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Communication orale Ligue franc ¸aise contre l’e ´ pilepsie (LFCE) The ´ matique : mercredi 28 avril 2010 Me ´ canismes d’action et pharmacologie des anti- e ´ pileptiques P. Ryvlin Lyon-Bron, France La pharmacope ´e des anti-e ´ pileptiques (AE) se constitue actuellement de plus 20 produits commercialise ´s ou en voie de l’e ˆ tre, dont six conside ´re ´ s d’ancienne ge ´ne ´ ration (barbitu- riques, phenytoine, e ´ thosuximide, benzodiaze ´ pines, carba- maze ´pine, valproate de sodium), et 17 de ´ veloppe ´s lors de 25 dernie `res anne ´es vigabatrin, zonisamide, lamotrigine, fel- bamate, gabapentine, tiagabine, topiramate, oxcarbaze ´ pine, le ´ve ´ tiracetam, pre ´ gabaline, eslicarbaze ´ pine, brivaracetam, rufinamide, lacosamide, carisbamate, pe ´ rampanel, ganaxo- lone). La majorite ´ des AE n’ont pas de lien de parente ´ entre eux, a ` quelques exceptions pre ` s (carbamaze ´ pine-oxcarbaze ´- pine-eslicarbaze ´ pine, gabapentine-pre ´ gabaline, le ´ve ´ tirace ´- tam-brivarace ´ tam). Pour l’essentiel, les proprie ´te ´s AE de ces mole ´cules ont e ´te ´ de ´couvertes par hasard ou dans le cadre de programme de screening syste ´ matique, seuls trois AE ayant e ´te ´ synthe ´ tise ´ s ou de ´ veloppe ´s avec un objectif de ciblage mole ´culaire pre ´cis (vigabatrin comme inhibiteur de la GABA transaminase, tia- gabine comme inhibiteur du transporteur du GABA, re ´ tigabine comme modulateur des canaux potassiques voltage de ´ pen- dant, pe ´ rampanel comme antagoniste des re ´ cepteurs au glu- tamate de type AMPA). Les me ´canismes d’action des autres AE sont relativement bien appre ´ hende ´s pour certaines mole ´cules (barbituriques, benzodiaze ´ pines, et ganaxolone agissant sur un site alloste ´- rique du re ´cepteur GABAA ; gabapentine et pre ´ gabaline se fixant sur le sous-unite ´ a2d des canaux calciques pre ´synatiques ; le ´ve ´ tirace ´tam et brivarace ´tam modulant la prote ´ine SV2A des ve ´sicules synaptiques). Par ailleurs, plu- sieurs AE d’ancienne et de nouvelles ge ´ne ´ rations agissent au niveau du canal sodique voltage de ´pendant, dont la carba- maze ´pine et ses de ´rive ´s, la phe ´nytoine, la lamotrigine, le felbamate, et la lacosamide. Certains de ces produits, en particulier la lamotrigine, ainsi que le valproate de sodium, le topiramate, et le zonisamide, semblent agir sur plusieurs cibles de manie ` re concommitantes. Enfin, le mode d’action de mole ´cules re ´centes telles le rufinamide et le carisbamate reste inconnu. Sur le plan de la pharmacologie, de nombreux e ´le ´ments dis- tinguent cette grande varie ´te ´ de produits AE, mais l’e ´le ´ ment le plus de ´terminant reste le potentiel inducteur enzymatique de certaines mole ´cules, au premier rang desquelles la carbama- ze ´pine, la phe ´nytoine et les barbituriques. D’autres produits, tels l’oxcarbaze ´pine, l’eslicarbaze ´pine et le topiramate posse `- dent une activite ´ inductrice plus modeste et dose de ´pendante. Le valproate est quant a ` lui l’unique AE inhibiteur enzymatique. Quand surseoir a ` l’instauration d’un traitement C. Marchal Neurologie A, CHU de Bordeaux, ho ˆ pital Pellegrin-Tripode, place Ame ´ lie-Raba-Le ´on, 33000 Bordeaux, France Mots cle ´s :E ´ pilepsie ; Me ´dicament ; E ´ pilepsie crise L’instauration d’un traitement anticonvulsivant se justifie quand le rapport entre les be ´ne ´ fices attendus (disparition des crises) et les risques pre ´ visibles (effets secondaires) est positif. Il est licite de surseoir a ` un tel traitement dans les situations suivantes : le be ´ne ´ fice attendu est faible ou nul : cela concerne les crises dont le risque de re ´ cidive est faible (crises provoque ´ es, crises a ` la phase aigue ¨ d’une pathologie ce ´re ´ brale ou me ´ tabolique, convulsions hyperthermiques simples du nourrisson, crises dont la nature e ´ pileptique n’est pas certaine, crise partielle be ´nigne de l’adolescent, crise spontane ´e unique a ` bilan normal). On peut y ajouter, d’une part, la pre ´ vention des crises apre `s un traumatisme cra ˆ nien ou une chirurgie ce ´re ´ brale, et d’autre part, les syndromes e ´ pileptiques constamment be ´ nins dans leur e ´ volution (e ´ pilepsie partielle be ´nigne de l’enfant) ; les risques lie ´s au traitement sont excessifs : toxicite ´ particulie ` rement fre ´ quente des anticonvulsivants chez les patients traite ´s pour tumeur ce ´re ´ brale, comorbidite ´s, poly- the ´ rapies. La multiplicite ´ des mole ´ cules disponibles a ` l’heure actuelle permet toutefois de limiter au maximum le risque d’effets secondaires et d’interaction ; me ˆ me quand le diagnostic d’e ´ pilepsie est certain, diffe ´ rer la mise en route du traitement ne semble pas aggraver la re ´ponse au traitement ou le pronostic a ` long terme chez l’adulte ; revue neurologique 166s (2010) a163–a165 0035-3787/$ – see front matter doi:10.1016/j.neurol.2010.02.008

Ligue française contre l’épilepsie (LFCE)

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Communication orale

Ligue francaise contre l’epilepsie (LFCE)

r e v u e n e u r o l o g i q u e 1 6 6 s ( 2 0 1 0 ) a 1 6 3 – a 1 6 5

Thematique : mercredi 28 avril 2010

Mecanismes d’action et pharmacologie des anti-epileptiquesP. RyvlinLyon-Bron, France

La pharmacopee des anti-epileptiques (AE) se constitueactuellement de plus 20 produits commercialises ou en voiede l’etre, dont six consideres d’ancienne generation (barbitu-riques, phenytoine, ethosuximide, benzodiazepines, carba-mazepine, valproate de sodium), et 17 developpes lors de25 dernieres annees vigabatrin, zonisamide, lamotrigine, fel-bamate, gabapentine, tiagabine, topiramate, oxcarbazepine,levetiracetam, pregabaline, eslicarbazepine, brivaracetam,rufinamide, lacosamide, carisbamate, perampanel, ganaxo-lone). La majorite des AE n’ont pas de lien de parente entreeux, a quelques exceptions pres (carbamazepine-oxcarbaze-pine-eslicarbazepine, gabapentine-pregabaline, levetirace-tam-brivaracetam).Pour l’essentiel, les proprietes AE de ces molecules ont etedecouvertes par hasard ou dans le cadre de programme descreening systematique, seuls trois AE ayant ete synthetises oudeveloppes avec un objectif de ciblage moleculaire precis(vigabatrin comme inhibiteur de la GABA transaminase, tia-gabine comme inhibiteur du transporteur du GABA, retigabinecomme modulateur des canaux potassiques voltage depen-dant, perampanel comme antagoniste des recepteurs au glu-tamate de type AMPA).Les mecanismes d’action des autres AE sont relativementbien apprehendes pour certaines molecules (barbituriques,benzodiazepines, et ganaxolone agissant sur un site alloste-rique du recepteur GABAA ; gabapentine et pregabaline sefixant sur le sous-unite a2d des canaux calciquespresynatiques ; levetiracetam et brivaracetam modulant laproteine SV2A des vesicules synaptiques). Par ailleurs, plu-sieurs AE d’ancienne et de nouvelles generations agissent auniveau du canal sodique voltage dependant, dont la carba-mazepine et ses derives, la phenytoine, la lamotrigine, lefelbamate, et la lacosamide. Certains de ces produits, enparticulier la lamotrigine, ainsi que le valproate de sodium,le topiramate, et le zonisamide, semblent agir sur plusieurscibles de maniere concommitantes. Enfin, le mode d’action demolecules recentes telles le rufinamide et le carisbamatereste inconnu.

0035-3787/$ – see front matterdoi:10.1016/j.neurol.2010.02.008

Sur le plan de la pharmacologie, de nombreux elements dis-tinguent cette grande variete de produits AE, mais l’element leplus determinant reste le potentiel inducteur enzymatique decertaines molecules, au premier rang desquelles la carbama-zepine, la phenytoine et les barbituriques. D’autres produits,tels l’oxcarbazepine, l’eslicarbazepine et le topiramate posse-dent une activite inductrice plus modeste et dose dependante.Le valproate est quant a lui l’unique AE inhibiteur enzymatique.

Quand surseoir a l’instauration d’un traitementC. MarchalNeurologie A, CHU de Bordeaux, hopital Pellegrin-Tripode, placeAmelie-Raba-Leon, 33000 Bordeaux, France

Mots cles : Epilepsie ; Medicament ; Epilepsie criseL’instauration d’un traitement anticonvulsivant se justifiequand le rapport entre les benefices attendus (disparitiondes crises) et les risques previsibles (effets secondaires) estpositif. Il est licite de surseoir a un tel traitement dans lessituations suivantes :

� le benefice attendu est faible ou nul : cela concerne les crises

dont le risque de recidive est faible (crises provoquees, crises

a la phase aigue d’une pathologie cerebrale ou metabolique,

convulsions hyperthermiques simples du nourrisson, crises

dont la nature epileptique n’est pas certaine, crise partielle

benigne de l’adolescent, crise spontanee unique a bilan

normal). On peut y ajouter, d’une part, la prevention des

crises apres un traumatisme cranien ou une chirurgie

cerebrale, et d’autre part, les syndromes epileptiques

constamment benins dans leur evolution (epilepsie partielle

benigne de l’enfant) ;

� les risques lies au traitement sont excessifs : toxicite

particulierement frequente des anticonvulsivants chez les

patients traites pour tumeur cerebrale, comorbidites, poly-

therapies. La multiplicite des molecules disponibles a

l’heure actuelle permet toutefois de limiter au maximum

le risque d’effets secondaires et d’interaction ;

� meme quand le diagnostic d’epilepsie est certain, differer la

mise en route du traitement ne semble pas aggraver la

reponse au traitement ou le pronostic a long terme chez

l’adulte ;

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� enfin, en dehors des indications imperatives ou urgentes, le

souhait ou les reticences du patient lui-meme doivent etre

pris en compte dans la decision.

Traitement des epilepsies idiopathiques del’enfant et de l’adolescent (epilepsies absence,EPR, EMJ)A. ArzimanoglouLyon-Bron, France

Les epilepsies idiopathiques de l’enfant et l’adolescent corres-pondent a des syndromes age-dependants au moins pour ledebut des crises d’epilepsie.Les epilepsies idiopathiques dites focales (epilepsie aparoxysmes rolandiques, syndrome de Panayiotopoulos. . .)sont tres frequentes et le plus souvent guerissent a l’ado-lescence. Les choix therapeutiques doivent surtout tenircompte des eventuels effets des AE sur le developpementcognitif.Les epilepsies idiopathiques dites generalisees (epilepsie-absences, epilepsie myoclonique juvenile. . .) ont une evolu-tion variable. Pour certaines (ex. EMJ) le traitement instaurependant l’enfance va etre maintenu durant plusieurs annees.D’autres criteres (future grossesse, contraception. . .) vontvenir donc s’ajouter a l’effet cognitif des AE pour guider leclinicien vers un choix optimal. Certains AE peuvent avoir uneffet aggravant.

Traitement de premiere intention des epilepsiesde l’adulteF. SemahLille, France

Texte non remis.

Quelle place pour les generiques ?A. BirabenRennes, France

Texte non remis.

Strategie therapeutique apres echec d’une ouplusieurs monotherapiesL. ValtonService de neurologie et explorations fonctionnelles neurologiques,CHU de Toulouse, Rangueil, 31059 Toulouse cedex 9, France

Mots cles : Epilepsie crise partielle ; Epilepsiepharmacoresistante ; EpilepsieLe traitement de premiere intention est efficace chez la moitiedes patients. En cas d’echec, on verifie si le traitement a eteoptimal, et on recherche des facteurs favorisants, en premierune mauvaise observance. La posologie pourra etre augmen-tee et le traitement sera explique. Si le traitement a ete bienconduit, une monotherapie alternative sera proposee, adapteeau syndrome epileptique et au contexte clinique ; cela aug-mentera le nombre de patients equilibres, de 50 % en casd’intolerance, seulement de 15 % en cas d’inefficacite dutraitement initial.Apres echec de deux monotherapies, les chances de successont moindres. Un bilan verifiera la nature epileptique des

crises, que le traitement est bien pris, a dose suffisante etadapte au syndrome epileptique. Le retentissement est sou-vent severe sur la vie du sujet. Ainsi toute suspicion de phar-macoresistance justifie un avis specialise rapide, unereevaluation globale (medicale et sociale), et un bilan ana-tomo-electroclinique, dont l’enregistrement video-electroen-cephalographique des crises est l’etape essentielle :

� une troisieme monotherapie, ou plus souvent une bithera-

pie peuvent apporter un succes therapeutique. Le choix des

associations est difficile (risque d’interaction medicamen-

teuse, de iatrogenie, voire d’aggravation paradoxale de

l’epilepsie), et repose sur des bases essentiellement empi-

riques en l’absence d’etudes comparant precisement les

differentes associations possibles ;

� la principale alternative, en cas d’epilepsie partielle repose

sur la chirurgie de l’epilepsie qui consiste en l’exerese de la

zone epileptogene. L’intervention est proposee au terme

d’une demarche individualisee, comprenant la realisation

d’explorations longues et couteuses certes, mais dont le

benefice est maintenant clairement demontre en termes

d’efficacite, d’amelioration de la qualite de vie, de reduction

de la morbi-mortalite et de cout pour la societe. Le benefice

est d’autant plus important qu’elle a ete realisee

precocement ;

� on pourra enfin considerer d’autres solutions : nouvelles

molecules, stimulation vagale, diete cetogene et techniques

en cours d’evaluation.

Prise en charge initiale de l’etat de malV. NavarroParis, France

Texte non remis.

Pourquoi, quand et comment arreter untraitement antiepileptique ?E. HirschPole tete cou CETD, HUS Strasbourg, neurologie, 1, place de l’hopital,67091 Strasbourg, France

Mots cles : Anti-epileptique ; Epilepsie ; AnxieteIntroduction.– L’arret du traitement est le souhait de la plupartdes epileptiques traites car il represente pour ceux ci, la« guerison » et l’arret de la stigmatisation.Le clinicien doit donner au patient et a son entourage desexplications claires sur les risques et des benefices medicauxet sociaux attendus :

� facteurs influent sur le risque de rechute : le syndrome

epileptique. Il conditionne, a lui seul, le pronostic : epilepsie

juvenile myoclonique, epilepsie a paroxysmes rolandiques. . .

L’etiologie de l’epilepsie. Les epilepsies symptomatiques ont

un risque de rechute d’environ 50 %, surtout chez l’enfant. La

gravite de l’epilepsie. Les facteurs pertinents sont : la

frequence des crises, le delai de reponse au traitement, le

nombre de crises sous traitement et la necessite d’utiliser une

polytherapie ;

� predire la rechute est possible, si on prend en compte et

pondere la duree de la remission, la polytherapie, l’age au

moment de la decision, le type de crises, ainsi qu’un EEG

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anormal. La valeur pronostique de l’EEG chez l’adulte est

discutable. Chez l’enfant le risque de rechute est tres faible

quand le trace est normal ;

� quand et comment arreter ? Apres combien de temps sans

crise ? Une duree de deux ans de remission avant

d’envisager l’arret du traitement est admise. Chez l’enfant,

des sevrages precoces du traitement, apres six ou 12 mois de

remission sont possibles. Les modalites du sevrage. Le

sevrage se fait en diminuant le traitement de 25 % tous les

deux ou trois mois, voire plus lentement selon les cas. Et s’il

y a une recidive ? Une recidive apres sevrage est vecue

douloureusement mais les effets de la rechute ne sont pas

superieurs a ceux ressentis par les patients qui ont poursuivi

le traitement.

Conclusion.– Le sevrage du traitement est souvent possible chezun patient en remission, mais il doit etre discute au cas par caset jamais impose a un patient reticent.References[1] Shih et al. A systematic review of antiepileptic drug initia-tion and withdrawal. Neurologist. 2009;15:122–31.[2] Specchio et al. Should antiepileptic drugs be withdrawn inseizure-free patients? CNS Drugs. 2004;18:201–12.