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Oncologie DOI 10.1007/s10269-014-2371-5 FMC-CASUISTIQUE / CME DOSSIER Article de J. Ciccolini Question n o 1. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) exacte(s) concernant les déterminants moléculaires et génétiques d’efficacité et de toxicité du 5-fluorouracile ? A – La surexpression de la thymidylate-synthase (TS), principale cible pharmacologique du 5-FU, est généralement asso- ciée à un phénotype de résistance aux fluoropyrimidines selon Lenz et Popat. B – La thymidine phosphorylase (TP) est impliquée dans l’activation de la capécitabine en 5-FU puis du 5-FU en FdUMP et également dans la néoangiogenèse selon Ciccolini. C – Les dérégulations affectant la CDA, une des trois enzymes hépatiques participant à l’activation de la capécitabine en 5-FU, pourraient, en cas d’acquisition d’un phénotype de type ultrarapide, occasionner des toxicités sévères parfois mortelles. D – Le gène codant pour la CDA est très polymorphe avec soit un gain d’activité (statut PM), soit une perte d’activité enzymatique (statut UM). E – Caronia a montré qu’une délétion dans la région promoteur du gène CEA était un marqueur associé aux toxicités de type syndrome main–pied. Article de E. Gamelin Question n o 2. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) inexacte(s) concernant la dihydropyrimidine- déshydrogénase (DPD) ? A – La DPD est l’enzyme majeure du catabolisme des fluoropyrimidines. Elle intervient dans la deuxième étape de leur métabolisme. Un déficit de son activité amène un risque accru de toxicité aiguë. B – L’activité de la DPD suit une courbe de Gauss dans la population générale. Elle est soumise à un polymorphisme génétique à transmission autosomique codominante qui est à l’origine de déficits enzymatiques majeurs. C – Les SNP (single nucleotide polymorphism) jouent un rôle majeur dans la tolérance des médicaments anticancers, et plus de 13 000 SNPs ont été rapportés au niveau du gène de la DPD, la plupart sont silencieux, et une quinzaine sont situés à des endroits majeurs pour l’activité de l’enzyme. D – Pour le dépistage des patients déficitaires en DPD, il y a deux approches : phénotypique et génotypique, l’enzyme ou le gène. L’approche phénotypique présente une plus grande spécificité, mais une plus faible sensibilité à l’inverse de l’approche génotypique. La combinaison des deux approches permet d’atteindre, selon Boisdron-Celle, une excel- lente spécificité et sensibilité. E – L’étude EUDRACT a comparé, avant traitement à base de 5-FU, deux cohortes de patients atteints de cancer du côlon, l’une avec recherche d’un déficit en DPD et l’autre non. Dans ce dernier groupe, traité par FOLFOX, un patient a présenté une toxicité polyviscérale amenant son décès. Un déficit complet en DPD a été rétrospectivement confirmé. Médecine de précision et cancer Precision Medicine and Cancer © Springer-Verlag France 2014 Correspondance : [email protected]

Médecine de précision et cancer; Precision medicine and cancer;

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OncologieDOI 10.1007/s10269-014-2371-5

FMC-CASUISTIQUE / CME DOSSIER

Article de J. Ciccolini

Question no 1. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) exacte(s) concernant les déterminants moléculaires et génétiques d’efficacité et de toxicité du 5-fluorouracile ?

A – La surexpression de la thymidylate-synthase (TS), principale cible pharmacologique du 5-FU, est généralement asso-ciée à un phénotype de résistance aux fluoropyrimidines selon Lenz et Popat.

B – La thymidine phosphorylase (TP) est impliquée dans l’activation de la capécitabine en 5-FU puis du 5-FU en FdUMP et également dans la néoangiogenèse selon Ciccolini.

C – Les dérégulations affectant la CDA, une des trois enzymes hépatiques participant à l’activation de la capécitabine en 5-FU, pourraient, en cas d’acquisition d’un phénotype de type ultrarapide, occasionner des toxicités sévères parfois mortelles.

D – Le gène codant pour la CDA est très polymorphe avec soit un gain d’activité (statut PM), soit une perte d’activité enzymatique (statut UM).

E – Caronia a montré qu’une délétion dans la région promoteur du gène CEA était un marqueur associé aux toxicités de type syndrome main–pied.

Article de E. Gamelin

Question no 2. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) inexacte(s) concernant la dihydropyrimidine- déshydrogénase (DPD) ?

A – La DPD est l’enzyme majeure du catabolisme des fluoropyrimidines. Elle intervient dans la deuxième étape de leur métabolisme. Un déficit de son activité amène un risque accru de toxicité aiguë.

B – L’activité de la DPD suit une courbe de Gauss dans la population générale. Elle est soumise à un polymorphisme génétique à transmission autosomique codominante qui est à l’origine de déficits enzymatiques majeurs.

C – Les SNP (single nucleotide polymorphism) jouent un rôle majeur dans la tolérance des médicaments anticancers, et plus de 13 000 SNPs ont été rapportés au niveau du gène de la DPD, la plupart sont silencieux, et une quinzaine sont situés à des endroits majeurs pour l’activité de l’enzyme.

D – Pour le dépistage des patients déficitaires en DPD, il y a deux approches : phénotypique et génotypique, l’enzyme ou le gène. L’approche phénotypique présente une plus grande spécificité, mais une plus faible sensibilité à l’inverse de l’approche génotypique. La combinaison des deux approches permet d’atteindre, selon Boisdron-Celle, une excel-lente spécificité et sensibilité.

E – L’étude EUDRACT a comparé, avant traitement à base de 5-FU, deux cohortes de patients atteints de cancer du côlon, l’une avec recherche d’un déficit en DPD et l’autre non. Dans ce dernier groupe, traité par FOLFOX, un patient a présenté une toxicité polyviscérale amenant son décès. Un déficit complet en DPD a été rétrospectivement confirmé.

Médecine de précision et cancerPrecision Medicine and Cancer

© Springer-Verlag France 2014

Correspondance : [email protected]

2 Oncologie

Article de F. Bibeau

Question no 3. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) exacte(s) concernant le phénomène d’ADCC, polymorphisme du récepteur Fcγ et les conséquences en termes de développement des thérapeutiques ciblées ?

A – La digestion par la pepsine scinde l’anticorps en deux fragments F(ab’)2 et Fc. La digestion par la papaïne coupe l’an-ticorps au-dessus de la région charnière et permet d’obtenir trois fragments : un fragment Fc et deux fragments Fab.

B – Pour éviter les effets indésirables des anticorps monoclonaux murins, on a construit des anticorps ne comportant que 33 % de protéines murines, et dont les domaines constants sont murins et les domaines variables sont humains.

C – Selon Weng, l’ADCC est induit par l’interaction entre la partie Fc de l’anticorps lié à la cellule tumorale et les récep-teurs Fc (FcγR) des cellules effectrices.

D – Cartron et Weng ont démontré que la réponse au rituximab, anticorps de type IgG1 dirigé contre l’antigène CD20 et essentiellement utilisé dans les lymphomes B folliculaires, était liée aux polymorphismes des gènes FcγRIIIa et FcγRIIa.

E – Pour optimiser les effets médiés par le fragment Fc dans le cadre de l’ADCC, on a administré des cytokines (IL2, INFγ, GMCSF) ou la thalidomide avec le rituximab dans les LNH dans un essai clinique de phase II. Reddy et Khan ont montré des résultats significatifs d’augmentation des réponses objectives.

Article de M.N. Paludetto

Question no 4. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) inexacte(s) concernant l’impact du génotype sur la tolérance à l’irinotécan et au cisplatine ?

A – Les neutropénies et/ou diarrhées sévères liées à l’irinotécan sont corrélées aux concentrations plasmatiques de SN-38, métabolite de l’irinotécan et, selon Raymond, sont plus fréquemment observées chez les patients présentant une hyperbilirubinémie libre.

B – Fréquemment, l’hyperbilirubinémie est caractérisée par un polymorphisme génétique au niveau du promoteur du gène de l’UGT1A1, responsable d’une baisse de l’activité enzymatique de glucuronidation de la bilirubine.

C – Freyer a montré que le génotypage d’UGT1A1 en pratique clinique permet de sélectionner les patients, atteints de cancers colorectaux, éligibles à de plus fortes doses d’irinotécan que celles proposées par l’AMM.

D – Peters indique qu’il n’y a pas de lien entre les glutathion-s-transférases (GST) et l’ototoxicité du cisplatine.E – Mukherjea a montré que la néphro- et l’ototoxicité du cisplatine sont liées à l’accumulation d’adduits de platine au

niveau des tubules proximaux des néphrons et de l’oreille interne vraisemblablement sous l’effet d’un transporteur membranaire qui pourrait être la mégaline.

Article de A. Lièvre

Question no 5. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) exacte(s) concernant des mutations de KRAS aux mutations de RAS : vers une meilleure définition de la réponse aux anticorps anti-EGFR dans le cancer colorectal métastatique ?

A – Deux études randomisées (Amado, Karapetis) ont montré que seuls les patients ayant une tumeur KRAS non muté bénéficient de l’action des anticorps anti-EGFR en termes de réponse et de survie.

B – Cette mutation concerne les codons 12 et 13 de l’exon 2 du gène KRAS, et il y a sept mutations au total.C – Récemment, l’ANSM a indiqué dans l’étude OPUS un effet délétère du cetuximab associé à une chimio thérapie à

base d’oxaliplatine chez les patients porteurs d’une mutation de RAS.D – Dans l’étude PEAK, Rivera a comparé en première ligne FOLFOX‑panitumumab à FOLFOX‑bevacizumab chez

285 patients KRAS exon 2 sauvage. Il observe une amélioration significative de la survie sans progression et de la survie globale en faveur du bras panitumumab chez les patients RAS sauvage, tandis que les patients KRAS exon 2 sauvage porteurs d’une mutation minoritaire de RAS n’obtiennent aucun bénéfice.

E – Vogelstein a détecté l’apparition d’une mutation de KRAS chez 38 % des patients initialement KRAS sauvage. Ces mutations apparaissent en moyenne après cinq à six mois de traitement par panitumumab.

Oncologie 3

Réponses : Question no 1 : A, B, C, E ; Question no 2 : A, D ; Question no 3 : A, C, D ; Question no 4 : D ; Question no 5 : A, B, C, D, E ; Question no 6 : C, D.

Article de G. Meurice

Question no 6. Quelle(s) est (sont) la (les) proposition(s) inexacte(s) concernant la médecine moléculaire ?

A – L’analyse du profil moléculaire permet de déterminer les éventuelles prédispositions d’un patient à une pathologie, ses réactions vis-à-vis d’un traitement et de médicaments.

B – Les puces à ADN ont permis l’analyse à grande échelle de l’expression des gènes et de la structure du génome puis des séquenceurs de nouvelle génération.

C – On peut, selon Hindorff, obtenir un profil génétique établi sur 5 000 à 10 000 points dans le génome.D – L’arrivée des séquenceurs de nouvelle génération ne permet pas de supplanter les puces à ADN (microarray).E – Selon le « 1000 Genomes Project Consortium », chaque nouvelle séquence du génome humain pourrait avoir entre

100 000 et 300 000 nouvelles variations polymorphiques de type SNP (single nucleotide polymorphism) et un peu moins de 1 000 mutations somatiques.

Ces QCM ont été réalisés par Maurice Schneider, centre Antoine‑Lacassagne, Nice