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Article original Médiation de l’eau dans l’autisme : Joachim ou la construction d’une première peau psychique The mediation of water in autism: Joachim or the construction of an initial psychic skin A. Brun Institut de psychologie, université Lumière Lyon-2, 5, avenue Pierre-Mendès-France, CP 11, 69676 Bron cedex 06, France Reçu le 7 décembre 2004 ; accepté le 1 avril 2005 Résumé Le cadre des jeux d’eau — pièce avec bassin peu profond et zone sèche, avec robinets, tuyaux-douche, miroir et jouets — constitue une indication particulièrement intéressante dans le traitement de l’autisme : le travail thérapeutique est en effet axé autour de la récupération d’un premier sentiment d’enveloppe, grâce à l’exploration des caractéristiques spécifiques de ce cadre, qui correspondent pour l’enfant à la pro- jection de son enveloppe corporelle dans l’espace. La médiation de l’eau permet notamment d’effectuer un travail d’intégration sensorielle fondamental pour l’enfant autiste, à partir de la dimension sensorielle de cet espace thérapeutique et des différentes modalités des liens aux thérapeutes, qui vont se déployer dans tous les registres sensoriels et passent par des accordages affectifs. Cet article mettra particulièrement l’accent sur le rôle joué par l’interaction du visuel et du tactile, par l’exploration de la bouche, par le travail de l’enveloppe sonore, et par l’exploration du cadre matériel dans le travail de construction de la peau psychique chez un enfant autiste. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract The structure of water-play — a room with a shallow pool and a dry area, equipped with taps, shower-pipes, mirror and toys — make up a particularly interesting indication in the treatment of autism. The therapeutic work is actually centred around recovering an initial feeling of an envelope, thanks to the exploration of specific characteristics of this structure, which correspond for the child to the spatial projection of his physical envelope. The mediation of water enables notably an effort of sensory integration to be made, which is fundamental for the autistic child, from the sensory dimension of this therapeutic space, the various methods of linking with the therapists, who will make use of all the sensory registers, through to emotional chords. This article will stress the role played by the interaction of visual, tactile, oral exploration; by the work on the sound envelope and by the exploration of the material framework in the task of constructing a psychic skin in an autistic child. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Autisme ; Médiation thérapeutique ; Enveloppe psychique ; Sensorialité Keywords: Autism; Therapeutic mediation; Psychic envelope; Sensoriality D. Anzieu [1] rappelle dans Le Moi-Peau que l’interdit primaire du toucher représente pour tout un chacun la condi- tion première de l’accès à la symbolisation et correspond à la nécessité pour l’enfant de décoller son corps de celui de ses parents. Mais, cet interdit fondateur n’a pu se mettre en place dans l’autisme qui ne se caractérise pas seulement par l’absence de constitution d’un Moi-peau, mais, de façon encore plus archaïque, par l’absence de constitution du pre- mier contenant, de nature rythmique, comme l’a indiqué G. Haag [9]. L’expérience clinique de l’autisme montre qu’il Adresse e-mail : [email protected] (A. Brun). Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 53 (2005) 200–205 http://france.elsevier.com/direct/NEUADO/ 0222-9617/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.neurenf.2005.04.002

Médiation de l'eau dans l'autisme : Joachim ou la construction d'une première peau psychique

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Article original

Médiation de l’eau dans l’autisme :Joachim ou la construction d’une première peau psychique

The mediation of water in autism:Joachim or the construction of an initial psychic skin

A. Brun

Institut de psychologie, université Lumière Lyon-2, 5, avenue Pierre-Mendès-France, CP 11, 69676 Bron cedex 06, France

Reçu le 7 décembre 2004 ; accepté le 1 avril 2005

Résumé

Le cadre des jeux d’eau — pièce avec bassin peu profond et zone sèche, avec robinets, tuyaux-douche, miroir et jouets — constitue uneindication particulièrement intéressante dans le traitement de l’autisme : le travail thérapeutique est en effet axé autour de la récupération d’unpremier sentiment d’enveloppe, grâce à l’exploration des caractéristiques spécifiques de ce cadre, qui correspondent pour l’enfant à la pro-jection de son enveloppe corporelle dans l’espace. La médiation de l’eau permet notamment d’effectuer un travail d’intégration sensoriellefondamental pour l’enfant autiste, à partir de la dimension sensorielle de cet espace thérapeutique et des différentes modalités des liens auxthérapeutes, qui vont se déployer dans tous les registres sensoriels et passent par des accordages affectifs. Cet article mettra particulièrementl’accent sur le rôle joué par l’interaction du visuel et du tactile, par l’exploration de la bouche, par le travail de l’enveloppe sonore, et parl’exploration du cadre matériel dans le travail de construction de la peau psychique chez un enfant autiste.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

The structure of water-play — a room with a shallow pool and a dry area, equipped with taps, shower-pipes, mirror and toys — make up aparticularly interesting indication in the treatment of autism. The therapeutic work is actually centred around recovering an initial feeling of anenvelope, thanks to the exploration of specific characteristics of this structure, which correspond for the child to the spatial projection of hisphysical envelope. The mediation of water enables notably an effort of sensory integration to be made, which is fundamental for the autisticchild, from the sensory dimension of this therapeutic space, the various methods of linking with the therapists, who will make use of all thesensory registers, through to emotional chords. This article will stress the role played by the interaction of visual, tactile, oral exploration; bythe work on the sound envelope and by the exploration of the material framework in the task of constructing a psychic skin in an autistic child.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Autisme ; Médiation thérapeutique ; Enveloppe psychique ; Sensorialité

Keywords: Autism; Therapeutic mediation; Psychic envelope; Sensoriality

D. Anzieu [1] rappelle dans Le Moi-Peau que l’interditprimaire du toucher représente pour tout un chacun la condi-tion première de l’accès à la symbolisation et correspond à lanécessité pour l’enfant de décoller son corps de celui de ses

parents. Mais, cet interdit fondateur n’a pu se mettre en placedans l’autisme qui ne se caractérise pas seulement parl’absence de constitution d’un Moi-peau, mais, de façonencore plus archaïque, par l’absence de constitution du pre-mier contenant, de nature rythmique, comme l’a indiquéG. Haag [9]. L’expérience clinique de l’autisme montre qu’ilAdresse e-mail : [email protected] (A. Brun).

Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 53 (2005) 200–205

http://france.elsevier.com/direct/NEUADO/

0222-9617/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.neurenf.2005.04.002

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serait prématuré d’inviter d’emblée à la séparation corporelleun enfant autiste qui a souvent tendance à aller se coller àl’adulte et qu’une mise à distance physique risque d’être vécuepar l’enfant comme un arrachement qui provoquera des agrip-pements sensoriels aux objets. Cependant, il serait aussi dom-mageable pour l’enfant de laisser perdurer ces contacts adhé-sifs sans tenter de les faire évoluer. Comment donc amorcerun travail thérapeutique susceptible d’aider ces enfants à récu-pérer une première peau psychique (E. Bick [4]), un premiersentiment d’enveloppe circulaire, condition préalable à un pro-cessus d’individuation ?

Un levier thérapeutique peut être le cadre spécifique desjeux d’eau qui requiert, dans un premier temps, l’implicationdu corps des thérapeutes dans le lien à l’enfant : il s’agit para-doxalement de travailler à partir du corps pour pouvoir envi-sager la fin du corps à corps et les prémices d’un processusde séparation. Plus précisément, le travail thérapeutique effec-tué dans le cadre des jeux d’eau visera à procéder à une inté-gration sensorielle, défaillante dans la pathologie autistique,que D. Meltzer [15] caractérise par le démantèlement, c’est-à-dire par l’incapacité de faire des liens entre les différentesexpériences sensorielles, autrement dit, par la dissociation desdiverses composantes de la sensorialité. Cette intégration sen-sorielle s’effectuera pour l’enfant autiste principalement à par-tir de la dimension sensorielle de l’espace thérapeutique etdes différentes modalités du lien des thérapeutes à l’enfantqui va précisément se déployer dans tous les registres senso-riels : nous aborderons successivement le registre du visuelet du tactile, puis celui de l’auditif, et enfin celui plus globalde l’exploration du cadre matériel.

Comment se présente le cadre thérapeutique des jeux d’eau,parfois appelé pataugeoire ? Il s’agit d’une pièce carrelée avecun bassin peu profond et une zone sèche, bassin muni de robi-nets et de tuyaux douche, surmonté d’un grand miroir recou-vrant la quasi-totalité du mur sur lequel s’appuie la patau-geoire. L’enfant peut disposer de différents contenants —cuvettes, récipients, flacons... — de jouets comme des balles,des baigneurs, des objets flottants ou immersibles et enfin,d’un biberon avec tétine. Ce cadre thérapeutique est doncconstruit autour de différentes oppositions binaires,dedans/dehors, sec/mouillé, adultes habillés et enfant enmaillot de bain. Les soignants peuvent se mouvoir autour dubassin et intervenir corporellement. Quelle est l’origine etl’histoire de cette technique de la pataugeoire ?

1. La pataugeoire : origine, histoire, théories

L’eau est utilisée depuis l’antiquité dans une perspectivethérapeutique, pour traiter les troubles mentaux. En Grèce, àpartir du VIIIe siècle avant Jésus-Christ, la pratique de l’hydro-thérapie s’effectuait dans des « ascleipeia », centres de soinstenus par des disciples d’Asclépios ; à la suite d’immersionsdans des piscines sacrées, les patients espéraient être guérisde leur affection grâce à la bienveillance des dieux [5, p. 4].À la Renaissance, le thermalisme connut un grand essor, puis

la médication à partir de l’eau trouve un regain d’intérêt auXVIIIe siècle, « dans la perspective des traitements ″humec-tants et rafraîchissants″ qui culminent en France vers 1760,avec l’Essai sur les affections vaporeuses des deux sexes dePomme » [16, p. 124], l’un des médecins les plus célèbres deson temps ; celui-ci prescrivait des bains tièdes prolongés afind’« humidifier »les fibres nerveuses desséchées. L’hydrothé-rapie était donc considérée au XVIIIe siècle comme l’un destraitements les plus efficaces des « maladies nerveuses » [5,p. 9].

Au XIXe siècle, avec la naissance de l’asile thérapeutique,les traitements hydrothérapiques se généralisent, promus parles aliénistes, et ils deviennent « le traitement par excellencede l’aliénation mentale » : selon Pinel, « les bains, dans lafolie sont un puissant moyen de guérison : un établissementbien entendu doit être pourvu de toute espèce de bains, avecune sorte de profusion » [16, p. 321]. Le « bain surprise » quiconsistait à plonger un malade dans l’eau froide pour traiterses idées délirantes, qualifié par Esquirol de « bain de ter-reur », connut alors un succès éphémère. Cette hydrothérapiescientifique, qui se développe au XIXe siècle, concerne tousles types d’aliénation et peut avoir une action révulsive, toni-que ou, au contraire, sédative. Ce succès de l’hydrothérapiedurera jusqu’à la première guerre mondiale et régressera aprèsl’introduction des traitements chimiothérapiques et de diffé-rentes formes de psychothérapies. Actuellement, même si lestraitements hydrothérapiques ont pu être réintroduits dans cer-tains lieux de soin institutionnel, une relative désaffection pourl’approche corporelle et hydrothérapique apparaît de nos joursdans le soin psychiatrique [5, p. 72].

En ce qui concerne les enfants, un réseau d’hospitalisationdes « enfants idiots » apparaît à la fin du XIXe siècle et dansles premières années du XXe siècle et, dans ces services, onapplique un traitement médicopédagogique qui comprendl’hydrothérapie [16, p. 398]. De nos jours, dans les servicesde pédopsychiatrie, la médiation par l’eau est souvent utili-sée sous diverses formes. Différente du travail thérapeutiqueen piscine ou en baignoire, la médiation par l’eau en patau-geoire — jeu d’eau sans immersion et en présence d’un miroir,avec possible projection d’eau en jet et, éventuellement, desmassages, des enveloppements, des pack — paraît particuliè-rement indiquée pour le traitement des enfants psychotiqueset autistes. La théorisation de la technique thérapeutique dela pataugeoire, que P. Lafforgue [13] et A. Gomez-Espinoza[8] ont notamment conceptualisée, s’articule autour de troisaxes principaux : la pataugeoire permet d’abord de réactua-liser le rapport des enfants avec le monde liquide des eauxmaternelles, soit avec les origines de la naissance mais aussiavec le vécu du bébé qui reçoit les soins maternels. Ensuite,le cadre de la pataugeoire favorise la différenciation progres-sive d’un dehors et d’un dedans, d’un contenant et d’uncontenu, et, par là même, le début de la construction d’uneidentité corporelle en référence avec la théorie du Moi-Peaude D. Anzieu [1]. P. Lafforgue [13] insiste par ailleurs surl’utilisation de la projection de l’eau en jet par un tuyausphinctérisable. Enfin, les angoisses archaïques peuvent être

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travaillées par la technique de la pataugeoire qui apparaîtcomme une phase de préparation à des thérapies plus classi-ques.

2. Illustration clinique : dispositif thérapeutique

En ce qui concerne plus spécifiquement le cadre thérapeu-tique qui sert de support à cette recherche sur la médiation del’eau et l’autisme, la pièce des jeux d’eau se situe dans uninternat thérapeutique pour enfants et la séance de Joachim,enfant autiste de sept ans, est assurée par trois soignantes, laréférente de Joachim dans l’institution, l’orthophoniste et unestagiaire psychologue qui prend des notes. Cette séance heb-domadaire d’une durée de 45 minutes se double d’un tempsde supervision que j’assurai en tant qu’intervenante exté-rieure à cette institution. Ainsi, ce dispositif thérapeutiquecomprend une double enveloppe selon la conceptualisationde D. Anzieu [2], un feuillet externe tourné vers le mondeextérieur soit l’enveloppe d’excitation où se vivent les inte-ractions sensorielles et émotionnelles entre enfant et soi-gnants, et un feuillet interne tourné vers le monde intérieursoit l’enveloppe d’inscription où il s’agit de mettre en sens cequi se joue ici, principalement à un niveau corporel ; cetteenveloppe d’inscription, est constituée d’abord par l’écriturede l’observatrice au sein du cadre thérapeutique des jeux d’eaupuis par l’écriture des trois soignantes, postérieure au tempshebdomadaire de prise en charge et enfin, par l’élaborationdans le cadre de la supervision. C’est dans cet emboîtemententre l’exploration de l’excitation d’une part, l’avènementd’un sens d’autre part, que se situe la dimension thérapeuti-que de la médiation des jeux d’eau au sein d’un dispositif quireflète l’emboîtement originaire des deux enveloppes d’exci-tation et de signification constitutives de la psyché.

Joachim est un enfant autiste, sans langage qui, à sept ans,n’a pas encore acquis la propreté sphinctérienne. Il vit dansle cadre de l’internat durant la semaine et retourne chez sesparents le week-end. Il se caractérise à cet âge par un retraitmassif et par sa propension à enduire de salive les objets etdes bouts de papier qu’il arrache sur des catalogues. On captedifficilement son regard. À cette époque, les parents de Joa-chim se disent très découragés et déprimés par leur enfantqui leur semble installé dans une immuabilité permanente.

Son atelier thérapeutique avec la médiation de l’eau a durétrois ans jusqu’au départ de Joachim en lieu de vie mais jecentrerai ma réflexion sur la première année durant laquelles’est effectué pour cet enfant un travail de récupération de lapremière peau. L’exemple de Joachim illustrera ce proces-sus, mais cette recherche sur la médiation de l’eau dansl’autisme s’appuie aussi sur le travail thérapeutique d’autresenfants.

3. Interaction du visuel et du tactile dans le travailde récupération de la première peau

La première année, l’atelier commence souvent par le net-toyage de Joachim qui porte encore des couches. Il manipule

peu les douchettes et n’utilise aucun objet et, la majeure par-tie du temps est consacrée au douchage de l’enfant qui pré-sente spontanément son dos à sa référente : ces moments dedouchage surtout de l’axe vertical du dos s’accompagnent laplupart du temps d’un échange intense de regard dans le miroirentre l’enfant et sa référente, alors que l’enfant se trouve assisou debout dans la pataugeoire devant le miroir et Joachimpeut aussi suçoter son pouce. L’utilisation de la douche alterneavec les temps de massage que l’enfant préfère axés dans lesens vertical de la colonne vertébrale mais, Joachim solliciteaussi un toucher simultané de la poitrine et du dos.

Cet arrosage du dos et ces massages devant le miroir com-binent donc le contact tactile au niveau de la zone du dosavec l’interpénétration des regards, dans la glace. C’est pré-cisément cette alliance des sensations tactiles du dos à la péné-trance du regard qui fonde le premier sentiment d’enveloppecomme le montre G. Haag [10,11] parce que cette concomi-tance entre interpénétration des regards et éprouvé tactile dudos donnerait la sensation–sentiment que quelque chose duregard de l’autre rentre dans les yeux pour organiser « la peaudu dos » et créer « l’espace en arrière ». De plus, en suçantson pouce, Joachim retrouve la première intégration senso-rielle effectuée par le bébé pendant la tétée, yeux dans lesyeux et mamelon/pouce dans la bouche avec le soutien tac-tile du dos par la mère, soit la structure rythmique primor-diale qui conditionne la formation d’un premier sentimentd’enveloppe, lié au va et vient des projections et introjectionsdans ces échanges mère/enfant, ici thérapeute/enfant.

Cette interaction première entre visuel et tactile, qui a étémise en évidence par S. Freud1, se travaille aussi, de façonoriginale, à partir d’une utilisation tout à fait spécifique dumiroir dans le cadre thérapeutique des jeux d’eau : l’enfantpeut en effet arroser le miroir avec le jet d’eau et brouillerainsi l’image.

Au cours de la première période de douchage et de mas-sage du dos, Joachim se colle au miroir et le mouille avec sasalive à la recherche d’un contact adhésif et de l’effet cyclopequi correspond à la suppression de la tridimensionnalité. Ilindique aussi son désir que les adultes collent la douchettecontre le miroir et il regarde l’eau s’écouler contre la glace.

Puis, Joachim parvient progressivement à manipuler lui-même la douchette et il joue alors beaucoup à arroser le miroir,à distance cette fois ; il tente visiblement de toucher et debrouiller sa propre image et celle des soignantes dans la glaceet il utilise ce brouillage comme un processus d’indifféren-ciation entre moi et non moi.

Cette possibilité offerte par les jeux d’eau de brouillerl’image dans le miroir jouerait à mon sens un rôle fondamen-tal pour un enfant autiste : j’avancerai l’hypothèse que cebrouillage de l’image pourrait constituer une première formed’emprise sur l’image pour un enfant autiste, précisément endifficulté pour s’approprier et investir les images offertes parla perception visuelle. Dans la pathologie autistique, G. Laval-

1 « Il en est de même des impressions visuelles, qui, en dernière analyse,peuvent être ramenées aux impressions tactiles », S. Freud [6].

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lée [14] montre que l’enveloppe visuelle du Moi n’est pasconstituée et que tout se passe pour l’enfant autiste commes’il voyait tout et rien à la fois sans pouvoir accommoder saperception sur tel ou tel objet. La réception de l’image n’esten effet pas passive, elle relève d’un mouvement projectifactif, au cours duquel le sujet projette au dehors, en directiondu stimulus visuel, les représentations inconscientes éveilléespar ce stimulus, qui donnent sens aux images perçues, avantd’introjecter la perception transformée et symbolisée en signi-fiant visuel. Mais, en l’absence de tout processus de projec-tion, l’enfant autiste traverse le monde du regard et la percep-tion autistique semble omnivoyante, difficile à focaliser surtelle ou telle image, avec des interruptions brutales de barriè-res de défense contre les stimuli, soit des phases de retraitmassif.

C’est bien dans ce collage perceptif que se situe Joachimdans un premier temps quand il se colle au miroir et resteainsi dans le registre bidimensionnel, sans projection possi-ble, ce qui correspond aussi à une opacification de son écrande vision. Mais, quand il commence à brouiller activementl’image dans le miroir et à attendre ensuite son retour en ces-sant d’arroser le miroir jusqu’à la reconstitution de l’image,l’enfant découvre son pouvoir sur l’image, sa capacité à lafaire disparaître et réapparaître. Du coup, celui-ci peut pro-gressivement se focaliser sur des images dans son champvisuel, la sienne propre et celle des soignantes, images qu’ilpeut faire disparaître et réapparaître dans un retournementpassif/actif qui permet à l’enfant d’exercer son activité sur lestimulus visuel, d’intervenir sur l’image et même, de l’atta-quer, de la refuser.

Dans cette dynamique, après environ six mois de travail,Joachim éprouve moins le besoin de solliciter l’arrosage dudos accompagné de l’échange des regards et il commence àrechercher des contenants moins vastes que la pataugeoirepour y lover son corps. Il tente d’abord avec acharnement derentrer dans une cuvette trop petite pour lui ; sa référente luipropose alors une baignoire de bébé dans laquelle il a plaisirà s’installer à chaque séance.

Si Joachim peut désormais avoir la représentation d’uneinclusion possible dans un contenant, il n’a pas encore acquisla différence entre petit et grand ; l’enfant se situe alors dansun espace d’inclusions réciproques, espace primitif réduit àune surface plane qui postule l’identité du dedans et du dehors,du contenu et du contenant, du petit et du grand, selon laconceptualisation de Sami-Ali [18]. Mais, cette recherchenouvelle d’inclusion de son corps dans des contenants accom-pagnée de l’apparition simultanée de différents jeux de trans-vasement se présente comme un signe de la constitution d’unpremier sentiment d’enveloppe.

Cette phase a coïncidé pour Joachim avec une rechercheactive de serrage dans les bras de sa référente : il contempled’abord sa propre image et celle de sa référente dans la glace,puis il se précipite dans les bras de sa référente, donc tournele dos à la glace. Il retourne aussitôt devant le miroir sem-blant à la fois interrogatif et dépité par le fait de perdre l’imagequand il embrasse sa référente. Il répète à maintes reprises

cette expérience, a même l’idée de venir à reculons vers saréférente, pour garder l’image mais, en se jetant finalementde face dans les bras de l’adulte, il se retourne forcément etparaît chaque fois surpris de perdre alors l’image qu’il cher-che à retrouver.

Cette quête de l’image perdue constitue une étape trèsimportante dans l’évolution de Joachim puisqu’elle a mar-qué pour cet enfant jusqu’alors relativement indifférent à sonchamp de vision, une première prise de conscience d’un man-que dans la perception, d’une disparition qui s’accompagned’un embryon de représentation puisque l’enfant cherche sanscesse l’image disparue. Ce qui est tout à fait remarquable dansce processus, c’est qu’il retrouve l’image quand il perd lecontact corporel avec sa référente : pour pouvoir percevoirson image, il doit donc renoncer au corps à corps avec saréférente. Avec la prise de conscience que l’image subsistederrière son dos dans un espace en arrière et en profondeur,l’enfant rentre ainsi dans un espace tridimensionnel, et ne sesitue plus dès lors seulement dans un espace plan sans pro-fondeur où se juxtaposeraient des objets bidimensionnels.

La phase suivante a consisté pour l’enfant à beaucoup jouerà brouiller les images des soignantes dans le miroir en seretournant sans cesse pour voir si ces dernières restaient pré-sentes dans la pièce même s’il effaçait leur image dans lemiroir.

Il vérifie alors que les soignantes n’ont pas disparu avecleur image autrement dit, qu’il ne les a pas détruites dans laréalité. Celles-là ont accompagné ces jeux de Joachimd’expressions de plaisir, de rires ou d’exclamations « cou-cou, tu me retrouves » ou « je suis toujours là mais il n’y aplus mon image dans la glace », et elles ont ainsi transformécette expérience d’attaque destructrice en jeu partagé car Joa-chim a progressivement pu exprimer une grande jubilation àeffacer leur image et à les retrouver ensuite en se retournantde leur côté, dans la réalité de leur présence. Il a ainsi pro-gressivement pris conscience d’une différence entre l’imageattaquée et la présence réelle et bienveillante des soignantes :il pouvait exercer sa destructivité à l’égard de l’image sanspour autant détruire l’objet. Il était d’autant plus importantd’introduire la dimension du plaisir partagé que Joachim avaiteu une mère qui se décrivait comme« très déprimée » aprèssa naissance ce qui correspond à une forme de non survi-vance de l’objet à la destructivité primaire de l’enfant décritepar Winnicott [21]. Ce plaisir partagé dans le jeu a coïncidéavec l’époque où les soignantes ont cessé de se sentir utili-sées comme des parties du corps propre de Joachim en quel-que sorte comme des objets inanimés et, où elles ont pu ren-trer dans une relation plus vivante avec l’enfant. L’évolutiontemporelle de ce jeu marque ainsi le passage de Joachim d’unétat autistique proprement dit au début de la phase symbioti-que selon la terminologie de G. Haag et de ses collaboratri-ces [12].

L’enfant continuera ensuite, durant les trois années, ce jeud’apparition et disparition avec les images, analogue à celuide la bobine, décrit par Freud [7] et il n’éprouvera progressi-vement plus le besoin de se retourner pour vérifier que lessoignantes survivent à l’effacement de leur image.

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Il a donc fallu travailler avec Joachim les correspondancesentre les impressions visuelles et tactiles pour que l’enfantréussisse à se représenter un monde qui ne se réduise pas à labidimensionnalité du corps à corps avec l’objet primaire, maisun monde tridimensionnel qui s’organise en profondeur.

4. Exploration du théâtre de la boucheet travail de l’enveloppe sonore

Cet accès à la tridimensionnalité s’est marqué par l’explo-ration du théâtre de la bouche et par un travail sur l’enve-loppe sonore. Joachim avait eu pendant longtemps une bou-che molle avec beaucoup de salive et il semblait, commenombre d’autistes, amputé de cette zone corporelle : ce phé-nomène évoque l’influence de pictogrammes de rejet (P.Aula-gnier [3]) c’est-à-dire de représentations originaires d’unerelation bouche/sein vécue sur le mode de l’arrachement quiconduit le sujet à s’automutiler de la zone de la bouche. Lecadre des jeux d’eau a permis de mobiliser particulièrementla zone de la bouche.

Ainsi, Joachim a beaucoup rempli puis vidé sa bouche, enalternance, parfois en adoptant une position « à quatre pat-tes » pour aspirer et rejeter l’eau du bain. Par ailleurs, il aimaitboire de l’eau tiède avec laquelle il pouvait même parfoisremplir un biberon dont il se délectait ; les soignantes ontsouvent mis l’accent, à l’adresse de l’enfant, sur la corréla-tion entre son remplissage avec de l’eau et ses fréquentesenvies d’uriner.

Cette exploration de la zone de la bouche a permis à Joa-chim de prendre conscience d’une intériorité et d’une exté-riorité et, au fil du travail de la première année, la bouche del’enfant cesse de paraître molle, non investie, et débordantede salive. G. Haag et S. Tordjman [12] désignent ce proces-sus comme « récupération du museau », et elles le situentdans l’étape de récupération de la première peau au niveau del’image du corps.

Cette exploration de la bouche a été associée à un travailsur le registre sonore.

La production vocale de cet enfant autiste se limitait auxcris mais on pouvait repérer l’existence d’un phrasé avec depossibles variations mélodiques. La présence de l’orthopho-niste a permis à Joachim de vivre l’atelier comme un vérita-ble bain sonore : celle-ci a notamment repris en écho sonoreses lallations tout en les modifiant légèrement par exemple,en jouant sur l’intensité. Elle accompagne aussi son massagedu dos de douces modulations que l’enfant peut reprendre enécho. Quand ce massage s’effectue avec une brosse dure, ellele ponctue d’onomatopées explosives, du type « pic, pic, pic »,alors que le toucher avec le gros pinceau doux se traduit par« Tchou, tchou... ».

Ainsi, le travail d’intégration sensorielle s’appuie ici surla discrimination du dur et du doux, à la fois au niveau dutoucher et au niveau sonore, par la distinction entre sons durset sons doux. Les liens émotionnels passent donc dans cecontexte beaucoup par l’enveloppe sonore, reliant contact par-

tagé de la douceur sur la peau et émission de sonorités dou-ces. On sait à cet égard que dans l’autisme, les sensationsexpriment d’abord les émotions (F. Tustin [20]), ce qui cor-respond d’ailleurs à l’étymologie du mot latin « tangere »,qui signifie à la fois « porter la main sur » et « affecter, émou-voir ».

Enfin, l’orthophoniste a particulièrement effectué des trans-positions du registre sonore dans d’autres modalités senso-rielles par exemple, dans le registre kinesthésique en accom-pagnant les émissions vocales de Joachim de rythmes avecles mains ou de frappés sur l’eau ou de jets d’eau rythmiquesavec la douchette. Elle a aussi introduit différents rythmes etdifférentes intensités sonores.

Il s’agit donc, dans le cadre d’un atelier thérapeutique avecla médiation de l’eau, pour un enfant autiste, de restaurer ladimension de l’accordage mère/enfant décrite par Stern [19],c’est-à-dire d’effectuer des transpositions d’un registre sen-soriel à l’autre. Ainsi, les jeux vocaliques accompagnent nonseulement les liens de communication mais, servent à l’inté-gration de l’image du corps et des représentations spatialescomme le montre G. Haag et ses collaboratrices [12].

5. Exploration de l’espace et des objets :projection de l’enveloppe corporelle dans l’espaceet passage de la bi- à la tridimensionnalité

Ces articulations du corps et de l’espace se manifestentpar l’exploration des particularités de l’espace des jeux d’eauqui correspond à une projection de l’enveloppe corporelle del’enfant dans l’espace. Plusieurs éléments spécifiques du cadredes jeux d’eau peuvent aider à la constitution de ce sentimentd’enveloppe pour l’enfant ; tout d’abord, la différence entrezone sèche et zone mouillée contribue à l’intériorisation d’unelimite qui n’est souvent pas perçue d’emblée par les enfants.

Ainsi, quand Joachim a commencé à intégrer l’idée d’unintérieur et d’un extérieur, il a alors beaucoup essayé d’arro-ser les soignantes à l’extérieur du bassin. Quelque temps plustard apparaissent de nouveaux comportements : il cherche àmarcher sur le rebord de la pataugeoire, puis il en fait le touravec un gant de toilette.

Ce moment de prise de conscience de la matérialité de lalimite du bassin est déterminant chez les enfants autistes, mar-quant la prise de conscience de la limite entre dedans etdehors. L’enfant commence alors souvent à expérimenter lesbords, à tenter d’atteindre le plafond avec le jet, de toucherles murs de côté ou d’explorer les limites de la pièce à l’aidedu ballon.

Autre élément fondamental, le trou d’évacuation et sonbouchon.

Au début, Joachim n’explore pas le trou d’évacuation etmême s’éloigne de cet orifice, quand l’eau du bassin se vide,manifestant par-là des angoisses de liquéfaction ou d’aspira-tion dans le trou. Après environ six mois, l’enfant prend sou-dain le doigt de sa référente pour explorer le trou puis, lesséances suivantes, il joue à boucher et déboucher le trou en

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plaçant au dessus un ballon. On se souvient que c’est au mêmemoment qu’il commence à explorer l’intérieur de sa bouche,et que les jeux de transvasement apparaissent, témoignantainsi de la possible représentation d’un remplissage et d’unvidage.

Quelque temps plus tard, il enlève lui-même le bouchondu bassin ; il s’allonge alors à plat ventre, regarde l’eau partiret colle son oreille au-dessus du trou. À la même époque, ilexplore pour la première fois les trous de la bouche et desoreilles sur le corps des thérapeutes, établissant ainsi un lienentre l’exploration des trous dans le bassin et celle des troussur le corps des thérapeutes.

L’interaction entre le cadre matériel et le lien corporel authérapeute permet donc d’élaborer une première représenta-tion d’enveloppe contenante, avec des trous par où ça entre etça sort. Une introjection du cadre comme structure enca-drante devient possible, en écho à l’introjection par l’enfantde la contenance des soins maternels. Joachim est passé peuà peu du registre bidimensionnel avec un collage adhésif auxthérapeutes à une exploration de la tridimensionnalité du cadreavec notamment l’exploration des trous dans le cadre maté-riel et sur le corps des thérapeutes. On ne s’étonnera donc pasque l’ensemble de ce processus ait débouché de façon tout àfait significative sur l’acquisition du contrôle sphinctérienaprès un an de travail.

L’implication corporelle des thérapeutes joue donc un rôlecentral pour sortir l’enfant des manœuvres autosensuellesautistiques en associant pour celui-ci le registre sensoriel àune dynamique relationnelle qui passe par des interactionscorporelles. Cette implication corporelle des soignants revientà la restauration de la relation homosexuelle primaire entre lamère et l’enfant, non pas au sens de fusion ou de symbiosemais comme relation en miroir en double ainsi que l’a mon-tré R. Roussillon2 : de façon générale, au sein d’ateliers thé-rapeutiques à médiation, dans le registre de la psychose ou del’autisme, l’expérience clinique montre qu’il est fondamen-tal d’offrir à l’enfant une sorte de miroir corporel et émotion-nel dans l’accordage des rythmes, des postures, de la ges-tuelle, des mimiques, des échanges sonores, accompagnésd’échanges émotionnels. Ce sont donc des accordages senso-riaffectifs entre enfant et soignants mis en position du miroirprimitif de la mère qui rétablissent la fonction de miroir endouble de la relation primaire, comme on l’a vu à propos du

travail à partir du toucher, du regard, du sonore, au sein del’atelier thérapeutique des jeux d’eau.

Dans cette perspective, la médiation de l’eau permetd’effectuer un travail d’intégration sensorielle, primordialpour un enfant autiste, et contribue ainsi à la restauration d’unepremière peau psychique. Au cours de ce processus, la ver-balisation des thérapeutes reste indispensable pour nommeret pour mettre en images les sensations–sentiments, lesangoisses, les images du corps et les liens de communicationentre thérapeute et enfant.

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2 R. Roussillon [17]. Selon cet auteur, l’organisation première de la rela-tion entre la mère et le bébé, désignée comme homosexualité primaire, estvectorisée par la quête de l’autre comme double de soi. Cette relation homo-sexuelle primaire en double se définit par des accordages entre la mère etl’enfant, dans une relation en miroir où la mère, qui reflète son enfant, estvécue par ce dernier comme un autre lui-même, donc paradoxalement commeautre et même à la fois.

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