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40 pratique exercice professionnel exercice professionnel Actualités pharmaceutiques n° 475 Juin 2008 Pour exercer en conformité avec la réglementation en vigueur, le pharmacien titulaire doit disposer de documents obligatoirement présents à l’officine. Si certains de ces documents sont communs à toutes les entreprises, la plupart restent spécifiques des officines, lieux de préparation et de dispensation de produits sensibles. À l’officine, la tenue incorrecte, dans 36 % des cas, des registres obli- gatoires, tels que l’ordonnancier, le registre comptable des stupéfiants et celui des médicaments dérivés du sang, peut engendrer des lacunes concernant la traçabilité des actes de dispensation des médicaments. Registres régis par le Code du travail • Registre unique du personnel Comme chaque entreprise qui emploie des salariés, l’officine doit détenir un registre unique du personnel tenu à la disposition de l’inspecteur du travail. L’article L 200-1 du Code du travail prévoit que les « établis- sements industriels et commerciaux et leurs dépendances, de quelque nature qu’ils soient, publics ou privés, laïques ou religieux, même s’ils ont un caractère d’enseignement professionnel ou de bienfaisance, les offi- ces publics ou ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles et les syndicats professionnels et associations de quelque nature que ce soit » en disposent. Il doit mentionner les noms et prénoms de tous les salariés de l’entreprise quelles que soient la nature et la durée de leur contrat de travail dans l’ordre d’embauchage. Ces mentions sont portées sur le registre au moment de l’embauche et de façon indélébile. L’article R 620-3 prévoit que, pour chaque salarié, doivent figurer sur ce registre la nationalité, la date de naissance, le sexe, l’emploi, la qualification, la date d’entrée et de sortie de l’établissement, le motif de la sortie, la nature du contrat (durée déterminée ou non, travail temporaire, à temps partiel, mise à disposition par un groupement d’employeurs…), le numéro de Sécurité sociale, éventuellement la date de l’autorisation d’embauchage si celle-ci est requise, ainsi que le type et le numéro d’ordre de titre valant autorisation de travail pour les personnes de nationalité étrangère. Les mentions obligatoires portées sur ce registre doivent être conservées pendant cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié a quitté l’établissement. De même, un registre des observations et mises en demeure de l’Inspection du tra- vail doit être présent au sein de chaque officine. Les registres à l’officine © BSIP/Jose Oto Le registre unique du personnel doit mentionner les noms et prénoms de tous les salariés de l’officine.

Les registres à l’officine

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Page 1: Les registres à l’officine

40pratique

exercice professionnelexercice professionnel

Actualités pharmaceutiques • n° 475 • Juin 2008

Pour exercer en conformité

avec la réglementation

en vigueur, le pharmacien

titulaire doit disposer

de documents obligatoirement

présents à l’officine.

Si certains de ces documents

sont communs à toutes les

entreprises, la plupart restent

spécifiques des officines,

lieux de préparation et

de dispensation de produits

sensibles.

À l’officine, la tenue incorrecte, dans 36 % des cas, des registres obli-gatoires, tels que l’ordonnancier,

le registre comptable des stupéfiants et celui des médicaments dérivés du sang, peut engendrer des lacunes concernant la

traçabilité des actes de dispensation des médicaments.

Registres régis par le Code du travail• Registre unique du personnelComme chaque entreprise qui emploie des salariés, l’officine doit détenir un registre unique du personnel tenu à la disposition de l’inspecteur du travail. L’article L 200-1 du Code du travail prévoit que les « établis-sements industriels et commerciaux et leurs dépendances, de quelque nature qu’ils soient, publics ou privés, laïques ou religieux, même s’ils ont un caractère d’enseignement professionnel ou de bienfaisance, les offi-ces publics ou ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles et les syndicats professionnels et associations de quelque nature que ce soit » en disposent. Il doit mentionner les noms et prénoms de tous les salariés de l’entreprise quelles que soient la nature et la durée de leur contrat de travail dans l’ordre d’embauchage.

Ces mentions sont portées sur le registre au moment de l’embauche et de façon indélébile. L’article R 620-3 prévoit que, pour chaque salarié, doivent figurer sur ce registre la nationalité, la date de naissance, le sexe, l’emploi, la qualification, la date d’entrée et de sortie de l’établissement, le motif de la sortie, la nature du contrat (durée déterminée ou non, travail temporaire, à temps partiel, mise à disposition par un groupement d’employeurs…), le numéro de Sécurité sociale, éventuellement la date de l’autorisation d’embauchage si celle-ci est requise, ainsi que le type et le numéro d’ordre de titre valant autorisation de travail pour les personnes de nationalité étrangère. Les mentions obligatoires portées sur ce registre doivent être conservées pendant cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié a quitté l’établissement.De même, un registre des observations et mises en demeure de l’Inspection du tra-vail doit être présent au sein de chaque officine.

Les registres à l’officine

© BSIP/Jose OtoLe registre unique du personnel doit mentionner les noms et prénoms de tous les salariés de l’officine.•

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exercice professionnelexercice professionnel

Actualités pharmaceutiques • n° 475 • Juin 2008

• Document unique relatif à l’évaluation des risques en entrepriseL’article R 230-1 du Code du travail sti-pule que l’employeur transcrive et mette à jour les résultats de l’évaluation des risques pour la sécurité et la santé des travailleurs. Ce registre doit permettre d’identifier et d’évaluer les principaux dangers existant dans l’officine et de suivre les mesures mises en place pour y remédier.• Un règlement intérieur et un registre des délégués du personnel sont obligatoi-res pour les officines dont les effectifs sont supérieurs à vingt salariés, en dehors des apprentis.

Registres obligatoires régis par le Code de la santé publiqueEn dehors des documents que doivent tenir à jour toutes les entreprises, quels que soient leurs domaines d’activité, les phar-macies d’officine sont tenues de renseigner certains registres relatifs à leur activité spé-cifique. Outre les pharmacopées française et européenne, ainsi que le formulaire national ou encore le Guide des bonnes pratiques de préparations officinales (BPPO), les officines doivent disposer de documents permettant d’enregistrer les médicaments délivrés, en particulier ceux contenant des substances vénéneuses, des stupéfiants, des produits dérivés du sang humain ou issus de prépa-rations magistrales.

Sur l’ensemble de ces registres, des mentions obligatoires doivent figurer en première page :– nom et adresse, numéro et date de déli-vrance de la licence de la pharmacie ;– nom du pharmacien titulaire ;– date, numéro et préfecture d’enregistre-ment du diplôme ;– numéro d’inscription à l’Ordre des phar-maciens ;– date de création ou date d’acquisition et nom du précédent pharmacien titulaire.• OrdonnancierL’article R 5132-34 indique que « l’exécu-tion des ordonnances ou des commandes comportant des médicaments classés sur les listes des substances vénéneuses (listes I, II, stupéfiants) fait l’objet d’une transcription sur un registre spécifique ou d’un enregistrement permettant une édition spécifique ». L’ordonnancier est un registre comportant des pages numérotées sur lequel il est noté, pour chaque dispensation, la date de déli-vrance, le nom et l’adresse du prescripteur ou de l’auteur de la commande (le cas échéant,

il faut préciser s’il s’agit d’un prescripteur hospitalier, d’un spécialiste…), la dénomina-tion de la spécialité et sa forme, la quantité délivrée, le numéro d’ordre d’inscription, et les nom et adresse du patient. Les mentions doivent être renseignées sans rature ni sur-charge, aucune ligne ne devant rester vierge. Ce registre ou les enregistrements ainsi que les éditions de ces enregistrements par périodes maximales d’un mois doivent être conservés dix ans après leur fermeture.• Registre comptable des stupéfiantsLes articles R 5132-81 et 36 stipulent que toute acquisition, cession ou délivrance de stupéfiants doit être inscrite sur un registre spécial, coté. L’inscription des entrées et des sorties se fait mensuellement par relevé global comportant la date à laquelle il est établi (une balance mensuelle des entrées et sorties est portée au registre). L’inscrip-tion de chaque opération d’entrée sur le registre reçoit un numéro d’ordre qui peut s’appliquer à tous les produits ayant fait l’objet d’une livraison unique. Elle est faite au moment de l’opération sans blanc, ni rature, ni surcharge. Elle indique les nom, profession et adresse du cessionnaire ou du cédant, la quantité de produit acquis ou cédé, sa dénomination ou sa composition.L’inscription des sorties comporte :– pour les préparations, la désignation et la quantité de stupéfiants utilisés, ainsi que le numéro de préparation ;– pour les spécialités pharmaceutiques, leurs désignations et les quantités déli-

Le décret 2007-157 du 5 février 2007 relatif aux substances vénéneuses

et modifiant le Code de la santé publique a pour objectif une plus grande

accessibilité aux médicaments de lutte contre la douleur, donc essentiel-

lement des stupéfiants. Ce décret maintient un équilibre entre le souci

de simplifier les obligations de suivi de ces médicaments et la nécessité

de tenir compte des obligations de traçabilité et de sécurité prévues

dans les conventions internationales de l’Organisation des Nations unies

(ONU).

• Le décret a permis une simplification, une informatisation et une réduc-tion du nombre de registres concernant le pharmacien d’officine :

– registre des préparations magistrales et officinales (article R 5 125-45) ;

– ordonnancier unique pour les médicaments inscrits sur les listes I, II et

des stupéfiants (article R 5132-9) ;

– registre des entrées et sorties pour les stupéfiants (article R 5132-36).

• Les caractéristiques des registres sont les suivantes :

– registres papier ou informatisé ;

– suppression du paraphe du maire ou du commissaire de police en première

et dernière pages ;

– transcription ou enregistrement immédiat des opérations sur le registre ;

– modifications des données impossibles après validation de l’enregistrement ;

– enregistrement informatique dupliqué sur deux supports distincts : un pour

la consultation et un, conservé en réserve ;

– éditions des enregistrements à la demande des autorités de contrôle

par patient, par médicament ou par ordre chronologique ;

– conservation du registre ou des enregistrements pendant dix ans.

• Ce décret a également supprimé l’article R 5132-28 relatif au car-

net de commande à souches pour la commande de stupéfiants auprès

des grossistes-répartiteurs.

Les apports du décret 2007-157 du 5 février 2007Les apports du décret 2007-157 du 5 février 2007

Une copie de toute ordonnance sécurisée

comportant la prescription de médicaments

classés comme stupéfiants doit être conservée

par le pharmacien pendant 3 ans. Ces copies

doivent être classées alphabétiquement,

par nom de prescripteur, et chronologique-

ment, afin d’être présentées à toute réquisition

des autorités de contrôle.

À noterÀ noter

Page 3: Les registres à l’officine

42pratique

exercice professionnelexercice professionnel

Actualités pharmaceutiques • n° 475 • Juin 2008

vrées, ainsi que le numéro d’inscription à l’ordonnancier ;– les nom et prénom des patients ou confrè-res recevant les produits.Tous les ans, chaque titulaire d’un registre procède à l’inventaire du stock, par pesées et décomptes.Ce registre doit être conservé pendant dix ans après inscription de la dernière entrée/sortie de stupéfiant pour être présenté à toute réquisition des autorités de contrôle.• Registre des matières premièresToute matière première à usage pharma-ceutique doit faire l’objet d’un contrôle de conformité, qu’elle possède ou non une monographie à la pharmacopée (article L 5112-1). Les matières premières doivent être enregistrées par ordre chronologique d’arrivée et affectées d’une référence pro-pre à l’officine qui est notée sur l’étiquette de chaque récipient. Pour l’enregistrement des matières premières et articles de condi-tionnement, les mentions à inscrire, dans le but d’en assurer la traçabilité, sont les suivantes : désignation de la matière pre-mière ou de l’article, nom du fournisseur,

date de réception, quantité reçue et nombre de contenants, numéro d’identification du lot, date limite d’utilisation le cas échéant, référence de contrôle de l’établissement pharmaceutique fournisseur, conditions particulières de stockage et de manipula-tion s’il y a lieu, éventuellement description et caractéristiques (caractères organolep-tiques pertinents pour un contrôle lors de l’utilisation), contrôles éventuels, décision d’acceptation ou de refus et signature du pharmacien.Ce document doit être conservé pendant dix ans après inscription de la dernière réception de matière première ou article de condition-nement.

• Registre des préparationsSelon l’article R 5125-45, les pharmaciens doivent « inscrire les ordonnances prescri-vant des médicaments magistraux sur un livre-registre d’ordonnances coté. Les dis-positions légales obligent le pharmacien à inscrire toutes ses préparations magistra-les sur un ordonnancier, même si elles ne comportent pas de substances vénéneuses. Ces transcriptions comportent un numéro d’ordre, le nom et l’adresse du prescrip-teur, les noms et adresse du client, la for-mule détaillée du médicament magistral, les références des produits utilisés à l’officine, la présentation finale du produit (forme et

quantité), le prix et la date à laquelle le médi-cament a été délivré ». Il peut être précisé, le cas échéant, si le produit est destiné à un usage médical, professionnel ou vétérinaire. L’article R 5132-9 précise que les ordonnan-ces ou commandes comportant des prépa-rations doivent être inscrites sur le registre « aussitôt, à la suite, sans blanc, ni rature ni surcharge... ou enregistrées immédiatement par tout système approprié ».Cet ordonnancier doit être conservé pen-dant au moins dix ans après inscription de la dernière délivrance de médicaments magistraux.• Registre des médicaments dérivés du sangL’article R 5121-186 du Code de la santé publique précise que « les pharmaciens d’of-ficine qui délivrent un médicament dérivé du sang transcrivent aussitôt sur un registre spécial… les informations mentionnées à l’article R 5132-53 (date de délivrance, nom et adresse du prescripteur et, le cas échéant, sa spécialité et le service auquel il appartient, la dénomination ou formule du médicament, les quantités délivrées, les nom, prénom et adresse du patient), la date de naissance du patient, ainsi que les informations figurant sur l’étiquette détachable du conditionne-ment extérieur (comprenant, entre autres, le numéro d’autorisation de mise sur le mar-ché du produit, le numéro de lot et la date de péremption). En cas de transcription sur un registre, cette étiquette y est apposée. Les transcriptions ou enregistrements com-portent pour chaque médicament délivré un numéro d’ordre différent ». Conformément à la réglementation en vigueur, ce registre doit être archivé pen-dant 40 ans après inscription de la dernière délivrance de médicament dérivé du sang. Il doit permettre, en un instant, de retrou-ver le prescripteur, le produit et le patient concernés. Lorsque cela est nécessaire à l’exercice de la pharmacovigilance, les cen-tres régionaux de pharmacovigilance peu-vent y avoir accès. �

Sébastien Faure

Maître de conférences des Universités,

Faculté de pharmacie, Angers (49)

[email protected]

Les matières premières refusées doivent être

retournées au fournisseur dans les plus brefs

délais.

À noterÀ noter

Les matières premières refusées doivent être

retournées au fournisseur dans les plus brefs

délais.

À noterÀ noter

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Registre comptable des stupéfiants.•

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Quelles sont les conditions d’informatisation des registres ?Les registres (ordonnanciers, registre comptable des stupéfiants…) peuvent être informatisés sous

réserve qu’ils satisfassent aux conditions suivantes :

– aucune modification des données ne doit être possible après validation de leur enregistrement

automatique ;

– ces données doivent figurer sur un support garantissant leur pérennité et leur intégrité ;

– une sauvegarde doit être effectuée sur deux supports distincts ;

– les données doivent être accessibles, consultables et exploitables dix ans à compter de la dernière

mention ;

– le système d’enregistrement doit permettre une édition immédiate des mentions à la demande de toute

autorité de contrôle ;

– chaque page doit comporter le nom et l’adresse de l’officine.