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planes ou de polypes) : doit-il etre indivi- duellement ou collectivement propose ? l La mise en place du depistage a partir de ce test simple n’a jamais ete definie par aucune autorite de Sante, malgre les inter- ventions reiterees et autorisees : propose par les generalistes, les medecins du tra- vail, ou systematiquement a tout client venant subir un examen de Sante a partir d’un certain age. En 1997, la Cnam se prononcait contre le depistage de masse. En 1998, une confe- rence de consensus faisait de m&me pour le depistage systematique en medecine g&&ale, pour la raison qu’ il ne correspon- dait pas a une campagne de masse orga- nisee. Lors du colloque de I’Andecaco, sa presi- dente, Mme Maite Carillo, I’a dit sans ambages : les malades, les cancereux du colon, les stomises, ne sont-ils pas en droit de poursuivre I’Etat, la securite sociale, les medecins, pour n’avoir jamais ete depistes ? Les preuves existent Une etude prospective a ete mise en place en Bourgogne en 1988 (Pr Jean Faivre, CHU de Dijon). Ses resultats sont en accord avec d’autres etudes prospectives etrangeres : I’Hemoccult permet de reduire en moyenne de 30 % (de 30 a 44 ‘Yo) la mortalite par CCR. Un test positif justifiant une coloscopie, I’etude de Bourgogne per- met de dire qu’une coloscopie sur 10 decouvre un cancer. Encore doit-on preci- ser deux points-&s. l Les coloscopies c negatives ) (pour le cancer) peuvent decouvrir de gros ade- nomes (> 2 cm) qui seront a surveiller. l Les cancers decouverts apres depistage biologique sont de quatre a cinq fois plus souvent des cancers limit& au colon (sta- de A et B de la classification tumorale de Dukes) par rapport aux cancers decouverts a la coloscopie chez des patients qui signalent des symptomes abdominaux : 1 cancer decouvert apres 199 coloscopies negatives et 1 cancer decouvert apres 99 coloscopies negatives chez des sujets ayant des antecedents : parents au premier degre ayant eu un CCR, families por-teuses des genes de predisposition (APC, HNPCC). Aujourd’hui, en France, la coloscopie apres Hemoccult positif (la plus utile a completer le depistage) ne represente que 2 010 des examens effect&s. Or, la securite sociale paie chaque an&e plus de 4,5 milliards de francs pour les coloscopies ! De la, comme certains specialistes, a parler de c( boycot- tage pp de I’Hemoccult (introuvable en phar- macie, meme prescrit par un medecin). La sensibilite du test peut etre augmentee par certaines mesures dietetiques. La spe- cificite (98 o/o) est la plus forte de tous les tests actuellement proposes pour le depis- tage. J.-M. M. ‘29-33, rue de M&z, 94170 Le Perreux Th/. : 01 48 72 31 75 fax: Of 48 72 31 76. Medicaments orphelins : ouverture sur I’Europe pour la pharmacie et le diagnostic Le Journal officiel des Communautes europeennes du 22 janvier a publie le reglement europeen sur les medicaments orphelins. Issu d’un memorandum francais de juin 1995, il aura done et6 prepare en un temps record pour un texte officiel, jetant les bases d’un statut privilegie des produits de la recherche biologique et medicale pour les maladies orphelines, ou maladies rares. A utre evenement susceptible de faire enfin decoller en Europe une recherche en sommeil : la creation de I’Alliance pour les maladies Tares*, regroupant 36 associations de malades et leur famille, representant 700 maladies dif- ferentes et p&s d’un million de patients. CEurope et son r&glement II faut maintenant constituer un Comite europeen des medicaments orphelins, adopter les credits qui seront confies a I’Agence europeenne du medicament, etc. CEurope des 15 devient ainsi la 3e puis- sance economique a se doter d’un statut favorable a I’ innovation au service des malades les plus demunis apres les Etats- Unis (depuis 1983) et le Japon (depuis 1993). Ces deux pays avaient compris qu’ il faut donner a la recherche d’exception en diagnostic in vitro et en therapeutique un statut juridique et fiscal plus favorable qu’a la recherche standard pour susciter I’ inno- vation. C’est ce qui explique que les quelques rares medicaments orphelins 12 deja disponibles sont americains et nous coOtent tres cher... Le probleme de I’ innovation en ce domaine est qu’elle coOte elle aussi t&s cher mais ne peut etre amortie en raison de sa (c faible clientele )a (sic), dans la mesure oti cer- taines maladies sont si peu courantes (maladie de I’homme de Pierre : moins de 50 cas connus en France) que cet amor- tissement n’est envisageable qu’a cer- taines conditions : exclusivite prolongee de developpement et de commercialisation, marche elargi (inter&t d’un effort europeen). Les maladies orphelines, mkdicaments orphelins Ces maladies, qui sortent de I’ombre epi- sodiquement (le Telethon), ont un score lourd. Meme si, statistiquement, elles n’af- fectent qu’un sujet sur 2 000, on estime leur nombre a 5 000 (5 000 differentes, peut-etre d’autres a decouvrir), touchant de 6 a 8 % d’une population, soit quelque 4 millions de personnes en France et 25 a 30 millions en Europe. Ces maladies sont aoi Une maladie orphehe, la maladie des OS de verre. Revue Fran&e des laboratoires, avrillmai 2000, No 322

Médicaments orphelins : ouverture sur l'Europe pour la pharmacie et le diagnostic

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planes ou de polypes) : doit-il etre indivi- duellement ou collectivement propose ? l La mise en place du depistage a partir de ce test simple n’a jamais ete definie par aucune autorite de Sante, malgre les inter- ventions reiterees et autorisees : propose par les generalistes, les medecins du tra- vail, ou systematiquement a tout client venant subir un examen de Sante a partir d’un certain age. En 1997, la Cnam se prononcait contre le depistage de masse. En 1998, une confe- rence de consensus faisait de m&me pour le depistage systematique en medecine g&&ale, pour la raison qu’il ne correspon- dait pas a une campagne de masse orga- nisee. Lors du colloque de I’Andecaco, sa presi- dente, Mme Maite Carillo, I’a dit sans ambages : les malades, les cancereux du colon, les stomises, ne sont-ils pas en droit de poursuivre I’Etat, la securite sociale, les medecins, pour n’avoir jamais ete depistes ?

Les preuves existent Une etude prospective a ete mise en place en Bourgogne en 1988 (Pr Jean Faivre, CHU de Dijon). Ses resultats sont en accord avec d’autres etudes prospectives etrangeres : I’Hemoccult permet de reduire en moyenne de 30 % (de 30 a 44 ‘Yo) la mortalite par CCR. Un test positif justifiant une coloscopie, I’etude de Bourgogne per- met de dire qu’une coloscopie sur 10 decouvre un cancer. Encore doit-on preci- ser deux points-&s. l Les coloscopies c negatives ‘) (pour le cancer) peuvent decouvrir de gros ade- nomes (> 2 cm) qui seront a surveiller. l Les cancers decouverts apres depistage biologique sont de quatre a cinq fois plus souvent des cancers limit& au colon (sta- de A et B de la classification tumorale de Dukes) par rapport aux cancers decouverts a la coloscopie chez des patients qui signalent des symptomes abdominaux : 1 cancer decouvert apres 199 coloscopies negatives et 1 cancer decouvert apres 99

coloscopies negatives chez des sujets ayant des antecedents : parents au premier degre ayant eu un CCR, families por-teuses des genes de predisposition (APC, HNPCC). Aujourd’hui, en France, la coloscopie apres Hemoccult positif (la plus utile a completer le depistage) ne represente que 2 010 des examens effect&s. Or, la securite sociale paie chaque an&e plus de 4,5 milliards de francs pour les coloscopies ! De la, comme certains specialistes, a parler de c( boycot- tage pp de I’Hemoccult (introuvable en phar- macie, meme prescrit par un medecin). La sensibilite du test peut etre augmentee par certaines mesures dietetiques. La spe- cificite (98 o/o) est la plus forte de tous les tests actuellement proposes pour le depis- tage.

J.-M. M.

‘29-33, rue de M&z, 94170 Le Perreux Th/. : 01 48 72 31 75 fax: Of 48 72 31 76.

Medicaments orphelins : ouverture sur I’Europe pour la pharmacie et le diagnostic

Le Journal officiel des Communautes europeennes du 22 janvier a publie le reglement europeen sur les medicaments orphelins. Issu d’un memorandum francais de juin 1995, il aura done et6 prepare en un temps record pour un texte officiel, jetant les bases d’un statut privilegie des produits de la recherche biologique et medicale pour les maladies orphelines, ou maladies rares.

A utre evenement susceptible de faire enfin decoller en Europe une recherche en sommeil : la creation

de I’Alliance pour les maladies Tares*, regroupant 36 associations de malades et leur famille, representant 700 maladies dif- ferentes et p&s d’un million de patients.

CEurope et son r&glement II faut maintenant constituer un Comite europeen des medicaments orphelins, adopter les credits qui seront confies a I’Agence europeenne du medicament, etc. CEurope des 15 devient ainsi la 3e puis- sance economique a se doter d’un statut favorable a I’innovation au service des malades les plus demunis apres les Etats- Unis (depuis 1983) et le Japon (depuis 1993). Ces deux pays avaient compris qu’il faut donner a la recherche d’exception en diagnostic in vitro et en therapeutique un statut juridique et fiscal plus favorable qu’a la recherche standard pour susciter I’inno- vation. C’est ce qui explique que les quelques rares medicaments orphelins

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deja disponibles sont americains et nous coOtent tres cher... Le probleme de I’innovation en ce domaine est qu’elle coOte elle aussi t&s cher mais ne peut etre amortie en raison de sa (c faible clientele )a (sic), dans la mesure oti cer- taines maladies sont si peu courantes (maladie de I’homme de Pierre : moins de 50 cas connus en France) que cet amor- tissement n’est envisageable qu’a cer- taines conditions : exclusivite prolongee de developpement et de commercialisation, marche elargi (inter&t d’un effort europeen).

Les maladies orphelines, mkdicaments orphelins Ces maladies, qui sortent de I’ombre epi- sodiquement (le Telethon), ont un score lourd. Meme si, statistiquement, elles n’af- fectent qu’un sujet sur 2 000, on estime leur nombre a 5 000 (5 000 differentes, peut-etre d’autres a decouvrir), touchant de 6 a 8 % d’une population, soit quelque 4 millions de personnes en France et 25 a 30 millions en Europe. Ces maladies sont

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Une maladie orphehe, la maladie des OS de verre.

Revue Fran&e des laboratoires, avrillmai 2000, No 322

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dites orphelines parce qu’elles ne suscitent que peu ou pas d’interet de la recherche clinique et therapeutique. La recherche est technologiquement co& teuse, car 80 % de ces maladies sont d’ori- gine genetique, ce qui impose d’identifier d’abord leur substrat biologique. L’AMR est la seconde grande initiative col- lective en faveur des maladies orphelines apres la creation en mars 1997 d’Eurordis (EURopean Organization for Rare DlSeases : Organisation europeenne pour les maladies rares), fed&ant 170 associa- tions dans 12 pays et representant 2 000 maladies rares et plusieurs millions de malades.

Selon le reglement europeen, un medica- ment est dit orphelin : - s’il est destine au diagnostic, a la pre- vention ou au traitement dune affection letale ou invalidante (chronique) touchant 5 personnes sur 10 000 dans la Communaute europeenne ; - s’il est destine au diagnostic, a la pre- vention ou au traitement d’une maladie mettant la vie en danger, t&s invalidante ou d’une affection grave et chronique et s’il est peu probable que, en I’absence de mesures d’incitation, la commercialisation dans la Communaute europeenne genere des benefices suffisants pour justifier les investissements necessaires ;

- s’il n’existe pas de methode satisfaisante de diagnostic, de prevention ou de traite- ment connue ou autorisee dans la Communaute europeenne. Les projets de developpement de produits de diagnostic, de prevention ou de traite- ment de maladies rares devront etre sou- mis au Comite europeen des medicaments orphelins, qui pourra, dans le cas de PME necessitant des investissements impor- tants, accorder des subventions a la recherche.

* AMR, 13, place de Rungis, 75013 Paris TGl. : 01 44 16 27 27

Le programme Cancer du Gouvernement :

cinq axes pour amkliorer les performances Invitee du 4e Skminaire dq Cercle des canckrologues franqais*, Domi- nique Gillot, secrktaire d’Etat B la Santk et B /‘Action sociale, a rappe- l& les grandes lignes du programme Cancer du Gouvernement dkfini en fhrier dernier avec le ministkre de I’Emploi et de la Solidaritk.

I I comporte cinq axes majeurs : renforce- ment de la prevention, generalisation du depistage de certains cancers, soutien a

la qualite des soins, amelioration des condi- tions de vie et garantie des droits de la per- sonne malade, coordination des efforts de recherche.

Prkvention : tabac, sole& alcool Elle comporte une serie d’actions de Sante publique telle la mise en vente libre en pharmacie des substituts nicotiniques. Une circulaire organisera la lutte anti-tabac dans les etablissements de Sante : motivation a I’arret, consultations de tabacologie. Le remboursement des substituts nicotiniques et I’interdiction de vente de tabac aux moins de 16 ans sont encore a I’etude. Par ailleurs, la lutte contre I’alcoolisme va etre intensifiee. Des campagnes d’information sur les dangers de la surexposition aux UV solaires et sur les mesures dietetiques anti- cancer sont au programme.

DBpistage : deux sans trois Deux depistages seront generalises : du sein d’ici 2001 et col de I’uterus d’ici 3 ans, le premier base sur la mammographie pour les femmes de 50 a 69 ans, sur la base des resultats du programme-pilote auquel parti- cipent actuellement 30 departements. Mais celui du cancer du colon n’est pas a I’ordre du jour, (1 il s’agit d’un debat tech- nique complexe ~1, dit-on en haut lieu. (c Je sais que I’engagement des professionnels sur ce theme est important, dit D. Gillot. Je pense aux medecins generalistes mais aus- si aux gastro-enterologues qui ont recem- ment diffuse leurs propositions aa. II faut se

Revue Fran~alse des laboratares, avrillmai 2000, N” 322

(re)mettre au travail pour about? a la gene- ralisation progressive du depistage dans toute la France.

Qualit des soins : en ville aussi Corganisation des soins via les SROS (schemas regionaux d’organisation des soins) doit permettre de reduire les inegali- tes dans I’acces aux soins. Les regions devront preparer un programme coherent de prevention/depistage/traitements, qui beneficieront d’un financement. Cobjectif est ici de reduire d’au moins 10 % la pro- portion des de&s par cancer dans les regions ou I’on constate une surmortalite. Le soutien a la qualite devrait egalement favoriser I’accbs aux techniques inno- vantes, telle I’imagerie par PET-Scan (scan- ner avec emission de positons), sur la base de programmes logiques d’equipement regionaux avec evaluation du service medi- cal rendu aux patients. Le renforcement et le renouvellement des parts regionaux de radiologie devrait remo- tiver I’attrait des jeunes medecins pour cet- te specialite (ex prescrite ‘a, comme les bio- logistes - NDLR). Enfin, le programme prevoit de faciliter I’ac- ces aux tests de predisposition genetique, notamment dans les consultations d’onco- genetique, en inscrivant ces nouveaux tests dans la nomenclature des actes de biologie medicale pour leur prise en charge. II faut enfin ameliorer la prise en charge a domicile en favorisant la poursuite des chi- miotherapies a domicile, sur les memes bases de qualite que la chimiotherapie en hopital. Pour cela, il faut actualiser la forma- tion des infirm&es se rendant a domicile.

Le Fonds d’aide a la qualite des soins en ville devrait aider a developper la chimio- therapie et les soins palliatifs extra-hospita- liers : son budget est de 500 millions de francs pour 2000.

Conditions de vie et droits des malades C’est I’incitation des professionnels de Sante s mieux informer et a dialoguer avec le patient. C’est le soutien psychologique, pour lequel seront recrutes des psycho- logues attribues aux structures organisees en reseaux. Ce chapitre prevoit encore I’encourage- ment a la formation des benevoles, la prise en charge des produits de renutrition orale et la poursuite des efforts dans I’organisa- tion du traitement de la douleur et les soins palliatifs.

Coordonner la recherche Ceffort public s’applique au developpe- ment de nouveaux traitements, bases notamment sur la genetique, de registres epidemiologiques des cancers et d’etudes du role des facteurs d’environnement. Une coordination des actions de soutien a la recherche de la Ligue contre le cancer et de I’ARC est necessaire. La recherche hos- pital&e en therapie cellulaire et genetique est consideree comme prioritaire.

J.-M. M.

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