l'objet a _ André Green

Embed Size (px)

Citation preview

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    1/23

    15

    L'OBJET (a) DE J. LACAN.

    SA LOGIQUE. ET LA THEORIE FREUDIENNE

    (Convergences et interrogations)

    par

    Andr GREEN (1)

    P a r l e r de l 'objet de la psychanalyse soulve immdia tement unequest ion. Elle conduit s ' i n t e r roge r pour savoi r s i l 'on va t r a i t e rde l 'objet de la psychanalyse au sens o l ' on par le de l 'objet d 'unesc ience - ce que vise la dmarche de l a sc ience en sa progress ion -ou s i l 'on va p a r l e r du s ta tut de l 'objet te l que le conoit l a psycha -nalyse . La su rp r i se se ra i t ic i de mont re r que ces deux sens sont

    t ro i tement l i s e t in terdpendants .Li t t r fait r e m a r q u e r qu'au mot sujet l 'Acadmie d i t : le s corps

    na ture l s sont le sujet de l a physique. E t au m ot objet , e l le di t enco -re : l e s corps na ture l s sont l 'objet de la physique. L o i n d e nous d 'yr e p r e r un redoublement cont rad ic to i re ou t rop faci lement rduct ible .Nous ne nous jo indrons pas non plus , brandissant ce t exemple, auchoeur de tous ceux qui dnoncent dans la spara t ion du sujet e t del 'objet la cause de toutes l es impasses thor iques dont l a pense t r a -dit ionnelle se rend responsab le .

    Rencont rer au dpar t le so r t l i du su je t e t de l 'objet n ' e s t nia ff i rmer l eur confusion, ni l eu r indpendance. C ' e s t supputer quenous al lons avoi r fa i re face aux confrontat ions de l ' ident i t e t dela di ffrence, de la conjonction e t de la dis jonct ion, de la suture e tde la coupure. Nous aurons a lo r s nous demander s i l 'objet de lapsychanalyse - je par le maintenant de ce quoi el le vise - peut sesuff i re de cet te l imita t ion couple laquelle beaucoup de discipl inescontempora ines , pa rmi l e s plus avances , se confinent.

    (1) Relat ion c r i t e e t dveloppe d 'une confrence prononce au s -mina i r e du Docteur Lacan , le 21 dcembre 1965

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    2/23

    16

    1 - L'OBJET DE JACQUES LACAN. RAPPEL CURSIF

    Examiner le rle de l 'objet (a) dans la thorie de Jacques Lacans e r a pour nous faire d lune p ie r re deux coups. Cela nous mnera -

    c ' e s t du moins notre proje t - en prc i se r le contenu dans le cadreconceptuel qui lu i e s t propre , d'une par t , e t d 'au t re par t marquerle s l imites de l 'accord de cette pense - et sans doute de toute la pense p s y c h a n a l y t i q u e ~ a v e c le s t ruc tura l i sme moderne.

    A - Le (a), mdiation du sujet l 'Autre

    Le (a) (je ne dis pas encore l 'objet (aves t prsent ds le plusancien graphe de Lacan(1) o celui -ci pa r t de la thorisation propose dans le Stade du miro i r (1936-1949). (a) peut se comprendre a lors

    dans sa relation a ' (qui aura les plus t ro i t s rappor ts avec le futuri (aL c ' e s t dire l ' image spculaire) comme lment de l ' indispensable mdiation qui unit le sujet l 'Aut re . I l es t c l a i r que cette s i tuat ion du stade du miro i r - qU'il es t moins important de dater commestade que de dsigner comme situation structurante - ne peut secomprendre qe s i l 'on prc ise que ce n ' e s t pas ic i la psychologiequi e s t en cause (qu' i l s 'ag isse de P r e y e r ou de Wallon) mais la psychanalyse. La psychanalyse qui donne l 'enfant i ssu de sa mre unesignification qui pse su r tout son dveloppement: savoir qu ' i l e s tle substi tut du pnis dont la m r e es t prive et qui n'accde sonstatut de sujet que de prendre sa place l o i l manque la mre donti l dpend. Ce substitut es t le l ieu e t lien d'change ent re la m r e e tle pre qui, pour a voir le pnis, ne peut pour autant le c r e r (puisqu' i l l ' a ) .

    La relation (a) i (a) va doubler la relat ion que nous venons dedcr i r e .

    B - Le (aL mdiation du sujet l ' idal du Moi

    Vient ensuite le quadrangle d it schma R (2). Ici encore s ' oppose le couple deR tensions entre le systme des ds i rs ( lM) et le sys tme des identifications (ml). Le a s ' in sc r i t su r la ligne (iM) qui, p a r-tie du sujet S vers l 'objet pr imordia l M (l a Mre) se consti tue t r a -vers les figures de l ' au t re imaginaire . P a r contre l 'a 1 s ' in sc r i t su r

    (1) Ce graphe, dit "schma L ", es t reproduit dans l ' Introduction au

    "Sminaire su r la le t t re vole". La Psychanalyse. Vol. Il, p. 9(2) Ce graphe es t in t rodui t dans "D'une question pr l imina i re tout

    t ra i tement possible d'une psychose l . La Psychanalyse. Vol. I I ,p. 22 . Cf. infra p. 18

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    3/23

    17

    la ligne qui va du su je t l ' Idal du Moi trave r s les formes spcu-1a i res du moi . On voit comment le quadrangle dr ive du Z dont i ljoint l e s points qui dans le p r e m i e r graphe ne sont at te ints que p arun pa rcou r s d tourn . On pourra i t i c i r e l eve r que dans le champ de

    l ' imagina i re les deux di rec t ions du su je t vont soi t ve r s l 'objet , soi tvers l ' ida l . On sa i t que dans l a pense freudienne cet te or ienta t ione s t t ro i tement dpendante du narc i s s i sme . On notera a lo r s que l 'Aut r e , venu au l ieu du N o m d u P r e , s i tu dans l e seu l champ du s y mbolique, au ple oppos au su je t i c i identique au phal lus , ne s 'a t te intque p ar l e s deux voies que nous venons de dc r i r e plus haut , objecta le ou narc i ss ique , mais j ama i s de faon di rec te .

    Le champ du r e l e s t compr is dans la tension des deux couplesmIxiM dont nous avons prc i s la s ignif icat ion. Mais c ' e s t au seu lchamp du symbolique qu'appara! l le t r o i s i me t e r m e , indispensable la s t ruc tura t ion du proces sus (1).

    c - Le (a), objet du ds i rEn effet , Lacan postule l ' ex i s tence d 'un Moi idal comme forme

    d'identification prcoce du moi cer ta ins objets qui jouent la foisco mm e objet d ' amour e t objet d'identification, mais en tant qu ' i l sront a r r a c h s , dcoups , pr levs s u r une s r i e qui fai t appar:;t!lrele manque. Moi qui par le , je t ' ident i f ie l ' ob je t qui te manque t o imme, dit Lacan . La re la t ion en t re (a) e t A e s t donc a ins i plus c la irement montre . Si A n'at te int sa pleine signification qu ' se souten i r du Nom du P r e qui n ' e s t , faut- i l le p r c i s e r, ni un nom ni unDieu, i l passe , nous l ' avons vu , p a r le dfi l mate rne l et ne s 'a t te intque lo rsque la coupure ent re le sujet e t l ' ob je t m a t e r n e l l e spare i r -rmdiab lement du dit objet . Ou encore lo rsque se r v l e ra le manque dont e s t affect l 'objet pr imordia l , dans l 'exprience de la c a st ra t ion . La s r i e des cas t ra t ions postule p a r F r e u d : sevrage , d r e s -sage sphinc t r ien , cas t ra t ion prop remen t d i te , rend cet te expr iencedans sa rpt i t ion, signifiante e t s t ruc turante , dans s a r cu r rence .

    (1) I l n 'e s t pas inuti le de fa i re ic i deux r emarques :a - dans les t ravaux psychanalytiques f r a n a i ~se dveloppe beaucoup la notion de re la t ion d 'objet (Bouvet) impor te des auteursanglo-saxons (M. Klein sur tou t , aprs Abraham). Lacan s 'y oppose en soulignant l 'absence de toute r f rence aux lments demdiat ion dans ces conceptions. Surtout - ce qui revient peut t re au mme - i l condamnera ce t te optique en tant qu 'e l le d bouche s u r une opposit ion Rel - Imagina i re , en c ra san t le S ymbol ique.b - L'opposit ion m oi ida l - Idal du Moi (Nunberg-Lagache) s e r tde pla te forme des dveloppements thor iques de Lacan i n s r sdans la perspec t ive du rappor t l ' A u t r e .

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    4/23

    18

    (Es) S ~ - - ~ - - -@'utre, . ~ ~" : . . ~ .' . ~ .

    ~ . ~ ~; ' 4 ' ~~ t > o

    (moi) a - - - + - - - " @utre

    m

    1

    ", i, . - - - - - - - - - ~ ~ ~ ~ M:5,,,,1

    L g e n d e :

    A p

    S c h m a L

    S c h m a ~

    Idal du Moi, M : signifiant de l 'objet pr imordia l (mre)

    P posit ion en A (grand Autre) du nom du P r eS : su je t

    j : Imaginaire , R : re l , .g: symbolique'P phallus

    segment iM ( sur le parcours sM _ Si, SaI

    ,a : f igure de l ' au t r e imaginaire

    2 3Sa , Sa .... SM )

    segment ml (sur le parcours SI - - - . Sm, Sa i l , Sa '2 , Sa'3 . . . SI )

    a ' identif ication du moi su r le chemin de l ' iden t i -f ication paternel le l ' Idal du Moi.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    5/23

    19

    L'objet (a) se r a donc ce qui de ces expriences, va choir, comme dit Lacan, de sa position d' ' 'exposant au chartlp de l 'Autre" (1),mais pour atteindre ce statut d'objet du ds i r. Le tr ibut pay ce tte accession es t d'exclure le sujet dsirant , dire , nommer, l 'ob

    je t du ds i r.D'avoir t situ au champ de l 'Autre permet maintenant de con

    cevoi r la fonction de mdiation qu'un te l objet joue moins entre le suje t et l 'Autre, que dans leur r appo r t ; mon ds i r entre dans l 'Autreo i l es t attendu, de toute ternit sous la forme de l 'objet que je suisen tant qU'il m'exile de ma subjectivit en rsumant tous les signifiants, quoi cet te subjectivit est attache (2).

    Nous savons que le fantasme permet l ' tabl issement de cetteformule de rapport , en tant qu'il y rvle le sujet en effaant sa t r ace . Le fantasme comm structure constitutive du sujet , o celui -cis ' impr ime en creux, par lequel la fascination opre, ouvre su r larelat ion de l 'objet(atavec le Moi idal

    D - Le (a) ftiche

    Cette formulation indique tout ce qui spare la thorisationde La.can de celle de s autres a.uteurs. Disons schmatiquement qu'alors qu e ceux -ci vont surtout marquer l ' aspect positif des qualits

    de l 'objet, Lacan valorise l 'approche ngative. Un exemple cla i r nousle montre. Devant l ' image de la mre phallique, les auteurs postfreudiens diront qu'elle e s t terr i f iante parce gue phallique. Parceque le phallus peut. t re instrument de malfaisance, arme des t ruct r ice , etc . . . Freud disai t que la sidrat ion produite par la tte de Mduse oprai t parce que les rept i les qui lui tenaient l ieu de chevelurevenaient nier, autant de fois qU'il y avai t de serpents , la castrat ionqui par ce renversement se rappelait de faon multiplie celui quila vou la it,annule r . Lacan suivra plus volontiers cet te dernire voie.Le cas du ftichisme su r lequel i l reviendra longuement se ra l 'apologue de ce mode rflexif. L'objet du ftiche se r a le tmoin, le voile du sexe chtr - du manque au champ de l 'Autre.

    E - Le (a) objet du manque, cause du ds i r

    A propos de son sminaire s ur le Banquet (3) nous apparana vec une force part icul ire la structure mtonymique e t mtaphorique de l 'objet (a) dans le reprage que fait Jacques Lacan dans le texte de Platon de la position particulire des agalmata, dans le dis-

    (1) "Remarques su r le rapport de D. Lagache". La Psychanalyse, vol.VI, page 145.

    (2) Sminaire su r "L'Angoisse"(1963)non publi . Je paraphraseLacan, ne pouvant le ci ter.

    (3) Sminaire su r "Le Banquet" (1960), non publi.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    6/23

    20

    cours d'Alcibiade o celui -ci dpeint Socra te : "n e s t tout parei l des si lnes qu'on voit plants dans des ate l ie rs de sculpture et qu eles ar t i s tes reprsentent tenant un pipeau ou une flte; ls ent r 'ouvre - t -on p a r le milieu, on voit qU' l ' in tr ieur i ls contiennent des f igurines de dieux. " Nous avons affaire la fois au fragment de corps , la part ie du corps et sa symbolisation, et ceci e s t prendre la le t t re , sous la forme de la figurine divine.

    C'es t justement en tant que ce t objet (a) va surg i r comme objetdu manque qu'il va se dployer su r un double regis t re qui se ra lafois la rvlation du manque de l 'Autre et la fois le manque tel qu'i lapparaft dans le processus de signification. Ce qui manque l 'Autre ,c ' es t ce qu'il n 'es t pas donn de concevoir. Le (- ft' ) qui s ' introduitic i sous la forme de ce qui n'apparaft pas, - c ' es t le Rien qui n 'es tpas figurable - sous lequel s 'ordonne la rencontre avec la castrat ioncomme impensable, dont l 'hiatus es t combl avec le processus de s ignificantisation, par le mirage du savoi r. Je cite enco re : "(a) symbolise ce qui, dans la sphre du signifiant comme perdu se perd lasignificantisation. Ce qui rs is te cette perte es t le sujet dsign ,ds qu'entre en jeu le processus du savoir, ds que a se sa i t , i l ya quelque chose de perdu" . C'es t cette apparit ion sous la forme del 'objet du manque qui spcifie ce autour de quoi va tourner notre expos, savoi r la nature non spcularisable du (a). Tout se passecomme s i le sujet b a r r prend fonction de i(a) comme s 'exprimeLacan ou encore comme si /court-circui tant l ' impossible spcular isation du manque, le sujet s ' identifie ainsi au savoir, venant en lieue t place de la perte qui en susci te la promotion, recouvrant cette pe rte jusqu' l 'oubli de son existence.

    A par t i r de cette apparit ion du manque, va jouer la fonction deres te i s sue du ds i r de l 'autre, fonction de res te qui se manifestecomme rsidu lch p a r la bar re , qui affecte le grand Autre et dontl 'homologue dans le sujet l ' in tresse au savoi r. L encore Lacan faitune distinction d 'ordre logique o la nullification ne supprime pasl 'avoir, ce qui justement fait apparaftre le res te .

    Fonction de res te , c ' e s t ce qui es t sauv de la menace qui psesu r le su j e t ; "le ds i r se construi t su r le chemin d'une quest ion:n ' t re" . L'objet (a) e s t la cause du ds i r.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    7/23

    21

    F - Le (a). produit d 'un t rava i l

    On peut penser, bien que Lacan ne le dise pas e x p r e s s ~ m eque la dimension progress ion - rgress ion peut const i tuer un plancor r la t ceux de la conjonction-disjonction et de la suture-coupur e . Les dveloppements engendrs su r le plan du savoi r se ront prendre dans l eur perspect ive ngative, renvoyant au plan de mconnaissance o i ls se sont organiss dans la dmarche du processus designificantisation, - qui tend sans relche annuler ou nullifier laper te de l 'objet - , ce qui s ' e s t signifi autour de cette per te , Barles t r aces l a i sses de ce t ravai l , dont l 'objet (a) s e r a le repre.le pluss a r , l ' index de la vri t point vers le sujet . Freud ins is te , danss es oeuvres t e rmina les su r la vri t historique laquelle vise la"construction" de l 'analyste . Le canal de la demande consti tue le fi l

    conducteur de ce t accs la vr i t . Sa fonction n 'es t pas seulementde s e r v i r de guide, mais de former le dess in mme de ce t i t inra i redes chemins de la vr i t .

    Ce rappel o nous n'avons voulu garde r que le minimum indispensable au dveloppement qui va su ivre va nous permet t re de pose rquelques problmes .

    a - Etant donn la relation de l 'objet (a ) la reprsentation, i lconvient de se demander quels sont le s rappor ts de ce l le -c i avec lachafne signifiante. Le manque reprsent a - t - i l quelque relat ion avecla parole comme concat"nation.

    b - Faut- i l accorde r - en se tournant vers Freud - le statut de s ignifiant au seul Vorstellung - reprasentanz ? Qu'en e s t - i l de l ' a ffec t?

    c - N 'y a- t - i l pas dans l 'oeuvre de Freud un point quant la r eprsentat ion qui n 'a pas trouv d'cho chez Lacan : l a dis t inct ion en.,.t r e dfrents types de reprsentat ion (de mots e t de choses p ar exemple). qui pourra i t conduire diffrencier encore davantage, pour sou-

    . l igner le ca rac t re original de la concatnation freudienne.

    d - Si le savoi r es t ce qui vient au l ieu de la vr i t , aprs la pertede l 'objet , n 'y a - t - i l pas l ieu de r e l i e r l 'un l ' au t re p ar le s t races decet te perte et la tentative de l eu r effacement.

    Ce sont ces questions qui permet t ront de cons idrer l 'objet (a)moins comme support de l 'objet pa r t ie l que comme parcours d'unemain t raante , inscr ipt ion, le t t re , a .

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    8/23

    22

    II - LA SUTURE DU SIGNIFIANT, SA REPRESENTATION ET L'OBJE T (a)

    J ' en viens ce qui va const i tuer un autre axe de mon expos, savoir la relation du (a) avec la coupure et la suture, e t je me r fre ra i l 'expos de J .A . Miller concernant la thorisation, pa r t i rde l 'ouvrage de Frege , de la logique du signiant (1). Ceci pour biens i tuer la position du nombre zro dans la mesure o elle va avoir uneincidence su r le destin du (a).

    En vertu du principe selon lequel, pour que la vri t soi t sauve,chaque chose es t identique so i et ~ r oes t le nombre assign auconcept "non identique soi" , i l n 'y a pas d'objet qui tombe sous ceconcept.

    Mais, dit Miller parlant de Frege . " i l a t ncessaire, afin quefllt exclue toute rfrence au re l , d'voquer, au niveau du concept,un objet non-identique soi - rejet ensuite de la dimension de la vr i t " . Le 0 qui s ' inscr i t la place du nombre consomme l 'exclusionde cet objet : Quant cette place, dessine par la subsomption, ol 'objet manque, r ien n 'y saura i t t re cr i t , et s ' i l y faut t r acer un 0 ,ce n 'es t que pour y f igurer un blanc. rendre visible le manque". Ily a donc ic i d'une par t l 'vocation et l 'exclusion de l 'objet non-identique soi , e t d'autre par t ce blanc, ce t rou, la place de l 'objet

    subsum.La notion d'unit es t donne par le concept de l ' identit, concept

    de l 'objet subsum. Mais sa place de un, non plus en tant qu'unitmais en tant que nombre un, reste problmatique quant sa place depremier, ~ u a n t sa primordial i t , s i j 'ose ainsi m'expr imer.

    Le nombre zro , f a i t remarquer Miller, i l n 'es t pas lgitime dele compter pour r ien, et la logique V'oudrait alors que l 'on confre ce nombre zro le rle de premier objet.

    La consquence en es t l ' identit au concept du. nombre zro quisubsume l 'objet nombre zro en tant qu' i l es t un objet. La pr imordialit, en somme, ne peut s ' ins taurer sous l e s igne de l 'unit, maisdu nombre par t i r duquel le un est possible . le nombre zro . Ainsiun double regis t re recouvre un fonctionnement qu'il faut dplier pourcomprendre l 'ambiguit du nombre zro en tant qu' i l inc lu t :

    - le regis t re du concept de non-identique soi- le regis t re de l 'objet. matrice de l 'un. objet permettant l ' a s -

    signa ion du nombre un.

    (1) Le texte de cet expos es t paru dans le n 1 des Cahiers, pourl 'Analyse, sous le t i t r e : "La suture".

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    9/23

    23

    Alors se dcouvre la double opra t ion:

    - l 'vocation et l 'lision du non-identique soi , avec un blanc auniveau de l 'objet subsum permettant le nombre zro

    - l ' introduction du zro comme nombre, c ' e s t dire comme nomsigniant et comme objet.

    Cette situation a surtout un intrt pour nous en tant qu'elle spcifie la structure de la concatnation. Non seulement le sujet s 'exclutde la scne et de la chafue signifiante du fait mme qu i l la constituecomme sujet dans sa s t ruc ture de concatnation, mais le premier deces objets joue la fois comme concept et comme objet, non reprsent mais dnomm objet unaire et concept su r la non-identit so i ,concept de menace pour la vri t , et ceci d'autant plus qu'i l es thorsjeu ou hors -je.

    Ce concept de menace pour la vrit es t pour nous concept issude la rencontre avec la vri t , en tant qu' i l dissocie non seulementla vri t de s a manifestation (identit soi) mais y dsigne sa place,p ar le bla.nc ou la t race qui la ngative. I l es t insuffisant de n 'y voir(c 'est le cas de le dire) qu'un simple rapport d'absence. I l faut ncore que soi t ic i cern son rapport de mangue la vri t .

    L'intrt pr is par nous cette confrontation avec Frege lu parMiller es t de l i e r le sujet au signifiant. L e sujet s ' identifie la r ptition qui prside chacune des oprations par lesquelles la concatnation se noue, dans la pr ise de chaque fragment par celui qui leprcde et celui qui lui succde : dans le mme t emps e t dans le m me mouvement, le sujet se voit autant de fois rejet hors de la scne - et de ma chafue - , qui ainsi se constitue. O r, s i l 'opra t ionl 'exclut chaque tape, la nullification ne supprime pas l ' avoi r gui subsiste pour nous, condition de savoir la reconnanre sous la formedu {a).

    L'effet de concatnation rejoint la dfinition par Lacan du signif iant : "le signifiant es t ce qui reprsente un sujet pour un autre s ignifiant". S'claire ainsi ce qu' i l es t des rapports du sujet et de l 'obje t a , dans leurs relations de suture e t de coupure. "Si la suite desnombres , mtonymie du zro conunence p ar s a mtaphore, dit Miller,s i le 0 nombre de la suite comme nombre, n 'es t que le tenant-lieu su turant de l 'absence (du zro absolu) qui se vhicule dessous la chafuesuivant le mouvement al ternat if d'une reprsentat ion et d'une exclusion, - qu'est ce qui fait obstacle, reconnaftre dans le rapport r e s -titu du zro la sui te des nombres , l 'ar t iculat ion la plus lmenta i re du rapport qu'avec la chafue signifiante entret ient le sujet ? I l

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    10/23

    24

    Je laisse ic i l a question du rapport du sujet au grand Autre parl 'effet du zro (1), mais vais m'employer soulever deux problmes,ceux de la suture et celui de la reprsentation.

    A - Le problme de l a sutureLeclaire s ' e s t lev l contre cette suturation infre par Miller.

    La question demeure : y a - t - i l ou n 'y a - t - i l pas su tu re? Ce qui dsigne la position du psychanalyste l 'endroi t de la vri t ne sera i t - i l .pas justement ce privilge de n'avoir pas su tu re r? Comment nierqu'il n'y ai t suture s ' i l y a concatnation.

    J ' en voudrais pour preuve ce t argument de Freud trop souventoubli su r les consquences de la castrat ion. Si cel le-c i es t possible ,

    s i la menace vient excution, elle ne prive pas seulement le sujetdu pla is i r masturbatoire . mais elle a , comme implication hautementredoute, l ' impossibi l i t dsormais dfinitive pour le sujet chtr del 'union avec la mre . Qu'on voie ici la castrat ion comme l 'effrondrement de tout le systme signifiant par la rupture de toute possibili tde concatnation, explique que Freud la compare un dsastre dontles dgts sont incommensurables . E n tous cas le pnis joue ic i lerle de mdiateur de la coupure e t de la suture.

    Comment cela peut- i l se s u t u r e r ? Jacques-Alain Mil ler, je viensde le dire , a montr l 'ascension du nombre zro, sa t ransgression dela bar re sous forme du un, son vanouissement lors du passage de n n ' qui es t n + 1. Mais on n 'a pas tor t non plus de faire valoir que la

    (1) Je voudrais avant d'avancer dans mon propos ouvrir un e parenthse su r une certaine vacillation de la pense freudienne ce sujetqui a branl le jugement de son commentateur Strachey dans laStandard Edition (vol. XXII, p. 65). Elle concerne l 'expression

    I l der Tri iger des Ich-ideals" t radui t p a r : le vhicule de l ' Idal duMoi, comme fonction du Sur-Moi. Ce te rme d e vhicule donne penser. Loin qu'il faille y voir une image de support mcanique,maisau contraire y re lever en l 'occurence un des quelques indices qui nous autorisent par le r d'une cbnecption du sujet de l ' inconscient comme Entzweiung. La fonction de l ' Idal "Ideal-funk-

    tion" s 'y rvle fondamentale. dpassant et de loin le rang d'une foncf O n ~ i o n .mais devant se rat tacher ce que Freud nomme plusheureusement : "Les Grandes Institutions" qui marquent une i n s -

    tance"ici le Moi pour ce qu'il fait y fonctionner sous le nom d 'preuve de la ral i t . (Complment mtapsychologigue la doctrine desrves) . L'ide de ces Grandes Institutions me paraIt propre qual i f ier cette "fonction de l ' Idal".

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    11/23

    25

    logique d'un IIconcept inconscient ll a des exigences qui sont internes sa formation. Citons ici Freud (avec Leclaire) : IIFaeces ll , "enfant I l , IIpnis Il forment ainsi une unit. un concept inconscient (sitvenia verbo). Le concept nommment d'une IIpetite chose" qui peutse sparer de son propre corps ( par. VII).

    A une opposition du type binaire. celle que la linguistique nousoffre, celle de la phonologie o les rapports sont toujours poss ente rmes de couples antagoilistes et cel le qU'on met la base de t o u ~ einformation, on substitue ic i un processus opratoire t ro is te rmes(n, +,n') avec vanouissement d'un te rme sitt qu'il s ' es t manifest.Nous trouvons l une sorte de paradigme qui peut nous donner la voiede ce que pourrai t tre le dcoupage du signifi.

    En effet les linguistes se montrent extrmement embarrasss loriqu'il s 'agit du dcoupage du signifi alors que le dcoupage du signifiant ne prsente pour eux aucun,e espce de difficult semble-t-U. Sipar exemple j 'en crois Martinet je l i s : IIQuant IIsmantique ll s ' i la acquis le sens qui nous in tresse . i l n'en es t pas moins driv d'uneracine qui voque non point une ral i t psychique mais bien le processus de signification qui implique la combinaison du signifiant et dusignifi ' j"un sme en tout cas ne saura i t tre autre chose qu'une unit double face". (1).

    L'embarras nan ic i de ce que toute rfrence directe au signifiruinerai t la dmarche structural is te , puisque son accession par l avoie du signifiant cre le dtour ncessaire une apprhension indirec te , relative et corrlat ive. En outre, e t surtout, le .reprage dest rai ts pertinents nous laisse ici dans la perplexi t .

    En dfinitive, ce qui manque ici de support consistant es t la structure du corps . C ar l 'assurance de tenir pour fermes les t rai ts per t inents en phonologie ne repose-t-el le pas en dfinitive su r le fonctionnement de l 'apparei l voca l? Sans doute est - i l sous commande nerveuse , ce qui explique la fascination des linguistes pour la cyberntique.Le psychanalyste es t ic i le seul se mettre l 'coute du sens . sonniveau, c 'es t dire considrer, en respectant la mme exigencede rfrence indirecte. que le dcoupage passera au niveau du signifi, e t que c 'es t ce dcoupage mme qui impliquera un dcoupage dusignifiant qui rend intelligible le signifi. Ici se repre l 'ambiguitqu' i l faudra bien lever, entre la conception linguistique du signifiantet sa formulation psychanalytique tel le que Lacan le conoit. Maiss 'agit -il du mme ?

    ( 1) A. Martinet. La linguistique synchronique, p. 25

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    12/23

    26

    Vous avez sans doute reconnu dans cet te unit double face lathorisation de la bande de Moebius de Lacan (1). Mais ne peut-onpas considrer que le dcoupage du signifi, dans cette sr ie mtonymique des diffrents objets part iels es t reprsent par le phallus,

    justement, en tant qu' i l vient apparaft re , sous la forme du ( -Cf

    )dans ses diffrents objets part iels . dont l a succession diachroniquevous est connue : objet oral . objet anal. objet phallique. etc . . . cest e rmes ne reprsentant que l eu r reprage quant aux zones rognes,la issant la place des formes plus complexes.

    Ceci pourrai t conci l ier un choix ent re un systme binaire s t r ic tqui nous renvoie des options te l les qu'el les ne nous la issent pasde mdiation t i e rce . e t un autre systme o la causalit es t dveloppe en rseau. un systme de type rt iculaire. qui fait disparaftre

    tout fonctionnement de type oppositionnel.Finalement i l paraft bien que la forme minima de cette s t ruc ture

    rt iculaire es t la s t ruc ture triangulaire o le t ie rs es t vanouissant.C'es t , je crois , l 'opration cla i re pa r le commentaire de Miller.

    Ceci peut nous voquer les diverses formes de relations auxquelles nous avons affaire dans l 'Oedipe o une opposition. celle dela diffrence des sexes, en tant qu'elle es t supporte par le phalluses t en fait insre dans un systme tr iangulaire e t ne s 'apprhende

    jamais que par des relations deux d e u x ; o le phallus constituel 'talon des change s , sa cause.

    Saussure a eu le mrite de placer au principe de la langue com - .me systme, la valeur, esquissant cet endroit la comparaison avecl 'conomie politique. Mais pour l ' avoi r ains i dgage,il n 'es t gureal l plus loin et ne s ' es t pas pos la question de ce qui a valeur pourle sujet parlant . Ainsi la suture s 'accompli t ic i en laissant se profile r la valeur, en cause, sans r ien nous dire d'el le .

    C'es t ici qu e nrus rencontrons la fonction de la cause dveloppepar Jacques Lacan. ~ i , avec Frege , l ' identit soi a permis le passage de la chose l 'objet, ne pouvons-nous pas penser que ce quenous venons de montrer peut fonctionner comme relation de l 'objet la cause? On peut conclure que l 'objet es t la relation signifiantequi peut re l ier les deux te rmes de la chose e t de la cause. Nous aur ions ic i peut - t re un de ces exemples dont parle ce t art icle aujourd 'hui contest de Freud su r le sens antithtique des mots primitifspuisque nous savons que chose et cause ont une racine commune. lamdiation se trouvant ic i passe r par l 'objet.

    (1 ' Cette thorisation es t mene au cours du prsent sminaire deJ . Lacan.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    13/23

    27

    En somme, nous ass is te r ions au passage de "l ' indtermin" " l ' ta t de ce qui es t ou opre" , de "ce qui es t en fait" "ce qui e s tde l 'o rdre de la ra i son , du sujet , ou du motif" par l ' intermdiairede l 'objet en tant que sa dfinition-est : "ce qui se prsente la vueou affecte les sens" (1).

    B - Le problme de l a reprsentat ion

    Ici se pose alors notre deuxime problme, savoi r celui de lareprsentat ion. Il m'avai t sembl que Miller avait fait pe u de place toutes les rfrences la reprsentat ion dont Frege use. Cependanti l a conserv, dans le passage cit plus haut, la notion d'un mouvement al ternat i f d'une reprsentat ion et d'une exclusion. La fonctionde rassemblement , de subsomption, es t sol idaire de la notion d'un

    pouvoir qui met ensemble, et qui, au prix d'une coupure (celle dupouvoir de rassemblement l a chose prsente) . reprsente. C 'es tl a coupure gui permet la reprsentat ion. O r ic i le nombre zro figure comme objet sous lequel ne tombe aucune reprsentat ion. C'es tp a r l 'oprat ion mme de la coupure qu'advient , s 'accompli t , le sujet , je dira i su r le dos, aux dpens, de l 'objet . Comme s i l 'on pouvait d i r e : qu'importe la coupure (du sujet) puisque res te la suture(de l 'objet (a. C'es t ce que ra l i se , pour a ins i dire , le sacrif ice del 'objet par le ds i r. Qu'importe l a perte de l 'objet s i le ds i r lui s u rvit et lui perdure . Quelque chose auss i qui sera i t de l 'o rdre de : l 'obje t e s t mort , vive le ds i r (de l 'Autre) . La demande devient ce quiassure la rsurrec t ion renouvele du ds i r au caS o i l viendraitlu i -mme m a n q u e r ; elle se formule t r avers l 'objet (a).

    La demande que ne soutient aucune cause , cause dont l 'effet es tle t rou, p ar lequel le res te se confondrait avec la demande, n 'es tce pas ainsi que le fou - le bouffon : Polonius - voit le fou -Hamletamoureux de sa fille et incertain vengeur du Pre mort - qui ferapr i r un autre pre , celui del 'objet de son ds i r (Polonius) la su i

    te d'une "tragique mpr i se" ."That l have found

    the very cause of Hamlet 's lunacyl will be brief . Your noble son 1s madMad cal l l i t ; for to define i rue madnessWhat is ' t but to be nothing else but mad."

    et plus loin :

    (1) Les te rmes entre guillemets sont ceux uti l iss p a r Lit tr auxa rt ic les chose, cause et objet.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    14/23

    28

    "That we find out the cause of this effect,Or rather say, the cause of this defect,For this effect defective cornes by causeThus it remains, and the remainder thus.

    Perpend" .Hamlet acte II, scne II, V, 48-9, 92-4, 100-5

    II I - LA RELATION (a) i(a) ET LE PROBLEME DE LA REPRESENTATION ET DE LA SPECULARISATION

    Lacan insiste avec force sur le fait que l 'objet (a) n'est pas spcularisable, le recours l ' image spcuaire n'est ni l ' image de l 'obje t ni celle de la reprsentation, elle est , dit Lacan dans son sminaire sur l'Identification (1962) un autre objet gui n'est pas le mme.Il est pris dans le cadre d'une relation o est en jeu la dialectiquenarcissique dont la limite est le phallus qui y opre sous la forme dumanque.

    O r, nous venons de voir l 'objet non figurable que reprsente lenombre zro.

    Qu'en est -il chez Freud ? A considrer le problme uniquementsous l 'angle de la dialectique narcissique, on court -circuite monavis le problme de la reprsentation. qui renvoie l 'objet de la pulsion. Freud le dsigne comme minemment substituable et interchangeahle, ce qui pourrait peut-tre appraftre comme un ddommagement l 'impossibilit de la fuite devant les stimuli internes, procdure intermdiaire, dirais -je, entre l 'change re streint et l ' change gnralis.

    Il faut qu' cet change participe comme terme chang un objetde pulsion, ce n'est donc pas n'importe quel objet qui fait l 'affairedans la substitution.

    Deux problmes ic i se prsentent devant nous. Le premier estcelui de la distinction entre le reprsentant de la pulsion et l 'affect,le second est celui de la distribution diffrentielle du mode de reprsentation.

    A - Le problme de la distinction entre le reprsentant de la pulsionet l 'affect.

    La distinction entre le reprsentant et l 'affect est conjecturaledans l 'oeuvre de Freud, on le sait . Souvent la pulsion y est confondue avec le reprsentant et vice versa. Mais la fin de son oeuvre,nous savons qu'une distinction de plus en plus marque est tablieo - c 'est ce que je propose de prendre en considration - l 'affect

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    15/23

    29

    prend statut de signifiant. La preuve en es t que, depuis 1924,l 'emploi de la Verleugnung qu'on a propos de t raduire par dni es t deplus en plus spcifi ; ce qui va t rouver sa formulation la plus prcise dans l 'ar t icle su r le ftichisme (1927) auquel Lacan se rfre

    s i frquemment, l ' a r t ic le su r le clivage du Moi (1938) e t .enfin le chapitre VIII de l 'Abrg de psychanalyse (1939). La thse de Freud devient alors que la perception tomberai t sous le coup de la Verleugnungalors que l 'affect tomberai t sous le coup de la Verdrngung.

    La possibili t dans l 'a l ternat ive acceptation-refus d'un fonctionnement global ou portant seulement su r un des t e rmes (perceptionet affect) es t la condition de la suture diffrencie de certaines o rganisations conflictuelles.

    C'es t l . c ' e s t par t i r de cette distinction que Freud voit ce c l ivage du m o i : l 'Entzweiung que valorise Lacan. O r s i Freud cre unte rme quivalent au refoulement, le dni, qui a mme valeur smantique, i l faut probablement en conclure que, s i seul un signifiant peutsubi r ce destin, c ' es t que l 'affect ent re dans cet te mme catgorie.{l)

    J e pense mme que la dfinition du signifiant gagnerai t peut - t re t re complte la lumire de ce qui prcde : le signifiant se ra i ta lors ce qui, sous peine de s 'vanouir, doit pour subs is ter en t re r dansun systme de t ransformations o i l reprsente un sujet pour un autre

    signifiant tombant sous le coup de la bar re du refoulement ou du dniqui le contraint la chute de son statut d ' t re dans son rapport avecla vri t , chute p ar laquelle i l accde ou i l advient au rang de signifiant dans s a rsurrec t ion .

    I l y aurai t un certain intrt souligner la corrlat ion de cesdeux modes de signification. chacun englobant les deux mcanisme s .On ne voit dans l 'affect que la dcharge, alors qu' i l es t - Freud ledit pour l 'angoisse - signal (signifiant pour nous), on ne voit dans lereprsentant que le signifiant, alors qu' i l e st (dans la thorie f reu

    dienne) engendrement d'un certain mode de production, donc de dcharge (engendr p ar l ' impossibi l i t de celle -ci) .

    Dans Le Moi et le Ca Freud reprend la question dj voque.non sans difficult dans son art icle su r l ' Inconscient, de la diffren-

    ( l ) Je voudrais signaler que j 'avais at t i r l 'attention su r ce pointds m a critique du rapport de Laplanche et Leclaire parue dansles Temps Modernes en 1962. Mais i l es t c la i r qu' i l s 'agi t l dedeux types de signifiants diffrents. c ' es t dire que nous devonsgarder l 'affect sa spcificit comme dcharge face au reprsentant comme production, production en tant qu'elle es t entredans un systme de t ransformation combinatoire.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    16/23

    30

    ce entre le reprsentant et l 'affect . Ce qui qualifie l 'affect es t qu' i l nepeut entrer dans aucune combinatoire. Il es t refoul, mais sa spcif icit en tant que signifiant es t d'tre exprim directement , de ne paspasse r pa r les l iens de connexion du prconscient .

    Dans son sminaire su r l 'angOisse, Lacan a lucid et dmontrce qui dclencilie l 'angoisse, la faon dont a opre quand i l y a del 'angoisse. Mais je me demande q ' i l a bien rendu compte de ce qu'estl 'angoisse au sens du statut qu'elle a dans la thorie . Je cro i s qu'ily a intrt considrer l 'affect comme une forme smantique originale ct des smantides pr imaires (1) que sont l e s reprsen tan t s ;celui -c i fonctionnerait dans une position seconde qui lui permet t ra i td 'acqur i r le statut de smantide secondaire d'une nature diffrentede celle du reprsentant e t redoublant l 'Entzweiung dans cette diff

    rence. I l Y aurai t l redoublement de l a non-identit soi par cettedispari t des deux regis t res du signifiant.

    Contrairement l 'opinion reue, i l est t rs curieux de voir queFreud fait du langage ce gui t ransforme les processus internes enperception, et non pas , comme on pourra i t le penser, ce qui s ' a r r a -che du plan perceptif , et qui appartiendrait l 'o rdre de la pense.Avec l 'affect nous sommes en prsence d 'un effet d 'effacement de lat race perue restitue sous forme de dcharge.

    Qu'en es t - i l du reprsentant? Les c'onsidrations de terminologie ne sont pas ic i inutiles. Cela n 'es t pas pour r ien qu'on a longteJllps discut pour savoir s ' i l fallait appeler le "Vorstellung- repra

    sentanz " le reprsentant reprsentat i f , le reprsentant de la t 'eprs ~ n t a t i o n ,le tenant-lieu de reprsentat ion. Il entre dans la combinatoire , nous le savons. C'es t ic i que commence l 'ambiguit. I l n'yentre pas t i t re d'unit homogne identique soi . La clairvoyancede Freud dans son domaine a t de faire ds le dpart cette dist inct ion exclusive, prsente dans vos mmoires . en t re la perception etle souvenir. Souvenons-nous du rle qU'il fait jouer la rminiscence en tant qu'elle sera i t . s i l 'on peut dire , le souvenir au l ieu del 'Autre, mais qui garde par devers el le la t race non sans perdre sa.qualit de souvenir s i elle vient se vivre dans l 'actualit.

    B - Le problme de la distribution diffrentielle du mode de reprsentation

    Un autre type de diffrenciation nous in tresse ic i , celui des r eprsentat ions de mots et des reprsentat ions de choses, distinctionqui n 'es t pas contingente. Je ne rappelle ceci . qui es t dj connu,

    (1) Ces termes sont emprunts au vocabulaire de la biologie molcu-1aire .

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    17/23

    31

    que pour avancer que : s ' i l y a une thorie du signiant chez Freud,elle ne peut viter de passer par le peru. Ceci est sensible dansl 'organisation du discours. Dans le rci t de l 'analys, l ' laboration secondaire du rve. le fantasme actuel ou ressuscit . l ' image.en sont les tmoignages renou.velsdans le texte de nos sances.

    L a

    question est de savoir s i tout cela es t vraiment de l 'ordre du peru.Ce reprsentant de la reprsentation montre qu'on ne peut rame

    ner son statut celui de la perception. Notons une fois de plus qu'iln 'es t jamais question de prsentation mais de ~ r s e n t a t i o n .Le peru ne reprsente gue le point de fascination. l 'effort de centration dela spcularisation comme dirait Lacan. Ce qui permet de fonctionnercomme zro . est de l 'ordre du sujet, mais ce qui va monter et prendre la place du un es t ici l 'objet (a), condition qu'on le considredans cette distribution diffrentielle, o la non-identit soi se m anifeste dans cette dispari t .

    Le point de vue conomique s ' i l lustre ici de ne pas seulementtre en cause lorsqu' i l s 'agi t de l 'valuation quantitative des processus , mais de pouvoir tre identifi dans cette distribution diffrent iel le . C'es t l 'effet de barrage gui pse su r le discours qui contraintnon seulement l a combinatoire, mais encore aux changements deregis t re , de matriau et de modes de reprsentation du signiant.Ces mutations ont pour objet d'accentuer la non-identit soi nonseulement dans rsurgence du signifiant mais dans ses mtamorphoses mtonymiques. La mtaphore s ' infi l t re jusque dans l 'enchafuement mtonymique.

    Ce n 'es t pas pour r ien que Freud oppose deux systmes: ce quifonctionne au niveau de l 'un es t l ' identit des perceptions et dans l ' aut re identit des penses. C'es t en tant que tous les deux ont un rapport la vrit qu' i ls relvent de nos concepts. Mais le point de t rouble e t de fascination vient de ce que la perception puisse se donnerC ~ ! I l I n echamp d'identit alors que l 'identit y opre selon un regist re qui n 'es t pas celui du peru.

    Cette identit, c 'es t ce qui abolit l a diffrence comme soutenuepar le manque et qui trouve se matrial iser dans le peru, de lamme faon que l ' identit des penses dans l 'ordre du penser ne vient tre oprante qu'aprs la per te de l 'objet.

    Lacan ne me parai t pas avoir eu tout fait raison d'avoir svrement critiqu les travaux portant:su r l 'hallucination ngative.Tout au plus peut-on dplorer leurs repres imprcis . L'hallucinat ion ngative, s i elle est cette ascension du zro en tant qu'elle nerelve absolument pas de l a reprsentation, sera i t de l 'ordre du re .ersentant de la reprsentation. Sa valeur est de donner un support la notion d'aphanisis dont on sai t qu'elle a jou un rle s i important chez Lacan aprs Jones.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    18/23

    32

    Il faut auss i se souvenir de l 'alternative releve par La.can dansles travaux de Jones su r la sexualit fminine, dont l a porte es t p robablement plus vas t e : ou l 'objet,ou le dsi r. L'hallucination ngativedonnerait ainsi le modle d'une structure subjective, en tant qu'elle

    implique le deuil de l 'objet e t l 'avnement d'un sujet ngativ renduainsi apte au dsi r. Ne peut-on rappeler ic i que le s premiers modesde la reprsentation du sujet le premier i (a) - es t justement le produit d'une reprsentation homologue de l 'hallucination ngative: lamain ngative de l 'ar t is te apparue dans le contour de la peinture quien dlimite l a forme. On voit alors comment vient se p lacer le fanta s me , puisque c 'es t la fonction que Lacan lui assigne de rendre leplaisir apte au dsi r. Ici donc apparaft ne forme d'mergence d'unsujet qui chapperait l 'anantissement de l a puissance signifiantedans l 'aphanisis , puisque l 'hallucination ngative arr ive se produire mais comme mangue spcularis. Elle me pa raft t re le rapportinaugural de l ' identification narcissique au sens de Freud conue comme rapport au deuil de l 'objet primordial . Elle es t le point de rencont r e de la coupure e t de l a suture.

    I l devient clair que ce procs es t le mme qui fonde le dsi r comme dsi r de l 'Autre, puisque le deuil s ' es t interpos dans la relationdu sujet l 'Autre e t du sujet l 'objet.

    Si le (a) joue entre toutes ces formes' (on peut dire qu'il se jouede la fascination du peru en parcourant ces registres) , c 'es t bienparce qu' i l es t , non comme peru, mais comme parcours du sujet,circui t du discours. J 'en donnerai un exemple pr is dans Othello. DansOthello,c 'est le mouchoir qui peut apparaftre comme (a). En fait, c 'es tc ' e s t l que nous sommes tmoins de l 'effort de fascination du peru,l a vrit es t que ce n 'es t pas tant le mouchoir qui importe que le c i rcuit qu' i l fait de la magicienne qui l ' a donn la mre d 'Othello oudu pre celle-ci (les de11X versions sont dans Othello) jusqu' about i r su r le l it de Bianca, l a putain, pour finalement rvler Othello

    Son dsi r, "ma mre es t une putain". Ce qu'il faut dmontrer l 'aidedu savoiIj car athel lo cherche comme tout jaloux l 'aveu plus que lavri t .,

    N'es t -ce pas alors ainsi qu'il convient d'entendre son soliloque,lors de l 'entre dans l a chambre nuptiale ott i l va donner la mort Desdmone, pour faire de sa nuit de noces une nuit de deuil.

    "It is the cause, ft is the cause my soulLet me not name i t to you, you chaste s ta rs .It is the cause".

    (Acte V, scne 2, 1-3).

    La fonction de la case est ic i ordonnatrice de la perception, i n -dubitable, du mouchoir de sa mre entre les mains de la putain.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    19/23

    33

    Freud souligne dans l 'Abrg de Psychanalyse que nous vivonsdans l ' espoi r que nos instruments de perception de l a ral i t s ' a ffinant, nous pourr ions finalement accder la certi tude du mondesensible . E n fait i l accentue une fois de plus l 'aff i rmat ion que la r a

    l i t e s t inconnaissable e t que nous ne pouvons nous permet t re quel a

    dduction du vra i par t i r des connexions e t des interdpendancesexistant entre l es d ivers ordres du peru . Ceci es t videmment aff i rm e r la prminence ' du symbolique, s i besoin en es t .

    Mais son originalit fut d' introduire au niveau du peru un o r d r e ,une organisation, qui permet te de s o r t i r du di lemme de l 'apparencee t de l a ra l i t , pour lu i subs t i tuer celui de l ' ida l (Idealfunktion) e tde la vr i t , ce couple fonctionnant auss i bien dans l ' o rd re du peruque du pens. La confusion rpte plus d 'une fois entre le symbole

    e t le symbolique doit nous rendre, attentifs ne pas prendre l 'unpour l ' au t re .

    Qu'advient- i l alors de l 'objet (a ) ? Celui -c i exis te comme s t r u ctu re de t ransformation o l 'objet du ds i r procde une nouvelle m utation et o c ' e s t le ds i r qui devient objet . P a r quelle opration lerecoupement t r ave r s l a non -identit so i de ces formes numress ' accompl i t - i l ? Je cro is qu'on peut les sa i s i r selon les deux grandsaxes de la synchronie e t de la diachronie en prenant pour r frencela thorisat ion de Freud.

    1 - Dans l 'axe de la synchronie , nous avons une s r i e forme p arle s penses en tant qu ' i l s ' ag i t des penses de l ' inconscient (e t o i lfaut dist inguer ent re le s reprsentat ions de mots et les reprsentat ions de choses) , le s affects (comme signifiants secondaires) e t deuxau t re s catgories qui me para issent devoir en t re r en considrationpour autant que nous le s observons dans l a situation analytique e t nonhors d ' e l l e ; je pense aux tats du corps propre - dpersonnalisationou hypochondrie, etc . . . e t toutes les manifestations qui relvent dece que le s auteurs anglais appellent le s parapraxies comme expression du regis t re de l 'acte (l 'acting-in et non l 'act ing-out) .

    2 - Mais nous pouvons r ep re r galement une aut re s r i e su r l 'axede la diachronie qui es t l 'axe de la succession des objets ora l , anal ,phall ique, e tc . . . Je me demande s i l 'objet scopique et l 'objet auditifque Lacan fait en t re r dans ce regis t re gagnent t re inclus dans cettes r i e et s ' i l s ne font pas plutt part ie de ce regis t re de t ransmiss ionen t re la synchronie et la diachronie que l 'on peut repre r dans le d i scours sous les formes diverses du rve e t de son laboration secon

    da i re , du phantasme, du souvenir, de la rminiscence , bre f de toute s ces voies qui font fonctionner la synchronie e t la diachronie. C'es tsu r ce prlvement que s 'opre l a crat ion de l 'objet (a ) o le ds i rdevient objet e t rend compte des positions subject ives . Cette nonidentit so i que le blanc figure e s t l ie pour moi au processus d ' e ffacement de la t r ace . C ' e s t cela qui contraint ce sys tme la t r a n sformation.

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    20/23

    34

    IV - IDENTITE ET NON-IDENTITE A SOI: LA PULSIONDE MORT

    Le signifiant rvle le sujet mais en effaant sa t race , dit Lacan,C'est l , je crois , que se situe le divorce avec toute la pense s t ructuraliste non-psychanalytique: dans l 'opposition visible-invisible,dans l 'opposition peru-savoir, nous mettons en jeu l 'ordre de lavri t , mais en tant gue cette vrit passe twjours par le problmede l 'effacement de la t race .

    Freud dit dans 'Morse et le monothisme (1938): ' 'Dans sesconsquences, la distorsion d'un texte ressemble un meurtre, ladficult n 'es t pas d!en perpt rer l ' ac te , mais de se dbarrasserdes t races" , Or, c 'es t ce processus qui, par t i r des t races , permet de remonter leur cause que nous trouvons le processus mmede la paternit, Dans ' Morse et le monothisme , toujours, reprenant une remarque dj mise au moment de ' l 'Homme aux Rats' ; i lrappelle que la materni t est rvle par les sens tandis que la paternit est une Iconjecture: base sur des dductions et des hypothses.Le fait de donner ainsi le pas au' processus cogitatif su r la perceptionsensorielle" fut lourd de consquences pour l 'humanit".

    Je fais ic i remarquer que s i Freud a tabli un l ien t rs troitentre le phallus et la castration, entre la curiosit sexuelle et laprocrat ion, i l me para1t curieux qu' i l n'ai t jamais de faon explici

    te mis en relation le rle du phallus dans la procration, dans l edsi r d'enfant chez l 'enfant ou dans la curiosit sexuelle.Ce qui au niveau du sujet fonctionnecomme cause (dans l a r e

    cherche de la vrit en tant qu'elle es t question des origines, rapport au gniteur) fonctionne comme Loi au niveau socio-anthropologique. Ici auss i la combinatoire n'entre en action gue sous la contrainte de l a rgle.

    A la prohibition de l ' inceste, interdiction au vu et au su de tous

    qui retranche la mre et les soeurs du choix pour dsigner d'autresobjets leur place, s 'adjoint le rituel funraire qui tablit la prsence de l 'absent, du Pre mort . Doubleprocessus , remarquons-le , decoupure et de suture, Pa rmi les vivants, coupure de la mre et suture par ses substituts, parmi les morts suture de la disparition duPre par le rituel ou le totem qui lui es t consacr, coupure de lui parl 'au-del inacessible o i l se tient dsormais .

    Nous avons l un exemple, frappant de la coupure entre LviStrauss et Freud, qui ,s 'illustre dans une rencontre inattendue,

    A propos du masque (1) Lvi-Strauss insiste sur la fonction la fois ngative (de dissimulation) et positive (d'accession un autre

    (1) "Entret iens avec Jean Pouillon" L'Oeil. nO 62, fvrier 1960

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    21/23

    35

    monde). Mais i l paraft s ' ag i r pour lui d'une homologie, d'une cor respondance telle que dans cette ralit biface rien n 'es t d'aucune faonperdu en route. On pourrai t poser la quest ion: gu ' es t -ce gui contrain1 la dissimulation, qu'est-ce qui force cette structure sur un double

    plan?Lvi-Strauss parle d'un masque (Hamshamtss) des Indiens Kwa

    kiutl fait de plusieurs volets art iculs qui permettent de dvoiler, de"dmasquer" (sic) la face humaine d'un dieu cach sous la forme extr ieure du corbeau. Nous tombons d'accord avec lui pour conclure"qu'on masque non pour suggrer, mais finalement pour dvoiler",o ~ ce masque dploy fait apparaftre la face humaine, dans ce qu'onpourrai t prendre pour le fond de la gueule du corbeau. Il ne faut pasbeaucoup forcer les faits pour dire que la figure ici prsente fait

    apparaftre les quatre demi moitis du bec (2 suprieures et 2 infr ieures) comme les 4 membres d'un personnage dont le tronc es t r e -prsent par la face du dieu. L'analogie entre cette reprsentation etcelle dont Freud fait tat dans un texte extrmement court - il s'agitdes Parallles mythologiques une reprsentation obsessionnelle -es t frappante. Il Y dcrit une reprsentation obsdante qui vient hante r le patient sous la dnomination de Vater Arsch, et o es t imaginun personnage constitu par un tronc et la part ie infrieure de celuic i, ses quatre membres. et o manquent les organes gnitaux et la

    tte, la face tant dessine sur le ventre (1).Freud de conclure au l ien entre le Vater Arsch. le Cul du Pre ,

    et le patriarche. ce sujet portant bien entendu une vnration toutefiliale l 'auteur de ses jours , comme tout obsessionnel.

    Il me semble que ce que manque Lvi-Strausstc 'est ce sacrif icede la tte et des organes gnitaux que reprsente le masque Kwakiutl,qui dborde le rapport du montr ou cach mais rvle un rapportdu dvoil l 'effac. au bar r , au mangue. La cause du dsi r es t ici.

    La mtonymie es t pointe par Freud dans la reprsentation ducorps substitutive au manque d'une de ses par t ies , les gnitoires.Tout ceci prend sa valeur de nous ouvrir l ' intrt pr is par Freud la fin de sa vie Morse, non pas seulement en raison de sa qualit de Juif, mais aussi parce que le monothisme y appara1t troitement li l ' interdiction de l ' idoltr ie et l 'effacement total de toutsigne de la prsence de Dieu autrement que sous la forme des Nomsdu pre (Yahve, Elohim, Adonai'). Notons encore ic i le redoublementde la non -identit soi .

    (1) Ceci ,voque les ttes jambes et les grylles gothiques su r lesquelles G. Lascault a att ir mon attention cf. J . Baltrusaitis

    "Le Moyen-Age fantastique" (chap. I )

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    22/23

    36

    Le t ravai l de l a pulsion de mort qui toujours oeuvre dans le s ilence se repre dans cette rduction - le mot es t prendre dans tout e s ses dimensions - qui s 'efforce de toujours atteindre ce pointd'absence par o le sujet rejoint s a dpendance l 'Autre, s ' iden

    tif ier lu i -mme son propre effacement. La mutation du signifiant,son piphanie sous se s formes polymorphes e t distr ibues. indiquele sursaut qu'il entend opposer - comme dans le rve - cet anant issement e t son effort par lequel i l perdure profondment t raves t i e tmodifi, comme tmoin.

    Faut- i l voir encore ic i un t ra i t marquant du judarsme dans le s i -lence qu' i l fait de la vie dans l ' au -de l? Les deux faits sont peut t re l i s . Mais pour comprendre la logique de l 'effacement de lat race , peut-tre faut- i l recour i r d 'aut res catgories temporo

    spat iales que celles que nous connaissons. Peut -tre faut - il y t rouver ic i les s t ruc tures d'un temps e t d'un espace que seuls les prsocrat iques on t pu nous rvler /directement ou t r avers les analysesde Vernant et Beaufret, tous deux d'une faon t r s diffrente, mais onotre surpr ise es t de constater que ce temps et cet espace, ces lieuxe t cette mmoire au sens des Grecs , la cure analytique nous en fournit l 'accs privilgi.

    Le (a) se rvle sous les structures de la nosographie commeorganisation pismantique et sous les modes du discours de l 'analys , de sa par t smantophore. Ls analystes ont l le passage d'uneporte troi te . L'approche d'une technique psychanalytique s t ruc turale me paraft devoir tre base su r la diffrenciation des reprsentants et de l 'affect e t su r la distribution diffrentielle des reprsentants .

    On es t extrment frapp la lecture des travaux de techniquepsychanalytique de constater la carence totale su r tout ce gui concerne les modes de discours de l 'analys. Nous connaissons pourtant tousles difficuIt . j considrables des cures qui ne se conforment pas aumodle tabli par Freud de l 'associat ion l ibre. Ce qui y manque leplus souvent es t cette distribution diffrentielle d es modes de reprsentation qui tmoigne de la non -identit soi du signifiant conditionncessaire de l 'analyse. Je ne signale ce point que comme champ derecherches pOSSibles sans pouvoir m 'y a r r t e r davantage.

    La difficult essentielle de l ' investigation psychanalytique vientde ce qU'elle es t un discours contra in t : i l ne s 'agi t plus seulementde communiquer, mais de tout dire de la par t de l 'analys. Du ctde l 'analyste , elle es t une parole courante - verba volant - que celui -ci ne peut comme le linguiste ou l 'ethnologue enfermer dans sabofte. L'analyste court aprs la parole de l 'analys. Si la pulsion demor t infil tre la parole de l 'analys, dans le silence vers lequel ellele pousse toujours, c ' e s t une parole vivante que l 'analyste a f a i r e ;

  • 8/2/2019 l'objet a _ Andr Green

    23/23

    37

    vivante par son refus d'tre rduite au si lence, vivante p ar son caractre rf rac ta i re tout embaumement o le texte enfin conditionn seprte tous le s t ra i tements auxquels les hommes du savoir le soumettent.

    Nous saurons au juste ce qu'est le (a) lorsque nous aurons parcouru le champ des positions subjectives. Nous aurons alors une v i -sion qui se ra correspondante de celle du philosophe qui pense l 'h istoire et la culture t ravers les modes de dcouverte du mouvementdes ides, de l 'ar t , de la science de son t emps , mais comme un milieupolymorphe, htrogne o s ' i l lustrent diverses formes d'alination.Qu'on ne s 'y t rompe pas cependant. Le psychanalyste. ici , n 'es t pasdispos abandonner s a priori t quiconque dans l 'examen de cesfai ts . Quitte t re tax d' imprial isme, i l res te ra toujours en a r r t

    devant cette affirmation de Freud que les rel igions de l 'humanit enreprsentent les systmes obsessionnels, tout comxre les diversesphilosophies en reprsentent les systmes paranofaques. Les uns etles aut res sont valoriss en tant qu ' i ls permettent au sujet de se sent i r meil leur,di t Freud, pour avoir a insi chapp au ds i r e t russ i y instal ler autre chose s a place. Et nous aurions ic i , dans l 'o rdrede s projections du fonctionnement de la psych. les premiers lmentsd'une conception ou d'une thorie mimtique du fonctionnement du sujetLa psychanalyse n 'a pas encore puis les ressources de la mimesis .

    I l es t insuffisant d'at t r ibuer au psychanalyste une fonction de dmystification qui permette de conserver un cogito purg et purifi.C'es t en fait parce que Freud par t de ce qui e s t scor ie , dchet, h u xpas, qu'il dcouvre la s t ruc ture du sujet comme rappor t la vri t .Cel le-c i es t peut-tre moins proche de l ' image de Promthe chasspour avoir drob le feu qu e de celle de Philoctte abandonn des sienssu r une n e dserte cause de sa puante b lessure .