12
Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Synthèse Les références internationales en matière de bioéthique Khady Badiane Cabinet Devers-Soula, 22, rue Constantine, 69001 Lyon, France Disponible sur Internet le 15 avril 2008 Résumé La bioéthique conduit à une réflexion qui tend à l’universalisme, et en ce domaine, toute règle de droit doit être de type international. Les références sont particulièrement nombreuses, et cette étude propose un classement des plus importantes d’entre elles. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. L’éthique est la science des morales. Droit et éthique s’affirment sur des registres différents; l’un ne peut être indifférent à l’autre et inversement, mais l’imbrication de ces deux domaines n’avait rien d’évident. C’est aujourd’hui une réalité, sous l’angle de la bioéthique, dès lors que les applications de la science, notamment par la rencontre entre la médecine et la biologie, pose des questions mettant en jeu les données humaines les plus essentielles. Ce nouveau domaine du droit, par sa dimension universelle, s’est naturellement développé sur le plan international, car une règle de bioéthique qui n’aurait d’application qu’à l’intérieur des frontières d’un État resterait sans autorité. La présente recherche vise à réunir les références internationales les plus pertinentes en matière de bioéthique. 1. Références mondiales 1.1. L’Organisation des Nations unies Il faut tout d’abord citer deux textes fondamentaux, qui ne traitent pas directement de bioé- thique, mais qui posent une définition générale des droits de la personne, exprimant la philosophie de la bioéthique internationale : Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ; Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ; Adresse e-mail : [email protected]. 1629-6583/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ddes.2008.02.003

Les références internationales en matière de bioéthique

  • Upload
    khady

  • View
    212

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Les références internationales en matière de bioéthique

Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

Synthèse

Les références internationales en matière de bioéthique

Khady BadianeCabinet Devers-Soula, 22, rue Constantine, 69001 Lyon, France

Disponible sur Internet le 15 avril 2008

Résumé

La bioéthique conduit à une réflexion qui tend à l’universalisme, et en ce domaine, toute règle de droitdoit être de type international. Les références sont particulièrement nombreuses, et cette étude propose unclassement des plus importantes d’entre elles.© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

L’éthique est la science des morales. Droit et éthique s’affirment sur des registres différents ;l’un ne peut être indifférent à l’autre et inversement, mais l’imbrication de ces deux domainesn’avait rien d’évident. C’est aujourd’hui une réalité, sous l’angle de la bioéthique, dès lors queles applications de la science, notamment par la rencontre entre la médecine et la biologie, posedes questions mettant en jeu les données humaines les plus essentielles.

Ce nouveau domaine du droit, par sa dimension universelle, s’est naturellement développésur le plan international, car une règle de bioéthique qui n’aurait d’application qu’à l’intérieurdes frontières d’un État resterait sans autorité. La présente recherche vise à réunir les référencesinternationales les plus pertinentes en matière de bioéthique.

1. Références mondiales

1.1. L’Organisation des Nations unies

Il faut tout d’abord citer deux textes fondamentaux, qui ne traitent pas directement de bioé-thique, mais qui posent une définition générale des droits de la personne, exprimant la philosophiede la bioéthique internationale :

• Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ;• Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ;

Adresse e-mail : [email protected].

1629-6583/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.ddes.2008.02.003

Page 2: Les références internationales en matière de bioéthique

58 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

D’autres travaux de l’ONU sont à citer, qui complètent ce cadre général :

• Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale :Résolution Ass. 2106 A(XX) du 21 décembre 1965 ;

• Utilisation du progrès de la science et de la technique dans l’intérêt de la paix et au profit del’humanité : Résolution 3384 (XXX), 10 novembre 1975 ;

• Déclaration 34/47 sur les droits des personnes handicapées, du 9 décembre 1975 ;• Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes :

Résolution Ass. 34/180 du 18 décembre 1979 ;• Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants :

Résolution Ass. 39/46 du 10 décembre 1984 ;• Convention relative aux droits de l’enfant : Résolution 44/25 du 20 novembre 1989 ;• Protection des personnes atteintes de maladie mentale et amélioration des soins de santé

mentale : Résolution 46/119 du 17 décembre 1991.

Extrait :Principe 11.15. « Les essais cliniques et les traitements expérimentaux ne doivent jamais être

menés sur un patient sans son consentement donné en connaissance de cause, étant entenducependant qu’un patient qui n’est pas capable de donner un tel consentement peut faire l’objetd’un essai clinique ou d’un traitement expérimental particulier mais uniquement après examenet approbation d’un organisme indépendant et compétent spécialement constitué à cette fin. »

• Droits de l’homme et progrès de la science et des techniques : Résolution de la commissiondes Droits de l’homme E/CN.4/1995/74, du 15 novembre 1994.

• Droits de l’homme et bioéthique : Résolution de la commission des Droits de l’homme, 1997/71du 16 avril 1997.

• Déclaration du millénaire : libre accès à l’information relative aux connaissances scientifiques,du 8 septembre 2000.

1.2. L’Unesco

Trois instances ont compétence en matière de bioéthique :

• le Comité international de bioéthique (CIB), créé en 1993, qui est l’organe expert ;• la Commission mondiale d’éthique des connaissances scientifiques et des technologies

(Comest), créée en 1998, chargée de conseiller l’Unesco ;• l’Observatoire mondial de l’éthique (GEObs), système de bases de données de portée mondiale

sur l’éthique et la bioéthique (site : [email protected]).

L’Unesco s’est prononcé par des textes généraux qui intéressent la matière :

• Convention de l’Unesco concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine del’enseignement, 14 décembre 1960.

• Recommandation de l’Unesco concernant la condition des chercheurs scientifiques,20 novembre 1974.

• Déclaration de l’Unesco sur la race et les préjugés raciaux, 27 novembre 1978.

Page 3: Les références internationales en matière de bioéthique

K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 59

• Déclaration de l’Unesco sur les responsabilités des générations présentes envers les générationsfutures, 12 novembre 1997.

• Déclaration universelle de l’Unesco sur la diversité culturelle, 2 novembre 2001.

Surtout, l’Unesco a été le cadre international dans lequel ont été adoptés les trois textes fon-dateurs de la bioéthique internationale, avec la Déclaration universelle sur le génome humain du11 novembre 1997, la Déclaration internationale sur les données génétiques humaines, 16 octobre2003, et enfin la Déclaration universelle sur la bioéthique et les Droits de l’homme, du19 octobre2005.

L’importance de ces textes peu connus, qui sont pourtant la trame de la bioéthique internatio-nale, justifie que nous en reproduisions de larges extraits.

1.2.1. Déclaration universelle sur le génome humain de l’UNESCO du 11 novembre 1997« A. La dignité humaine et le génome humain

« Article premier

« Le génome humain sous-tend l’unité fondamentale de tous les membres de la famillehumaine, ainsi que la reconnaissance de leur dignité intrinsèque et de leur diversité. Dansun sens symbolique, il est le patrimoine de l’humanité.

« Article 2

« (a) Chaque individu a droit au respect de sa dignité et de ses droits, quelles que soientses caractéristiques génétiques.

« (b) Cette dignité impose de ne pas réduire les individus à leurs caractéristiques génétiqueset de respecter le caractère unique de chacun et leur diversité.

« Article 3

« Le génome humain, par nature évolutif, est sujet à des mutations. Il renferme des poten-tialités qui s’expriment différemment selon l’environnement naturel et social de chaqueindividu, en ce qui concerne notamment l’état de santé, les conditions de vie, la nutritionet l’éducation.

« Article 4

« Le génome humain en son état naturel ne peut donner lieu à des gains pécuniaires.

« B. Droits des personnes concernées

« Article 5

« (a) Une recherche, un traitement ou un diagnostic, portant sur le génome d’un individu, nepeut être effectué qu’après une évaluation rigoureuse et préalable des risques et avantagespotentiels qui leur sont liés et en conformité avec toutes autres prescriptions prévues parla législation nationale.

« (b) Dans tous les cas, le consentement préalable, libre et éclairé de l’intéressé(e) serarecueilli. Si ce(tte) dernier(e) n’est pas en mesure de l’exprimer, le consentement oul’autorisation seront obtenus conformément à la loi, et seront guidés par son intérêtsupérieur.

Page 4: Les références internationales en matière de bioéthique

60 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

« (c) Le droit de chacun de décider d’être informé ou non des résultats d’un examengénétique et de ses conséquences devrait être respecté.

« (d) Dans le cas de la recherche, les protocoles de recherche doivent être soumis, de plus,à une évaluation préalable, conformément aux normes ou lignes directrices nationales etinternationales applicables en la matière.

« (e) Si conformément à la loi une personne n’est pas en mesure d’exprimer son consen-tement, une recherche portant sur son génome ne peut être effectuée qu’au bénéfice directde sa santé, sous réserve des autorisations et des mesures de protection prescrites par laloi. Une recherche ne permettant pas d’escompter un bénéfice direct pour la santé ne peutêtre effectuée qu’à titre exceptionnel, avec la plus grande retenue, en veillant à n’exposerl’intéressé(e) qu’à un risque et une contrainte minimums et si cette recherche est effectuéedans l’intérêt de la santé d’autres personnes appartenant au même groupe d’âge ou setrouvant dans les mêmes conditions génétiques, et sous réserve qu’une telle recherche sefasse dans les conditions prévues par la loi et soit compatible avec la protection des droitsindividuels de la personne concernée.

« Article 6

« Nul ne doit faire l’objet de discriminations fondées sur ses caractéristiques génétiques,qui auraient pour objet ou pour effet de porter atteinte à ses droits individuels et à seslibertés fondamentales et à la reconnaissance de sa dignité.

Les articles 7, 8 et 9 traitent de la confidentialité, de la réparation des dommages causés, et dunécessaire recours à la loi pour la limitation des droits.

« C. Recherches sur le génome humain

« Article 10

« Aucune recherche concernant le génome humain, ni aucune de ses applications, en par-ticulier dans les domaines de la biologie, de la génétique et de la médecine, ne devraitprévaloir sur le respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de la dignitéhumaine des individus ou, le cas échéant, de groupes d’individus.

« Article 11

« Des pratiques qui sont contraires à la dignité humaine, telles que le clonage à des fins dereproduction d’êtres humains, ne doivent pas être permises. Les États et les organisationsinternationales compétentes sont invités à coopérer afin d’identifier de telles pratiques etde prendre, au niveau national ou international, les mesures qui s’imposent, conformémentaux principes énoncés dans la présente Déclaration. »

L’article 12 traite de la liberté de la recherche, les articles 13 à 16 des conditions d’exercice del’activité scientifique, et les articles 17 et suivants de la solidarité et coopération internationale.

1.2.2. Déclaration internationale sur les données génétiques humaines de l’Unesco, du16 octobre 2003

« Article 3: Identité de la personne

Page 5: Les références internationales en matière de bioéthique

K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 61

« Chaque individu a une constitution génétique caractéristique. Toutefois, l’identité d’unepersonne ne saurait se réduire à des caractéristiques génétiques, puisqu’elle se constituepar le jeu de facteurs éducatifs, environnementaux et personnels complexes, ainsi que derelations affectives, sociales, spirituelles et culturelles avec autrui, et qu’elle implique unélément de liberté.

« Article 4: Spécificité

« (a) La spécificité des données génétiques humaines tient au fait :

« (i) qu’elles peuvent indiquer des prédispositions génétiques concernant des individus ;

« (ii) qu’elles peuvent avoir une incidence significative sur la famille, y compris la des-cendance, sur plusieurs générations, et dans certains cas sur l’ensemble du groupe auquelappartient la personne concernée ;

« (iii) qu’elles peuvent contenir des informations dont l’importance n’est pas nécessaire-ment connue au moment où les échantillons biologiques sont collectés ;

« (iv) qu’elles peuvent revêtir une importance culturelle pour des personnes ou des groupes.

« (b) Il faut accorder l’attention qui convient au caractère sensible des données géné-tiques humaines et assurer un niveau de protection approprié à ces données ainsi qu’auxéchantillons biologiques.

« Article 5: Finalités

« Les données génétiques humaines et les données protéomiques humaines peuvent êtrecollectées, traitées, utilisées et conservées uniquement aux fins de :

« (i) diagnostic et soins de santé, y compris le dépistage et les tests prédictifs ;

« (ii) recherche médicale et autre recherche scientifique, y compris les études épidémio-logiques, en particulier les études de génétique des populations, ainsi que les étudesanthropologiques ou archéologiques ci-après désignées collectivement par l’expression“recherche médicale et scientifique” ;

« (iii) médecine légale et procédures civiles ou pénales et autres voies de droit, compte tenudes dispositions de l’alinéa (c) de l’article premier.

« (iv) ou toute autre fin compatible avec la Déclaration universelle sur le génome humainet les droits de l’homme et avec le droit international des droits de l’homme.

Article 6 : ProcéduresArticle 7 : Non-discrimination et non-stigmatisationArticle 8 : ConsentementArticle 9 : Retrait du consentementArticle 10 : Droit de décider d’être informé ou non des résultats de la rechercheArticle 11 : Conseil génétiqueArticle 12 : Collecte d’échantillons biologiques aux fins de la médecine légale ou de procédures

civiles ou pénales ou autres voies de droitArticle 13 : AccèsArticle 14 : Vie privée et confidentialitéArticle 15 : Exactitude, fiabilité, qualité et sécurité

Page 6: Les références internationales en matière de bioéthique

62 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

Article 16 : Changement de finalitéArticle 17 : Echantillons biologiques conservésArticle 18 : Circulation et coopération internationaleArticle 19 : Partage des bienfaitsArticle 20 : Conservation

1.2.3. Déclaration universelle sur la bioéthique et les Droits de l’homme, de l’Unesco du19 octobre 2005

Article 3 – Dignité humaine et Droits de l’homme

« La dignité humaine, les Droits de l’homme et les libertés fondamentales doivent être pleinementrespectés.

Les intérêts et le bien-être de l’individu devraient l’emporter sur le seul intérêt de la science oude la société. »

Article 4 – Effets bénéfiques et effets nocifs

« Dans l’application et l’avancement des connaissances scientifiques, de la pratique médicaleet des technologies qui leur sont associées, les effets bénéfiques directs et indirects pour lespatients, les participants à des recherches et les autres individus concernés, devraient êtremaximisés et tout effet nocif susceptible d’affecter ces individus devrait être réduit au minimum. »

Article 5 – Autonomie et responsabilité individuelle

« L’autonomie des personnes pour ce qui est de prendre des décisions, tout en en assumantla responsabilité et en respectant l’autonomie d’autrui, doit être respectée. Pour les personnesincapables d’exercer leur autonomie, des mesures particulières doivent être prises pour protégerleurs droits et intérêts. »

Article 6 – Consentement

« Toute intervention médicale de caractère préventif, diagnostique ou thérapeutique ne doit êtremise en œuvre qu’avec le consentement préalable, libre et éclairé de la personne concernée,fondé sur des informations suffisantes. Le cas échéant, le consentement devrait être exprès et lapersonne concernée peut le retirer à tout moment et pour toute raison sans qu’il en résulte pourelle aucun désavantage ni préjudice.

Des recherches scientifiques ne devraient être menées qu’avec le consentement préalable, libre,exprès et éclairé de la personne concernée. L’information devrait être suffisante, fournie sousune forme compréhensible et indiquer les modalités de retrait du consentement. La personneconcernée peut retirer son consentement à tout moment et pour toute raison sans qu’il en résultepour elle aucun désavantage ni préjudice. Des exceptions à ce principe devraient n’être faitesqu’en accord avec les normes éthiques et juridiques adoptées par les États et être compatiblesavec les principes et dispositions énoncés dans la présente Déclaration, en particulier à l’article27, et avec le droit international des Droits de l’homme.

Dans les cas pertinents de recherches menées sur un groupe de personnes ou une communauté,l’accord des représentants légaux du groupe ou de la communauté concerné peut devoir aussi être

Page 7: Les références internationales en matière de bioéthique

K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 63

sollicité. En aucun cas, l’accord collectif ou le consentement d’un dirigeant de la communautéou d’une autre autorité ne devrait se substituer au consentement éclairé de l’individu. »

Article 7 – Personnes incapables d’exprimer leur consentementArticle 8 – Respect de la vulnérabilité humaine et de l’intégrité personnelleArticle 9 – Vie privée et confidentialitéArticle 10 – Égalité, justice et équitéArticle 11 – Non-discrimination et non-stigmatisationArticle 12 – Respect de la diversité culturelle et du pluralismeArticle 13 – Solidarité et cooperationArticle 14 – Responsabilité sociale et santéArticle 15 – Partage des bienfaitsArticle 16 – Protection des générations futuresArticle 17 – Protection de l’environnement, de la biosphère et de la biodiversitéArticle 18 et suivants : Application des principes

1.3. L’Association médicale mondiale

• Code international d’éthique médicale de l’Association médicale mondiale, adopté à Londres,en octobre 1949 et amendé en 1968, 1983 et 2006.

• Déclaration d’Helsinki de l’Association médicale mondiale : principes éthiques applicablesaux recherches médicales sur des sujets humains, adoptée en Juin 1964, et amendée en 1964,1975, 1983, 1989, 1996 et 2000.

En voici des extraits :

A. Introduction

« La Déclaration d’Helsinki, élaborée par l’Association médicale mondiale, constitue une décla-ration de principes éthiques dont l’objectif est de fournir des recommandations aux médecins etautres participants à la recherche médicale sur des êtres humains. Celle-ci comprend égalementles études réalisées sur des données à caractère personnel ou des échantillons biologiques nonanonymes.

La mission du médecin est de promouvoir et de préserver la santé de l’être humain. Il exerce cedevoir dans la plénitude de son savoir et de sa conscience.

Le Serment de Genève de l’Association médicale mondiale lie le médecin dans les termes sui-vants : « La santé de mon patient sera mon premier souci » et le Code international d’éthiquemédicale énonce que « le médecin devra agir uniquement dans l’intérêt de son patient lorsqu’illui procure des soins qui peuvent avoir pour conséquence un affaiblissement de sa conditionphysique ou mentale ».

Les progrès de la médecine sont fondés sur des recherches qui, in fine, peuvent imposer de recourirà l’expérimentation humaine.

Dans la recherche médicale sur les sujets humains, les intérêts de la science et de la société nedoivent jamais prévaloir sur le bien-être du sujet.

L’objectif essentiel de la recherche médicale sur des sujets humains doit être l’amélioration desméthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention, ainsi que la compréhension des causeset des mécanismes des maladies. Les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention,

Page 8: Les références internationales en matière de bioéthique

64 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

même les plus éprouvées, doivent constamment être remises en question par des recherches por-tant sur leur efficacité, leur efficience et leur accessibilité.

Dans la recherche médicale comme dans la pratique médicale courante, la mise en œuvre de laplupart des méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention expose à des risques et àdes contraintes.

La recherche médicale est soumise à des normes éthiques qui visent à garantir le respect de tousles êtres humains et la protection de leur santé et de leurs droits. Certaines catégories de sujetssont plus vulnérables que d’autres et appellent une protection adaptée. Les besoins spécifiquesdes sujets défavorisés au plan économique comme au plan médical doivent être identifiés. Uneattention particulière doit être portée aux personnes qui ne sont pas en mesure de donner ou derefuser elles-mêmes leur consentement, à celles qui sont susceptibles de donner leur consentementsous la contrainte, à celles qui ne bénéficieront pas personnellement de la recherche et à cellespour lesquelles la recherche est conduite au cours d’un traitement.

L’investigateur doit être attentif aux dispositions éthiques, légales et réglementaires applicablesà la recherche sur les sujets humains dans son propre pays ainsi qu’aux règles internationalesapplicables. Aucune disposition nationale d’ordre éthique, légal et réglementaire ne doit conduireà affaiblir ou supprimer les mesures protectrices énoncées dans la présente déclaration. »

Le texte traite ensuite des principes fondamentaux applicables à toute forme de recherchemédicale et des principes applicables à la recherche médicale conduite au cours d’un traitement.

2. Références européennes

2.1. Le Conseil de l’Europe

Le Conseil de l’Europe est très présent sur le terrain de la bioéthique. Il s’est exprimé parnombre de délibérations de ses instances – le comité directeur pour la bioéthique, la conférencepermanente des comités nationaux d’éthique, l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europeet le Commissaire européen aux Droits de l’homme – et il a été le cadre dans lequel a été adoptéela Convention sur les Droits de l’homme et la biomédecine d’Oviedo, le 4 avril 1997.

2.1.1. Comité directeur pour la bioéthique

• Dépistage génétique anténatal, diagnostic génétique anténatal et conseil génétique : Recom-mandation R(1990)13, 21 juin 1990.

• Utilisation des analyses de l’acide désoxyribonucléique (ADN) dans le cadre du système dejustice pénale : Recommandation R (1992)1, 10 février 1992.

• Tests et dépistage génétiques à des fins médicales : Recommandation R (1992) 3, 10 février1992.

• Rapport sur la génétique destiné à la réunion exploratoire du groupe de travail sur la génétiquehumaine. DIR/JUR(97)13 bis, 27 octobre 1997.

• Recueil sélectif de jurisprudence en matière de bioéthique et de droit médical :CDBI/INF(1998)7.

• Assistance médicale à la procréation, protection de l’embryon humain et clonage (Étude com-parative sur la situation dans 44 pays) : Rapport CDBI/INF(98)8, 2 juin 1998.

• Euthanasie, réponses au questionnaire pour les États membres : CDBI/INF (2003) 8, 20 janvier2003.

Page 9: Les références internationales en matière de bioéthique

K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 65

• Protection de l’embryon humain in vitro : Rapp. CDBI-CO-GT3 (2003) 3, 3 sept. 2003.• Protection des Droits de l’homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux :

Recommandation (2004)10 du comité des ministres, 22 septembre 2004.• Accès à la procréation médicalement assistée (PMA) et droit à la connaissance de ses origines

pour les enfants nés après PMA : CDBI/INF (2005) 7, 12 juil. 2005.• Recherche utilisant le matériel biologique humain : Recommandation R (2006) 4 adopté par le

CDBI le 20 octobre 2005, et par le comité des ministres le 15 mars 2006.

2.1.2. Conférence permanente des comités nationaux d’éthique• Étude comparative sur le fonctionnement des comités nationaux d’éthique dans 18 états

membres : Cometh(98)13, 4 nov. 1998.• Convention sur la protection des données à caractères personnel : STE n◦ 108, 28 janv. 2001.

2.1.3. Travaux de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe• Utilisation d’embryons et fœtus humains à des fins diagnostiques, thérapeutiques, scientifiques,

industrielles et commerciales : Recommandation 1046 (1986)1, 24 septembre 1986.• Droits de l’homme et dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la

médecine : Avis n◦ 184 (1995)1, 2 février 1995.• Droits de l’homme et biomédecine : Avis n◦ 198 (1996)1, 26 septembre 1996.• Xénotransplantation : Recommandation 1399 (1999)1, 29 janvier 1999.• Biotechnologie et propriété intellectuelle : Recommandation 1425 (1999) 1, 23 septembre 1999.• Biotechnologies : Recommandation 1468 (2000) 1, 29 juin 2000.• Protection du génome humain : Recommandation 1512 (2001) 1, 25 avril 2001.• Harmonisation des règles en matière d’autopsie : Recommandation n◦ 1159 (1991) 1, 28 juin

1991.• Trafic d’organes en Europe : Recommandation 1611 (2003) 1, 25 juin 2003.• Recherche sur les cellules souches humaines : Résolution 1352 (2003)1, 2 octobre 2003.• Droits de l’homme et recherche biomédicale : Avis no 252 (2004) 1, 30 avril 2004.

2.1.4. Commissaire européen aux droits de l’homme• Droits des étrangers et exécution des décisions d’expulsion : Recommandation

CommDH(2001)19/19 septembre 2001.• Garantie des droits lors de l’arrestation et de la détention des personnes à la suite des opérations

dites de « nettoyage » en République tchétchène de la Fédération de Russie.• Recommandation CommDH(2002)17/30 mai 2002.• Stérilisation des femmes en République slovaque : Recommandation CommDH(2003)12,

17 octobre 2003.• Institutions nationales de droits de l’homme : Rapport CommDH/NHRI(2004)2, 26 novembre

2004.• Droits de l’homme des Roms, Sintis et Gens du voyage en Europe : Rapport

CommDH(2006)1/15 février 2006.

2.1.5. Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine du Conseil de l’Europe,Oviedo, 4 avril 1997

« Chapitre I - Dispositions générales

Page 10: Les références internationales en matière de bioéthique

66 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

« Article 1 – Objet et finalité

« Les Parties à la présente Convention protègent l’être humain dans sa dignité et son identitéet garantissent à toute personne, sans discrimination, le respect de son intégrité et de sesautres droits et libertés fondamentales à l’égard des applications de la biologie et de lamédecine. « Chaque Partie prend dans son droit interne les mesures nécessaires pour donnereffet aux dispositions de la présente Convention.

« Article 2 – Primauté de l’être humain

« L’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société oude la science.

« « Article 3 – Accès équitable aux soins de santé

« Les Parties prennent, compte tenu des besoins de santé et des ressources disponibles, lesmesures appropriées en vue d’assurer, dans leur sphère de juridiction, un accès équitableà des soins de santé de qualité appropriée.

« « Article 4 – Obligations professionnelles et règles de conduite

« Toute intervention dans le domaine de la santé, y compris la recherche, doit être effectuéedans le respect des normes et obligations professionnelles, ainsi que des règles de conduiteapplicables en l’espèce.

« Chapitre II – Consentement

« Article 5 – Règle générale

« Une intervention dans le domaine de la santé ne peut être effectuée qu’après que lapersonne concernée y a donné son consentement libre et éclairé. Cette personne recoitpréalablement une information adéquate quant au but et à la nature de l’intervention ainsique quant à ses conséquences et ses risques. La personne concernée peut, à tout moment,librement retirer son consentement.

« Article 6 – Protection des personnes n’ayant pas la capacité de consentir

« 1. Sous réserve des articles 17 et 20, une intervention ne peut être effectuée sur unepersonne n’ayant pas la capacité de consentir, que pour son bénéfice direct.

« 2. Lorsque, selon la loi, un mineur n’a pas la capacité de consentir à une intervention,celle-ci ne peut être effectuée sans l’autorisation de son représentant, d’une autorité oud’une personne ou instance désignée par la loi. L’avis du mineur est pris en considérationcomme un facteur de plus en plus déterminant, en fonction de son âge et de son degré dematurité.

« 3. Lorsque, selon la loi, un majeur n’a pas, en raison d’un handicap mental, d’une maladieou pour un motif similaire, la capacité de consentir à une intervention, celle-ci ne peut êtreeffectuée sans l’autorisation de son représentant, d’une autorité ou d’une personne ouinstance désignée par la loi. La personne concernée doit dans la mesure du possible êtreassociée à la procédure d’autorisation.

« 4. Le représentant, l’autorité, la personne ou l’instance mentionnés aux paragraphes 2 et3 recoivent, dans les mêmes conditions, l’information visée à l’article 5.

Page 11: Les références internationales en matière de bioéthique

K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68 67

« 5. L’autorisation visée aux paragraphes 2 et 3 peut, à tout moment, être retirée dansl’intérêt de la personne concernée.

« Article 7 – Protection des personnes souffrant d’un trouble mental

« La personne qui souffre d’un trouble mental grave ne peut être soumise, sans son consen-tement, à une intervention ayant pour objet de traiter ce trouble que lorsque l’absenced’un tel traitement risque d’être gravement préjudiciable à sa santé et sous réserve desconditions de protection prévues par la loi comprenant des procédures de surveillance etde contrôle ainsi que des voies de recours.

« Article 8 – Situations d’urgence

Lorsqu’en raison d’une situation d’urgence le consentement approprié ne peut être obtenu,il pourra être procédé immédiatement à toute intervention médicalement indispensable pourle bénéfice de la santé de la personne concernée.

« Article 9 – Souhaits précédemment exprimés

« Les souhaits précédemment exprimés au sujet d’une intervention médicale par un patientqui, au moment de l’intervention, n’est pas en état d’exprimer sa volonté seront pris encompte. »

Sont ensuite traitées les questions de la vie privée et du droit à l’information, du génomehumain, de la recherche scientifique, des prélèvement d’organes et de tissus sur des donneursvivants à des fins de transplantation, et de l’interdiction du profit et utilisation d’une partiedu corps humain.

Un protocole additionnel portant interdiction du clonage d’être humains a été conclu à Paris,le 12 janvier 1999. En voici des extraits :

« Article 1

« Est interdite toute intervention ayant pour but de créer un être humain génétiquement identiqueà un autre être humain vivant ou mort.

Au sens du présent article, l’expression être humain « génétiquement identique » à un autre êtrehumain signifie un être humain ayant en commun avec un autre l’ensemble des gènes nucléaires. »

Voir aussi : protocole additionnel relatif à la transplantation d’organes et de tissus d’originehumaine, Strasbourg, 24 janv. 2002.

2.2. Union européenne

• Protection des animaux utilisés à des fins expérimentales : Dir. 86/609/CEE du Conseil, 24 nov.1986.

• Produits dérivés du sang et du plasma humain : Dir. 89/381/CEE, 14 juin 1989.• Clonage : Résolutions du Parlement européen B4-0209, 0213, 0214, 0225, 0242/97 du 14 avril

1997.• Brevetabilité des biotechnologies : Dir. 98/44/CE du Parlement européen et du Conseil, 6 juillet

1998.• Régime applicable aux procédés de diagnostic in vitro : Dir 98/79/CE du Parlement européen

et du Conseil, 27 octobre 1998.

Page 12: Les références internationales en matière de bioéthique

68 K. Badiane / Droit Déontologie & Soin 8 (2008) 57–68

• Régime général des dispositifs médicaux, incluant les substances dérivées du sang et du plasmahumain : Dir. 2000/70/CE du Parlement européen et du Conseil, 16 nov. 2000.

• Charte des droits fondamentaux du 7 décembre 2000.• Harmonisation des protocoles de recherche biomédicale : Dir. 2001/20/CE du Parlement euro-

péen et du Conseil, 4 avril 2001.• Incidences éthiques, juridiques, économiques et sociales de la génétique humaine : Rapport

A5-0391/2001, 8 novembre 2001.• Code communautaire relatif aux médicaments : Dir. 2001/83/CE du parlement européen et du

Conseil, 31 mars 2004.• Agence européenne pour l’évaluation des médicaments : Règl. 2309/93, 22 juil. 2003 et Règl.

726/2004, 31 mars 2004.• Autorisation de mise sur le marché des thérapies géniques, cellulaires et tissulaires : vote d’une

proposition à la commission, IP/07/566, 25 avril 2007.• Rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États

membres relatives à l’application de bonnes pratiques cliniques dans la conduite d’essais cli-niques de médicaments à usage humain : Directive 2001/20/CE du Parlement européen et duConseil, 4 avril 2001.

• Protection juridique des inventions biotechnologiques : Directive 98/44/CE du Parlement euro-péen et du Conseil, 6 juillet 1998.

• Traitement des données à caractère personnel et libre circulation de ces données : Directive95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, 24 octobre 1995.