3
• • • 7 6 L'arrivée de votre petit- enfant est prévue depuis longtemps. Votre fils, votre fille, vous a téléphoné un jour pour vous demander de « le prendre cet été » et pour caler les dates… Et voilà, ils sont arrivés chez vous, les enfants de vos enfants. Vous avez le cœur en fête et vous reléguez dans un coin de votre tête votre petite appréhension devant cette invasion. Lorsque vous les voyez au cours de l’année, c’est le temps d’un repas, d’une après- midi… Cet été, ils vont partager votre vie, du réveil au coucher, plusieurs jours d’affilée. C’est une «Chers grands-parents, occasion unique de pouvoir nouer avec eux un lien d’intimité bien à vous. Vous allez vous régaler ! Enfin du temps pour s’émerveiller de leur lumière et de leur énergie. À l’âge « Pomme d’Api », ils ont une maîtrise suffisante du langage pour exprimer leurs sentiments et leurs émotions. Leur innocence – que de premières fois encore à cet âge ! – rajeunit votre regard, forcément un peu émoussé par l’empilement des années ! Découvrir ses petits-enfants, c’est * Maryse Vaillant est grand-mère de quatre enfants dont trois de l’âge « Pomme d’Api ». Elle est l’auteur de « Au Bonheur des grands-mères » (Erès, 2010), dans lequel elle évoque sa propre grand-mère, et à travers elle, la relation entre cinq générations d’une même famille. DR • • • Dossier À VOUS QUI ALLEZ RECEVOIR VOS PETITS-ENFANTS CET ÉTÉ… LETTRE OUVERTE AUX GRANDS-PARENTS POUR LEUR SOUHAITER UN BEL ÉTÉ Pour tous les grands-parents de nos petits lecteurs qui vont les recevoir cet été, nous avons demandé à Maryse Vaillant, psychologue clinicienne et grand-mère*, de leur écrire une lettre ouverte pour leur souhaiter un bel été.

Lettre ouverte aux grands-parents

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Interview de la psychologue clinicienne Maryse Vaillant, présentée sous forme de lettre ouverte aux grands-parents qui accueilleront leurs petits-enfants durant les grandes vacances.

Citation preview

Page 1: Lettre ouverte aux grands-parents

• • •

76

L'arrivée de votre petit- enfant est prévue depuis longtemps. Votre fils, votre fille, vous a téléphoné un jour pour vous demander de « le prendre cet été » et pour caler les dates… Et voilà, ils sont arrivés chez vous, les enfants de vos enfants. Vous avez le cœur en fête et vous reléguez dans un coin de votre tête votre petite appréhension devant cette invasion. Lorsque vous les voyez au cours de l’année, c’est le temps d’un repas, d’une après-midi… Cet été, ils vont partager votre vie, du réveil au coucher, plusieurs jours d’affilée. C’est une

«Chers grands-parents,occasion unique de pouvoir nouer avec eux un lien d’intimité bien à vous.

Vous allez vous régaler ! Enfin du temps pour s’émerveiller de leur lumière et de leur énergie. À l’âge « Pomme d’Api », ils ont une maîtrise suffisante du langage pour exprimer leurs sentiments et leurs émotions. Leur innocence – que de premières fois encore à cet âge ! – rajeunit votre regard, forcément un peu émoussé par l’empilement des années ! Découvrir ses petits-enfants, c’est

* Maryse Vaillant est grand-mère de quatre enfants dont trois de l’âge « Pomme d’Api ». Elle est l’auteur de « Au Bonheur des grands-mères » (Erès, 2010), dans lequel elle évoque sa propre grand-mère, et à travers elle, la relation entre cinq générations d’une même famille.

DR

• • •

Dossier

À VOUS QUI ALLEZ RECEVOIR VOS PETITS-ENFANTS CET ÉTÉ…

LETTRE OUVERTE

AUX GRANDS-PARENTS

POUR LEUR SOUHAITER

UN BEL ÉTÉ

Pour tous les grands-parents de nos petits lecteurs qui vont les recevoir cet été, nous avons demandé à Maryse Vaillant, psychologue clinicienne et grand-mère*, de leur écrire une lettre ouverte pour leur souhaiter un bel été.

Page 2: Lettre ouverte aux grands-parents

• • •

• • •

98

Découvrir ses petits-enfants, c'est se découvrir aussi soi-même !

se découvrir aussi soi-même : on renoue avec le jeune papa ou la jeune maman qu’on a été… mais avec quelques aménagements. Nous pouvons nouer parfois avec nos petits-enfants une relation affective que nous ne nous étions jamais autorisée avec nos propres enfants, pris que nous étions dans nos responsabilités éducatives, nos contraintes professionnelles, ou une vision plus figée des rôles de chacun. Un papa peut découvrir – bouche bée et avec un pincement de jalousie – son père, devenu grand-père, se passionner pour les Lego et libérer des trésors d’attention et de patience.

Les petits, eux, sont ravis de vous retrouver. Certes, l’absence des parents est à gérer. En ce domaine, il faut respecter leurs spleens éventuels, mais sans se culpabiliser ni dramatiser. Car vous avez beaucoup à leur ap-porter. En premier lieu, de la pro-fondeur générationnelle. Grâce à vous, à vos habitudes, au décor dans lequel vous vivez, ils per-

çoivent qu’ils ont un passé, qu’ils sont le fruit d’une longue histoire. Vous êtes ceux qui peuvent dire : « Toi non plus tu n’aimes pas la rhu-barbe ? Comme ta maman ! » ou « Regarde, sur cette photo, ton papa avait ton âge… » Ils adorent qu’on leur présente ainsi les membres de leur famille, les liens de sang, les liens d’alliance. Ainsi, ils se rendent compte qu’il n’y a pas que Papa et Maman ! Et, à l’âge de « l’Œdipe », il est essentiel qu’ils sentent qu’ils appartiennent à une

famille élargie, et pas seulement au trio œdipien et tout-puissant.

S’ils soulignent une différence entre vous et leurs parents, assumez-la ! « Chez nous, au petit déjeuner, il y a du Nutella », « Maman, le soir, elle nous chante une chanson », « Tu es plus sévère que Papa »… Eh oui, chez vous, ce n’est pas pareil ! Ensemble, vous inventerez une vie commune bien à vous, des rituels du coucher uniques, des menus

spéciaux, des expressions, des activités qui vous ressemblent, tous ces détails qu’ils seront tellement contents de retrouver, année après année, dès qu’ils franchiront la porte de votre maison : « Mmmmh, ça sent bon chez toi, Mamie ! » « Où est passé le camion de Papa quand il était petit ? » Oui, vous représentez – bon gré mal gré – la permanence, les retrouvailles. Votre univers rassurant fixe les souvenirs et donne de la consistance à la

Dossier LETTRE OUVERTE

AUX GRANDS-PARENTS

POUR LEUR SOUHAITER

UN BEL ÉTÉ

Page 3: Lettre ouverte aux grands-parents

• • •

1110

Dossier

mémoire. Si, en plus, ils ont la chance de partager leurs grands- parents avec des cousins – qui n’ont pas les mêmes parents, donc pas la même éducation, ni la même vie – quelle richesse ! Avec eux, comme avec vous, ils découvrent qu’on peut être « pas tout à fait semblables, mais pas complètement étrangers. »

Résumer vos relations avec vos petits-enfants par la formule « Plaisir d’offrir, joie de recevoir » serait toutefois un peu court. Car s’occuper de jeunes enfants, c’est aussi harassant ! Bien sûr, on est ravi de rendre service à ses enfants, mais il y a des moments où l'on prend vraiment conscience de la valeur du service : la nuit, par exemple, avec les réveils nocturnes et matinaux ! Le mieux est donc de penser leur séjour à l’avance. Même si leur imagination les met en général à l’abri de l’ennui, prévoyez des occupations en privilégiant celles qui vous plaisent. Vous n’êtes pas une « bonne maman confiture » ou un « papi bricoleur » ? Tant pis pour les stéréotypes ! Chacun a quelque chose à transmettre.

Si vous êtes passionné de vielles pierres, emmenez-les visiter des châteaux en ruine, si vous aimez le rock and roll, faites-leur écouter vos airs favoris et apprenez-leur à danser. On prend un tel plaisir à partager ce qui nous plaît qu’on aurait tort de se forcer à jouer aux petits chevaux si ce jeu nous ennuie ! S’ils retournent chez eux en chantant Sylvie Vartan plutôt que « Ainsi font, font, font… », est-ce vraiment grave ?

Un impératif est de s’aménager un peu de répit dans la journée ou en soirée. Une mamie épuisée, et un papi coincé du dos, cela devient moins drôle pour tout le monde ! Renseignez-vous sur les horaires de la bibliothèque, de la ludothèque, sur les musées adaptés à leur âge, et – pourquoi pas ? – sur le centre de loisirs, le club de poney ou de natation. Une demi-journée ou une journée par semaine pour souffler, cela fait du bien ! Prévoyez des goûters chez vos amis qui reçoivent aussi leur descendance, optez pour le pique-nique, si pratique ! Enfin, si vous en avez la possibilité, faites-vous aider. Une adolescente du

voisinage pourrait par exemple s’occuper des enfants deux après-midi dans la semaine, ou, si vous appréhendez le coup de feu du soir, de 17h30 à 20h30, moyennant des heures de babysitting.

Et si la demande qui vous est faite est trop lourde pour vous, que pouvez-vous faire ? Vous avez envie de partager des vacances avec vos petits-enfants, mais pas toutes vos vacances ? Vous en avez le droit le plus absolu. L’essentiel est de savoir ce qui vous fera plaisir, et de repérer ce qui risque de vous faire

basculer dans le déplaisir, pour cause de fatigue ou de sacrifice. Pas de culpabilité, tout le monde y gagne à ce jeu-là : enfants, petits-enfants et vous-même. La bonne mesure, c’est lorsque nous pourrons remercier sincèrement nos enfants de nous avoir confié leurs enfants, parce qu’ils auront enchanté notre été !

Il me reste à nous souhaiter de passer de beaux et de bons moments avec nos petits-enfants cet été. »

Maryse Vaillant, avec la complicité d’Anne Bideault

LETTRE OUVERTE

AUX GRANDS-PARENTS

POUR LEUR SOUHAITER

UN BEL ÉTÉ