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'^f lj LAiiture Woyzeck, un tout-couleur 164 RUE AMBROISE CROIZAT Jean-Pierre Baro présente un Woyzeck (je n'arrive pas àp/ei/rerjqui entremêle le récit deBuchneretla mémoire de son père, travailleur immigré sénégalais. L es parents du met- teur en scène ont formé ce qu'on appelle un couple mixte Son père, sénégalais, fait partie de la première génération des tra- vailleurs immigrés, les tout- couleur, littéralement « ceux qui s'en vont et se perdent », venus en France pour étudier Dans les années 1970, c'est en- core une nouveauté Même si nul n'est certain qu'être un couple mixte, aujourd'hui, soit une sinécure Cette figure paternelle qu'il a peu connue le hante, le tourmente Alors il in- terroge sa mère, lui arrache un EPOUSTOUFLANTE Jean-Pierre Baro s'empare de la pièce de Woyzeck, ina- chevée, comme un matériau qu'il malaxe, reconfigure sans lui ôter son substrat pour l'en- tremêler au récit de la vie de son père Si l'entrée en matière peut sembler incertaine, dé- routante, au fur et à mesure que le spectacle s'installe, on est pris par les images qui jaillissent sur le plateau, les dé- placements dansés des acteurs, et le rythme soutenu qui laisse entendre les deux narrations à la perfection Le monologue de la mère, porté par une Cé- cile Coustillac époustouflante, fait écho à brûle-pourpoint aux fulgurances de Woyzeck, lui conférant une modernité plus que salutaire, néces- saire Adama Diop incarne Woyzeck lin Woyzeck noir, docile, taiseux, qui retournera son bouillonnement intérieur contre le seul être qui l'aime, pas contre ses bourreaux Cette histoire de prolos, en dé- pit des deux siècles d'écart qui les séparent, éclaire brillam- ment ce « racisme social Iié aux inégalités » que dénon- çait Buchner en son temps Du juke-box qui trône sur le plateau, s échappent des mu- siques noires, des airs de jazz et des accents de soûl qui sur- gissent dans ce no man's land habité par des fantômes Au final, il nous reste le souvenir' ainsi réhabilité du destin croisé de deux hommes anéantis par une lutte des classes sans merci dont ils ne connaissaient pas toutes les règles MARIE-JOSE SIRACH Ce spectacle a éte créé au CDN d'Orléans Au Montfort Théâtre, 106, rue de Brancion, 75015 Paris Jusqu'au 6 avnl Réservation au OI 56083388. Le 16 avnl, au théâtre de Comouaille, à Quimper usines Dassault, on lui tend un balai, naturellement Le racisme pour l'un, le mépris pour l'autre Et inversement C'est l'accumulation de ces humiliations qui conduiront Woyzeck vers l'irrémédiable, le meurtre de sa maîtresse, et verront sombrer le père dans l'alcoolisme jusqu'à éprouver, comme son alter ego buchné- nen, des hallucinations, qui les perdront tous deux UNE CÉCILE COUSTIUAC à un les souvenirs Le parallèle entre ce père, jamais à sa place, jamais au bon endroit, portant l'exil comme un fardeau, et Woyzeck s'impose comme une évidence, une filiation qui ex- plose la temporalité et les lieux de l'action Woyzeck n'est-il pas un immigré dè l'intérieur* 7 Un prolétaire maintenu dans un état d'asservissement et d'humiliation par toutes les hiérarchies 7 La trajectoire du père croise celle de Woyzeck dans cette lutte des classes qui ne dit jamais son nom Lorsque le père, technicien qualifié dans l'aéronautique, débarque dans l'atelier des Woyzeck, un tout-couleur comme les autres

L'HUMANITÉ - Jean-Pierre Baro

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"On est pris par les images qui jaillissent sur le plateau, les déplacements dansés des acteurs, et le rythme soutenu qui laisse entendre les deux narrations à la perfection. Le monologue de la mère, porté par une Cécile Coustillac époustouflante, fait écho à brûle pourpoint aux fulgurances de Woyzeck, lui conférant une modernité plus que salutaire." L'HUMANITÉ Marie José Sirach

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Page 1: L'HUMANITÉ - Jean-Pierre Baro

164 RUE AMBROISE CROIZAT93528 SAINT DENIS CEDEX - 01 49 22 73 29

25 MARS 13Quotidien Paris

OJD : 45827

Surface approx. (cm²) : 761N° de page : 18

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MONFORT3617475300503/XTT/OTO/1

Eléments de recherche : Toutes citations : - THEATRE SILVIA MONFORT ou LE SILVIA MONFORT-THEATRE ou LE MONFORT: uniquement lethéâtre à Paris 15ème - SILVIA MONFORT : uniquement en tant que comédienne

'^f ljLAiiture DISPARITIONCHINUA ACHEBE

Un des pètes de la litteratureafricaine moderne est décédé auxÉtats-Unis à l'âge de quatre-vingt-deux ans, a annonce vendredi sonéditeur. Publie en 1958, son premierroman, te monde s'effondre, devenuun livre-culte, avart fait connaîtrela culture igbo et les souffrancesdues à la colonisation britannique.

Woyzeck, un tout-couleurcomme les autres

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'^f ljLAiiture DISPARITIONCHINUA ACHEBE

Un des pètes de la litteratureafricaine moderne est décédé auxÉtats-Unis à l'âge de quatre-vingt-deux ans, a annonce vendredi sonéditeur. Publie en 1958, son premierroman, te monde s'effondre, devenuun livre-culte, avart fait connaîtrela culture igbo et les souffrancesdues à la colonisation britannique.

Woyzeck, un tout-couleurcomme les autres

164 RUE AMBROISE CROIZAT93528 SAINT DENIS CEDEX - 01 49 22 73 29

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

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Jean-PierreBaro présenteun Woyzeck(je n'arrive pasàp/ei/rerjquientremêle le récitdeBuchneretlamémoire de sonpère, travailleurimmigrésénégalais.

Les parents du met-teur en scène ontformé ce qu'onappelle un couplemixte Son père,

sénégalais, fait partie de lapremière génération des tra-vailleurs immigrés, les tout-couleur, littéralement « ceuxqui s'en vont et se perdent »,venus en France pour étudierDans les années 1970, c'est en-core une nouveauté Même sinul n'est certain qu'être uncouple mixte, aujourd'hui,soit une sinécure Cette figurepaternelle qu'il a peu connue lehante, le tourmente Alors il in-terroge sa mère, lui arrache unà un les souvenirs Le parallèleentre ce père, jamais à sa place,jamais au bon endroit, portantl'exil comme un fardeau, etWoyzeck s'impose comme uneévidence, une filiation qui ex-plose la temporalité et les lieuxde l'action Woyzeck n'est-ilpas un immigré dè l'intérieur*7

Un prolétaire maintenu dansun état d'asservissement etd'humiliation par toutes leshiérarchies7 La trajectoire dupère croise celle de Woyzeckdans cette lutte des classesqui ne dit jamais son nomLorsque le père, technicienqualifié dans l'aéronautique,débarque dans l'atelier desusines Dassault, on lui tendun balai, naturellement Leracisme pour l'un, le méprispour l'autre Et inversementC'est l'accumulation de ceshumiliations qui conduirontWoyzeck vers l'irrémédiable,le meurtre de sa maîtresse, etverront sombrer le père dansl'alcoolisme jusqu'à éprouver,comme son alter ego buchné-nen, des hallucinations, qui lesperdront tous deux

UNE CÉCILE COUSTIUAC

EPOUSTOUFLANTEJean-Pierre Baro s'empare

de la pièce de Woyzeck, ina-chevée, comme un matériauqu'il malaxe, reconfigure sanslui ôter son substrat pour l'en-tremêler au récit de la vie deson père Si l'entrée en matièrepeut sembler incertaine, dé-routante, au fur et à mesureque le spectacle s'installe, onest pris par les images quijaillissent sur le plateau, les dé-placements dansés des acteurs,et le rythme soutenu qui laisseentendre les deux narrations àla perfection Le monologuede la mère, porté par une Cé-cile Coustillac époustouflante,fait écho à brûle-pourpointaux fulgurances de Woyzeck,lui conférant une modernitéplus que salutaire, néces-saire Adama Diop incarneWoyzeck lin Woyzeck noir,docile, taiseux, qui retournerason bouillonnement intérieurcontre le seul être qui l'aime,pas contre ses bourreauxCette histoire de prolos, en dé-pit des deux siècles d'écart quiles séparent, éclaire brillam-ment ce « racisme social Iiéaux inégalités » que dénon-çait Buchner en son tempsDu juke-box qui trône sur leplateau, s échappent des mu-siques noires, des airs de jazzet des accents de soûl qui sur-gissent dans ce no man's landhabité par des fantômes Aufinal, il nous reste le souvenir'ainsi réhabilité du destin croiséde deux hommes anéantis parune lutte des classes sans mercidont ils ne connaissaient pastoutes les règles

MARIE-JOSE SIRACH

Ce spectacle a éte créé au CDNd'Orléans Au Montfort Théâtre,106, rue de Brancion, 75015 ParisJusqu'au 6 avnl Réservation auOI 56083388. Le 16 avnl, au théâtrede Comouaille, à Quimper

164 RUE AMBROISE CROIZAT93528 SAINT DENIS CEDEX - 01 49 22 73 29

25 MARS 13Quotidien Paris

OJD : 45827

Surface approx. (cm²) : 761N° de page : 18

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Eléments de recherche : Toutes citations : - THEATRE SILVIA MONFORT ou LE SILVIA MONFORT-THEATRE ou LE MONFORT: uniquement lethéâtre à Paris 15ème - SILVIA MONFORT : uniquement en tant que comédienne

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Un des pètes de la litteratureafricaine moderne est décédé auxÉtats-Unis à l'âge de quatre-vingt-deux ans, a annonce vendredi sonéditeur. Publie en 1958, son premierroman, te monde s'effondre, devenuun livre-culte, avart fait connaîtrela culture igbo et les souffrancesdues à la colonisation britannique.

Woyzeck, un tout-couleurcomme les autres