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BA SE Biotechnol. Agron. Soc. Environ. 2012 16(3), 369-381 Le Point sur : Les modèles de croissance en microbiologie prévisionnelle pour la maitrise de la sécurité des aliments (synthèse bibliographique) Laurent Delhalle, Georges Daube, Ysabelle Adolphe, Sébastien Crevecoeur, Antoine Clinquart Univ. Liège. Département des Sciences des Denrées alimentaires. B43bis Sart-Tilman. B-4000 Liège (Belgique). E-mail : [email protected] Reçu le 22 février 2011, accepté le 3 juillet 2012. La microbiologie prévisionnelle a pour but de prédire l’évolution des micro-organismes dans les aliments par des modèles mathématiques. De nombreux modèles ont été publiés et la complexité de certains d’entre eux rend leur utilisation difficile aux non-initiés. Cependant, l’utilisation de cette discipline est amenée à se généraliser dans les années à venir. Ces modèles fournissent, par exemple, des outils supplémentaires pour assurer la sécurité microbiologique des aliments, établir les flux de contamination dans une chaine alimentaire, développer et assister les systèmes d’assurance qualité. Le développement de nouveaux logiciels informatiques et de bases de données permettra aux acteurs impliqués dans la chaine alimentaire d’avoir un meilleur contrôle des dangers microbiologiques. Le but de cette synthèse est de donner une vue d’ensemble des modèles de microbiologie prévisionnelle et de leurs applications. Une première approche des modèles primaires, secondaires et tertiaires est donnée. La modélisation de la latence, les modèles intégrés et les tests de croissance sont également abordés. Mots-clés. Modèle, croissance, innocuité des produits alimentaires, mesure phytosanitaire, chaine alimentaire, assurance qualité, produit alimentaire, micro-organisme, Listeria monocytogenes, Clostridium botulinum. A review of growth models in predictive microbiology to ensure food safety. Predictive microbiology aims to predict the evolution of microorganisms in foods using mathematical models. Several models have been published and the complexity of some of them makes their use difficult for the uninitiated. However, the use of this discipline will become widespread in coming years. These models provide, for example, additional tools to ensure the microbiological safety of food, to establish the contamination flow in a food chain, and to develop and assist existing quality assurance systems. The development of new computer software and database will enable stakeholders in the food chain to have better control of microbiological hazards. The aim of this review is to give an overview of existing models of predictive microbiology and their applications. A first approach of the primary, secondary and tertiary models is given. The modeling of latency, integrated models and growth tests are also discussed. Keywords. Models, growth, food safety, phytosanitary measures, food chains, food safety, quality assurance, foods, microorganisms, Listeria monocytogenes, Clostridium botulinum. 1. INTRODUCTION En 2008, 5 332 foyers de toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) ont été rapportés dans l’Union européenne (UE), causant 45 622 cas cliniques, 6 230 hospitalisations et 32 décès (European Food Safety Authority, 2010). Depuis une vingtaine d’années, la sécurité des denrées alimentaires doit être gérée dans un contexte international de libre échange et de mondialisation. En 1994, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a conclu un accord pour l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (sanitary and phytosanitary measures, SPS measures) dont les objectifs sont d’éviter les entraves au commerce international et d’instituer des règles selon lesquelles un pays peut refuser de commercialiser un produit sur son territoire s’il présente un risque pour la population. La justification du refus de commercialisation d’une denrée alimentaire doit se fonder sur une analyse de risque basée sur des normes internationales reconnues par l’OMC. En 2000, l’UE a édité le Livre Blanc sur la sécurité alimentaire où les principes généraux de la politique européenne en matière de sécurité alimentaire sont exposés. Dans ce texte fondateur, on insiste sur le

Les modèles de croissance en microbiologie … · Les modèles de croissance en microbiologie prévisionnelle ... de contamination dans une chaine alimentaire ... température au

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BASE Biotechnol. Agron. Soc. Environ.201216(3),369-381 Le Point sur :

Lesmodèlesdecroissanceenmicrobiologieprévisionnellepourlamaitrisedelasécuritédesaliments(synthèsebibliographique)LaurentDelhalle,GeorgesDaube,YsabelleAdolphe,SébastienCrevecoeur,AntoineClinquartUniv.Liège.DépartementdesSciencesdesDenréesalimentaires.B43bisSart-Tilman.B-4000Liège(Belgique).E-mail:[email protected]

Reçule22février2011,acceptéle3juillet2012.

Lamicrobiologieprévisionnelleapourbutdeprédirel’évolutiondesmicro-organismesdanslesalimentspardesmodèlesmathématiques.Denombreuxmodèlesontétépubliésetlacomplexitédecertainsd’entreeuxrendleurutilisationdifficileauxnon-initiés.Cependant,l’utilisationdecettedisciplineestamenéeàsegénéraliserdanslesannéesàvenir.Cesmodèlesfournissent,parexemple,desoutilssupplémentairespourassurer lasécuritémicrobiologiquedesaliments,établir lesfluxdecontaminationdansunechainealimentaire,développeretassisterlessystèmesd’assurancequalité.Ledéveloppementdenouveauxlogicielsinformatiquesetdebasesdedonnéespermettraauxacteursimpliquésdanslachainealimentaired’avoirunmeilleurcontrôledesdangersmicrobiologiques.Lebutdecettesynthèseestdedonnerunevued’ensembledesmodèlesdemicrobiologieprévisionnelleetdeleursapplications.Unepremièreapprochedesmodèlesprimaires,secondairesettertiairesestdonnée.Lamodélisationdelalatence,lesmodèlesintégrésetlestestsdecroissancesontégalementabordés.Mots-clés.Modèle, croissance, innocuité des produits alimentaires, mesure phytosanitaire, chaine alimentaire, assurancequalité,produitalimentaire,micro-organisme,Listeria monocytogenes,Clostridium botulinum.

A review of growth models in predictive microbiology to ensure food safety. Predictivemicrobiologyaimstopredicttheevolutionofmicroorganismsinfoodsusingmathematicalmodels.Severalmodelshavebeenpublishedandthecomplexityofsomeofthemmakestheirusedifficultfortheuninitiated.However,theuseofthisdisciplinewillbecomewidespreadincomingyears.Thesemodelsprovide,forexample,additionaltoolstoensurethemicrobiologicalsafetyoffood,toestablishthecontaminationflowinafoodchain,andtodevelopandassistexistingqualityassurancesystems.Thedevelopmentofnewcomputersoftwareanddatabasewillenablestakeholdersinthefoodchaintohavebettercontrolofmicrobiologicalhazards.Theaimofthisreviewistogiveanoverviewofexistingmodelsofpredictivemicrobiologyandtheirapplications.Afirstapproachoftheprimary,secondaryandtertiarymodelsisgiven.Themodelingoflatency,integratedmodelsandgrowthtestsarealsodiscussed.Keywords. Models, growth, food safety, phytosanitary measures, food chains, food safety, quality assurance, foods,microorganisms,Listeria monocytogenes,Clostridium botulinum.

1. INTRODUCTION

En2008, 5332foyers de toxi-infections alimentairescollectives (TIAC) ont été rapportés dans l’Unioneuropéenne (UE), causant 45622cas cliniques,6230hospitalisations et 32décès (European FoodSafetyAuthority,2010).

Depuis une vingtaine d’années, la sécurité desdenréesalimentairesdoitêtregéréedansuncontexteinternational de libre échange et de mondialisation.En 1994, l’Organisation Mondiale du Commerce(OMC) a conclu un accord pour l’application desmesures sanitaires et phytosanitaires (sanitary and

phytosanitary measures, SPS measures) dont lesobjectifs sont d’éviter les entraves au commerceinternationaletd’instituerdes règles selon lesquellesunpayspeutrefuserdecommercialiserunproduitsursonterritoires’ilprésenteunrisquepourlapopulation.La justification du refus de commercialisation d’unedenrée alimentaire doit se fonder sur une analyse derisquebaséesurdesnormesinternationalesreconnuesparl’OMC.

En2000,l’UEaéditéleLivreBlancsurlasécuritéalimentaire où les principes générauxde la politiqueeuropéenne en matière de sécurité alimentaire sontexposés. Dans ce texte fondateur, on insiste sur le

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respectdesaccordsinternationaux.Depuislors,l’UEa remplacésonancienne législationparunensemblede nouveaux règlements communément appelés «lepaquethygiène».Lesdifférentes règlementationsdupaquet hygiène découlent toutes du règlement (CE)N°178/2002 établissant les principes généraux et lesprescriptions générales de la législation alimentaire,appelée «General Food Law » (EU, 2002; EU,2004a; EU, 2004b; EU, 2004c; EU, 2004d; EU,2005).L’UEdécidequeleniveauélevédeprotectionde la santé, qui est la base de l’élaboration de lalégislation alimentaire, soit appliqué de manièrenon discriminatoire aux échanges tant nationauxqu’internationauxdesdenréesalimentaires.

De même, le règlement (CE) N°2073/2005concernant les critères microbiologiques applicablesaux denrées alimentaires recommande des révisionsdes critères microbiologiques en tenant compte del’évolution des connaissances dans les domaines dela santé publique et de lamicrobiologie des denréesalimentaires. Cette évolution comprend les progrèsscientifiques, technologiques et méthodologiques,l’évolution des niveaux de prévalence et decontamination, l’évolution de la population deconsommateurs vulnérables ainsi que les résultatséventuelsd’analysesderisque.

L’article3 du règlement (CE) N°2073/2005précise que «les exploitants du secteur alimentaireresponsables de la fabrication du produit conduisentdesétudesafind’examinersilescritèressontrespectéspendanttouteladuréedeconservation.Cettedispositions’appliquenotammentauxdenréesalimentairesprêtesà être consommées permettant le développement deListeria monocytogenes et susceptibles de présenterun risque pour la santé publique lié à Listeria monocytogenes ». Dans l’annexeII de ce règlement,les outils d’aide à l’évaluation de la durée de viemicrobiologiqued’unproduitalimentairesontcités:ladéterminationdescaractéristiquesphysico-chimiquesdu produit alimentaire, le test de vieillissement, letestdecroissance(challenge test)etlamicrobiologieprévisionnelle.

L’utilisation de la microbiologie prévisionnellepeutconcerner(Bruletal.,2007):– les plans HACCP (Hazard Analysis - Critical Control Point,appeléségalementenfrançaisAnalyse desDangers -PointsCritiquespour leurMaitrise) (qui comprend différentes étapes: analyse préliminaire des dangers, identification et établissement des points critiques, surveillance, actionscorrectives,vérification);– l’Appréciation Quantitative de Risque (AQR) (estimation de l’évolution du nombre de micro- organismes dans une chaine de production, évaluationdel’expositionàunebactériepathogène, conséquencesdecetteexposition);

– la détermination de la durée de vie d’un aliment, laprédictiondelacroissancedemicro-organismes pathogènes ou d’altérations sur un aliment déterminé;– le développement d’un nouveau produit ou d’un nouveau procédé (par exemple, l’évaluation d’une nouvelletechnologiedeproduction);– la mise au point d’une nouvelle formulation d’un produitsurl’évolutiondesmicro-organismes);– laformationdupersonnel(formationdespersonnes directement responsables de la qualité micro- biologiqueduproduit);– la planification d’expériences (définition des intervallesentrechaqueéchantillonnageetnombre d’échantillonsàprélever).

La première application concrète dans l’industrieagro-alimentaire est le modèle log-linéaire dedestruction thermique (Bigelow, 1921 ; Esty et al.,1922). Ce modèle est cependant une simplificationde phénomènes complexes et ne tient pas comptede certaines particularités des micro-organismes.Malgrécette faiblesse,cemodèle resteencoreutiliséaujourd’hui.Un exempled’applicationde cemodèleestlaprédictionducoupletemps/températureadéquatpourladestructiondessporesdeClostridium botulinumdanslesboitesdeconserve.

En 1937, Scott envisage pour la première foisle potentiel de l’utilisation de la microbiologieprédictive pour déterminer la croissance de bactériespathogènes sur une carcasse durant sa manipulationet sa réfrigération (Scott,1937). Ila falluattendre lagénéralisation de l’électronique et de l’informatiquedans les années 1960-1970 pour que cette disciplinedisposed’outilsperformantsdesuividucoupletemps/température au cours du processus de fabrication etde distribution des denrées alimentaires. Mais c’estsurtout aucoursdecesvingtdernières annéesqu’unprogrès considérable en modélisation a permis desavancées spectaculairesavec l’apparitiondemodèlesplusprécisetflexiblesentenantcomptedesconditionsenvironnementales.

Cette synthèse propose un aperçu de plusieursmodèles de microbiologie prévisionnelle. Le but,in fine,estdedonneraulecteurunevisionglobalesurlamanièreparlaquellelamicrobiologieprévisionnellepeutcontribueràunemeilleuremaitrisedelaqualitésanitairedesaliments.

2. PRINCIPES DE BASE

La microbiologie prévisionnelle est basée surl’hypothèse que les réponses de populations demicro-organismesàdesconditionsenvironnementalesidentiques sont reproductibles. Par conséquent, il est

Lamicrobiologieprévisionnelleappliquéeauxaliments 371

possible, à partir d’observations disponibles sur lacroissance,lasurvieoul’inactivationdesbactériesenfonctiondefacteursenvironnementaux,deprédirelesréponses desmêmesmicro-organismes sous d’autresconditions, en suivant les facteurs environnementauxplutôt qu’en réalisant des analyses microbiologiqueslourdesetcouteuses.

Si les conditions sont favorables à la croissance,l’évolutiondelapopulationmicrobiennesuittoujoursle même profil. La figure 1 décrit la courbe decroissanced’uneculturebactérienneetsesdifférentesphases:1.la phase de latence (λ): cette phase correspond à l’adaptation de l’inoculum (N0) à son nouvel environnement.Durant cettepériode, la vitessede croissanceestnulle(μ=0),2.laphased’accélération:lesbactériescommencentà se multiplier pour atteindre progressivement la vitessemaximumdecroissance(μmax)(0<μ<μmax),3.laphaseexponentielle:lavitessedecroissancedes bactériesestmaximum(μ=μmax),4.la phase de décélération: la vitesse de croissance devientprogressivementnulle(μmax >μ >0),5.la phase stationnaire : la vitesse de croissance est nulle(μ =0)etlacultureatteintsadensitémaximale (N = Nmax) avec, parfois, une phase ultérieure de décroissancedelapopulation.

Desmodèlesprimaires,secondairesettertiairessontutilisés pour modéliser le comportement des micro-organismes. Le modèle primaire vise à reproduirel’évolution de la concentration en micro-organismesaucoursdutempsdansunenvironnementdonné.Lesmodèlessecondairespermettentdedécrirel’influencedes facteurs environnementaux sur les paramètresprimaires.Lesmodèlestertiairesutilisentdessystèmesexperts et des bases de données afin d’établir des

relations entre les modèles primaires et secondaires(Whitingetal.,1993).

On distingue deux types d’approche enmodélisation: l’empirique et le mécaniste. Lesmodèles empiriques ont pour unique but lemeilleurajustement possible aux données observées sansexpliquer les phénomènes provoquant la réponseobservée.Lemeilleurexempled’unmodèleempiriquesecondaireestlemodèlepolynomialdontlescapacitésd’ajustement sur un jeudedonnées sont excellentes,maisdontl’équationgénéréen’aaucunesignificationbiologique (Luning et al., 2007). A contrario, lesmodèlesmécanistessontdéveloppésàpartirdethéoriesoud’hypothèsesetpermettentd’expliquer la réponseà modéliser par l’action de phénomènes physiques,biologiques et/ou chimiques (Ross et al., 2003a).Enmicrobiologie prévisionnelle, la grande majorité desmodèlesnesontpaspurementempiriquesoupurementmécanistes, mais peuvent être considérés commesemi-mécanistescarlesmécanismesdecroissanceoud’inactivationgouvernantlecomportementdesmicro-organismesnesontpasencoretouscomprisetintégrésdanslesmodèlesactuels.Larelationmathématiqueestempirique,mais les composantes de la formule sontdesparamètresayantunesignificationbiologique(Brulet al.,2007).Danslefutur,ledéveloppementdemodèlesmécanistescomplexesdépendraessentiellementdelacompréhension du comportement physiologique auniveaucellulaire.

3. LES MODÈLES PRIMAIRES

Les modèles primaires décrivent la croissanced’un micro-organisme bien défini dans un contexteenvironnementaldonné.On lesdistingueenmodèlesdéterministesoustochastiques.Laplupartdesmodèlesutilisés actuellement sont desmodèles déterministes.Danscesmodèles, l’évolutiondunombredecellulesd’unepopulationmicrobiennepeutêtredécriteparunensembledeparamètres,àsavoirN0,λ,μmax,Nmax.Maiscertains modèles tentent également de connecter lecomportementdescellulesindividuellesàceluidetoutelapopulation.Ceciconduitauxmodèlesstochastiquesou probabilistes dans lesquels les paramètres dumodèle sont des variables de distributions aléatoiresreprésentant l’ensemblede lapopulationbactérienne.Celasignifiequelesparamètresdumodèlefontpartied’une distribution aléatoire pouvant représenter lavariabilité biologique entre les cellules individuellesd’une même population. Au moyen de modèlesstochastiques appropriés, l’information acquise surla distribution du comportement des cellules, parexemple, via les mesures de Bioscreen, peut êtreutilisée pour améliorer les prédictions du temps delatencede la population (Augustin et al., 2000).Ces

Temps (h)λ

μmax

1 2 3 4 5

Nmax

N0

Con

cent

ratio

n (lo

g N

)

Figure 1. Courbe de croissance d’une culture bactérienneavec ses différentes phases—Growth curve of bacterial culture with its different phases.

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modèlesstochastiquessonttrèsutileslorsquelataillede l’inoculumest faibleet ladifférencedu tempsdelatenceentrelescellulesindividuellesesttrèsvariableau sein de cette petite population (Guillier et al.,2005).Lacompréhensiondelavariabilitédecertainsparamètres à l’échelle de cellules individuelles seracertainement la prochaine étape en microbiologieprévisionnelle.

Lepremiermodèleprimairedecroissancequi aitétédécritenmicrobiologieprévisionnelleestlemodèleexponentiel(Buchanan,1918).Cemodèletrèssimpledécritlaphaseexponentielle,maisnetientpascomptede la phase de latence ni de la phase stationnaire.Néanmoins, il peut être utilisé enpremière approchepourréaliseruneestimationdel’évolutiondunombrede bactéries suivant un scénario pessimiste, puisquel’on considère que toutes les bactéries peuvent semultiplieràunevitessemaximale.Unealternativeaumodèleexponentielestl’utilisationdumodèlelinéaireà trois phases proposé par Buchanan et al. (1997)correspondantaumodèleexponentielavecdémarrageetfreinagebrusqueoùN(t)correspondantaunombredecellulesautempst :

ln[N(t)]=ln(N0)sit≤λ =ln(N0)+µ(t-λ)sit>λ(Éq.1) =ln(Nmax) siN(t)≥Nmax

Cependant, ce modèle ne permet pas un bonajustementsurdesdonnéesobtenuesexpérimentalement(Baranyi,1997).Lesmodèlesnonlinéaires,baséssurdes fonctionssigmoïdescomme lemodèle logistiqueou de Gompertz, permettent un meilleur ajustement(Lôpezetal.,2004).

Lemodèle logistique avecdélai et rupture est undes plus utilisé actuellement (Rosso et al., 1995). Ilsupposequ’iln’yapasdepossibilitédecroissancelorsdelaphasedelatenceetqu’iln’yapasdetransitionentrelaphasedelatenceetlaphaseexponentielle:

ln[N(t)]={ln(N0) sit≤λ

ln(Nmax)-ln[1+(Nmax-1)e[-µ(t-λ)]]sit>λ

N0(Éq.2)

Cemodèleal’avantagedepouvoirêtreutiliséassezsimplement.UnmodèledecroissanceaétéproposéparBaranyietal.(1993).Ilestégalementundesplusutiliséactuellement. Ce modèle est basé sur une équationdifférentielle (phase exponentielle) et complété pardeux fonctions d’ajustement. La première fonctiond’ajustementdécritlaphasedetransitionentrelaphasedelatenceet laphaseexponentielle.Ceprocessusdetransitionestdéterminéparunparamètreadditionnelreprésentant l’état physiologique des bactéries et est

caractérisé par une augmentation graduelle d’unevaleur comprise entre 0 et 1. La seconde fonctiond’ajustement permet de décrire la phase d’inhibitionentre la phase exponentielle et la phase stationnaire.Elle est basée sur le principe d’une diminutionprogressivedesnutriments.Pourdesraisonspratiquesd’ajustementdemodèle,lafonctiond’inhibitionaétécréée sur base de la concentrationmaximale et d’unparamètre de courbure. Ce dernier est également lafonctiondefreinagedumodèlelogistique.Lemodèlede Baranyi fut réécrit en un modèle utilisant desvariablesexplicites(Baranyietal.,1994):

ln[N(t)]=ln(N0)+µA(t)-ln[1+e[µA(t)]-1](Éq.3) e(Nmax-N0)

oùA(t)=t+ln(e(-µt)+e(-µlag)-e(-µt-µlag)).

µ

LemodèleBaranyiesttrèsutilisécarildonnedesrésultatssatisfaisantslorsd’ajustementdemodèlessurdes données de laboratoire. Le succès de cemodèlepeut être expliqué en partie par lamise au point deDMFit, un logiciel gratuit d’ajustement basé sur lemodèleprimairedeBaranyidisponiblesurhttp://www.combase.cc/toolbox.html.

Lafigure 2présentelemodèleprimairedeBaranyiajusté à l’aide du logiciel DMFit sur des donnéesobtenues lors d’un test de croissance concernantListeria monocytogenes dans de la viande hachée deporc irradiéeetconditionnéesousfilmétirableàunetempératurede10°C(Delhalleetal.,2009).

Le coefficient dedétermination (R2) a été calculéà partir des points obtenus par le modèle primaireauxmêmes temps que les points expérimentaux. Lacomparaisondel’ajustementdemodèlesprimairessur

Données expérimentalesModèle primaire ajusté(R2 = 0,99)

0 50 100 150 200 250

Log

UFC

. g-1

9

87

6

5

4

3

2

1

0

Temps (h)

Figure 2.Ajustement d’un modèle primaire aux donnéesobtenueslorsd’untestdecroissance— Fitting of a primary model with data obtained during a challenge test.

Lamicrobiologieprévisionnelleappliquéeauxaliments 373

desdonnéesde laboratoire a fait l’objet deplusieursétudes(Baranyi,1997;Buchananetal.,1997;Lôpezetal.,2004;Paletal.,2008).Actuellement,iln’estpaspossibledesélectionnerunmodèleenparticulierpourreprésenterdemanièrelaplusappropriéelacroissancebactérienne. Les modèles les plus simples peuventsouvent être suffisants pour représenter correctementlesparamètresfondamentauxdecroissance.Miconnetetal. (2005)proposentuneréflexionsur l’incertitudedes paramètres de croissance obtenus à partir dedonnéescollectéeslorsdetestsdecroissance.

4. LES AUTRES MODÈLES PRIMAIRES

La plupart desmodèles actuels s’intéressent unique-mentaucomportementd’unepopulationbactérienne,mais d’autres modèles décrivent le comportementde cellules individuelles. Ces derniers se basent surdifférents principes comme la consommation d’unesubstancevitalepour lacroissancede lacelluledansson nouvel environnement (Baranyi et al., 1994),l’augmentation de la biomasse (Hills et al., 1994),l’apparition de molécules précédant la division(Buchanan et al., 1997) ou l’hétérogénéité entreles cellules composant une population en phase delatence (McKellar, 1997). L’idée est de représenterle comportement à un niveaumicroscopique (celluleindividuelle) pour in fine simuler le comportement àun niveau macroscopique (population). Pour obtenirle comportement de cellules individuelles, il fautsimulerlesdifférencesentrelescellulesenutilisantdesvariablesaléatoires représentéespardesdistributionsstatistiques. L’hypothèse de départ est que chaquecellule interagit avec son environnement demanièreindépendante.Ledéveloppementdemodèlesdécrivantlecomportementdecellulesindividuellesresteencoreau stade de recherche.De plus, ce genre d’approchenécessiteunmatérieldemesurespécifique.

5. LES MODÈLES SECONDAIRES

5.1. Les modèles secondaires pour la vitesse de croissance

La croissance est gouvernée par les conditionsde stockage (facteurs extrinsèques) et par lescaractéristiques propres au produit (facteursintrinsèques). Ces deux types de facteurs sont reprissous le terme général de facteurs environnementaux.Danslesaliments,lesfacteursenvironnementauxsontsouventcomplexesetdynamiquescarilsdoiventinclurel’effet combiné de facteurs extrinsèques comme latempérature,lacompositionengazdel’atmosphèredeconditionnementetlesfacteursintrinsèquescommele

pH,l’activitédel’eau,laprésencenaturelledecertainsacideset les interactionsentre lesgroupesdemicro-organismes. Les modèles secondaires permettent dedécrirel’effetdesconditionsenvironnementalessurlesparamètresdumodèleprimaire(Whitingetal.,1993).

Dans la plupart des situations, la température estle facteur environnemental qui aura le plus d’impactsur la croissance des micro-organismes dans lesaliments. Durant les étapes de transformation, destockageetdedistribution,latempératuredesalimentspeut varier considérablement et inclure des périodesd’abus de température (Likar et al., 2006). Le suivides températures à différentes étapes de la chainealimentaire permet d’introduire ces données dans unmodèle secondaire intégrant l’effetde la températureaucoursdutemps,afindeprédirelesconséquencesentermesdecroissance.

Pour être applicable, un modèle secondaire doitidéalementrencontrerunesériedecritères(Rossetal.,2000):– lacollectedesparamètresnécessairespourlemodèle doitêtreréalisable,– les paramètres à inclure doivent avoir une significationconcrète,– lespropriétésdesfonctionsmathématiquesdoivent refléterlesphénomènesbiologiques,– le modèle doit permettre des extensions ou des améliorations,– lemodèle ne doit pas contenir plus de paramètres quenécessaire,– la gamme d’utilisation du modèle doit être suffisante.

Ces deux derniers points concernent surtoutles modèles polynomiaux, car ils comportent ungrand nombre de paramètres et manquent donc deparcimonie (Corroler, 2006). Même si l’éliminationdes coefficients non significatifs permet d’obtenir unmodèle plus parcimonieux, les différents coefficientssontdifficilement interprétables.Deplus, ledomained’utilisation de ces modèles est plus restreint quel’espacemultidimensionnel défini par les bornes desgammes étudiées des différents facteurs (Baranyiet al.,1996;LeMarcetal.,2005).Sicesmodèlessontutilisésendehorsdelaplaged’interpolation,alorsilspeuventconduireàdesestimationsaberrantes.

Les modèles secondaires se composent le plussouvent de variables déterministes car elles sontsimplesàcollecter.Ilestégalementpossibled’intégrerdelavariabilitéoudel’incertitudepourlesparamètrescomposantunmodèle.Decettemanière,lesvariablessontreprésentéesdansunedistributionstatistique.

Les modèles secondaires ont déjà fait l’objet detravaux de synthèse (Ross et al., 2003a). La sectionsuivantetraitedugammaconceptetdonneunaperçudesmodèlessecondairesdecroissanceetdutempsde

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latence actuellement disponibles avecunediscussionsurleursutilisationspratiques.

Le gamma concept. Legammaconceptaétéintroduitpar Zwietering et al. (1992) et s’appuie sur deuxprincipes:1.tous les facteurs mesurables, ayant une influence sur le tauxdecroissance (µ), sont indépendantset interviennentdefaçonmultiplicative:

µ = f(température) x f(aw) x f(pH) x f(autres1) xf(autres2)x...x(autresn) (Éq.4)

2.l’effetdechaquefacteursurlavitessedecroissance peut être représenté par une fraction du taux de croissancemaximum:

γ=μcomprisentre0et1(Éq.5) μopt

oùgreprésenteunefonctionprenantencompteleoulesfacteursayantuneinfluencesurμopt, lavitessedecroissanceoptimale.

Danslesconditionsoptimalesdecroissance,chaquemicro-organismeaunevitessedecroissanceoptimalereproductible. Sous des conditions défavorablesde croissance, la vitesse de croissance diminue demanièreprévisibleetpeutêtrecalculéeàpartirde lavitesse de croissance optimale comme indiqué dansl’équationn°7.L’inhibitiondelacroissance,produiteparchaquefacteur,àdesconditionssous-optimales,estreprésentéeparlefacteurdecroissance«gamma»(g).

Modèles de type racine carrée. Unmodèlepurementempiriqueaétéproposéafindemodéliserl’effetdelatempératuresurletauxdecroissance(Ratkowskyetal.,1983).Lestauxdecroissanceontététransformésparuneracinecarréeafindestabiliserleursvariances.Cetypedemodèleainsiquetouslesmodèlesendécoulantserontappelésdesmodèlesdetype«racinecarrée».

√µ=b(T-Tmin) (Éq.6)

oùbestunparamètreconstantdumodèleobtenuparrégression, T est la température en °C et Tmin est latempératureminimumdecroissancequidoitêtrede5à10°Cinférieureparrapportàlatempératureobservée(McKellar et al., 2004). Lemodèle de type «racinecarrée» continue à être développé pour obtenir desextensionsdumodèle(Wijtzesetal.,2001):

μ=b(T-Tmin)2(aw-awmin)(pH-pHmin)(pH-pHmax)(Éq.7)

oùlesparamètresb,T,Tminontétédéfinisprécédemment,pHetaw sontrespectivementlepHetl’activitédel’eaudumilieu,pHminetawminsontlepHetl’activitédel’eauminimaux de croissance pour le micro-organisme.D’autres extensions du modèle ont été suggéréesincluantlaconcentration,lesinteractionsentrelepHetlaconcentrationenacidelactique(Rossetal.,2003b).

Les modèles de type racine carrée peuventégalement être utilisés dans le gamma concept. Lavitessede croissanceoptimale (μopt) est lavitesseoùtouteslesconditionsenvironnementalessontoptimalestellesquelatempérature(Topt),lepH(pHopt),l’activitéde l’eau (awopt), etc. L’effet combiné de plusieursfacteurs environnementaux est alors déterminé parmultiplication de leurs facteurs gamma respectifs(Zwieteringetal.,1996):

µmax=µoptγ(T)γ(pH)γ(aw) (Éq.8)

γ(T)=[T -Tmin ]2

(Éq.9)

Topt-Tmin

γ(pH)=(pH -pHmin)(pHmax -pH)

(Éq.10) (pHopt-pHmin)(pHmax -pHopt)

γ(aw)=aw-awmin (Éq.11)

1-awmin

Suivantlesprincipesexpliquésci-dessus,unseultestdecroissanceavecuneespècebactériennepathogèneenconditionoptimalesurunproduitparticuliersuffiraitàdéterminersonμoptet,parconséquent,d’appliquerlemodèlesousdifférentesconditionssous-optimales.

Pour les bactéries d’altération présentes dans lesdenrées alimentaires stockées à faible température,les paramètres tels queTopt,awopt ouμopt sont souventinconnus. Dans ces conditions, il est préférabled’utiliserdesmodèlesplussimplesn’incluantpaslesvaleursoptimalesdecroissance(Gimenezetal.,2004).

Modèle cardinal. Les modèles cardinaux sont desmodèlesempiriquesdeplusenplusutilisés(LeMarcetal.,2002;VanDerlindenetal.,2008).Unparamètrecardinalaunesignificationbiologique.Cemodèleestbasésurlemêmeprinciped’utilisationquelemodèlegamma, à savoir que l’influence de chaque effetenvironnemental peut être intégré dans une fonctionpardesfacteursmultiplicatifs:

µmax=µoptCMn(X) (Éq.12)

Lamicrobiologieprévisionnelleappliquéeauxaliments 375

oùCM est l’acronyme demodèle cardinal,X est unfacteur environnemental,Xmin est la valeur cardinaleminimale de croissance, Xopt est la valeur cardinaleoptimale de croissance pour laquelle μmax atteintsa valeur optimale μopt, Xmax est la valeur cardinalemaximaledecroissanceetnestunparamètredeforme.

Leséquations14et15montrentlemodèlecardinalincluantl’effetdelatempérature,dupH,del’activitédel’eau,desubstancesinhibitrices(ci)etdesfacteursqualitatifs (kj) sur la vitesse de croissance optimale(Rossoetal.,1995):

n p

µmax=µoptCM2(T)CM1(pH)CM2(aw)Πγ(ci)Πkj i=1

j=1

(Éq.14)

γ(ci)={(1-ci/MICi)2,ci<MICi

0,ci≥MICi(Éq.15)

oùMICi est la concentrationminimale inhibitrice ducomposé au-delà de laquelle aucune croissance n’estpossible, touteslesautresvariablesayantétédéfiniesprécédemment. Les facteurs qualitatifs concernentl’effetdefloresdecompétitionoul’effetdelamatricealimentaire(Augustinetal.,2000).

L’avantage du modèle cardinal est qu’il permetde représenter l’ensemble de la gamme de valeurs

du paramètre X représenté dans la figure 3 pour latempérature et le pH. Les valeurs utilisées dans lesreprésentationsdumodèlecardinalpourlatempératureetlepHdelafigure 3proviennentdel’étuded’Ellouzeetal.(2010).

Le modèle cardinal peut également tenir compted’unphénomènebi-phasiquedanslamodélisationdelavitessedecroissanceenfonctiondelatempérature(Le Marc et al., 2002). Les modèles cardinaux sontdeplus enplusutilisés car ils sont simples avecdesparamètresfacilementinterprétablesetmesurables,etleshypothèsessous-jacentesàcetypedemodèlepeuvents’appliquer dans une large variété d’environnementsdifférents.Cependant,ilestimportantdetenircomptedes interactions possibles entre facteurs (Le Marcet al.,2002).

Les modèles polynomiaux.Lesmodèlespolynomiaux,aussiappeléslesmodèles«bulldozers»(Luningetal.,2007), permettent de décrire la vitesse de croissanced’une bactérie en fonction de plusieurs facteursenvironnementaux (Delignette-Muller et al., 1995).Cesmodèlessontencore largementutiliséspour leurfacilitédemiseenœuvre.Unmodèleincluantplusdedeuxfacteurss’écrit:

µ=ax+by+cz+dx2+efy2+...+fzn(Éq.16)

-10 0 10 20 30 40 50 3 4 5 6 7 8 9 10 11Température (°C) pH

Vite

sse

de

croi

ssan

ce (l

og U

FC. h

-1)

Vite

sse

de

croi

ssan

ce (l

og U

FC. h

-1)

1,0

0,9

0,8

0,7

0,6

0,5

0,4

0,3

0,2

0,1

0,0

1,0

0,9

0,8

0,7

0,6

0,5

0,4

0,3

0,2

0,1

0,0

Figure 3.SimulationdelavitessedecroissanceenfonctiondelatempératureetdupHparlemodèlecardinalétablipourListeria monocytogenes—Simulation of the growth rate in function of temperature and pH by the cardinal model established for Listeriamonocytogenes.

CMn(X)={0, X≤Xmin (X -Xmax)(X -Xmin)

n (Éq.13) (Xopt -Xmin)

n-1[(Xopt -Xmin)(X -Xopt)-(Xopt -Xmax)((n -1)Xopt +Xmin -nX)]Xmin <X <Xmax

0, X≥Xmax

376 Biotechnol. Agron. Soc. Environ. 201216(3),369-381 DelhalleL.,DaubeG.&AdolpheY.

oùx,y,…zreprésententlesfacteursenvironnementaux.Les modèles polynomiaux donnent des prévisionsacceptables uniquement dans le domaine où ils ontété établis. Les paramètres a, b, c… n’ont aucunesignification biologique ou concrète, ils permettentjusteaumodèledes’ajusteraumieuxaujeudedonnées.

5.2. Modèle secondaire pour le temps de latence

Plusieursdéfinitionsontétéproposéespour le tempsde latence (Swinnen et al., 2004). Parmi celles-ci, on peut définir le temps de latence de cellulesindividuellescommeétantletempsentrel’inoculationd’unecelluleetlemomentdesadivision(Pirt,1975).Au niveau d’une population, le temps de latenceapparent est défini comme le temps nécessaire pourlamultiplicationpardeuxdelapopulation(Buchananetal.,1972).Buchananetal.(1990)ontdéfiniletempsdelatenceencalculantladérivéesecondedumodèleprimairedeGompertz, letempsauquell’accélérationde la croissance est maximale correspond au tempsdelatence.Ladéfinitioncommunémentadmiseestletempscorrespondantàl’intersectionentrelatangenteaupointd’inflexiondelaphaseexponentielledelacourbedecroissanceetl’horizontalepassantparl’ordonnéeàl’originede lacourbedecroissance (Figure 1) (Bruletal.,2007).

Letempsdelatencenedépendpasuniquementdel’environnementactuel,maisaussidel’environnementprécédent et de l’état physiologique des bactéries.Decefait, ledéveloppementdemodèlessecondairespourprédireletempsdelatenceestcompliqué.Deuxapprochesontétéadoptéespourmodéliserletempsdelatence:lapremièreconsidèrequeletempsdelatenceet la vitesse de croissance doivent être modélisésséparément (Ratkowsky et al., 1982), la deuxièmeconsidèrequeletempsdelatenceestproportionnelautempsdegénérationdesbactériescarcelles-cidoiventréaliserunecertainequantitédetravailpours’adapterà leurnouvelenvironnement (Robinsonetal.,1998).Il existe donc dans cette dernière approche unecorrélationentreletempsdelatenceetl’inversedutauxdecroissance.Pourdesconditionsdepré-incubationsidentiques,onal’équationsuivante:

λ*µmax=k (Éq.17)

où k est une constante pour des conditions de pré-incubation données représentant une quantité detravail.Sil’onconnaitlavaleurk,alorsl’estimationdutempsdelatencepeutêtredéduitedeμmax.

Lorsqueletauxdecroissanceestoptimal,letempsdelatenceestminimal.Onaalors:

λmin*µopt =k (Éq.18)

En intégrant lavaleurdek de l’équation17dansl’équation18:

λ*µmax=λmin*µopt (Éq.19)

Dans une approche cardinale, on peut déduirel’équationsuivante(LeMarc,2001):

λ=λmin (Éq.20)

CM1(T)*CM2(pH)*CM2(aw)

Il apparait que le temps de latence est trèsvariable, tandisque la constantek est assez stable etreproductible.Cetteapprochepermetde simplifier lamodélisation du temps de latence et de la vitesse decroissanceparunmodèleuniquedecroissance.Ilestpossibled’attribuerunedistributionàlavaleurkdansune approche stochastique lorsque, par exemple, lavaleurkestinconnue.

6. LES MODÈLES TERTIAIRES

Les modèles utilisant des systèmes experts et desbasesdedonnéespourfaire le lienentre lesmodèlesprimaires et secondaires sont appelés modèlestertiaires.Unsystèmeexpertestunlogicielcapablederépondreàdesquestions,eneffectuantunerelationàpartirdefaits(basededonnées)etderèglesconnues(modèles primaires et secondaires). Les modèlestertiairessontdoncconstituésd’unebasededonnéespermettantdesélectionnerlamatricealimentaireetlesmicro-organismesd’intérêt.

À partir de données collectées pour un micro-organisme dans une matrice alimentaire déterminéedans des conditions environnementales connues(test de croissance), un modèle tertiaire permet deprédire l’évolution de ce micro-organisme dans desconditions environnementales différentes dans laplage d’interpolation pour laquelle les données sontdisponiblesdanslabasededonnées.Silemodèleestutiliséendehorsdelaplaged’interpolation,l’utilisateurdoitêtreconscientdel’incertitudesurlerésultat.

La figure 4 donne un exemple de modélisationde la croissance de Listeria monocytogenes dansde la viande hachée de porc conditionnée sousfilm étirable. Les données expérimentales ont étécollectéesàunetempératurefixéeà10°C.Àpartirdedonnées expérimentales complétées par des donnéesbibliographiques, le comportement de Listeria monocytogenes dans de la viande hachée de porcconditionnée sous film étirable peut être modélisé àunetempératurede5°C.

Àtitred’exempledemodèletertiaire,onpeutciterSym’Previus,PMPetSSSP.Ceslogicielscomprennentunebasededonnéesetdesmodèlesdecroissanceou

Lamicrobiologieprévisionnelleappliquéeauxaliments 377

d’inactivationdebactériespathogènesoud’altérationd’origine alimentaire et ne nécessitent pas d’intégrerdes résultats issus d’expériences de laboratoire.Cependant,mêmesiceslogicielspossèdentunebasededonnéesimportante,ilestpréférablederéaliseruntest de croissance en laboratoire afin de réaliser dessimulationssurbasededonnéesissuesdirectementdeladenréealimentaired’intérêt.

Le tableau 1 présente une synthèse des logicielsetdesbasesdedonnéesdisponiblessur internetpourréaliserdesétudesenmicrobiologieprévisionnelle.

7. LA VALIDATION

Une des étapes les plus importantes dans ledéveloppement et l’utilisation d’un modèle est des’assurerquecelui-ciestapplicableensituationréellepourdesdenréesalimentaires.Beaucoupdemodèlesont été développés sur base d’expérimentations enmilieux de culture et il est important de s’assurerde la transposition aux denrées alimentaires, ce quicorrespond à un environnement très différent (florebactérienne d’origine, structure de la matrice). Leprincipe est simple: il faut comparer les prédictionsdesmodèlesavecdes résultats indépendantsdeceuxquiontserviàétablirlemodèle(McKellaretal.,2004).

La validation peut se réaliser en deux étapes(teGiffeletal.,1999):– la validationmathématique, qui consiste à vérifier quelesécartsentrelesvaleursthéoriquesprévuespar lemodèleetlesdonnéesobtenuesdanslesconditions quiontserviàleconstruirenesontpasexcessifs,

– lavalidationdansdesproduits,quiconsisteàvérifier que les écarts entre les valeurs théoriquesprévues parlemodèleconstruitàpartirdesdonnéesobtenues en conditions expérimentales et les valeurs réelles obtenues sur des produits industriels contaminés naturellementnesontpasexcessifs.

Si lemodèleaétévalidé, ilpeutêtreutilisépourla prévision, à condition de se limiter, pour ce quiconcerne la variation des facteurs, à la gamme desvaleurscomprisesentrelesvaleursquiontfaitl’objetde la validation. Il faut éviter l’extrapolation ou êtreconscient des risques qu’on prend en la pratiquant(Baranyietal.,1996).

Idéalement, lavalidation sebase surdesdonnéesobtenues lors d’expériences de laboratoire réaliséesdans les mêmes conditions que pour l’obtention dumodèle. Cependant, l’obtention de telles donnéesest couteuse en temps et en énergie. L’utilisation dedonnées issues de la littérature permet également deréaliserlavalidationdesmodèles.L’utilisationdecesdonnées est basée sur l’hypothèseque les conditionsappliquées aux expériences issues de la littératurene diffèrent pas significativement des expériencesréaliséesdanslecadredudéveloppementdumodèle.Les conditions d’expérience doivent être idéalementidentiques tellesque lesconditionsdepré-incubationdelasouchebactérienneoùlacompositiondumilieune doit pas être composée de substances ayant uneinfluence importante sur la croissance de la bactériecomme un additif de conservation. Miconnet et al.(2005) proposent une réflexion sur l’incertitude desparamètresdecroissanceobtenusàpartirdedonnéescollectéeslorsdetestsdecroissance(challenge tests).

On reproche souvent à la microbiologieprévisionnelle un caractère pessimiste. En effet, onconsidèrequ’unmodèlen’estvalideques’ilnesous-estimepaslerisque.Maisleplussouvent,lesvaleursobservées sont très inférieures aux prévisions.Ainsi,lesduréesdeconservationpréditessonttrèsinférieuresauxduréesdeconservationréelles,cequiestpénalisantpourlesproducteursdedenréesalimentaires.

Les modèles qui ont été publiés ces dernièresannées,avecleursnombreusesqualités,nepermettentpastoujoursderefléterlesrésultatsrelevéslorsdelacroissanceoul’inactivationdesmicro-organismessurladenréealimentaire.Deplus,ilestmaintenantclairquedessouchesgénétiquementprochesnesecomportentpas de manières identiques (Beaufort et al., 2008).Parailleurs,auseind’unemêmepopulation,ilexistedes différences de comportement entre les différentsindividus (Guillier et al., 2005). Ces problèmespeuvent se révéler d’une importance capitale depuisque les industrielsexplorent lespossibilitésd’utiliserdesprocessusetdes techniquesde travailpermettantderéaliserunproduitaumeilleurcout,maiségalement

0 100 200 300Temps (h)

Log

UFC

. g-1

7

6

5

4

3

2

1

0

Modélisation

Données expérimentales à 10 °CAjustement d’un modèle primaireValeurs prédites à 5 °C

Figure 4. Évolution de la concentration en Listeria monocytogenes dans une viande hachée de porcconditionnéesousfilmétirablemesuréeà10°Cetpréditeà5°Cparunmodèletertiairedecroissance— Evolution of Listeriamonocytogenes concentration in ground pork meat packaged in stretch wrap measured at 10°C and predicted at 5°C by a tertiary growth model.

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Tableau 1. Listedesiteswebproposantdesoutilsinformatiquesutilesenmicrobiologieprévisionnelle—List of websites with helpful information-technology based tools for predictive microbiology.ComBase www.combase.cc

ComBaseestunebasededonnéessurlacroissance,lasurvieoul’inactivationdesmicro-organismesdans les aliments. Les données ont été obtenues à partir de la littérature ou fournies par le soutiendeplusieurs institutions.Laboite àoutilsdemodélisationau seindeComBasecomprendComBasePredictor,PerfringenspredictoretDMFit.ComBasePredictorcomprendunensembledemodèlesdecroissanceoud’inactivationpourdenombreuxmicro-organismespathogènesoud’altérationd’originealimentaireenfonctiondefacteursenvironnementaux,ycomprislatempérature,lepHetlaconcentrationdesel.PerfringensPredictorestuneapplicationpourprédirelaréponsedeClostridium perfringensdanslaviandeaucoursdu refroidissementoù la températuremaximalede cuissonest entre70et95 °C.DMFitestuneapplicationpermettantd’ajusterunmodèleprimairedecroissanceoud’inactivationsurdesdonnéesobtenueslorsd’expérimentationsafind’obtenirletempsdelatence,lavitessedecroissanceoudedécroissance,laconcentrationinitialeetmaximale

FSLP Fish Shelf Life Prediction Programhttp://ccm.ytally.com/fileadmin/user_upload/downloads/2_FSLP_Cold_Chain_2008_Alfaro_01.pdf.FSLPpermetlaprédictionetlavisualisationdel’acceptabilitésensorielleetdelacroissancedesbactériesaltérantessurdesproduitsdel’aquaculturesuivantdifférentesconditionsdestockage

Foodrisk.org www.foodrisk.orgLesiteproposedesinformationsrelativesàl’analysedesrisques,ycomprisdesdonnées,destutoriels,desoutilsetdesliens.Quelquesinformationssurlamicrobiologieprévisionnellesontégalementdisponibles.Lesites’intéresseprincipalementauxtravauxréalisésenAmériqueduNord

GInaFiT http://cit.kuleuven.be/biotec/downloads.phpGInafitestunoutilsimpled’utilisationàutiliseravecMicrosoftExcel.Ilpermetl’ajustementdeneufmodèlesdifférentsdesurviemicrobiennesurdesdonnéesexpérimentalesrelativesàl’évolutiondelapopulationmicrobienneaucoursdutemps

Opti-FormÒ Listeria control

http://www.purac.com/EN/Food/ingredients/Meat_poultry_and_fish/Preservation/Food-safety/Listeria.aspxCelogicielcommercialpréditl’effetdesacidesorganiques,latempérature,lepHetl’humiditésurlacroissancedeListeria monocytogenesdanslesproduitsdeviande

PMP Pathogen Modeling Programhttp://portal.arserrc.govCe logiciel permet de prédire la croissance ou l’inactivation des bactéries pathogènes suivant lesconditionsde température,depH,deNaCl,d’activitéd’eauetdanscertainscas, laconcentrationenacidesorganiques.Enoutre,PMPcomprenddesmodèlespermettantdeprédirel’effetdurefroidissementàpartirdeprofilsdetempératuresurlacroissancedeClostridium botulinumetClostridium perfringensaprèslacuissondeproduitsdeviandedebœuf.Ilexisteuneversiondulogicieltéléchargeableetuneversionaccessibleenligne

Process Lethality Determination spreadsheet

http://www.amif.org/ht/d/sp/i/26870/pid/26870Lebutdumodèleestdefournirauxtransformateursdeviandeunoutildevalidationscientifiquepourdémontrer l’efficacité d’un traitement thermique spécifique. Lemodèle permet de saisir les donnéesdetemps/températureàpartird’uncycledecuissonpourdéterminersileprocédépermetlaréductionsouhaitéedunombredemicro-organismes

Refrigeration index calculator

http://www.foodsafetycentre.com.au/refrigerationindex.phpL’index de réfrigération prédit la croissance d’Escherichia coli dans la viande en fonction de latempératuredupH,del’activitédel’eauetdelaconcentrationenlactate.Lemodèlepermetd’entrerdesdonnéesdetempératureaucoursdutemps.Lesautresparamètressontfixéspartypedeproduit.Lelogicielestdisponibleautéléchargement

Risk Ranger http://www.foodsafetycentre.com.au/riskranger.phpLeRisk Ranger est un outil simple d’aide à la décision utilisable sousMicrosoftExcel basé sur lestechniquesd’appréciationquantitativedurisqueLespossibilitésoffertesàl’utilisateursontlimitéesetsonutilisationestparconséquentassezréduite.Cependant,ilresteunoutilpourunepremièreapproche

Shelf Stability Predictor-

http://www.meathaccp.wisc.edu/ST_calc.htmlCeprogrammepermetdeprédirelaprobabilitédecroissancedeListeria monocytogenes etStaphylococcusaureussurdesproduitsdeviandeenfonctiondupHetdel’activitédel’eau

Lamicrobiologieprévisionnelleappliquéeauxaliments 379

leplusprochepossibledes limitesdes conditionsdedestructionouderéductiondesmicro-organismes.Decefait,celarequiertuneplusgrandeprécisionetunevalidationplusfinedesmodèlesutilisésdansl’industriesemblenécessaire.

8. LES TESTS DE CROISSANCE

Le suivi d’une cinétique de croissance microbiennesur les aliments via un test de croissance est un desoutilsàmaitriserpourcollecterdesparamètrespourlesmodèlesdemicrobiologieprévisionnelle.Leprincipegénéral consiste à inoculer l’aliment considéré, et àmesurer l’évolution de la concentrationmicrobienneen fonction du temps, de façon à tracer une courbedecroissance.Ledénombrementclassiquesurmilieugélosé est encore très courant. Cependant, cettetechniqueserévèlelongueetfastidieuse.Ilexistedesméthodesalternatives,maisencorepeuutilisées,poursuivre laflore sur les aliments.Àpartir desdonnéesexpérimentales,unmodèlepourraitêtreconstruitpourétablir un lien entre les conditions expérimentales etla croissance des souches considérées. On travailledirectementàpartirdel’alimentconsidéréetnonpassurunmilieudeculture,afindetenircomptedel’effetstructure et des phénomènes de compétition entre laflorebanaleetlabactéried’intérêt(Luningetal.,2007).

Lamiseenplaced’un telprotocolenécessitequeseuls des laboratoires ayant une expertise suffisantedans le domaine puissent l’utiliser. De plus, lesconditions d’expérience sont différentes lorsque l’ondéveloppeunmodèleoulorsquel’ondésireutiliserunmodèlepourreprésenterlaréalitéavecsacomplexité(effetmatrice,effetflore,variabilitéentrelessouchesdebactéries,etc).

9. CONCLUSION

Cette synthèse donne un aperçu de l’étendue desmodèlesdemicrobiologieprévisionnellepour l’agro-alimentaire. Le nombre de modèles disponibles esten constante augmentation, avec parfois un niveauélevé de complexité. Cependant, la microbiologieprévisionnelle offre de nombreuses perspectivesd’utilisationetestsur lepointdesegénéraliserdansunedémarchedemaitrisedesdangersmicrobiensdansunechainealimentaire.Danslesprochainesannées,laprévision de la durée de conservation, de la sécuritéet de la qualité à partir desmodèles, se développeraà mesure que l’accès aux bases des modèles serarenduplusaiséetquelesmodèlesserontvalidéspluslargementauniveauinternational.

Bien que cette discipline arrive à maturité, denombreux travaux doivent encore être menés. Les

futures recherches s’intéresseront certainement auxcomportements de cellules individuelles et non plusà une population. Les modèles intégrés doivent êtredéveloppés pour modéliser tous les phénomènesengendrés lors de la croissance de bactéries sur unaliment. La mise au point de techniques simples etrapidesdedénombrementdesbactériessurdesdenréesalimentaires au cours du temps doit encore êtreréalisée pour alléger le travail de laboratoire. Enfin,la validation reste une priorité puisque des modèlesdoiventprouverleurscapacitésdeprédictionpourdesaliments complexes. Cette validation est nécessairepourquecettedisciplinesoitgénéraliséeetemployéecomme méthode de routine en complément desméthodesactuelles.

Remerciements

LesauteurssouhaitentremercierchaleureusementMonsieurle Professeur Jean-Christophe Augustin pour la lecturedumanuscrit et pour les suggestions d’améliorations. LesauteurssouhaitentégalementremercierlaRégionwallonnepour son support financier (Projet Consalim, DGO6,Convention n°5713, 2008-2011, http://www.wagralim.be/consalim.php).

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