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Carrières et mines souterraines Les nouvelles technologies au service du dimensionnement d’exploitations souterraines L’article illustre les apports des nouvelles technologies – dont les logiciels de simula- tion – mises en œuvre au cours de la vie d’une exploitation souterraine, pour concevoir et dimensionner, mais également pour accompagner et suivre l’exploitation, jusqu’aux phases de fermeture des travaux souterrains. Or la multiplicité de ces outils ne doit pas dispenser de développer une compréhension approfondie des modèles utilisés. Car sans expertise ni analyse des résultats, l’apparente facilité d’utilisation de ces outils et des interfaces utilisateurs très conviviales, peuvent conduire à des résultats esthé- tiques, certes, mais potentiellement erronés. caractérisation du gisement à exploiter ; choix de la méthode d’exploitation et dimensionne- ment des travaux souterrains ; dimensionnement de l’aérage ; suivi opérationnel de l’exploitation ; autres domaines : optimisation/dimensionnement des forages et des tirs de mines et dimensionnement de l’exhaure. Caractérisation du gisement à exploiter La modélisation des caractéristiques du gisement est l’étape comprise entre la géologie de sondages (log, échantillonnage, analyses chimiques…) et la planifica- tion minière. C’est la première phase d’un projet d’ex- ploitation souterraine sur laquelle se base principale- ment la faisabilité du projet. Elle vise à : comprendre et visualiser la géologie, la géochimie et la structure du gisement et des terrains encais- sants ; – évaluer la potentialité d’exploitation (volumes et teneurs extractibles) ; planifier et organiser la future exploitation (lignes directrices de la méthode d’exploitation : limites des panneaux exploitables, orientations et direc- tions des chantiers, etc.). Ces modélisations valorisent les données disconti- nues et ponctuelles issues des campagnes de forages, des investigations géophysiques et de toute autre information de terrain : interfaces géologiques, direc- tions et pendages structuraux, épaisseurs, isobathes, mesures de résistivité, de teneurs, etc. Sur la base de ces informations et d’algorithmes d’interpolation, le modèle de gisement décrit et représente les valeurs d’un ou de plusieurs paramètres du gisement dans l’es- U n projet d’exploitation souterraine se bâtit peu à peu, en plusieurs étapes, s’inscrivant dans un processus dynamique, mis à jour et perfec- tionné au fur et à mesure de l’acquisition d’informa- tions supplémentaires. Compte tenu des pressions éco- nomiques, environnementales ou sociétales, les responsables de projets souterrains d’extraction n’ont aujourd’hui, encore moins qu’hier, pas le droit à l’erreur. C’est le plus souvent dès les premières étapes (avant- projet sommaire [APS], avant-projet détaillé [APD] et projet d’exécution) que les grands choix doivent être faits, dont au premier rang le dimensionnement de l’exploitation projetée : positionnement de la zone exploitée, méthode d’extraction et de traitement du minerai, dimensions et formes des excavations, sé- quences d’exploitation, mise en œuvre de soutène- ment, aérage, exhaure, caractéristiques des matériels d’exploitation… Les éventuelles insuffisances de trai- tement de ces premières étapes peuvent peser très lourdement, tant financièrement que techniquement, sur la suite du projet. Dans ce contexte, les nouvelles technologies, notam- ment les outils informatiques et numériques permet- tant de simuler, de modéliser et de reproduire toutes les caractéristiques de l’exploitation souterraine, constituent un atout majeur pour le dimensionne- ment “moderne” de ces travaux. En effet, le monde des exploitations souterraines n’est pas resté en marge des avantages apportés par l’utilisation de ces nouvelles technologies qui ont investi la majorité des secteurs de l’industrie et de la recherche ces 15 dernières années. Ces outils impactent plusieurs phases de vie d’une exploitation souterraine, chacune d’entre elles sera détaillée et illustrée dans la suite de l’article : DOSSIER 68 n° 212 Mars 2014 Par Frédéric Poulard, Ineris. Eric Massy-Delhotel

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Carrières et mines souterraines

Les nouvelles technologies au service du dimensionnementd’exploitations souterrainesL’article illustre les apports des nouvelles technologies – dont les logiciels de simula-tion – mises en œuvre au cours de la vie d’une exploitation souterraine, pour concevoiret dimensionner, mais également pour accompagner et suivre l’exploitation, jusqu’auxphases de fermeture des travaux souterrains. Or la multiplicité de ces outils ne doit pasdispenser de développer une compréhension approfondie des modèles utilisés. Carsans expertise ni analyse des résultats, l’apparente facilité d’utilisation de ces outils etdes interfaces utilisateurs très conviviales, peuvent conduire à des résultats esthé-tiques, certes, mais potentiellement erronés.

– caractérisation du gisement à exploiter ;– choix de la méthode d’exploitation et dimensionne-

ment des travaux souterrains ;– dimensionnement de l’aérage ;– suivi opérationnel de l’exploitation ;– autres domaines : optimisation/dimensionnement

des forages et des tirs de mines et dimensionnementde l’exhaure.

Caractérisation du gisement à exploiterLa modélisation des caractéristiques du gisement estl’étape comprise entre la géologie de sondages (log,échantillonnage, analyses chimiques…) et la planifica-tion minière. C’est la première phase d’un projet d’ex-ploitation souterraine sur laquelle se base principale-ment la faisabilité du projet. Elle vise à :– comprendre et visualiser la géologie, la géochimie

et la structure du gisement et des terrains encais-sants ;

– évaluer la potentialité d’exploitation (volumes etteneurs extractibles) ;

– planifier et organiser la future exploitation (lignesdirectrices de la méthode d’exploitation : limitesdes panneaux exploitables, orientations et direc-tions des chantiers, etc.).

Ces modélisations valorisent les données disconti-nues et ponctuelles issues des campagnes de forages,des investigations géophysiques et de toute autreinformation de terrain : interfaces géologiques, direc-tions et pendages structuraux, épaisseurs, isobathes,mesures de résistivité, de teneurs, etc. Sur la base de cesinformations et d’algorithmes d’interpolation, lemodèle de gisement décrit et représente les valeursd’un ou de plusieurs paramètres du gisement dans l’es-

Un projet d’exploitation souterraine se bâtit peuà peu, en plusieurs étapes, s’inscrivant dans unprocessus dynamique, mis à jour et perfec-

tionné au fur et à mesure de l’acquisition d’informa-tions supplémentaires. Compte tenu des pressions éco-nomiques, environnementales ou sociétales, lesresponsables de projets souterrains d’extraction n’ontaujourd’hui, encore moins qu’hier, pas le droit à l’erreur.C’est le plus souvent dès les premières étapes (avant-projet sommaire [APS], avant-projet détaillé [APD]et projet d’exécution) que les grands choix doiventêtre faits, dont au premier rang le dimensionnementde l’exploitation projetée : positionnement de la zoneexploitée, méthode d’extraction et de traitement duminerai, dimensions et formes des excavations, sé -quences d’exploitation, mise en œuvre de soutène-ment, aérage, exhaure, caractéristiques des matérielsd’exploitation… Les éventuelles insuffisances de trai-tement de ces premières étapes peuvent peser trèslourdement, tant financièrement que techniquement,sur la suite du projet.Dans ce contexte, les nouvelles technologies, notam-ment les outils informatiques et numériques permet-tant de simuler, de modéliser et de reproduire toutesles caractéristiques de l’exploitation souterraine,constituent un atout majeur pour le dimensionne-ment “moderne” de ces travaux. En effet, le monde desexploitations souterraines n’est pas resté en marge desavantages apportés par l’utilisation de ces nouvellestechnologies qui ont investi la majorité des secteurs del’industrie et de la recherche ces 15 dernières années.Ces outils impactent plusieurs phases de vie d’uneexploitation souterraine, chacune d’entre elles seradétaillée et illustrée dans la suite de l’article :

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Par Frédéric Poulard,Ineris.

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pace 2D ou 3D de façon continue (au moins par par-tie au sein d’un maillage) et à un moment donné, voirexemple en figure 1.De telles modélisations nécessitent différents do -maines de compétence et de savoir-faire : géologie,géochimie, statistique, mathématique et informa-tique entre autres.Les développements des outils numériques et l’aug-mentation des puissances des moyens de calculs infor-matiques de ces 15 dernières années permettentaujourd’hui de valoriser des données de forages trèsdétaillées (diagraphies diverses et imageries de paroisHD notamment), de développer des représentationsspatiales complexes croisant de nombreuses donnéeset intégrant des lois statistiques, de visualiser fine-ment, en 3D et de manière dynamique les gisementset leurs caractéristiques.

Définition des schémas d’exploitation et études de stabilitéLa modélisation de la stabilité de l’exploitation souter-raine est l’étape qui fait le lien entre la ressource minérale(dimensionnée par les modélisations géologiques) et lavalorisation souterraine par une méthode d’extractionsûre, techniquement, et rentable, économiquement.Toute exploitation souterraine, quels que soient laméthode et les schémas d’extraction retenus, conduità la création de vides souterrains dont la stabilité àcourt, moyen et long termes doit être précisément étu-diée afin de garantir la sécurité des travailleurs et deprévenir les mouvements de terrain en surface. Ces

études prennent en compte aussi bien les instabilitéslocales (pilier, toit, mur et parement) que globales(ensemble de l’exploitation). À cette phase, plusieursconfigurations de travaux sont généralement modéli-sées et comparées dans le but d’identifier celle quiconduit au meilleur rapport “stabilité/extraction”(optimisation des volumes extraits par rapport auxconditions de stabilité).Ces modèles, dits de stabilité, valorisent les donnéesponctuelles issues d’essais géomécaniques (essais decompression uniaxiale, triaxiale, de flexion, de cisail-lement, de fluage, de vieillissement), d’investigationsgéophysiques, de données bibliographiques : valeursde résistance des matériaux, lois de comportement dematériaux, etc. Sur la base de ces informations et d’al-gorithmes d’interpolation, le modèle décrit et repré-sente les valeurs d’un ou de plusieurs paramètres destabilité dans l’espace 2D ou 3D de façon continue, ausein d’un maillage, et à différentes dates (voir exem-ples en figures 2 et 3). Dans ce domaine, il est courantde représenter dans l’espace de l’exploitation souter-raine, un facteur dit de sécurité, défini comme le rap-port entre les contraintes modélisées et la résistanceréelle des matériaux.Différents domaines de compétences et de savoir-faire sont requis pour mettre en œuvre de telles modé-lisations : géologie, géotechnique, mécanique des solset des roches, statistique, mathématique et informa-tique entre autres.Les développements des outils numériques et l’aug-mentation des puissances des moyens de calculs infor-

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Section N040

Section N130

Figure 1. Block-model de définition de ressources en fer par estimation des variations géostatistiques de la teneur en Fe2O3(Tata Steel, Côte d’Ivoire, avec Surpac).

Figure 2.Modélisations des zones plastifiéesdans une configurationde puits et galeries (avec Flac3d).

Figure 3.Modélisation des contraintesprincipales d’une exploitation par chambres et piliersabandonnés sur deuxniveaux (avec Flac3d).

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Une exploitation souterraine nécessite généralementla mise en place d’une aération mécanisée (certainesconfigurations où le tirage naturel est suffisant ne lenécessitent pas) dans le but d’apporter suffisammentd’air frais au personnel travaillant dans l’exploitation,d’évacuer les éventuels gaz nocifs (engins et tirs à l’ex-plosif ) et d’extraire les fumées en cas d’incendie ou defeux souterrains. Les modélisations d’aérage ont pourobjectifs :– d’estimer les pertes de charge (dues aux configura-

tions du réseau souterrain), la puissance des ventila-teurs et les débits d’air nécessaires (en situationsnormale et dégradée, suite à un incendie) ;

– d’établir les plans de circulation d’air (en phase avecl’avancement des travaux).

Ces modèles reposent sur les lois de circulation d’air, laforme et la géométrie des travaux souterrains (lon-gueur et section des chambres et galeries, revêtementdes parements, etc.), les courbes de fonctionnement deventilateurs. Sur la base de ces informations et d’algo-rithmes d’interpolation, le modèle décrit et représentenotamment les variations des teneurs de l’air – oxygèneet/ou gaz nocifs – en tout point de l’exploitation sou-terraine (2D ou 3D au cours du temps). Voir les exem-ples en figures 4 et 5. Les calculs consistent à disposerdifférents ventilateurs et barrages dans le réseau demanière à garantir des valeurs seuils dans l’air enchaque point de l’exploitation souterraine modélisée.De telles modélisations requièrent différents do -maines de compétences et de savoir-faire : aéraulique,mécanique des fluides, mathématique et informa-tique entre autres.L’aérage est resté, pendant un certain temps, l’enfantpauvre de la modélisation numérique notamment enFrance, mais ce n’est plus totalement le cas et le déve-loppement de logiciels dédiés voit le jour.Une nouvelle fois, la principale plus-value de ces outilsest la visualisation en 3D des écoulements d’air et degaz mais également la modélisation de réseaux souter-rains complexes (multi-niveaux, variations des sec-tions, géométries irrégulières, encombrements multi-ples,  etc.) nécessitant des modèles fins et vastes :plusieurs milliers de nœuds et de branches. La puis-sance des ordinateurs modernes permet d’atteindrecette finesse de calculs.

Suivi opérationnel de l’exploitationLa modélisation et les outils numériques peuvents’éloigner des phases projet, sans réellement les quit-ter, pour revêtir des fonctions plus opérationnelles enparticipant au suivi de l’exploitation souterraine “aujour le jour” : tonnages produits, volumes excavés, ges-tions des équipes et des engins, etc. Ce domaineconnaît actuellement les développements logiciels lesplus marqués.Ces outils valorisent en temps réel toutes les donnéesen provenance de l’exploitation (mesures, levés,pesées, photographies, etc.) dans le but de :– cartographier régulièrement les zones exploitées et

à exploiter (figures 6 et 7) ;

matiques de ces 15 dernières années permettentaujourd’hui de :– raffiner et d’étendre les maillages et donc d’affiner

les calculs de stabilité en détectant très précisémentles zones d’initiation d’instabilité ou en modélisantl’intégralité des terrains entre l’exploitation et la sur-face (et pas seulement les ouvrages souterrains). Lesmodèles numériques résolvent couramment desproblèmes à 10, 15 ou 20 voire 50 millions demailles nécessitant 10 à 15 jours de calculs sur desmachines à 30 cœurs et 60 à 80 Go de RAM1 ;

– visualiser en 3D les contraintes (déformations,déplacements…) en permettant de modéliser descas complexes ne possédant pas d’axe ou de surfacede symétrie. De telles configurations (cavités nonsymétriques, exploitations par chambres et piliersirréguliers) ne peuvent être modélisées que depuisces dernières années ;

– évaluer le comportement à très long terme desmatériaux (100, 500 ou 1 000 ans) ;

– modéliser et prendre en compte des lois de compor-tement des matériaux complexes et/ou couplées :fluage et dissolution, couplage hydro-thermo-méca(phénomènes physiques qui, jusqu’à récemment, nepouvaient être étudiés et modélisés qu’indépen-damment les uns des autres).

Dimensionnement de l’aérageLe dimensionnement de l’aérage peut être considérécomme une phase du dimensionnement de l’exploita-tion souterraine (au même titre que les études de sta-bilité et le dimensionnement de l’exhaure, non abor-dée en détail dans cet article). Il contribue égalementà définir une méthode d’extraction sûre et rentable.

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1. Mémoire vive. Elle est de 2, 4, 8 ou 16 Go sur les PC “classiques”grand public.

Figure 4.Modélisation 3D

des conséquences d’un incendie

dans une galeriesouterraine (avec FDS).

Figure 5.Exemple

de modélisation de l’aérage

d’une exploitationsouterraine (avec Aero).

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– planifier en quantité et en qualité la production (etéventuellement réajuster les paramètres) ;

– visualiser et détecter rapidement les signes de dégra-dation (figure 8).

Les plans de mines, historiquement en 2D, ont étérévolutionnés par la représentation en 3D géolocali-sée, possible sur les ordinateurs modernes. La planifi-cation minière gagne ainsi en précision et en représen-tativité.Le développement d’outils numériques autonomes,comme les scan-3D ou la robotisation des engins d’ex-ploitation, contribue également aujourd’hui à l’opti-misation et à l’efficacité du suivi des exploitations sou-terraines.

Autres domainesL’optimisation des forages et des tirs de mines et ledimensionnement de l’exhaure sont des domaines for-tement impactés par le développement d’outils numé-riques et de logiciels de modélisations spécifiques.Comme cela a été vu précédemment, ces outils valori-sent des données ponctuelles en les interpolant demanière continue dans l’espace, généralement en 3D,de tout ou partie de l’exploitation souterraine :– débit ou niveau d’eau, pour la problématique de

l’exhaure ;– ondes de chocs ou énergie transmise pour le dimen-

sionnement de tirs (figures 9 et 10).

Des outils séduisants mais complexes à utiliserMême si les règles et les principes utilisés pour ledimensionnement de toute exploitation souterraine(mécanique des sols et des roches, hydraulique, aérau-lique, thermodynamique, voire économie) sontconnus et appliqués depuis de nombreuses années, lesdéveloppements informatiques, l’amélioration desalgorithmes et des modèles ainsi que l’augmentationdes puissances de calculs ont eu des conséquences,

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Figure 6.Développementsexistants et projetés de la mine de diamantsde Diavik au canada (avec Vulcan).

Figure 7.Représentation globaled’un projet d’exploitationd’une carrière souter -raine de marbre en Chine(avec Surpac Visio).

Figure 8.Scan-3D d’une galerieminière (avec LeicaCyclone Model).

Figure 9.Modélisation des ondesde choc de tirs de mines(avec JKSimBlast).

Figure 10.Modélisation deschargements de trous(avec JKSimBlast).

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Un prérequis également indispensable à ces outils estleur nécessaire adaptabilité. En effet, l’exploitationsouterraine est un domaine très spécifique où chaquesite est différent avec ses contraintes et ses particulari-tés que les logiciels doivent prendre en compte (unecarrière souterraine en roche massive, une minemétallique d’or, de cuivre, de terres rares ou bien uneexploitation de charbon, demandent des approchestrès différentes). Les outils doivent, en outre, s’inscriredans un processus dynamique de mise à jour qui suit leprocessus d’avancement du projet d’exploitation etainsi permettre des phases de calage nécessaires àtoute opération de calage.Enfin, une attention particulière doit être portée sur lemaintien dans le temps de ces outils (robustesse, com-patibilité des formats, etc.) en cohérence avec la vieparfois très longue d’une exploitation souterraine. n

Frédéric Poulard, Ineris

parfois spectaculaires, sur le dimensionnement desexploitations souterraines. Le passage de la 2D à la 3D(en modélisation et en visualisation) ou encore lamodélisation des mécanismes complexes en mécaniquedes roches, comme le comportement des discontinui-tés structurales, en sont des exemples représentatifs.Toutefois, la multiplicité des outils disponibles nedoit pas dispenser de développer une compréhensionapprofondie des modèles utilisés. En effet, sans exper-tise ni analyse des résultats, l’apparente facilité d’utili-sation de ces outils et des interfaces utilisateurs trèsconviviales, peuvent conduire à des résultats esthé-tiques, certes, mais potentiellement erronés.De plus, ces outils apparemment séduisants, n’en res-tent pas moins fort complexes à l’utilisation. Leurmanipulation nécessite bien souvent des connais-sances spécifiques que l’exploitant devra aller chercherchez des bureaux d’études experts et spécialisés.

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Pour aller plus loinVoici certains des logiciels de modélisation les plus couramment utilisés2 dans le domaine des exploitations souterraines (liste non exhaustive). Il est intéressant de visiter les sites Web des sociétés proposant ces licences pour se faire une idée plus précise des possibilités offertes par ces outils. 2. Sans objectif commercial ni promotionnel et de manière transparente.

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AERO X http://jmbavec.free.fr/outils/index.htmlARCGIS X www.esrifrance.fr/arcgis.aspxAUTOCAD 2D/3D X www.autodesk.fr/products/autodesk-autocad-lt/overviewBIMSU X www.earthresourcetechnology.com/bimsu.aspxBLAST LOGIC X www.maptek.com/products/blastlogic/CATIA X www.3ds.com/fr/produits-et-services/catia/COMSOL X www.comsol.com/CYCLONE MODEL X http://hds.leica-geosystems.com/en/Leica-Cyclone_6515.htmDIPS X www.rocscience.com/products/1/DipsEPS X www.minerpsolutions.com/en/software/planningsched/EPS.aspxEUREKA X www.maptek.com/products/eureka/EXAMINE 2D/3D X www.rocscience.com/products/11/Examine2DFEFLOW X www.feflow.info/FLAC 2D/3D X www.itascacg.com/software/flac3dFLOW-3D X X www.flow3d.com/GEMS X www.gemcomsoftware.com/products/gemsGENESIS X www.geostat.com/genesis/GEOMODELLER X www.intrepid-geophysics.com/ig/index.php?page=geomodellerGEOS3D X www.coralis.com/index.php3?type=geos3dHARD DOLLAR X www.harddollar.com/HYDREF X X www.geosciences.mines-paristech.fr/fr/recherche/bibliotheque-de-logiciels/geomecaniqueI-BLAST X www.dna-blast.com/Blasting-Design-Simulation-Optimization/I-Blast_Software.htmlINSITE X www.gemcomsoftware.com/products/InSiteIRING X X www.iring.ca/I-SITE STUDIO X X www.maptek.com/products/i-site/JKSIMBLAST www.soft-blast.com/JKSimBlast/JKSimBlast.htmLASERGEN X X lasergen.com/LEAPFROG3D X www.leapfrog3d.com/MAPINFO X X www.mapinfo.com/MICROMINE X www.micromine.com/products-downloads/micromineMINE 2-4D X www.minerpsolutions.com/en/software/planningsched/mine2-4D.aspxMSO X www.cae.com/mining/software/underground-planning-solution/

MINESCHEED X www.gemcomsoftware.com/products/MineSchedMINEX X www.gemcomsoftware.com/products/minexMODFLOW X www.swstechnology.com/tag/groundwater-modeling-softwareNEWVENDIS X www.ineris.fr/centredoc/25.pdfPETREL X www.software.slb.com/products/platform/pages/petrel-2013.aspxPFC 2D/3D X www.itasca.fr/SITE-PFC/index.htmlPITRAM X www.micromine.com/products-downloads/pitramPLAXIS X www.plaxis.nl/PROMINE X X X www.promine.com/QUICKSURF X www.rockware.com/product/overview.php?id=205ROCPLANE X X www.rocscience.com/products/5/RocPlaneRS3 X www.rocscience.com/products/16/RS3SHOTPLUS X www.oricaminingservices.comSIROVISION X X X http://sirovision.com/SLIDE X www.rocscience.com/products/8/SlideSLOPE-W X www.geo-slope.com/products/slopew.aspxSTRAT 3D X www.cae.com/mining/software/STUDIO 3 X www.cae.com/mining/software/STUDIO 5D PLANNER X www.cae.com/mining/software/SURFER X www.ritme.com/fr/product/surfer/descriptionSURPAC X X X www.gemcomsoftware.com/products/SurpacSWEDGE X www.rocscience.com/products/9/SwedgeUDEC/3DEC X www.itascacg.com/software/udecUNWEDGE X www.rocscience.com/products/10/UnwedgeVENTSIM X www.ventsim.com/VIC 3D X X www.correlatedsolutions.com/index.php/products/vic-3dVIPLEF X www.geosciences.mines-paristech.fr/fr/recherche/bibliotheque-de-logiciels/geomecaniqueVULCAN X X X www.maptek.com/products/vulcan/WHITTLE X X www.gemcomsoftware.com/products/Whittle

Systèmes d’information géographique (SIG)

Travaux de minage

Gestion, suivi et planification minière

Ventilation et aérage

Simulation et suivi financier

Ecoulements d’eaux

Scanner 3D ou imagerie 3D

Site Internet

Dessin et cartographies 2D ou 3D

Modélisation numérique géomécanique

Stabilité des surfaces de discontinuité

Modélisation géologique

Noms Logiciels

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solides, charbons, minerais et matériaux deconstruction (Labbé, Duffaut, 2006).

Selon l’analyse du projet Deep City denos voisins suisses, il faut d’ailleurs

ajouter les fluides, dont l’eausouterraine, les hydrocar-bures liquides et gazeux, etl’énergie (géothermique)

comme le montre la figure 1.

Rappel historiqueDans quelques cas anciens au moins, il

est malaisé de vérifier si le creusement decavités a eu pour premier objectif l’abri, avec

réutilisation du matériau extrait, ou le matériau àvaleur marchande, avec réutilisation dela cavité. Les carrières ont-elles partoutprécédé cet habitat qu’on a appelé troglo-dytique, comme il est probable ? Ou bienle matériau extrait, devenu encombrant àl’extérieur, a-t-il reçu une affectation

nouvelle ? On comprend bien qu’il s’agit d’une préoc-cupation économique élémentaire. On se souvientque les projets de lignes ferroviaires du XIXe siècle s’ef-forçaient d’équilibrer les déblais et les remblais, ce queles normes récentes sur les qualités de matériaux ontrendu souvent impossible. Il est probable que beau-coup d’architectures troglodytiques appliquaient lemême principe, fut-ce sans l’avoir codifié. Bienentendu, les mineurs possédaient l’expérience et lesoutils permettant de creuser des annexes de leursexploitations (ateliers, stocks, cantines et même dor-toirs), surtout sous les climats difficiles, de la hautemontagne englacée aux déserts brûlants, jusqu’auxvilles souterraines de Coober Pedy en Australie.Dans les villes et à leurs abords, l’exploitation de maté-riaux de construction est le principal moteur des car-rières, comme le montre l’exemple parisien suivi àLille, Arras et Bordeaux pour s’en tenir à trois exem-

Carrières et mines souterraines

Deuxième vie des videsminiers et carriers

Après un rappel historique sur les vides miniers et carriers, de nombreux exemplesponctuels de réutilisation sont cités, en France et à l’étranger, dont le cas exceptionnelde Kansas City. Les avantages connus et méconnus des installations souterraines– dont la meilleure résistance aux séismes – sont comparés aux inconvénients et diffi-cultés. Enfin sont posées les questions concomitantes de la pérennité et de la valorisa-tion des vides créés, dans une vision prospective à une échelle de territoire.

Le propre du mineur est d’exploiter lesressources de la croûte terrestre, etlorsqu’il exploite en souterrain,

il crée des cavités plus ou moinsdurables : les vides miniers.Dans une phase artisanale, ilest souvent arrivé auxmineurs et aux carriers deréutiliser, tout naturelle-ment, une partie au moins de cesvides, à l’instar d’ailleurs des grottes,ces cavités naturelles qu’utilisait“l’homme des cavernes” pour s’abriter, abri-ter ses biens, et parfois ses ateliers. L’époqueindustrielle semble avoir négligé cette formed’après-mine qui mérite d’être mieuxconsidérée, alors que la réalisation d’ou-vrages souterrains s’est souvent imposéesans considération de la valorisation dumatériau extrait. Après un bref rappelhistorique, deux chapitres énumèrent desexemples contemporains de réutilisation, en Francepuis à l’étranger, qui illustrent les atouts du sous-solsans négliger ses difficultés. L’espace souterrain appa-raît alors comme une nouvelle ressource de la croûteterrestre, dont il convient d’étudier la meilleuremanière de l’utiliser. Une telle approche est susceptiblede relancer de nombreuses exploitations en souterrain.On peut qualifier d’entreposage l’abri de denrées et detrésors en tout genre, pour des durées brèves, saison-nières et interannuelles, comme les bijoux de la cou-ronne d’Angleterre pendant une guerre, ou même lesarchives des Mormons pour l’éternité. Et on utiliserale mot enfouissement pour des stockages “définitifs”(cadavres, déchets ultimes et radioactifs) qu’il n’est pasenvisagé d’extraire ultérieurement.Une gestion responsable et durable du sous-sol urbaindevrait donc tenir compte à la fois des besoins enespace et des ressources disponibles : aux matériaux

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Par Monique Labbé,Aftes.

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Espace Géomatériaux

Eau souterraine

Géothermie

Figure 1. Les quatrecomposantes du sous-sol,

matériau solide utile ou non,espace vide naturel ou non,

fluide, dont l’eau souterraine,énergie géothermique (Parriaux et al, 2010).

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domaine des matériaux concessibles, on trouve à lafois les volumes vides des mines de fer et qui règnentsur des centaines de kilomètres carrés et, au contraire,les vides localisés des mines filoniennes (on sait queles mines de charbon sont en quasi-totalité affaisséesou remblayées) et ne laissent pas d’autres vides qu’uneporosité anormalement élevée.Un cas extraordinaire et pourtant peu connu d’affais-sement minier est celui de Duisburg, en Allemagne, àl’amont immédiat du confluent de la Ruhr avec leRhin : l’exploitation des riches couches de charbonavait d’abord été interdite sous le port de Duisburg afinde ne pas disloquer l’ensemble des quais, grues et bâti-ments de ce très important port industriel. Or la cor-rection du cours du Rhin, en vue de faciliter la naviga-tion, a conduit à l’abaissement du niveau du fleuve,entraînant l’abaissement du tirant d’eau dans les darsesdu port voisin : la situation a été rétablie dans lesannées 1950 par l’exploitation prudente de deuxcouches de charbon, qui a abaissé la surface du sol de 1à 2 m suivant les endroits et remis les darses en service.Faut-il ou non considérer comme vides miniers ceuxqu’abandonnent des exploitations à ciel ouvert ? Ceproblème, qui n’est pas abordé ici, mérite certaine-ment de l’être un jour.

Les exemples en France sont nombreux mais isolésFROIDEVAUXUn exemple remarquable de réutilisation des carrièresde Paris est un poste de commandement aménagé sous

ples. L’extension des carrières souterraines de Paris etdes environs est relativement bien connue puisqu’uneinspection a été créée par le roi Louis XVI dès 1777,qui les a cartographiées et consolidées sous le domainepublic (figure 2). La réutilisation n’avait pas attenducette date puisque, dès le siècle précédent, les moineschartreux utilisaient les anciennes carrières situéessous leur couvent (aujourd’hui sous la pépinière dujardin du Luxembourg) pour les convertir en caves eten distilleries, dans lesquelles ils fabriquaient, puisentreposaient, leur célèbre Chartreuse. Rappelonsseulement les glacières et brasseries dans le XIVe arron-dissement de Paris, grâce aux conditions climatiquesidéales pour la fermentation de l’orge et la conserva-tion de la bière (température et hygrométrie cons -tantes). Pour suivre la consommation, les brasseriesDumesnil ont dû essaimer à Ivry au XXe siècle, tou-jours à partir des carrières préexistantes dans le même“calcaire grossier”, nom traditionnel à Paris des bancsdu Lutétien.Si la demande urbaine de matériaux de constructions’exerce au plus près des villes, la possibilité du trans-port fluvial a permis le recours à des carrières plus éloi-gnées : la pierre des carrières de Pontoise a servi àmaint édifice religieux parisien, celle des carrières del’Yonne a pris le relais pour la construction du Parishaussmannien. Les pierres pour la sculpture et l’orne-ment, marbres et serpentines de l’opéra Garnier parexemple, venaient des Pyrénées ou d’Italie et leurvaleur permettait le transport à longue distance, maisles volumes n’étaient pas du même ordre. Dans le

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Figure 2. Extension des carrièressouterraines de la ville de Paris (source IGC) :calcaire grossier au sud,gypse au nord, sables et argiles dans la plainealluviale rive gauche.

Calcaire grossierZONE DES CARRIÈRES SOUTERRAINES

ZONE DES CARRIÈRES À CIEL OUVERTCalcaire grossier

Gypse

GypseGlaisièresSablièresTerrains exposésà un risque naturel

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creuser une entièrement artificielle sous son siègesocial, dans une zone où le niveau de la nappe avaitempêché l’exploitation du calcaire grossier, et permet-trait au contraire de noyer la salle en cas de menace(salle carrée d’un hectare environ).

TAVERNY En banlieue nord-ouest, les carrières de gypse offrentau contraire une hauteur confortable de plus de 10 m.Elles ont été exploitées depuis 1815 sous la forêt deMontmorency à partir d’une entrée proche du cheminde fer à Taverny, aujourd’hui en Val d’Oise. Lors de laSeconde Guerre mondiale, l’occupant allemand y aaménagé un dépôt de munitions, puis un poste decommandement de l’espace aérien, ainsi que des fabri-cations de guerre (roulements à bille et même fusées).Toutes installations qu’il détruira avant de les quitter.L’armée de l’air française reprend le site et y placed’abord un dépôt de matériel avant d’en choisir le site

un square proche de la place Denfert-Rochereau, sur600 m² à 19 m de profondeur, avec une hauteur sousplafond de 2,40 m. Achevé en mars 1938, il a hébergél’état-major des FFI du 20 au 25 août 1944 pour lalibération de Paris. C’est à l’intérieur de Paris le seulexemple de transformation complète d’anciennes car-rières en abri, et sa vie utile a été brève. On cite aussides réalisations également éphémères plus modestescomme des centraux téléphoniques de la Résistance,renforcés pour anticiper les attaques et bombarde-ments. Il faut reconnaître que les volumes exploitésdans les carrières de calcaire grossier ne se prêtent pasaisément à réutilisation en raison de hauteurs faibleset, par exemple, leur situation à une vingtaine demètres de profondeur a dissuadé leur utilisationcomme abris de défense passive (le métro s’y prêtaitmieux). Quelques agences bancaires ont toutefoisaménagé des chambres fortes dans les carrières situéesau-dessous, alors que la Banque de France en a fait

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Remblaiement partiel des carrières sous la forêt de Montmorency

Comme les travaux publics et urbains dans Paris et ses faubourgs produisent annuellement 10 à 15 Mm3 deterres, transportées à grands frais en camions ou par voie fluviale à plus de 100 km, et comme l’exploitation sou-terraine de gypse par Saint-Gobain sous la forêt de Montmorency, par chambres et piliers, devait être remblayéepour garantir une stabilité à long terme, la carrière a été autorisée à recevoir des terres de déblai, pourvu qu’ellesne contiennent ni fer, ni bois, ni plastiques et qu’elles soient dépourvues d’odeurs et de radioactivité.Sur la carte d’ensemble, le périmètre de la concession est en rouge, les zones remblayées en jaune, les zonesexploitées encore vides en gris

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Périmètre d’exploitation autoriséCavageZone remblayéesAvancement des galeries pour le 2nd semestre 2013Avancement du remblai pour le 2nd semestre 2013Limite des 300 mètres/habitationsLimite des 500 mètres/habitationsLimite de communes

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Il y a lieu de rappeler ici un projet beaucoup plus auda-cieux présenté par l’architecte Georges Lépine dans lecadre des travaux du GECUS sous le plateau de Gra-velle (bois de Vincennes) où n’existent que quelquesmodestes carrières en bordure du plateau et au centre(carrière de la Brasserie). Le double avantage d’unsous-sol d’espace public (le bois est rattaché à la villede Paris) et d’un coteau bordé par les voies ferrées de lagare de Lyon et la Marne navigable, (plus aujourd’huil’autoroute du Sud) a conduit à proposer un ensemblesystématique d’espaces de parcs à voitures (900 voi-tures), de stockage de carburants (60 citernes de2 500 m3) et d’entreposages (50 ha). Malgré la facilitéd’aménagement progressif dans le cadre d’origine et laflexibilité des aménagements de détail, le projet n’apas abouti (Lépine, 1957, figure 4).

DANS L’YONNE, dont le cours d’eau éponyme permet-tait le transport des pierres de taille vers Paris, la car-rière de Champ Retard, à Coutarnoux, a été aména-gée en parc sportif privilégiant l’escalade et lestyroliennes : «  Venez faire de l’escalade à l’abri desintempéries ! ». Non loin, celle de Cravant, en partienoyée, sert notamment à l’entraînement des pom-piers. De même, le long de la vallée du Rhône, la pierrede Seyssel, utilisée pour la construction à Lyon et àl’aval, provenait de grandes carrières souterraines dontune partie a été aménagée pour l’affinage de fromagesdu comté (fromagerie Gojon, présentée dans l’émis-sion Des racines et des ailes, le 25 septembre 2013). Lecas bien connu des caves de Roquefort est différentpuisqu’elles sont aménagées dans des cavités natu-relles, les fleurines, au sein de blocs de calcaire dislo-qués le long d’un versant.

EN SAUMUROISDoué-la-Fontaine abrite d’immenses carrières defaluns, un grès réputé pour les pierres tombales, carac-térisées par la grande hauteur de galeries parallèlesétroites affleurant la surface du sol par des ouverturessommairement rebouchées. L’une d’elles, proche ducentre-ville, est aménagée en restaurant, une autre estouverte aux visites avec dortoirs et surtout projectionsd’images, d’autres abritent des gîtes et un ensemblelargement à ciel ouvert a été transformé en zoo.

pour le Centre d’opérations de la défense aérienne(CODA) ouvert en 1957 et devenu, en 1963, COFAS(Commandement des forces aériennes stratégiques)sous le nom de base aérienne 921 fermée en juillet2011. Naturellement protégée par une profondeur de30 à 80 m et desservie par des galeries à grand gabarit,la zone souterraine de 15 ha comporte une centraleélectrique et des réserves de nourriture pour plusieurssemaines d’autonomie. L’ensemble des moyens de sur-veillance de l’espace aérien est abrité dans les vides lais-sés par l’exploitation d’une couche de gypse par cham-bres et piliers, contrairement au site jumeau du montd’Or lyonnais qui est installé dans des cavernes creu-sées pour cette fonction. Dans les deux cas, l’ensembledes salles “sensibles” sont installées dans une cage deFaraday et certaines dans des “boîtes” suspendues parressorts pour être à l’abri des secousses, qu’elles soientsismiques ou produites par des explosions ou bombar-dements. Creusées spécialement aussi, les cavernesqu’occupait le poste de commande des silos du plateaud’Albion (à Rustrel, dans le Vaucluse), reconverti encentre de recherches universitaires.

MONTQUARTIERSPlus proches de Paris, à Issy-les-Moulineaux, ces car-rières de craie ont été aménagées en caves pour lesréserves de vins fins de grands hôtels et de restaurantsparisiens. L’aménageur y a aussi installé un restaurantet un espace pour réceptions et autres événements(figure 3). Très voisine, dans la commune de Meudon,la carrière Rodin comporte plusieurs étages de gale-ries qui ont abrité des champignonnières mais aussides fabrications d’armement sous l’occupation alle-mande. En dépit de leur valeur esthétique et patrimo-niale (confirmées par un classement), elles sont mena-cées de comblement pour mise en sécurité de lasurface (c’est-à-dire pour y permettre la constructiond’immeubles en toute sécurité…).

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Figure 3. Le restaurant Les crayères installé dans les anciennes carrières des Montquartiers à Issy-les-Moulineaux.

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Marne Autoroute A4Nationale

Chemin de fer Côteau Allée

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Figure 4. Coupe schématique et portion de plan du projet Lépine sousle bois de Vincennes (1957, Le Monde souterrain, 101, 502-504.).

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THERMES DE JONZACLa ville de Jonzac, en Charente-Maritime, ayant pro-cédé à des recherches géothermiques a obtenu une eauchaude à vertus médicinales à 62 °C, grâce à laquelles’est développée une nouvelle station thermale agrééepar le ministère de la Santé : l’ensemble des installa-tions a été placé dans des carrières de pierre de taillepréexistantes dont l’exploitation en champignon-nières avait décliné (figure 6).

TURQUANTCe village du bord de Loire, en rive gauche entre leconfluent de la Vienne et la ville de Saumur, étaitadossé au coteau et accompagné de cavités semi-tro-glodytiques comme ses voisins, Candes et Montso-reau. La réhabilitation s’est déroulée en deux temps :au début, le village a attiré des artisans d’art dans sa par-tie hors sol et, dans une deuxième phase, certains inves-tissent les carrières hautes, complétées ensuite par unhôtel mi-troglodyte dont la piscine est ouverte sur l’ex-térieur (avec un toit mobile en cas d’intempéries).On ne peut oublier les très nombreuses caves de vigne-rons, isolés ou en coopératives, qui utilisent les car-rières comme caves à vins, d’abord pour le mûrisse-ment, puis pour l’entreposage, et souvent aussi commemagasin ouvert au public et donc aux dégustations.Dans le secteur de Sancerre, bien loin à l’amont, on aconstaté l’abandon des “caves” traditionnelles rempla-cées au moment d’une extension par des hangars cli-matisés (plus compatibles avec les moyens modernesde manutention).

LA CULTURE DE CHAMPIGNONS (dits de Paris) a étégénéralisée dans les carrières de la région parisienne eta longtemps subsisté, par exemple, à Saint-Maximin(Oise) dans une partie de la carrière Parrain (figure 5).En dépit de la concurrence étrangère (surtout d’Europede l’Est), le tonnage de champignons produits enFrance reste élevé et provient encore pour l’essentield’exploitations souterraines, contrairement à beaucoupde pays où la production se fait dans des bâtiments cli-matisés (comme la conservation des vins déjà citée). Lamécanisation des transports tend à réserver l’exploita-tion aux galeries ayant les plus grands gabarits.

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Figure 5. Culture de champignons

en sacs autour d’un pilier

(carrière Parain).

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Thermes dans la carrièrede Jonzac.

Figure 6. Parcours de marche dans l’eauthermale, aux thermesdans la carrière de Jonzac.

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en température et en hygrométrie a paru favorable àl’installation d’un sanatorium en service depuis desdécennies. Plus récemment, une salle de réunion d’unmillier de places a été inaugurée.

KANSAS CITY AUX ÉTATS-UNISAux confins du Missouri et du Kansas, et précisémentau confluent de ces deux rivières, Kansas City est unnœud majeur de communication au cœur du centre-ouest américain. La ville se développe sur des plateauxde part et d’autre de vallées encaissées où le chemin defer bénéficie de la plaine alluviale. Au long des versantsaffleure un calcaire dur apprécié comme pierre detaille, ballast, et granulat pour béton : le calcaire deBethany Falls, d’âge pennsylvanien. C’est une couchepratiquement horizontale entre deux couches plusargileuses (figure 7). Les carrières s’y développent dèsle XIXe siècle et, à partir de 1950, divers industriels yinstallent des ateliers qui bénéficient d’une isolationremarquable par rapport aux bruits et aux vibrationsdes ateliers en surface. La stabilité thermique a valuaux carrières terminées la qualification de réfrigéra-teur naturel. Longtemps les usages sont restés ponc-tuels et isolés.Dans un deuxième stade, le développeur immobiliercommence par exploiter un matériau calcaire de hautevaleur marchande avant de proposer à la location desespaces aménagés suivant les besoins du locataire, endesserte (y compris ferroviaire), en sécurité, climatisa-

MAY-SUR-ORNE Cette ancienne mine de fer de l’Orne, proche du portde Caen, qui a été transformée en stockage de fuellourd pour un volume de 5 Mm3, constituant unvolume tampon dans l’approvisionnement des raffi-neries du Bassin parisien. Son exploitation a duré 21 ans, de 1972 à 1993, et s’est arrêtée lorsque lebesoin qui l’avait engagée eu disparu. Le vide minierdéveloppé entre 15 et 400 m sous la vallée de l’Orne,était particulièrement complexe puisqu’il concernaitles deux flancs d’une structure synclinale, l’un presquevertical, l’autre ayant un pendage de 45 degrés. L’ex-ploitation de la couche de minerai de fer avait laissé degrandes chambres à divers niveaux et le maintien deleur stabilité conduisait à fonctionner à niveauconstant, en remplaçant le fuel soutiré par de l’eau (ladifférence de densité imposait des stockages et desdéstockages suffisamment lents pour ne pas induiredes différences de pression susceptibles de déstabiliserles épontes). Cette expérience n’a pas eu de suite enFrance, et les stockages souterrains qui ont suivi onttous utilisé des cavernes creusées spécialement, maisles études préparatoires et les observations en coursd’exploitation ont fourni une riche moisson sur lecomportement de ce type de réservoir (Maury, 1972,1974). Toutefois, il faut signaler les stockages en cavi-tés salines, Tersanne et Etrez en France : le sel extraitpour créer la cavité est aussi un produit de valeur uti-lisé notamment dans l’industrie chimique. Ailleurs,en Lorraine, l’espace créé n’est pas réutilisé et le sitedevient une friche industrielle inutilisable.

Exemples à l’étrangerWIELICZKA EN POLOGNEUne des premières mine de sel gemme en Europe, quien s’enfonçant toujours davantage a abandonné dessalles immenses dont certaines ont été plus tard affec-tées à divers usages, sans négliger les visites organiséespour les touristes (qui sont parfois des mineurs pro-fessionnels). Les éléments les plus remarquables étantdes sculptures dans une église souterraine et des char-pentes de soutènement. Le climat souterrain constant

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Figure 8. Perspectiveouverte du siteSubtropolis à KansasCity, desservi par routeet rail à partir de la vallée du Missouri.

Figure 7. Plan de la carrière

souterraine de Subtropolis

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Beaucoup de ces avantages sont malheureusementdifficiles à chiffrer, ce qui rend incertaines les compa-raisons économiques et laisse trop souvent la premièreplace aux difficultés et aux inconvénients.On peut trouver des correspondances avec diversouvrages souterrains existants comme, par exemple,les tunnels (et stations) des réseaux souterrains. Lemétro n’est pas une carrière, mais il représente unvolume souterrain doté de certaines qualités commela protection contre les intempéries (apprécié dessans-abri) et en temps de guerre contre les bombarde-ments. Indépendamment de l’espace occupé, le régimehydraulique et surtout thermique des espaces souter-rains du métro peut contribuer à des fonctions nonprévues à l’avance, notamment de climatisation (demême pour les tunnels et tranchées du chemin de ferde petite ceinture à Paris).

PARMI LES DIFFICULTÉS, on notera d’abord la craintesur la stabilité des vides (craintes de l’usager commedu futur propriétaire), les vulnérabilités aux inonda-tions et aux gaz toxiques, puis l’incertitude sur lesdélais et les coûts d’aménagement qui toutefoisdépendent moins des surprises géologiques que dansle cas d’ouvrages creusés, puisque le terrain est déjà lar-

tion, réseaux de fluides et de données : le site le plusimportant, Subtropolis (présenté comme le World’sLargest Underground Business Complex), représenteactuellement plus de 500 000 m² d’espace en serviceet 800 000 en réserve, avec des piliers réguliers carrésde 7,6 m de côté séparés par des allées larges de 12,2 met une hauteur sous plafond de 4,9 m (figure 8).Les sites exploités sont nombreux à Kansas City, etont suscité des émules dans plusieurs autres villesbénéficiant de conditions géologiques analogues. Denombreuses sociétés proposent des chambres fortespour archives et documents, dont la sécurité d’accèsest l’objet de mesures très sûres en sus de la protectioncontre le feu et l’inondation. Le cas des archives desMormons, à Salt Lake City, s’en distingue puisque sescavernes ont été creusées spécialement dans le granite.

HAGERBACHBeaucoup plus modeste, mais très original, cet exem-ple de reconversion remarquable concerne le site d’an-ciennes mines métalliques au flanc d’une vallée morteproche de la vallée du Rhin, à Sargans, dans les Gri-sons (sa visite était au programme du récent congrèsmondial des tunnels à Genève, en juin 2013). Lasociété Amberg SA met à disposition d’anciennesgaleries minières (et de nouvelles creusées à lademande) pour des essais de matériels et de technolo-gies minières. Le site est équipé de services généraux,ateliers, sanitaires, cuisine et restaurant. Des séancesde formation aux métiers du souterrain et des congrèsy sont organisées, ainsi que des séminaires de forma-tion, des expositions de matériel et des journées portesouvertes (qui ont un grand succès).

Les atouts du sous-sol et ses difficultésLES AVANTAGES GÉNÉRAUX de l’occupation du sous-sol sont classiques : ubiquité, discrétion, abri contremalveillance et agressions, isolation et stabilité ther-miques, sauvegarde d’espace au sol, tous invoqués àjuste titre lorsqu’une solution souterraine est propo-sée en alternative. Un avantage trop méconnu est unemoindre sensibilité aux séismes. Un effet abondam-ment documenté lors des séismes, tant dans le cas demines dont les mineurs qui n’ont rien perçu trouventen remontant des villes complètement démolies(séisme de 1976, à Tangshan, en Chine) qu’au long deslignes japonaises de Shinkansen dont les viaducs sontdémolis quand les tunnels restent indemnes (Kobe en1995). Au Japon, des résultats nombreux et concor-dants ont été obtenus grâce à des stations de mesuredans des centrales souterraines profondes de 100 à300 m. La théorie le confirme : pour les ondes venantde la profondeur, l’amplitude des déplacements estmoindre en surface qu’à l’intérieur (cf. le mouvementdit de lacet, qui explique l’amplitude accrue du balan-cement du dernier wagon d’un train). En outre, lesdiverses ondes de surface à forte composante horizon-tale sont particulièrement dommageables pour lesstructures construites sur le sol.

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Quelques remarques sur les exploitations par chambreset piliers abandonnés

Les méthodes d’exploitation des mines et carrièressouterraines sont nombreuses et variées. Elles cor-respondent aux caractéristiques morphologiques etgéotechniques des gisements et aux conditionstechnico-économiques des exploitations. Parmi cesméthodes, un certain nombre conduisent à exploiterle gisement en laissant des vides éventuellementréutilisables, mais la plupart ne le permettent pas(exploitations avec foudroyage ou remblayage,mines noyées par arrêt de l’exhaure).En fait, les mines et carrières souterraines qui lais-sent des vides réutilisables sont le plus souventdes exploitations en plateures, à relativement fai-ble profondeur, à l’écart des nappes phréatiques etexploitées par la méthode des chambres et piliersabandonnés.C’est une méthode très ancienne qui a été utiliséedans un grand nombre de gisements dans le monde(calcaire, gypse, sel, minerai de fer…) les vides lais-sés peuvent avoir de grandes dimensions.Il est évident que la réutilisation de ces vides imposeun contrôle rigoureux des caractéristiques géotech-niques des matériaux pour garantir la sécurité dansces vides ainsi que des travaux de confortement sinécessaire.Les procédures de ces contrôles doivent être fixéeset suivies par des laboratoires spécialisés.

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ser, le sous-sol est l’une d’elles et les cavités anthro-piques existantes offrent sans doute, sous certainesconditions, une opportunité. En effet, quelle est lavaleur du vide laissé par une ancienne exploitation, lavaleur d’une cavité existante ? La valeur patrimoniale,certes, témoignages de diverses natures, techniques,art, histoire, etc., mais aussi et surtout l’opportunitéd’un espace libre existant, d’une surface (tré-) foncièrepossible, parfois de connexions utiles. En ville, elle vapermettre de préserver ou (re)valoriser des espaces ensurface, d’accueillir des infrastructures (logistiques,services, réseaux…) ou des équipements divers en ayantun faible impact sur l’extérieur et, inversement, ellelimitera, pour ces équipements, les nuisances venuesde l’extérieur. Elle va permettre aussi de connecter desespaces entre eux et, si la continuité des galeries n’a pasencore été interrompue par des comblements, de relierou d’installer réseaux ou connexions.

UTILISATION PROSPECTIVE DES CARRIÈRES À L’ÉCHELLE DU TERRITOIRELes exemples de réutilisations que nous avons citésrépondent à des opportunités ponctuelles, souventloin des centres urbains. Or, en période de densifica-tion et de raréfaction du foncier disponible, ne peut-on envisager une approche des cavités existantes et desopportunités qu’elles présentent, à l’échelle d’un terri-toire et de manière plus systématique et systémique ?C’est-à-dire en les considérant dans leur environne-ment à la fois géomorphologique, économique,urbain (accès, connexions possible, proximités, etc.).Cela suppose d’avoir compris l’intérêt de l’utilisationde l’espace souterrain dans la ville moderne.Le moteur décisif d’une attitude nouvelle, d’un chan-gement dans les manières de faire, est l’intérêt écono-mique. Il convient d’avoir un autre regard sur lesanciennes carrières et de les considérer comme desfriches industrielles au même titre que celles de la sur-face : certains édifices doivent être détruits, d’autresprésentent des qualités et de l’intérêt à être conservéset transformés pour de nouveaux usages. Il en va demême des anciennes exploitations de matériaux aumême titre d’ailleurs que d’autres cavités existantes,telles que les anciennes constructions souterrainesdésaffectées. Elles représentent des continuités, desopportunités urbaines à considérer et à mettre en rela-tion avec les fonctions de la ville.Il est possible de trouver des reconversions autres quele remplissage par des déchets ou des déblais : si de telsusages rendent à court terme un service rémunérateur,ils condamnent toute évolution et stérilisent à jamaisdes volumes en friche qui pourraient trouver des re -conversions utiles et rémunératrices sur le long terme.L’exemple des carrières sous Paris et sa proche cou-ronne est intéressant : la qualité des calcaires et desgypses, par exemple, n’y a fourni que peu de grandsvolumes (on peut cependant citer les carrières deMeudon, d’Issy-les-Moulineaux…) et beaucoup d’en-tre ceux-ci, on peut le déplorer, ont été comblés telsqu’une partie des carrières de Gravelle sous le bois de

gement accessible et connu. La stabilité, toujourstransitoire, est menacée par des changements dans lescharges et leur répartition, dont les charges dues à l’eausouterraines par les altérations et les dissolutions, quisont susceptibles de répondre à des modifications cli-matiques, comme par exemple un changement de lacirculation de l’air à l’intérieur.Sans comparaison avec la durée de stabilité de certainsvides naturels, estimée en millions d’années, certainsouvrages creusés par l’homme manifestent des duréesde vie stable qui dépassent le siècle, ainsi le tunnel duMalpas où passe le canal du Midi depuis 345 ans, voirele millénaire, comme l’aqueduc souterrain d’Eupali-nos à Samos en Grèce.L’inondation est un risque très important de tout amé-nagement souterrain, dont les accès doivent être proté-gés du ruissellement, de la montée du niveau des coursou plans d’eau voisins (crue de rivière ou tsunami), ycompris par écroulement rocheux dans un lac ou fjord,et par destruction de barrage, sans négliger la mise enœuvre de portes étanches. La pollution de l’air inté-rieur peut être redoutable dans des espaces confinés.

CONDITIONS INITIALESEntre avantages et difficultés, la nature des terrains etles conditions de la création des vides miniers consti-tuent des conditions très largement variables et doncplus ou moins favorables à telle ou telle réutilisation :à première vue, une carrière de granite est supposéeplus durable qu’une carrière de sable, mais si le sableest homogène, légèrement cimenté, et bien drainé, lacavité peut durer plus longtemps que dans un granitetraversé par une zone broyée aquifère. Les cavernescreusées dans le sel gemme sont à la merci d’une infil-tration d’eau. L’observation régulière des parois despiliers et celle des toits sont nécessaires, complétéesparfois par un programme de mesures. Le creusementà l’explosif peut avoir fissuré le massif au point de com-promettre sa stabilité.

Réutilisations nouvelles à inventerRISQUE OU OPPORTUNITÉ ?En zone urbaine particulièrement ou péri-urbaine,par les édiles comme par les institutions responsablesde la sécurité des carrières (l’IGC à Paris et sa petitecouronne), les carrières abandonnées sont abordéescomme un “risque”. Or, si le risque est bien réel, lemeilleur moyen de le prévenir est de pouvoir surveil-ler l’évolution d’une carrière en étant dedans !La notion de valorisation n’est pas encore admise etc’est le bourrage qui prévaut, mais les comblements,parce que, dans la majeure partie des cas, ils se réali-sent de manière aléatoire, au rythme et à l’échelle desinterventions sur les propriétés de surface, obstruentles accès, rendent inaccessibles nombre de cavités,aération et circulation d’eau ne sont pas contrôlables :le risque demeure.Dans la ville dense, toute surface, tout espace est pré-cieux. Si la ville durable doit renouer avec les res-sources du territoire où elle est implantée et les valori-

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Page 14: Les nouvelles technologies au service du …lasim.org/images/Dossiers/mc212_p2.pdf · projet sommaire [APS], avant-projet détaillé [APD] et projet d’exécution) que les grands

elle peut répondre d’une façon satisfaisante aux be -soins urgents d’une agglomération.Extraire un matériau marchand et créer une cavitéutile, l’une de ces activités n’est trop souvent qu’unsous-produit fatal de l’autre, alors que le cumul peutavoir de multiples avantages tant pratiques qu’écono-miques, comme l’a montré l’exemple de Kansas City.Le volume de tout vide nouveau a deux valeurs : l’uneétant la valeur du matériau extrait, l’autre celle de l’es-pace dégagé. Bien que le rapport des deux puisse varierconsidérablement d’un cas à l’autre, leur somme esttoujours supérieure à chacune prise séparément. Ilvaut donc toujours la peine d’envisager le doublet, etde prendre dans la phase exploitation les mesuresfavorables à une deuxième vie.La gestion optimale des ressources du sous-sol exigeune vue à grande échelle et à long terme. n

Monique Labbé, Pierre Duffaut, Pierre Gurs, AFTES, Comité Espace souterrain

Vincennes. Il faut donc chercher plus loin, dans lapériphérie parisienne, des volumes plus hauts, plusvastes, parcourables en véhicules, par exemple, maisces données ne sont pas forcément un frein : à chaquemorphologie de carrière peut correspondre des utili-sations, à chaque territoire d’implantation peuventcorrespondre des usages utiles.Avec la chambre de commerce et d’industrie, l’agencede développement économique et le conseil généraldu Val-de-Marne, nous avons croisé la carte des reliefs,des réseaux routiers et ferrés et des carrières avec celledes demandes en immobilier d’entreprise dans ledépartement : elles font apparaître des coïncidencesintéressantes. Idem pour la logistique et ses besoins enlocaux de stockage ou de transfert modal de la grandecouronne –  où existent les plus belles carrières  –jusqu’aux lisières des villes.

LE PROJET DE RECHERCHE VILLE 10D-VILLE D’IDÉESÀ l’évidence, toutes les carrières ne sont pas valorisa-bles, leur capacité à “muter” dépend de différents cri-tères à apprécier et à mesurer : stabilité, ambiance,humidité, dimension et qualité de l’espace, localisa-tion par rapport à la surface, accessibilité, etc.Il dépend aussi du type d’usage souhaité. La mutabi-lité et la valorisation des carrières sont un des axes derecherche du projet national de recherche Ville 10D-Ville d’Idées. Il propose une classification des caracté-ristiques des vides ainsi qu’une classification desouvrages pouvant utiliser d’anciens vides carriers :– ouvrages de types flux (galeries/parking) ;– ouvrages de type vie (équipements…) ;– ouvrages de type utilité publique (bassin d’orage…) ;– ouvrages de type logistique urbaine (espace logis-

tique urbain).Le projet de Georges Lépine (cf. figure 4) n’est pas uneutopie, peut-être même a-t-il inspiré les fondateurs deSubtropolis à Kansas City. Il prouve que nous avonssans doute, sous le bois de Vincennes, manqué uneopportunité. Il est encore temps de prendre en consi-dération les vides carriers qui ont encore gardé leurintégrité avant qu’il ne soit trop tard.

ConclusionsLa réutilisation des vides souterrains résultant de l’ac-tivité des carrières et mines souterraines a une longuehistoire. Dans des terrains favorables, lœss de Chine,craie ou faluns en France, par exemple, la double utili-sation a été longtemps la règle pour les artisans carrierscependant que des circonstances particulières, no -tamment les températures extrêmes du grand Nord oudes déserts brûlants pouvaient ailleurs conduire lesmineurs jusqu’à habiter sous terre. Les limites entre letroglodytisme pur et la réutilisation d’exploitationssouterraines sont loin d’être strictes bien au contraire.Le site de Kansas City représente à ce jour le modèle leplus abouti. Le recul manque pour établir une hiérar-chie des usages susceptible de choisir dans chaque casparticulier la solution optimale : on conçoit que lecomblement ne soit pas la solution la plus noble, mais

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