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MASTER 2 COOPÉRATION INTERNATIONALE, ACTION HUMANITAIRE
ET POLITIQUES DU DÉVELOPPEMENT
PROMOTION 2006-2007
MÉMOIRE DE RECHERCHE
La réforme humanitaire des Nations Unies
Silvia ENEA Directeur : Eric CHEVALLIER
1
SYNTHÈSE
Ce mémoire porte sur la réforme humanitaire des Nations Unies. Il présente une analyse des composantes principales de cette réforme, telles que l’approche de responsabilité sectorielle, le nouveau rôle des Coordonateurs Humanitaires, l’introduction des nouveaux mécanismes de financement, tels que le Pool Fund et le Central Emergency Response Fund, et la mise en place d’un partenariat entre les agences des NU et les autres acteurs humanitaires non onusiens. Dans cette présentation il s’agit d’expliquer d’une manière technique les rôles et les responsabilités de ces quatre piliers de la réforme, mais il s’agit également de mettre en perspective les enjeux (politiques et financiers) qui en découlent pour les acteurs prenant partie à ce processus. Etant donné la nouveauté de cette réforme et sa récente mise en place (environ un an et quelque mois) les conclusions qui peuvent être tirées restent encore provisoires et nécessitent de plus de données et d’études pour acquérir un poids plus scientifique. Cela n’a quand même pas empêché certaines ONG d’analyser l’impact de cette réforme sur leur action humanitaire, sur la base de leurs expériences sur le terrain. Ainsi, à une position de net refus de participer à la réforme de la part de Médecins Sans Frontières, s’oppose une majeure ouverture d’Action Contre la Faim grâce à leur bonne expérience en Indonésie. Entre les deux Oxfam et Save the Children UK saluent cette réforme de façon plus positive, même si elles ne manquent pas d’afficher un fort scepticisme, notamment par rapport à l’enjeu financier. Enfin, l’expérience en cours de Médecins du Monde montre les difficultés de comprendre une réforme qui se passe plutôt au niveau du terrain, un peu en décalage avec le siège.
Mots Clefs
Réforme humanitaire – Nations Unies – ONG – Médecins du Monde
2
Executive Summary
This memoir deals with the United Nations Humanitarian Reform. It analyses the reform’s main components, such as the cluster approach, the new role of the Humanitarian Coordinator, the introduction of new financing mechanisms, such as the Pool Fund and the Central Emergency Response Fund, and the setting up of a partnership between the UN agencies and the other non-UN humanitarian actors. This memoir vouches to explain technically the roles and responsibilities of the four reform pillars, but it also aims to put in perspective the political and financial issues linked to this reform for the actors taking part in this process. Given the newness of this reform and its recent implementation (a little over a year) the conclusions are temporary and they need to be studied and detailed further to gain more scientific weight. All this, did not stop NGOs from analysing the impact of the reform on their humanitarian action, on the basis of their field experiences. Reactions to this reform are diverse, from a clear refusal to take part in the reform from Médecins sans Frontières, is opposed a warmer welcome from Action contre la Faim thanks to their good experience in Indonesia. Between both of them, Oxfam and Save the Children UK welcome the reform in a more positive way, even though they did not hide their strong scepticism, notably in relation with financial issues. Finally, Médecins du Monde’s current experience shows the difficulty for the head office to fully understand a reform that is taking place at the field level.
Key Words
Humanitarian Reform – United Nations – NGOs – World Doctors
3
Liste des sigles utilisés
ACF Action Contre la Faim CAP Consolidated Appeals Process CERF Central Emergency Response Fund CH Coordonateur Humanitaire CHAP Common Humanitarian Action Plan CICR Comité International de la Croix Rouge CPIA Country’s Policy and Institutional Assessment CR Coordonateur Résident CSU Coordinateur des Secours d’Urgence DAP Département des Affaires Politiques DO Designated Official DOMP Département des Opérations de Maintien de la Paix DPA Department of Political Affairs DPKO Department of Peace Keeping Operations ECHO European Commission for Humanitarian Aid ERC Emergency Relief Coordinator FAO Food and Agricultural Organization FICR Fédération Internationale de la Croix Rouge FTS Financial Tracking Service GHDI Global Humanitarian Donorship Initiative GHP Global Humanitarian Partnership HCR Haut Commissariat aux Réfugiés HCT Humanitarian Country Team(s) HRR Humanitarian Response Review IASC Inter Agency Standing Commitee ICVA International Council of Voluntary Agencies IDPs Internal Displaced Persons LoU Letter of Understanding MDM Médecins du Monde MSF Médecins Sans Frontières NU Nations Unies OHCHR Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights OIM Organisation Internationale pour les Migrations OMS Organisation Mondiale pour la Santé ONG Organisation Non Gouvernementale ONU Organisation des Nations Unies PAH Plan d’Action Humanitaire PAM Programme Alimentaire Mondial PF Pool Fund PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement PoP Principles of Partnership PSC Programme Support Costs SC Save the Children SCHR Steering Committee for Humanitarian Response StG Steering Groupe ToR Terms of Reference UNCT United Nations country Team(s) UNDG United Nations Development Group UNICEF United Nations Children’s Fund
4
UNUSG United Nations Under Secretary General for Humanitarian Affairs USD United States Dollars VOICE Voluntary Organisations in Cooperation in Emergency
5
Avertissement
L'Université Paris I n'entend donner aucune approbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.
Remerciements
Je souhaite remercier sincèrement Eric Chevallier, qui a accepté de diriger ce mémoire, pour sa disponibilité et ses conseils. Un immense merci à ma mère, Matthieu, Vincenzo pour leur soutien et leurs encouragements tout au long de mon travail, en particulier dans les derniers mois.
6
Sommaire
LISTE DES SIGLES UTILISÉS ............................................................... 4
SOMMAIRE ................................................................................................ 7
INTRODUCTION....................................................................................... 8
A) LE CONTEXTE PROFESSIONNEL DE RÉALISATION DU MÉMOIRE ................................. 8 B) LA RÉFORME DES NATIONS UNIES : ADAPTATIONS ET PROCESSUS PERMANENT........ 8 C) PROBLÉMATIQUE .................................................................................................... 11
CHAPITRE I – LA RÉFORME HUMANITAIRE DES NATIONS UNIES : ANALYSE DES QUATRE PILIERS. .....................................12
A) L’APPROCHE DE RESPONSABILITÉ SECTORIELLE (CLUSTER APPROACH) ................... 14 B) LE RÔLE DU COORDONATEUR HUMANITAIRE (CH) ................................................ 30 C) LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT (POOL FUND ET CERF).................................. 41 D) LE GLOBAL HUMANITARIAN PARTNERSHIP ............................................................... 51
CHAPITRE II – ANALYSE DE L’IMPACT DE LA RÉFORME HUMANITAIRE DES NATIONS UNIES SUR L’ACTION HUMANITAIRE. ......................................................................................57
A) L’EXPÉRIENCE DES ONG........................................................................................ 57 B) L’EXPÉRIENCE EN COURS DE MÉDECINS DU MONDE – FRANCE .............................. 74
CONCLUSIONS........................................................................................84
BIBLIOGRAPHIE....................................................................................87
TABLE DES MATIÈRES ........................................................................88
ANNEXES..................................................................................................89
7
Introduction
A) Le contexte professionnel de réalisation du mémoire
Ce mémoire a été réalisé dans le cadre de mon stage auprès de l’organisation non
gouvernementale (ONG) Médecins du Monde (MDM), basée à Paris. Je m’étais déjà
intéressée à la question de la réforme humanitaire des Nations Unies (NU) dans le cadre
de mon Master sur la « Coopération Internationale, Action Humanitaire et Politiques du
Développement ». Par la suite, ayant eu la possibilité d’effecteur mon stage auprès de
MDM et celle-ci ayant affiché la volonté de s’intéresser également à ce sujet, j’ai décidé
de mettre mes connaissances au service de l’ONG afin que, une fois obtenues toutes les
informations nécessaires, elle puisse prendre une position par rapport à cette réforme.
Pour faire cela, il a fallu tout d’abord se documenter sur la réforme elle-même, la
bibliographie se basant sur des documents officiels publiés par les agences onusiennes,
par des collectifs d’ONG ou par des nouvelles instances qui se sont crées. Des
documents un peu moins officiels, ou scientifiques, internes à des organisations, des
rapports de réunions, etc…, ont également constitué une base pour mes recherches, pour
cumuler plus d’informations et pour voir aussi les éventuelles évolutions de ce work in
progress qui est la réforme. Ensuite, voulant apporter ma contribution à MDM, j’ai
mené des entretiens téléphoniques avec les équipes terrain dans les pays qui ont déjà été
affectés par la mise en place de la réforme. Finalement, aujourd’hui MDM n’a pas
encore officialisé un positionnement clair, du fait de beaucoup d’incertitudes et de
manque de coordination et de suivi de la question au siège même. On espère que cela ne
se fera pas trop tard et que ce travail puisse leur être utile.
B) La réforme des Nations Unies : adaptations et processus
permanent.
La réforme humanitaire des NU s’inscrit dans une volonté plus grande et générale de
vouloir réformer le système entier de cette organisation. Depuis sa création la quête aux
moyens pour assumer la responsabilité de l’organisation n’a jamais diminuée. Depuis sa
naissance pour l’ONU il s’est toujours agit de se remettre en cause, se réorganiser,
8
s’auto-réformer et s’adapter aux nouvelles données internationales pour faire face aux
défis.
Selon l’ex Secrétaire Général, Kofi Annan, « la réforme n’est pas un événement, c’est
un processus » 1 . D’ailleurs, l’élection même de Kofi Annan à ce poste était
conditionnée par la mise en œuvre d’un programme de réformes, en vue de
« moderniser l’Organisation, l’adapter aux défis de la mondialisation et y observer les
règles de bonne gouvernance ».
Le 60ème anniversaire de l’ONU a constitué l’occasion pour synthétiser en une seule
grande réforme tous les essais précédents faits dans le but de revitaliser et moderniser
l’institution internationale. C’est ainsi que cette occasion a donné naissance à
l’élaboration de trois rapports : le Rapport du comité de haut niveau sur les nouvelles
menaces, les défis et le changement : Un monde plus sûr, une responsabilité partagée
(A/59/565) ; le Rapport projet développement du millénaire : Investir dans le
développement (janvier 2005) ; le Rapport du Secrétaire général : Dans une liberté plus
grande (A/59/2005). Le dernier rapport rassemble les idées principales présentes
également dans les deux premiers et oriente la nécessité de mettre en place des réformes
autour des trois axes suivants :
1. La revitalisation de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social
grâce à un agenda plus restreint qui permette de mettre en évidence les défis
contemporains et qui permette à l’Assemblée de devenir un organe de décision
effectif. Pour que cet objectif soit concrètement fonctionnel est prévu que le
statut des ONG et leur régime d’association avec le système onusien soient
revus. Depuis l’Agenda du millénaire, les réflexions autour d’éventuelles pistes
de réformes sur ce sujet ont débouchés dans l’idée commune que les concepts de
la paix, du développement et de la démocratie sont intrinsèquement liés entre
eux : aucun objectif des droits de l’homme ne peut être atteint indépendamment
des autres. C’est dans cette vision que les acteurs de la société civile doivent
collaborer ensemble avec les acteurs locaux qui agissent pour la mise en place
des programmes des Nations Unies2.
1 Charte de l’ONU ou ABC de l’ONU. 2 Hassen FODHA, « La réforme de l’Organisation des Nations Unies », Enjeux diplomatiques et stratégiques, 2006, pag. 21.
9
2. L’élargissement du Conseil de Sécurité à 24 membres avec soit l’entrée de six
nouveaux membres permanents sans droit de veto et de trois membres non
permanents, soit de neuf nouveaux membres non permanents avec des
ajustements des règles du vote majoritaire.
3. La création d’une « Commission internationale pour la construction de la paix »
avec une mission préventive d’effondrement des États et d’un éventuel
glissement vers la guerre. Dans ce cadre, le Secrétaire Général a proposé de
réviser le concept de « sécurité collective » afin de prendre en compte les
évolutions de la mondialisation, notamment dans l’après 11 septembre 20013.
Dans les réflexions et recherches universitaires la nécessité de démocratisation de
l’ONU se montre comme une priorité absolue. Selon Boutros Boutros-Ghali, la vraie
réforme de l’ONU devrait commencer par sa démocratisation 4 . La configuration
actuelle de cette organisation date de la Guerre froide, de l’exigence de l’époque de
vouloir mettre en place un organe avec une attitude de neutralité, au service des États,
respectant le principe de la non-ingérence. Cependant, cette propre forme qui lui a été
forgée n’a pas empêché d’assister, immobile parfois, devant à des catastrophes
humaines ou d’intervenir trop tard lorsque le pire avait déjà été atteint (ex. Rwanda).
C’est dans cet esprit d’impuissance apparente et réelle que s’insère la réforme des NU,
pour chercher à corriger cette articulation fonctionnelle héritée de la Guerre froide. En
effet, l’ONU est restée inchangée dans ses structures et ses modes de fonctionnement
depuis cinquante ans, alors qu’entretemps le scénario international a connu des
profondes transformations, jusqu’à l’avancée féroce de la mondialisation. Les contextes
ont bel et bien changé : alors qu’en 1945 les États étaient encore les seules entités
souveraines sans contestation, leur souveraineté s’exerçait pleinement sur le territoire
national et la promulgation de lois et normes se faisait uniquement avec l’accord de
l’État, aujourd’hui on n’assiste pas du tout à la même configuration et aux mêmes
pratiques. L’État n’est plus l’unique source de souveraineté, il n’est plus le seul acteur
sur la scène internationale. Sociétés multinationales, ONG, associations de crime
organisé ou de terrorisme international ont tous fait leur apparition au 20ème siècle. De
plus, des législations supranationales se sont mises en place en matière de droit
3 Hassen FODHA, op. cit., pag. 23. 4 Boutros Boutros-GHALI, « Peut-on réformer les Nations Unies ? », Pouvoirs, 109, mars 2004.
10
humanitaire, protection de l’environnement ou protection des droits de l’homme5. Les
États se trouvent pleinement englobés dans le processus de la mondialisation auquel ils
doivent au même temps faire face et se confronter. Ce scenario montre bien la nécessité
d’une réforme des NU tant dans la forme que dans le fond. Il faut essentiellement tenir
en compte des faits de la puissance d’aujourd’hui. Cette réforme ne doit pas concerner
exclusivement le Conseil de Sécurité, autour duquel gravitent nombreux enjeux, mais il
s’agit également de prendre en compte une réforme des opérations de maintien de la
paix, de la bureaucratie onusienne et du rôle de l’ONU en matière de développement
économique et social.
C) Problématique
La problématique qui sera abordée dans le cadre de ce travail est la suivante :
Dans quelle mesure cette réforme, en donnant lieu à des stratégies et des
recompositions des « rapports de force » entre les différents acteurs participant à
ce processus, « bouleverse » les relations entre les NU et les ONG ? Sur la base des
expériences concrètes de mise en place de la réforme, quelle première évaluation
est-il possible de dresser ? Sur la base de ces considérations, quelles suggestions
concrètes peut-on formuler et adresser à une ONG comme Médecins du Monde
qui n’a pas encore dit son mot sur ce sujet ?
Cette problématique semble particulièrement intéressante à aborder dans le cadre d’un
mémoire de Master 2 Professionnel du fait qu’elle constitue l’un des grands chantiers de
réforme de l’action de réponse humanitaire à l’échelle internationale. Elle est donc une
problématique actuelle, qui fait l’objet de réflexions, d’engagements et d’actions. Elle
s’inscrit dans un processus en cours. Il semble donc intéressant de bâtir une réflexion
sur cet objet qui mobilise la communauté onusienne, celle des ONG, des donateurs et de
tout autre acteur participant à ce processus, d’interroger les concepts utilisés et la
dimension novatrice de l’approche proposée.
5 Josepha LAROCHE, Politique Internationale, Paris, L.G.D.J., 2000.
11
Chapitre I – La Réforme humanitaire des Nations Unies :
analyse des quatre piliers.
Dans le contexte plus général de la réforme des Nations Unies (NU), l’ex Secrétaire
Générale, Kofi Annan, a mis en évidence dans son rapport intitulé « Dans une liberté
plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l’homme pour tous », la
nécessité que la réponse humanitaire soit « plus prévisible en toute situation
d’urgence »6. En fait, au cours des deux dernières décennies, le panorama de l’action
humanitaire a sensiblement changé. Le système humanitaire a rapidement évolué en
passant d’un scénario composé par un nombre limité d’acteurs à un autre caractérisé par
le foisonnement de nombreux et nouveaux protagonistes sur la scène humanitaire aux
capacités, domaines d’intervention et priorités parfois différents. Les urgences
humanitaires ont ainsi été caractérisées par une forte compétition entre toutes ces
différentes parties prenantes. De plus, le rôle changeant de l’ONU, un environnement de
plus en plus compétitif par rapport aux fonds financiers, le poids financier des ONG qui
devient toujours plus important, une inspection publique et approfondie de l’action
humanitaire sont tous des aspects qui témoignent de cette mutation de l’environnement
humanitaire.
Mais pour quelle(s) raison(s) il y a eu la nécessité de démarrer une réforme
humanitaire?
En 2004, la lenteur, l’inadéquation, la faiblesse de la réponse humanitaire à la crise du
Darfour, au Soudan, ont fait prendre conscience de la nécessité d’intervenir au plus vite
dans le système humanitaire en général. Cela a poussé donc l’Emergency Relief
Coordinator (ERC, ou Coordinateur des Secours d’Urgence, CSU) et le Sous Secrétaire
Général des Affaires Humanitaires (OCHA), les deux positions étant représentées à
l’époque par Jan Egeland, à évaluer la portée de la réponse humanitaire internationale et
à en conclure que le système n’était pas assez prévisible et efficace dans son action. Ce
déficit nécessitait donc d’être comblé. En 2005, l’ERC a ainsi commissionné un rapport
d’enquête intitulé Humanitarian Response Review (HRR) qui, dans un délai d’un an,
aurait du examiner la façon avec laquelle améliorer ce système. Ce rapport a mis en
évidence l’existence depuis un long moment de gaps dans certains secteurs de l’action 6 http://daccessdds.un.org/doc/UNDOC/GEN/N05/270/79/PDF/N0527079.pdf?OpenElement, « Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l’homme pour tous », Rapport du Secrétaire Général Kofi Annan, A/59/2005, mars 2005.
12
humanitaire. Il a également souligné le manque ou très faible niveau de liens entre
l’ONU et les autres acteurs internationaux, une coordination entre eux mal définie et
souvent dépendante des personnalités de chacun, le manque d’un système de
responsabilisation, ou du moins très insuffisant (surtout par rapport à l’enjeu des
populations déplacées à l’intérieur même de leur pays, Internally Displaced Persons,
IDPs) et une politique incohérente pour les donateurs de fonds. En réalité, plus que tout,
l’augmentation des fortes pressions des bailleurs internationaux afin de rationnaliser
l’utilisation des fonds et le poids de plus en plus important d’acteurs privés sur la scène
internationale ont été ressenties comme une sorte de menace pour les NU7. Cependant,
le HRR ne prenait pas en compte l’analyse des réponses humanitaires au niveau local et
national, alors que l’ERC, au contraire, avait souligné l’importance de considérer
également cette dimension là. Ainsi, quand le rapport a été publié, il a été pointé du
doigt du fait de ce manque d’attention aux réponses autres qu’au niveau international.
Plusieurs observations et recommandations ont été du coup avancées, en lançant des
débats au sein de la communauté d’acteurs humanitaires faisant partie du Inter-Agency
Standing Commitee (IASC)8.
La mise en place de la réforme humanitaire trouve donc ses racines dans ce contexte de
volonté de rationalisation de l’aide humanitaire. Elle cherche à améliorer l’efficace de la
réponse humanitaire en en assurant une meilleure prévisibilité et responsabilité par le
biais de partenariats entre acteurs différents. Il s’agit d’un effort ambitieux pour la
communauté internationale afin de joindre le maximum de bénéficiaires, avec une
majeure compréhension des réels besoins sur le terrain d’une façon plus effective et
rapide. Á la suite des analyses et des recommandations présentées dans le HRR,
concrètement la réforme a commencé à être appliquée vers la mi-juillet 2005 autour de
quatre piliers centraux, à savoir :
7 Humanitarian Response Review, Commissioned by the United Nations Emergency Relief Coordinator and Under-Secretary-General for Humanitarian Affairs, Office for the Coordination of Humanitarian Affairs (OCHA), New York-Genève, Août 2005. 8 L’IASC est un forum intra- agences de coordination, développement de politiques et de prise de décisions. Il est composé par les Nations Unies, le Mouvement de la Croix Rouge et celui du Croissant Rouge, plusieurs ONG [à travers la présence de trois collectifs: Inernational Council of Voluntary Agencies (ICVA), InterAction, The Steering Commitee for Humanitarian Response (SCHR)], l’OIM et la Banque Mondiale. Sous le leadership de l’ERC, l’IASC formule des politiques humanitaires, cherche un consensus sur une division claire des responsabilités par rapport aux différents aspects de la réponse humanitaire, identifie et cherche à combler les lacunes dans la réponse humanitaire et exerce de la pression afin que les principes humanitaires soient effectivement appliqués. L’IASC a été établi en 1992 par la résolution 46/182 de l’Assemblée Générale.
13
1. Approche de responsabilité sectorielle (cluster approach)
2. Coordonateur(s) Humanitaire(s) (CH)
3. Financements humanitaires (pool funds, CERF)
4. Partenariats entre les NU et tout autre acteur non onusien (Global Humanitarian
Partnership, GHP)9.
Dans la première partie de ce travail on cherchera à analyser les piliers de la réforme
humanitaire dans leurs aspects purement techniques, dans leur mode opératoire, dans
leurs évolutions récentes et on mettra en perspective les enjeux qui en découlent.
A) L’approche de responsabilité sectorielle (cluster approach)
Une petite précision de caractère terminologique est nécessaire afin de bien définir
l’objet d’analyse en question et pour clarifier l’usage de certains mots au sein des
différents pays concernés par la réforme humanitaire. Certains utilisent le terme
« cluster » et « cluster lead(s) », alors que d’autres parlent plutôt de « secteurs »,
« groupes sectoriels », « responsables sectoriels », ou encore « groupes de travail »,
« groupes thématiques » ou « équipes de travail ». Tous ces termes reviennent à
indiquer la même chose, le même concept, la même structure organisationnelle. En
général, on pourrait dire que le recours à l’un ou à l’autre terme dépend soit de
l’influence de la langue de travail dans le pays théâtre de leur mise en place, soit encore
des différentes agences, selon l’appréciation des équipes humanitaires. Ainsi, entre le
mot « cluster » et celui « groupe sectoriel » il n’y a aucune différence par rapport à la
poursuite des objectifs et des activités, à savoir : combler les lacunes dans l’action
humanitaire et garantir une meilleure préparation et des réponses plus adéquates lors
d’éventuelles prochaines crises.
En quoi consiste un cluster et quelle est sa procédure de fonctionnement ?
Un cluster consiste dans le regroupement de plusieurs acteurs humanitaires (ONG,
agences des NU, société civile locale, acteurs locaux, etc…) travaillant tous dans un
9 Ce quatrième pilier a été inséré plus tard par rapport aux trois premiers. Sa naissance remonte à la réunion entre les NU et les autres acteurs non onusiens de juillet 2006 ayant pour but de mettre en place le Global Humanitarian Partnership (GHP).
14
même secteur ou domaine de compétence spécifique dans lequel ont été identifiés des
lacunes. Ces acteurs se réunissent pendant des meetings dont la définition de leur nature,
de leur fréquence et de leur organisation revient aux chefs de file sectoriels (cluster
leads)10.
Leur but est celui d’offrir une compétence adéquate et un leadership prévisible dans ces
secteurs là, afin de :
• améliorer la prévisibilité, la responsabilité et la collaboration dans la réponse
humanitaire dans tous ces secteurs11.
• Renforcer la capacité technique et les mesures de préparation aux urgences
humanitaires au niveau international.
• Définir des interventions plus stratégiques au niveau national.
• Améliorer la hiérarchisation des ressources disponibles.
Ces objectifs restent les mêmes pour tous les clusters, ce qui change sera le niveau de
responsabilité et d’implication des différents cluster leads.
Cette approche doit être utilisée dans les « nouvelles » crises humanitaires majeures
(major new emergencies), provoquées par des conflits ou bien par des catastrophes
naturelles, ou encore dans des urgences « en cours » (ongoing emergencies)12.
Avant la mise en place de la réforme, lorsqu’il y a eu des crises humanitaires et une
réponse humanitaire était donc nécessaire, seulement dans des cas et des secteurs
spécifiques certains agences se sont retrouvées à devoir assumer une responsabilité
opérationnelle. Cela s’est traduit concrètement par des réponses humanitaires ciblées,
mais présentant des lacunes techniques dans la mise en acte de la réponse même. Donc,
en réalité, la naissance des secteurs et des groupes sectoriels ce n’est pas le produit
nouveau de la réforme humanitaire, car déjà avant celle-ci il existait certains secteurs 10 Etant donné l’hétérogénéité des acteurs participant à ce type de réunions, il faut que les cluster leads veillent à limiter la fréquence de telles réunions, en particulier au regard des petites organisations qui manquent de ressources suffisantes à déployer dans le cas d’un grand nombre de réunions sectorielles. 11 Pour la prévisibilité il s’agit d’identifier à l’avance les agences et/ou les organisations responsables de l’animation des secteurs concernés. Pour la responsabilité il s’agit de fournir au Coordonateur Humanitaire un premier interlocuteur et une agence de dernier recours dans tous les principaux secteurs d’activité. Pour la collaboration il s’agit de définir les rôles et les responsabilités des organisations humanitaires selon les secteurs. 12 Selon l’Operational Guidance on Designating Sector/Cluster Leads in Major New Emergencies, publié par l’IASC, pour « nouvelle crise majeure » on doit entendre « any situation where humanitarian needs are sufficiently large scale and complexity that significant external assistance and resources are required, and where a multi-sectoral response is needed with the engagement of a wide range of international humanitarian actors ».
15
guidés par des agences qui, de leur coté, se portaient responsables devant le
Coordonateur Humanitaire (CH). Ce qui change avec la réforme, donc, ce n’est pas tant
la forme de ces secteurs, mais plutôt le fond, car on vise à renforcer et non pas à
remplacer, la coordination sectorielle, toujours sous la direction générale du CH, afin
d’améliorer la réponse humanitaire dans des contextes d’urgence13. Cette approche vise
donc à rationnaliser le système, à y reconnaître des claires responsabilités pour tous les
acteurs y prenant partie, eux aussi clairement identifiés et définis au sein de la
communauté humanitaire internationale.
Or, ça a été la faiblesse de la réponse humanitaire dans le passé qui a mené l’IASC à
promouvoir une stratégie opérationnelle différente, ayant pour but de combler de telles
lacunes. Ainsi, en septembre 2005, il a désigné au niveau global à la tête de neuf
secteurs des agences onusiennes en tant que chefs de file sectoriels (global cluster
leads), surtout dans le cas d’urgences humanitaires, avec des tâches de gestion et de
responsabilité pour les neuf clusters en question14. Le principal rôle des cluster leads est
celui de fournir un soutien important aux CH et aux Coordonateurs Résidents (CR) afin
d’assurer une réponse plus coordonnée.
En Janvier 2006 seulement trois pays avaient été concernés par la mise en place de
l’approche de responsabilité sectorielle. Il s’agissait de : Ouganda, République
Démocratique du Congo et Liberia. En Avril 2006 la Somalie a été ajoutée à la liste15.
Par la suite, des nouveaux pays ont intégré l’approche de responsabilité sectorielle à la
suite de nouvelles urgences, telles qu’au Pakistan, à Jakarta (Indonésie) et au Liban. En
2007 l’Ethiopie est rentrée à en faire partie. Dans la même année 12 autres pays se sont
déclarés intéressés à adopter cette approche. Il s’agit de : Afghanistan, Côte d’Ivoire,
Erythrée, Guinée, Haïti, Niger, République Centrafricaine, Tchad, Sri Lanka, Soudan,
Timor Leste, Zimbabwe. Pour que les équipes des NU sur le terrain (UN Country Teams,
UNCT) déterminent si présenter une demande officielle d’activation de l’approche
clusters, des ateliers d’information et de préparation à l’approche de responsabilité
sectorielle ont été organisés16. Lors de la réunion sur le cluster global santé, qui s’est
tenue à New York le 19 juin 2007, il a été établi que l’approche cluster devra être mise 13 IASC, Note d’orientation sur la mise en œuvre de l’approche de responsabilité sectorielle (“cluster approach”) pour renforcer l’action humanitaire, 24 Novembre 2006, pag.5. 14 http://www.humanitarianreform.org/humanitarianreform/Default.aspx?tabid=217, The Global Cluster Leads. 15 IASC, Terms of Reference, IASC Cluster Approach Evaluation, 1st Phase, Final Draft, 25 Avril 2007, pag. 1. 16 Sybille GUMUCIO, Global Health Cluster Meeting, New York, 19 juin 2007, pag. 2 (document interne à Médecins du Monde, MDM).
16
en œuvre dans tous les pays où un CH est déjà en poste (cela concernerait donc à
l’heure actuelle 25 pays). Il s’agit de pays affectés par des crises humanitaires qui
dépassent le mandat d’une simple agence, où l’évaluation des besoins se révèle
insuffisante par rapport à leur complexité. C’est justement l’ampleur et la complexité de
ces besoins qui justifient la nécessité de mener une action multisectorielle avec la
participation d’un grand nombre d’acteurs faisant partie de la scène internationale
humanitaire17.
Dans la désignation des différents clusters n’ont pas été pris en compte tous les secteurs
possibles, en particulier en ont été exclus les domaines d’activités pour lesquels une
responsabilité des acteurs humanitaires internationaux avait déjà été établie très
clairement. Ainsi, par exemple, le domaine de l’agriculture se trouvait (et continue de
l’être) sous la responsabilité de la FAO, celui de l’alimentation sous celle du PAM,
celui des réfugiés sous celle du HCR, et enfin celui de l’éducation sous celle de
l’UNICEF. De cette façon, les autres domaines pour lesquels ont été constitués des
clusters, ils ont été identifiés sur la base d’un manque de responsabilité prévisible dans
le cas de crises humanitaires ou sur la base de la nécessité de renforcer ultérieurement la
responsabilité et le partenariat entre les différents acteurs humanitaires. Le but de créer
de groupes sectoriels au niveau global, dans des domaines affectés par un manque de
capacités réellement efficaces, comporte une innovation importante du fait que, grâce à
ces clusters, il y aura une majeure disposition et circulation de matériels, d’expertise et
d’informations.
Il existe trois domaines de regroupement des clusters :
1. Domaines techniques de provision d’assistance aux bénéficiaires (clusters :
nutrition, santé, eau et assainissement, abris d’urgence).
2. Domaines interdisciplinaires concernant des enjeux transversaux (coordination
et gestion des camps, protection et relèvement précoce), ce qui demande une
coordination très rapprochée avec tous les autres clusters.
17 L’approche de responsabilité sectorielle lorsqu’il a été appliquée en 2006 en Ouganda, RDC et Libéria, concernait des urgences complexes. Sa mise en place, toujours en 2006, à Jakarta, au Liban et au Pakistan concernait, par contre, des nouvelles urgences. En plus des 12 pays qui se sont déclarés intéressés par cette approche, on doit y ajouter : Burundi, Madagascar, Myanmar, Népal, Territoires Occupés de Palestine, Nord Caucase, Mozambique. La majorité des ces pays est affectée par des urgences complexes et en cours depuis très longtemps.
17
3. Domaines de provision de services communs (clusters : logistique et
télécommunications).
18
Chefs de file sectoriels (Cluster Leads) an niveau global18
(comme convenu par les responsables du IASC en décembre 2005)
Secteur ou domaine d’activité Chef de file sectoriel au niveau global Domaines techniques :
1. Nutrition UNICEF 2. Santé OMS 3. Eau/assainissement UNICEF 4. Abris d’urgence : déplacés internes (conflits) HCR Catastrophes FICR (Animateur)*
Domaines interdisciplinaires :
5. Coordination/gestion des camps : déplacés internes (conflits) HCR Catastrophes OIM 6. Protection : déplacés internes (conflits) HCR Catastrophes/civils affectés HCR/OHCHR/UNICEF par des conflits (autres que les déplacés internes)** 7. Relèvement précoce PNUD
Domaines de service commun :
8. Logistique PAM 9. Télécommunications d’urgence OCHA/UNICEF/PAM
* La FICR s’est engagée à diriger l’ensemble de la communauté humanitaire pour les abris d’urgence lors de catastrophes, afin de consolider les meilleures pratiques, de cartographier les points forts et les lacunes et de conduire la réponse concertée. La FICR préfère être un « animateur » plutôt qu’un « responsable de groupe sectoriel ». Dans un Mémorandum d’accord conclu entre la FICR et l’OCHA, il a été convenu que la FICR n’assumerait pas d’obligations au-delà de celles définies dans sa Constitution et propres politiques, et que ses responsabilités ne laissaient aucune place à des obligations à durée indéterminée ou illimitée. Elle ne s’est donc pas engagée à être une « agence de dernier recours » et n’est responsable envers aucune partie du système onusien. ** Le HCR assume la responsabilité du groupe sectoriel de protection au niveau global. Cependant, au niveau national, dans les situations de catastrophes naturelles ou d’urgences complexes sans déplacement majeur de personnes, les trois principales agences mandatées pour la protection (HCR, UNICEF et OHCHR) se concerteront et décideront d’un commun accord, sous la direction du Coordinateur Humanitaire/Résident, laquelle des trois agences assumera le rôle de responsable de groupe sectoriel de la protection.
18 Source du tableau : IASC, Note d’orientation sur la mise en œuvre de l’approche de responsabilité sectorielle pour renforcer l’action humanitaire, novembre 2006, pag. 3.
19
La nécessité d’appliquer l’approche de responsabilité sectorielle tant au niveau global
qu’à celui local s’explique par la poursuite de deux objectifs.
Au niveau global il s’agit de renforcer la capacité de réponse technique et les mesures
de préparation aux urgences humanitaires. Pour cela il a fallu identifier à l’avance les
agences, les organisations et les acteurs responsables et en charge de l’animation des
secteurs concernés.
Au niveau local l’objectif à cibler vise davantage l’amélioration de la réponse
humanitaire en faisant recours à une majeure et meilleure capacité de prévisibilité, de
responsabilité des acteurs qui entrent en jeu et des partenariats dans tous les secteurs ou
domaines d’activité où il existe encore des lacunes. Il s’agit là de mieux cibler l’action
d’intervention stratégique lorsqu’une situation de crise ou d’urgence le demande grâce
également à une meilleure hiérarchisation des ressources disponibles. Cela comporte
une rationalisation du travail entre les divers acteurs qui contribuent à la réponse
humanitaire. Il faut que les rôles, les tâches et les responsabilités soient bien identifiés et
définis à l’avance sur la base de la valeur ajoutée que chacun d’entre eux peut apporter.
Dans ce contexte, dans n’importe quel domaine d’activité, le CH joue le rôle de premier
interlocuteur avec les acteurs concernés au niveau global et local19.
Pour les nouvelles crises majeures, la procédure d’activation d’un cluster au niveau
local se met en place de la façon suivante : dans les 24 heures dès l’éclatement d’une
crise, le CH, exploitant sa position d’intermédiaire, après concertation avec l’équipe
humanitaire présente dans le pays (Humanitarian Country Teams, HCT), lui propose la
direction de chaque domaine majeure. Il cherche ainsi le consensus pour établir des
groupes sectoriels ad hoc. Sa proposition doit ensuite être envoyée à l’ERC qui, à son
tour, devra la partager avec les cluster leads au niveau global. Ensuite, dans les 24
heures suivantes la réception de la proposition du CH, l’ERC doit assurer la prise d’un
accord au niveau global et, par la suite, en informer le CH et les partenaires sur le
terrain. Le CH a le devoir d’informer le Gouvernement local du pays dans lequel se
mettra en place l’action de tous les partenaires dans un cluster. Pour les urgences « en
cours », comme déjà annoncé, l’IASC a prévu que dans tous les pays où il est présent un
CH il faudra appliquer l’approche de responsabilité sectorielle. Dans cette optique, il a
été mis en place un outil de diagnostic pour apporter de l’assistance au CH et à l’HCT
dans le but de déterminer le soutien nécessaire pour utiliser l’approche clusters et pour
19 IASC, Note d’Orientation…, 24 novembre 2006, pag. 2.
20
établir un programme d’action, ainsi que des délais pour la réalisation de celui-ci.
L’outil de diagnostic est basé sur les enseignements obtenus au cours de la première
année de mise en place de cette approche. La prise en compte de ces leçons devrait faire
en sorte que l’HCT puisse mieux comprendre l’objectif opérationnel et les modalités de
fonctionnement de l’approche de responsabilité sectorielle, de mieux identifier les rôles
et les responsabilités, la capacité de réponse et les lacunes à combler, d’assurer la mise
en place de structures de coordination adéquates et, pour finir, de développer des
indicateurs sur la base desquels mesurer les progrès éventuellement réalisés20.
En règle plus générale, la mise en place des clusters passe par trois phases. Il s’agit, tout
d’abord, au niveau global, de définir les normes et les politiques, de les diffuser et
d’identifier celles qui pourraient être les « meilleures pratiques ». Ensuite, leur union
doit permettre d’augmenter la capacité d’intervention sur le terrain, après avoir évalué le
système à toutes les échelles, locale, nationale, régionale et internationale. Il faut donc
disposer et pouvoir déployer d’une capacité de personnel rapide et compétent, ainsi que
de stocks de matériel. Enfin, il faut offrir un appui opérationnel par l’évaluation des
besoins humains, financiers et institutionnels, savoir faire face à des éventuelles
situations d’urgence en planifiant dans le long terme. Pour faire cela, il est nécessaire un
réel accès et une exploitation du savoir-faire technique approprié, exercer des actions de
plaidoyer et mobiliser le maximum de ressources possibles en les mettant à la portée de
tous et en garantissant une complémentarité des efforts par le biais du renforcement et
de l’amélioration des partenariats. Après analyse et évaluation des besoins et des
lacunes bien identifiés, après avoir mesuré les éventuelles capacités d’intervention du
Gouvernement et des autorités locales, de la société civile locale, des organisations
humanitaires internationales et d’autres acteurs, lorsqu’ils sont présents, on passe à la
phase de désignation des responsables des différents groupes sectoriels.
Le fait que l’approche de responsabilité sectorielle soit appliquée tant au niveau local
qu’à celui global n’implique pas forcement une uniformité exacte entre les deux
échelles. Bien sûr, un certain alignement par rapport aux directives générales identifiées
par le cluster au niveau global doit être poursuivi. Cependant une certaine flexibilité
existe dans l’application de ce principe, surtout en prenant en considération les capacités
et les moyens dont disposent les organisations humanitaires déjà présentes dans le pays
concerné. Ainsi, concrètement cela se traduit parfois par un manque de correspondance
20 http://www.humanitarianreform.org/humanitarianreform/Default.aspx?tabid=109, When is the Cluster Approach Used?
21
exacte entre la structure de responsabilité sectorielle au niveau national et celle au
niveau global. Dans tous les cas, il faudra toujours partir de l’analyse de cas concrets,
des circonstances. Dans certaines situations ce ne sera pas du tout nécessaire de mettre
en place des clusters particuliers, dans d’autres il se peut qu’ils aient fusionné, comme
par exemple santé et nutrition, alimentation et agriculture. Le groupe sectoriel au niveau
global, dans le cas du relèvement précoce (early recovery) préfère favoriser une
planification de ce relèvement par son intégration transversale dans le travail de tous les
autres groupes sectoriels, plutôt que de mettre en place un cluster spécifique dans ce
domaine. Celui-ci se relèvera par contre être nécessaire lorsque l’intégration
transversale n’est pas possible ni peut être assurée. Etant donné que le but prime et
ultime est celui de combler les gaps de la réponse humanitaire, il faut hiérarchiser les
principaux problèmes et il faut donc mettre en place des stratégies opérationnelles
efficaces. Ainsi, à titre d’exemple, si des fois l’établissement d’un cluster au niveau
local pour les télécommunications et la logistique pourrait se révéler superflu, d’autres
fois pourrait, au contraire, être fondamentale comme tout au début de l’éclatement d’une
crise humanitaire majeure.
Le niveau global doit fonctionner comme point de référence, de consultation, d’appui,
de concertation sur ce qui concerne les normes, les politiques et les « meilleures
pratiques », ou autre encore. Cela ne doit pas, par contre, faire penser à une réelle
hiérarchisation entre les deux échelles de groupes sectoriels21.
La nécessité de renforcer les partenariats stratégiques entre les ONG, les organisations
internationales, le Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, ainsi que les
agences onusiennes joue un rôle central dans le processus de réforme humanitaire. La
réussite dans la mise en place de l’approche de responsabilité sectorielle réside surtout
dans la capacité de tous les acteurs humanitaires participant au processus de coordonner
leur action, de partager leurs expériences et mécanismes à une échelle d’égalité dans
tous les aspects de la réponse humanitaire, à commencer de l’évaluation, de l’analyse
des besoins et de la planification d’une (ou plusieurs) action(s) stratégique(s), jusqu’à sa
mise en œuvre, la mobilisation des ressources et le bilan final. C’est dans cette finalité
qu’il existe l’exigence de mettre en place une équipe humanitaire dans le pays en
21 IASC, Note d’Orientation…, 24 novembre 2006, pag. 6.
22
question au niveau national : il s’agit du premier maillot pour une mise en œuvre
efficace et prometteuse de bons résultats de l’approche de responsabilité sectorielle.
Cependant, il n’existe pas une forme de partenariat préétablit et défini une fois pour
toutes. Cela dépend à chaque fois du cas par cas, des contingences particulières qui
caractérisent un terrain de travail spécifique. Il s’agit, dans tous les cas, d’établir une
coordination très étroite entre les acteurs prenant partie, ou bien de réaliser une
programmation conjointe avec d’autres associations plus libres, afin d’éviter les
répétitions d’actions et d’améliorer la complémentarité et la valeur ajoutée de chacun.
Pour que cette stratégie produise ses fruits, il faut que tous reconnaissent les spécificités
propres à chacun, que chacun se charge de ses propres responsabilités et de ses propres
rôles, enfin qu’on respecte les différents mandats des différentes organisations
humanitaires. C’est un processus qui vise à promouvoir la collaboration et l’intégration
de cette pluralité d’acteurs sur la base du partage d’un intérêt commun. Les chefs de file
sectoriels doivent s’assurer que tous les acteurs humanitaires prennent partie à cette
démarche et qu’ils collaborent en apportant leur support utile dans la définition des
orientations, des stratégies et des actions que le cluster devra suivre22. Ce sera justement
cette complémentarité qui devrait offrir une réponse humanitaire plus appropriée.
Les relations que les clusters leads au niveau local entretiennent doivent viser à
améliorer la coordination et l’efficace du travail humanitaire ensemble avec d’autres
acteurs, tels que les gouvernements et les autorités locales, les institutions publiques, la
société civile locale et les autres éventuelles parties prenantes. Cependant, le type de
relation sera lié au type de situation existante dans le pays ou la région en question.
Ainsi, par exemple, lorsqu’il s’agira d’intervenir dans des cas de catastrophes naturelles,
ce sera le Gouvernement et les autorités locales qui joueront un rôle plus important et de
direction de la réponse humanitaire, le CH se limitant à soutenir leur stratégie. Dans
d’autres scénarios, comme cela peut être le cas avec des conflits durables, l’éventuelle
volonté participative des autorités gouvernementales locales à la réponse humanitaire
pourrait être compromise et pourrait influencer sur la conduite et la nature des relations
avec les autres acteurs humanitaires internationaux agissant in loco.
Dans toutes les circonstances, il faudra respecter la volonté de tout acteur humanitaire à
vouloir diriger, participer ou exploiter ses propres capacités et ressources dans les
opérations humanitaires.
22 IASC, Note d’orientation…, pag. 9.
23
Á un cluster lead dans un secteur spécifique n’incombe ni la responsabilité ni le devoir
de diriger la réponse humanitaire globale dans ce domaine en particulier, car cela peut
plutôt revenir à d’autres acteurs, tels qu’un département gouvernemental ou à une
autorité locale. Cela n’exclue pas, par contre, que le responsable du groupe sectoriel
promue une forte collaboration et concertation entre les différents acteurs humanitaires
internationaux qui travaillent dans le secteur en question, ainsi que de vérifier et
adresser les liens instaurés avec les gouvernements et les autorités locales, la société
civile, etc…Lorsque les autorités locales présentent un déficit au niveau des capacités,
les responsables sectoriels doivent se charger des formations et du développement de
celles-ci afin de leur permettre de prendre, par la suite, la direction des opérations.
Pour que la réponse soit efficace il faut que les responsables de ces plans (que ce soit au
niveau local, régional ou du siège) se mettent en étroite relation et concertation avec les
autorités nationales dans la finalité de renforcer les capacités locales de réponse et
d’action. Dans cette démarche les responsables doivent également prendre contacts et se
consulter avec les clusters leads et les autres agences responsables au niveau global.
Quelle responsabilité des chefs de file sectoriels au niveau global et local ?
Au niveau global les cluster leads sont responsables vis-à-vis de l’ERC, comme il a été
établi avec l’IASC sur la base de la répartition des responsabilités. Leur accountability
se mesure par rapport au fait qu’ils doivent garantir la capacité technique et de
préparation à l’échelle du système pour apporter une réponse humanitaire aux crises,
ainsi qu’améliorer la prévisibilité et l’efficacité des réponses apportées par un ensemble
d’organisations dans leur secteur spécifique.
Au niveau national la responsabilité globale de garantir une réponse humanitaire
efficace revient au CH avec le soutien du Bureau de la Coordination des Affaires
Humanitaires (OCHA). Les cluster leads doivent reporter non pas aux cluster leads au
niveau international, mais au CH, qui, à son tour, doit rendre compte de son action à
l’ERC. Les chefs de fils sectoriels, même si leur but est celui d’apporter des
améliorations et une majeure coordination à/de l’action humanitaire dans les secteurs
spécifiques qui les concernent et pour lesquels ils ont été désignés, cependant ils ne sont
pas responsables des actions et des résultats de tous les autres partenaires humanitaires
qui se retrouvent dans le même domaine d’intervention. Ils doivent, par contre, rendre
compte au CH de la mise en place des bons mécanismes de coordination dans le secteur
24
qu’ils dirigent, de la programmation et de la planification stratégique pour améliorer
l’efficacité de la réponse humanitaire. En général, parmi les responsabilités spécifiques,
ils doivent s’occuper de l’intégration de tous les principaux partenaires humanitaires,
d’établir et maintenir des mécanismes appropriés de coordination de l’action
humanitaire, se charger de la coordination avec les autorités nationales, les institutions
publiques, la société civile locale et d’autres acteurs entrant à faire partie de ce
processus, promouvoir une approche participative et ciblée sur les communautés, porter
une attention particulière tout au long de l’action sur des thématiques transversales
prioritaires (âge, diversité, environnement, genre, VIH/SIDA, droits humains). Une
attente et ponctuelle évaluation et analyse des besoins est également demandée, ainsi
que le développement de plans stratégiques d’action en cas d’urgences, l’application des
normes, le plaidoyer et la mobilisation de ressources, la formation et le développement
de capacités, fournir assistance ou des services en dernier recours 23 . Une tâche
importante revient aux chefs de file sectoriels. Il s’agit de prêter attention tout au long
de l’évolution de la programmation aux éventuels changements des priorités, en passant
du secours d’urgence au redressement et au développement sur le long terme. Une telle
chose comporterait un changement et une progressive réduction de leurs interventions
d’urgence en faveur d’interventions de transition ou de développement. C’est pour cela
que tous les clusters doivent inclure en leur sein tout un tas de procédures et de
stratégies de relèvement précoce (early recovery)24 . Le but ultime reste toujours le
même : garantir une planification conjointe et une réponse intégrée.
Lorsqu’un responsable de file sectoriel ne satisfait pas pour son opérationnalité et pour
son efficace, alors le CH, après avoir pris consultation avec le direct intéressé et,
éventuellement, avec l’HCT, il peut avancer des nouvelles propositions. Avant même de
les formuler, il pourra également demander à l’ERC de consulter les membres du IASC
au plan international.
23 IASC, Annexe 1, Termes de Références génériques pour les chefs de file sectoriels (“Cluster Leads”) au niveau national, in Note d’Orientation…, pp. 14-16. 24 Le concept d’early recovery est défini selon le Cluster Working Group Early Recovery (CWGER) comme un processus de relèvement qui est mis en place assez tôt dans un contexte humanitaire. Il s’agit d’un processus qui présente plusieurs dimensions, guidé par des principes de développement. Son but est celui de favoriser une certaine autonomie au niveau national et de mettre en place des mécanismes solides pour le relèvement dans une situation de post crise. Les programmes de relèvement précoce visent à restaurer les services de subsistance, à fournir de l’abri et à améliorer les capacités de gouvernance (sécurité, administration local et système judiciaire). Il se met en place en parallèle avec le déroulement des activités humanitaires, même si les objectifs, les mécanismes et l’expertise sont différents. L’early recovery vise à augmenter les opérations d’assistance humanitaire déjà en cours; à garantir que les initiatives spontanées de relèvement précoce pour les populations affectées soient viables et puissent éviter des nouveaux risques ; à établir des bases pour un relèvement sur le long terme.
25
La responsabilité des organisations humanitaires ayant décidé de participer aux clusters
est proportionnelle à leur niveau d’engagement préalablement établi. Elles seront donc
jugées responsables par rapport aux chefs de file sectoriels seulement si elles s’y étaient
engagées précisément à cet effet.
Dans le système international, normalement lorsque la réponse humanitaire se révèle
être insuffisante et elle présente des lacunes, les chefs de file sectoriels devront
intervenir pour organiser une réponse alternative par la coordination et la collaboration
de tous les autres partenaires humanitaires compétents dans le domaine spécifique en
question. Cependant, il se peut que cette nouvelle intervention soit un échec, dans lequel
cas et selon l’urgence, le chef de file sectoriel recouvre le rôle d’« agence de dernier
recours » afin de combler ultérieurement ces lacunes25. Cela ce traduit dans un rôle très
important au sein de l’application de l’approche de responsabilité sectorielle. Il s’agit,
en effet, d’un engagement de la part des cluster leads à faire le maximum pour garantir
une réponse adéquate. Cet engagement respecte, en tout cas, des conditions préalables,
telles que le libre accès aux populations touchées, la sécurité du personnel humanitaire,
de ses biens et la disponibilité de financements adéquats26. Or, l’action du cluster lead
dans cette circonstance pourrait également se montrer inefficace lorsque, pour faire un
exemple, les financements n’ont pas été mis à disposition de ses activités. Donc, même
si l’action ne pourra pas être mise complètement en œuvre, cependant le chef de file
sectoriel devra se charger de mobiliser les ressources nécessaires en collaboration et en
concertation avec le CH et les donateurs. Encore, c’est à l’agence de dernier recours
d’expliquer aux autres parties prenantes les éventuelles contraintes qu’elles pourront
rencontrer, par exemple lorsqu’elles n’arriveraient pas à obtenir l’accès à un endroit
particulier ou dans le cas où elles devraient se retrouver sous un régime sécuritaire qui
limite leur manœuvre d’action. L’agence devra ainsi pousser ses efforts de
sensibilisation. Ce rôle de sensibilisation et d’action pédagogique qui incombe à
l’agence de dernier recours, est à appliquer également quand il s’agit de thématiques
transversales, telles que la protection, le relèvement précoce et la coordination des
camps27.
25 Rappelons que la FICR ne s’est pas engagée à être une “agence de dernier recours” et n’est responsable envers aucune partie du système onusien. 26 http://www.icva.ch/printer/doc00001467.html, TALK BACK, The Newsletter of the International Council of Voluntary Agencies (ICVA), Special Issue: Humanitarian Reforms, Vol. 7-3, Octobre 2005. 27 Pour aider à clarifier et à mettre en perspectives les enjeux liés au concept de last resort, prenons en exemple le cas des populations déplacées à l’intérieur (IDPs) de leur pays même, dont l’HCR en sera le provider of last resort pour leur cluster. Mais des questions se posent : à partir de quel moment, en réalité,
26
Quelle évaluation peut-on tirer aujourd’hui de l’application de l’approche de
responsabilité sectorielle ?
Alors qu’au début la participation des ONG dans les clusters était limitée, les trois
collectifs d’ONG participant au IASC ont fait des efforts pour que leurs membres
s’engagent davantage dans le processus. Aujourd’hui il existe une réelle volonté de
rendre les ONG de plus en plus impliquées dans le travail des clusters. Cependant,
encore pour beaucoup parmi elles, il se pose la question de la réelle utilité d’un tel
engagement. Plusieurs discussions se sont focalisées sur des aspects techniques et sur
des questions de responsabilité des clusters leads, ainsi que sur tous les enjeux
conséquents qui en découlent. Pour plusieurs ONG la vraie valeur de l’approche des
clusters serait au niveau du terrain. De ce fait, le vrai défi consisterait à faire en sorte
que tous ces efforts aient un impact positif au niveau du terrain et qu’ils ne soient pas
seulement porteurs de nouvelles couches de bureaucratie et de coordination.
Pour évaluer les premiers résultats de l’application de la réforme humanitaire, l’IASC a
commissionné une première auto-évaluation en automne 2006. Cependant, déjà à cette
période là, plusieurs membres du IASC considéraient que c’était encore trop tôt pour
mesurer les effets et l’impact de cette approche sur les styles de vie des bénéficiaires.
Néanmoins, elle a mis en évidence toute une série de défauts et de manques qui ont
affecté la mise en opération de l’approche de responsabilité sectorielle28. Cette étude a
mis en relief plusieurs résultats. Tout d’abord, il a été souligné le potentiel qui peut être
dégagé à partir de cette réforme pour améliorer l’efficacité de l’action humanitaire dans
son ensemble. Le cluster approach, en effet, aide à mettre davantage l’accent sur des
gaps récurrents en créant un mécanisme d’action plus prévisible. Mais, pour que cela
soit vraiment plus efficace, il faut créer un meilleur esprit de travail d’équipe entre tous
les acteurs prenant partie au processus en cours. L’auto-évaluation a également salué
certains clusters comme étant des succès. Il s’agit des clusters logistique, nutrition,
WASH (water, sanitation and hygiene) grâce au fait qu’ils requièrent une approche plus
pragmatique. Par contre, les clusters santé et protection, du fait de leur faible le dernier recours sera-t-il déterminé ? Quels sont les critères pour déterminer l’impasse d’une situation avant que l’HCR n’intervienne en fournissant des services et de la protection ? N’y-a-t-il pas le risque que le dernier recours puisse devenir la solution préférée ? Est-ce que les autres agences devront être considérées responsables pour leurs manques dans la réponse, ou bien la responsabilité en entier devra retomber sur l’HCR ? D’après tout, la réponse collaborative devrait être la base de tout type de réponse dans des telles circonstances et si les agences ne répondent pas, elles devraient quand même être retenues responsables d’une certaine façon et en quelque sorte pour leur(s) omission(s). 28 Humanitarian Reform Newsletter, Septembre 2006.
27
opérationnalité et parce qu’ils requièrent une approche plus politique, ont offert moins
de résultats positifs. D’autres effets, plus techniques, ont été soulignés dans cette auto-
évaluation, tels que l’inadéquation, parfois, du leadership des clusters ; une
inconsistance dans et entre les clusters dans l’application des Termes de Référence
(ToR) pour le(s) cluster lead(s) ; ou encore, des systèmes, des structures et des supports
inadéquats pour faciliter la coordination entre clusters ; enfin, un manque de
communication sur les objectifs et les modalités de cette approche29.
Bien sûr, tous ces éléments vont influencer l’efficace et l’efficience de la réponse
humanitaire. C’est pour cela que l’IASC a décidé de travailler plus sur ces déficits qui
devront être majoritairement pris en compte dans les futures applications de cette
approche. En particulier, pour ce qui concerne la mise en œuvre de l’approche de
responsabilité sectorielle, certaines critiques ont été avancées sur la multiplication des
réunions, avec un conséquent alourdissement des couches bureaucratiques. Ce
processus a été accusé d’être dominé par les NU, les ONG étant reléguées dans un rôle
de fournisseurs d’informations et de metteurs en œuvre, mais sans un rôle principal dans
le processus de prise de décisions stratégiques. Des conflits entre le mandat de l’agence
et les responsabilités des cluster leads soulignent la nécessité de recruter une personne
distincte pour assurer la fonction de cluster lead. Les majeures critiques sur la mise en
œuvre concernaient sa rapidité, ce qui n’a pas donné véritablement le temps de se
préparer correctement et, de l’autre coté, sa lenteur : il n’y a pas de résultats visibles
malgré les fonds qui ont été déjà déboursés30.
A partir de là, le Steering Group (StG) a proposé de continuer à mener cette auto-
évaluation présentant une analyse détaillée et utile de l’approche de responsabilité
sectorielle dans une deuxième phase, la première ayant mis en évidence les conclusions
et les manques de l’approche tout en cherchant des nouvelles directions à suivre. Dans
la deuxième phase, qui devra être mise en acte en 2008, il faudrait évaluer la pertinence,
l’efficace, l’efficience, l’impact et la responsabilité des effets de l’approche.
Plusieurs questions continuent quand même d’être posées : sur quels pays se focaliser
au début pour la mise en place de cette approche ? D’où proviennent-elles les ressources
afin de construire les capacités des cluster leads ? Comment améliorer les situations
courantes qui présentent une réponse inadéquate, lorsque les équipes nationales ont la
29 IASC, Terms of Reference IASC Cluster Approach Evaluation, 1st Phase, Final Draft, 25 April 2007, pp. 2-4. 30 Selon les données du CERF, en 2006 27 millions de USD ont été déboursés (pour un Appel de 39 millions de USD). En 2007, en avril, il a été lancé un nouvel Appel d’environ 60 millions de USD.
28
perception, elles, de faire un bon travail et qu’elles refusent une aide extérieure ? Ou
encore, d’autres aspects cruciaux ont été également soulignés déjà pendant le groupe de
travail du IASC en septembre 2005. Il s’agit de l’engagement des acteurs humanitaires
dans un processus qui examine des enjeux autour de l’espace humanitaire et des
missions de peace-building, étant donné que beaucoup des agences des NU mènent ce
type de missions. Dans le passé, beaucoup de débats autour de si dites « missions
intégrées » ont été isolés au sein même des NU, avec le Département des Opérations de
Maintien de la Paix (DOMP, Department of Peace Keeping Operations, DPKO) et le
Département des Affaires Politiques (DAP, Department of Political Affairs, DPA) qui
jouaient un rôle en première ligne31. Mais à partir du moment où l’appel pour une
meilleure coordination de l’action humanitaire a été lancé, les NU se sont engagées à
entamer un dialogue avec le reste de la communauté humanitaire étant donné la façon
avec laquelle les missions intégrées ont un impact sur leur travail. Ainsi des
concertations majeures avec les protagonistes du IASC se sont imposées.
On pourrait se poser la question si l’approche des clusters ne se limite pas à panser les
symptômes plutôt que de prendre en compte des problèmes fondamentaux dans le
système de réponse humanitaire. Les mécanismes de coordination inadéquats, dirigés
par le CH ou le CR, jouent un rôle important dans la faiblesse d’une réponse. Par
rapport à la coordination, le problème ne semble pas être constitué par un manque de
réunions de coordination, bien au contraire, mais plutôt par un manque d’analyse
conjointe, ce qui veut dire prendre des décisions politiques sur quel type de réponse il
faudra mener et sur quel type de priorité il faudra se baser. La façon dont les besoins
sont évalués et ensuite ciblés reste un domaine dans lequel beaucoup de boulot est
encore à faire. Travailler avec les capacités locales et nationales ce n’est pas la première
ni forcement la principale action de plusieurs agences humanitaires. De plus, le manque
de financements alloués pour différentes crises négligées condamne la réponse
humanitaire à être disproportionnée entre pays et populations différents.
31 Le terme « mission intégrée » fait référence à une opération des NU dans laquelle les acteurs onusiens, y compris les acteurs humanitaires des NU, travaillent ensemble sous la direction et la coordination du Special Representative of the Secretary General (SRSG). Une « mission intégrée », de par sa nature, réunit ensemble les différentes parties du système onusien et/ou les terrains des opérations (politiques, militaires, humanitaires et de développement) au sein d’une même structure. Or, les acteurs humanitaires non onusiens ont exprimé leur doute ò propos de l’utilité de telles missions, surtout pendant la phase du conflit, plutôt que dans celle du post-conflit. Les missions intégrées réprimeraient l’espace et l’accès humanitaire. Elles sont perçues comme des menaces pour l’indépendance et la neutralité de l’assistance humanitaire en faisant un mélange des objectifs et des secteurs politiques, militaires et humanitaires. Par conséquence l’accès humanitaire peut subir des limitations et il pourrait aussi créer des perceptions adverses de la part de la communauté humanitaire.
29
Etant donné la démarche avec laquelle les initiatives des réformes sont en train de se
mettre en place, surtout au niveau du terrain, beaucoup au sein de la communauté
humanitaire commencent tout juste d’entendre ce qui se passe et ce qui se met en place,
ou d’en remarquer les changements. C’est vrai que le système humanitaire ne
fonctionne pas de façon prévisible ou impartiale lorsqu’on observe les besoins
humanitaires au niveau global. Cependant, une meilleure réponse demande plus que de
la bonne volonté et des efforts de la part des acteurs humanitaires. Les gouvernements,
ceux des pays où sont présents les personnes déplacées et ceux des pays bailleurs,
jouent un rôle crucial dans la mesure où ça revient également à eux une partie de
responsabilité dans la façon de rendre efficace et concrète une meilleure réponse
humanitaire.
B) Le rôle du Coordonateur Humanitaire (CH)
Une des questions principales à se poser pendant qu’on assiste au work in progress de
cette réforme humanitaire, est de savoir si les structures existantes, qui continuent
souvent à être considérées comme dirigées par les NU (même en dépit de l’évolution
d’autres acteurs non onusiens sur la scène internationale) tiennent tête aux attentes de la
communauté internationale.
L’actuel système de coordination humanitaire prend forme dans trois types de réseaux.
Il s’agit du système onusien, du Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge et
celui des ONG.
Au sein des NU, les fonctions essentielles de coordination sont exercées par l’ERC,
l’IASC, OCHA et le CH au niveau local. Le CH coordonne le travail des agences
humanitaires à travers un forum des équipes de terrain des NU (UN Country Teams,
UNCT), forum auquel même le Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge,
les ONG et l’OIM peuvent prendre partie à différents niveaux d’engagement. Les
principales questions qui sont débattues au sein de ces forums concernent l’évaluation
des besoins, la préparation des actions à entreprendre, les appels d’offre et les
financements, la division du travail et la sécurité. Les trois réseaux du système de
coordination humanitaire travaillent en tant qu’entités séparées, mais quand même avec
des liens limités entre eux pour une collaboration productive. Cependant, le moment
pour que la communauté humanitaire cherche à opérer de façon plus collective est
30
arrivé avec la volonté de promouvoir un large système de mécanismes de coordination
envers lequel tous les acteurs y prenant parties puissent partager un sentiment
d’appartenance. Parmi ces mécanismes, le CH, de par son rôle, exerce une position
intermédiaire entre plusieurs agences dans la finalité ultime de servir la communauté
humanitaire dans sa dimension la plus large, en y incluant de ce fait les ONG, le
Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, l’OIM et les agences des NU.
Selon le rapport du HRR, la coordination de l’assistance humanitaire au sein des NU
était guidée par 21 CH pour un égal numéro de pays en situation d’urgence ou de crise.
Le rôle de CH a été généralement assumé par le CR déjà en place dans ces pays.
Cependant, la majorité des membres du IASC, ainsi que beaucoup de bailleurs, n’ont
pas tardé à manifester leur mécontentement, d’un coté par rapport au processus de
consultation et de fusion de ces deux fonctions de CR et de CH, de l’autre par rapport à
un éventuel désaccord avec la personne choisie en tant que candidat au poste de CH32.
En effet, avec la nouvelle approche de responsabilité sectorielle, la fonction du CR et du
CH est devenue même plus importante afin d’assurer que l’ensemble des besoins
humanitaires et que toute la réponse humanitaire ne soient pas sous-évalués dans le
processus de coordination des clusters. Le vrai enjeu, dans ce cas, consiste dans le choix
des bons candidats pour les positions de CR et de CH, une question assez cruciale du
fait que ces deux positions comportent à la fois des implications politiques et
opérationnelles. Cet aspect constitue un des enjeux majeurs mis en évidence par les
nouvelles dynamiques de la réforme. Dès le début de la mise en place de celle-ci, ayant
pris toute de suite conscience de l’importance et de l’enjeu stratégique que le rôle du
CH pouvait représenter, plusieurs réserves ont été avancées en particulier par rapport
aux mécanismes d’attribution d’une telle qualification. Au début, l’actuelle réforme des
clusters a un peu détourné l’attention de cette fonction, en la laissant un peu de coté et
en en retardant des éventuelles modifications pour après. Le moment venu de tendre
plus d’attention envers cette position stratégique, l’IASC a entamé toute une série de
réunions, meetings et débats tout en y incluant les acteurs humanitaires qui se trouvent
au-delà du système des NU afin de les faire participer à l’élaboration de nouvelles
propositions et recommandations à ce sujet. Ainsi, en avril 2006, les Principes du IASC
ont approuvé un « Plan d’Action sur le renforcement du système de coordination
humanitaire » sur le long terme, avec la création de petits groupes du IASC afin de
32 Humanitarian Response Review…, pp. 46-48.
31
faciliter le progrès de ce Plan d’Action. Ces groupes ont travaillé sur la définition du
profil et des fonctions du CH, en particulier sur leur séparation avec celles du CR33.
En effet, au début le problème était qu’il n’existait pas de véritables critères ou
qualifications requises pour l’attribution de ce rôle. Le processus était plutôt obscur, peu
clair et il se concluait souvent par l’attribution du poste de CH aux CR déjà présents
avec une faible ou presque inexistante expérience humanitaire34. Mais le CH est en
charge de servir la communauté humanitaire élargie au-delà du seul système onusien ; il
est responsable de l’établissement et de la mise en place de mécanismes de coordination
qui voient la participation de tous les acteurs impliqués dans la réponse humanitaire au
niveau local. Jusqu’à maintenant, l’option préférée par les NU a été celle d’offrir le rôle
de CH à un CR, pratique qui, dans trop de cas, a mis en évidence l’inexpérience du CH
à guider et coordonner la réponse humanitaire35. Á la place de préférer une séparation
des deux tâches et rôles, les NU optaient pour le double casquette, en affirmant que la
séparation des positions, en réalité, ne marchait pas, même si leurs conclusions
semblaient être basées sur un nombre très limité de cas concrets36. Or, le dilemme qui
venait à se créer résidait dans le fait de voir la même personne recouvrir les fonctions de
CR et de CH dans des situations où le gouvernement était aussi une des parties
prenantes importantes du conflit dans le pays en question. Le CR, de par son mandat,
doit collaborer avec le gouvernement sur le coté du développement, alors que, en même
moment, les enjeux majeurs peuvent se révéler être autres, telles que l’accès
humanitaire et la sécurité. Les notions d’impartialité et de neutralité deviennent ainsi
toute de suite au centre de tout débat du fait de cette double casquette sur la même
personne. Si d’un coté il y a la question d’être capable d’influencer le gouvernement
plus facilement, du fait que le CH entretient déjà des rapports avec lui grâce à sa
fonction de CR, de l’autre coté il reste le fait que le nombre de positions qui ont vu un
CR séparé d’un CH est resté trop faible et donc pas assez consistent pour pouvoir établir
des conclusions définitives sur la valeur de la double casquette contre la séparation des
charges 37 . De plus, la quantité de travail dont le CR/CH est chargé a souvent été
33 http://www.humanitarianreform.org/humanitarianreform/Default.aspx?tabid=254, Action Taken and Progress. 34 Souvent les CR (nommés par la suite en tant que CH) proviennent du PNUD et ils présentent donc une faible expérience dans le domaine de l’humanitaire. 35 Elizabeth RASMUSSON, Review of Experiences and Recommendations for Strengthening the Dedicated Humanitarian Coordinators Pillar of Humanitarian Reform, Genève, Mars 2007, p. 3. 36 http://www.icva.ch/printer/doc00001467.html, TALK BACK, Ibidem 37 L’expérience du Nord de l’Ouganda a constitue une rare exception de séparation entre le poste de CR et celui de CH.
32
considérée comme excessive, ce qui pousse aujourd’hui à préférer une séparation des
deux postes. Le débat sur la séparation des fonctions reflet une complexité liée à ces
deux qualifications. En effet, le CR recouvre une fonction liée aux NU, alors que le CH
il en recouvre une qui est liée à la communauté humanitaire dans son ensemble au-delà
du système onusien. Institutionnellement, les deux font référence, respectivement, à
deux entités différentes : le Groupe de Développement des NU (UNDG) et l’IASC38.
L’importance de ce rôle et les manques de qualifications personnelles et
professionnelles (pas d’expérience humanitaire, pas de habilité à rendre les
gouvernements plus participes, etc…) qui parfois ont caractérisés les CH/CR en place,
ont poussé à réviser cet aspect important de la réforme. Ce qui peut être plus efficace
pour le système humanitaire est de veiller à ce que les personnes présentant un profil
adéquat et des bonnes compétences puissent recouvrir la charge de CH, ce qui se traduit
par le fait de prendre en compte également des acteurs qui ne proviennent pas forcement
du système onusien. Le point de départ a donc été celui de définir des critères clairs
pour sélectionner le(s) candidat(s) au poste de CH, ainsi que de clarifier davantage le
processus de prise de décision, l’option préférée par les NU de nommer un CR en tant
que CH nécessitant vraiment d’être révisée.
Ainsi, comme on a bien pu le mettre en évidence, le renforcement du CH est
aujourd’hui un des aspects et un des enjeux centraux de la réforme humanitaire, du fait
qu’il en a constitué, jusqu’à maintenant, le pilier peut-être le plus faible. La majorité des
recommandations qui ont été avancées pour améliorer la coordination humanitaire
s’adresse surtout au IASC. Cependant, c’est à l’ERC de prendre des décisions en
concernant la mise en place. La quantité de recommandations avancées fait penser à un
besoin urgent de revoir les Termes de Références du CH et d’établir des structures
fonctionnelles de support afin de garantir un renforcement du système du CH dans le
futur proche. Mais de quoi s’agit-il plus concrètement ?
1. De la sélection au déploiement du CH
Etant donné l’importance de ce rôle, les attentes envers cette qualification sont très
élevées. Il est un leader dont le but principal est de faciliter et de construire le consensus
38 Il peut également y avoir des cas de triple casquette lorsqu’un CR est nommé CH et que, dans les situations des missions intégrées, il est aussi désigné en tant que Deputy Special Representative of the Secretary-General (DSRSG). Cette position est une fonction des NU, alors que, on le souligne une fois de plus, le CH doit représenter la communauté humanitaire, y compris les acteurs non onusiens.
33
entre acteurs. Il est ainsi complètement dépendant du soutien offert par la communauté
humanitaire.
Il est nommé dans un pays affecté par une urgence complexe ou lorsqu’une crise
humanitaire, déjà en cours, s’empire ultérieurement. La nomination est faite par l’ERC,
au nom du Secrétaire Général des NU et après consultation avec l’IASC. Selon le
contexte, l’ERC peut opter pour plusieurs options :
• Il nomme le CR déjà en place en tant que CH (cela correspond, jusqu’à
aujourd’hui, à la pratique la plus répandue).
• Il nomme un CH séparé du CR.
• Il désigne une agence en tant que chef pour la provision d’assistance
humanitaire et l’agence chef de file dans le pays en question pour
recouvrir le rôle de CH39.
• Il nomme un CH régional lorsqu’une urgence concerne plusieurs pays en
même moment. Dans ce cas les CH et les CR de tous les pays concernés
doivent travailler en tant qu’équipe sous le guide du CH régional.
Dans tous les cas, le choix du CH doit être justifié par une expérience humanitaire
remarquable, une connaissance spécifique de l’environnement humanitaire et par un
leadership vérifiable et mise en pratique lors d’autres urgences complexes40.
Or, pour la désignation du CH ce n’est pas demandé l’accord du gouvernement du pays
hôte, cependant il faut que celui-ci soit consulté et renseigné dans les moindres détails.
En effet, pour certains gouvernements on peut bien imaginer que la figure du CH puisse
mettre le pays auquel il a été affecté en mauvaise lumière. L’envoie d’un CH pourrait
être perçu comme un acte contre le gouvernement et non pas en sa faveur, ou en tout cas
pas en faveur de sa population. Cette image ou cette peur que certains gouvernements
peuvent nourrir nécessite d’être changée. L’IASC doit se charger de développer des
stratégies afin d’améliorer la compréhension et l’assimilation de l’assistance
humanitaire, de la coordination et de la logique de fonctionnement. Une fois que les
gouvernements seront mieux renseignés sur les « règles du jeu », probablement ils
seront plus enclins à accepter un CH. De toute façon, les gouvernements, en tant 39 Cette option est mise en évidence dans l’ “IASC Recommendations Related to the Review of the Capacity of the UN System for Humanitarian Assistance”, IASC, 29 Juillet 1998. 40 http://www.humanitarianreform.org/humanitarianreform/Default.aspx?tabid=216, The Appointment of a Humanitarian Coordinator.
34
qu’États membres, doivent se souvenir de leurs obligations dans la mise en place des
décisions des NU41. La figure du CH a été convenue et soutenue par une majorité
écrasante d’États membres au sein de l’Assemblée Générale en 2006. L’IASC devrait
donc chercher à trouver les besoins et les intérêts des gouvernements qui pourraient se
rencontrer avec les activités et les fonctions du CH, dans le but de bâtir un terrain
commun pour la coopération et le dialogue. Dans cette idée, tous les acteurs doivent être
complètement informés, briefés, et instruits par leur Quartier Général afin de préparer le
terrain et l’éventuel soutien à l’arrivée du CH. C’est le cas des CR et des UNCT. Les
bailleurs aussi y jouent un rôle important car ils pourraient encourager les
gouvernements locaux à accepter et mieux comprendre le rôle du CH dans une logique
de l’aide au développement.
Avant le déploiement du CH, parmi les meetings les plus importants, il y a celui avec
l’ERC pour établir les bases de la responsabilité de cette fonction. Avec l’ERC, il faut
trouver un consensus sur les priorités humanitaires dans le pays en question et comment
le CH devra réaliser ces priorités42. L’ERC doit donc rencontrer le CH et lui procurer
assistance et conseils sur comment interpréter les priorités humanitaires. De plus, les
Termes de Référence doivent quand même être adaptés au pays en question sur la base
des particularités de celui-ci. Le CH pourra être considéré responsable seulement
lorsqu’il aura reçu des instructions claires à ce propos. Dans la lettre de désignation du
CH, l’ERC devra également y indiquer la période du déploiement et tous les critères et
points de références.
2. Analyse des Termes de Références (ToR) du CH
Les ToR auxquels on fait référence ont été adoptés par l’IASC en 2003. Dès le début ils
se présentaient comme assez génériques et larges. Parmi les tâches principales on
retrouve :
• Responsabilité : le CH doit rendre compte devant l’ERC (et donc OCHA) dans
le pays (ou la région) concerné(e). L’ERC doit donc bien clarifier la 41 Elizabeth RASMUSSON, Ibidem, pp. 2-3. 42 http://ocha.unog.ch/humanitarianreform/Portals/1/H%20Coordinators/HC%20ToR%20endorsed%202003.pdf, Terms of Reference for the Humanitarian Coordinator. Sous le paragraphe “Strategic Coordination Functions”, in « Humanitarian Accountability », le point 24 attribue au CH la responsabilité de promouvoir et contrôler la mise en place de : « existing policies as well as future new ones as they are developed, adopted and issued by the IASC… ». pag. 6.
35
signification de cette condition de façon à que le CH et le Chef d’OCHA aient la
même compréhension et connaissance de ce que cela signifie.
• Reporting : le CH doit reporter directement à l’ERC des NU. Mais comment,
chaque combien, dans quel format et pour quel type d’information ? Tout cela
doit être discuté et doit trouver des réponses afin de renforcer et clarifier la
responsabilité du CH et de développer des outils et des routines qui serviront à
soutenir le CH dans l’accomplissement de ses tâches et fonctions43.
• Fonctions de gestion : il doit coordonner les activités humanitaires de l’équipe
du pays et il doit s’occuper de la mise en relation de celle-ci avec l’ERC. Il est
aussi responsable de la gestion du bureau d’OCHA qui est mis en place pour le
soutenir dans l’exercice de ses fonctions. Il faut par contre clarifier les rôles et
les responsabilités respectives du CH et du Chef d’OCHA. Le Chef d’OCHA
gère le Bureau, comme prévu dans ses ToR, alors que le CH, sous la charge de
son Agence, gère celle-ci. Ainsi pour cela, une certaine distance se crée entre le
CH et le Bureau d’OCHA. L’équipe de terrain d’OCHA est concernée par le fait
que le CH puisse recouvrir une double casquette en mixant les deux fonctions.
La relation fonctionnelle entre le CH et le Bureau d’OCHA sur le terrain est un
élément clé pour garantir le succès du CH. Dans les ToR, pour le Chef d’OCHA
est établi clairement qu’il est directement supervisé par le CH, c’est à lui qu’il
doit reporter ses actions et il doit l’aider et soutenir en tant que sa fonction
primaire. Cependant, il est recommandé que l’ERC offre une majeure et plus
claire orientation sur la relation entre le CH et OCHA afin que celle-ci soit bien
intégrée et qu’OCHA devienne l’outil principal pour le CH.
• Fonctions de coordination opérationnelle : la division du travail parmi les
agences humanitaire est réglée à travers la mise en place de l’approche de
responsabilité sectorielle. Les ToR pour le CH doivent être révisés et les
références pour le Guidance Note for Cluster Leads and Terms of Reference for
Cluster Leads doivent y être incluses. Dans le cadre des mécanismes de
43 Cependant il n’existe aucun moyen pour retenir les CH responsables pour ne pas avoir respecté leurs termes de référence. Il faudrait donc mettre en place un système de responsabilité afin que les CH qui ne portent pas à terme leurs rôles de façon efficace ne se voient plus réattribuer le même poste dans une autre mission. Néanmoins, il faut aussi souligner un point important. La coordination, au-delà de tout, est réellement effective et efficace aussi lorsque les acteurs avec lesquels quelqu’un est censé se coordonner, ils montrent, eux aussi, une volonté de collaboration dans la coordination. Dans ce sens, peut-être l’approche de responsabilité sectorielle peut conduire vers une augmentation d’une volonté plus coopérative.
36
coordination, le CH est spécifiquement responsable pour convoquer et présider
les réunions du IASC ; garantir la leadership pour la coordination dans des
clusters spécifiques et/ou pour des zones géographiques (donc mise en place de
l’approche des clusters) ; assurer la consultation avec les autorités nationales,
entre les NU et toute autre agence humanitaire et les composants des forces
militaires bilatérales. En conclusion, par rapport à ce point, il faudrait une sorte
de carte qui montre comment l’architecture de la communauté humanitaire
devrait être développée par OCHA dans tous les pays où il n’existe pas de doute
sur qui fait quoi et à quel niveau, mais aussi comment sont croisés entre eux les
différents niveaux et travaillent entre eux pour réaliser les objectifs communs.
Cette carte devrait être partagée entre tous les acteurs relevant y compris l’IASC,
les bénéficiaires, les autorités et les bailleurs. La consultation avec les autorités
nationales est très importante lorsqu’il y a l’enjeu des IDPs, dans ce cas le CH
doit prendre contact avec les niveaux les plus élevés du gouvernement pour
veiller à qu’il n’y ait pas de vide concernant la compréhension et les
consultations au niveau politique44.
Le CH exerce ses fonctions de coordination par le biais de l’UNCT qui s’occupe aussi
de questions de développement et de sécurité. Même si l’UNCT travaille sous le
consensus de la communauté des NU, ses décisions ne sont pas contraignantes et
plusieurs membres s’adressent à leur Quartier Général de référence pour la décision
finale. Dans les cas où un CH est mis en place, les ONG et les autres acteurs non
onusiens sont plus disponibles à travailler et à participer aux réunions d’UNCT. Donc,
avec l’appui d’OCHA, le CH doit mettre en place les mécanismes de coordination
visant à créer du consensus parmi la multiplicité d’acteurs intervenants, ainsi que leur
participation et intégration au processus.
Par rapport aux secteurs, le CH doit s’occuper de la consultation des cluster leads et de
tous les autres acteurs humanitaires prenant partie au développement et à l’orientation
d’une stratégie opérationnelle de l’action humanitaire. Les réunions entre tous ces
acteurs doivent permettre la circulation et la diffusion d’informations efficaces et utiles
entre eux afin de garantir une réponse plus cohérente sur le terrain. Le CH pointe
également son attention sur les thématiques transversales (âge, diversité, environnement,
44 Elisabeth RASMUSSON, Ibidem, pp. 5-7.
37
genre, VIH/SIDA, droit humains) de façon à qu’elles ne soient pas ignorées. Il doit
veiller à ce que la planification stratégique soit cohérente dans tout le pays, à tous les
niveaux (national, sous-national et infranational). Afin de garantir une collaboration
multisectorielle efficace, les secteurs ont à leur disposition des services et des outils
communs notamment dans les domaines de la gestion de l’information, de l’évaluation
des besoins, de l’élaboration du plan d’action humanitaire commun, de la préparation de
l’appel global, de l’appel d’urgence et de la planification des mesures d’urgences. Il
travaille en étroite collaboration avec les chefs de file sectoriels pour leur offrir son
soutien et son appui dans le processus de sensibilisation et de mobilisation des
ressources toujours dans le but final de procurer une réponse humanitaire plus prévisible,
efficace, équilibrée et hiérarchisée en termes de priorités45.
Les derniers progrès du deuxième pilier.
Les derniers progrès qui ont été menés dans le cadre de la réforme du pilier du CH
trouvent leurs origines dans l’adoption du Plan d’Action, en 2006. Aujourd’hui il existe
un consensus assez partagé sur le profile du CH46. Un autre résultat important a été la
prise en charge par le PNUD de déployer un directeur du pays (Country Director)
lorsque un CR est désigné aussi CH. De plus, la performance du CR/CH pour 2006 est
en train d’être évaluée et révisée par une équipe de directeurs régionaux à travers un
processus intra-agences auquel OCHA prend partie47.
En novembre 2006, au moment où s’est tenue la 66ème réunion du Working Group du
IASC, il y avait 32 CH dans différents pays48. Á l’exception de celui en Ouganda, tous
les autres avaient le double titre de CR et CH et neuf parmi eux étaient aussi DSRSG
des missions de maintien de la paix. Avant la fin de septembre 2006 il y avait des CH et
CR séparés au Liban lors de ‘éclatement de la guerre. Les récentes désignations du
45 http://ocha.unog.ch/humanitarianreform/Portals/1/H%20Coordinstors/HC%20ToR%20endorsed%202003.pdf , Revised Terms of Reference for the Humanitarian Coordinator, 11 Décembre 2003. 46 Pour le résoudre brièvement, il s’agit d’être indépendant de tout type d’agence, de nourrir une position de neutralité vis-à-vis du gouvernement hôte, de témoigner d’une forte expérience humanitaire et des compétences d’opérationnalité, de diplomatie et de négociation. 47 http://www.icva.ch/doc00001939.html, Strengthening the Humanitarian Coordinator's System. Draft Discussion Paper. Exceptional Circumstances leading to the Separation of the RC and HC Functions and the Role of Deputy Humanitarian Coordinator. 66th Working Group Meeting, New York, 15-17 Novembre 2006 (point 4). 48 Afghanistan, Angola, Burundi, République de Centrafrique, Tchad, Colombie, Cote d’Ivoire, RDC, Erythrée, Ethiopie, Géorgie, Guinée, Haïti, Inde, Indonésie, Iraq, Libéria, Maldives, Népal, Niger, Territoires Occupés de Palestine, Pakistan, Fédération Russe, Sierra-Léon, Somalie, Sri Lanka, Soudan, Tadjikistan, Timor-Leste, Thaïlande, Ouganda, Zimbabwe.
38
poste de CH dans les dernières crises majeures ont montré la volonté de faire plus
d’attention dans cette phase du processus en tenant en considération les particularités
aussi de la crise en question sur la base des compétences et des expériences propres du
CR en place, mais également le contexte d’émergence de la crise. L’enjeu du contexte
joue, en effet, un rôle décisif dans la décision de désigner un CH dans la même personne
qu’un CR. Un bon exemple est constitué par le Pakistan, un pays caractérisé par un très
fort gouvernement local, une société civile consolidée et une armée nationale efficiente
pour le soutenir. Ainsi, lors du tremblement de terre en Octobre 2005, un désastre
naturel d’énormes proportions dans un tel pays a mené le gouvernement local à se
positionner carrément en tant que leader dans la réponse d’urgence. De l’autre coté, en
Ouganda toute une série de facteurs ont contribué à la décision, en partie de l’ERC, de
maintenir une séparation entre les deux fonctions de CH et CR : il y a une situation
politique assez complexe, avec un gouvernement qui préfère clairement l’agenda du
développement à celle humanitaire et avec une crise humanitaire bien confinée dans une
région spécifique du pays. La crise du Liban est aussi intéressant car pendant l’existence
d’un gouvernement fort à la tête de la réponse humanitaire, la complexité de l’urgence,
sa propre nature et la puissance de la dimension politique qui l’ont caractérisée a généré
un long débat au sein même des NU sur l’ensemble des compétences appropriées à
avoir pour gérer la crise, y compris celles en relation avec la fonction du Designated
Official (DO) pour la sécurité. Á la fin, le système des NU a préféré une séparation des
fonctions, derrière aussi la pression et l’insistance de l’ERC, qui sentait qu’un
leadership humanitaire et opérationnel forte était nécessaire dans ce type de crise.
Le rôle de l’Emergency Relief Coordinator (ERC, Coordinateur de Secours
d’Urgence-CSU)
Ce dernier exemple montre comment le rôle de l’ERC est important, stratégique et
central dans la préparation, la mise en place et le suivi de la réponse humanitaire.
En janvier 2007, le Secrétaire Général des NU, Ban Ki-moon, a désigné John Holmes
comme successeur de Jan Egeland pour les postes de Sous Secrétaire Général pour les
Affaires Humanitaires (United Nations Under Secretary-General for Humanitarian
39
Affairs, UNUSG) et de Coordinateur de Secours d’Urgence49. Il s’agit d’une position de
très grand niveau et importance au sein des NU, ainsi qu’au sein d’OCHA. La
différence entre la position de l’ERC et celle d’USG réside dans le fait que la fonction
de l’ERC est une fonction vers laquelle toute la communauté humanitaire manifeste un
vif intérêt. Il joue un rôle fondamental en devant construire un consensus entre les
membres du IASC et tous les acteurs humanitaires onusiens et non onusiens qui
travaillent sur le terrain.
L’ERC, ainsi, en tant que président du IASC, joue un rôle d’influence très important
pour tous les acteurs humanitaires. Son leadership, ainsi que sa vision de l’action
humanitaire, constituent des enjeux fondamentaux selon la façon dont ils sont reçus tant
au sein du système des NU que de celui non onusien. Il est responsable de la
coordination de la réponse internationale des NU pour les populations affectées par des
urgences et des désastres et il doit veiller à que toutes les parties prenantes
accomplissent leurs obligations envers les bénéficiaires. L’efficace de son travail
dépend de la nature des interactions avec les membres du IASC, de ses relations avec le
Secrétaire Général et de la qualité de ses briefings avec le Conseil de Sécurité50.
En faisant une sorte de bilan jusqu’à maintenant sur le succès de cette qualification, on
peut dire qu’au sein des NU, y compris au niveau du Secrétariat, les relations de travail
de l’ERC sont considérées comme étant bonnes et elles semblent bouger dans la bonne
direction pour améliorer la coordination humanitaire. Le défi est qu’au niveau du IASC
et dans la communauté des bailleurs la demande pour recouvrir ce rôle est en nette
augmentation afin de construire une communauté humanitaire plus large et plus
inclusive au niveau opérationnel. Cela comporterait donc un renforcement progressif de
cette fonction51.
La force de l’ERC devrait résider dans une démarche active de consultation avec les
membres du IASC et les partie prenantes majeures afin de trouver un consensus dans la
désignation d’une responsabilité opérationnelle pour les différents secteurs et domaines
49 La qualification de l’ERC a été créée avec une résolution des NU (A/46/882, ST/SGB/248) en décembre 1992 dans le but de coordonner les efforts des représentants spéciaux du Secrétaire Général des NU dans le cadre de crises complexes ou de catastrophes naturelles. 50 Humanitarian Response Review, pag. 51. Le grand turnover d’ERC (six en douze ans) a eu un impact pendant les ans à suivre par rapport au IASC et à OCHA en même temps, aussi bien que sur sa capacité d’influencer le Secrétaire Général. (1992-1994 : Jan K. Eliasson ; 1994-1996 : Peter Hansen ; 1996-1998 : Yasushi Akashi ; 1998-2000 : Sergio Vieira de Mello ; 2001-2003 : Kenzo Oshima ; 2003-2007 : Jan Egeland ; 2007- Jean Holmes). 51 Humanitarian Response Review, chap.3 “A Shared Vision for the Coordination of the Humanitarian Response”, pag. 48.
40
d’activités transversaux, ainsi que pour répondre à la protection et aux soins des
populations internement déplacées (IDPs)52. L’ERC a la tâche de revoir la composition,
les fonctions et le processus de prise de décision du IASC sur la base des éléments
suivants : les membres doivent montrer un engagement substantif dans les opérations
humanitaires ; une bonne leadership à démontrer dans le monitoring et la promotion du
processus de la réforme à travers une fécondation croisée parmi les organisations ; les
organisations doivent être d’accord sur un système approprié d’empowerment du IASC
dans la prise de décisions contraignantes pour ses membres dans des situations
prédéfinies.
C) Les mécanismes de financement (Pool Fund et CERF)
Dans le contexte de la réforme humanitaire des NU et en adéquation aux Principes du
Good Humanitarian Donorship Initiative (GHDI), ont été développés des nouveaux
mécanismes de financement pour améliorer la qualité et l’action de la réponse
humanitaire53. Il s’agit de fournir des ressources financières nécessaires en relation avec
les besoins des populations affectées par une crise ou une urgence. En effet, avant la
réforme, la majorité des Flash Appeals ne produisait pas des fonds adéquats pour
couvrir la phase initiale des opérations d’urgence. Les analyses statistiques des Flash
Appeals entre 2002 et 2005 ont démontré que la réponse, en moyenne, couvrait
seulement 16% des besoins identifiés et cela après un mois du début de la crise54. C’est
dans ce cadre qu’en 2006 ont été lancés le Pool Fund (en RDC et au Soudan) et le
Central Emergency Response Fund (CERF). Ces deux outils, combinés avec d’autres
contributions, ont fourni plus de 30 millions USD pour projets d’assistance et de
réhabilitation dans plusieurs pays.
52 D’ailleurs, une approche similaire devrait être suivie aussi pour désigner les organisations chefs de file dans les secteurs là où cela manque. 53 Le Good Humanitarian Donorship Initiative constitue pour les bailleurs un forum de discussion sur les bonnes pratiques du financement humanitaire et sur d’autres sujets annexes. En définissant les principes (« Les 23 Principes ») et les standards, le GHD fournit le cadre pour guider l’aide humanitaire officielle et un mécanisme pour encourager la responsabilité des plus grands bailleurs de fonds. Les « Principles and Good Practice of Humanitarian Donorship », ont été adoptés à Stockholm le 17 juin 2003 par Australie, Belgique, Canada, la Commission Européenne, Danemark, Finlande, France, Allemagne, Irlande, Japon Luxembourg, Pays-Bas, Norvège, Suède, Suisse, Royaume Uni et les Etats-Unis. Pour plus de détails : http://www.goodhumanitariandonorship.org/ 54 Abby STODDARD, Katherine HAVER, Adele HARMER, Operational Consequences of Reform Project. Humanitarian Financing Reform, Center on International Cooperation, ODI, Juin 2007, pag. 9.
41
1. Le Pool Fund (PF)
Le PF, en s’inscrivant parmi les larges réformes de l’architecture humanitaire, a pour
but principal de contribuer à améliorer les résultats de l’action humanitaire. L’objectif
est de soutenir les financements accordés par les bailleurs de fonds pour les besoins
d’urgences dans les pays qui se trouvent sous la direction d’un CH. Cet outil, en effet,
appui le rôle du CH en mettant à sa disposition un mécanisme apte à renforcer
l’efficacité de la réponse humanitaire.
Le fond est octroyé seulement pour les projets classés dans le Plan d’Action comme
« humanitaire », c’est-à-dire des projets jugés indispensables et prioritaires par le
Country’s Policy and Institutional Assessment (CPIA) et le Pool Fund Board, le conseil
d’administration du PF. C’est une équipe composée par les NU, les ONG et les bailleurs
qui identifie et établi une priorité parmi les projets dans les différentes régions du pays
en en garantissant la transparence et la gestion équitable des fonds.
Le premier PF a été institué en RDC en 2005 selon la volonté des NU de promouvoir
une approche plus coordonnée avec les ONG dans l’assistance humanitaire. En effet, la
RDC représente un des pays pilots pour la mise en place du PF dans le cadre du GHDI,
ainsi que le Soudan. Sous l’autorité du CH, le PF est devenu la plus grande source
individuelle de financement pour les activités humanitaires en RDC55.
Afin de réaliser ses objectifs, le PF se propose de :
• Fournir des financements de façon plus rapide.
• Renforcer le processus d’organisation et de coordination.
• Engager l’allocation des fonds au Plan d’Action Humanitaire (PAH, Common
Humanitarian Action Plan, CHAP).
• Elargir la participation dans le PAH.
• Canaliser les fonds vers les besoins les plus urgents.
• Garantir que les fonds soient disponibles pour des réponses rapides lors
d’événements imprévisibles.
55 En RDC, les bailleurs de fonds ont alloué plus de 88 millions USD à travers le PF en 2006. Par exemple, étant donnée l’importance du secteur agricole en RDC, la FAO a bénéficié de 10 millions USD déboursés rapidement à travers le PF, ce qui a permis à l’Organisation d’apporter de l’assistance auprès des dizaines des centaines de familles d’agriculteurs.
42
Le PF est administré par le PNUD selon les règlements financiers de l’Organisation.
Celle-ci sert d’Agent Administratif au nom des autres agences onusiennes participantes.
Les ONG et l’OIM, en tant que partenaires impliqués dans le Plan d’Action, peuvent
avoir accès au PF par le biais du PNUD et elles exercent un rôle additionnel de
surveillance. Ainsi, les ONG et l’OIM doivent traiter directement avec l’équipe du
PNUD. Dans ce cas, le CH retiendra responsable pour l’allocation des fonds une ONG
en particulier et le projet inclus dans le Plan d’Action. Pour les agences onusiennes, qui
veulent accéder aux fonds du PF, elles doivent traiter leurs propositions de projets avec
OCHA et celles-ci doivent ensuite être révisées par les clusters leads56.
Il existe deux mécanismes de déboursements de fonds pour le PF :
1. Un mécanisme d’allocation standard : il s’agit de débourser la plus grosse partie
des ressources du PF pour assurer une allocation rapide pour les projets jugés
être les plus urgents.
2. Un mécanisme d’allocation rapide, à utiliser dans le cas de circonstances
imprévisibles.
L’institution du PF en RDC et au Soudan répond à la nécessité de vouloir apporter des
améliorations à la suite des échecs du Consolidated Appeals Process (CAP) avec des
nouveaux programmes, tels que le Common Humanitarian Action Plan (CHAP). L’idée
était d’essayer de prendre plus en compte les besoins sur le terrain. Or, d’un point de
vue global, on ne remarque pas qu’un grand pourcentage de flux financiers soit passé
par ces nouveaux mécanismes (CAP, CHAP et PF). Après un déclin entre 2002 et 2005,
les CHAP ont vu augmenter le pourcentage des flux globaux seulement en 2006. En
même moment, le pourcentage total de l’aide humanitaire destiné aux programmes au
sein du CAP a diminué en moyenne de 51% entre 2000 et 2003 à 41% en 2004-2006.
Cependant, au niveau local, sur le terrain, la valeur ajoutée des fonds des États bailleurs
est plus évidente, comme cela peut être démontré selon les évaluations du PF en RDC et
au Soudan en 2006 : « In regard to strategic coordination of funding, since the
inception of the mechanism, the portion of total aid flows directed to activities inside the
countries’ strategic plan frameworks, as opposed to uncoordinated direct bilateral
56 http://www.rdc-humanitaire.net/f/article.php3?id_article=43
43
payments, rose by a considerable amount – to 70% in Sudan (from a prior years’
average of 56%) and 82% in the DRC (formerly 54% on average) »57.
2. Le Central Emergency Response Fund (CERF, Fond Central ’Intervention
d’Urgence)
L’autre outil qui a été mis en place dans le cadre de la réforme des NU est le Central
Emergency Response Fund (CERF), crée en décembre 2005 par la résolution 60/124 de
l’Assemblée Générale des NU. Son objectif principal est celui d’assurer une réponse
humanitaire prévisible et rapide pour les urgences humanitaires, basée sur des besoins
vérifiables et sur des priorités bien identifiées en consultation avec l’UNCT, dans le but
général de contribuer à améliorer la coordination de l’aide humanitaire.
Le CERF vient à compléter un autre dispositif déjà existant, le Central Emergency
Revolving Fund (CERF, Fond Auto-renouvelable d’Urgence) crée en 1991 par la
résolution 46/182 et reformé ainsi en décembre 2005 avec le nouveau CERF (Expanded
CERF, E-CERF) 58 . La nouveauté avec la création de ce deuxième Fond est qu’il
complète le premier en ajoutant à la composante prêts (constituée de 50 millions USD)
une composante dons (dont le montant s’élève à 450 millions USD) afin d’intervenir
rapidement lors des situations d’urgence humanitaire, pour un montant total du fond qui
s’élève à 500 millions USD59.
Cet outil s’insère parfaitement dans le cadre de la réforme de l’architecture humanitaire
car il contribue à l’amélioration de la réponse et de la coordination humanitaire, il
consolide le rôle et le leadership du CH et/ou du CR, il renforce également l’approche
de responsabilité sectorielle du fait que les clusters jouent un rôle important lors 57 Abby STODDARD et al., Evaluation of the Common Funds for Humanitarian Action in the Democratic Republic of the Congo and Sudan, CIC, NYU and HPG, Novembre 2006. L’étude reflet les frustrations des ONG avec le rôle des NU dans la gestion financière du PF. Pag. 2. 58 Au niveau des abréviations, E-CERF désigne le nouveau Fond, crée en 2005. Cependant, tout au long de ce travail de recherche on utilisera seulement l’abréviation « CERF » pour faire expressément référence à l’Extended Central Emergency Response Fund. 59 Le Central Emergency Revolving Fund a été conçu comme un instrument complémentaire aux réserves et aux autres mécanismes de financement des agences onusiennes et de l’OIM. Sa fonction est d’assurer le déploiement des ressources adéquates, sous forme de prêts, aux organismes intervenants lors des phases critiques d’une crise qui a besoin d’une réponse multilatérale, afin de faciliter une intervention plus rapide et coordonnée aux demandes d’aide d’urgence. Cela ne prévoyait pas de composante dons. En 2001, ce Fond a été élargi afin de prendre en compte l’assistance dans des cas d’urgences humanitaires pour les populations affectées par des désastres naturels. Les prêts sont remboursés par les contributions volontaires reçues par les organisations en réponse aux CAP. Cependant, ce mécanisme c’est avéré être peu utile, en particulier au moment de trouver une solution pour les urgences plus discrètes du fait que les agences ne sont pas très propices à faire recours à ce Fond pour des activités dans des pays qui ne répondent pas aux intérêts des bailleurs.
44
d’établir des priorités parmi les différents projets à financer. De plus, pour souligner
l’interconnexion entre tous les acteurs et tous les mécanismes qui prennent partie à la
réforme humanitaire, on remarquera que le Directeur du CERF est l’ERC, qui recouvre
aussi la charge de Secrétaire Général d’OCHA. L’ERC est soutenu par l’Advisory
Group composé par 12 experts sélectionnés dans la communauté humanitaire (y
compris les ONG et les bailleurs). Ce groupe n’a pas de pouvoir décisionnel, mais il
exerce un rôle consultatif et d’expertise sur la gestion et l’usage des fonds du CERF.
Une précision s’impose tout de suite : le CERF ne constitue pas une alternative à la
recherche habituelle de financements auprès des bailleurs de fonds traditionnels. Son
but ce n’est pas de remplacer, mais de compléter les mécanismes de financements
humanitaires déjà existants60.
Le CERF est constitué par trois composantes :
1. La composante « prêts », qui est dotée de 50 millions USD et qui fonctionne
comme un instrument d’autofinancement des organisations humanitaires afin
d’en améliorer la flexibilité financière.
2. La composante « don en cas de réponse rapide », qui bénéficie des 2/3 des
ressources du fond, soit 300 millions USD. Elle vise à faciliter une réponse
rapide et adaptée selon les besoins immédiats en cas d’urgences humanitaires
résultant de catastrophes improvises (catastrophes naturelles ou urgences
complexes) ou de l’exacerbation rapide de crises complexes déjà existantes61.
3. La composante « don pour les crises sous financées », qui peut bénéficier
jusqu’à 1/3 maximum des ressources du fond, soit 150 millions USD. Elle
cherche à renforcer la réponse humanitaire pour ce type de crises « oubliées ». 60 Le total du financement humanitaire mondial pour 2005 a été de 12.8 billions USD. Le CERF ne représente que 4% environ des ressources globales ! 61 Dans un draft du Secrétariat du CERF, du 23 mai 2007, concernant les « CERF Life-Saving Criteria and Sectoral Activities », pour « catastrophe naturelle » on doit entendre: « a serious disruption of the functioning of a community or a society causing widespread human, material, economic or environmental losses which exceed the ability of the affected community or society to cope using its own resources. A disaster is a function of the risk process. It results from a combination of hazards, conditions of vulnerability and insufficient capacity or measures to reduce the potential negative consequences of risk ». Pour « urgence complexe » on doit entendre: « a humanitarian crisis that requires an international response that goes beyond the mandate or capacity of any single agency. Complex emergencies are characterized by: extensive violence and loss of life, massive displacements of people, widespread damage to social and economic assets, and multi-faceted humanitarian responses ». Cette définition est donnée par l’IASC pour définir la notion d’ « aide humanitaire » pour le Financial Tracking System, en septembre 2005.
45
Le recours au CERF doit permettre le déploiement de fonds là où cela est le plus
nécessaire dans les réseaux de l’aide des organisations internationales, afin de garantir
aux acteurs éligibles une action immédiate lorsqu’il y a un désastre improvise ou pour
mettre ces fonds à disposition pour des activités de life-saving.
Mais qui sont les acteurs éligibles pouvant bénéficier des ressources du CERF ?
Ce sont les agences onusiennes, ses programmes et fonds et l’OIM qui peuvent obtenir
des dons ou des prêts dans le but d’améliorer les activités humanitaires. Etant donné
qu’OCHA joue le rôle de manager du CERF, il n’est pas éligible pour bénéficier de
fonds sous la forme de dons. Par contre, les ONG et le CICR ne peuvent pas postuler
directement pour les fonds du CERF, mais elles y ont un accès indirect en tant que
partenaires des agences onusiennes et de l’OIM.
Ce Fond est formé par les contributions volontaires des Etats membres des NU, par des
fondations et des donateurs privés62. Depuis son apparition (9 Mars 2006), le CERF a
alloué 559 millions USD pour financer 692 projets dans 53 pays. En particulier, 362.4
millions USD ont été utilisés pour la réponse rapide lors de l’éclatement de nouvelles
crises, 196.6 millions USD ont financé des crises sous-financées dans 22 pays. Les
quatre pays qui ont reçu les plus de dons ont été la RDC, le Soudan, l’Afghanistan et le
Kenya. Les trois secteurs les plus financés par le CERF sont : nutrition (30,3%), santé
(21,6%) et les activités multisectorielles reliées à l’assistance auprès des réfugiés
(19,8%)63.
Pour ce qui concerne les dons, c’est seulement en cas d’absence de toute autre source de
financement immédiate, comme les réserves internes des agences, les fonds
d’affectation spéciaux non affectés des agences et l’assistance bilatérale des bailleurs,
que c’est possible de soumettre une demande d’obtention de fonds en provenance du
CERF. Les dons sont remis au fond, programmes et agences spécialisées des NU (OIM
inclue). Or, il existe deux types de procédures à suivre selon qu’il s’agisse d’obtenir des
dons pour une réponse rapide ou pour des crises chroniquement sous-financées.
i. Dans le cas des dons en cas de réponse rapide : tout d’abord, les projets à
proposer doivent strictement concerner le life-saving et non pas la capacity
62 En 2007, 62 États, 1 gouvernement local, 2 organisations privées ont versé un total de 346.5 millions USD. 63 http://ochaonline3.un.org/cerf/CERFFigures/tabid/1796/Default.aspx. Les données disponibles se
référent à la dernière mise au jour qui date du 15 octobre 2007. Pour consulter les tableaux statistiques, voire annexe I.
46
building ou needs assessments. Les fonds, dans ce cas, doivent être
déboursés dans les trois mois à suivre, dans d’autres cas, le jour même. La
demande doit être soumise auprès du CH/CR avec l’assistance du bureau
d’OCHA présent sur le terrain. Ensuite, le CH/CR, après consultation avec
l’équipe sur le terrain du IASC, soumet à l’ERC une liste détaillée des
priorités principales de l’urgence humanitaire. Cela veut dire, donc, que les
agences ne peuvent pas s’adresser directement à l’ERC. Á OCHA revient la
tâche de valider et prendre en compte les applications en conformité avec les
objectifs du CERF, ainsi que sur la base de la qualité du projet en général.
L’ERC, de son coté, veille à ce que les dons à affecter ne remplacent pas les
mécanismes d’appel humanitaire existants et il s’assure que le projet ne fasse
pas l’objet d’un double financement. Une fois le projet approuvé, on passe
au déboursement du montant.
ii. Dans le cas des dons pour les crises sous-financées : l’objectif est de
permettre une continuité des activités vitales essentielles dans ce genre de
crises. Il existe seulement deux déboursements par an : Février/Mars et
Juillet/Août. Lors de ces deux possibilités de déboursement, l’ERC invite les
pays qui ont été sélectionnés à postuler pour ce type de fonds. La sélection
de ces pays se base sur l’analyse des données du CAP, du Financial
Tracking Service (FTS), ainsi que des recommandations des agences
onusiennes, des discussions avec le CH/CR, etc... Ensuite, l’ERC, après
avoir proposé une liste d’éventuels projets éligibles, communique aux
CH/CR une probable affectation des fonds selon les projets des pays. L’ERC
peut aussi prendre en compte des pays sans CAP ou sans Flash Appeal.
Après cette première phase, le CH/CR établit une priorité des projets, après
consultation avec les équipes sur le terrain (agences onusiennes, ONG, OIM)
afin de prioriser, sur la base des besoins évalués, les lacunes principales et
sélectionner les projets vitaux et essentiels d’urgence64. Enfin, les demandes
sont prises en charge par OCHA qui en décide de l’approbation et de
64 Dans les pays disposant déjà du CAP, le CH/CR peut utiliser celui-ci comme un catalogue de projets à partir duquel établir déjà des projets prioritaires susceptibles de bénéficier des financements du CERF. Pour les pays qui ne disposent pas d’un CAP, il faut compléter un CERF Application Template afin que la demande de don soit bien prise en compte.
47
l’éventuel déboursement des fonds. En général, les fonds devraient être
versés entre cinq et dix jours.
Or, les ONG, en dépit du fait qu’elles ne peuvent pas postuler directement auprès du
CERF, peuvent, néanmoins, être incluses dans le processus à deux niveaux : a) elles
apportent leur contribution pour prioriser les projets et les secteurs plus lacuneux grâce
à leur participation dans les équipes sur le terrain (cluster, Country Team), ou, si celles-
ci n’existent pas, grâce à des accords ad hoc ; b) elles reçoivent les fonds du CERF en
tant que partenaires exécutifs des projets financés par le CERF.
De ce fait, une des questions principales qui ont été soulevées après la création du
CERF, concerne justement la non-éligibilité directe des ONG à ses fonds. Ce sujet a été
avancé par l’ensemble des ONG qui aujourd’hui exercent un fort lobbying lors des
réunions à Genève ou à New York pour marquer un changement dans les pratiques. En
fait, selon les ONG, souvent c’est elles-mêmes qui répondent en première ligne et dès le
début lors de l’éclatement de désastres naturels imprévus ou de nouvelles crises, en
fournissant la livraison d’environ 80% des services sur le terrain. De leur coté, plusieurs
représentants des agences onusiennes considèrent que l’accès indirect pour les ONG au
CERF est justifié. En fait, étant donné que les agences onusiennes sont désignées
comme cluster leads au niveau global, cela doit se traduire aussi en termes de
coordination des financements de la part de ces agences. Plusieurs ONG ont répliqué
que les nouveaux mécanismes de financement ont abimé leurs projets en cassant en
partie les relations qu’elles entretenaient avec certains bailleurs de fonds, en particulier
ceux qui ont choisi de faire passer des quantités plus significatives d’argent à travers ces
nouveaux outils, plutôt qu’en tant que dons directement pour les ONG. En plus, elles
reprochent le fait que les dons, en passant par les mécanismes des agences onusiennes,
tendent à être réduits lors du transfert de ces montants aux ONG pour leurs programmes
à cause d’une sorte de « frais générales »65.
En analysant les données statistiques, on peut remarquer que les financements adressés
par les NU aux agences humanitaires non onusiennes, après avoir connu un déclin
pendant cinq ans, ont enregistré une forte augmentation à partir de 2006, l’année dans
laquelle les nouveaux outils de financement ont été introduits. Par contre, les ONG et le
CICR on vu leur partie de financements directs s’élever à partir de 2000, mais diminuer
65 Plus de détails seront fournis dans la deuxième partie de ce travail, en analysant plus concrètement les expériences d’ONG, telles qu’OXFAM et Save the Children.
48
dès 2006. En quoi se traduit cela concrètement ? Après un déclin annuel moyen de 8%
depuis 2000, la proportion des financements des NU a augmenté de 38% en 2005
jusqu’à 63% en 2006. De l’autre coté, en revanche, la proportion des financements des
ONG et du CICR, qui augmentaient depuis 2000 avec une moyenne de 24%, a
commencé à diminuer de 49% jusqu’à 29%66.
Sur la base de ces tendances, qui ont été dénoncées par les acteurs humanitaires non
onusiens, en juin 2007 a été établi le CERF Partnership Taskforce67. Son objectif est
celui de revoir les procédures pour établir des partenariats pour le CERF entre les
agences onusiennes et les partenaires exécutifs dans le but d’améliorer les opportunités
et la prévisibilité des déboursements du CERF. Cela se fait par le développement de
recommandations afin d’accélérer le processus pour que tous les acteurs humanitaires
soient inclus dans l’action de prioriser les besoins et la prise de décisions pour
l’allocation des fonds. La Taskforce a été crée comme le résultat des recommandations
qui ont été avancées lors de la réunion du IASC en mars 2007 qui focalisait l’attention
sur l’importance d’augmenter le rôle des ONG dans l’administration du CERF. Ainsi, à
partir de là, les directives du CERF encouragent de plus en plus le CH/CR à promouvoir
une large participation de tous les acteurs humanitaires sur le terrain, y compris les
ONG, dans l’établissement des besoins retenus être prioritaires et dans le
développement des demandes de dons. De plus, aux ONG est demandé d’apporter de
l’assistance au CERF du fait de leur flexibilité, ce qui leur permet de rejoindre des zones
sur le terrain pour assister de plus près les bénéficiaires. De ce fait, les ONG ont été
incluses dans les sessions de formation du CERF sur le terrain à Dakar et Nairobi, ainsi
qu’aux Quartiers Généraux à Genève et à Rome68.
Il faut souligner le fait que le CERF a été opérationnel à partir de 2006. Ainsi, toutes les
données qui y sont relatives doivent quand même être approchées avec caution, car c’est
peut-être encore trop tôt pour remarquer si les changements dans les flux financiers sont
66 Abby STODDARD,…, Ibidem, pag. 16. Voir annexe II. Les recherches de cet étude ont démontré la persistance de la même tendance, même en excluant l’année 2005 de leurs calculs, l’année du Tsunami, ce qui aurait pu fausser les résultats à la suite d’une très forte injection d’argent dans les flux de l’aide humanitaire internationaux. En conclusion, les NU sont passé d’un pourcentage annuel de déclin à une augmentation de celui-ci de 10% ; les autres acteurs humanitaires non onusiens sont passé, de leur coté, d’un pourcentage moyen en augmentation à un déclin de 18%. 67 Les participants à cette Taskforce sont: Christain Children’s Fund, InterAction, ICVA, Save the Children, IMC, OXFAM, Office Africain pour le Développement et la Coopération (OFADEC), FAO, UNICEF, HCR, OMS et le PNUD. 68 http://ochaonline.un.org/cerf/CERFandNGOs/tabid/1825/Default.aspx
49
indicatifs d’une nouvelle tendance dans le financement humanitaire ou bien le résultat
direct de la réforme des instruments financiers en eux-mêmes.
Une première conclusion pourrait être de dire que, alors que la période de mise en place
de la réforme semble avoir donné des tendances négatives ou mélangés au niveau global,
par contre, au niveau local, les réformes peuvent avoir focalisé l’attention sur les pays
qui présentent un intérêt central pour les bailleurs les plus engagés dans le processus de
réforme. Le fait est qu’au niveau global, les impacts se montrent de façon moins visible,
alors qu’au niveau du terrain ils le sont davantage et ils sont aussi porteurs d’effets
significatifs. La question qu’il faut se poser est de voir si les flux de l’aide humanitaire
après la réforme montrent des changements considérables dans la rapidité,
l’amélioration et une majeure rationalisation des déboursements.
Il faut dire que la réforme humanitaire a été limitée dans la réalisation de ses objectifs.
En effet, le montant total en provenance du CERF représente seulement le 4,1 % des
flux humanitaires globaux en 2006 ; le CERF a reçu la majorité de ses ressources par
une poignée de donateurs qui ont contribué à un niveau moyen. L’approche de
responsabilité sectorielle n’a pas été appliquée que dans six pays seulement parmi les 25
potentiels pour les urgences « en cours », où est aussi présent un CH, ainsi que six
autres pays pour les « nouvelles crises majeures »69. Pour ce qui est de l’autre outil, le
PF a été mis en place seulement en deux pays, la RDC (qui en même moment assistait à
la mise en place des clusters) et le Soudan. Cela dit, il semble assez claire que les effets
de la réforme sur le coté des financements, seront plus évidents au niveau micro, sur le
terrain.
En fait, étant donné que les plus grands contributeurs au CERF (Royaume Uni, Pays
Bas, Suède, Norvège, Canada, Irlande) ont aussi participé au PF, on peut se demander si
les réformes ont eu un impact sur le niveau des financements, en particulier sur les flux
globaux en provenance de ces Etats bailleurs en 2006. En effet, les bailleurs ont
augmenté leurs contributions de 23% dans l’année de la mise en place du CERF et du
PF. Sur la base de l’étude menée par A. Stoddard, K. Haver et A. Harmer sur les
conséquences financières de la réforme humanitaire, on peut conclure que dans les
contextes où les réformes sont orientées, d’une certaine façon, par les bailleurs de fonds
de façon assez importante, du fait de leur grande participation au niveau global
69 On rappelle que pour les crises en cours il s’est agit de: Colombie, RDC, Ethiopie, Liberia, Somalie et Ouganda. Pour les nouvelles crises majeures, il s’est agit de : Jakarta (Indonésie), Liban, Madagascar, Mozambique, Pakistan et les Philippines. En Côte d’Ivoire l’approche a été appliquée seulement dans le secteur de la protection.
50
(contributions au CERF) et au niveau local (contribution au PF en RDC), la valeur
ajoutée sur le terrain est évidente. Par contre, dans des contextes tels que le Soudan et
dans les flux d’aide, plus en général, où ces réformes sont mises un peu plus de coté par
la présence des grands bailleurs de fonds, comme ECHO ou les Etats-Unis, les réformes
arrivent à avoir un impact mineur sur le total des flux financiers70.
D) Le Global Humanitarian Partnership
En juillet 2006, lors de la réunion entre les NU et les autres acteurs non onusiens, a été
convenu de mettre en place le Gloabal Humanitarian Partnership (GHP) qui doit se
réunir annuellement. Il s’agit du quatrième pilier de la réforme humanitaire des NU,
mais sa mise en place a retardé par rapport au démarrage de la réforme elle-même. Il a
été créé un Comité de Pilotage (Steering Commitee) afin de superviser la préparation
pour le GHP avec une première réunion qui s’est tenue en date 12 octobre 2006 à
Genève. Le Comité, formé par quatre consortiums d’ONG (ICVA, SCHR, InterAction,
VOICE), FICR, CICR et des membres des NU, a eu pour but de gérer les préparatifs
pour la première réunion du GHP entre acteurs onusiens et non onusiens qui s’est tenue
en juillet 2007. Afin d’organiser cette réunion tous les pays avec un CH ont du revoir
les dispositions de coordination actuelles dans leur pays, y compris la participation des
ONG, dans le but de développer une vision globale et compacte de la coordination
humanitaire. Cela a du aboutir dans l’élaboration des Principes de Partenariat (PoP) et
dans la sélection de 2-3 pays pilots pour la mise en place des Humanitarian Community
Partnership Teams. Le but de cette réunion est celui de réunir les ONG travaillant sur le
terrain, dans les régions du Sud, pour discuter des recommandations avancées lors de la
réunion du 12-13 juillet dans le processus plus large de la réforme humanitaire. Les
résultats de ces réunions ont été insérés dans la Réunion du GHP de 200771.
Le pilier du partenariat a été rajouté plus tard dont le but a été éclairé par l’ERC : il
s’agit de promouvoir tout un ensemble de relations entre les NU et les autres acteurs
non onusiens. La portée de l’intérêt que l’ERC a donné vers cet aspect vise à vouloir
prendre plus en considération les ONG et à modifier la façon dont elles sont perçues. En
70 Abby STODDARD, Ibidem, pag. 14. 71 Humanitarian Reform Newsletter, Sept 2006, pag. 4.
51
particulier, il a voulu renforcer le rôle des ONG nationales et locales contre les ONG
occidentales omniprésentes. Il y a des choses qui, dans l’application de l’approche de
responsabilité sectorielle, nécessitent d’être révisées pour faire en sorte que les ONG
soient des acteurs plus impliqués dans ce processus, étant donné le rôle fondamental
qu’elles jouent sur le terrain. C’est pour cela que c’est important qu’au niveau du terrain
il y ait une meilleure participation des ONG dans le processus de prise de décisions.
Ainsi, la réunion du 12 et 13 juillet 2006 a été salué comme une tentative d’améliorer le
dialogue entre les NU et les non NU. D’ailleurs, le processus de réforme a été vu par
beaucoup d’acteurs non onusiens comme un processus centré sur les NU : les décisions
étaient prises par les NU sans aucune attente à que les autres acteurs humanitaires
puissent se joindre au processus. Or, comme les ONG sont des leaders dans
l’opérationnalité de la réponse humanitaire, il a semblé normal qu’elles jouent un rôle
plus proactif dans la construction de l’agenda de la réforme humanitaire. Pendant
plusieurs années les ONG ont été les leaders dans la conduite des politiques
humanitaires et dans la définition de standards concernant l’identité, la qualité et la
responsabilité de l’action et des acteurs humanitaires. Elles ont beaucoup à offrir en
termes de propositions et suggestions sur la façon dont améliorer l’architecture de la
réponse humanitaire. Celle-ci devrait se baser sur la diversité et la complémentarité des
agences et non pas sur une approche centralisée, gouverné et géré par une seule
instance72.
C’est ainsi qu’à la réunion de 2006 quarante leaders en provenance des agences
onusiennes, des ONG, du Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, de
l’OIM et de la Banque Mondiale se sont retrouvés à Genève. Le meeting a été présidé
par l’ERC, Jan Egeland, et Elizabeth Ferris, la représentante du Comité de Pilotage de la
Réponse Humanitaire. A cette occasion, tous les acteurs participants ont convenu sur la
nécessité qu’une augmentation et une amélioration de la coopération au niveau global
devait se traduire par des succès vérifiables et concrets au niveau du terrain. Les
décisions prises au niveau global doivent être accompagnées et complétées par les
suggestions et les expériences en provenance du terrain.
Au niveau du terrain seront ainsi établies des Humanitarian Community Partnership
Teams. Ces nouvelles équipes devront être mises en place de manière flexible. Il s’agira
72 http://www.icva.ch/doc00001833.html, Background Note for NGOs in Preparation for UN and Non-UN Dialogue on Enhancing the Effectiveness of Humanitarian Action, 12-13 July 2006, A Brief Overview of Humanitarian Reforms, 10 Juillet 2006.
52
dans certains cas d’en créer des nouvelles, ex novo, dans d’autres cas de remplacer ou
d’élargir les équipes humanitaire du pays du IASC déjà en place. Bien sur, dans certains
contextes politiques l’application de celles-ci s’avouera un peu plus complexe. Leur
installation sera faite toute en respectant la présence des UNCT. Les deux équipes
seront séparées. Là où il existe, les mécanismes de coordination des ONG détermineront
les représentants des ONG dans l’Humanitarian Community Partnership Team. Dans
les pays où ces mécanismes n’existent pas, ce sera le CH à demander aux ONG de
nommer leurs propres représentants pour les intégrer dans cette équipe. Ces équipes ont
le rôle de chercher les moyens pour renforcer le travail de collaboration sur le terrain (y
compris des formations conjointes) et de renforcer les consortiums d’ONG. Cette
approche sera mise en pratique dans trois pays pilots : Zimbabwe, Indonésie et El
Salvador/Panama.
Au niveau global la concrétisation de ce partenariat passe par une réunion annuelle pour
trois ans, en conjonction avec les réunions du IASC, pour permettre dans ces forums de
débattre sur les enjeux humanitaires urgents. La nouvelle plateforme globale est censée
s’occuper des tâches suivantes :
• formuler les principes pour un partenariat (PoP) stratégique ou authentique avec
un engagement sur le respect de l’égalité, la diversité, la transparence, la
responsabilité et le respect réciproque et la complémentarité des rôles. Les
partenaires doivent s’engager à poursuivre toutes leurs actions dans le respect de
ces principes guides.
• focaliser la collaboration sur le terrain dans deux ou trois pays où des
Humanitarian Community Partnership Teams ont été mises en place et par le
biais de celles-ci vérifier l’impact des PoP sur l’amélioration de la performance
humanitaire. Par la suite il faudra mettre en pratique les PoP dans le maximum
de pays. Là où ces PoP ont déjà été appliqués, il faudra que les organisations sur
place prennent possession du processus par le biais duquel ces PoP sont mis en
place.
• fournir un forum pour focaliser les débats sur des enjeux stratégiques en
particulier, tels que la responsabilité, la capacity-building, la sécurité ou les
transitions. Il s’agit de prendre en compte la responsabilité envers les
populations avec lesquelles et pour lesquelles les acteurs humanitaires travaillent,
53
renforcer la capacité des acteurs nationaux et locaux, la sécurité et sureté de son
propre staff, et leurs rôles dans les situations de transition.
• adopter un statu sur des enjeux d’intérêt commun, dans le but que la
communauté humanitaire mène des efforts d’advocacy. Pour cela, il faudra
organiser des rencontres annuelles pour faire le point de la situation sur les
progrès et éventuellement sur les changements et les points à améliorer et réviser.
L’approche de responsabilité sectorielle est un work in progress et le système doit
s’occuper de prendre en compte les besoins réels d’une meilleure collaboration qui
remontent du terrain. Les représentants des NU semblent vouloir s’ouvrir davantage à la
participation des ONG et à l’idée qu’elles puissent jouer un rôle de leader dans le
processus décisionnel d’un cluster. Beaucoup d’ONG, de leur coté, ayant compris
l’importance d’une telle dynamique, veulent prendre part à ce processus et avancer dans
cette direction73.
C’est donc dans la perspective d’améliorer la réponse humanitaire par une meilleure
coordination et collaboration entre les différents acteurs humanitaires intervenants sur la
scène internationale que le forum du GHP permet aux trois familles les plus importantes
de la communauté internationale humanitaire de se partager la responsabilité de
l’efficace de leurs actions. Á partir du moment où il y a consensus sur l’idée qu’aucune
agence humanitaire à elle toute seule peut faire face et couvrir tous les besoins
humanitaire, la collaboration ne se présente plus comme une option parmi d’autres,
mais plutôt elle s’impose comme une nécessité inéluctable. Or, la collaboration parmi
une pluralité d’acteurs différents peut prendre différentes formes. Le GHP cherche à
maximiser la complémentarité entre eux sur la base du respect des différents mandats et
des différents engagements de mission. Il ne s’agit pas de poursuivre une seule voie et
un seul model d’action de travail dans un cadre unique.
Le GHP ne vise pas à devenir une structure institutionnalisée, mais pendant les trois ans
continuera de fonctionner d’une manière très flexible, son but étant celui de renforcer le
travail des structures de coordination déjà existantes. Il s’agira donc de veiller à ce que
les ONG sur le terrain soient mieux et plus représentées.
73 http://www.icva.ch/doc00001844.html, Background Note for NGOs in Preparation for UN and Non-UN Dialogue on Enhancing the Effectiveness of Humanitarian Action, Chair’s Summary, 12-13 July 2006.
54
Or, pour que le GHP ne soit pas perçu comme un outil ou un processus dirigé selon un
mouvement top-down, il faut qu’à tous les niveaux tous les acteurs y prenant partie
partagent les mêmes valeurs et les mêmes principes. D’ailleurs, le GHP n’est pas non
plus un forum fermé et exclusif seulement pour les organisations y faisant déjà partie,
mais toute autre agence intéressée peut y prendre part74.
Lors de la première réunion du GHP à Genève le 11-12 Juillet 2007, ils ont tous
convenu que les PoP constitueront la base du renforcement du partenariat entre eux dans
les années à suivre. Dans le panorama international actuel il y a plusieurs situations
d’urgence qui éclatent ainsi que des désastres naturels qui font augmenter les attentes
envers une réponse immédiate et efficace. De plus, aujourd’hui le nombre et le type
d’acteurs à chaque fois impliqués est très varié et multiple et cela témoigne d’un monde
en plein changement. A coté des ONG on voit aussi les gouvernements, le secteur privé
et les militaires, chacun avec son propre mandat et sa propre mission, expertise et
intérêts. Des fois ils se trouvent en compétition même entre eux, ce qui empêche ou
retarde donc tout type de collaboration. De plus, au sein de la société civile on retrouve
une réalité complexe à laquelle ne participe pas seulement l’univers des ONG, mais
aussi des mouvements politiques, des groupes sous-nationaux, etc…des acteurs qui
souvent jouent un rôle très important dans la mise en place de la réponse humanitaire,
mais qui généralement ne sont guère reconnus. Pour finir, le nombre de participants
représentant les ONG du Sud n’est pas assez représenté.
Le premier pas que les participants ont décidé d’entreprendre concerne la bonne
réception des PoP au sein même de leurs organisations. Il s’agit de suivre les
orientations suivantes :
• Propager les PoP au sein de leur organisation, du staff sur le terrain et auprès des
partenaires locaux, de fournir une guide à partir des Quartiers Généraux sur
comment utiliser ces PoP.
• Englober les PoP dans leurs politiques sur les relations avec les autres acteurs
humanitaires.
• Les englober dans leur processus de recrutement, formation et évaluation du
staff, y compris les CH et les CR.
74 http://www.icva.ch/doc00002016.html , The Global Humanitarian Platform, An Outline, Janvier 2007.
55
• Faire en sorte que son propre staff travaille dans des partenariats dans une
position d’égalité par rapport aux autres acteurs humanitaires.
• Chercher d’autres voies au sein de leur propre organisation pour incorporer les
PoP dans leur travail, mettre en avant le partenariat dans les plans et les rapports
annuels, les autres publications et dans les relations avec les médias.
• Inclure les PoP dans les mécanismes de collaboration déjà existants, tels que les
memoranda of understanding, les initiatives des clusters et les autres initiatives
conjointes.
• Offrir un feedback aux autres acteurs lors d’un problème.
• Faire un rapport sur les éventuels progrès obtenus au sein de chaque
organisation pour l’année suivante la réunion du GHP.
Afin de contrôler les éventuels progrès ou échecs d’une telle démarche, il est nécessaire
mener des évaluations de besoins conjointes et d’estimation de l’impact. Dans certaines
situations, il pourrait s’avérer utile de développer des positionnements communs par
rapport à des enjeux tels que l’engagement humanitaire dans le travail humanitaire. Les
initiatives de Réduction des Risques des Désastres peuvent fournir un moyen
d’augmenter les capacités locales. De plus, il faut aussi engager dans ce processus les
Etats bailleurs afin qu’ils soutiennent ces initiatives là. Ils doivent comprendre la
nécessité et la valeur ajoutée d’une telle collaboration. A ce propos il a même été avancé
une proposition de faire des rencontres entre le GHP et le Good Humanitarian
Donorship (GHD) sur certains points en commun75.
75 L’initiative du Good Humanitarian Donorship a été lancée en Juin 2003 lors d’une réunion internationale à la présence des gouvernements bailleurs, des agences des NU, du Mouvement International de la Croix Rouge et du Croissant Rouge et d’autres organisations impliquées dans l’action humanitaire. Les représentants des gouvernements et d’ECHO ont adoptés les Principles and Good Practice of Humanitarian Donorship, ce document se basant sur le partage d’objectifs communs en relation avec l’action humanitaire. Pour plus des détails : http://www.goodhumanitariandonorship.org/
56
Chapitre II – Analyse de l’impact de la réforme humanitaire
des Nations Unies sur l’action humanitaire.
Dans cette deuxième partie on cherchera à mettre en évidence la façon dont cette
réforme a été perçue, reçue et vécue par certaines ONG, en tant qu’acteurs principaux
participant à ce processus. Sur la base des rapports, documents, études que ces ONG ont
publié, il s’agit de voir, à travers leurs expériences pratiques sur le terrain, quels sont les
enjeux majeurs pour ces acteurs, quelle sorte d’évaluation peut être faite à ce jour sur le
cluster approach, quelles requêtes de changements sont avancées, notamment en
relation avec les nouveaux mécanismes de financement. Il faut bien noter que la
bibliographie, qui constitue la base et l’appui pour le développement de cette section,
fait partie d’une documentation « grise », dans le sens où elle se base principalement
soit sur des documents d’évaluation commissionnés par les mêmes ONG, soit sur des
documents internes à celles-ci, soit encore sur quelques entretiens.
Dans un deuxième point l’attention sera focalisée sur l’expérience en cours de Médecins
du Monde (MDM) – France – sur la base d’entretiens et d’échanges avec les équipes
terrain, souvent beaucoup plus renseignées sur la thématique de la réforme que le siège
même. On cherchera de mettre en perspective les enjeux que cette réforme peut
présenter pour une ONG comme MDM, notamment dans le domaine de la santé.
A) L’expérience des ONG
Les ONG qui ont été prises en compte ont été sélectionnées seulement sur la base de
l’accessibilité des documents reliés à la question de la réforme humanitaire des NU, sur
la base également de l’importance de la position qu’elles ont pris par rapport à cette
refonte, ainsi que de la réflexion qu’elles ont menée et de la nécessité de faire évoluer le
débat en cette direction. Les ONG auxquelles on s’intéressera sont : Save the Children
(SC - UK), Oxfam International, Action Contre la Faim (ACF) et Médecins Sans
Frontières (MSF).
57
1. Save the Children (SC)
SC s’est prononcée en particulier sur la question des nouveaux mécanismes de
financement, surtout sur le CERF. Déjà en Novembre 2005 l’International Save the
Children Alliance a salué de façon favorable la mise en place de cet outil dans le seul
but de voir améliorer la responsabilisation du système humanitaire international 76 .
Cependant, cela n’a pas exclu la formulation de plusieurs et différents doutes, ainsi que
des nouvelles suggestions. Depuis 2005 jusqu’au dernier document, qui a été publié en
Juin 2007, SC a toujours mis l’accent sur trois points considérés comme fondamentaux
pour que les acteurs onusiens et ceux non onusiens puissent trouver une bonne base
d’entente à partir de laquelle continuer à développer et améliorer cette réforme. Les trois
points sont les suivants :
1. L’accès au CERF limité seulement aux agences onusiennes
Selon SC, tout d’abord les ONG participent à la réponse humanitaire au moins pour le
50% à elles toutes seules. Ensuite, elles se caractérisent par un déploiement rapide de
leurs ressources lors des urgences, en tout cas elles témoignent d’une efficace majeure
que les NU. Enfin, elles travaillent et interviennent souvent dans des pays, régions et
zones où les agences onusiennes ne sont pas du tout présentes. Á la lumière de ces
préoccupations, la mise en place du CERF est perçue comme un risque de voir les
agences onusiennes récupérer les fonds qui devraient être destinés aux ONG. Cela
comporterait que les ONG doivent augmenter leurs efforts pour obtenir des
financements. Ce qu’il ne semble pas être justifiable est le fait de voir augmenter ce
fond de 50 millions USD jusqu’à 500 millions sans que les ONG puissent y bénéficier
de façon directe, mais seulement en liant des partenariats avec les agences onusiennes.
2. La rapidité de déboursement des fonds du CERF
La réforme prévoit que le déboursement des fonds du CERF est effectué dans trois jours
vers les agences onusiennes. Cependant, aucune date limite ou de référence est donnée
76 L’International Save the Children Alliance est un réseau composé par toutes les organisations de Save the Children présentes dans le monde. Ce réseau se focalise sur le regroupement des ressources, établit des politiques communes et mène des projets dans le monde de façon conjointe. Pour davantage de détails : http://www.savethechildren.net/alliance/
58
pour établir dans combien de temps les fonds seront par la suite affectés aux ONG. Déjà
la prise d’accords avec les NU prend environ deux à trois semaines, voir même plus. Un
poids administratif et bureaucratique typique du système onusien alourdirait et
retarderait donc l’accès à ce type de financement. Selon SC, le fait que les bailleurs
financent ce fond, dans l’esprit de voir la réponse humanitaire devenir plus rapide et
améliorée, ne se traduit pas forcement dans ce sens là. En tout cas, cela ne concernerait
pas forcement la réponse humanitaire dans son ensemble, mais plutôt de façon
fragmentée.
3. L’établissement de priorités pour les secteurs et les crises
L’autre crainte manifestée par SC concerne le fait que le CERF, en voulant mettre en
place un système un peu plus radical pour choisir quels secteurs et quels types de crises
il faut financer plutôt que d’autres, risquerait, ainsi faisant, de reproduire la même erreur.
Le risque serait de voir une politisation des éventuels secteurs à financer, sur la base des
priorités politiques et techniques propres à chaque agence onusienne. De plus, cette
réforme, en renforçant le rôle du CH, favorise que la prise de décisions, finalement,
dépende des personnalités individuelles de cette figure au sein du système onusien77.
D’autres manques ou défauts ont été soulignés par SC. Par exemple, l’ONG reconnaît
au Secrétariat du CERF la faiblesse dans la collecte d’informations. En effet, à ce jour il
est difficile de dire combien de fonds ont été versés, quand bien même indirectement,
aux ONG, ainsi que comment cela s’est passé, c’est-à-dire la période employée pour
l’affectation de ces fonds vers le niveau terrain78. En effet, les NU ne demandent pas à
leurs agences de prendre note des montants qui du CERF passent ensuite par leurs biais
aux ONG. Cela empêcherait donc d’établir des statistiques sur les financements en
direction des ONG79. De plus, aucune mention n’est faite également sur la rapidité de
déboursements de ces fonds, ainsi que de leur éventuelle efficace. L’évaluation publiée
par l’Overseas Development Institute sur l’usage des PF dans les pays pilots de la RDC 77 Save the Children Position Paper, UN Central Emergency Response Fund, 11 Novembre 2005, pp. 1-2. 78 Save the Children Position Paper, Exclusion of NGOs: The Fundamental Flaw of the CERF, 29 Janvier 2007, pag. 1. 79 Le « Discussion Paper, CERF Advisory Group » sur The Role of NGOs in Proritising Requests and Implementing CERF Programmes, publié par les NU en octobre 2006, se limitait juste à dresser une liste des ONG ayant reçu des fonds du CERF, mais sans aucun détail sur le montant, la rapidité et l’efficace de ces déboursements. Ce sont plutôt les ONG mêmes (Oxfam en particulier) qui mènent des recherches pour pouvoir évaluer l’impact du CERF sur la base des expériences de différentes ONG sur le terrain.
59
et du Soudan, dont on a déjà parlé dans la première partie de ce travail inhérente aux
nouveaux mécanismes de financement, a montré que les ONG (qui en général ont utilisé
la plus grande partie du budget officiel humanitaire dans ces pays) l’année dernière ont
du se contenter seulement de 17% et de 15% des financements du PF respectivement,
alors que le restant 83% et 85% était adressé aux agences onusiennes80. En particulier,
certaines parmi ces agences qui ne peuvent pas vanter une grande expérience dans le
domaine humanitaire, se sont néanmoins retrouvées à bénéficier d’une quantité
disproportionnée de fonds en provenance des nouveaux outils de financement81. Pour
SC il s’agit de savoir si finalement ces fonds ont été affectés aux acteurs les plus
compétents dans le système humanitaire international.
C’est surtout sur la base des expériences concrètes vécues sur le terrain que SC a pu
avancer des recommandations sur la mise en place de cette réforme. Si d’un coté,
l’ONG a pu bénéficier de fonds sans lesquels certains projets auraient continué à
présenter des lacunes au niveau de leur accomplissement, de l’autre un sentiment de
frustration et de confusion s’est semé. Ce sentiment de dépossession ou de mise de coté
concerne surtout la question de l’accès aux financements du CERF. Sur la base de ses
expériences concrètes, SC a pu constater que ce système engendre en réalité une
prolongation dans les temps de déploiement des montants, ainsi que le partage au sein
de l’équipe de l’ONG qu’ils sont soumis à un traitement différent, plus contraignant et
plus lourd que les agences onusiennes. Si celles-ci, ou si le CH attendent un délai de 72
heures environ pour obtenir éventuellement le déploiement jusqu’à 30 millions USD,
les ONG, de leur coté, doivent démarrer toute une procédure bureaucratique et
administrative de quelques semaines, voir quelques mois, même pour avoir accès
seulement à une partie de ce montant.
80 Abby STODDARD, Ibidem, pag. 14. 81 Selon le rapport de l’Overseas Development Institute, la FAO a vu ses propres fonds augmenter de 168% et l’OMS de 612%.
60
OLD SYSTEM :
DONOR → NGO
NEW SYSTEM82 :
DONOR → CERF → UN AGENCY → NGO
Source: Save the Children Position Paper, Exclusion of NGOs: The Fundamental Flaw of the CERF, 29 Janvier 2007, pag. 5.
Dans le cas de SC, il est arrivé que les deadlines pour déposer un proposal ont été d’une
semaine ou juste de quelques jours. Sur 37 pays qui en 2007 ont bénéficié des fonds du
CERF (pour les nouvelles crises et pour les urgences sous-financées), SC est présent
dans 1783. Parmi ces pays, SC a réussi à obtenir deux dons pour des cas de réponse
rapide au Libéria et au Mozambique.
i. Libéria
Dans le cas du Libéria, le CERF a reçu environ 2 millions USD à utiliser pour le life-
saving, et pour les besoins de nutrition et sécurité. SC a reçu 100.000 USD du montant
du CERF par le biais de l’OMS. Cependant, l’affectation de ce fond à l’ONG a pris
environ deux mois avant d’être portée à terme. La cause majeure de ce retard semble
avoir été le manque de préaccords lors d’une éventuelle approbation du proposal, ainsi
que des accords plus clairs concernant le transfert d’argent de l’OMS (Genève) à SC
(Londres), dont le bureau a des moyens efficaces de transfert vers le terrain. Á part cela,
cependant, les relations avec le système de suivi basé à Genève semblent avoir été
bonnes et continues. Cependant, alors que cela a fait croire à une amélioration du
processus, à la suite des recommandations avancées dans le document de novembre de
2005, l’ONG s’est retrouvée face à un nouveau constat : à la suite de cette expérience
82 Une petite précision par rapport à ce graphique : dans le nouvel système, il existe aussi la configuration suivante: DONOR→POOL FUND→UN AGENCY→NGO, lorsque les bailleurs décident de financer le PF existant dans un pays. Encore, les ONG peuvent toujours recevoir des financements directement de la part des bailleurs. 83 Pour les urgences sous-financées, SC est présent dans les pays suivants : Angola, Bangladesh, Côte d’Ivoire, RDC, Ethiopie, Myanmar, Somalie, Soudan, Zimbabwe. Dans les cas de réponse rapide, SC est présent en : Afghanistan, Indonésie, Kenya, Libéria, Mozambique, Sri Lanka, Tanzanie et Ouganda.
61
quand même positive, sur les 17 pays potentiellement concernés par une demande
auprès du CERF, seulement deux en avaient entamé la démarche84.
ii. Mozambique
Pour le Mozambique, le CERF a obtenu une enveloppe pour les dons en cas de réponse
rapide égale à 11.2 millions USD. Á SC sont revenus environ 320.000 USD de la part
de l’UNICEF et du PAM pour les secteurs de l’éducation, de la formation pour la
protection des enfants, de la nutrition et de la distribution de nourriture. Apparemment,
au début, tant du coté des NU que de celui des ONG, il y avait un manque de
connaissance sur les procédures administratives et sur les mécanismes à suivre, ce qui a
été comblé par la suite. Le bilan final sur cette expérience considère qu’il s’est agit d’un
partenariat plutôt positif, à l’exception d’un manque de consultation des ONG, en
général, avant la publication d’un appel d’offre pour le CERF85.
iii. Zimbabwe
Un troisième cas, celui du Zimbabwe semble être emblématique pour chercher de
visualiser, à partir du fonctionnement du CERF, quels enjeux en découlent pour les
ONG plus dans les détails.
Le problème principal, par rapport à ce pays, semble avoir été en relation avec les
deadlines annoncées par l’intermédiaire du IASC aux ONG pour soumettre un proposal
afin de bénéficier des fonds du CERF. En mai 2006 les ONG ont été renseignées
d’avoir seulement une semaine comme délai. Cependant, une deuxième deadline de
seulement quelques jours a été annoncée lors d’une nouvelle réunion du IASC à la fin
de l’année. Cependant, étant donné que seulement une ONG était présente lors de ce
meeting, aucune autre a pu soumettre un proposal. Pour SC, le projet a été approuvé par
l’IASC et, ensuite, par OCHA en juillet. Á partir de là, il y a eu toute une succession de
changements des termes entre lesquels SC aurait du dépenser toute l’enveloppe affectée
par le CERF. Ainsi, de douze mois, le délai est passé à six (donc pour décembre 2006), 84 Parmi les justifications avancées par les différentes équipes terrain de SC, comme reporté sur le document de juin 2007, on peut citer le manque de connaissance de la possibilité d’y faire recours, le fait que les agences onusiennes ont fini le proposal sans en tenir informées les ONG, le manque de nécessité de fonds pour des projets, ou encore à cause d’une précédente et mauvaise expérience. 85 Save the Children’s Experience with CERF in 2007, Progress, yet speed and transparency remain key problems that demand innovative solutions involving NGOs from the field, Juin 2007, pp. 2-5.
62
pour revenir ensuite encore une fois aux douze mois, tout cela ayant comporté plusieurs
avenants au contrat. Or, la question qui semble, en tout cas, capter la vraie attention de
SC et sur laquelle l’ONG s’est particulièrement concentrée concerne les coûts de
transaction vers les agences onusiennes. Lorsque le CERF attribue des fonds à une
agence des NU, celle-ci a pris accord pour qu’elle ne prenne que 7% de ces fonds
comme frais généraux pour payer les coûts par projet (Programme Support Costs, PSC).
Ce n’est pas possible que le montant passe d’une agence à une autre. Le CERF effectue
seulement des déboursements de fonds pour une seule agence à la fois. Pour calculer les
PSC, il faut considérer le pourcentage du total du montant du projet et non pas en tant le
pourcentage du montant total du CERF86. Il reste à voir comment ce 7% est partagé
entre les agences onusiennes et les ONG à leur tour récipiendaires. On reporte le
schéma réalisé par SC afin de mieux visualiser ce processus.
OLD SYSTEM :
DONOR (1£) → NGO (0.93p)
NEW SYSTEM :
DONOR (1£) → CERF (1£) → UN AGENCY (0.93p) → NGO (86.5p)
Source : Save the Children Position Paper, Exclusion of NGOs: The Fundamental Flaw of the CERF, 29 Janvier 2007, pag. 7. Par contre, ce qui s’est passé au Zimbabwe c’est que l’agence onusienne partenaire de
SC a demandé 11% pour payer les PSC, ce qui déjà dépassait le montant maximum
établi par le CERF et en plus ne prévoyait rien pour SC. Finalement il a été négocié que
l’agence prenne 7% et SC 3%, alors qu’au début elle en avait demandé 5%.
D’ailleurs, étant donné un manque de confiance absolue dans ce dispositif, la question
que SC se pose concerne ses relations avec les autres bailleurs. SC a remarqué que les
bailleurs traditionnels semblent pousser de plus en plus l’ONG à faire recours aux fonds
du CERF87.
86 CERF, Under-Funded Grants 2007, CERF Technical Guidelines and Application Template, 7 Fevrier 2007, pag. 4. 87 Tel a été le cas en Afrique de l’Est où DFID, pour lequel le Kenya est même un des pays prioritaires, n’a pas pu affecter des montants à SC pour des projets dans ce pays car tout avait été adressé au CERF.
63
En conclusion, sur la base de ses propres expériences et de ses recherches, SC, dans le
dernier document inhérent à la question de la réforme, mais plus en particulier à l’aspect
financier de celle-ci, qui date de juin 2007, avance toute une série de recommandations
qu’on pourrait résumer de la façon suivante :
• Le Secrétariat du CERF devrait mettre en place des procédures de pré-approbation
ou des Letters of Understanding (LoUs) avec les ONG compétentes sur la base du
respect de critères de transparence.
• Pour améliorer la transparence du CERF il faudra améliorer l’activité de reporting
sur les montants de déboursement, la vitesse et l’efficace des fonds du CERF sur le
terrain. Cela devrait donc être assuré par des guidelines bien précises là-dessus.
• Les agences onusiennes devraient elles-mêmes être jugées responsables pour
garantir des niveaux plus élevés de transparence et de vitesse dans le déboursement
des fonds.
• Les ONG devraient pouvoir bénéficier d’un accès direct au CERF du fait qu’elles
déploient 50%, voir plus, de l’aide humanitaire.
2. Oxfam International 88
Tout comme SC, Oxfam a également mené des recherches et des études pour essayer
d’évaluer la réforme humanitaire et ses mécanismes après un an de sa mise en place. Ses
publications, comme celles de SC, ont apportées une attention particulière au système
du CERF envers lequel dès le début ces ONG ont nourri des grands espoirs. Cependant,
le constat aujourd’hui est un peu différent du fait qu’il est enrichi des expériences
significatives sur le terrain. L’attention portée sur les nouveaux mécanismes de
financement nous fait réfléchir une fois de plus sur ceux qui sont les vrais enjeux de la
réforme humanitaire : l’aspect financier en constitue le moteur central où convergent les
intérêts et les positionnements de tous les acteurs participant à la réponse humanitaire
du système international.
88 Oxfam International est une confédération de 13 organisations qui travaillent ensemble dans plus de 100 pays. Il s’agit de : Oxfam Amérique, Oxfam Australie, Oxfam Belgique, Oxfam Canada, Oxfam France-Agir ici, Oxfam Allemagne, Oxfam Royaume Uni, Oxfam Hong Kong, Oxfam Espagne, Oxfam Irlande, Oxfam Nouvelle Zélande, Oxfam Novib (Pays Bas), Oxfam Québec.
64
Dès un rapport publié en 2005, « Financement prévisible pour les urgences humanitaires.
Un défi lancé aux donateurs », l’ONG saluait déjà de façon positive la rénovation du
CERF, mais, en même moment, elle proposait que les membres du fonds s’engagent à
verser un total de 1 milliard USD, celle-ci étant le chiffre estimé indispensable pour
garantir l’amélioration de l’action humanitaire mondiale. Cette estimation a été faite en
calculant les lacunes du système international lorsqu’il s’agit d’intervenir et de mettre
au plus vite des ressources financières à disposition. En effet, ces gaps dépendent trop
souvent d’une aide humanitaire insuffisante pour combler l’ensemble des besoins, d’un
retard dans son déploiement, d’une couverture médiatique liée souvent à la prééminence
d’intérêts politiques différent 89 . D’ailleurs, comme l’observe Oxfam, toute
considération sur le CERF ne peut pas être prise en compte de façon isolée de la
performance générale du système en entier, car il en constitue qu’une petite partie.
En se basant sur des expériences concrètes, l’ONG reconnaît au CERF d’avoir, dans
certaines circonstances, renforcé la réponse rapide lors de situations humanitaires
critiques. C’est le cas au Kenya, au Timor-Leste et au Darfour, où les déboursements de
fonds du CERF ont accéléré la mise en place des projets de life-saving. Dans d’autres
cas, cette accélération de l’application de ces projets a été liée aussi à la capacité des
agences onusiennes, ou de leurs partenaires, d’anticiper des fonds en faisant confiance
aux futurs déboursements en provenance du CERF. Cela a été le cas, en particulier, lors
d’une majeure familiarisation et prise de connaissance avec les mécanismes du CERF et
avec toutes les procédures bureaucratiques et administratives que celui-ci comporte90.
Cependant, ce qui reste encore à améliorer est le délai de décaissement des fonds au
niveau du terrain des agences onusiennes envers leurs partenaires. Ces retards, en effet,
contribuent à miner la réaction rapide de réponse et de mise en place des projets pour les
ONG, ce qui, au final, contribue également à saper l’efficace générale du CERF.
Etant donné que le Secrétariat du CERF n’est pas capable, par faute d’informations, de
dresser une liste des ONG ayant pu bénéficier, de façon indirecte, des ses fonds, Oxfam
a réussi à faire un récapitulatif sur quelques ONG, nationales et internationales, qui ont
bénéficié des fonds du CERF en tant que partenaires des agences onusiennes. Á partir
89http://www.oxfam.qc.ca/pdf/etudes/CERF%20Brief%20SIGNED%20OFF%2020%20October%202005-fr.pdf, « Financement prévisible pour les urgences humanitaires. Un défi lancé aux donateurs », Oxfam International. 90 Le Soudan représente un exemple positif pour le fonctionnement du CERF. En effet, les agences onusiennes n’ont attendu que 48 jours pour pouvoir recevoir les fonds du CERF, ce qui leur a permis d’apporter de l’assistance auprès de 200,000 IDPs dans la région du Darfour. La deuxième allocation n’a pris qu’une semaine pour être effectuée.
65
des données obtenues, l’ONG a pu dresser le tableau suivant qui nous permet d’avoir
une idée sur le nombre d’ONG participantes en général.
Agency WFP UNICEF UNHCR WHO IOM
National
NGOs
17 26 4 3 3
International
NGOs
28 30 8 3 -
Total 45 56 12 6 3
Source : Oxfam International, The UN Central Emergency Response Fund one year on, Mars 2007, pag. 15.
Parmi ces ONG, beaucoup se sont senties reléguées à un rôle de partenaires mineurs
dans la mise en place des projets bénéficiant des fonds du CERF. Encore une fois, cela
souligne la volonté des ONG de vouloir accéder directement à ce fond, ainsi que de
permettre aux ONG nationales et aux gouvernements de prendre partie au processus de
prise de décision91. De l’autre coté, il faut reconnaître que toutes les ONG ne sont pas
forcement capables de se familiariser facilement avec ces mécanismes, en particulier à
cause de leurs contraintes au niveau de capacités et de ressources, ou encore
d’expérience tout court. Il faut aussi tenir bien à l’esprit qu’il peut y avoir des ONG qui
décident de ne pas bénéficier des fonds du CERF pour des questions de maintien
d’indépendance et d’autonomie d’un mécanisme qu’elle considèrent comme politisé du
fait de ses origines onusiennes.
Les recommandations avancées par Oxfam rejoignent celles de SC sur différents points.
La différence majeure entre les deux ONG tient plutôt à l’approche utilisée. Alors que
SC s’est principalement basée sur ses propres expériences, Oxfam a posé un
questionnaire à nombreuses ONG, ainsi qu’à des bailleurs, gouvernements, etc…afin de
cueillir le maximum de données concrètes relatives à la réforme, et très en particulier au
CERF, pour chercher à en dresser un tableau plus général et qui prenne en compte les
éléments positifs ainsi que ceux négatifs. Même si l’étude, publiée un an après la mise
en place de ce système, reconnaît certaines améliorations et progrès dans la façon de
répondre aux nouvelles crises émergentes et aux désastres naturels, néanmoins les
résultats obtenus semblent être encore loin des objectifs de départ. L’ONG se maintient
91 Oxfam International, The UN Central Emergency Response Fund one year on, Mars 2007, pag. 17.
66
quand même optimiste pour que le CERF continue à s’améliorer. Cependant, certaines
questions doivent être traitées rapidement à cause de leur importance et de leur urgence.
Il s’agit des points suivants :
• Les NU (c’est-à-dire le Secrétariat du CERF et les agences onusiennes) doivent
améliorer la rapidité et la prévisibilité de décaissement des fonds. Ce qui est
également très important concerne les délais de transfert des montants d’argent des
NU aux ONG. Pour cela, il faudrait tout d’abord mettre en place des partenariats
efficaces et stratégiques, ainsi que donner plus de place aux ONG (surtout
nationales) dans le processus de prise de décisions et dans celui de l’établissement
des priorités. Une proposition nouvelle voit le CH/CR jouer un rôle plus central : ça
reviendrait à lui la tâche de débourser les fonds, derrière l’appui d’OCHA et du
PNUD, comme pour les PF.
• Les bailleurs doivent augmenter la viabilité et la prévisibilité des financements. Pour
cela, il faudrait que les bailleurs s’engagent davantage pour que la réserve du CERF
soit constituée d’1 milliard USD.
• Les NU doivent garantir un système plus efficace d’évaluation des impacts sur les
projets financés par le CERF. Il faut donc mettre en place un système de reporting
et de suivi sur toutes les activités du CERF, en particulier sur toutes les phases de
celles-ci.
• La réforme humanitaire, plus en général, ne doit pas être focalisée seulement sur la
réforme « des » Nations Unies. Elle doit davantage prendre en considération la
dimension du terrain, le niveau local, les victimes des urgences et des crises, les
bénéficiaires des programmes d’aide humanitaire. Dans cette dimension, la
participation de la société civile dans le sens le plus large est très bien accueilli92.
3. Action Contre la Faim (ACF)
ACF International a publié un document de positionnement par rapport à la réforme
humanitaire des NU. En réalité, son analyse et son positionnement se basent surtout sur
l’approche des clusters au niveau global. ACF reconnaît la nécessité d’améliorer la 92http://60gp.ovh.net/~ngovoice/documents/Oxfam%20Humanitarian%20Coordination%20Policy%20APPROVED.pdf, Oxfam International Policy Note, Humanitarian Coordination, VOICE, Décembre 2006.
67
coordination entre tous les acteurs humanitaires et d’exploiter la valeur ajoutée que
chacun parmi eux peut apporter afin d’augmenter la qualité dans la réponse humanitaire.
Cela ne devrait pas être considéré selon une vision de l’assistanat, mais dans l’espoir
qu’une meilleure cohérence et qualité dans la réponse humanitaire internationale puisse
permettre aux populations bénéficiaires et récipiendaires de cette aide de gagner plus
d’autosuffisance et d’autonomie dans des conditions meilleures et dans un délai
temporel court. C’est justement dans cette optique et vision de la réforme qu’ACF a
décidé de prendre partie à différents clusters en respectant un principe de cohérence
avec les activités que l’ONG mène sur le terrain. Ainsi, les clusters auxquels ACF
participe sont : nutrition, eau et assainissement, logistique et abris d’urgence. Il s’agit,
donc, des domaines purement techniques.
La volonté de participer aux clusters s’explique par la prise de conscience qu’une telle
participation peut apporter à l’ONG la possibilité de concourir à l’échange
d’informations sur un secteur en particulier, pour lequel il faut une compétence
spécifique, ainsi qu’une complémentarité au niveau opérationnel entre les différents
acteurs humanitaires. La complémentarité n’est pas, par contre, synonyme de
subordination, mais simplement de coordination tout en gardant l’identité et
l’autonomie propre à chacun. Cela veut dire que les choix de nature méthodologique ou
les positionnements stratégiques d’ACF ne font pas l’objet de révision ou discussion
avec les autres parties prenantes93. Cependant, ACF a des limites lorsqu’il s’agit de
s’engager dans l’approche de responsabilité sectorielle. Car, s’il y a un consensus sur les
objectifs que cette approche veut poursuivre (amélioration de la qualité et de la
coordination de la réponse humanitaire), cependant ACF veut pointer sa réflexion sur
les acteurs qui sont désignés comme cluster leads ainsi que sur toutes les autres parties
prenantes au cluster approach. Les points qui pour ACF nécessitent d’une majeure
clarification sont les suivants :
• Il faut clarifier davantage la cohérence stratégique entre les différents
mécanismes de coordination déjà existants et mis en place. Pour cela, il faut que
le cluster approach soit appliquée dans les cas prévus, mais aussi en tenant en
compte les conjonctures propres à chaque cas, sans donc partir dans des
généralisations trop larges. De plus, des questionnements se posent. Qui sera en
93 Action Contre la Faim International, Action contre la Faim International positionning vis-à-vis the reform of clusters, Advocacy, ACFIN, Janvier 2007. pag. 2.
68
charge de la définition de quel cas pourra être considéré en tant qu’urgence, sur
la base de quels critères certaines régions ou pays seront définis éligibles pour
l’application de cette approche ? Il faudra donc veiller à ce qu’aucun intérêt de
nature strictement politique n’empêche pas de suivre des procédures de façon
transparente et selon les règles. Plus de clarté est demandée dans la façon dont
les clusters sont intégrés aux mécanismes de financement, tels que le CERF.
Encore, les clusters doivent s’intégrer de façon coordonnée avec les autres
structures et procédures déjà en place qui se chargent des mêmes secteurs que
les clusters (nutrition, sécurité alimentaire, etc…).
• La question des IDPs doit ultérieurement être prise en considération. En effet, la
réponse pour la protection des IDPs avant la réforme s’est révélée être
insuffisante et inadéquate. Par la suite, aujourd’hui la responsabilité de ce
secteur est donnée à l’HCR ou à l’OIM, respectivement selon que la cause du
déplacement soit liée à un conflit, une crise ou bien à un désastre naturel. Mais
quid des autres éventuels cas qui ne rentrent pas dans ces deux cas de figure ?
Même si, au final, c’est l’HCR qui est le provider of last resort, cependant ACF
souligne la faiblesse de cet organisme du fait d’un corpus opérationnel qui
semble être inadéquat à la poursuite de l’objectif qu’elle se propose de réaliser.
De plus, son intervention est également soumise aux approbations et aux
humeurs des autorités locales, ce qui peut se traduire concrètement par l’exercice
d’une pression politique sur l’HCR.
• Le financement des programmes par le biais des clusters doit être une garantie
que les ressources nécessaires soient bien allouées selon la réalisation des
objectifs qu’il faut poursuivre. Par contre, il faut veiller à ce que ce passage de
financements soit le plus transparent possible et qu’il ne soit pas exclusif, c’est-
à-dire qu’une ONG doit avoir le droit de recevoir un financement même si elle
fait déjà partie d’un cluster. Dans ce contexte, ACF demande une clarification
par rapport à la position des bailleurs. En effet, les ONG craignent de voir les
fonds en provenance de leurs bailleurs habituels être destinés aux nouveaux
outils financiers mis en place par la réforme, ce qui concrètement se traduirait
par une baisse de financements directs. En plus, le nouveau système risque de
disperser des quantités importantes des fonds pour payer les frais généraux de
tous les différents acteurs qui, à un moment ou à un autre, interviennent dans le
processus.
69
• C’est nécessaire de mettre en place des indicateurs pour évaluer les impacts de la
réforme pour en améliorer l’efficacité, celui-ci étant encore aujourd’hui un fort
gap dans la réforme humanitaire. S’il n’existe pas la possibilité d’évaluer cette
approche, comment l’intérêt des populations peut être mesuré par la suite ?
Cependant, il se pose la question de savoir quel acteur, quelle organisation
indépendante puisse effectuer à posteriori cette évaluation.
• ACF veut pousser pour qu’il y ait un majeur engagement dans cette approche
des acteurs locaux et nationaux, de la société civile, communauté et des
institutions locales94.
Tous ces points résument les éléments centraux et essentiels pour ACF. Cependant,
l’ONG se réserve le droit de se retirer du processus dans le cas où le cluster approach
ne serait plus en accord avec la stratégie, la charte ou les principes d’intervention
d’ACF, ou encore si les progrès en termes d’effectivité de la coordination et/ou de la
réponse aux urgences ne seraient pas démontrés.
Encore aujourd’hui ACF est dans une posture d’observation et d’évaluation de
l’application de cette approche en menant des évaluations à titre personnel et, en même
temps, en participant dans des clusters au Pakistan, au Liban et à Java.
Or, sur la base d’un entretien téléphonique avec Mme Anne Garella, d’ACF France, on
peut constater, à propos des différents clusters auxquels ACF participe, qu’ils avancent
tous à des vitesses différentes, ils ne sont pas tous au même stade et que, par
conséquence, on ne peut pas parler d’homogénéisation. C’est à Java le cluster eau et
assainissement qui fonctionne le mieux. Il a fait preuve d’une bonne intervention
efficace lors des inondations. Par contre, pour les autres clusters, il n’y a pas les mêmes
degrés d’avancements d’outils et tout semble se jouer plus au niveau international. Cette
nouvelle approche de coordination semble donc avoir bien fonctionné pour un cas de
désastre naturel, mais le résultat n’a pas été le même au Zimbabwe ou au Liberia, des
pays affectés plutôt par des crises contextuelles où l’analyse et la stratégie
d’intervention ne sont pas les mêmes qua dans une crise naturelle. ACF participe aux
réunions de coordination, même si elles semblent être trop nombreuses, caractérisées
par un « langage NU ». Il y a le sentiment diffus que la réforme humanitaire de Jan
Egeland veuille traduire la volonté d’affirmer le rôle d’OCHA ainsi que d’en augmenter
94 Action Contre la Faim International, Ibidem, pp. 3-5.
70
le pouvoir de coordination sur tous les acteurs humanitaires internationaux, y compris
les autres agences onusiennes également.
En tout cas, ce qui compte le plus pour ACF est de réussir à garder sa propre autonomie
et indépendance tout en cherchant à prendre ce qui de positif elle peut tirer de cette
réforme et de la participation à ses mécanismes. Par rapport au groupement avec
d’autres ONG, il ne s’agit pas de dire qu’ACF ne veut pas du tout être mélangé avec
une autre ONG, mais simplement de reconnaître que chacune a une spécificité et une
valeur ajoutée propres à elle qu’il faut préserver.
4. Médecins Sans Frontières (MSF)
Parmi les différentes ONG qui ont pris un positionnement plus ou moins clair par
rapport à la réforme humanitaire des NU, Médecins sans Frontières (MSF) se situe
parmi celles les plus « radicales ». Sa position idéologique, son autonomie et
indépendance affichées avec des tons souvent très forts ont poussé l’ONG urgentiste à
décliner toute invitation à travailler ensemble avec les NU. Sa décision pourrait ne pas
étonner, étant donné son mode opératoire. Cependant, tout n’est pas figé non plus et
quelque différence entre le siège et le terrain, MSF International et MSF de certains
pays doit être faite.
Tout d’abord on doit dire que MSF a porté une grande attention à la nature de l’aide
humanitaire offerte par le système onusien depuis toujours. De plus en plus, il y a eu un
sentiment de grande divergence entre les besoins à combler et l’efficacité de la réponse
onusienne95.
Un passage dans une lettre adressée aux équipes terrain de MSF pour sonder les
impressions et les inquiétudes lors d’une éventuelle collaboration avec les agences
onusiennes, résume bien le sentiment de l’ONG :
« Quoi qu’il en soit, le fait de repenser notre relation avec d’autres acteurs devrait être
envisagé comme un moyen/instrument pour nous positionner dans des conditions
95 MSF fait référence à une réponse inappropriée ou en retard de la part des NU dans les urgences au Niger, en RDC, au Soudan et en Somalie. Elle souligne aussi une difficulté de l’organisation à comprendre les stratégies et les agendas, tels que dans le nord de l’Ouganda, dans le Caucase ou en Colombie, une coordination pauvre avec leurs partenaires en Indonésie à la suite du tsunami ou plus récemment après le tremblement de terre au Pakistan.
71
optimales afin de mener notre mission sociale (assistance humanitaire et témoignage).
Les relations avec les autres doivent nous aider à atteindre cet objectif. En considérant
que notre objectif, tout en interagissant avec le système d’aide, est de contribuer à
améliorer notre mission sociale, nous ne pouvons éviter de se demander ce qui servira
au mieux les populations en détresse… »96.
Dans l’International Activity Report de 2005/2006, l’ONG affirme suivre avec attention
les implications de la réforme, sans pour autant vouloir rendre publique une prise de
décision sur cette refonte en cours, étant donné qu’elle considère que cela ne rentre pas
dans les compétences d’une ONG médicale/humanitaire de commenter ou d’avancer des
propositions sur ce qui concerne le travail en interne des NU. Mais clairement, MSF ne
veut pas prendre partie au cluster approach, elle ne veut pas être membre d’un cluster et
son action ne sera pas placée sous la responsabilité des NU97.
Or, après la mise en place de l’approche de responsabilité sectorielle et après des
échanges avec leurs équipes terrain, MSF a proposé des éléments d’analyse et de
réflexion sur les clusters. Plusieurs points sont à souligner :
• Pour ce qui concerne l’urgence, parmi les équipes présentes sur le terrain (au
Pakistan en particulier) il y a la conscience que le système des clusters a
surement contribué à améliorer l’échange d’informations, mais, en même temps,
a alourdit énormément le nombre de réunions interminables et, par la suite, tout
un tas de mesures bureaucratiques et administratives. Cette approche permet de
repérer les lacunes et de développer une intervention plus efficace auprès des
populations, cependant elle semble également encourager une « analyse
fragmentée pré-formatée faisant fit de l’analyse contextuelle et du nécessaire
recul pour avoir une vision globale nécessaire à la gestion adéquate d’une
crise »98.
• Par rapport aux conflits : le Libéria constitue un bon exemple pour une mission
complexe, d’autant plus que les postes de DSRSG, de CH et de CR sont occupés
tous par la même personne, sachant que le représentant de l’ONU se trouve sous
la direction du Secrétaire Général à travers le DOMP. Dans ce contexte, MSF est
96 MSF, Comment cadrer votre discussion sur la question des relations de MSF avec le “système de l’aide” lors des Débats Associatifs Terrain?, Février 2007. 97 MSF, International Activity Report 2005-2006, MSF, pag. 18. 98 MSF, Le point sur la réforme du système humanitaire de l’ONU. Le point sur la situation pré-DG19/IC, MB ET FB/IO/DG19&IC/Juin 2006, pag.4.
72
reconnu comme un acteur spécialisé dans le domaine de la santé, ce qui semble
pousser l’OMS, en tant que cluster lead pour la santé, à considérer les activités
de l’ONG comme partie intégrante de l’action du cluster, alors que MSF ne veut
pas car elle veut préserver la perception qu’on a d’elle, de son action et de ses
rapports avec tout autre acteur participant à la réponse humanitaire. En effet,
MSF craint que les ONG puissent devenir de facto des instruments du système
des NU juste en participant aux clusters.
• Par rapport au CERF : MSF craint que, en voyant gonfler l’enveloppe à
destination du CERF, en même temps les autres fonds et subventions des États
bailleurs pour les ONG puissent diminuer99.
• Par rapport au quatrième pilier de la réforme, MSF a été invité à prendre partie
aux forums, cependant elle a décliné car une éventuelle participation à ce forum,
selon elle, vaudrait dire : valider le principe pour lequel une intervention
internationale, dans un cadre onusien et sous l’égide d’OCHA, saurait
envisageable ; cela pourrait aussi provoquer une dispersion de la responsabilité
propre à chacun dans une intervention commune et amalgamée ; de plus, MSF
ne se propose pas d’améliorer la qualité du système onusien, mais simplement
de ses opérations, donc une participation à la réforme vaudrait dire se
transformer en promoteur de politiques et de solutions internationales, ce qui
dépasserait le mandat même de l’ONG ; MSF veut bien s’afficher comme acteur
indépendant de toute action des NU, surtout dans les cas des missions intégrées.
Cependant, si on regarde à la liste des participants aux réunions des clusters ou à des
working groups ou à des task forces, on peut remarquer la présence de MSF. C’est le
cas, par exemple, de MSF Hollande et de MSF Espagne qui ont participé au « 1st IASC
Somalia Health Cluster Retreat » à Nairobi, au Kenya, en mai 2007, ou encore à des
working groups sur les épidémies pour MSF Espagne100.
99 Comme les autres ONG, MSF veut clarifier la possibilité d’un accès direct au CERF pour les ONG, cependant on connaît l’indépendance financière dont dispose cette ONG, ce qui lui permet d’avoir une posture différente de celle des autres ONG. 100 IASC, 1st IASC Somalia Health Cluster Retreat, 23-24 Mai 2007, annexe 2, pag. 22.
73
B) L’expérience en cours de Médecins du Monde – France
Médecins du Monde (MDM) n’a pas à l’heure actuelle pris une position par rapport à la
question de la réforme humanitaire des NU. La raison principale de ce « retard » est due
en particulier à un manque d’informations et à un décalage entre ce qui se passe sur le
terrain et ce qui se passe au siège à Paris. Bien sûr, il s’agit d’un processus de refonte
assez récente, qui date d’un peu plus d’un an à peine, qui parfois pèche par manque de
clarté et qui est un work in progress, dont les mécanismes se mettent en place peu à la
fois, dont les acteurs participant commencent tout juste à en comprendre les « règles du
jeu » et à avoir conscience des enjeux (politiques, administratives, financières) qui en
découlent. Cependant, étant donné que ce processus est loin d’être arrivé au terminus, le
vrai enjeu pour MDM serait de comprendre l’importance de faire entendre sa voix et,
ensemble avec les autres ONG, de chercher à imposer également ses propres « règles du
jeu » qui correspondent avec les intérêts des premiers bénéficiaires et potentiellement
intéressés de cette réforme, c’est-à-dire les populations affectées par des crises
humanitaires qui durent depuis trop longtemps, ou démunies de ressources pour faire
face à des nouvelles urgences humanitaires et naturelles. D’ailleurs, dans la future mise
en place de l’approche de responsabilité sectorielle dans tous les 25 pays où un CH est
présent, MDM, de son coté, y est présent dans 17, ce qui représente un enjeu capital
pour l’ONG101.
Lors de la période de stage effectuée auprès de MDM, à Paris, j’ai eu la possibilité de
collecter toute une série d’informations concernant ce sujet, ce qui permet à MDM de
pouvoir les capitaliser pour en tirer un profit surement avantageux dans son futur proche.
Sur la base d’entretiens eus au mois de juin avec les équipes terrain de MDM, il a été
possible de dresser un état général de la situation : comment la réforme est perçue,
comment elle a été mise en place et quels enjeux elle comporte dans un pays en
particulier différemment d’un autre, etc…
Les pays qui feront l’objet de l’analyse dans cette deuxième partie ont été choisis
exclusivement sur la base de leur cohérence avec le sujet, de leur expérience pratique et
des enjeux présents et futurs qu’ils représentent pour MDM. Il s’agit de : Somalie,
101 Les pays où le cluster approch est déjà appliquée, ou le sera bientôt, et où MDM est déjà présent sont : Liberia, RDC, Somalie, Colombie, Ethiopie, Zimbabwe, Afghanistan, Erythrée, Haïti, Indonésie, Madagascar, Myanmar, Népal, Niger, Territoires Occupées de Palestine, Nord Caucase, Soudan.
74
Zimbabwe, République Démocratique de Congo (Goma et Kalemie), Liban et Indonésie
(Jakarta).
1. Somalie102
Les informations concernant la Somalie sont le résultat d’un entretien et de la
collaboration avec M.me Stéphanie Dérozier103.
La réforme a déjà été mise en place dans ce pays. Cependant, un sentiment général de
manque de clarté est assez diffusé car la perception qu’il s’agit d’un work in progress
est très forte. Ce qui est particulier pour la Somalie est qu’ici il existait déjà, et il existe
encore, un consortium d’ONG qui travaillent et qui entretiennent des relations avec les
NU et les bailleurs de fonds. La question que beaucoup se sont posée est la suivante :
pourquoi les NU ne cherchent pas (n’ont pas cherché) à améliorer la dimension
politique de leurs rapports avec les autorités locales somaliennes, plutôt que de
demander aux ONG de coopérer avec elles ? Or, avec la mise en place du nouveau
système promu par les NU on s’éloigne davantage d’une situation d’uniformité d’autant
plus que ce système n’est pas le même selon qu’il s’agisse de régions touchées par
l’urgence ou par des projets de développement104. Cela veut dire que pour chaque région
il faudra suivre des guidelines particulières, pour chaque zone il va y avoir un système
de coordination, de reporting différent selon le contexte.
Dans le pays, MDM fait déjà partie des clusters santé, logistique et IDPs. La
participation majeure a été celle au cluster logistique105. La participation à ces clusters a
été assez autonome et elle a marché par le biais de contacts. En participant aux réunions
organisées par les NU, la coordinatrice a eu la possibilité de prendre davantage
connaissance du processus de réforme humanitaire et d’en voir les effets en Somalie. Le
vrai intérêt de participer régulièrement à ces réunions a été celui de concourir et de
102 Entretien téléphonique avec Stéphanie Dérozier le 13 juin 2007. 103 En réalité, la base est à Nairobi (Kenya) et non pas en Somalie, où MDM a simplement effectué une mission exploratoire, mais ça reste un pays très intéressant de par sa position stratégique. 104 Á la date de l’entretien il s’agissait d’une région au Sud affectée pour l’urgence et de deux autres pour le développement. 105 Les autres ONG qui ont pris partie à ces clusters sont : des ONG italiennes (COOPI, CISPE, COSPE), ACF- France, Merlin, des ONG somaliennes, MSF – Espagne (celle-ci participait seulement aux working groups sur les épidémies). Les cluster leads pour la santé étaient une ONG membre d’un consortium d’ONG (GEDO Health Consortium) ainsi qu’un bailleur (la coopération italienne) et un représentant des NU. Pour le cluster protection les cluster leads sont OCHA, HCR et le Danish Refugee Commitee.
75
contribuer à un échange continu d’informations. En effet, l’importance de prendre partie
à ce type de réunion constitue un bénéfice pour MDM pour trois raisons :
1. Cela permet un échange d’informations précises sur des secteurs spécifiques
(santé, protection, logistique, etc…) afin d’en connaître mieux la situation.
2. Cela permet de faire passer des témoignages sur des sujets intéressants et qui
touchent de près les ONG sur le terrain.
3. Cela permet à l’ONG de se rendre plus visible afin de pouvoir rechercher des
fonds par la suite, ce qui oblige à gérer un maximum d’informations.
Un constat intéressant souligné par la coordinatrice est de remarquer que les ONG
françaises, en général, semblent avoir plus de mal à travailler avec les NU, alors que
celles anglo-saxonnes ou du Nord, de par leur mandat de lobbying, considèrent cela plus
comme une occasion en leur faveur qu’un obstacle à leur indépendance et autonomie.
Pour ce qui concerne le CERF, l’accès peut se faire en passant par le Humanitarian
Relief Fund (HRF), donc par OCHA. Il s’agit de 250.000 USD par projet maximum
pour 6 mois.
Le desk respectif de MDM au siège a été tenu au courant de tout ce processus,
cependant cela n’a pas amené à prendre une position sur le sujet, pas encore, en tout cas.
2. Zimbabwe
Les informations concernant la mise en place de la réforme humanitaire des NU au
Zimbabwe ont été obtenues grâce à un entretien téléphonique assez précieux avec
Joanna Heil, représentante administrative sur le terrain, ainsi que des documents qu’elle
nous a fait parvenir106.
Le processus de mise en place du cluster approach a démarré en début de l’année
dernière par une réunion de sensibilisation et de renseignement général sur la réforme
organisée par OCHA107 . Lors d’une autre réunion qui s’est tenue en début de juin
dernier, MDM a proposé de participer à un groupe de travail sur la définition des ToR
106 Entretien téléphonique du 19 juin 2007. 107 Lors de cette première réunion parmi les ONG qui y ont pris partie, on peut citer : MSF, ACF, Oxfam, Care, Concern, GOAL, SC, World Vision, des ONG africaines comme Africare et des ONG locales.
76
notamment sur le cluster lead au Zimbabwe. Parmi toutes les ONG présentes sur place,
au moment de ces réunions ou des meetings entre chefs de mission, est ressorti le
sentiment général de ne pas vouloir que cette réforme soit exclusivement une réforme
« des » NU. Leur collaboration, en tout cas, a été productive pour la participation à
l’élaboration des PoP par le Steering Commitee for Humanitarian Reform (SCHR) en
vu du GHP108.
Au Zimbabwe MDM participe au cluster santé, dont le cluster leads est le Ministère de
la Santé avec la coprésidence de l’OMS. Elle participe aussi au sous-cluster nutrition.
Or, ce qui semble manquer un peu, selon l’avis de l’interviewée, est une implication
pratique sur le terrain à la suite de toutes ces réunions :
« Pour simplifier, t’as une réunion de coordination générale, qui est la réunion du
cluster qui est, elle-même, sous-divisée en sous-comités, donc chaque sous-comité se
rencontre et une fois tous les mois ou tous les deux mois il y a cette grande réunion du
cluster. Le problème c’est que j’ai du mal à voir des implications pratiques dans la
mesure où les sujets qui sont abordés ne sont pas vraiment de coordination, mais plus
des sujets de présentation sur les thèmes généraux. Il y a rien de pratique qui ressort.
Ce n’est pas très claire, quoi ! Ce qu’est un cluster, mais je n’ai vu aucun changement
dans la mise en œuvre sur le terrain de ce partenariat »109.
Or, l’application du cluster approach a eu des implications plus concrètes pour MDM,
dans le sens que cela lui a permis d’acquérir plus d’importance au niveau de la visibilité,
dans un pays où les relations avec les autorités locales sont très importantes et sensibles.
De ce fait, par la participation aux réunions du cluster santé, MDM a pu entretenir des
relations plus proches avec le Ministère de la Santé, mais aussi être un peu plus présent
au niveau de la province. En plus de la notoriété, cette implication a permit de mieux
connaître les mécanismes de coordination et d’évaluation au niveau central et de la
province et cela s’est traduit par des majeures implications en termes de monitoring et
d’évaluation. Ce qui manque, en revanche, est que l’application des programmes ne
semble pas avoir beaucoup des conséquences significatives sur le terrain. Pour résumer,
on pourrait dire que cette réforme au Zimbabwe a produit jusqu’à aujourd’hui des
108 Rappelons que les PoP sont les suivants : 1) Equality, 2) Transparency, 3) Result-oriented approach, 4) Responsability, 5) Complementarity 109 Passage de l’entretien téléphonique avec Mme Joanna Heil.
77
résultats indirects, plutôt que concrets sur le terrain : il s’agit de se faire connaître et
reconnaître, communiquer et s’échanger des informations.
Cependant, un problème qui semble caractériser les clusters dans ce pays est qu’ils
n’arrivent pas à être complètement indépendant des personnalités qui les composent, ou
encore ils ont à faire face à une hétérogénéité d’acteurs qui permane en dépit de la
volonté du cluster de rechercher une meilleure qualité dans la coordination et dans la
réponse humanitaire. De plus, au Zimbabwe, il faut prendre en compte également les
relations avec le Gouvernement local qui est très fort et présent.
3. République Démocratique du Congo (Goma)
Le cas de MDM en RDC, à Goma, représente un bon exemple de comment l’ONG
participe à l’approche de responsabilité sectorielle du fait qu’elle se retrouve depuis
plusieurs mois à co-piloter avec l’OMS le cluster santé. Cela dérive de son expérience
dans le secteur. Il s’agit d’un cas intéressant de concertation entre les NU et les ONG,
car tous les acteurs sont fortement rapprochés, même si des discussions sont assez
limitées à l’affectation des fonds et ne s’évoluent pas dans un sens plus stratégique et
opérationnel. L’interview avec Pierre Sallah de MDM, présent sur le terrain, a mis en
évidence qu’eux, les acteurs des ONG sur le terrain, se sont retrouvés face au produit de
la réforme, mais qu’aucun travail de fond de présentation sur le contenu de la réforme
ne leur a pas été fourni110. Sur place, ils ont donc eu le sentiment que cette réforme a
été mise en place par les NU, pour les NU, que celles-ci se sont concertées entre elles,
sans prendre en compte les acteurs non gouvernementaux. Ce sentiment s’est développé
de plus en plus lors des discussions concernant le PF et le CERF à cause des
retardements dans les payements de la part des agences onusiennes envers les ONG, ce
qui a retardé les activités sur le terrain111.
Á Goma MDM a réussi à co-piloter le cluster santé ensemble avec l’OMS après les
pressions soulevées par les ONG qui voulaient ce type d’association, ainsi que derrière
conseil du Directeur des Missions Internationales de MDM de l’époque lors d’un
110 Entretien téléphonique avec Pierre Sallah, 14 juin 2007. 111 MDM n’a pas fait demande auprès du CERF et/ou du PF jusqu’à aujourd’hui. En effet, aujourd’hui il n’y a pas de difficultés particulières, car le projet est bien financé, stable et l’ONG peut travailler indépendamment du cluster et du CERF.
78
déplacement sur ce terrain112. En effet, dans le pays il y a des gros problèmes de VIH et
MDM est reconnue comme étant très compétente dans ce secteur, alors que l’OMS était
perçue comme distante des enjeux concrets du terrain. Tout comme les autres pays où le
cluster approach a été appliqué, il ressort l’utilité de prendre partie aux clusters du fait
du partage d’informations. Or, dans le cas de la RDC et dans le secteur de la santé,
même s’il ne s’agit pas d’un cluster fonctionnel pour débattre de la nature des projets,
cependant il permet de s’échanger des informations entre acteurs qui se regroupent par
secteurs de spécialisation : santé, protection, nutrition, assainissement. Ce cadre permet
donc de rapprocher une diversité d’acteur sur la santé, à l’occurrence, chose qui ne
serait pas possible sans le cluster.
Par contre, en dépit de cet aspect positif du cluster, ce qui apparaît comme négatif est le
fait que le fonctionnement du cluster porte plus sur la distribution des fonds, il ne se
concentre pas sur la stratégie ou sur la complémentarité entre les différents projets, ni de
leur aspect opérationnel. Cet aspect très bureaucratique et pas du tout opérationnel sème
le sentiment que les agences des NU et qu’OCHA veuillent tout concentrer dans leurs
mains, tout en restant loin du terrain, des impacts concrets sur le terrain et sans contact
aucun avec les populations affectées.
4. République Démocratique de Congo (Tanganyika - Kalemie)
En RDC Tanganyika-Kalemie, comme à Goma, l’équipe MDM présente sur le terrain a
été invitée à prendre partie à des réunions hebdomadaires organisées par OCHA dans le
but de renseigner les ONG sur les changements en acte dans le cadre de l’action
humanitaire. L’interviewé, Kalil Toure, souligne que lors de ces réunions il n’y a pas de
véritable concertation intra-ONG, mais les débats portent surtout sur des questions
d’ordre financier113. C’est à partir de 2006 que MDM a joint le cluster santé, présidé par
l’OMS, avec la participation d’autres ONG, telles que COOPI, Equilibre, FAHI (une
ONG américaine), Caritas, GOAL ainsi que la Fondation Damien. MDM est la seule
ONG française présente et participante au cluster, car dans ce district il n’y a qu’elle en
tant que française. En réalité, dans ce district il n’y a pas une grande circulation de
données, car il s’agit plutôt d’un sous-cluster, dont la mise en place n’a pas pris
112 Le Directeur des Missions Internationales de MDM de l’époque dont on parle est M. Eric Chevallier. 113 Entretien téléphonique avec Kalil Toure, le 18 juin 2007.
79
beaucoup de temps étant donné que dans la région il existait déjà des commissions qui,
avec la réforme, se sont juste réorganisées. La mise en place des clusters dans la région
ne semble pas encore avoir porté ses fruits, dans le sens où il n’y a pas eu des réelles
implications par rapport au programme sur le terrain. En réalité, le gros enjeu est
constitué par le financement. Ces nouvelles structures de coordination, selon l’avis de
l’interviewé, ne facilitent pas les financements car il existe des procédures jugées
longues et une gestion des fonds considérée trop compliquée et loin des réalités du
terrain. La méfiance vis-à-vis des NU persiste surtout avec le nouveau système de
financement mis en place et pour MDM (sur le terrain) obtenir des financements du
CERF voudrait dire rentrer dans des procédures plutôt compliquées, trouver des bons
interlocuteurs au sein des NU mêmes, demander l’avis aux sous-bureaux des agences,
etc…Sur le terrain il y a le sentiment que les NU sont en train de mettre en place une
stratégie assez intelligente qui consisterait dans une apparente responsabilisation des
ONG à travers l’efficacité des NU. En tout cas, pour MDM n’a jamais été question de
faire demande auprès du CERF pour pouvoir bénéficier de ses fonds114. En fait, un
grand scepticisme règne à cause d’expériences négatives de certaines ONG qui n’ont
pas encore reçu l’argent de la part du CERF, il s’agit de GOAL, Coopi, Equilibre, FAHI,
Caritas. L’attente (depuis mars) de l’argent bloque le partenariat même car si les ONG
savent d’avoir eu accepté des financements de la part du CERF, elles ne vont plus
chercher d’autres fonds ailleurs.
En conclusion, dans ce terrain, l’expérience de MDM met bien en évidence
l’importance de l’enjeu financier, c’est pour cela qu’il y a une prise de conscience sur la
façon dont pouvoir faire changer les choses. Un premier par serait de changer le
système de financement, en permettant aux ONG d’accéder directement au CERF sans
passer par les agences onusiennes, ce qui leur permettrait de gagner plus de temps et
plus d’argent, étant donné qu’on ne devrait plus prendre en compte les coûts des frais
généraux pour les NU.
114 Cependant, à un moment il semble y avoir été un appel d’offre pour le PF, mais MDM n’était pas présent sur place physiquement. Par la suite, MDM a appris que le sous-cluster à Tanganyika a regretté leur absence car MDM est considérée comme une ONG ayant la capacité de répondre aux besoins de partenariat
80
5. Liban
Le Liban représente un cas où MDM n’a pas trop été en lien avec les NU, au moins
jusqu’à l’éclatement de la guerre l’année dernière. La seule exception était constituée
par le HCR du fait de la thématique commune des réfugiés. En effet, le HCR a mis en
place ensemble avec les ONG présentes sur le terrain qui s’occupent des réfugiés
irakiens des working groups mensuels sous forme de secteurs d’activité sur la
thématique des réfugiés. La participation au cluster santé, présidé par l’OMS, ou à celui
sur les réfugiés, présidé par le HCR, n’a pas besoin d’invitation formelle, mais cela
marche plutôt par un passage d’informations, surtout entre les ONG, comme ça a été le
cas pour MDM qui en est venue à connaissance grâce à Handicap International.
Au Liban, comme dans les autres pays touchés par la réforme, une des premières
considérations relatives à l’impact de celle-ci, est de constater une incrémentation dans
l’échange et la cumulation d’informations dont toutes les parties prenantes (NU et
ONG) peuvent profiter. Cependant, dans le cas du Liban, lors de la guerre, l’apparition
sur le terrain de trop d’agences onusiennes a représenté un moment de chaos et de
surabondance des aides par rapport aux besoins, par forcement toujours bien ciblés.
Par contre, aucune information ne semble avoir été réceptionnée par l’équipe terrain de
MDM sur les nouveaux outils de financement115.
6. Indonésie
En Indonésie MDM ne participe et n’a participé à aucun cluster. Cela a été du aux
circonstances. En fait, lors des inondations à Jakarta, en février, l’urgence a été gérée
surtout par les autorités nationales et par les NU116 ; dans le cas du tremblement de terre
à Palanga MDM est arrivée en retard quand c’était presque la fin de l’intervention
d’urgence, donc ce n’était pas nécessaire de faire partie d’un cluster117. De toute façon,
115 Entretien téléphonique avec Bérengère Martin (coordinatrice générale) et Reem Mansour (coordinatrice médicale) le 13 juin 2007. 116 En Indonésie les autorités locales sont très fortes et très présentes. De plus en plus, la réponse d’urgence, surtout dans les premiers instants, est prise en charge localement, aussi avec une forte intervention de l’armée et/ou du personnel médical, donc les ONG et les organisations internationales présentes sur place doivent s’adapter au Gouvernement. Par exemple, à Jakarta, le Gouvernement a voulu du soutien pour les populations « illégales ». Donc, MDM n’a pas travaillé le Gouvernement, mais elle se trouvait dans les bidonvilles avec les populations « illégales ». 117 Entretien téléphonique avec Olaf Valverde du 13 juin 2007.
81
la démarche pour participer à un cluster est personnelle, c’est-à-dire que cela revient à
l’ONG (MDM dans le cas spécifique) de prendre contact avec les autorités locales ou
avec d’autres ONG plus « expérimentées » pour ensuite jouer un rôle plus actif au sein
d’un cluster, d’autant plus que dans un cas d’urgence il faut se faire remarquer plus. De
plus, le problème pour MDM est qu’en étant sur un terrain pour une mission d’urgence,
elle se trouve à remplir sa mission dans des zones périphériques et lointaines du centre
où se tiennent les réunions de coordination. Cependant, cela n’empêche pas d’être au
courant des dernières nouvelles grâce à l’intermédiaire des nouvelles technologies avec
le coordinateur d’un cluster. En dépit du fait que MDM n’a pas pris partie à la vie du
cluster, à cause de son retard, cependant l’équipe a reçu toutes les informations
concernant l’évolution du cluster, ce qui est clairement reconnu être un atout de ce
nouveau système. Or, si d’un coté le cluster semble favoriser un partage et un échange
d’informations, de l’autre il faut faire aussi une différenciation entre les types de cluster
du fait qu’il y en a certains dont la structure est beaucoup plus lourde avec des réunions
excessive en quantité et en durée et qui des fois ne priorisent pas le travail de qualité.
Mais de toute façon, encore une fois, est souligné l’importance de pouvoir y participer
parce que, mis à part le fait que ce ne sont pas des lieux pour des prises de décision, en
plus de bénéficier d’informations presque souvent utiles et cohérentes, le cadre permet
de nouer des relations avec d’autres ONG, avec des éventuels bailleurs de fonds là
présents, avec les agences onusiennes, etc…
Le cas de l’Indonésie est intéressant car il représente la seule expérience à ces jours de
dépôt d’une demande de fonds auprès du CERF, même si elle n’a pas abouti à un succès.
La demande a été faite en Avril et elle concernait les inondations de Février à Jakarta,
donc déjà il y avait un premier décalage temporaire qui a fait que la disponibilité de
l’argent était réduite. Apparemment, la procédure de dépôt de la demande était assez
simple (environ 6-7 pages à remplir), mais le vrai problème, selon l’interviewé, réside
dans le fait qu’il y a un comité technique au sein du CERF qui doit décider de
l’acceptation ou refus d’une demande, seulement ce comité est composé par des gens
des NU. Ainsi, donner ce pouvoir décisionnel à des gens des NU, qui souvent sont
déconnectés des réalités du terrain et qui ne sont pas des experts sur les projets, est
considéré comme un point faible de ce nouveau mécanisme. Selon une discussion que le
coordinateur de MDM sur place a eue avec le responsable de la communication des
résultats d’OCHA, la raison du rejet de la demande de MDM a été l’inclusion des frais
administratifs, alors que le jury financier avait choisi de regarder le critère des outputs.
82
Or, le projet de MDM qui avait été déposé concernait une urgence médicale, mais il
était accompagné également par une demande pour les soins d’assainissement, pour
l’hygiène, ce qui était complémentaire à l’urgence initiale, alors que « celui qui reçoit
de l’argent du CERF ce n’est pas celui qui fait un travail complet, mais c’est celui qui
fait un travail de donation, de distribution, simplement il arrive et après il balance des
choses et puis il part. Ils agissent vraiment dans l’immédiat et ils partent après »118.
Á ce propos, la crainte manifestée par le coordinateur de MDM est de voir une
concentration des fonds habituels dans un seul mécanisme de coordination des
financements, ce qui alourdit la procédure et qui le rend moins accessible.
Les mots d’Olaf sont très révélateurs pour mieux exprimer la problématique que cela
comporte :
«…car toute concentration, par définition, alourdit toujours. Ils disent qu’il faut
coordonner, mais pour moi coordination ça ne veut pas dire concentration. C’est tout le
contraire. Coordination c’est échange d’informations et non pas concentration de la
décision. Les gens qui travaillent aux NU sont toujours saturés de boulot…ils font des
rapports, toutes les décisions se prennent dans le niveau de leur hiérarchie… il faut
revendiquer, surtout au nom de MDM et, en général, comme organisation
internationale, que nous, nous sommes à coté de la réalité, revendiquer ça et qu’ils
fassent plus d’attention à cet aspect. Ce que je pense de la reforme c’est qu’il faut se
prendre soin des structures, mais c’est une reforme des NU, ce n’est pas une réforme
qui pense à l’impact des NU… ».
118 Entretien téléphonique avec Olaf Valverde du 13 juin 2007.
83
Conclusions La réforme humanitaire des NU est, à un an et plus de sa mise en place, encore un work
in progress qui verra des nouvelles modifications et évolutions grâce à la participation
et à l’engagement de toute une pluralité d’acteurs différents intervenant dans la réponse
humanitaire internationale.
Aujourd’hui ce n’est pas encore possible de dresser une conclusion finale sur les
résultats de la réforme, cela est encore tôt. Mais l’analyse des expériences concrètes
vécues par les ONG sur le terrain et les débats lors des réunions au niveau global
permettent de mettre en évidence les enjeux principaux de cette refonte et soulignent ce
qui nécessite de continuer à faire l’objet de débats et d’ultérieures réformes.
Ce travail a été conçu dans l’optique de pouvoir apporter un appui technique et une
occasion de réflexion et de débat au sein d’une ONG comme MDM. En effet, de par son
travail efficace sur le terrain, de par sa volonté de s’impliquer dans des situations
difficiles et compliquées, il est peut-être utile de s’intéresser davantage à une
dynamique fondamentale et incontournable comme celle de la réforme humanitaire des
NU, sans promouvoir une idéologie du non-partenariat qui, en fin de compte, pourrait
ne pas se révéler avantageuse. Des questions sont encore ouvertes au sein de MDM pour
qu’elle puisse se prononcer sur un positionnement par rapport à cette réforme. Il s’agit
notamment de :
• Clarifier davantage le terme de « coordination » : s’agit-il de la responsabilité
des NU ? Concrètement, cela consiste en quoi ?
• Est-il possible de « coordonner » sans être obligé de prendre partie à des
nombreuses réunions ?
• Quel positionnement MDM devrait prendre par rapport à la question du
renforcement des capacités nationales, étant donné que, à la base, elle est
porteuse du principe de renforcement de celles-ci, mais un peu plus sceptique
lors de son application dans un contexte d’urgence ?
Or cependant, mis de coté les questionnements, il faudrait aussi reconnaître que la
réforme est déjà en place, mais que, au même temps, elle est en train de se faire,
d’évoluer. Donc, quel serait l’intérêt de rester en dehors de ce processus maintenant, de
84
na pas y jouer un rôle au nom d’une indépendance idéologique qui parfois pourrait
déconnecter des réalités du terrain et des autres enjeux qui concernent toute la
communauté humanitaire internationale ? Dans quel but et pour quelle raison il
faudrait traduire le concept d’indépendance en isolement ? De toute façon, sur le terrain
les nouveaux outils mis en place par la réforme remplaceront tous les anciens
mécanismes de coordination déjà existent. Donc, ne pas participer voudrait dire se
mettre en dehors de toute coordination. Au siège, une éventuelle participation pourrait
permettre des nouvelles stratégies pour mener l’action de MDM, pour acquérir plus de
visibilité aussi auprès des bailleurs de fonds ou des autorités locales, pour se donner la
possibilité de prendre la parole et de faire connaître sa propre position, ses propres idées
et pour faire passer ses propres messages. Bien sur, cela ne se met en place du jour au
lendemain, car cela requiert tout d’abord une coordination à l’intérieur de l’ONG même
et une direction pleine de bonne volonté et capable de mener des actions au début peut-
être un peu risquées en investissant dans des ressources humaines et financières dont les
résultats ne seront peut-être pas immédiats.
Il faut également tenir bien à l’esprit que cette réforme sera très prochainement
appliquée dans tous les 25 pays où un CH est présent et MDM, de son coté, est présent
dans 17 de ces pays. Ce qui veut dire que sur le terrain il y aura surement des
conséquences d’ordre pratique que MDM ne pourra pas négliger.
Dans tout ce contexte, il ne faut pas sous-estimer l’enjeu financier du CERF. MDM ne
dispose pas encore d’une grande connaissance et maîtrise de cet outil, donc elle en
méconnait les réelles potentialités. Pourtant, il pourrait représenter une aide
considérable pour les crises sous-financées, comme cela peut être le cas du Zimbabwe
aujourd’hui. Sur la base des perceptions qui remontent du terrain par rapport à cette
réforme, MDM pourrait jouer un rôle stratégique ensemble avec d’autres ONG sur le
partage de l’idée commune que cet outil de financement devrait être en accès direct pour
elles-mêmes, afin de chercher de rééquilibrer les relations avec les agences onusiennes,
des relations qui sont perçues comme inégales. Haïti peut constituer pour l’ONG le
prochain terrain d’essai par rapport à cet enjeu. Des clusters viennent de se mettre en
place dans ce pays et de plus en plus les équipes terrain semblent recevoir des
informations et des mises à jour sur les possibilités de financement par le biais du CERF.
En conclusion, MDM pourrait tirer des bénéfices en prenant partie au processus de
réforme humanitaire, elle pourrait également contribuer à diriger les prochaines
85
évolutions de celle-ci vers une association des ONG au processus de coordination au
niveau central et du terrain par le biais de mécanisme de co-gouvernance choisis, un
accès direct et transparent au CERF et une participation plus active et productive à un
processus d’évaluation tant au niveau global qu’à celui local selon un système mixte de
participation entre les ONG, les NU, les bailleurs de fonds. Le rôle et la responsabilité
des ONG est aussi de peser sur la façon dont ce work in progress va évoluer.
Il s’avérerait être plus avantageux et peut-être plus responsable d’adopter une posture de
dialogue ouverte et lucide avec le monde des NU, plutôt que prôner une idéologie
immobiliste du non-partenariat.
86
Bibliographie
OUVRAGES GENERAUX LAROCHE Josépha, Politique Internationale, Paris, L.G.D.J., 2000. RASMUSSON Elisabeth, « Review of Experiences and Recommendations for Strengthening the Dedicated Humanitarian Coordinators Pillar of Humanitarian Reform », Genève, Mars, 2007. ARTICLES DE REVUES ET CHAPITRES FODHA Hassen, « La Réforme de l’Organisation des Nations Unies », in CHAIGNEAU Pascal, dir., Enjeux diplomatiques et stratégiques, Edition Economica, 2006, pp.19-26. GHALI Boutros Boutros, « Peut-on réformer les Nations Unies ? », Pouvoirs, 109, mars, 2004. STODDARD Abby et al., « Evaluation of the Common Funds for Humanitarian Action in the Democratic Republic of the Congo and Sudan », Center on International Cooperation, NYU and HPG, Novembre 2006. STODDARD Abby, HAVER Katherine, HARMER Adele, « Operational Consequences of Reform Project Humanitarian Financing Reform », Center on International Cooperation, ODI, Juin, 2007. PRESSE Humanitarian Reform Newsletter, Septembre 2006. DOCUMENTATION « GRISE » Action Contre la Faim International, Action Contre la Faim International positionning vis-à-vis the reform of clusters, Janvier 2007. CERF, Under-Funded Grants 2007, CERF Technical Guidelines and Application Template, 7 Février 2007. IASC, 1st IASC Somalia Health Cluster Retreat, 23-24 Mai 2007. IASC, Note d’orientation sur la mise en œuvre de l’approche de responsabilité sectorielle (« cluster approach ») pour renforcer l’action humanitaire, 24 Novembre 2006. IASC, Recommendations Related to the Review of the Capacity of the UN System for Humanitarian Assistance, 29 Juillet 1998.
87
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http://www.icva.ch
http://www.ocha.unog.ch/humanitarianreform
http://www.ochaonline.un.org
http://www.cerf.un.org
http://www.rdc-humanitaire.net
http://savethechildren.net
http://www.oxfam.qc.net
http://goodhumanitariandonorship.org/
http://dacessdds.un.org
Table des matières
88
LISTE DES SIGLES UTILISÉS ............................................................... 4
SOMMAIRE ................................................................................................ 7
INTRODUCTION....................................................................................... 8
A) LE CONTEXTE PROFESSIONNEL DE RÉALISATION DU MÉMOIRE ................................. 8 B) LA RÉFORME DES NATIONS UNIES : ADAPTATIONS ET PROCESSUS PERMANENT........ 8 C) PROBLÉMATIQUE .................................................................................................... 11
CHAPITRE I – LA RÉFORME HUMANITAIRE DES NATIONS UNIES : ANALYSE DES QUATRE PILIERS. .....................................12
A) L’APPROCHE DE RESPONSABILITÉ SECTORIELLE (CLUSTER APPROACH) ................... 14 B) LE RÔLE DU COORDONATEUR HUMANITAIRE (CH) ................................................ 30 C) LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT (POOL FUND ET CERF).................................. 41
1. Le Pool Fund (PF)........................................................................................................................42 2. Le Central Emergency Response Fund (CERF, Fond Central ’Intervention d’Urgence) ...........44
D) LE GLOBAL HUMANITARIAN PARTNERSHIP ............................................................... 51
CHAPITRE II – ANALYSE DE L’IMPACT DE LA RÉFORME HUMANITAIRE DES NATIONS UNIES SUR L’ACTION HUMANITAIRE. ......................................................................................57
A) L’EXPÉRIENCE DES ONG........................................................................................ 57 1. Save the Children (SC)..................................................................................................................58 2. Oxfam International .....................................................................................................................64 3. Action Contre la Faim (ACF) .......................................................................................................67 4. Médecins Sans Frontières (MSF) .................................................................................................71
B) L’EXPÉRIENCE EN COURS DE MÉDECINS DU MONDE – FRANCE .............................. 74 1. Somalie .........................................................................................................................................75 2. Zimbabwe......................................................................................................................................76 3. République Démocratique du Congo (Goma)...............................................................................78 4. République Démocratique de Congo (Tanganyika - Kalemie) .....................................................79 5. Liban .............................................................................................................................................81 6. Indonésie.......................................................................................................................................81
CONCLUSIONS........................................................................................84
BIBLIOGRAPHIE....................................................................................87
TABLE DES MATIÈRES ........................................................................88
ANNEXES..................................................................................................89
ANNEXE I .................................................................................................................... 90 A. SECTEURS FINANCÉS PAR LE CERF.......................................................................................90 B. AGENCES RÉCIPIENDAIRES ....................................................................................................90 C. TYPES DE FINANCÈMENT POUR WINDOW ...........................................................................91 D. FINANCÈMENTS PAR PAYS ......................................................................................................91
ANNEXE II ................................................................................................................... 93
Annexes
89
Annexe I
A. SECTEURS FINANCÉS PAR LE CERF
1. Total depuis le 9 Mars 2006
B. AGENCES RÉCIPIENDAIRES
1. Total dès le 01-03-2006 au 28-06-2007
Agence Fonds Déboursés en USD Pourcentage du Total
WFP 164, 921,199 37.01 %
UNICEF 108, 177,760 24.28 %
UNHCR 51, 407,492 11.54 %
WHO 42, 589,578 9.56 %
Secteur Fonds Déboursés en USD Pourcentage du Total
Nutrition 111, 426,221 25.01 %
Santé 90, 503,091 20.31 %
Multi-sector 58, 445,699 13.12 %
Coordination and support services 55, 733,956 12.51 %
Agriculture 40, 641,516 9.12 %
Watsan 37, 592,291 8.44 %
Shelter and non-food items 29, 784,259 6.68 %
Protection/Human Rights/Rule of Law 14, 431,502 3.24 %
Education 4, 156,334 0.93 %
Sécurité 1, 741,381 0.39 %
Action contre les mines 1, 109,900 0.25 %
Total 445, 566,149 100 %
90
FAO 35, 882,437 8.05 %
UNDP 14, 603,553 3.28 %
IOM 13, 801,898 3.10 %
UNRWA 7, 387,392 1.66 %
UNFPA 6, 564,841 1.47 %
UNOPS 230,000 0.05 %
Total 445, 566,149 100 %
C. TYPES DE FINANCÈMENT POUR WINDOW
1. Total dès le 01-03-2006 au 28-06-2007
Pourcentage du Total Window Fonds Déboursés en USD
Réponse rapide 283, 765,971 63.69 %
1ère allocation pour crises sous-financées 118, 103,025 26.51 %
2nde allocation pour crises sous-financées 43, 032,683 9.66 %
Crises sous-financées 664,470 0.15 %
Total 445, 566,149 100 %
D. FINANCÈMENTS PAR PAYS
1. Total dès le 01-03-2006 au 28-06-2007
Pays Fonds Déboursés en USD Pourcentage du Total
RDC 74, 587,128 16.74 %
Soudan 46, 094,099 10.35 %
Afghanistan 35, 907,573 8.06 %
Kenya 29, 130,975 6.54 %
Somalie 25, 856,338 5.80 %
Sri Lanka 18, 944,099 4.25 %
91
Ethiopie 17, 073,069 3.83 %
Tchad 16, 701,907 3.75 %
Burundi 12, 569,847 2.82 %
Cote d'Ivoire 11, 929,035 2.68 %
Guinée 11, 766,908 2.64 %
Mozambique 11, 162,981 2.51 %
Liban 10, 676,248 2.40 %
République de Centrafrique 10, 172,067 2.28 %
République Démocratique de Corée 8, 098,577 1.82 %
Erythrée 7, 885,305 1.77 %
Angola 7, 716,263 1.73 %
Iraq 7, 531,949 1.69 %
Territoires occupés de Palestine 7, 355,351 1.65 %
Uganda 7, 000,000 1.57 %
Timor-Leste 6, 638,924 1.49 %
Liberia 6, 183,236 1.39 %
Niger 5, 503,823 1.24 %
Myanmar 4, 158,717 0.93 %
Zimbabwe 3, 999,963 0.90 %
Burkina Faso 3, 796,080 0.85 %
Djibouti 3, 480,925 0.78 %
Madagascar 3, 431,553 0.77 %
Indonésie 3, 159,906 0.71 %
Haïti 3, 000,545 0.67 %
Congo 2, 881,702 0.65 %
Philippines 2, 598,305 0.58 %
Yémen 2, 432,110 0.55 %
Colombie 2, 220,939 0.50 %
Mauritanie 2, 075,604 0.47 %
Bolivia 2, 000,000 0.45 %
Mali 1, 985,598 0.45 %
92
Guinée-Bissau 1, 361,531 0.31 %
République Unie de Tanzanie 1, 200,061 0.27 %
République Arabe de Syrie 1, 177,096 0.26 %
Bangladesh 1, 000,000 0.22 %
Jordan 1, 000,000 0.22 %
Namibie 999,999 0.22 %
Cameroun 500,000 0.11 %
Zambie 500,000 0.11 %
Tadjikistan 119,814 0.03 %
Total 445, 566,149 100 %
Annexe II Table 12 : Recipient agency distribution (direct funding only) (Abby Stoddard, Katherine Haver, Adele Harmer, “Operational Consequences of Reform Project”,pp. 16-17)
Year Total UN % NGO/IFCR/ICRC
% Govt/other %
2000 2,005,706,588 1,363,110,449 68% 438,957,853 22% 203,638,286 10% 2001 3,821,387,094 1,830,781,297 48% 973,543,827 25% 1,017,061,970 27% 2002 5,158,004,401 3,218,821,977 62% 1,444,193,670 28% 494,988,754 10% 2003 7,758,750,666 4,837,465,317 62% 1,436,419,284 19% 1,484,866,065 19% 2004 4,737,945,760 2,726,463,208 58% 1,655,876,974 35% 355,605,578 8% 2005 13,140,084,301 4,977,732,774 38% 6,393,679,138 49% 1,768,672,389 13% 2006 7,222,750,860 4,565,033,058 63% 2,069,385,055 29% 588,332,747 8% Totals 43,844,629,670 23,519,408,080 54% 10,381,195,551 24% 4,030,860,250 9%
UN NGO/IFCR/ICRC Govt/other Avg % change 00-05 - 8% 24% 43% % change 05-06 67% - 41% - 39% Avg % change 00-04 - 2% 20% 34% % change 04-06 10% - 18% - 31%
93