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Le culturel De ses débuts de prestations de la Sagouine devant les membres de sa famille, il a progressé aux soirées amateurs locales et, un peu plus tard, aux spectacles d’humour des troupes d’improvisation à la Polyvalente Roland-Pépin de Campbellton. C’est lors d’une journée carrière à la polyvalente qu’il se pointe devant le kiosque de l’Université de Moncton pour y voir de l’information sur le Département d’art dramatique. Ce qui l’attire, instantanément, est le mot « improvisation ». Un monde qu’il baigne dedans depuis plusieurs années. Déjà bien avant son entrée au Département d’art dramatique, il avait découvert que son créneau, c’était l’humour. « Quand tu fais rire le monde, c’est une sensation incroyable. Tu en veux encore, des rires. C’est un peu comme une drogue. » C’est en arrivant à l’université qu’il cimente sa relation avec son compère de longue date, Robert Gauvin. Les deux sont des mordus de l’improvisation et sont, aujourd’hui, reconnus comme étant des grands maîtres de cet art au Canada. Si beaucoup de jeunes étudiants universitaires passent leur temps à fréquenter les brasseries et les boîtes de nuit lors de leurs études, Luc LeBlanc et Robert Gauvin passaient de longues soirées à pratiquer leur art. Dans un appartement de la ville de Moncton, avec un groupe d’amis, ils pouvaient imaginer des scénarios et créer des sketchs pendant de longues nuits. Ces heures passées à perfectionner son jeu ont façonné le Luc LeBlanc que nous connaissons aujourd’hui, mais elles ont aussi eu un impact plus immédiat. En 1990, il joue un rôle de PAR STÉPHANE LEBLANC Dans la série de bandes dessinées « Astérix le Gaulois », le personnage d’Obélix est particulier parce que, selon la légende, il est tombé dans la marmite du druide quand il était petit et avait ingurgité toute une marmite de potion qui lui donnait des pouvoirs spéciaux en permanence. Luc LeBlanc, c’est l’Obélix de la scène culturelle en Acadie. Il est « tombé dans la marmite de potion » et il semble ne pas avoir de limites. Luc Leblanc C ’est dans un café du chemin Mountain à Moncton que j’ai fixé un rendez-vous avec Luc LeBlanc, figure de proue de la scène artistique en Acadie. Pour avoir vu ce comédien/humoriste/scénariste à l’œuvre à plusieurs reprises, je m’attendais presque à voir entrer Citrouille, ou un des frères Smouthe. Mais non, c’est plutôt le Luc LeBlanc chic, mais décontracté, de Luc et Luc qui s’est présenté. Comme plusieurs, j’ai l’impression de connaître Luc LeBlanc. Beaucoup de gens ont cette impression. Justement, en entrant au café, une dame le salut et lui dit qu’elle a l’impression de le connaître depuis des années. Elle l’accueille, quand même, dans son salon tous les dimanches soirs. L’homme est flatté et, sans hésitation, donne rendez- vous à la dame pour ce dimanche aux ondes de Radio-Canada. Malgré une véritable omniprésence dans le calendrier culturel en Acadie, on ne connaît pas tout sur Luc LeBlanc. « Le vrai début, pour moi, s’est fait chez moi, en famille, dans le coin de la Restigouche », nous dit celui qui est plus connu comme Citrouille, le jeune naïf né de l’imaginaire de la grande Antonine Maillet. Il se dit issu d’une famille qui n’a pas d’antécédents dans le monde du théâtre ou du spectacle, mais d’une famille qui aime bien faire la fête. « J’aime bien dire que le type le plus plate de ma famille, c’est moi », dit-il en riant. Difficile à croire. Le vrai début, une histoire que peu de gens connaissent, explique-t- il, s’est produit lorsqu’il enfilait un costume de la Sagouine pour faire des imitations. Il interprétait de courts textes écrits par son père. Qui aurait cru que, plus tard dans sa vie, il deviendrait le visage, sinon l’âme, d’un des personnages les plus connus du Pays de la Sagouine.

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Une entrevue avec Luc LeBlanc, le comédien et humoriste aux multiples visages.

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De ses débuts de prestations de la Sagouine devant les membres de sa famille, il a progressé aux soirées amateurs locales et, un peu plus tard, aux spectacles d’humour des troupes d’improvisation à la Polyvalente Roland-Pépin de Campbellton.

C’est lors d’une journée carrière à la polyvalente qu’il se pointe devant le kiosque de l’Université de Moncton pour y voir de l’information sur le Département d’art dramatique. Ce qui l’attire, instantanément, est le mot « improvisation ». Un monde qu’il baigne dedans depuis plusieurs années.

Déjà bien avant son entrée au Département d’art dramatique, il avait découvert que son créneau, c’était l’humour. « Quand tu fais rire le monde, c’est une sensation incroyable. Tu en veux encore, des rires. C’est un peu comme une drogue. »

C’est en arrivant à l’université qu’il cimente sa relation avec son compère de longue date, Robert Gauvin. Les deux sont des mordus de l’improvisation et sont, aujourd’hui, reconnus comme étant des grands maîtres de cet art au Canada.

Si beaucoup de jeunes étudiants universitaires passent leur temps à fréquenter les brasseries et les boîtes de nuit lors de leurs études, Luc LeBlanc et Robert Gauvin passaient de longues soirées à pratiquer leur art. Dans un appartement de la ville de Moncton, avec un groupe d’amis, ils pouvaient imaginer des scénarios et créer des sketchs pendant de longues nuits.

Ces heures passées à perfectionner son jeu ont façonné le Luc LeBlanc que nous connaissons aujourd’hui, mais elles ont aussi eu un impact plus immédiat. En 1990, il joue un rôle de

PAR STÉPHANE LEBLANC

Dans la série de bandes dessinées « Astérix le Gaulois », le personnage d’Obélix est particulier parce que, selon la légende, il est tombé dans la marmite du druide quand il était petit et avait ingurgité toute une marmite de potion qui lui donnait des pouvoirs spéciaux en permanence. Luc LeBlanc, c’est l’Obélix de la scène culturelle en Acadie. Il est « tombé dans la marmite de potion » et il semble ne pas avoir de limites.

Luc Leblanc

C’est dans un café du chemin Mountain à Moncton que j’ai fixé un rendez-vous avec Luc LeBlanc, figure de proue de la scène artistique en Acadie.

Pour avoir vu ce comédien/humoriste/scénariste à l’œuvre à plusieurs reprises, je m’attendais presque à voir entrer Citrouille, ou un des frères Smouthe. Mais non, c’est plutôt le Luc LeBlanc chic, mais décontracté, de Luc et Luc qui s’est présenté.

Comme plusieurs, j’ai l’impression de connaître Luc LeBlanc. Beaucoup de gens ont cette impression. Justement, en entrant au café, une dame le salut et lui dit qu’elle a l’impression de le connaître depuis des années. Elle l’accueille, quand même, dans son salon tous les dimanches soirs. L’homme est flatté et, sans hésitation, donne rendez-vous à la dame pour ce dimanche aux ondes de Radio-Canada.

Malgré une véritable omniprésence dans le calendrier culturel en Acadie, on ne connaît pas tout sur Luc LeBlanc.

« Le vrai début, pour moi, s’est fait chez moi, en famille, dans le coin de la Restigouche », nous dit celui qui est plus connu comme Citrouille, le jeune naïf né de l’imaginaire de la grande Antonine Maillet.

Il se dit issu d’une famille qui n’a pas d’antécédents dans le monde du théâtre ou du spectacle, mais d’une famille qui aime bien faire la fête. « J’aime bien dire que le type le plus plate de ma famille, c’est moi », dit-il en riant. Difficile à croire.

Le vrai début, une histoire que peu de gens connaissent, explique-t-il, s’est produit lorsqu’il enfilait un costume de la Sagouine pour faire des imitations. Il interprétait de courts textes écrits par son père. Qui aurait cru que, plus tard dans sa vie, il deviendrait le visage, sinon l’âme, d’un des personnages les plus connus du Pays de la Sagouine.

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peut-être raison, mais si l’Acadie a bien ses étoiles, Luc LeBlanc brille particulièrement fort dans cette constellation.

Cette attitude de générosité est un simple reflet de la générosité dont il a bénéficié au cours des années. Ce qu’il aime nommer « de belles rencontres ».

« J’ai été chanceux, dit-il, d’avoir été entouré de gens généreux tout au long de ma carrière. Il est impossible d’avoir du succès seul. L’importance de faire partie d’une bonne équipe est primordiale à la réussite dans le domaine des arts. »

Il nomme, bien sûr, son bon ami Robert Gauvin, mais aussi Andreï Zaharia, professeur au Département d’art dramatique de l’Université de Moncton et ancien directeur du Théâtre populaire de l’Acadie, et Guillermo de Andrea, ancien directeur du Théâtre du Rideau Vert à Montréal et premier directeur artistique du Pays de la Sagouine. Certes, il y en a bien d’autres, des gens qu’il a côtoyés, et il insiste beaucoup sur le fait qu’ils ont tous eu une influence sur sa carrière.

Aujourd’hui, Luc LeBlanc, porte plusieurs chapeaux. Il est un des frères Smouthe, un duo qu’il a fondé avec Robert Gauvin lors de leurs études universitaires. Un duo qui est toujours en grande demande partout en Acadie. Depuis 2005 (?), il anime une émission de variétés sur les ondes de Radio-Canada Acadie et, bien sûr, il incarne Citrouille au Pays de la Sagouine.

Mine de rien, il se prépare à entamer sa 17e saison « au Pays », comme il aime dire. Cette saison, par contre, sera différente pour le talentueux comédien. Il ajoutera une autre flèche à son arc en occupant le poste de nouveau directeur artistique au Pays de la Sagouine.

Chacun de ses rôles lui apporte un plaisir différent et lui permet de faire appel à ses différents intérêts et à ses talents variés.

« Si mon rôle de Citrouille est plus encadré et restreint à l’intérieur du monde d’Antonine Maillet et fait appel à mon côté comédien, les frères Smouthe me permettent de me défouler complètement et de faire appel à mon côté d’humoriste. » Pour les chanceux qui ont vu un spectacle des frères Smouthe, il n’est pas difficile de comprendre ce qu’il veut dire par « défouler ».

À la barre de l’émission Luc et Luc, il fait plutôt appel à son côté sérieux et intellectuel. « L’animation de cette émission fait appel aux deux côtés de ma personnalité, d’où le nom Luc et Luc. D’un côté, j’aime lire et avoir des conversations intelligentes avec les gens et, aussi, j’aime bien me perdre dans des personnages et faire rire les

« J’ai été chanceux d’avoir été entouré de gens généreux tout au long de ma

carrière »

premier plan lors de la victoire de l’Université de Moncton à la Coupe universitaire d’improvisation et, en 1991, il remporte le Prix du public au même évènement.

Cette visibilité à l’échelle nationale l’amène aux auditions Juste pour Rire, où il remporte la première place du volet Atlantique. À Montréal, au grand gala de l’institution d’humour la plus respectée au pays, il termine deuxième, derrière l’humoriste québécois de renommée Martin Petit. Son prix : une inscription payée à l’École de l’humour à Montréal.

À peine sorti de son adolescence, il décide de renoncer à l’offre et de retourner rouler sa bosse ici, en Acadie. Inspiré par Molière et l’idée de faire partie d’une troupe, l’humoriste et comédien surdoué va tenter de faire son chemin à sa façon.

« Contrairement à ce que certains puissent penser, ce n’est pas par un sentiment patriotique d’appartenance à l’Acadie que je suis resté. C’est plutôt une décision prise dans l’optique de la fraternité. De continuer à développer ce que j’avais commencé ici. » Il est clair cet esprit de fraternité et de partage est fondamentale à la démarche et à la philosophie de Luc LeBlanc.

Malgré lui, Luc LeBlanc est aujourd’hui une vedette en Acadie. Il est un homme qui n’est aucunement imbu de lui-même et qui est très généreux envers les autres. C’est un homme sans prétention qui affirme que de jouer la vedette en Acadie, ça ne passe pas bien. Il évoque le fait qu’il n’y a pas vraiment de système de vedettariat en Acadie. Il a

« Contrairement à ce que certains puissent penser, ce n’est pas par un sentiment

patriotique d’appartenance à l’Acadie que je suis resté. C’est plutôt une décision prise dans

l’optique de la fraternité »

16 avril 2011

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rel« À ce stade-ci, j’aime bien l’idée d’offrir

de la formation et du soutien à la relève »

Mélanie St-Pierre Ce qui compte c’est vous et ce dont vous avez besoin Robert St-Pierre Assistante administrative Conseiller en sécurité financière

ASSURANCE VIE • MÉDICAMENT • INVALIDITÉ • COLLECTIVE • MALADIE GRAVE • R.E.E.R & F.E.E.R • PLACEMENT • CONVETION ACHAT/VENTE

gens. »

S’il cumule les postes et qu’il porte tous ces chapeaux, il n’a toujours pas l’impression de « travailler » tellement il aime ce qu’il fait. Il ne faut pas se faire d’illusions, cependant. Il a bel et bien beaucoup de travail pour arriver à animer, divertir et émerveiller. Même si tout semble lui venir naturellement, des centaines, voire des milliers d’heures de répétition informent tout ce qu’il fait aujourd’hui.

Parmi tous ses rôles, est-ce qu’il y en a un qui prime sur les autres? Si on lui demande quel rôle il aime le plus, il n’hésite pas une seconde. « Père de famille! », répond-il, comme un homme qui tire plus vite que son ombre. « Pour moi, ma conjointe Dominique et mes enfants Anabelle, Anthony et François sont le centre de ma vie, dit le père de trois enfants le visage illuminé. Après ça, le reste c’est la cerise sur le gâteau. »

Être père de famille, c’est un autre chapeau que porte Luc LeBlanc. Sans aucun doute, c’est celui qui l’allume le plus.

Comédien, Humoriste, Animateur/Metteur en scène, père de famille. C’est une brochette très impressionnante. Il a certainement du pain sur la planche. Mais, que réserve l’avenir pour l’artiste aux multiples talents?

« À ce stade-ci, j’aime bien l’idée d’offrir de la formation et du soutien à la relève. J’ai profi té des conseils de gens comme Viola Léger et Florian Chiasson, entre autres, et je pense avoir des choses à transmettre à la nouvelle génération de comédiens et humoristes. » Ce désir deviendra rapidement réalité, car il y a déjà des pourparlers avec l’Université de Moncton pour former la relève, en partie, dans l’enceinte du Pays de la Sagouine.

Va-t-il continuer à jouer? « Oui, j’y aspire certainement. Il y a des gens autour de moi qui ont soixante ans et plus et qui continuent à monter sur scène. »

Est-ce que nous verrons Citrouille à soixante ans?« Pourquoi pas? »

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