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Saint-Gilles, le 13 mai 2015 Mlle Angie BÉGLER-FONNIER À l'attention de Monsieur le Président de la République, M. François HOLLANDE Monsieur le Président de la République, Je me permets de vous écrire car je fais partie de vos électeurs et je sou- haite vous exprimer aujourd'hui mon désenchantement et ma tristesse. Ayant grandi à Tulle, j'ai pu mesurer votre travail et votre investissement au sein de cette commune et je vous ai toujours témoigné, au même titre que mes parents, une profonde estime et une affection sincère, permettez-moi de vous le di- re. J'ai eu la chance de recevoir au sein du Collège Clemenceau puis du Lycée Edmond Perrier un enseignement de qualité auprès de professeurs dévoués et pas- sionnants, notamment auprès de M. Mazouaud, professeur de Lettres Classiques à l'origine de ma vocation. Titulaire d'un baccalauréat de série C, j'eusse pu atteindre d'autres sphères mais j'ai choisi, par vocation, la voie de l'enseignement et je suis professeur de Lettres Classiques. Aujourd'hui, je vis en Camargue, dans une ville où le FN serait à la tête de la mairie, sous la conduite de Collard, sans une alliance droite-gauche. J'enseigne dans la même ville, dans un collège classé en REP (établissement en Zone Prévention Violence). En mars dernier, vous avez engagé une Réforme du collège, sous l'égide de votre Ministre de l'Education Nationale, Mme Vallaud-Belkacem, réforme qui me peine car elle touche au plus précieux de mon enseignement.

Ma lettre à François Hollande p. 1-2

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#ReformeduCollege

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  • Saint-Gilles, le 13 mai 2015 Mlle Angie BGLER-FONNIER

    l'attention de Monsieur le Prsident de la Rpublique, M. Franois HOLLANDE

    Monsieur le Prsident de la Rpublique,

    Je me permets de vous crire car je fais partie de vos lecteurs et je sou-

    haite vous exprimer aujourd'hui mon dsenchantement et ma tristesse.

    Ayant grandi Tulle, j'ai pu mesurer votre travail et votre investissement au sein de cette commune et je vous ai toujours tmoign, au mme titre que mes parents, une profonde estime et une affection sincre, permettez-moi de vous le di-re.

    J'ai eu la chance de recevoir au sein du Collge Clemenceau puis du Lyce Edmond Perrier un enseignement de qualit auprs de professeurs dvous et pas-sionnants, notamment auprs de M. Mazouaud, professeur de Lettres Classiques l'origine de ma vocation. Titulaire d'un baccalaurat de srie C, j'eusse pu atteindre d'autres sphres mais j'ai choisi, par vocation, la voie de l'enseignement et je suis professeur de Lettres Classiques.

    Aujourd'hui, je vis en Camargue, dans une ville o le FN serait la tte de la mairie, sous la conduite de Collard, sans une alliance droite-gauche. J'enseigne dans la mme ville, dans un collge class en REP (tablissement en Zone Prvention Violence).

    En mars dernier, vous avez engag une Rforme du collge, sous l'gide

    de votre Ministre de l'Education Nationale, Mme Vallaud-Belkacem, rforme qui me peine car elle touche au plus prcieux de mon enseignement.

  • Je n'hsite pas corriger mes lves ou les adultes lorsqu'ils qualifient le Latin et le Grec de langues mortes . Mais avec la Rforme engage, on peut affir-mer que votre Ministre a bien mis mort les langues anciennes, matires que j'en-seigne des enfants de tous bords.

    Avec cette rforme, vous entendez supprimer ces options, tout comme les langues rgionales, les sections bilangues, soi-disant parce qu'elles sont litistes . Il n'en est rien. Mes lves hellnistes de 3e s'appellent, dans l'ordre alphabtique, Nasria, Vincent, Laura, Sonia, Carla, Yasmine, Mohamed, Samir, Hana, Saad, David, Elodie, Sarah et Sandrine. Cette option, comme le Latin propos ds la 5e, permet des lves issus de classes moyennes ou de milieux dfavoriss, voire exclus de la socit comme ils peuvent l'tre dans une ville pro-FN, de s'extirper du lot. C'est loin d'tre une lite mais ce sont, pour la plupart, des lves curieux et intresss, qui choisissent de suivre un enseignement en sus de leurs heures de cours traditionnel-les, pour dcouvrir et apprendre une langue ancienne, enrichir leur culture gnrale et comprendre la langue franaise. Et je ne peux que les en remercier.

    Votre Ministre a choisi de supprimer l'enseignement de ces langues ancien-nes pour les remplacer par des EPI (Enseignements Pratiques Interdisciplinaires). Elle a d'abord voqu que ces langues anciennes seraient incluses dans un EPI (11 mars), puis devant les premires protestations d'enseignants inquiets, qu'elles se-raient un EPI (13 mars), avant d'annoncer qu'elles deviendraient un EPI drogatoire (18 mars).

    Mais quand on sait que les horaires des EPI seront soustraits chaque ma-tire implique dans les EPI, n'est-on pas en droit de s'interroger ? Quelle matire sera impacte par l'EPI Langues et Cultures de l'Antiquit ? Sera-ce le Franais ? Si oui, quel tablissement acceptera que des lves de 3e par exemple ne suivent que 3h hebdomadaires de Franais, s'ils choisissent l'EPI LCA ? Aucun malheureusement. Un lve qui choisirait l'EPI LCA en cycle 4 (5e, 4e et 3e) perdrait ainsi 108h de Fran-ais : inimaginable ! Et ce sera la mort des enseignements de nos humanits, qui

    font partie de notre patrimoine et qui ont fait la richesse de la langue et de la culture franaises.

    Devant ce danger qui nous guette, nos propres interrogations, ou celles de nos lves ( Mais pourquoi, nous, on a pu choisir l'option Latin et ceux qui nous sui-vent ne le pourront pas ? sic, ai-je entendu dans ma salle de classe), aucune r-ponse ne nous est apporte. Au contraire, nous nageons dans le flou total et les m-dias prennent le relais de nos inquitudes.

    Mme Vallaud-Belkacem assure par ailleurs que les lves qui choisiront l'EPI LCA feront moins de dclinaisons et plus d'histoire et de civilisation. Mais je l'in-vite venir parcourir les cahiers de nos lves, assister des cours de Latin ou de Grec Ancien. Aujourd'hui, les programmes et la faon dont nous abordons l'appren-