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8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 1/155
/';-=09 )(8*
=-0/']
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 2/155
©
PUV,
Saint-Denis,
1985
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 3/155
MEDIEVALES
Revue semestrielle
publiée
par
les
Presses
Universitaires
de
Vincennes
Paris-8 avec
le
concours du
Centre
National
de la
Recherche
Scientifique
COMITE DE
REDACTION
~
V
g? ^
Jérôme BASCHET 1
JÎ^jrjJ"fiffļ
1
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ï
François-Jérôme
EAUSSART
^0w¡l¡¡ M»
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Anne
BERTHELOT
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Bernard
CERQUIGLINI
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Ilan HIRSCH Ç-J / M [¡¡£¿1 ?: ;:ÎÊS:T~
François
JACQUESSON
--
>i/l 7/ff
-
;
¡¿Vr-
:
Christine
LAPOSTOLLE
^Wj/f D
V
;
Yvonne
REGIS-CAZAL
Le
numéro 49
F
Abonnements
-
2
numéros
92 F
(étranger
105
F)
-
4
numéros 175F
(étranger
200
F)
Les
manuscrits,
actylographiés
ux
normes
habituelles,
insi
que
les
ouvrages, our
comptes
rendus,
oivent tre
envoyés
:
MEDIEVALES
PUV Centrede
Recherche
Université
aris
VIII
2,
rue
de la Liberté
93526
aint-Denis
edex
02
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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SOMMAIRE
N°
9
/
AUTOMNE 1985
Page
Avant-propos
François
JACQUESSON
3
L'histoire
ntre
e Cosmos
et le
Hasard
entrevue
vec Robert
DELORT
7
LANGUES
La
parole
de l'autre
Yvonne
REGIS
CAZAL 19
Expliquer
Justifier
Grammaire
t
poétique
de
la
cause
en
ancien
français
Annie
DELBEY
35
Le
lai
de
Doon,
ou
le
fonctionnement
e la brièveté
Catherine RIZZA 55
L'
«
Amor
de
Lonh
du
grammairien
Jean-Charles
UCHET
64
Darès,
voyageur
u
temps
ou
: Comment evint
e roman
François
JACQUESSON
80
Procès
auriculaire
Le droit
t
l'image
sur
un cas
d'essorillage
Marie-Laure
E BAIL
118
Procès
posthume
Accusé Guido
Riccio
de
Fogliano,
défendez-vous
Chiara
FRUGONI
et Odile
REDON
103
JEUX
(jeux)
Patricia
MULHOUSE
132
Notes
de
lectures
Roland
BECHMANN,
Des
arbres
et des
hommes.
La
forêt
au
Moyen
Age;
Jean-Claude
ONNE,
L'art roman de
face
et de
profil
Le
tympan
de
Conques Monique
BOURIN,
RobertDURAND,Vivre au villageau MoyenAge Chiara
FRUGONI,
Una
lontana
città Sentimenti
immagini
nel
Medioevo
134
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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AVANT-PROPOS
Les
Mathématiques
nt
conquis
la
confiance
ublique
en
se
cons-
tituant n ensemble
ynthétique
les
Lettres
se
dissimulant
arfois
sous le
zeugma
de
«
sciences humaines
-
se
sont
segmentées
n
nombreuses
«
disciplines
et
leurs
sous-sections
hronologiquement
découpées.
Curieusement,
t
pour
des raisons
qu'il
serait
aisé de
décrire,
nos
mille
ans de
MoyenAge
sont restés à l'écart
des
segmentations.
es
médiévistes ont de
toute
orte,
t visent
mille
horizons.
MEDIEVALES
a
déjà exploré
cette diversité. ans le cadre si variable du
«moyen
âge»
les
compétencesmultiples 'épaulent
ssez
bien,
et le
spécialiste
du
VIII*
siècle
est
toujours
l'affût
e ce
qu'on
apprend
du XII*.
Les
sciences
auxiliaires
continuent
'y
avoir
un rôle
stimulant n même
temps que
documentaire.
ref,
le
Moyen
Age, grâce
à
sa relative
forclusion,
'a
pas
été
démembré
ar
les
polarisations.
C'est toujoursen bloc qu'il excite es jugements.On trouve ncore
à
son
égard
ces
emportements,ositifs
u
négatifs,
u'on
serait bien
en
peine
d'observer
pour
les
«
siècles
en tranche
.
Préservé comme
un vin vieux
par
le
bouchon
de la
Renaissance.
Mais
soyons
plus précis.
Ce dont
il
faut se
féliciter,
'est
qu'il
ait
été
préservé
de la
dislocation.
Ce
qu'il
faut
craindre,
'est
que
sa
coupure
(la
Renaissance)
n'ait,
dans
son
appréciationpar
nous,
des
effets
ocifs.
Comme
ouvent,
'avantage
e dédouble de l'inconvénient.
Pourtant,
u
total,
'occasion est
superbe
si nous
parvenons
nous
défaire des
préjugés d'époque qui
nous le
maintiennent errière es
paravents
du
pittoresque
ou du
ressentiment,
e
millénaireest un
terrain xtraordinairee fraîcheur.l en va de mêmequ'à Pompéi
bien
sûr
l
nous en
note
beaucoup,
t le
plan
des
lotissements
'apparaît
pas
toujours
lairement,
u l'on
peut
chercher
rop
vite à
y
voir
passer
des
fantômes.Mais faut-il
our
cela en
regretter
'existence
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 6/155
4
La notion
«
d'époque
,
finalement,
ous
a fait
beaucoup
de mal.
Chez
les historiens
omantiques,
ont
Hegel,
elle
avait le rôle
des
mouvements,
ifs ou
lents,
du concerto
historique
ntre
'idée et
les
hommes.
Et
à
la
fin,
lle a
gauchi
l'idée de
l'ensemble.
Il faut se convaincre
ue
le
Moyen Age
n'est
pas
seulement
une
époque négligée,olie,
une sorte de
tourisme e
luxe
-
car
cela est ce
que
suggère
a commercialisation
u
«
thème
médiéval
. Le
Moyen
Age,
les
Romantiques
'ont voulu
champ
clos,
sinon
cimetière,
essource
antinomique
d'une vie ouverte
ou béante.
Et nous savons
que
cela
aussi est
dommageable
uisque
cela revenait,n
négatif,
accepter
e
verdict
e clôture
rononcée
dit-on
e
plus
souvent)
ar
la Renaissance.
Nombreux
ont
ceux
qui
continuent
insi
de chercher
u
Moyen Age
leur vision
de
l'Eden,
sans voir
qu'ils
ne sont
pas
si loin
de ceux
qui
y
cherchent
'imagerie
e
l'Enfer.
Or,
recadrer
orrectement
es
temps,
ou
notre
perception
du
temps,
passe par
la coordination
ntelligible
de
l'Antiquité
u
MoyenAge
et
de celui-ci
ux
Temps
modernes.
Car
il
y
a un
rapport
essentiel
entre a formation
enaissantede
l'esprit
historique
el
que
les
Temps
modernes
e
constituent,
'est-à-diree
modèle de
la durée
comme
progrès porteur
(le
fonctionnaire
ui
vieillit st payéplus ), et la clôtured'untempsmédian, e court-circuit
de
mille ans.
Il
y
a
un accord fondateur
ntre
a confiance la
tempo-
ralité
porteuse
d'histoire
et ce
non-lieu de
l'histoire,
ette
utopie
médiane
du
Moyen Age.
Tout ce
qui
se
veut de soi-même
ignifiant,
comme
ce
«
temps
au sens
moderne,
emble
traîner
avec
soi
son
nécessaire
nsu.
De
sorte
que
toute
critique
érieuse
de notre
perception ar
nous-
mêmes,
depuis
les
échos
les
plus
subtils
des
significationsusqu'aux
conséquences
es
plus
épaisses
(qu'est-ce
que
cette
«
angoisse
,
cette
«
peur
de
l'avenir
pour
quoi
les
magazines
trouvent ant
de
mots
euphoriques
Et
qu'est-ce
ue
le
suicide,
d'un
individu u d'une
cul-
ture ) passe par la priseen cause,si l'onpeutdire,de notre ohérence,
dont
la cohésion
historique
st la
forme
a
plus
lisible
et de cette
cohésion,
e
Moyen
Age
est
la clef.
Il va
falloir
tre
très-précautionneux,
insi,
avec ces deux verrous
qui
nous ont
relativement
réservé
ou
momifié)
e
millénairemédiéval
et
pourtant,
ls
sont
le
passage
obligé.
C'est
en
eux,
dans
l'Antiquité
disparaissante
t
l'apparition
e
la
Modernité,
'est à travers ux
que
nous
pourrons
aisir
une
idée encore
mal
imaginable,
t certainement
surprenante,
e
la
cohérence
e notre ulture
en
libérant
es mathé-
matiques
du rôle
ingrat
de totem
et de là nous retrouver ans
un
avenirque nous aurons inventé n cherchant découvrir e temps.
Il ne
s'agit
donc
pas
de
clamer
que
la
pépite
est
dans notre
rivière,
mais
de se
rendre
ompte
de
la situation
rès
particulière
u
concept
de
Moyen
Age,
et des
conséquences
que
cela
a
eu,
et
ne
cesse
pas
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 7/155
5
d'avoir,
sur notre
philosophie
de
l'histoire,
otre
sens du destin
de
l'individu,
u dans notre
perception
ntellectuelle
ont la
littérature
est la
forme visée. Se rendre
compte
de la
qualité
très
particulière
de notre ituation
evant
e colosse
fragile,
t saisir
l'occasion.
Ce
numérode MEDIEVALES
est encadré
par
deux
sujets
d'actua-
lité. D'une
part,
on
pourra
lire
commentRobert
Delort,
'un de nos
grands
médiévistes,
onjugue
a
prudence
t
l'audace dans sa méthode
historique
en
observant a
démarche,
n se convaincra
isément
que
le Moyen Age n'est pas un champ clos. D'autre part,on pourra,en
lisant a
description
lerte de Chiava
Frugoni
t
d'Odile
Redon,
uger
combien
e
qu'on
croyait
e
mieux
véré
en
fait d'attribution édiévale
est
parfois
riche de
surprise
une
fresque
célèbre,
que
de nombreux
manuels
présentent
omme
un
emblème
du
Moyen Age,
est-elle
du
XVII*
siècle ? De
sorte
que
sous
deux
aspects
différents,
t
complé-
mentaires,
elui
de
l'élargissement
écessaire de la
méthode,
t celui
de la
révision
ritique
des
données,
e
Moyen
Age
montre a fécondité
intellectuelle.
Yvonne
REGIS-CAZAL
nalyse
e mode et les
enjeux
de
l'apparition
de la languevulgairedans les drames liturgiquesbilingues.L'alter-
nance
des
deux
langues
ne
se contente
as
de résoudre
un
problème
de
communication ntre
'Eglise
et
son auditoire
llettré,
lle
permet
l'émergence
'une autre
parole,
celle de
l'effusion
yrique,
xpression
de la
douleur
personnelle
t de
la
perte.
Les
répliques
bilingues
mettent
ainsi
en
scène les tensions
qui
menacent e drame
liturgique,
n
signalent
t en
récupèrent
'extérieur
la
langue
mais aussi la littérature
profane
qui
s'introduit
ous forme
de
citations
dans le drame.
Par
là-même,
e
drame ature
tous es modes de
participation
e l'auditoire
laïc,
assurant u mieux
on
édification.
i le drame
iturgique
ilingue
est un
genre
sans
descendance,
'examen
minutieux e sa structure
montre ue c'est en raisonmême de son caractère avant et concerté.
Annie
DELBEY décrit et
analyse
'expression
e
la cause
dans
la
langue française
médiévale.
Elle
montre,
reuves
à
l'appui,
comment
la
gamme
des
conjonctions
tablitune
grille
ubtile
ur
la
subjectivité
ou
l'objectivité
e la causalité.
Puis,
fortede cet
acquis,
elle montre
comment
es
genres
ittéraires t
l'historiographie
otamment,
nt
eu
des
réactions ifférenciées
cette
gamme
d'expressions.
insi
'expres-
sion
de la
cause est-elle
une
approche
«
intelligente
de
la diversité
littérairemédiévale on
voit
plus
clair
dans
la
trajectoireglobale
de
la
littérature,
ans rien
perdre
en finesse.
KatherineFRIZZA, à travers 'exempledu Lai de Doon, met en
évidence a
façon
dont
'organisation
es différentesormes
u
discours
rapporté
ert à
compenser,
ur
le
plan
de la
stucrture
u
récit,
a
brièveté
e la narration.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 8/155
6
Jean-Charles UCHET
examine es
Leys
d'Amors,
ù
la
tradition
des
troubadours emble
s'épuiser
au XIV*
siècle,
et
ne
plus produire
que
des
règles
grammaticales.
l
montre ombien
ette
coïncidence
es
lois de l'amour vec
celle
d'une
angue
est aussi une combinaison
rigi-
nale
l'amour ndicible ans
son excès manifeste n
au-delà
de l'amour
comme de la
langue
que
la loi
repère.
L'auteur
conduit adroitement
son lecteur travers es
jeux d'échanges églementés
u désir et de la
grammaire.
FrançoisJACQUESSONmontre travers 'antiquité es stades de
concentration
ynthétique
u
discours,
u'il
soit
historique
u
poétique.
Il montre
omment n
aboutitainsi
à de véritables
ésumés,
t
selon
quelle logique
ces
«
semences
concentrées
e
redéploient l'origine
du
roman
médiéval.
Marie-Laure
E BAIL nous
montre
omment
ne
image
du
XIII*
s.,
prise
dans un
manuscrit
es
Coutumes
de
Toulouse,
et
qui,
sans ce
qu'elle
nous
en
dit,
aurait
pu
apparaître
anodine
ou
simpliste,
met
en
scène
une
conception
très
précise
de
la
justice
médiévale.
Elle
examine
pour
ce faire
ette
mage
sous
le
plus
grand
nombre
d'aspects
possible
et fait
apparaître
omment,
ans
la
composition
e
tous ces
traits,'imageproduit n sensque ne livrerait as forcémenta lecture
des
textes
correspondants.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 9/155
L'HISTOIRE ENTRE
LE COSMOS
ET LE HASARD
:
entrevue avec Robert DELORT
MEDIEVALES.
-
Le
titre
que
vous
avez
donné
à votre
récent
livre,
Les
animaux ont une
histoire,
st
ďune
certaine
façon
polémique
..
ROBERT DELORT.
-
Polémique,
n'exagérons
rien.
Je
voudrais
attirer 'attention
ur le
fait
que
les
animaux
ont
une histoire
ui
leur
est propre t que ce n'estpas uniquementes rapportsde l'homme t
des
animaux
qu'on
doit
considérer,
mais aussi
les
animaux
en
eux-
mêmes.
Avec
une
vision
d'homme,
évidemment,
e
qui
fait
qu'ils
apparaissent oujours
dans une
optique
humaine,
mais
en
privilégiant
d'abord es
rapports
des
animaux
avec les
hommes,
uisque
c'est
une
trame
particulièrement
éconde
pour
écrire cette
histoire.
Je reconnais
volontiers
u'il
est
cependant
difficile
'étudier
par
exemple
es insectes
dans
cette
perspective.
n
en
a
retrouvé
rès
peu
de
fossiles,
part
ceux
conservés
ans
la
glace
du Mont
Look
ou dans
l'ambre
de la
Baltique,
ou
encore
les
quelques
traces
chitineuses
égarées
dans
des
tourbières
mais
on
ne
peut généralement
tteindre
les insectes,comme la plupart des invertébrés ui n'ont pas de
coquille,
que
de
manière
ndirecte
par
l'action
qu'ils
ont
eue
sur
les
végétaux,
es
animaux
ou les
hommes,
domestiqués
omme
le
ver
à
soie,
véhiculant
a
malaria,
détruisant
igne,
pomme
de
terre,
uceron
comme
phylloxéra,
oryphore,
occinelle...
De
ce
fait l'histoire
des
insectes
repose
en
grande
partie
sur
des
sources
humaines.
Pourtant
ous
mettez
ouvent
'accent
ur
le
fait
qu'il
faut
éviter
de
faire
une
histoire
rop
humainedes
animaux
R.D.
-
Certes
et
c'est
à
la
rigueur
ossible
pour
tous
les.
vertébrés
qui
ont
laissé des
vestiges,
des
poils,
des
plumes,
des
ossements...
partque nousconservonslors 'optique lle aussi humainedu zoologue
de laboratoire.
Mais
pour
es
invertébrés,
part
les
éponges
spicules),
les
mollusques
(coquilles)
ou
d'autres
cas
rarissimes,
nous
devons
abandonner
oute
étude directe
ar les
structures
molles
disparaissent.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 10/155
8
Et les tortillons e lombrics u
la
plupart
des traces d'animaux
que
l'on
pourrait epérer
ans des fouilles ont très
difficilementtudiables.
Il
semble
que
cet
intérêt
our
les animaux se
manifeste
epuis
votre thèse
qui
est
consacrée au commercedes
fourrures
ans
l'occidentmédiéval.
R.D.
-
Oui.
Ma
thèseest elle-même uivantun
système
élescopique
une
amplification
e mon mémoirede
l'Ecole
Française
de
Rome,
de
ma
thèse
des
Hautes-Etudes,
t de mon
mémoirede
maîtrise
C'est
depuis le début de mes études d'histoire ue je m'intéresse ux ani-
maux,
en
fait
depuis
mon enfance.
D'abord
par
le
biais
de
l'histoire,
ensuite
par
le
biais
de la
zoologie,
t maintenant
isons
par
le
biais
de la
zoohistoire.
Dans cet
ordre
là ?
Vos
recherches ur
les
sauterelles,
par
exemple,
ous semblent tre
une
étape
intermédiaire
R.D.
-
C'est-à-dire
u'après
ma thèse de
Lettres,
'ai repris
des
études de
sciences,
vec des
jeunes
qui
venaientde
passer
le
«
bac
»
;
c'est
à ce moment-là
ue j'ai
obtenu les
trente-huit
.V.
qui
me
donnent
roit
u titre nviéde licencié s sciences
puis j'ai
commencé
une thèse de doctorat s sciences...J'ai essayé de réunirdes connais-
sances
scientifiques
enant de la
zoologie,
de
la
botanique,
tc.,
avec
des
recherches
historiques.
i nous revenons
u cas
particulier
des
criquets, 'ai
fait des études
aussi bien dans les
ouvrages
d'entomo-
logie,
de
zoologie,
dans les
laboratoiresde
Paris-VII,
que
dans les
Annales
arolingiennes.
t
après
avoir bien
dépouillé
es Annales aro-
lingiennes,
e
me
suis
dit
qu'il
fallait chercher
ussi
dans
la
Bible
j'ai
alors eu
la chance de tomber
ur
un articlede
la nièce de Uvarov
(celui
qui
a
trouvé
e
système
des
phases)
qui
avait fait
l'étude des
criquets
à
partir
du
XVIIe
siècle,
puis
sur une
masse de sources...
Le processus ue vousdécrivez, 'est ce qui vous a amenéà faire
vos recherches
ur
les
criquets
R.D.
-
Voilà,
entre autres
parce
qu'il
y
aussi le
fait
qu'étant
professeur
'histoire
u
Moyen
Age,
e
m'étais ntéressé
Charlemagne.
Depuis
trente
ns
que j'enseigne
ette
histoire,
'ai
évidemment
egardé
un
grand
nombre
de
textes,
t c'est
parce
que
j'enseignais
ur
Charle-
magne
que j'ai
trouvé
ces textes
sur les
criquets,
esquels
correspon-
daient aux études
que
je
faisais à
la Faculté des sciences
à
l'époque.
On
ne
peut
pas
dire ce
qui
a
été
premier...
Vous
avez
dit
tout à l'heure
que
les animaux
c'était une
piste
très mportante ource qui vous semblaitdevoir être
'histoire.
R.D.
-
Là aussi
ce sont des
idées
qui
remontent rès
loin. Je
pense
que
l'histoire,
'est
la science
de
l'espace
dans le
temps.
Car
c'est
bien
l'espace
qu'on
étudie dans
le
temps.
Tous les
phénomènes
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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9
évolutifs
me semblent
insi
avoir une histoire
l'astrophysique
'est
une histoire e
l'univers t c'est
quand
mêmeune histoire. es
galaxies,
le
système
olaire,
la
planète
Terre,
ont une histoire.L'homme
est
arrivé
si
tard,
que
l'histoire
de la
Terre,
c'est surtout
'histoire
des
phénomènes
omme e
champ magnétique
errestre,
es tremblements
de
terre,
a variationdu
niveau des
mers,
e
climat,
a course autour
du
soleil,
a création des
sols... Donc
un
ensemble
de facteurs
bio-
tiques qui changent
dans le
temps,
t un ensemble
de facteursbio-
tiques
la couverture
végétale,
es
animaux,
et l'homme
qui
tous
changent aturellement.'hommebiologique,par exemple au Moyen
Age,
l
n'était
pas
comme à
l'heure
actuelle
les
règles
des femmes
apparaissaient
peu
avant dix-huit
ns.
En
Occident,
lles
avaient le
bassin
plus
important
t la
poitrine
lus
menue les hommes étaient
plus petits,
a
répartition
es
groupes
anguins
tait
différente...
ref,
en
quelques
siècles,
es
hommesont
changé,
out
comme
es
animaux
ou
la couverture
égétale,
elle-ci n
partie
sous l'action de l'homme
mais en
partie
aussi sous
l'effet es
phénomènes
volutifsnaturels.
Tout cela
représente
es
idées
que j'ai
depuis
très
longtemps.
Au
début
e pensais
même
que
c'était
parce qu'il
faisait
plus
froid
que
les gensmettaient lus de fourrurespuis j'ai vu que non et que, en
Occident
médiéval,
e
phénomène
tait
principalement
û à
la
tradi-
tion,
à
la
mode,
au
luxe,
au mental
et
au
psychologique
lus
qu'au
physiologique.
uis
j'ai
constaté
que
les
variationsdu climat et
du
milieu faisaient ussi varier
a
qualité
et
l'épaisseur
des
peaux,
et
les
conditions u
marché,
tc.
Depuis que
je
suis
président
d'une commissiondu
CNRS,
j'ai
pu
faire
quelques
démarches
n
faveur
de
l'étude
des
variations
dans le
temps
des
phénomènes
aturels t
grâce
à la
compréhension
u direc-
teur du PIREN
se tient e 20
juin
une
journée
de réflexion ur ces
thèmes
ont été invités des
astrophysiciens,
es
géologues,
des
géo-
graphes,des clima ologues,des zoologues...En effet, i l'histoire st
bien
la science de
l'espace
dans le
temps,
elle doit coordonner 'en-
semble des
connaissances
humaines,
ce
qui
est
particulièrement
ambitieux.
Bien
entendu
je
suis
incapable
de coordonner 'ensemble
des
connaissances
humaines,
mais
je pense
que
tous les
spécialistes
de
toutes es connaissanceshumaines
devraient
tre coordonnés
par
des
historiens,
u du moins devraient
mettre
ne dimension
hronologique
à leurs
préoccupations.
ouvent
d'ailleurs
ls font de
l'histoire
ans
le
savoir
il
faudrait e
leur dire.
Quand mes professeurs e Paris-VII me disaientqu'on avait fait
pousser
le blé avec
des résultats différentsous
différents
hamps
magnétiques,
e
me souvenais
ue
le
champ
magnétique
errestre vait
beaucoup
varié et le
blé au
MoyenAge
Si
nous
savons
exactement
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de
quel
blé
il
s'agit
question
de
botanique),
l
faudrait e
faire
pousser
sous
le
champmagnétique ui
était celui du
MoyenAge,
t Ton
verrait
si cela
n'expliquepas
très
partiellement
a moindre écondité à
côté
.de tous les autres facteurs facteur
pédologique,
climatique,
etc.
Voyez,
chaque
fait
historique
est
porté
par
un faisceau
de causes.
Disons
qu'il
y
en a
1000
on
n'en
connaîtra
amais
950
on en connaît
déjà
une
dizaine;
et si nous
pouvons
sur les
quarante
qui
restent t
qu'on peut
peut-être
ncore connaître n trouverdeux ou
trois,
cela
approfondirait
es tentatives
'explication.
C'est donc une
façon
de
mettre 'historien u
confluent
des
connaissances,
e lui
donner un rôle
d'organisateur
Ou sinon
d'organisateur
du moins... omment
diriez-vous
R.D.
-
De coordonnateur. l
faut mettre
en contact
toutes
ces
disciplines ui
forment'histoire t
qui peuvent
nrichir onsidérable-
ment la recherche
historique.
Ainsi
les
grains
sous
champs
magné-
tiques
différents.
e même a réflexion e
cet historien
nglais
qui
dit
le X'
siècle est
plein
de lentilles. 'est vrai
que parmi
es acides aminés
absolumentnécessaire
la
vie,
l
y
en a huit
qui
sont fournis
ar
la
nourritureormale, t le neuvième st difficile trouver t se trouve
en
particulier
ans les lentilles donc un
changement
e
régime
limen-
taire,
ou
l'apport
de ce neuvième cide
aminé
par
des
végétaux
peu
nombreux,
pourrait partiellement xpliquer
des
variations d'ordre
biologique.
Je ne
crois
pas
en fait
que
les lentilles oient
spécialement
en
cause,
mais cela
attire 'attention ur l'un des
nombreux acteurs
de
la
physiologie
e
l'hommedans l'occidentmédiéval.
l
s'agit
là de
touches
multiples.
Il vous semble
donc
urgent
de
faire
un tableau
général
ou du
moins
d'essayer
de rassembler vec le maximumde
puissance
tous ces éléments-là.
R.D.
-
Exactement.
l
y
a
quand
même n
Allemagne,
n
Angleterre,
en Union
Soviétique,
des
gens qui,
au
moins
ponctuellement,
ont
intéressés
ar
cet
aspect.
D'ailleurs en Union
Soviétique,
ls
devraient
être
encore
plus puisqu'il s'agit
là du
support
matériel
de l'infra-
structure e l'histoire
humaine,
t
de la
pensée.
Dans
votre ivre vous dites
pourtant
propos
de la malaria
que
les historiens
avent
bien
tout cela.
Page
94
«
On voit combien
paraît simpliste
pour
un historien u
un
écologiste
e
principe
de la cause
unique (...)
l'histoire
que
bien des médecins roient
pouvoir
ssimiler la
simple chronologie
.
R.D.
-
Les historiens
avent,
omme es
écologues,
a
pluralité
des
causes
sans
jamais
arriver connaître u même chercher
connaître
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l'ensemble es
causes
repérables.
Mais
je
parle
ici de certains
médecins
qui
s'essaient à faire de
l'histoire
u du moins dont les
ouvrages
et
leurs
titres)
peuvent
faire croire
à leurs lecteurs
qu'ils
sont à
compo-
sante
historique.
i
l'un
de vos étudiantsvous
disait,
par
exemple
Kerenski
'est demandé
si,
sans
Raspoutine,
énine
aurait
triomphé.
La
question
mérite
d'être
posée, que
lui
répondriez-vous
Que
la
question
ne
mérite
d'être
posée
que
si
on
veut faire
de l'histoire
comme
au
temps
d'arrière
grand papa
Kerenski,
equel
d'ailleurs
n'était
pas
historienni
biologiste,
ar
il
aurait
pu déjà
connaître
e
fameux
paradoxe
de Darwin les vieilles filles
nglaises
ont
permis
a
maîtrise
de
l'Angleterre
ur
les mers en effet
lles élèvent
des
chats
qui mangent
es
souris,
esquelles mangent
des larves
de
bourdons,
ceux-làmême
qui
fécondentes
trèfles,
rincipale
ourriture
es bovins
dont la
viande
rouge
sert
à
fortifieres
équipages
de
Sa
Gracieuse
Majesté
Cette
succession de causes
partielles,
onsidérées
chaque
fois comme
uniques,
aboutit ainsi à
un résultat diot.
Même chose
pour
ce
«
paradoxe
de
Raspoutine
.
Le
tsarévitch tait
hémophile
Raspoutine
rrivait
arrêter
ertainesde ses
hémorragies,
a tsarine
reconnaissante
ubissait
son
influence
t
à son
tour
influençait
e
faibletsar, equel aurait pu laisser Lénine dans le néant en faisant
réaliser
temps
es
réformes
rgentes
t
indispensables
u en
faisant
d'une
main ferme xécuter
es
révolutionnaireses
plus dangereux
u,
inversement,
n
n'acceptant
pas
de
prendre
'initiative 'une mobili-
sation
générale,
ui
menaitdirectement
la
guerre
ontre
'Allemagne
et à
«
août
quatorze
...
Cela fait
des décennies
que
les historiens
connaissent
ette
chaîne
de
causalités
partielles
parmi
les mille
et
mille
raisons de
la Révolution
'Octobre.
Bien sûr aucun
spécialiste
des maladies du
sang
ne
pourra
écrire
que
l'hémophilie
t
Raspoutine
sont
responsables
de
la
Révolution
russe. Mais la manière de privilégier ne cause ou ime chaîne de
causes et
d'effets,
u même
une faible
pluralité
de
causes,
est une
démarche
qui
n'est
pas
historique
mais
qui
s'apparente
à celle de
Pasteur dans le
domaine
de la
biologie,
t
donc du milieu
pastorien.
Or
Pasteur,
ui
a révolutionnéa
médecine,
n'était
pas
médecin mais
normalien,
'est-à-dire
mathématicien,
hysicien
t
chimiste,
ciences
où
une cause
entraîne
bien
un
effet.
e la
même
manière,
vous avez
le
bacille
de
Koch,
donc vous
avez la
tuberculose
le bacille de
Hansen la
lèpre
le
bacille de
Yersin la
peste,
etc. Si
la cause
cesse,
cesse l'effet
pécifique.
e
ce
point
de vue la
médecine
pasto-
rienne
qui
continue s'illustrer
ans de
nombreux
domaines
a
une
démarche bien différente e celle de la nouvelle histoire c'est
d'ailleurs e
contraire
ui
serait
anormal.
Et, redisons-le,
l
ne
faut
pas
que
l'on
s'imagine
faire de
l'histoire
i l'on
replace
des
chapelets
de causes
uniques
dans un
cadre
chronologique.
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Vous
opposez
à
cela,
dans leur
propre
champ
en
quelque
sorte,
l'exemple
de la malaria
qui,
dans
le
cadre
des
maladies,
montre
qu'en
fait
l
y
a des choses
plus complexes.
R.D.
-
Justement. t
il
y
a des médecins
qui
ont aussi
compris
que,
en
histoire,
l
n'y
a
pas
de
cause
unique,
ni même de cause
prin-
cipale.
J'admire
beaucoup par exemple,
e
professeur
Sournia,
qui
a
écrit vec
beaucoup
de
nuanceset
de finesse
n
ouvrage
ur
Histoire
et
médecine.
l
n'a
pas
repris
'exemple
des cours
d'amour,
des retraits
lignagers, e la civilisation t du culte de la femmeau XIIe siècle
dans
le
Sud-Ouest
rançais,
ui
coïncident
n
gros
avec
la
répartition
des
groupes sanguins
et la
ligne
des 50
%
de
sang
0,
pour
ne
pas
souligner
'évidence
que
les autres
pays
qui
connaissent ette
répar-
tition n'en ont
pas pour
cela connu à la même
époque
des cours
d'amour. Mais
il
vient
d'écrire,
avec
J. Ruffiéun autre
ouvrage,
Les
épidémies
dans
l'histoire,
ont
j'admire
tout autant
la
science,
l'équilibre,
a
pertinence
t
que
je
cite
toujours
avec
éloge.
Autrement
it,
dans votre
programme
e collaboration ntre
es
sciences,
l
n'y
a
pas
seulement ne
question
d'information,
l
y
a
aussi
une
question
de
méthode.
R.D.- Oui. De même
que
des historiens e
peuvent
as
s'improviser
médecins,
e même la
plupart
des médecinsne
peuvent
s'improviser
historiens ans avoir
auparavant
fait
quelques
études d'histoire
bien
que
ce
soit une tradition
qui,
au siècle dernier
donné
quelques
bons
ouvrages)
que
le
médecin,
rès
cultivé,
st en
particulier pte
à écrire
des livres à
sujet
historique.
Donc il
vous
semble
que
l'historien st
privilégié, arce
que
c'est
lui
qui
est au nœud des causes.
R.D.
-
Peut-être
ue
d'autres,
non
historiens,
iraient
ue
ce sont
eux qui sont privilégiés mais c'est vrai. On retombetoujours sur
cette
question
d'étudier
'espace
dans le
temps.
Et
comment,
ans
cette
trajectoire,
nscrivez-vous
otre
ivre ur
Venise
R.D.
-
C'est
que pour
ma
thèse,
e
me suis
promené
dans toute
l'Europe,
de Séville à
Moscou,
de
l'Angleterre
la Méditerranée.
t
pour
le
commerce
es
fourrures
t
l'histoire
conomique
de l'occident
médiéval,
'ai
résidéà
Venise,
t
longuement
ravaillé ans
ses archives.
Pour
y
avoir vécu
tout
un
long
hiver,
d'octobre à
mai,
j'ai
trouvé
Venise une
ville extrêmementttachante t
j'ai
pensé
que
son
exis-
tence était un vrai miracle,qu'aucune des causes traditionnellement
avancées
(milieu
ou
histoire)
ne
pouvait
expliquer.
Cet événement
urbanistique
xceptionnel
ne semblait
mériter
un cours
à la Sor-
bonne
et ce
cours
qui
a eu lieu
en 1968-69t
que
je
faisais en même
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13
temps
que
les
travaux
pratiques
a tellement
ntéressé es
étudiants
que
certains n
ont
parlé
à un
éditeur.
J'ai demandé
à ce
que
mon
excellent
mi
Braunstein efît
es
chapitres
du
milieu,
parce que
je
n'avais vraiment
as
le
temps.
Voilà
comment
ela
s'est
passé
: mon
séjour
à
Venise,
mon
émerveillement,
e cours
à
la
Sorbonne et
la
multiplicité
es
travaux
pratiques.
Voilà
la
chaîne des
causes
R.D.
-
La
chaîne...
uelques-unes
es causes
du
faisceau
qui
porte
ce livre.
Vous vous
rattrapez
R.D.
-
Ce
n'est
pas
une
chaîne
parce que
les
origines
ont
diffé-
rentes.
Je suis
allé à
Venise,
bon... s'il
n'y
avait
pas
eu
68,
e
n'aurais
pas
fait e
cours à la
Sorbonne
parce que je
n'aurais
pas
eu le
droitde
faire
un
cours,
tant
l'époque simple
maître-assistant.t si
je
n'avais
pas
été à
Paris VIII
Vincennes,
e
n'aurais
pas
eu
pour collègues
et
amis
J.
Julliard t M.
Winack
qui
ont insisté
pour que
je
fasse ce
livre
puis
si
je
n'avais
pas
eu Braunstein omme
camarade
en
khâgne,
E.N.S.
et Ecole
française
de
Rome,
et
s'il n'avait
pas
travaillé sur
Venise, e
ne lui
aurais
pas
demandéetc. Un
grand
nombrede causes
convergentes,
ais
indépendantes.
Tout cela
ne
fait
pas
une histoire
rès déterministe.n somme
il
n'y
a
que
vous,
et moi
parce que
vous
venez
de me
le
raconter
qui pouvons
xpliquer
omment ous
avez
fait
ce livre ur Venise.
R.D.
-
Il
y
a en
plus
de
très
nombreuses
utres raisons
je
n'ai
dit
que
celles
qui
se
présentaient
mon
esprit.
Vous demandez
ussi
pourquoi
'ai
choisi
e commerce
es
fourrures,
omme
sujet
de thèse
d'état.
l
y
a
là
également
ne série de
hasards. D'abord le choix
de
mon
regretté
maître,
Maurice
Lombard,
qui
faisait des
cours
excep-
tionnelset semait les idées en un rayonnementerpétuel. l était
venu
faire des
cours
d'agrégation
l'Ecole Normale
Supérieur,
ur
les
Royaumes
Barbares
puis
sur les Abbassides.J'ai trouvé
que
c'était
un
professeur
xtraordinaire
je
me
suis
renseigné
t
ai
appris
qu'il
avait
un
enseignement
l'Ecole
Pratique
des Hautes Etudes.
J'y
suis
allé,
très étonné
d'y
être
généralement
eul,
sauf les fois
où
Jacques
Le Goff
ouvait
y
venir,
depuis
Lille,
ou Robert
Philippe depuis
son
lycée.
Et un
jour,
il
a
parlé
des fourrures ans le monde
musulman.
J'ai
trouvé
ela tellement
aptivant
ue je
me
suis
demandé
'il n'était
pas
possible
d'étudier
e
même
problème
dans le
monde occidental.
Maintenant
ourquoi ai-je
été attiré
par
les fourrures
Ce sont
je
pense des grainesqui sonttombéesdans un sol fécondet qui y ont
germé.
l
y
aurait eu à ce
cours
cinquante
auditeurs,
mais
pas
moi,
peut
être
n'y
aurait-il
amais
eu de
thèse sur
le
commerce
des four-
rures
n Occident
la fin
u
Moyen
Age.
l
n'y
a
là aucun
déterminisme.
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14
Donc
ce livre
sur
l'histoire es
animaux,
l
est
au
carrefour
e
deux
grands
thèmes.
D'une
part,
tout
ce
que
Lombard
dévelop-
pait
sur
l'importance
es
commerces,
tc.,
et
d'autre
part
votre
intérêt
our
les
animaux.
R.D.
-
Il
y
a
aussi le fait
que
j'étais
germaniste
t
russisant,
t
que
la
fourrure
m'attirait
ers e
monde
germanique
t
russe. Là
aussi,
j'avais
envie
d'étudier
e
vieux
russe,
e
moyen
bas-allemand
tc.,
mais
sans
quitter
'Espagne
ou
l'Italie
que
j'aimais
beaucoup.
Il
y
a
des
raisonsde
toutes
ortes.
Mais
..
R.D.
-
...et
aussi le
fait
que pour
être
Professeur
'Université,
e
Moyen
Age
me
semblait
ntéressant,
ue j'avais
envie d'être
Professeur
d'Université.
t si
je
n'étais
pas
entré à
l'Ecole
Normale
Supérieure,
je
ne
l'aurais
pas
été.
Il
faut
éviter
de se
répandre
dans
l'accessoire,
uoique
l'acces-
soire,
de ce
fait,
devienne
ransparent.
R.D.
-
Mais
c'est très
mportant
Si
je
n'avais
pas
commencé
par
faire
aupe
avant
de faire
khâgne,
on
seulement
e
n'aurais
pas
gardé
le
goût
des
sciences
«
dures
,
mais
je
n'aurais
pas
choisi la
disserta-
tion llemande u concoursde L'ENS ; j'aurais pris a versiongrecque
entré
comme
germaniste
L'ENS,
j'ai
eu
la
possibilité
d'aller
étudier
en
Allemagne
Et en
Allemagne
e
suis
allé à
Hambourg
ù
j'ai
étudié
le
vieux
russe.
Il
y
a
tellement e
choses
à
considérer.
Vous
êtes très
exigeant
vec
l'historien.
R.D.
-
Mais
il
y
a
des
historiens
ui
font
dmirablement
'histoire
des
grands
hommes,
'histoiredes
batailles,
de
l'économie,
tc.
Ceux-
là
sont
absolument
ndispensables.
t
puis
il
y
en a
qui
cherchent es
racines
plus profondes
ces
batailles
ou
à
ces faits
économiques.
ls
ne sont
pas
meilleursmais leurs
recherches u
leurs
approches
sont
différentes.ar exemple, e fais partied'unegénération ù l'on expli-
quait
tout
par
des
courbes de
prix
maintenant,
e
crois
que
les
courbes de
prix
sont
toujours
aussi
fondamentales,
mais
qu'elles
n'expliquent
ien
elle sont au
contraire a
synthèse
e
tous ces fac-
teurs
dont
nous ne
connaîtrons
amais qu'une
infime
partie
mais
dont,
grâce
à elle
nous
pourrons
spérer
n cerner
quelques
autres.
Il
vous
semble
donc
qu'un
des
moyens 'apercevoir
uelque
chose
en
histoire,
'est de ne
pas
se
précipiter
ur
tel
ou tel
type
de
cause,
mais
d'essayer
d'en
conserver u
d'en
valider a
diversité
R.D.
-
C'est ce
qu'il
y
a
de
plus
fondamental.
Dans votre façon de vous occuper des animaux,on sent la
volonté
de mettre n
valeur
cette
diversité.On
sent bien
dans
votre
ivre,
ès le
début,
uand
vous
insistez
ur
l'histoire
ropre
des
animaux,
une
façon
de débouter
oute
causalité
inéaire
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15
R.D.
-
En
effet.
es animaux ont
un
chapitre ypique,
t
en même
temps
une
façon
d'atteindre
mieux es
lecteurs
u'une
histoire
u
paléo-
magnétisme
ar
exemple,
qui
aurait
été
un ours absolument
nven-
dable.
La zoohistoire
st
plus
attirante
et
j'ai
beaucoup
de
plaisir
à
la
recherche
conographique).
C'est
par
là
qu'il
fallait
commencer
et
j'espère
que
quelques-uns
e
mes élèves
vont continuer.
Et dans
quelle
voie
?
R.D.
-
Pour commencer,a zoohistoire. 'est ce qui parle
le
plus,ce
qui
est
susceptible
de donnerdans les années
qui
viennent es
résultats
es
plus
féconds.
C'est
vrai
qu'en
France,
maintenant,
a
zoohistoire
est en route.
Du moins
l'archéo-ostéologie,
'étude
des
ossements
parce
que
là,
on
est très
bien
formé
grâce
à la
paléon-
tologie,
t
puis
au
fur
et
à
mesure
que
les
fouilles
médiévales
pro-
gressent,
u
plus
exactement
epuis qu'on
ne
jette
plus
à
la
poubelle
tous
es ossements
'animaux,
epuis qu'on
ne
détruit
lus
les couches
médiévales
pour
arriver
la
couche
antique qui
pendant
ongtemps
a
uniquement
ntéressé,
n
a de
plus
en
plus
de
matériaux,
vec
des
gens
qui
sont
capables
de les
interpréter.
l
n'y
en a
pas
beaucoup.
La zoohistoire st plus neuve que l'ethnobotaniqueu que la paléo-
botanique,
t
peut
se
développer
rès
rapidement.
Mais
il
faut
pousser
aussi
l'étude
dans le
temps
des
facteurs
bio-
tiques
et surtout
ssayer
de voir comment
out
s'emboîte.
C'est
cela
au fond
qui
m'intéresse
c'est
ce
que j'appellerais
«
l'écohistoire
,
l'histoire
u milieu
ou
histoire
de l'environnement
ien
que
chaque
expression
ouligne
un
peu
trop
que
l'homme
st
le centre
du
monde
(écologie
vient
mêmede oïkos
qui signale
a
maison)
..ilfaudrait
rouver
un
mot
meilleur
u'
«
écohistoire
pour signaler
'histoire
des
phéno-
mènes
naturels.
Aprèsvotrecolloque vous avez l'intention,u pointde vue des
institutions
e chercher
donner une
assise
à
ces
rencontres
de savants
de
différents
orizons
R.D.
-
J'aurais
bien
voulu,
mais
je
crois
que
ce n'est
pas
possible
de
penser
créerun
«
Centre
nternational
e Zoohistoire
ou,
encore
mieux,
d'Ecohistoire
Paris.
Je sais
bien
que
les
étrangers
eraient
contents
i
la France
en
créait
un ils
accepteraient
eut-être
même
d'aider un
peu
car
Paris
est une
ville
extrêmement
entrale t
agréable
comme
point
de rencontre
ntre
Allemands,
nglais,
taliens,
Espagnols
et,
bien sûr
Américains
u
Européens
de
l'Est mais
je
ne vois
pas
comment n pourraitdébloquerles créditsnécessaires.On va voir
beaucoupplus
modestement
e
20
uin
ce
qu'on
peut
fairedans
le cadre
du
CNRS et du
PIREN
(Programme
nterdisciplinaire
e
recherches
sur
l'environnement).
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16
A
noter
cependant ue
le
Ministère
e l'Education Nationale vient
de créer
pour
la
rentrée
prochaine
l'Université
aris Vili un
DEA
(Diplôme
d'Etudes
Approfondies)
'Histoire
de
l'Environnementt des
phénomènes
aturels,
nimé
par
des historiens t des
géographes
mais
en
liaison étroite
vec les
sciences de
la
Nature et
de la Vie.
Nous
espérons qu'un
certain nombre d'étudiants
de
toutes
ces
disciplines
sera
intéressé.
Et le
résultat e
tout
cela,
comment
'imaginez-vous
Une
gigan-
tesqueencyclopédie
R.D.
-
Je
pense qu'il
faut
bien
commencer
ar
un manuel de
base,
qui
rassemble
tout ce
que
l'on sait
de manière très
dispersée.
Il
faudrait
e mettre
une
douzaine de
spécialistes
et
écrire
un
livre
de
500
à
600
pages
qui
soit
parfaitement
ondé
scientifiquement.
uis,
dans une démarche mmédiatement
ostérieure
u concomitante réer
des
équipes
ntégrées.
es Russes en
ont
effectivement
ais ils
publient
peu
ou du moins l
est difficile
'obtenir eurs
publications.
n
trouve
de notre côté
qu'ils
ont
quelques
a
priori,
de
même
que
nous
parais-
sons être
champions
d'idées
capitalistes
et
bourgeoises.
l
faudrait
donc, u moinspour
a
France,
enter
e constituer
ne
équipe intégrée,comme l en existe
déjà pour
a
préhistoire,
omme l commence s'en
mettre
ur
pied pour
la
protohistoire
t
le
monde de
l'Antiquité
las-
sique.
C'est là
que je
redeviensmédiéviste t
moderniste,
ar
c'est
pour
ces
périodesque
nous
n'avons rien. Peu de fouilles
t,
quand
on
passe
à travers
es
niveauxdes
XIX
et
XVIIIe
siècles,
c'est
bien
rare
que
l'on
fasse
attention
la faune ou à la flore
nous
avons
heureu-
sement
les
préoccupations
des
géographes
et de très
nombreuses
études
rédigées
partir
de
sources
écrites.De mon
point
de
vue,
le
grand
hiatus
dans
l'étudedu milieu
t
en
particulier
e
la
faune
'étend
de
Charlemagne
ou
des invasions
barbares)
à la
Révolution
rançaise.
Il faudrait oncun Manuel Généralqui, au moinspour cettepériode,
attire 'attention
es historiens
ur
cet
aspect
de l'histoire.
En
fait,
e
n'est
pas
un
«
aspect
»
de l'histoire
R.D.
-
Si,
parce
que
les historiensdoivent continuer faire ce
qui
leur
plaît
et
à étudier ussi
bien
les batailles
que
les
groupements
humains,
etc.
tout
cela,
c'est de l'histoire.C'est
quand
même un
«
aspect
de
l'histoire
ue
d'essayer
de mettre
outes
ces
études dans
une
vue
globalisante.
Du
côté
des
mathématiciens,
n
tire notre
chapeau
au
groupe
Bourbaki
ou à Weierstrass
ui
ont
essayé
de
refondre
es
mathématiques,
ais
il
fallait
bien
qu'il
y
ait
des
mathé-
maticiens ussi géniaux,que ce soit Fermat,ou Cauchyou autres,
qui poussent
a
recherche
mathématique
ans
tel
ou
tel
domaine.C'est
pareil,
l
n'y
a
pas
de hiérarchie
il
y
a
plusieurs
manières
de
faire
avancer
l'histoire,
ar
la
base
comme
par
les
couches
superficielles.
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17
Cependant
on
petíř
ontestera
comparaison
Il
semble
plus
vrai-
semblable
qu'un
secteur
particulierpuisse
avoir sa
légitimité
parce
gwe
on
homogénéité,
n
mathématiques
alors
qu'on
envi-
sage plus difficilement
u'un
secteur
historique
puisse
s'isoler
pour
trouver n soi-même es
faisceaux
de causes
dont
vous
montrez
u'ils
sont
toujours
l'œuvre
R.D.
-
Mais
il
faut
quand
même
connaître
es événements.
l
faut
que
des
historiens
défrichent 'événement.
i
Ton ne
connaît
pas
l'événement,e n'estpas la peined'en chercheres causes. Les mathé-
matiques
me
sont venues
tout
de
suite à
l'espritparce
que j'ai
beau-
coup
aimé les
mathématiques,
u l'histoire
des
mathématiques
mais
je
tiens
quand
même à la
comparaison.
l faut bien
que
des
collègues,
qui
peuvent
voir du
génie,
défrichentes
événements,
u établissent
des
faits,
vec la
pluralité
des
causes
qui
semblent es
avoir
portés,
avant de
pouvoir
en
rechercher
uelques
autres,
plus profondes
t
mieux
achées,
par
un
simple
ravailde routine
t
à
partir
d'un
nouveau
questionnaire.
Pour
faire
se
correspondre
t s'emboîter
es
savoirs,
vous
n'avez
pas
tout à
fait
répondu
ma
question
ur
l'encyclopédie
après
le Manuel qui est le pointde départ comment e pratiquerait
ce
genre
de savoir
R.D.
-
Une fois
que
ce
Manuel,
ue
ces
quelques principes
eraient
définis
ar
un
groupe
de
savants,
l
faudrait
éunirdes
équipes
pour
étudier
des
événements
déterminés.
Ce
qui
manque
surtout,
pour
l'instant,
e sont les bonnes
questions
à
poser;
on
peut essayer
d'en
réunir ne série
nouvelle,
ne
espèce
de
questionnaire
our
l'ensemble
de
l'histoire
umaine.
i les bonnes
questions
sont
posées
aux
spécia-
listes,
ls donnent e bonnes
réponses.
Dans
le
cas
du blé
qui pousse
différemment
elon le
champ
magnétique,
n s'adresse
à
des
gens
spécialistesdu magnétisme, es gens spécialistesde botanique,de
pédologie,
de
climatologie,
galement
e
sociologie
ou
d'anthropologie
historique
on
élabore un
modèle
et
on
y
ajoute
le
champ
magnétique
qu'il
y
avait
à
l'époque. Ça
donne
quelque
chose
ou
ça
ne donne
rien
c'est
une
question qu'on
pose.
Elle ne
donnera
probablement
ien,
parce qu'il y
a
d'autres
causes
qu'on
ne connaît
pas
et
qui
étaient
aussi
importantes
ue
le
paléomagnétisme...
t au
fur t à
mesure
qu'on
trouve
es
correspondances,
n accroît
e
questionnaire
e base
et
donc
les demandes
adresser
aux
spécialistes.
Autre
xemple,
'armée
austro-hongroise
e
la
guerre
1914-18 st la
seule dont
on
puisse
étudier
à
peu près
les
groupes sanguins,pour
la bonneraisonque les pionniers ans cettediscipline, andsteiner t
son
équipe
étaientde
Vienne.
On
en
a,
paraît-il,
'assez bonnes
archives
et il
semble
qu'il
serait
possible
d'en
tirer
u moins
plusieurs
entaines
de
milliers
de données
pour
cette
mosaïque
de
peuples
que
rassem-
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18
blait cet
Empire, après
les
grands mélanges
du
Moyen Age
et de
l'époque
moderne
mais avant les événements es
récentes
décennies.
Et si l'on arrive à tracer
une carte
hématologique,
ui
est
déjà
de
l'histoire,
n
peut également
hercher
savoir
non
seulement
i elle
s'expliquepar
l'histoire,
mais encore
si elle
peut (partiellement)xpli-
quer
certains
faits
historiques.
On
peut imaginer u'au fur
et à
mesure
que
ces
registres
de
causes
se
complètent eu
à
peu,
on
finissepar
avoir sinon tous
les filsdu faisceau..
R.D.
-
...on
ne les aura
jamais,
mais
on
pourra
mieux
expliquer
un
certainnombrede
phénomènes istoriques ui jusque-là
n'étaient
ue
constatés.
Et
je
me
demande si
parfois
cela ne nous
donne
pas
une
meilleure onnaissance
de l'avenir.Par
exemple,
i nous revenons
ux
animaux,
et en
particulier
ux
criquets,
a connaissance du
présent
a certes
précédé
celle du
passé
mais le
passé
a
largement
onfirmé
que
c'était dans les
régions
grégarigènes
u'il
fallait
et
qu'il
faudra)
intervenir
our
se
défendre
ontre eurs invasions.
Dans de nombreux
cas
l'étude
historique
des facteurs de l'environnement
eut prédire
ce
qui
risque
de se
passer.
Et
plus
on
ira,
plus
on
pourra
se
poser
de
questions ur le passé à la lumièredu présentmais aussi sur le futur
à la suite
du
passé.
On
a
l'impression ue plus
vous
montrez
es
chances
qu'on
a de
saisir
'enchevêtrement
es
causes,
en
même
temps,
ous
montrez
de
la
même
façon
qu'il
va
«
en rester
.
R.D.
-
Il
y
a
effectivement
n
hasard. Rien ne
peut
«
expliquer
Venise. On connaît
un
certain nombre
de
causes,
mais aucune de
fondamentale,
i a fortiori e faisceau
explicatif.
n va connaîtrede
plus
en
plus
de causes
portant
un même
événement
mais,
dans l'état
actuel des
choses,
l
en reste
d'inconnues,
t
d'inconnaissables,
u'on
appelle e hasard.
Propos
recueillis
par
F.
Jacquesson,
le 12
juin
1985
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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YVONNE REGIS-CAZAL
LA
PAROLE DE
L'AUTRE
Jusqu'à
ce
que
vacillent es droits
de
la
langue paternelle...
R.B.
Depuis
le
IX* siècle et
la Réforme
arolingienne
1),
l'Eglise
doit
faire face à une
situationde
clivage
inguistique.
e
peuple
chrétien,
dans la
mesureoù est
avérée 'irréductibilitée la
langue vulgaire
u
latin,
apparaît
divisé
désormaisentre itterati ceux
qui
maîtrisent
le latin angue avante,angued'Eglise et ceuxqui ne le comprennent
plus,
es illitterati
S'imposent,
lors,
d'autant
plus,
a
nécessité t l'ur-
gence
de la
pastorale.
Entre
e culte d'une
Parole révéléedans la
forme
même
qui
l'a
transmise,
ans son
mystère
ui
en confirmea
sacralité
et ce devoir
évangélique
vers ses
destinataires es
plus
urgents,
ne
distorsion
'instaure.
Sur le
mode
du
compromis,
ans
un
but
d'efficacité,
lusieurs
olu-
tions furent
doptées
la
prédication
n
langue
romane
(2),
la
glose
et
le
commentaire voire a
traduction
ure
et
simple
sont
autant
de
moyens
de redoubler n
texte atin devenu
ncompréhensible.
ans
cette ntreprisea languevulgaire emeure tilitaire,épendante ormel-
lement du latin
vis-à-vis
uquel
elle entretient
n
rapport
de
redon-
dance.
l
s'agit
de
suppléer
l'opacité
du latin
pour
es
profanes
ar
la
multiplication
es canaux
d'expression.
e ce
point
de
vue,
a
dramati-
sation de
la
liturgie,
e
l'Ecriture
ainte
occupe
une
place
exemplaire.
De
façon
analogue
au
catéchisme
ar l'image,
pour
enseigner
t
émou-
voir,
'Eglise oint
e
geste
à la
parole.
Le
drame,
genre
ssentiellement
(1)
On considère raditionnellement
ue
les
recommandationsu concile
de
Tours
de 813
marquent
'étape
finale e la
prise
de
conscience e
l'oppo-
sition ntre atin t languess) vernaculairess). Nous en rappelonse textecélèbre «Et ut easdemhomiliasuisque perte ransferretudeatn rusti-
caniRomanam
inguam
ut
Thiosticam,
uo
facilius
uncti
ossint ntelligere
quae
dicuntur.
(2)
M.
ZINK,
La
predication
n
langue
omane vant
300,
aris,
976.
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20
polyphonique,urimpose
u
texte,
a
mimique,
a voix. l
y
avait dans
cette
convergence lace pour
cette
voix
particulière,
mmédiate
et
efficace,
elle de la
langue populaire.
Le
bilinguisme
'introduit ans
le drame
iturgique.
Pour
certains,
a
langue
romane
pparaît
-
comme dans
les
autres
productions
ittéraires
orgées
n milieu
ecclésiastique
asservie au
latin,
dépendante
ous forme de
glose.
Toutefois,
'ensemble de ces
drames ne
peut
se réduire à une
simple
entreprise
e
vulgarisation.
Tout au contraire,e mélangedes languesobéit à une volonté esthé-
tique particulière.
'irruption
e
la
langue vulgaire
ntroduit
ne autre
parole,
celle
de
l'effusion
yrique
qui
contredit t
complète
e texte
narratifatin.Par
là-même,
e
bilinguisme
enoue vec des fins
pédago-
giques.
En
effet,
es interventionsuscitent n mode de
participation
de l'auditoire adicalement
utre,
non
plus
intellectuelmais émotionnel
et
-
semble-t-il voulu tel. La
langue
profane,
yrique, étérogène
u
discours
dramatique,
n
dessine
es
limites,
écupère
t
met
en scène ce
qu'il
exclue
l'expression
ittéraire t
profane
de la douleur
person-
nelle. Ce
faisant,
a
langue vulgaire permet
une
identification,
ne
participation
ur le mode de la reconnaissance. nséré dans le
drame,
le refrainroman en signale sous la formede la citationlittéraire
profane,
'extérieur.
ais cet
extérieur,
l
le ramène
dans le drame sous
la
forme
d'une
image
de la
littérature
rofane.
Ce
que
le
bilinguisme
des drames donne à
voir,
c'est moins
a
consciencedouloureuse
d'un
clivage
que
la maîtrise réussie mais
peut-être
ans avenir
de deux
traditions, atine,
narrative
t
sacrée
d'une
part,
profane,
yrique
et
romaned'autre
part.
L'usage
de la
langue
vulgaire
Les
drames
iturgiques
ont
les héritiers
e
ces
amplifications
er-
bales d'un
passage
de l'Ecriture
que
l'on nomme des
tropes
(3).
Ils
apparaissent
u IV*
siècle,
'épanouissent
ous la Réforme
arolingienne.
Sous forme
d'introduction,
'interpolation
u
de
conclusion,
ls
se
greffent
ur le
rituel
iturgique
xistant,
n utilisent
a
théâtralité. es
rites
uniquementgestuels
comme
la
Depositio,
déposition
du
corps
du Christ
et
VElevatio,
e
dimanche
de
Pâques
sont
complétés
par
(3) Sur l'originedes drames iturgiquese reporter l'articledeH.F. MULLER,
Prehistory
fthe medieval rama theantecedentsf the
Tropes
nd
the
conditions
f their
pparition
,
in
Z.R.Ph.,
XLIV,
p.
544-75,
1975.
(4)
Tous
ces textes ont
recensés
ar
K.
YOUNG,
The drama
of
the
medieval
hurch,
ome
pour
es
origines,
ome
pour
e texte
es drames.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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21
la
Visitatio
sepulchri
où est
amplifié,
dramatisé,
le
dialogue
de
l'Evangile
entre
es femmes t
l'ange
du
tombeau,
ntre Madeleine et
le
Christ
4).
La
constitution u
corpus
dramatique,
rèsbien
représenté
à
partir
du
XIe
siècle,
se fait donc sur le mode de
l'interpolation.
a
transition st aisée entre a
dramatisation
'un
passage
narratif t la
farcitured'un
texte
latin,
lui
aussi
préexistant,
l'aide de
gloses
romanes.
C'est ainsi
qu'à partir
du XI*
siècle,
à
côté des
drames
latins,
apparaissent
es drames
bilingues.
ls sont
peu
nombreux.
e
plus
ancien
est
un
remaniement
ilingue
d'une dramatisation e
la
parabole des Vierges sages et des Viergesfolles, e Sponsus. Il date
du XIe
siècle.
Ensuite,
u XIIe
siècle,
on trouveune farciture omane
des
répons
de la
Septuagésime,
uivie d'une
dramatisation
ous forme
de
glose
du sermon
attribué
Augustin
«
Vos,
inquam
convenio o
Judaei...
,
plus
connu
sous le nom de Procession des
prophètes,
'en-
semble
porte
e
titrede Ordo
repraesentationis
dae ou Jeu
d'Adam
Proches de ce
dernier
par
bien des
aspects,
viennent nsuite
un
frag-
ment
de
jeu,
La
sainte Résurrection insi
qu'une
Visitatio
sepulchri
provenant
u monastère éminin
'Origny-Sainte-Benoîte.
eux drames
bilingues,
ne
Résurrection e
Lazare
et un Miracle de saint
Nicolas
dont l'auteur
nous est
connu sous
le
nom
d'Hilaire,complètent
'en-
semble 5). Six drames,donc,
qui
utilisent iversemente
mélange
des
langues.
Un
corpus
malgré
tout dont le
petit
nombre
nterroge.
De
ce
groupe
de
textes,
es
historiensdu théâtre n'ont
souvent
examiné
ue
le
plus
célèbre,
e Jeu d'Adam en ont étendu es caracté-
ristiques
ux autres
œuvres
bilingues
n ce
qui
concerne
plus
particu-
lièrement e rôle et la fonction e la
langue vulgaire.
Or,
dans
ce
drame,
a
langue
profane
st
à
la
fois
complètement
ubordonnée ux
répons
atins
qui précèdent
hacune de ses
interventionst totalement
émancipée
ussi dans la mesure ù elle
assure,
eule,
e
discoursdrama-
tique.
Le
jeu
est une dramatisation u Liber
responsalis
de
Grégoire
le Grand,plus précisément e la liturgie u dimanchede la Septuagé-
sime. De ce
texte atin sont extraits
ept répons
dont six
apparaissent
dans
la
première
partie
du drame
-
Adam et Eve
au Paradis
puis
chassés
-
tandis
qu'un
seul concerne e meurtre
d'Abel. Ces
répons
entretiennent
n
rapport
autoritaire vec le texte
roman. En
effet,
rien
n'est
dit
par
la
langue vulgaire
qui
ne l'ait été
par
le
chœur,
n
latin.
Considérons
es
premières épliques
du Jeu
entreAdam et
Dieu,
elles
traduisent
e texte
iturgique ui
les
encadre
(5) L.P.THOMAS, e Sponsus, aris, 951.
P.
AEBISCHER,
Le
mystère
'Adam
Ordo
repraesentacionis
de),
Textes ittéraires
rançais,
enève,
964.
J.G.
WRIGHT,
a résurrectionu
Sauveur,
.F.M.A.,
aris,
1974.
J.J.
HAMPOLLION-FIGEAC,
ilarii
versus t
ludi,
Paris,
1838.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 24/155
22
«
Formavit
gitur
ominus
hominem e
limo terrae
t
inspiravit
n
faciem
ejus spiraculum
vitae et
f
ctus est
homo
in animam
viventem
(6).
Quo
finito icat
Figura
Adam
Adam
Sire
Figura
Fourmé
e
ai
De limo terre.
Adam
Bien le sai
De même la finde la scène
Tunc
Figura
manu
demons ret
paradisum
Ade,
dicens
Adam
Adam
Sire
Figura
Dirrai
toi mon avis.
Veez cest
ardin
?
Adam Cum
ad nun?
Figura
Paradis.
Adam Mult
par
est bel
Figura
Jel
plantai
e asis.
Qui
i
maindra erra mis
amis.
Jol toi comand
por
maindre
por
garder.
ce
qui
correspond
la
suite
du
premier épons
u
au débutde la scène
«
Plantaverat
utem
Deus
paradisum
voluptatis principio,
n
quo
posuit
hominem
uem
formavit.
Le
patronage
du
texte atin
est tel
que
la
mise en
dialogue
est
bien
maladroite.
La
langue
vulgaire
redouble
'information onnée
par
le
chœur
comme
le
montre a
réplique
d'Adam
«
Bien
le
sai ».
Les
latinismes
omme
«
de
limo terre
soulignent
a
dépendance.
a
langue
vulgaire,
ci,
traduit
mais elle reste
encadrée
par
le texte
liturgique
latin. l est vraique nousavons choisi e début et la finde la première
scène,
c'est-à-direes
points
de
contact entre es
deux
langues.
C'est
qu'ils
sont
révélateurs e la
subordination e la
langue vulgaire
au
latin,
de
sa
fonction
ssentiellement
ulgarisatrice.
ntre ces deux
groupes
de
répliques,
e
placent
es
dialogues
entre Adam
et
Eve
qui
n'émanent
pas
du
texte atin. Ils
sont
pure
création du
dramaturge
médiéval et ce sont eux
qui par
leur
vivacité et leur
pittoresque
assurent a
qualité esthétique
du
jeu,
en
justifient
e
succès
jusqu'à
nous. Mais
plus
de
mélange
des
langues
ci.
Ces
parties
authentique-
ment
dramatiques
du
jeu
sont
véhiculées
ar
la
seule
anguevulgaire.
(6)
«
Le
Seigneur
modela
'homme
vec de la
poussière rise
du sol.
Il
insufflaans ses narines'haleine e
vie,
t l'homme
evint
n
êtrevivant.
Gen.
I,
7,
trad,
œcuménique.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 25/155
23
Le
Jeu d'Adam est à
peine
un drame
bilingue,
es hésitations
des
éditions
modernes
n
témoignent.
es
plus
anciennesne donnent
ue
l'incipit
des
répons,
a
pièce
devient
française,
es
plus
récentesresti-
tuent
'intégralité
e la
leçon
liturgique,
e
faisant,
lles révèlent
un
texte
double.
Texte
attachant
t
révélateur
u fonctionnement
e la
farciture
7)
mais
qu'il
serait
trompeur
e
prendrepour
modèle du
fonctionnemente la
langue
profane
n
contexte atin. Elle
s'y
révèle
redondante t subordonnée la
langue
d'Eglise.
La sainte Résurrection
et
la
Visitatio
epulchri
d'Origny-Sainte-Benoîte
ont semblables
cet
égard.De telsdrames, 'ils rendentomptede l'avenirde l'évolution u
genre
(la
présence unique
de la
langue
vulgaire
quand
elle se sera
annexé ce domaine
religieux)
ne disent rien
de
l'utilisation
des
res-
sources
dramatiques
t
esthétiques
u
mélange
des
langues.
Pour
résoudre
e
problème
de la
communication,
e l'éducation
religieuse
ans une société
bilingue,
ôt ou
tard
l'Eglise
aura recours
à la
traduction,
e
plus
en
plus
à la
langue
profane.
Mais
du terme
de cette
évolution
ue
nous
connaissons,
l ne faudrait
pas
déduire
que
les œuvres
bilingues
ont
autant
d'étapes
transitoires ans une
histoire littéraire
conçue
linéairement.
ien
souvent,
pourtant,
es
historiens u théâtre eligieux nt vu dans le bilinguismeittéraire,a
marque
d'une
telle transition u latin des drames
primitifs
l'ancien-
français
des
mystères.
es drames
bilingues,
ls les ont
appelés
de
façon
révélatrice
semi-liturgiques
. La
chronologie
e
confirme
as
une telle
hypothèse.
u
cours
du XIIe siècle on trouve es
trois
types
de
drames, atin,
roman
et
bilingue.
Une fois de
plus,
comme
pour
la
littérature
rofane,
n n'assiste
pas
à
une
genèse,
e
plus
ancien drame
bilingue,
e
Sponsus,
est aussi
un de celui où
le
mélange
des
langues
est le
plus
savant.Le
drame
bilingue,
hronologiquement,'occupe pas
de
position
médiane.On ne
peut pas,
non
plus,
attribuer
l'apparition
de la
languevulgaire
ne fonction
e
sécularisation.
Il est vrai
que
le drame naît
dans
l'église
pour
s'acheminer ers
le
parvis,pour
s'installer
nfin ur la
place
et dans les rues de la
ville.
Mais cette sortie
vers
le
profane
ne
s'accompagnepas
systématique-
mentde
l'usage
de la
langue
vulgaire.
Au XIVe
siècle,
bien
après
nos
drames,
une Présentation
e la
Vierge
fut
donnée dans
la ville. Elle
était en latin
uniquement.
Des indications de mise en scène
très
détaillées
précèdent
e texte
du drame.
Tout à
la fin
de cet
ordo,
son
auteur
pensant
au
peuple d'Avignon
qui
la
représentation
tait
destinée,
autorise
une
traduction
n
quelque
sorte simultanée des
paroles
de Marie et des autres
acteurs
(7)
Voir,
ce
propos,
'excellentrticlede William
NOOMEN,
e Jeu
d'Aaam,
aris,
971.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 26/155
24
«
Et
notandum
uod
carmina
de
Laudibus
Virginis uprascripta
ue
per Angelos
t
personas
alias
suprascriptas
lta voce cantabuntur
seu
proferentur,
evotísima unt
ac
certe lacrimabilia
pre
devo-
tione
maxime fidelibus
grammaticam ntelligentibus
sed
quia
vulgaris populus grammaticam
non
intelligit,
i
videtur ex
e-
diens
(8),
et Nostra
Maria dulcíssima in
cordibus devotorum
suorum
per
gratiam
nspiraverit,
ranslatari
poterunt epetacta
carmina in
vulgāri
dictamine t
vulgariter
imili
modo dictari
poterunt
(9).
Le lieu de la
représentation,
on caractère
profane
ou
religieux,
a
langue utilisée sont trois paramètresessentiels dans l'évolution du
drame
médiéval mais ils ne
se combinent
as
obligatoirement,
ont
loin en tout
cas d'être
univoques.L'apparition
de la
langue vulgaire
dans les drames
bilingues
révèle
davantage
une maîtrise
grandissante
des
techniques dramatiques
qu'une
sécularisation
de leur contenu.
Il
existe des
jeux
où les deux
langues
se
répartissent
elon les
person-
nages.
Les
plus
sacrés,
es
personnes
divines
et
les saints
n'usent
que
du
latin,
es
plus
profanes
ne
s'expriment
u'en
langue
vulgaire.
Dans
le but
de
différenciere discours de ses
personnages,
e
dramaturge
a utilisé les ressources d'une société
bilingue.
Ainsi,
le marchand
d'onguents
u
Sponsus
ne
parle jamais latin,
au
contraire es autres
acteurs. Mais dans des drames
uniquement
atins,
Yunguentarius,
création
médiévale
est
déjà présent.
S'il
est
signe
de
sécularisation,
la
langue vulgaire
ne le crée
pas.
Il
parlait déjà
un
registre
bas,
quotidien
du latin.
Longtemps
onsidéréecomme une variante
popu-
laire,
«
rustique
,
du
latin,
a
langue
romane continue
en
jouer
le
rôle
(10).
Elle
souligne,
plus
efficacement.
e théâtre est un
genre
polyphonique,
a
langue populaire
y
a
sa
place
comme
les
humbles.
Outre a fonction
roprement
echnique
e
caractérisation 'un
person-
nage,
elle facilite
ans doute l'identification
opulaire.
Nous verrons
plus
loin
que
dans ce but elle
met en
œuvre
d'autres
moyens.
Une
autre
parole
: L'effusion
lyrique
La
langue vulgaire
ntretient
ans
les
drames
examinés
plus
haut
un
rapport
de
dépendance
vis-à-vis
u
latin. Pour bien
des
historiens,
(8)
C'estnous
qui soulignons.
(9)
Manuscrit
atin,
.N.
n°
17330,
°
18r
24r,
dité
par
Young,
p.
cit.,
p.
202-208.
Remarquons,
nfin,
ue
si
les vers ités
plus
hauts la
louange
de la
Vierge ue
doivent
hanter
u
dire haute oix
es
anges
u
les
autres
personnages
entionnési-dessus uscitenta
piété
et même es
larmesde
{)iété,
peuple
c'est
ordinaire
urtout
uprès
ne le
comprend
des fidèles
pas,
ui
on
omprennent
pourra,
i
e
on
atin.
le
juge
ais,
nécessaire
uisque
e
peuple
rdinaire
e le
comprend
as,
on
pourra,
i on le
juge
nécessaire
etque la trèsbonneViergeMarie nspire e sa grâce e cœurde ses fidèles,
traduire
es mêmes ers
en
langue
vulgaire
t les dire de la même
façon
dans
a
langue
u
peuple.
(10)
Sur
l'évolution
es
termes
ésignant
a
langue
vulgaire,
ous ren-
voyons
l'article
e H.J.
MULLER,
On the use of the
expression
lingua
romana"
rom
hefirsto the
ninth
entury
,
in
Z.R.Ph.,
LIII,
p.
9-19,
923.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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25
elle
s'y
réduit.
econdaire,
ncadrée
quand
elle
glose
des
répons
atins,
ressource
technique
uand
elle individualise e
parler populaire
d'un
personnage,
lle
n'est
que
recours
bligé
-
il faut
se
faire
comprendre
des illiterati ou
langue
pittoresque.
l
est,
cependant,
es
drames
où elle
signale
moins
a
langue
de l'autre
qu'une
autre
parole
et une
autre ittérature. es drames où
elle
n'est
plus
asservie,
tilitaire
mais
complémentaire.
elle revient
une autre
fonction
ue
n'assume
pas,
que
ne
peut
assumer e latin
faire
place
à
l'expression
e
la
douleur
personnelle.
Ces
drames
se
signalentpar
le fait
que
la
langue
vulgaire
ne
constitue
ni
le discours
unique
d'un
personnage
ni une
reprise,
une
glose
du
latin. L'alternance
y joue
au
sein
d'une même
réplique.
On
touche
dans ces œuvres
véritablement
ixtes à l'utilisation
sthé-
tique
du
bilinguisme.
ls sont
peu
nombreux
ans
ce
genre
déjà
faible-
ment
représenté.
rois seulement Le
Sponsus,
La
résurrection
e
Lazare
et
Le
miraclede saint Nicolas. Le
mélange
des
langues
n'est
pas,
dans ces
trois
pièces,
e fait de
tous
les
personnages.
'ange
Gabriel
et
l'Epoux
du
Sponsus
encadrentde
tirades latines les
répliques
bi-
lingues
des
Vierges
t
le discours omandes marchands. ne hiérarchie
se dessine, ci entre les degrés de sacralité des personnages. aint
Nicolas
dans
le Miraclede saint Nicolas n'utilise
ue
le
latin,
e
barbare
aussi
quand
l
parle
à
l'imagereprésentant
e saint u début insi
qu'à
la
fin
uand
l
décidede
se
convertiru christianisme.ntre es
deux,
lors
qu'il
est seul devant a cassette
vide,
l
fait alterner es
deux
langues.
Marthe
t
Marie,
es
sœursde Lazare
déplorent
a mortde leur
frère n
répliquesbilingues
mais
répondent
n latin aux
Juifs,
u
Christ
et
à
Lazare
qui
n'usent
que
de cet idiome. La
répartition
u
bilinguisme
et
du
monolinguisme
e révèle
pas
seulement
es
degrés
de sacralité
mais aussi des différences'intensité
ramatique.
En
effet,
a
langue
profane
'intervient
u'à
des moments
récis
et
toujours
emblables
- dans le déroulement e l'action.En fait,elle interromptt immo-
bilise le discours
dramatique,
'entraîne ers ce
qui
-
historiquement
et
techniquement
lui est une tentation t
une menace l'effusion
lyrique.
Dans un
premier emps,
ne concordance
emarquable
pparente
es
répliques
bilingues
elles ne
jaillissent
de
la bouche des
personnages
que lorsqu'ils
ont seuls. Le
bilinguisme
st
toujoursmonologué.
Marie
puis
Marthe
uand
Lazare est mort
et
que
le Christ
arde,
e barbare
dérobé,
es
Vierges
follesdémunies vant
'arrivéede
l'Epoux,
tous
ces
personnages
brusquement
onfrontés
eux-mêmes nt recours au
bilinguisme. udemeurant,l s'agitmoinsd'unesolitudede circonstance
que
de
la
constatation
'une
perte qui
apparaît
irrémédiable.
itons
à la
suite,
our
en
souligner
a
ressemblance,
e début de
ces
premières
répliques
bilingues
Marie,
œurde
Lazare,
au vers
25
de la
pièce
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26
«
Ex
culpa
veteri
Damnantur
osteri
Mortalesfieri.
Hor ai
dolor,
hor est
mis freremorz
por que
gei plor.
»
Les
Vierges
folles
qui
n'ont
pas
su rester
veillées
«
Nos
virgines,
uae
ad
vos venimus
negligenter
leum
fundimus
ad vos orare, orores, upimus
ut
ad
illas
quibus
nos
credimus.
Dolentas
Chaitivas
Trop
i
avem
dormit.
Le
Barbare,
enfin,
onstatant
e vol
«
Gravis
ors
et dura
Hic
reliqui
plura,
sed sub mala
cura
Des
quel
domage
Qui
pert
a
sue
chose,
purque
n'enrage
»
Le
bilinguisme
pparaît
avec
la
perte,
humaine ou d'un
objet.
Si les
personnagesontseuls sur scène, 'est qu'ils ontperduce qui justifiait
leur
rôle
même. La
trame atine
de ces
drames est
bâtie sur la circu-
lation
de
l'or,
de
l'huile,
du
frère
aimé. L'action
est
scandée
par
la
crainte
de la
perte,
a
constatation,
a
réparation
ou
son caractère
irréversible
ans le
cas des
Vierges
folles.
Or,
les
répliques
bilingues
occupent
ne
place
centrale,
près
l'exposition
t
avant e dénouement
latins,
elle de la
crise. Mais
pour
dire a
perte
et le
vide,
e latin et le
roman
de ces
répliques
mixtes
ne
recourent
as
aux
mêmes
moyens,
au même
discours.Ce
serait
simple
rapport
de
glose,
de
redondance
entre es deux
idiomes,
a
langue
vulgaire
serait
dépendante
omme
dans les
drames
du
type
du Jeu
d'Adam.Mais
il
n'en est rien.
Le latin
est narratif,a languevulgaire e fait chant yrique.Tous deux disent
la douleur
mais
de
façon
différente
t même
contradictoire.
onsidérons
la
suite de la tirade
bilingue
de
Marie
«
Per cibum
vetitum
Nobis
interitum
Constat
mpositum
Hor
ai
dolor,
hor
est mis
freremorz
por que
gei
plor.
»
L'ensemblede
la
réplique
est
forméde
quatre
couplets
composés
de
trois vers atins et de troisversromans.Au latinrevient 'explication
doctrinale e la
morthumaine
«
Ex
culpa
veteri
,
depuis
a
première
faute,
es
hommes ont
mortels. e
cette
origine
onnue t ici
reconnue,
découle une
histoire ollective ù
Marie
s'inscrit
«
nobis .
Le
person-
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 29/155
27
nage
s'inclutdans le
groupe
des
«
posteri
donc des
«
mortales
.
Le
vocabulaire
est
savant,
es
personnes
des verbes sont
au
pluriel,
a
syntaxe
elie
passé
et
présentpar
des
prépositions
ui
instaurent
ne
fatalité,
n
processus
historique
mais aussi une
responsabilité,
ex
»,
«
per
».
Marie,
en latin
rappelle
la
doctrinechrétienne
ur
la mort
humaine
ui
en adoucit
e scandale
puisqu'elle 'explique.
L'expression
de sa douleur
st à
proprement arler
difiante. ais à
quatre
reprises,
les vers romans viennent ontredire e
processus
narratif.
a
parole
qu'ils
véhiculent
'est
plus
collective
mais individuelle. e
qui émerge,
massivement, ans les partiesromanes, 'est la premièrepersonne
dans les formesverbales
«
hor ai dolor
,
par
le
possessif,
«
mis
ir
r
»,
par
la
présence
du
pronom
personnel
ujet,
souvent
nexprimé
en
ancien-français
ais
ici,
nsistant,
rédicatif
t
redondant,
por
que
gei
pior
». Ceci
est d'autant
plus
remarquable ue,
lorsqu'elles
utilisent
le
latin
pour
s'adresser
ux autres
personnages,
arthe t
Marie
parlent
ensemble.
Elles sont les sœurs
de
Lazare,
indifférenciées.
uand
elles
alternentes
langues,
lles retrouvent
ans
l'expression
e leur
douleur,
une
parole
individuelle.
Formellement
ussi,
les vers
romans
se
signalent
par
leur
hétéro-
généité.
Le mètre est alterné
4/6/4.
e vers médian
reprend
'hexa-
syllabe
atin
qui précède.
C'est,
au demeurant,ui
qui
rappelle
'infor-
mation
Lazare est mort.
es deux vers
qui
l'encadrent ont
plus
brefs
-
4
syllabes
ils
ne
disent
rien mais redoublent
ne
gestuelle
de
la
douleur
par
le cri. ls
s'opposent
l'explication
istorique
ar
un
rappel
têtu
du
présent
«
hor
répété
deux fois.
Au
lieu de
monnayer
n
événement
n
étapes,
en causes et en
conséquences,
ls
superposent
la
douleur
et sa cause
pour
revenir la
douleur.
Le
latin, ui,
tentait
de
donner
a
raison
de la mort. Les
vers romans disent
e
présent,
le refus de
l'Histoire,
ls
sont doublement
autologiques,
is-à-vis u
geste
qu'ils
prolongent,
ntre
eux
parce
qu'ils
ne font
que
se
répéter.
S'ils tiennent u cri,encorebien prochedu corps,c'est aussi dans la
mesure
où ils sont
composés
quasiment
de
monosyllabes,
u'ils
sont
moins délivrance
d'un sens
que
variation
ur un
couple
de
sons,
le
/o/
ouvert
t le
/R/.
eur musicalitémême es
oppose
au
latin comme
le
lyrique
'oppose
au narratif.
Une
parole,
dans les vers
romans,
aillit,
sur
le
mode
du
lyrisme.
Elle se
place
aux limites
du
discours
dramatique
atin
qui répète
a
doctrine,
a
position
de foi.
Elle
récupère
insi un mode
d'expression,
délaissé
par
le latin.
Hétérogène,
étérodoxe,
uisqu'elle
tourne
e dos
à
l'explication,
l'histoire
ollective,
lle
correspond
dans le
drame
liturgique
u moment
ù
la
foi
vacille,
où les héros sont bien
près
du
désespoir.Elle n'est toutefois as hérétique ar la suite du drame se
chargera
de
réparer
a
perte,
de montrer 'efficacité
ivine,
n
instant
remise n
question.
Mais les
personnages
ans leurs
répliquesbilingues
sont
parfois
bien
proches
du
blasphème.
Ces
monologues
nt
en
effet
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 30/155
28
parfois
un destinatairemais
il
est
absent ou sourd
aux
suppliques.
C'est
le
Christ,
'image
de saint Nicolas
qui
devait
garder
e
trésor,
qui
par
leur
retard,
eur
démission nt
permis
a
perte,
a mort et
le
vol. Alors es
personnages
clatent n
reproches,
n
menaces
dans les
vers
latins,
mais le refrain oman
en révèle l'inutilité.Ainsi Marthe
à Jésus
«
Si
venisses
primitus
dol en ai
Non esset gemitusBais frere, erduvos ai »
Les moments
bilingues
ont autant de mises
en scène d'une tension
entre
deux discours Le discours
dramatique,
ocialisé et
orthodoxe t
l'effusion
ndividuelle ourde aux
explications.
ette dernière st
véhi-
culée
par
la
langue
populaire,
elle facilite
ainsi l'identification
hez
l'auditoire. lle dramatise
es
objections
11),
théâtralise
a révolte t
la douleur.Nous sommes oin du
compromis,
'est dans
leur
différence
essentielle,
ans
-
semble-t-il
leur rréductibilité ême
que
les deux
positions
et les deux
langues
sont confrontées. 'est dans
la
tension
que
nous voudrionsmontrer
entrifuge
t
centripète ue
se dit
la
leçondu drame.En prenante risquede laissersurgir ne autrevoix,
contradictoire
t
désespérée, 'Eglise
illustre ce
qui
la divise
-
la
bi-polarité
inguistique
,
cerne les résistances
que
rencontre
on
entreprise
missionnaire
'éducation u
peuple.
« Moins
la trace
d'une fissure
que
le double
aspect
ďune
unité »
(12)
Sur le
plan
formel
omme sur celui
du
sens,
la
langue
vulgaire
s'oppose au discours atin. Si cetteopposition e transforme n ten-
sion,
si elle est
féconde,
'est
qu'elle
est
redoublée,
renforcée
ar
le
mode
d'apparition
e la
langueprofane
l'interruption
t la récurrence.
(11)
L'Eglise
'est
trouvée onfrontéerèstôt
-
dès le IXe
siècle
au
problème
e la
participation
es laïcs à la
composition
e
tropes
estinés
à
élargir
e
corpus
iturgique.
a
méfiancest de
règle
à
l'égard
de ces
compositionsrivées.
our
des raisons 'orthodoxie'abord.
Quand,
la fin
du VIIIe
siècle,
e
triomphe
éfinitifu rituelromain
emble
mettre in
aux tendances
ovatrices,
'interdictione maintient
our
des
raisons,
ette
fois-ci,
e
puretéinguistique.
n
passe
d'une
ormulation
«
Quod
non
portet
plebeiospsalmos
n
ecclesia antare
(Francfort,
94,
2°
canon)
à
«
Non
oportetb idiotispsalmos omposios et vulgares ici in ecclesiis. L'exi-gence inguistique'emporte.ette xclusion es « idiotae - ceuxqui ne
maîtrisent
as
le
latin,
vaut en fait
pour
une
incitation
our
les
lettrés,
même aïcs.Ce
qui explique
'essor,
partir
u IXe siècle
des
compositions
liturgiquesar
es
laïcs.
(12)
Paul
ZUMTHOR,
ntroduction la
poésie
orale,Seuil,
1983,
.
96.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 31/155
29
En
effet,
ous les vers romans
de
nos
drames
forment efrain. ette
caractéristiqueppartient
la seule
anguevulgaire.
e latindes
drames
même
unilingues
'est
jamais répété.
Ceci
reste
vrai
pour
des
pièces
latines fort
proches
de nos textes
par
le
sujet.
On
trouve ainsi
dans
une
Suscitado
Lazaři
provenant
de
l'abbaye
de
Fleury
des
amplifi-
cations sous
forme
d'ornementsittéraires
ans la
bouche des sœurs
de
Lazare à la mort de ce dernier.Le moment
est
semblable,
a
tonalité exclamative
ussi,
c'est aussi un
monologue
adressé
à
un
absent
«
Care
frater,
rater
arrissime
Legem
mortis am
passus
pessime
Nos
liquisti.
Propter
rimipeccatum
hominis
Generalis ormentu
riminis
Iam
sensisti.
(13).
Il
y
a
bien un
vers
qui
se détache
par
sa brièveté. 'est une caractéris-
tique
formelle ssentielledu
refrainmais
il
n'est
pas répété
(14).
La
présence
du
refrain au contraire
es autres critères
ue
nous avons
dégagés
dans la
première artie
-
est exclusivementiée à
l'usage
de
la languevulgaire.Nous avons vu que le romanajoutaità l'explication
doctrinale
t collectivede la douleur
une
autre
parole.
L'immobilité
de
cette
dernière
le
refrain lôt
chaque strophe
atine
remet
donc
en cause
l'efficacité ême du
discours
atin
puisqu'il
est
sans influence
sur elle.
Explications
ationnelles,
nventaire es
biens
perdus par
le
barbare,
reproches
dressés à
qui
a
permis
la
perte,
tout ceci est
suspendu
par
le retour de
l'expression
ffective,
rraisonnéede
la
douleur.
Le
désespoir
n'est
pas
muet
grâce
à
la
présence
de
la
langue
romane mais
il
est
sourd au
discours
atin
qui l'organise.
L'intrusion e
la
langue vulgaire
xerce donc
une
force
centrifuge
sur
le
discours
dramatique
atin. Une
tension
'établit dans le
drame
bilingue,d'une part entre parties latines qui disent la présence,
l'échange,
ui
mettent
n
scène
une
éducationdes
personnages
t les
parties
bilingues
ui expriment
a
perte
et le
désespoir, éché suprême
et,
d'autre
part,
u sein des
répliques
bilingues
ntreun
aménagement
de l'absence
dans une économie et sa formulation
rute,
parasite
et
menaçante.
es tiraillements
ais
aussi cette
complémentarité
ettent
(13)
Les autres ifférences
oulignées lus
haut demeurentci
les
deux
sœurs
parlent
nsemble,
u
pluriel
t
rappellent
e
discours octrinal
ui
justifie
a mort umaine.
(14)Ceci souffrene exception pparente. a malédiction inale de
l'Epoux
dans le
Sponsus
est redoublée
ar
troisvers romans.Mais ils
renouentvec
un
procédé
e
glose
et redisenta condamnationatine.
ls
reprennent
ependanthématiquement
e refrain
ui
a scandé out e drame
sous la
forme
«
Alet
Chaitivas Alet malaureas
»
lui
restituant,
n
fine
une
dimension
ramatique.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 32/155
30
en
abyme
la
situation de
représentation
u
drame,
les
compromis
auxquels
le
plie
sa
fonction
édagogique.
l
faut tenir
compte
de la
parole
de
l'autre,
de ceux
qui
ne
comprennent
ue
la
langue profane
tout en
l'encadrantdans un
discours orthodoxe t
édifiant.
i l'on
considère a
structure
'ensemble,
es
répliques
ilingues
'ont
amais
le
derniermot.
Elles
qui
occupent
e
centre
u
drame,
lles
aissent
place,
à
la
fin,
u
dénouementatin. l faut
dire
que
c'est e Christ
ui
dénoue
ce
que
son absence
ou son retard
-
voire l'imminence
e son
arrivée
dans le
Sponsus
-
avait noué. C'est
saint Nicolas
qui
restitue e
trésor
que son imagen'avaitpas su garder.Et dans nos piècesbilingues, es
personnages
'expriment
oujours
n
latin.Comme l
se doit.
Ce
retour
de la
langue
cultuelle
ssure aussi
-
mais
pas
seulement
la
transi-
tion
avec la
suite de l'office.
ne
indication e
l'auteur
précise
s'il faut
entonner e Te Deum ou le
Magnificat
la fin
de
la
représentation.
En
milieu
ecclésiastique,
e latin
reste la
langue
dominante
uquel
il
faut
revenir,
our longtemps.
l
y
a donc
retour
du
latin
parce qu'il
y
a
réparation
de
la
perte
et
-
pourrait-on
ire
-
rétablissement e
l'ordre
dramatique)
un
instantmenacé
(15).
Ceci
est
particulièrement
net dans
la
Résurrection
e
Lazare
où
les
répliques
atines
sont
intro-
duites
par
«
dicent,
die
t
»
-
elles sont
parlées
-
tandis
que
les
momentsbilingues ont chantées « cantans,cantabit indiquent es
didascalies.Fortifié
n cela
par
les
oppositions
narratif
s
lyriquequi
le
traversent,
'est
déjà
le
bilinguisme
n son
entier
qui
suspend
le
discours
dramatiqueglobal,uniquement
atin.
Mais la
parole
narrative
encadre
le chant. Laisser une
place
à ce
dernier,
'est
engager
une
participation
ouvelle de l'auditoire.
Ceci se fait
par
l'identification,
outenue
par
une
meilleure
com-
préhension.
our édifier
e
vulgaire,
l
fautmettre n
scène
son
erreur,
le
désespoir,
onner
n
spectacle
ce
qui
le menace
ou ce
qu'il
vit la
perte.
D'abord
la
misèrede l'homme ans
Dieu,
ensuite e
salut
par
le
miracle. Si l'Eglise utilise deux modes d'expression ussi différents
sur
tous les
plans,
c'est
qu'il
ne lui
faut
pas
seulement
nseigner
mais
aussi émouvoir.
Dans
le but
de saturer tous
les
moyens
de
partici-
pation
de
l'auditoire,
lle
ajoute,
à une
compréhension
ntellectuelle
du
message
essentiel
ransmis
n
latin,
une
identification
ffective
ar
l'effusion,
e
chant,
e
langage
du
corps
et la
langue
vulgaire.
Dans
ce
souci
de
complétude,
a
langue
profane,
onc e
refrain,
première
ue
hétérogène
t
contradictoire,
eut
par
d'autres voies
que
le latin
dispenser
a
même
eçon.
mmobilisateur
t
toujoursrépété,
l
ressasse
et
martèle
à où le latin
prend
du
temps,
e
sert de la
temporalité
dramatique
pour
convaincre.Le drame
de
l'Epoux,
le
Sponsus
est
(15)
Nous
renvoyons
ci
au séminaire
e Bernard
Cerquiglini
ur
la
Parole
féminine.
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31
scandé tout au
long
par
le même et
unique
refrain
«
Dolentas
Chaitivas
trop
avem dormit .
Or,
ce vers roman
xprime
out
autant
que
la
parabole
dramatisée
en
son
entier e
caractère
rrémédiable,
irréparablemalgré
es
suppliques
-
qui
forment vec
les
réponses
qu'elles
suscitent
'unique
action du
drame
-
de la
perte.
Le
dialogue
qui
prend place
entre
l'avertissementnitial de
l'Ange
qui
sert
de
prologue
t la
malédiction inalede
l'Epoux,
est
composé
de
strophes
de
quatre
vers atins
auquel
le remanieur u
XIe siècle a
joint
un vers
roman. En
latin,
es
Vierges
folles
disent leurs
efforts
our réparer
leurnégligence,ue ce soit auprès de leurs sœursplus prudentes u
auprès
des marchands
'huile
également ompatissants
t
impuissants.
Une
situation,
ne
action,
un dénouement.
outefois,
e
refrain
oman
dénonce le caractère
illusoire d'une
réparation
éventuelle.Dès son
apparition,
l
dit
la
résignation
es
Vierges
folles alors
que
la
strophe
latine
présente
eur
requête
auprès
de leurs sœurs
«
Nos
virgines,
uae
ad
vos
venimus,
negligenter
leum fudimus
ad
vos
orare, sorores,
upimus
ut ad illas
quibus
nos credimus
Dolentas Chaitivas Trop i avem dormit.
Ce
refrain
era
repris
la
finde
chaque
strophe, ar
les
Vierges
folles
bien
sûr
mais aussi
par
les
Vierges sages
et les
marchands.Seule
concession la
nécessité
du
dialogue
dramatique,
n
changement
e
personne:
«
Dolentas Chaitivas
Trop
i avet dormit . Sous ces deux
formes,
l
revient nze
fois. Constatation
mmobilisatrice,
aralysant
l'action,
l
court-circuitee déroulement
ramatique
en
rappelant
e
caractère néluctable e la damnation inale.
A
le bien
considérer,
oute
la
portée
schatologique
u drame de
l'Epoux
est
annoncée,
ès
l'appa-
rition
de la
langue
profane, ar
le
refrain.
A
qui
ne
comprenait ue
lui - et sans préjugerde ce qu'un spectateur gnorantdu latin en
comprenait
éellement,
ans
négliger
e
rôle d'une
imprégnation
udi-
tive
soutenue
par
une
connaissance
globale
du canevas
-
à
qui,
donc,
n'entendait
ue
la
langue vulgaire,
a
leçon
du drame
cependant arve-
nait. Par la
répétition
t
par
l'émotion.
Mais
pourquoi, ustement,
e refrain Si l'on
comprend, ourquoi
redire Il
n'est
amais
latin et la
langue profanen'apparaîtque
sous
cette forme.Sans doute
parce que
le
refrain,
our
les auteurs des
drames
bilingues
mblématisenon
plus
la
langue profane
seulement
mais
la
littérature
ui
l'a vue naître.
l
est
le
signe
nécessaire t suffi-
sant, emble-t-il,
e la littérature
aïque.
Il
est
vrai,
au
demeurant,
ue
la reprise yrique st une des caractéristiques es créations ittéraires
romanes,
u
moins à ses débuts.
La fonction u refrain st de
recon-
naissance,
n cela
il
facilite ussi
la
participation.
l
est
par
structure
autonome
et
mobile,
l
circule dans les
drames.
Ces deux
critères
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33
On
pourraitmultiplier
es
exemples,
d'Aude
devant le cadavre de
Roland à
Blancheflore.
u
moment ù la
langue
profane uspend
par
le
refrain,
e
flux
dramatique
atin,
outes es œuvres
profanes ui
ont
forgé
t
transmis e cliché de la
déplora
ion féminine ont
sollicitées.
Le
refrain deux rôles
Véhicule
de la
langue profane,
dans sa
dimension
yrique
t
répétitive,
l
favorise ne
participation opulaire.
Par
ses
voies
propres,
a
langue
vulgaire
onfirmea
leçon
du
drame.
Sous la
formede citationsde
la
littérature
rofane,
l
dépasse
cette
fonction dentificarice. Le
jeu
de la
reconnaissance u
cliché
qui
le
compose est savant. La littérature laquelle il renvoie aussi. La
réception
de
l'œuvre
bilingue
e fait donc à
plusieurs
niveaux. Celui
de la
mise en scène des
tensions
t de leur
résolution ntre
a
foi
et le
désespoir,
ntre
'inscription
ans
une
histoire hrétienne
ollective
t
la
révolte
ndividuelle,
ntre e
profane
t le sacré. Mais
elle
peut
aussi
-
les deux
plans
ne sont
pas
exclusifs
'un de l'autre
-
donner ieu
au
plaisir
esthétique
e la
pratique
de l'intertextualité.
n même
objet
remplit
la fois son
contrat
iturgique
t accueille
ce
qui
lui
est
radicalement
xtérieur.
l
dessine
par
le
mode de
confrontation es
langues
es limitesde la littérature
eligieuse
out en donnant e
spec-
tacle de sa maîtrise de
la
littérature
rofane.
l
s'agit
bien
d'une
maîtrise
puisqu'il
en fournit ne
image,
un modèle
pertinents.
Qui
pourrait
ouloir t réussir ne telle
entreprise
Nous ne connais-
sons
malheureusement
resque
rien des
auteurs de
drames
bilingues.
On les
suppose
au
confluent
e deux
traditions,
ans
une
position
parti-
culièredonc
pour
le
Moyen
Age.
Un seul nous
guide
un
peu
il
s'agit
d'Hilaire
qui
composa
la
Résurrection e
Lazare
et
le
Miracle de
saint
Nicolas.
On sait
qu'il
futun
temps
'élève
d'Abélard,
n le
trouve
au
Paraclet
en 1125
puis
à
Angers.
es autres œuvres
non
dramatiques
sont de
types
savant,
goliardique
t
satirique.
l use du
mélange
des
langues
dans un but
parodique
parfois.
Ce n'est
visiblement
as
le cas
dans ses drames. Il reste que pour parodier l faut extrairede son
modèle ses
caractéristiques
ignificatives.
n
personnage
proche
des
Goliards...D'autres œuvres
bilingues,
rofanes
t non
dramatiques,
e
rencontrentans le recueil des CarminaBurana Un
personnel
avant,
donc,
au
croisement
e
l'Eglise
et
du
monde. Les
plus
à
même
sans
doute
pour
mettre n scène
un
clivage
inguistique
t
littéraire oire
social. La belle
harmoniede leurs
productions
émoigne ue
c'était
en
toute connaissance e cause.
La
position
de
l'Eglise
médiévale en
matière de
langue
liturgique
oscille entre e
pragmatisme
t
la
méfiance. ans
un but
d'efficacité
pédagogique,
lle recourt assez tôt
aux
langues
vernaculaires
pour
commentert enseigner. e latin reste- pour longtemps langue
de
mémoire,
e citation
de
l'Ecriture. a
langue
vulgaire
st
apparue
comme
un recours
obligé pour
se
faire
comprendre
de
l'auditoire.
Obligé
t
cependant
ncadré t
contrôlé. 'est ainsi
qu'elle
glose,
traduit
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 36/155
34
parfois
e
texte
atin. Cette fonction
ulgarisatrice,
ui
rend
compte
de
l'usage majoritaire
e la
langue
populaire
en milieu
ecclésiastique,
est
cependant
dépassée parfois.
La
langue
romane
accède
à la
drama-
tisation
de la
liturgie,
out
à fait
émancipée
du discours
atin. Au lieu
de
lui servir
d'équivalent
opulaire,
a
langue
vulgaire
ui
oppose
une
autre
parole,
un
autre mode
du dire. En l'accueillant
n tant
que
tel,
le discours
atin de
l'Eglise
mesure ses
limites.
Langue
de
l'Histoire,
de la
doctrine,
e la
présence
et
de la
narration,
l
charge
a
langue
vulgaire
e
l'expression
ndividuelle,
yrique,
-historique
e la
douleur.
Ce faisant, l met en scène cela mêmequ'il cherche organiser la
premièrepersonne,
e
manque
de
foi,
le
corps
et
le cri.
Toujours
interrompu,
l
pèse
les résistances
our
-
peut-être
mieux es lever.
Par
ce
détour,
n
effet,
e drame
récupère
un
autre mode de
lecture,
non
plus
intellectuel
mais affectif
t
émotionnel,
ne
participation
ar
l'identification
t
la reconnaissance.
e
spectateur
médiéval
assistait,
aux moments
ilingues,
la confrontation
e
deux
littératures,
ans
les
lamentations
es
personnages,
l réentendait
es
douleurs
profanes.
Pour faire
reconnaître,
l
faut
bien connaître.
Les drames
bilingues
émeuvent
ar
le fait
même
qu'ils
sont
peu
nombreux,
u'ils
sont
une
expérience. omment aire servirchacunedes deux traditionsmédié-
vales à
un mode
différent
'expression
de
l'expérience
eligieuse
du
doute
et
de la
foi,
de la
perte
et des retrouvailles.
'Histoire
montre
que
le
genre
bilingue
st
sans descendance.
es
drames
sont en
marge
de
l'évolution,
ls
correspondent
ependant
un
goût
que
nous
croyons
profondément
édiéval
de
l'hybride.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 37/155
Annie DELBEY
EXPLIQUER.
JUSTIFIER
Grammaire et
poétique
de la
cause
en ancien
français
La cause
semble
une
notion
grammaticale
amilière,
marquée par
des outils
grammaticaux
ien
connus
car,
por
ce
que puisque
sans
compter
es
que
et
quant
propres
à
l'ancien
français.
Pourtant
que
recouvre
cette
notion
Quelle
importance
ui
accorde
la
littérature
médiévale
du
XP siècle
au
XIIIe
siècle?
(1).
Sans
préjuger
des
réponsesqu'un logicien
ou
un
historien
es
idées
pourrait
pporter
ces questions, e linguiste eut observer e sens, l'emploi, e fonction-
nement
des
outils
pour
en
décrire
tout
d'abord
la fonction.
Quand
a-t-on
ecours
à
un
enchaînement
ausal
?
Pour
apporter
les
motifs
des
faits
que
l'on
narre,
des
actes
que
l'on
fait,
si
l'on
suit
la définition
u
Robert
«
Ce
par
quoi
un
événement,
ne
action
humaine
rrive,
e
fait
. Nous
verrons
ourtant
ue
c'est
à le
plus
mince
domaine
ù
la
cause
apparaît.
a
fonction,
ans
la
littérature
édiévale,
c'est
avant
tout,
de
prouver
que
ce
que
l'on
dit est
justifié
2)
:
il
est
légitime
'ordonner,
'interroger,
'affirmer
ce
sont
ces
actes
de
parole,
u-delà
même
du
contenu
nformatif
ur
lequel
ils
portent,
ue
la cause viendraexpliquer.Ainsi, a cause en ancienfrançaissemble
manifester,
n
permanence,
e la
part
des
personnages
'unrécit omme
du
narrateur,
a
volonté
de
convaincre
ou
plus
hypocritement
e
persuader
que
l'on
a
le droit
de
dire
ce
que
l'on
dit.
Enonciateur
et
destinataire
ont
nscrits
ans
la
lettre.
C'est
cette
fonction
ragma-
tique
où
la cause
vaut
davantage
u
niveau
du
«
dire
que
du
«
dit
»,
1.
Les
orientations
t
les
conclusions
e
cet
article
ont
e reflet
'un
doctorat
e
troisième
ycle
n
préparation
Paris-IV.
2. Cette
opposition
dire-dit
ainsi
que
l'orientation
ragmatique
t
certains
ermes
e
cet rticle
ont,
n
particulier,
éférence
Oswald
UCROT,
Direetnepas dire, aris, éd.,1980tLe dire t le dit,Paris, 984.
3.
Ces
analyses
'appuient
ur
e
dépouillement
unetrentaineœuvres
de
genre
ivers
es
XP
au
XIIP
siècles
épopée,
oman
n
vers
t
en
prose,
hagiographie,
istoire,
exte
idactique.
os
exemples
envoient
ux textes
es
Editions
hampion
auf
orsque
nous
précisons
a
référence.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 38/155
36
de
la
parole
parlant
d'elle-même
ue
des
informations,
ue
nous
voudrions
'abordmettre
n
lumière.
Certes,
n constate
d'un
siècle à
l'autre
ou
d'un
genre
l'autre des
variations
qui
-
sans toucher
e sens ou
l'emploi
de ces
mots
-
affectent
eur
fréquence
elative.Nous
nous
proposons
de
voir dans ces
variations
moins es
progrès
'une
angue
rchaïque
llantde la
parataxe
«
primitive
à une
multiplication
es coordonnants
t,
mieux
encore,
des subordonnants
u'une
marque
des
différences
'enjeux
des textes
littéraires
ux-mêmes
en
particulier
n indice des
problèmes
que
faitsurgir, u XIIIe siècle, 'apparition e la prose.Les différencese
fréquence
refléteraient
oins
une évolutiondes outils
de
la
langue
qu'une
évolution
e
la littérature lle-même
3).
La cause
en ancien
français
: ses fonctions
Peu soucieuse
d'exposer
eulement
e
motif
d'un
acte ou d'un
fait,
la
langue
de
nos textes
fait une
place
assez
restreinte
por
ce
que.
C'est
pourtant
e seul
mot
qui
insiste ur
la relation
de causalité entre
deux faits, iant fortementes propositions omme le montrent er-
taines
particularités
yntaxiques
ui l'opposent
car
/
que
/
puisque
/
quant.
Ces derniers
ont une
valeur
pragmatique
ensible
aussi
bien
lorsqu'ils
expliquent
un
acte
qu'un
acte de
parole
ils
s'opposent
cependant
entre
eux
par
la
place
qu'ils
accordent à
la
parole
de
l'autre
4).
Le motif
«
Por
quoi
?
Parce
que...
»
:
informer
A la
question
portant
ur
le
contenu,
eul
por
ce
que
est
apte
à
répondre, ormisdes cas rarissimes ù car le remplacepar commodité
métrique.
Sa
fonction
st
donc
d'abord
informative.
l va de
plus
placer
la relation
ausale
au
centre
du
message.
Ainsi,
cet outil
peut
être
précédé
d'un
adverbe
Et
quand
il
vit
ce,
si
conmença
trembler
our
a
paour
qu'il
avoit
de cele
grande
beste,
et
meïsmement
our
ce
quii
avoit oï
dire
la
sainte
fame
que
ele n'avoit
onques
veü
beste
sauvage
(5).
Vie
de sainte
Marie
l'Egyptienne,
,73,
Ce
n'est
donc
pas
seulement
e
rapport
de causalité
qui
est
posé
ici
4. Pour
a
commodité
e
l'exposé,
ous
désignerons
ésormais
ar
«
p
»
et
«
a
»
les
propositions
eliées
ar
un outil
ausal.
5.
Edition
embowski,
enève,
977.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 39/155
37
mais le fait
que
cette cause est
essentielle.
Confrontonsmaintenant
deux
phrases
où
p
est
négatif
(I)
Richart rova l'autel
apoié
Ne lessa
mie
por
ce
qu'iert
el
mostier
Le
poing
senestre
i
a mellé el
chief.
Couronnemente Louis 1937
6)
(II)
En ceste
terren'iert
l
por
nos tochiez
Quar
i
bor ois
li
vorroient idier.
ibid.
2050
Dans le
premier
as,
la
négation
porte
à
la
fois
sur le verbe de
p
et
sur la
relationde cause
à effet le
personnage
ne renonce
pas
à
agir,
violemment. tre
au cœur d'un édifice
acré
(q)
devrait
tre
un motif
pour
renoncer la
violence
p)
mais cetterelation e
causalité virtuelle
n'a
pas
été
actualisée d'où
«
non
p
»
(et
«
non
p
por
ce
que
»).
In
II,
au
contraire,
a
négation
orte
xclusivementur
p
;
quar
introduit,ui,
la
cause tout à fait
déterminante
e
«
non
p
». Confrontons ncore
deux
phrases
nterrogatives
(III)
Biau
Sire
Deux
est
ele venue et
s'en est eie alee
pour
ce
queeie ne me trouva
Vie de
sainte Marie
l'Egyptienne
X, 57,
9
(IV)
Comment
asseras
tu
a
moi
Car
point
de
passage
n'i voi ?
ibid. 1157
(III)
fait
porter
la
question
sur
l'enchaînement ausal
«
q
a-t-il
entraîné
p
?
»
alors
que
(IV)
questionne
xclusivement ur
p.
Ainsi
vec
por
ce
que,
le lien
causal
unissant
p
et
q apparaît-il
uffi-
samment
fort
pour
être
objet
d'interrogation
u de
négation
t
pour
être modifié
ar
un
adverbe.Ce
qui
n'est
pas
le cas avec car. La
même
démonstrationeutse fairepour opposerpor ce que à que mais aussi
à
puis que
et à
quant.
On
peut
encore
opposer
es
deux
types
de
liaison
lorsque p
est enchâssée comme
proposition
omplétive,
ar exemple
derrière e verbe
croire
(V)
et si
grant
fianche nt en
chel ansconne
que
il
croientbien
que
nus
qui
le
port
n
batalle ne
peut
estre
desfis,
t
pour
chou
que
Marchofles e le
portoit
mie
a
droit,
réons
nous
qu'il
fu
desconfis.
Clar
LXVI,
20
(VI)
je
croi bien
que
ce soit
il,
car il
resemble
molt bien
mon
seignor.
QuesteSt Graal 3,32
6.
Edition .G.
Lepage,Genève-Paris,
978.
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38
Dans
(VI)
«
car
q
»
justifie
croire
que p
»
:
on formule
n
jugement
sur
p
puis
on
apporte
la
preuve
de son exactitude.
Au
contraire,
dans
(V),
le
jugement
orte
non sur
«p»
mais sur
«p parce
que
q».
Il ne
s'agit
pas
de
prouver
ue
Marchofle
été vaincu
-
c'est un
fait
avéré
par
la narration
ui précède
mais d'énoncer
'opinion ue
tel
fait
est
la
cause
de cet échec.
On
pourrait,
n
outre,
vérifier
ue
dans
chacun
de ces
exemples
a
causalité
exprimée
ar
por
ce
que
concerne
des actes
-
des contenus
par opposition ux actes de paroles
-
trembler,
enoncer
agir,partir,subir a défaite.Dans chaque exemplecomprenantar c'est l'acte de
parole
-
affirmer,
nterroger
qu'il s'agit
de valider.
On
pourra,
certes,
objecter
que por
ce
que
peut,
lui
aussi,
justifier
n
acte
de
parole
(l'ordre
en
particulier)
t
qu'à
l'inverse,
ar
et ses
acolytes
peuvent
ntroduire
e motif
'un acte. Il
n'en
reste
pas
moins
que
ces
mots,
outre eur fonction
nformative,
uront
alors
-
même dans
cet
emploi
un
rôle
pragmatique.
or ce
que
restant
eul
capable
de
faire
fusionner
n
une
seule les
deux
propositions
t de
donner
ainsi
la
relation
ausale comme
objet
de
la
communication.
Le
motif informer
t convaincre
Car,
fréquemment
ommutable
vec
por
ce
que
dans les
variantes,
est
susceptible
e
répondre
même i c'est
exceptionnel
à
por
quoi.
Il est
porteur
d'information
otivant e
contenu.
Pourtant,
l
paraît
bien souvent
donner
a raison d'un acte
pour apporter
a
preuve
de
sa
véracité.
Ainsi,
dans les formules
uasiment
rituellesde
l'épopée,
à
la
première
ersonne
du
présent
u du
futur
u
type
Servirai
Dieu,
car talens
m'en
est
pris.
MoniageRenouart,
Le motif
de
l'engagement
agir joue
surtout
omme
garantie
de la
promesse.
Car
apparaît
ainsi derrière
ne formule
roche
de
l'illocu-
toire.
De
même
lorsque,
dans un
dialogue,
'interlocuteur
ustifie
a
réponse
Boort,
avez
vos esté
a cele
assemblée
-
Dame, oil,
fet-il.
Et
veïstes
vos
Lancelot
vostre
cousin?
-
Dame,
nenil,
car
il n'i fu
mie.
-
Par mon
chief,
ait a
reïne,
i
fu.
Mort
Roi Artu
34,
5
Car introduit la fois e motifde l'acte nié et un jugementde vérité
sur
son
énonciation.
n
peut gloser
a
réponse
des
deux
façons
1)
je
ne
l'ai
pas
vu
la raison
en est
qu'il
n'y
était
pas.
2)
Je ne l'ai
pas
vu.
Ce
que je
vous
dis
est
vrai la
preuve
en
est
qu'il
était
impossible
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39
de
le voir il
était
absent.La
première
olution
onstituant ne
lapalis-
sade,
Tinterlocuteur
nterprétera
e
message
dans le second sens.
C'est
ce
que
fait
a
reine
qui
s'attaque
à la
preuve
non au
fait
ni
à
la
cause.
On
exhibe
e
motif e
l'acte,
voire a
condition
écessairede réalisation
si
p
est
au
futur,
our
affimer
a
véracité.
Nous vaincrons ar
nous
sommes es
plus
forts .
Puis
que
et
quant peuvent
ussi
introduire
e motifde
p
mais
leur
valeur
pragmatique
st
encore
plus
nette.Par
leur valeur
temporelle,
évidente
pour
quant
et encore
sensible en
ancien
français
pour
puis
que, ces motsposentle fait dans le réel. De plus, le jeu des temps
verbaux
établit
une relation
antérieur-postérieur,
ccompli-inaccompli
entre
q
et
p
;
l'antériorité e
q
-
marquée par
le
sémantismemême
de
puis que
(après
que)
-
lui
confère,
ès
lors,
valeur
de cause mais
d'une
cause
-
nous venons
de
le
voir
-
bien
posée
dans le réel.
Une
observation
étaillée
faitde
plus
apparaître,
u
point
de vue de l'ordre
des
mots,
une
large
dominante e
l'antéposition
e
la subordonnée e
qui
renforce
ncore sa valeur
d'antériorité,
onc
d'origine.Ajoutons
que
cette
subordonnée
n'apporteplus
une
information
ouvelle mais
reprend
n
élément u
message
déjà
connu.Cette
aptitude
la
reprise
coïncide vec une autrecaractéristique e ces outils ils entrent,rès
fréquemment,
ans un
dialogue
où
s'opposent
«
je
» et « tu ». Dans
«
puis que,
quant q,
p
»
q reprendra
rès
souvent
n
acte ou une
parole
de
l'allocutaire
andis
que
p
concerne e
locuteur.
Acte
réalisé antérieurement
onc cause
réelle,
déjà
énoncé donc
admis,
partant
de l'acte ou de la
parole
de
l'autre donc
indiscutable,
le motif
que
présentent
puis
que
et
quant
apparaît
comme une
contrainte
néluctable t indéniable.
ls sont ainsi
des
marqueurs
privi-
légiés
des
rapports
de
force
jouant
sur la
polyphonie
e
renoncia-
tion
(7),
«
p
puis que q
»
énonce la
soumission
du locuteur
(qui
énonce
p)
à l'allocutaire
qui
énonce
q)
dont es
paroles
sont
rapportées
dans q par le locuteur ui-même
-
«
Sire
quens,
car
ostés Nicoletevotre
filóle
(...)
-
«
Sire,
fet
li
visquens,
ce
poise
moi
(...)
Mais
puis que
vostre
volenté
est et
vos
bons,
je
l'envoierai
en tel
tere et en
tel
païs,
que
jamais
ne
la
verra de
ses
ex.
»
Aucassin
t
Nicolette, V,
4
et
10
Le
pouvoir
oercitif e l'ensemble era
d'autant
plus
fort
que,
comme
dans
l'exemple précédent, ,
très
fréquemment,
era
entendre
une
demande,
n
ordre,
une
volonté.
La
subordonnée
eut également
aire
référence
la force nexorable u
destin.Dans les
deux
cas,
la
phrase
établit une hiérarchie, lle marque la soumission, a « défaite du
7.
Cf.
DUCROT,
e
dire
t le
dit,
p.
cit., .
171 t suiv.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 42/155
40
locuteur.
Mais en
expliquant
cette soumission
par
une
obligation
à
laquelle
il ne
peut
échapper
-
la
subordonnée
égitime
du
même
coup
son acte
et
rend sa
«
défaite
honorable.Un
duel
verbal
à
qui
perd
gagne.
La
cause
explique
donc souvent
une décision-acte
ui
se
fait
tandis
qu'on
l'énonce on est
déjà
dans
le domaine de la
parole.
La
légitimation
d'une
parole
:
justifier
une affirmation
Par des stratégies t avec des intensités rgumentativesiverses,
car(qué),
puis que(quant)
vont le
plus
souvent servir à
justifier
non
les
faits,
es
actes,
mais
la
parole
elle-même véracitéd'une
affirmation,
légitimité
'un
ordre,
d'une
question.
Dans cet
emploi,
e retrouve
'opposition récédemment
otée entre
car/que
et les
conjonctions 'origine emporelle
u
pouvoir
à
la
fois
coercitif
t raisonneur.
'antériorité
emporelle xprimée
doublement
par
le connecteur
t,
bien
souvent,
e
jeu
des
temps
verbaux,
a
reprise
d'un
message
connu
t/ou
dmis
-
faits
que
nous avons
évoqués
précé-
demment
permettent
e
présenter
e contenu de la subordonnée
commeun
argument
rréfutable
our prouver
a vérité.Le constat
au
niveau des faits sert de fondementour le dire
Puis
qu'il
est
morz,
moult avons
bien mené a fin
ce
por quoi
nos
feusmes
a
envoiez.
Tristan,
8,
14
8)
Partantde
prémisses
dmises,
e
raisonnement
résente
a conclusion
comme
devant
également
tre
admise. L'enchaînemente donne alors
comme
un mécanisme
riend'étonnant ce
que
la
conjonction
uis que
apparaisse,
avec
une
fréquence
nhabituelle,
ans un texte comme
Le roman de
la
Rose,
particulièrement
ans des contextes
appuyant
sur la logiqueou les règlesdu jeu d'échecs.
Ces outils
ouent généralement
ans
le
dialoguepour
faire dmettre
à
autrui
a vérité
du
jugement
que
l'on
porte,
bien
souvent,
ur les
actes
de celui-ci.
Ainsi trouve-t-on
lus
rarement ette
polyphonie
e
Ténonciation
emarquée
dans le
cas d'une décision.
l ne
s'agit plus,
pour
le
locuteur,
de
justifier
a décision
personnelle
par
la
volonté
de
l'allocutaire
le
point
de vue est
opposé
on
justifie
e
jugement
que
l'on
porte
sur l'interlocuteur
partir
de ses actes. La
parole
est
donc
toute
entière
u
juge,
le locuteur.
e
rapport
de force
s'inverse.
On
ne
trouve
ertes
pas
dans tous
les cas une illustration
ussi nette
de
ce schéma
pragmatique.
Pourtant
a
plupart
des cas de
figure
marquéspar le jeu des personnes erbales t des énonciateurs euvent
8.
Edition .
Blanchard,aris,
976.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 43/155
41
s'y
ramener.
Jugement
e
soi-même,
ur
soi-même,
our
soi-même,
dans un
monologue
entrecoupé
de
«
fet-il
,
«
dit-il
,
qui
tient
du
dialogue pas
vraiment ntérieur
jugement
ur un
groupe
auquel
on
appartient,
faire
admettre ce
groupe jugement
ur une
situation,
un
tiers
ou
soi-même evant autrui
dans
tous les
cas,
le but
est de
convaincre.
Même
lorsque,
très
rarement,
a troisième
ersonne ppa-
raît
dans un
passage
narratif,
a
personne
convaincre st encore
là
-
c'est
l'auditeur,
e lecteur. La
force
argumentative
e
ces mots
venant,
non de ce
qu'ils
introduisent ne nouvelle
nformation,
ais
au contrairede ce qu'ils s'appuientsur un élément connu par le
message précédent
u
admis
grâce
au
bon
sens,
ls
entrent acilement
dans les
lapalissades
-
Et
puis que j'arai
la
teste
caupee ja
mais
ne
parlerai
a Nicolete
me douce amie.
Aucas
in, XI,
18
La
lapalissade
semble le
point
extrême
ui,
par
son
comique
même,
à la
manière d'une
caricaturerévèle
le
sens
profond
de
puis
que
:
faire
de
la
preuve
une
évidence
pour
entraîner 'adhésion u
jugement
que l'on porte
-
et mieux agir sur l'interlocuteur.'évidencepeut
également
tre iée à la situation e discours la « causale» intervient
pour
justifier
'énonciation u
message,
non
plus
même du
point
de
vue de la
vérité,
n référence u
monde extérieurmais
par rapport
u
déroulement u
discours ui-même
-
Et
puis
qu'a
Fortune
enons
Quant
de s'amor sermon
enons
Dire t'en veill
fieremerveille.
Roman de
la
Rose,
4807
Puis
que
et
quant
sontdonc des
éléments e la
langue
qui
font
ntendre
la parole.Car (et que) permettentgalement e justifiera parole qui
précède.
La
légitimité
e dire
p
sera
affirmée
ar
«
car
q
»
selon
l'un
des
schémas uivants
1)
p
car
(conséquence
de
p)
2)
p
car
(description
e
p)
3)
p
car
(motif
e
p)
4)
p
car
(existence
e
p)
1)
On
pourra
d'abord
prouver ue
p
est
vrai,
réel
en affirmant
ue
sa
conséquence
existe réellement. i
la
conséquence
est
réalisée,
es
prémisses
ne
peuventque
l'être
également
il
n'y
a
pas
de
fumée
sans feu
-
De
l'esploitier
Gadifers
e
hasta
car au matin si com l'aube creva
desous
Aiete
i
paiens
ariva.
Moniage
Renouart,
293
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 44/155
42
On
voit
que
la
«
cause
»
au niveau du dire
s'appuie
sur la
conséquence
au niveau
des faits. Cette
confusion
es deux
notions n'est
propre
à
surprendre
i
pour
car ni
pour que
l'étymon
atin
quare
est consé-
cutif.
Que
exprime réquemment
n ancien
français
a
conséquence.
On
sera
parfois
insi amené à hésiter ntre
conséquence
d'un
procès
à un
autre et
preuve
d'une
parole
par
une
autre.
2)
Très
fréquemment
ussi,
a
preuve
de la véracité
assera
par
une
explication,
tablissant ne relation
d'équivalence
ntre
p
(ou
l'élément
à
justifier
ans
p)
et
q
:
q
va
développer
n
apportant
es
détails,
une
plus grandeprécision,e contenu émantiquede p :
-
Je vos mostrerai a riens
el mont
que
vos
amés
plus
car
c'est
Nicolete
vo duce aimie.
Aucassin,
XL,
43
La
relation ntre es deux
propositions
e
rapproche
ensiblement 'une
apposition
on voit là encore l'ambivalence
e
que
laissant
mal dis-
tinguer
aleur de
preuve
car)
et
complétive
savoir
que).
3)
Lorsque
le
verbe est au
futur,
u
conditionnel u modalisé
par
un
verbe comme
pooir,
'affirmationon actualisée est
cependant
pré-
sentéecommevéridiquegrâceà un car qui introduit en les présen-tant comme vrais - le motifou la conditionde réalisation.Or la
«
cause
»
existant
réellement,
e
temps
verbal se
charge
de
l'inscrire
dans
la
réalité,
a
conséquence
ne
peut
tarder survenir
il
n'y
a
pas
de
feu sans fumée. On inverse e
premier
schéma
dégagé
mais en
conservant
a visée démonstrative
Bataille avrez vos en estes
tuz fiz
Kar a vos oilz
veez
les Sarrasins.
Roland
1130
9)
4)
Pour
ustifier
on
assertion,
n
peut
enfin irectement
aire réfé-
rence sa réalité l'énonciation 'estpas justifiée ar rapport d'autres
faits
1
et
3)
ni en
justifiant
on contenu
par
une
explication
2)
mais
par
une autre énonciation
ffirmant
ue
ce contenu
xiste
à
l'exclusion
de tout
utre
que
l'on
pourrait maginer
En
Loquiferne
tant
i
enfes més
-
Car Picolet
'i
avoit
apportés
Par le cornant
e roi Thiebaut 'Esclers
-
Que
il
est
grant
t furnis t
menbrés.
Moniage
Renouart,
56
La
parenthèse yntaxique
ntroduite
par
car n'est
pas
en
relation
d'équivalence vec ce qui précède,ni de conséquence.On ne peut pas
9.
Edition
Moignet,
aris,
972.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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43
non
plus
dire
qu'il s'agit
de
la
cause
car ce
qu'elle
affirme
e n'est
pas
la cause
d'un
long séjour
(«
a tant més
»)
mais ce
qui
fonde
pure-
ment a
possibilité
e l'énonciation l'enfant tait à.
C'est,
des
quatre
schémas
d'emploi
de
car,
celui où
l'on
perçoit
e
plus
nettement
a
parole
se commentant
t se fondant lle-même.
r,
on
peut
statistique-
ment constater
une dominancedes deux
premières
personnes
et
du
style
directou
indirect
apportant
es
paroles
dans
les
contextes
ù
apparaît
car. Pourtant n
n'a
pas
à être
surpris
de son
apparition
ans
le récit
la troisième
ersonne
il
permet
n
effet de
façonanalogue
à sonparonymemar- de faire ntendrea voix du narrateur ommen-
tant
a narration.
ar
est
un des éléments e subversion e
l'opposition
discours/récit
uggérée
ar
Benveniste.
Justifier
n ordre
La cause
justifiant
n
impératif
ou
ses
équivalents)
pparaît
encore
une
fois dans
un
contextemanifestant
es
rapports
de force
entre
interlocuteurs.'ordre
place
-
ou
prétendplacer
-
l'allocutaire
dans
une alternative béissance/désobéissance.a « cause» survient lors
pour
mieux
contraindre 'interlocuteur
choisir
a
soumission.
C'est
là
-
inversé le schéma
qui permet
u locuteur e
justifier
a décision
par
la
soumission
la
volonté
de
son
interlocuteur.
n
pourrait
dire,
en
simplifiantue
«
je
:
tu
»
se
substitue
«
tu
je
».
Là
encore,
des
nuances
pparaissent
elon es
différentsonnecteurs.
ar semble
parti-
culièrement
pte
à
exprimer
e
qui
justifie
'ordredu
point
de vue du
locuteur.Aussi
e
trouvera-t-on
rès
fréquemment
uivi
d'un verbe à
la
première
ersonne.L'opposition
vec
por
ce
que
est
particulièrement
nette dans
une
phrase
comme
Ohi Ogier, enés moi covenant
De mon
neveu,
por
ce
qu'il
est enfant
Car nule
rien el siecle
n'aim
e
tant.
Aspremont,
804
car
ajoutant
a cause
subjective
ce
qui
est motif
bjectif.
En aucun
cas,
car ne
peut s'appuyer
ur la
parole
de l'allocutaire.
On
pourra,
n
revanche,
e référer
la
parole
d'un
tiers
pour
former
un raisonnement
'autorité n
s'appuyant
ar exemple
ur
un
proverbe.
On trouvedonc
es schémas
1) (Fais p) car «une raisonqui paraîtdéterminanteu locuteur, u'il
assume
et
qui,
éventuellement,
ui est
personnelle).
2) (Fais
p)
car
(X
dit
que)
avec
(X
^
de
l'allocutaire)
u
(Fais
p)
car
(tel
fait).
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44
Les schémas seront
plus
variés avec
puis
que
1) (Fais
p)
puis que
(une
raison
qui
m'est
personnelle,
e
le
veux).
2)
(Fais
p) puis
que
(tu
dis
que).
3)
(Fais
p) puis que
(X
dit
que,
tel
fait).
Dans tous les
cas,
la
justification
tant
présentée
ar puis que
comme
une
vérité,
'ordre
pparaît
comme
e fruit
'une déduction
la caution
de
l'enchaînement
ogique
donne
ainsi
à l'ordre
une
pleine
valeur
d'obligation
néluctable,
ondé
qu'il
est
non sur
l'arbitraire
mais
sur
la
raison.
Outrecetteforce
oercitive
énérale,
uis
que
(ou
quant)
prend
une valeur argumentativepécifique t redoutable orsque la subor-
donnée
reprend
es
paroles
de l'interlocuteur.
n retrouve
à
la
poly-
phonie
de l'énonciation
voquée précédemment
propos
de
la
justifi-
cation
d'un acte
-
ce
qui
renforcea
symétrie
es deux
constructions.
La
phrase
fonctionne
ans ce cas comme
un
piège.
Le
locuteur
'appuie
en effet ur les dires
ou la
pensée
de
l'interlocuteur
qui
est aussi
celui
que
l'on veut faire
obéir.
Or,
en utilisant
son
vouloir
comme
prémisses,
n
présente
'ordre
comme découlant
de
la
volonté
même
de celui
qui
le
reçoit.
Cela ôte ou
prétend
ôter
la
possibilité
d'un
contre-argument
égitimant
n refus
d'obéissance
l'interlocuteur e
peut nier ce pointde départ qui est sa proprepensée. Il lui faudradémontrer
ue
la déduction
pérée
par puis que
-
qui
a l'allured'un
mécanisme
ogique
imparable
n'est
que
la
conclusion
tirée
par
le
locuteur
elon ses
intérêts
ropres.Argument
élicat dans
la mesure
où,
nous
l'avons
vu,
par
sa
valeur
temporelle
'antériorité,
ar
le
temps
et le mode des
verbes
qu'il
régit,
uis
que
donne
'enchaînementntre
subordonnée
t
principale
comme nécessaire.
Il
lui restera
comme
défense
a
possibilité
de faire
valoir
que
le
point
de
départ proposé
résume
a
pensée
en la
manipulant.
insi,
dans le
dialogue
où la
mère
d'Aucassin
veut
convaincre
elui-ci
de
prendre
une
épouse
autre
que
Nicolette,
l'argument
Puis
qu'a
moulliéte vix traire
pren
femme
de haut
parage.
Aucas
in,
II,
11
Aucassin
pourra
toujours
répondre
qu'on
ne
reprend
pas
son désir
avec
exactitude,
l
ne
veut
pas
«
se
marier mais
«
se
marier
avec
Nicolette
. Il
lui faudra
prouver
ue
dans
«
je
veux
me marier
avec
Nicolette
,
l'essentiel
du
message
est
a)
je
ne
me
marierai vec
personne
d'autre
qu'avec
Nicolette,
et
non
b)
je
veux
me
marier.
Or,sa mèrepourra toujours ui rétorquer ue l'essentiel st bien (b).
Et,
en
effet,
e
présupposé
d'un
message
ayant
pour
premiers
ritères
l'invariance
la
négation
t à
l'interrogation,
b)
semble
bien être
le
présupposé
des
paroles
d'Aucassin
la réduction
pérée par
la mère
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45
est,
au moins
à
première
ue,
légitime.
a
comtesse est un
monsieur
Jourdain
e
la
pragmatique.
n
utilisant
ar on cherche
faire
obéir
en
mettant
n
avant sa
propre
pinion
utiliser
uis que permettra
e
légitimer
'ordre
par
l'opinion
de celui
qui
le
reçoit.
Justifier
'interrogation
L'interrogation
onstitue
ussi,
en
elle-même,
n acte
de
langage
contraignantelle obligeou veutobliger utrui répondre. es connec-
teurs
dits de
cause,
en
justifiant
a
question,
viennent
enforcer ette
contrainte
légitimer
e fait
que
le
locuteur e
pose
une
question,
'est
contraindre,
ès lors
que
la
question
est
légitime,
'interlocuteur
répondre.
armi
es divers
outils,
eul car
intervient
our
ustifier
ne
question
véritable.
l
met
en
avant
l'importance ue
revêt a
question
pour
e locuteur
finde
rendre
a
réponse
nécessaire
on
retrouve à la
relation
privilégiée éjà
observée
entre car et le
locuteur
Le
fil
Karlon
qui
je
ma foi
pievi,
Ou
le troverai Car
forment
e désir.
Couronnemente Louis,1423
Dans le cas
de
l'interrogation
ite
oratoire,
a
nuance
coercitive
st
encore
plus
nette la
question
pour
seul
but de
faire vouer à
l'inter-
locuteur
'impossibilité
e
réaliser e
procès
sur
lequel porte
'interro-
gation.
La
proposition
ntroduite
ar
un
outil
causal,
expliquant
e
motif
de cette
mpossibilité,
ient
prouver
u'aucune
réponse
positive
n'est
envisageable
Coment
orai
sormonter
spremont
Quant
ai
perdu
mon
destrier
rragon
Aspremont,
618
L'interrogationustifiée ar puis
que permettra
dans une
énonciation
polyphonique
de
formuler n
raisonnement
ar
l'absurde.
Partant
d'un
postulat
repris
à
l'interlocuteur t
qu'il
pose
momentanément
comme
vrai,
e
locuteur,
l'aide
de
puis que,
tire
es
conclusions
ui
sont ainsi
présentées
omme
conséquences
néluctables
Puis
qu'amors
ne sunt mie
bones
Ja mes n'ameré
d'amors fines
Ainz
vivrai
toujourz
n
haines
Roman de la
Rose,
4618
L'interrogationmanifeste ependant e doute et la réprobationdu
locuteur,
ttitude
u'il
veut
faire
partager
son
«
adversaire : il
le
force
répondre
la
question
tout en lui
montrant
ue
celle-ci
ne
se
pose qu'en
raison de
son
postulat
nitial.
'il
est anti-naturel
t absurde
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46
de vivre
dans
la
haine,
force est
d'admettre
ue
la
condamnation
e
l'amour est
également
bsurde. La
réponse
ne
peut
être
que
négative.
Or
il
est
impossible pour
l'interlocuteur
e nier la
conclusion sans
admettre 'absurdité du
point
de
départ
que
constitue sa
propre
pensée.
Nous
voyions
dans la
lapalissade
le
point
d'aboutissement e
la
tendance
de
puis que
à
présenter
a cause
-
ou la
preuve
comme
absolument raie. On
peut
voir
dans
le
raisonnement
ar
l'absurde e
symboled'une valeur pragmatique spécifiqueà ce mot enfermerautruidans sa
propre
pensée pour
le convaincre e ses contradictions.
«
Convaincre
. Ce
terme,
avec
ses
connotations
uridiques,
nous
semble résumer a
fonction
ssentielle
ssignée
à la
cause en ancien
français.
On ne
cherche
pas
tant
à
démonter,
xpliquer
'enchaînement
des faits
-
c'est le rôle
prédominant
'un
por
ce
que
bien minori-
taire
-
qu'à justifier
ans cesse
ses
paroles.
Justification,
arole,
c'est
d'abord
à
ces
deux
notions
ue
se rattache
'idée
de cause.
L'étymologie
pour
cette
fois
ne
trompepas
:
cause,
raison sont bien
liées
au
dis-
cours,
au
procès.
«
Causari c'est
alléguer,prétexter,ustifier
une
parole
pragmatique.
Les fonctionnementspécifiques ropres ces outils sontconstants
du Saint
Alexis
la
prose
du XIII* siècle.
Cette
affirmation
e
prétend
certes
pas
renvoyer
une uniformité e
l'expression
e la cause dans
la
langue
correspondant
cette
époque.
Une
telle
inférence,
utre es
contestations
méthodologiques u'elle
peut
soulever,
négligerait
n
l'occurrence
eux
paramètres
la
diachronie t
l'hétérogénéitétylis-
tique qui
-
s'ils n'influent
as
sur
le
sens des
différentsutils
-
jouent
sur leur
fréquence
relative.Si l'on
perd
en
cela
l'espoir
de
reconstituer
'image
de
l'expression
e la
cause,
cela
doit d'autant
plus
stimuler mieuxcerner
'usage
que
la
littérature
ait
de ces
outils,
t
par là, la poétiqueque peuttrahir n tel usage.
Cause et
poétique(s)
Une
poétique
ou des
poétiques
du textemédiéval La
cause
semble
révélatrice ces deux niveaux elle manifeste n certain
rapport
de
l'artiste son texte t à son
public
mais
aussi les
enjeux
divergents
e
textesformellementifférents.
La
dominancedes
«
coordonants
car,
que
-
pour reprendre
a
terminologieabituelle est nette et permanente. ertes, es mono-
syllabes,
ar
leur brièvetémême dans une littérature
n
majorité
ver-
sifiée,
e
prêtent
ien à tous les
usages.
Pourtant
e
phénomène
ous
paraît
surtout
ymptomatique
'une littérature
ui
participe
à «un
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47
type
de culture dominante rale
»
(10)
et
qui prétend
dire le vrai.
Car est lié à
la
parole
comme e
montrent
ussi
bien ses
emplois
ordre,
question,
xclamation
ue
l'on
justifie)
que
son association
fréquente
avec
les
première
t deuxième
personnes
u
les
temps
du
présent
à l'inversede
por
ce
que
lié
à
la
non-personne
il)
et
au
passé.
Cette
oppositionque
l'on
pourait
faire
apparaître
avec
précision
dans
des
tableaux
statistiques
ous semble résuméedans
le
passage
suivantoù
la cause intervient uccessivement
ans le
style
direct
puis
dans le
commentaire u narrateur
-
«
Tornons
ui
les
chiés des
chevaux,
ar s'il nos
prent
l
travers,
il
nos metra
a trop
a mal
».
Et
ce
disoit-il
or
ce
qu'il
quidoit
del duc
que
ce
fust
Guillaumes
des
Bares
(11).
Par la
voix
du
personnage,
ar
suivi du
présent ustifie
un
impératif
de
première ersonne
por
ce
que permet
u narrateur
'expliquer
u
passé
les
actes
de
son
personnage.
e
fonctionnement
e car confirme
ainsi
l'opposition
discours/récit
uggérépar
Benveniste
mais
-
tout
à la fois
-
la subvertit
dans
la
narration
même car
qui
vient sans
cesse
justifier
'énonciation
éintroduit
e narrateur t inscritdans le
texte on rapport u public, u sens dramatiquedu terme.Ainsi,dans
une littérature ù
«
l'énoncé est
indissociablede l'énonciation
(12),
tout
récit est en même
temps
discours.
Zumthor,
mettant
n
relief
dans
l'ouvrage
ité
le
caractère
dramatique
d'une
littérature
ui sug-
gère
toujours
un
dialogue
virtuel ntre es deux
pôles texte-récepteur
note,
p.
42
«
La
poésie
médiévale
est
poésie
en situation et
cette
situation st inscrite ans le
code,
à une
profondeur
elle
que
le texte
nous
apparaît
d'une extrême
auvreté
n
indices
y
renvoyant xplicite-
ment.
L'omniprésence
e car
semble être
un de ces indices.
Par
ailleurs,
e souci de
prouver
on
dire
participe
comme
le recours
aux
autorités
u à
l'antiquité
e la matière de ces
«
protestations
e
véridicité (13) d'une littératureui a pourtâched'exprimera vérité
globale
du monde.
«
Parole
souveraine,
manation
'un
Verbe,
objet
de
foi
(14).
Pourtant ette domination
énérale
recèle des écarts
significatifs
car
que
détiennent
n
monopole uasi
absolu dans les
épopées
es
plus
anciennes t les
poèmes
religieux
u
type
du Saint Alexis.
l
n'y
a aucun
10.Cf.
P.
ZUMTHOR,
ssai de
poétiquemédiévale,
aris,
1972,
.
38.
11.
L'anonyme
e
Béthune
récit
n
prose
de
Bouvines)
écitdes Histo-
riens es Gaules t de la Francet. XXIV,citéparG. DUBY,Le dimanchedeBouvines, aris, 973, . 250.
12.
Cf.
P.
ZUMTHOR,
p.
cit.
p. 41,et,
en
general,
our
ce
qui
concerne
le
caractère
'oralié et de
véracité,
'ensemble
es
chapitres
et II.
13.
bidem,
.
35.
14.
bidem,
.
38.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 50/155
48
por
ce
que,
non
plus,
dans Le charroi
de Nîmes ou La
prise
d'Orange.
A
l'inverse,
a
proportion
e ces mots
par
rapport
por
ce
que
s'abaisse
singulièrement
ans
des textes
historiques
n
prose
du XIII*
siècle
Grandes
Chroniques
e
France,
récits
de Clari et de
Villehardouin. a
très
faible
présence
e
por
ce
que
dans
a
première
atégorie
eut
certes
s'expliquerpar
des facteurs
métriques
t
historiques
étroitessedu
décasyllabe,
yntaxe
rchaïque
privilégiant
a
parataxe
ou
-
à tout le
moins
-
la
coordination
ar
maladresse manier
es
subordonnants.
Mais ce
choix
syntaxique
nous
paraît
tout autant
révélateurde la
vision du mondequ'exprimentes textes.Dans un univers -temporel,
régi par
le
plan
divin et
éternel,
a
causalité
événementielle
e
peut
qu'être
dérisoire.
Auerbachdécèle
dans
la
narration
pique qui
«
évite
de condenser t d'articuler
ationnellementes
faits
au
profit
d'une
disposition
ontinue,
uxtapositive
...)
et dans
laquelle
les relations
causales
et
même
temporelles
'estompent
(15)
l'indice d'une
concep-
tion
figurative
e l'histoire
ui,
selon
lui,
domine a
littérature cci-
dentale des débuts de l'ère chrétienne u XVIe
siècle. Dans
cette
perspective,
out événement errestre 'est
pas
la
conséquence
d'un
autre événement
ppartenant
u
même
plan
terrestre,
mais
un
signe,
la
«
figura qu'il convient 'interpréter,ar une correspondancepiri-tuelle, ommel'accomplissement'un événement istorique ntérieur
qui
le
préfigurait.
e
qui importe
lors ce n'est
pas
la
connexion orizon-
tale entre es faits de
ce
monde mais leur
interprétation
la
preuve,
non le motif
16).
On
a d'ailleurs
souvent
noté
que
cette
syntaxe
«
rustique
,
peu
fournie
n
outils de causalité
marque,
en
revanche,
plus fréquemment
es relationsde
conséquence
nous serions tentée
de voir à un autre ndice du but
assigné
à
cette
ittérature
il
s'agit
non
d'expliquer
es
faits
mais
d'enregistrer
es
gesta
Dei.
En
outre,
ar est
particulièrementpte
à relierdes
propositions
ux
plans temporels
istincts,
aisantfusionner ans une même
phrase,
a
temporalitéu récit u passé et le présent ommun u récitant t à son
public
qui
réactualisent e
passé
(lors)
en
un
présent
or)
Lors
vosist estre a
Chartres u a
Blois
ou a
Paris,
en
la
terre
e
roi,
quar
or ne set de lui
prendre
ouroi
Prise
d'Orange
30
15.Cf.
AUERBACH,
imesis, aris,
977.
16.
bid.
pp.
84-85
La liaison
orizontale,
'est-à-dire
emporelle
t
causale,
se
dissout,
e hic et nunc
n'est
plus
un
simple
élément 'un
processus
terrestre, ais en même emps, uelquechosequi a toujours té et quis'accomplitans le futur. Procéder insic'est établir ne relation ntre
deux
événements
ui
ne
sont reliésni
temporellement
i
causalement,
ne
relation
u'il
est
impossible
e
postuler
aisonnablementans
a
dimension
horizontale
...)
On
peut
eulement
tablir e
rapport
n
rattachant
es deux
événements
erticalementla
providence
ivine...
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 51/155
49
BeranrdGuenée
rappelle
que,
pour
l'historien
hrétien,
l
n'y
a
qu'un
temps,
u
point
qu'à
la
fin du
Moyen Age
encore,
es
bibliothèques
anglaises
réunissentdans une même
catégorie
livres d'histoireset
prophéties
17)
l'épopée
et le
chant
religieux
'inscrivent
leinement
dans cette achronie. a fusion
emporelle
eut
se doubler d'une ambi-
guïté
uant
à
l'énonciateur,
uperposant arole
du
personnage
t
parole
du narrateur
De grantoutrage commença parlervers
Looys,
ar servit 'ot assez.
Le charroide
Nîmes
129
Le récit
en
tant
qu'énoncé
des
événements
e
fond
alors avec son
énonciation,
aisant
pénétrer
es auditeurs dans
l'a-temporel
ù ils
rejoignent
es
actants
de
l'Histoire.Car
participe
ainsi à cet
enjeu
majeur
de
l'épopée
révéler
à
la
communauté es
valeurs,
intégrer
l'accidentel
«
une
intemporalité
riomphante,
une
durée
éternelle,
dans
la
présence
t
le
chaud
dialogue
virtuel,
u
chanteur t
de ceux
qui
Técoutent
(18).
En revanche, orsque l'histoire e libère de sa fonctiond'hagio-
graphie aïque présente
ans
les
œuvres
en
vers comme
Brut
ou
Guil-
laume le Maréchal
-
même si elle reste véhicule
d'idéologie
-
les
faits et leur enchaînement
rennent
de
l'importance.
a
proportion
de car
/que
par
rapport por
ce
que
est d'environ 9
dans La
Chanson
ďAspremont,
6 dans le
Roland
11,5
dans
Le
Couronnement e
Louis;
or elle est
de 4
dans les
ouvrages
de Clari
et de
Villehardouin, ,5
dans
une trentaine e
chapitres
es Grandes
Chroniques
livre
,
chapitres
à
24,
ivre
I,
chapitres
à
10).
L'écart est
frappant
la causalité
n'est
plus
seulement
rovidence
dire. Cette
fréquence lus
importante
e
por
ce
que
coïncide avec
un
tournantdans le
genre historique,
u
XIIP siècle. On constate, n effet lors,une double sécularisation e
l'histoire
qui, échappant
au
quasi monopole
des
moines,
est
écrite,
bien
plus
souvent,
n
langue
vulgaire,par
des laïcs
ou
des
clercs
s'adressant un
public
de laïcs. Ce
goût
nouveau d'un
public
aristocra-
tique
manifeste oit le souci de célébrerun
lignage
oit une
curiosité
pour
es
événements,
n
particulier
es événements
ontemporains
19).
B. Guenée
note,
ce
propos, 'importance
e la croisade dans
le chan-
gement
du
goût
du
public
et,
partant,
de
l'historiographie
20).
Ce
17.B. GUENEE,Histoire t culture istoriqueans 'Occidentmédiéval,Paris, 980, p.20-21.
18.P.
ŽŪMTHOR, angue, exte, nigme, aris, 975, .
239.
19.G.
DUBY,
Le dimanche e
Bouvines,p.
cit.
pp.
185-186.
20.B.
GUENEE,
op.
cit.
p.
360
voir
ussi
pp.
363-364
our
e
goût
des
laïcs
pour
'histoire
u XIII®
iècle.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 52/155
50
regain
d'intérêt
our
«
l'actualité
s'accompagne
d'un
souci accru des
relations
causales.
Jusqu'alors,
'historien
médiéval,
iant
histoire et
théologie,
n'explique
pas
tant les faits
par
des causes
particulières,
terrestres,
ue par
la
cause
générale qu'est
la
volonté divine. Cette
attitude ommence se modifier
u XIIIa
siècle
où l'on
prend
davan-
tage
en considération 'enchaînement aturel des faits
(21).
Nobles,
crivant
our
eurs
pairs
es aventures
ontemporaines
u'ils
ont
vécues,
n
l'occurrence
a
Croisade,
Clari et
Villehardouin
emblent
caractéristiques
u renouveau du
projet historique
à leur
époquel'importanceccrue du nombrede por ce que dans leurs textesmani-
feste
grammaticalement
ettemutation.
On
pourrait,
ependant,
'étonner e voir une
régression
elative
de
car dans deux
œuvres
où,
fait
peu fréquent
u
MoyenAge,
'auteur se
nomme
pour
témoigner
ur
son
temps
sa
place
semble
prépondérante
dans
l'œuvre et
cela
devrait
nfirmer
os
hypothèses
oncernant
a
relation
privilégiée
ntre car et la
parole.
Ce
paradoxe
nous semble
justement
ypique
d'un certaindessein du
narrateur
rapporter bjec-
tivement,
hronologiquement
es faits
dont l a été le témoin
t
qu'il
a
appris
en se référant des
témoignages
récis.
Daniel Poirion
montré,
à proposde Villehardouin,ommente narrateur ssimileen récit es
multiples
iscours
que
lui
livre sa documentationt
qui
ont contribué
à
la
marchedes événements
22).
Son œuvre st
témoignage
ersonnel,
œuvre
de
mémoire,
ertes,
mais aussi
et
surtout
olonté
d'ordonner es
faits.
«
Son récit cherche
à
développer
tout
ce
que
contiennent e
cause
et d'effet es
discours
qui
ont conduit
les
croisades
où l'on
sait»
(23).
D. Poirion
oppose
cette volonté
organisatrice,
ui
tend
à
dépasser
a
subjectivité
e
l'auteur,
la manière
de
Joinville
il
n'est
pas
indifférente noter
que
les car
prolifèrent
hez cet
auteur
qui
utilise
pourtant
ui
aussi,
la
prose.
On
comprend,
u même
coup,
que
l'accroissement
elatif
u
nombre
des
por
ce
que
dans
la
prose
histo-
rique du XIII* siècle,ne peut s'expliqueruniquement ar la liberté
syntaxique
u'offrirait
a
prose,permettant
des articulations
onjonc-
tives
plus longues
de s'insérer ans
le tissu
de la
phrase.
On
constate,
d'ailleurs,
ue
d'autres
genres
de
prose
ne
comportent as
uniformé-
ment
ce
phénomène.
l
faut
donc
bien
y
voir
une volonté
propre
à
l'historien,
ans
ces
textes,
e s'effacer evant
es faits
pour
en
exposer
l'enchaînement
ou de feindre
e le
faire.
Ce
type
d'écritnous
paraît
ainsi,
dans
la littérature
n
ancien
français,
e
plus proche
d'une
mimesis.
Montrer,
e
ne
peut
être
qu'une
façon
de
raconter,
t cette
21.
bidem
p.
207
211 t
362
n
particulier.
22.D.
POIRION,
«
Les
paragraphes
t le
pré-texte
e Villehardouin
,
Langue rançaise,
°
40,
décembre
978, p.
45-59.
23.
bidem
.
57.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 53/155
51
façon
consiste
la
fois à
en dire le
plus
possible,
t
ce
plus
à le
dire
le
moins
possible
...)
feindre e
raconter,
'est
feindre e
se
taire
(24).
L'historien
e faisant
plus
impersonnel,
es
indices
grammaticaux
e sa
voix,
comme car se
font
moins
fréquents.
La
prose
romanesque
t
didactique
du XIII* siècle
partage-t-elle
e
dessein
La situation
tatistique
st variable
la
proportion
e car
que
par
rapport por
ce
que
est
supérieure
10
dans
Le
Roman
de
T
ristan
en
prose
ou
La
Quête
du
Saint Graal mais elle s'abaisse
à 5 ans
dans
La Mort Artu t
davantage
ncore dans
des mises
en
prose
de
textes,
à l'origine, ersifiésommeLe Roman du Graal.Il y a là une diversité
dont
on
pourrait
tirer
argument
our
voir dans
cette forme
e
seul
reflet
éridique
de
la
parole
médiévale,
'irrégularité
es
fréquences
trahissant a liberté nsaisissable
du vécu
ainsi
la
prose
serait
e
lieu
privilégié
our
saisir
la
langue
vierge
de toute
«
écriture
,
de toute
déformation
tylistique.
n
y
rencontrerait
nfin
non la cause filtrée
par
le dessein
poétique
d'un
genre
mais
la
cause
«
telle
qu'on
la cause
»
au XIIP
siècle.
Il nous semble
pourtant ossible
de
discerner
es
constantesdans
l'utilisation
e la cause
en
prose
romanesque
t
didactique,
onstantes
qui sont autant d'indicesd'une poétique de cette prose qui reste àdéfinir. a
comparaison
des versions n vers et en
prose
d'un même
récit
-
comme
Le Roman de
l'Estoire dou Graal
de Robert
de
Boron
(25)
et la version en
prose
du manuscrit
de Modène
(26)
ou
La vie de Sainte Marie
l'Egyptienne
27)
dans
les versions
T et
X
-
nous
paraît,
cet
effet,
clairant.
n
constate
n double
phénomène
la
diminution
es coordonnants
ar
que
en
prose
on
passe
respectivement
dans ces
deux textes
de 112 à 53 et de
41 à
33)
mais,
conjointement,
l'apparition
de
ces connecteurs
n
prose,
là où
le vers
emploie
la
parataxe.
La
mise en
prose
semble insi
appliquer
propos
de car
que,
un
double
principe
resserrer
e texteen
supprimant
es
détails,
des
commentaires,n condensant lusieursphrasesen une seule,remanie-
ments
qui
entraînent
a
disparition
e car
mais,
orsque
deux
propo-
sitions existant
en vers sont
conservées
en
prose,
conservation
u,
éventuellement,
pparition
d'un
mot de liaison.
Tendance,
d'une
part,
à l'effacement
u
narrateur,
l'absorption
du discours
en
récit,
que
l'on
voit
nettement
l'œuvre
quand por
ce
que
se substitue
car,
le
récit
mpersonnel
la
parole
-
Judas
rie
«
Bien
le
tenez,
Car
il
est
merveilles orzhom.
Robertde Boron 388-389
24.G.
GENETTE, igures
II
, Paris, .
187.
25. Edité
par
W.A.
Nïtze, aris,
983.
26. Edité
par
B.
Cerquiglini,
ans,
1981.
27. Jbdition
embowsKi,
oir
upra.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 54/155
52
-
Et Judas lor crie
«
Tenez lou bien. Et ce
lor dist
il
por
ce
que
il
lou savoit
mout a fort.
Robert
de
Boron,
C.
22
(9)
Le manuscrit versifié
uperpose
la
voix du
narrateur
à
celle
du
personnage,
n l'absenced'une
ponctuation
igoureuse
la
prose disjoint
nettement
es deux énonciations t transformea
parole
en un récitoù
por
ce
que accompagne
a
troisième
ersonne.
a
place
de car
est
ainsi
amenée à
se
restreindre.
Mais, simultanément,ne autre tendance se fait jour celle qui
consiste
à
multiplier
es
connexions
yntaxiques
pour compenser
a
perte
de
cohérence
u'entraîne
a
disparition
e la
rime,
du
rythme,
du
distique.
Ainsi aux vers
-
Joseph,
r ne t'esmaie
mie
La vertuDieu
has
en aïe.
Robertde
Boron,
R. 731-732
se substituentes
propositions
oordonnées
-
Joseph,
Joseph,
ne t'esmaiertu
mie,
car la
vertu
de
mon
pere
te regardera.
Robert
de
Boron,
C.
27
(16)
L'apparition
de
car,
en
prose,
n'est
pas
liée
au
goût
du
détail,
à
la
volonté
d'ajouts
«
réalistes mais
au
désir de créer une forme ussi
cohérente
ue
le
vers,
ans les contraintes u mètre se libérerde
la
versification,
our
mieux
entrer dans le carcan de
la
syntaxe.
La
comparaison
des deux versionsdu
Roman du Graal
fait
apparaître
n
prose
12
car
correspondant
n
vers à une
parataxe.
Sur ces 12
car,
un
seul
correspond
l'ajout
d'un
détail,
7
relientdes
propositions
ui,
en
vers,
forment
n
distique,
2
permettent
e
marquer
le
début d'une
énonciation, se rapprochent 'un rôle de ponctuation. ar participe
ainsi,
comme
d'autres
connecteurs,
'une volontéd'établir
une liaison
que
suffisait maintenir a
rime
on
constate,
par
exemple,
dans le
passage
suivant a double
apparition
de car et de
qui:
-
Vous
veez
ci,
dist
il,
seigneur,
Les
messages
'empereeur
Savoir
welent
ues
hons estoit
Cius
qui
on Jhesu
peloit
Qui
de la
loi se feisoit
ires.
On
leur
ha dist
qu'il
estoit
mires
Robertde
Boron,
R.
1417
-
Segnor
veés ci les messagesa l'empereor ui vuelent avoirqui
cil est
que
vous
avés
ocis,
qui
ert
sire de
li loi. Car
l'empereres
a
oï dire
qu'il
estoitmolt buens mirres.
Robert
de
Boron,
C. 38
(26)
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 55/155
53
Dans une
prose qui
ne
tolère
plus
les
ambiguïtés
ur
le
locuteur,
ar
peut
également
ntrer
armi
es
dispositifs ui
délimitent vec
netteté
les
changements
ans l'énonciation
ainsi
apparaît
un
car
exhortatif
que
l'on dit
souvent
réservé
u
styleépique
-
Com
l'oīrent,
En leur
cuers tout s'en
esjoïrent
«
Enseigne
nous
comment 'aruns
Ibid.,
R.
285
-
Et
quant
i
Juïf
'oïrent
ue
il
enfragnoit
a
loi,
si en
orent
grantjoie, et il li disent « Car nous ensagniéscomment nous le
porons
prendre
.
Ibid.,
C. 20
(10)
La
syntaxeproduit
un
substitut ce
que
marquaient
a
clôture du
mètre t le
changement
e rime.
Dans ce
rôle de
bornage
du
discours,
car
se
rapproche
d'un dernier
ype d'emploi
où
il
fonctionne omme
substitut 'une
ponctuation.
es vers
peuvent,
n
effet,
e
passer
des
deux
points
ouvrantune déclaration
xplicative
n
apposition
la
fin
du
mètre
marquée
par
la rime
suffit
indiquer
e
rapport.
La
prose,
privée
de
cette
possibilité,
tilise car
- volentierse direi,
Cet
essemble
en
Perrun
peurei
Aussi
comme
'iaue ordoia
Des
premiers
iez
c'on
i
lava
(...)
Ibid.,
R. 341
-
Çou
est
l'essamples
Pieron,
ar
tout aussi
com
li
eve fu
orde des
premiers iés
(...)
Ibid.,
C.
On
pourrait
montrer
ettemême
fonction,
out la
fois,
de
délimitation
et
de cohésion
dans 6 des 7 car
qui
apparaissent
dans
la
version
X
de
Sainte
Marie
l'Egyptienne.
Certes,e textemis en prosen'estsans doutepas un texte n prose
normal la
réécritureend
rendre
'œil
critique, oussant
supprimer,
dans
le domainede
la
cause,
toute
explication ui
ne
paraîtrait
xister
que pour
les besoins de
la
rime
ou du
rythme
ainsi
peut
disparaître
ce
qui
semble
une cheville
-
laue
buvoient ient
aine,
Car ele n'iert
pas
de fontaine.
Vie de Sainte
Marie
l'Egyptienne,
. 723
-
(...)
et buvoient
yaue
moult mauvaise
Ibid., X,
31
(8)
On pourrait xpliquer à, nous semble-t-il,e plus faiblenombrede car
dans ces textes
que
dans les
romans
écrits
directement n
prose.
Il
n'en
reste
pas
moins
que
ces
réécritures
ous
renseignent
ur le
souci
dominant
du
prosateur
coordonner.
Ainsi,
même si sa
voix
s'amuït
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 56/155
54
par
le
développement
u
récit u détriment
u
discours,
es car restent
nombreux.
n
chasse
le
commentateur
ais
le commentaire
éapparaît
par
souci
d'unité.
Nicolas de Senlis
expliquant
es
raisons
qui
l'ont
poussé,
au début
du XIII"
siècle,
à traduire
n
prose
La
Chronique
du
PseudoTurpiti
déclare
dans sa
préface
«
Nus contes
rimés n'est verais .
Aussi
la
prose, porteuse
d'une
plus
grande
vérité,
supprime-t-elle
es car
qu'amenaient
es seules contraintes
métriques
mais elle
ne
peut
se
passer
d'un
instrument
ui
lui
permet
de
proclamer
a
vérité
de sa
parole et de rivaliser vec l'unitéformelle u mètre.Suppressionou
adjonction,
ans
les deux cas
triomphe
e souci de
la vérité. ouci
de
vérité t non de réalité
l'expansion
e
por
ce
que
n'est
pas
comparable
à
ce
qu'elle
est en
prose historique.
Ainsi l'étude de la cause semble fournir u confirmer
ertaines
directions
e recherche ur
les
particularités
e
la
prose
romanesque
plus
faible
présence
du
narrateur,
estriction t délimitation e
la
parole,
volonté e cohérence
'appuyant
ur es ressources e la
syntaxe.
Dans ce
domaine,
omme
dans
l'épopée
ou
l'histoire
n
prose, 'expres-
sion de
la
cause reflète
moins
un
système
de
langue que
les
options
d'une forme ittéraire. utant e poétiquesdivergentes.Reste
pourtant
'unité
profonde
d'une «littérature»
qui,
confiante
dans
la Voix n'est
pas
encoreEcriture
Parole
qui
est avant
tout
com-
mentaire,
a cause est là
pour
ustifier
on
pour
expliquer,
our
prouver
le
dire.
«
Savoir
consiste
donc
à
rapporter
u
langage
du
langage.
...)
A
tout
faire
parler.
C'est-à-dire faire
naître
au-dessus
de
toutes les
marques
e discours
econd
du
commentaire.
e savoir
n'est
ni de
voir
ni
de
démontrer,
mais
d'interpréter»
28).
28.Cf.
M.
FOUCAULT,
es
Mots et
les
Choses
1966,
.
55.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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Katherine FRIZZA
LE
LAI DE
DOON,
OU LE
FONCTIONNEMENT DE
LA BRIÈVETÉ
«
Il
est interdit
entrer ans
ce
jardin
avec
des
fleurs
la
main
(1).
Au
seuil
de la
littérature
médiévale,
l
conviendrait e se
souvenir
de
cette
consigne,
t de
suspecter
appellation
e
récit
bref,
ui
fleurit
maintenant
ous les
plumes
les
plus
autorisées,
de venir
tout droit
de
notre
littérature
moderne.Car si l on
considère
ce
que
recouvre
ce genre, ssez récemmentpparu dans le domainemédiéval, t qui
semble
désormaisfaire
oi,
on voit se
côtoyer xempla,
vidas,
lais
et
fabliaux.
Autantde
genres spécifiques,
ossédant
chacun
une
tonalité,
un
imaginaire
t
une
écriture
articulière.
quel
titre
eut-on
ubsumer
ces
différents
enres
en un
seul
?
Leur commune brièveté
Cela
saurait-il
uffire
Il
y
aurait
pourtant
ien des raisons de s en satisfaire.
ace aux
lais
et aux
fabliaux
uxquels
nous avons restreint otre bservation
2),
la
critique
depuis
J. Bédier avait
depuis
longtemps
ffectué
e
rappro-
chement t
mis
en œuvre a
comparaison,
n
constatant
t
en
se basant
sur
leurparenté dans le temps lais et fabliaux pparaissent t dispa-raissentensembleentre e XII* et le XIII siècle dans leur forme
emploi
de
l octosyllabe,
t brièveté
ommune
d une
centaine de vers
à
mille
vers).
Mais ce
rapprochement
evait conduire un divorce.La
critique
est en
effet
ttachée
à
la
thématique
e ces
genres
le
lai,
évoluant
dans
un
univers
courtois où
la
matière
celtique
donnait e
cadre des
histoires, autre,
e
fabliau,
mettant n scène un
monde
quotidien,
éaliste
dit-on,
ù le rire et la
grivoiserie
aisaient
oi.
1.
J.
PAULHAN,
es
Fleurs
de
Tarbes,
u
la
Terreur
ans les Lettres
Gallimard.2.MARIEDE FRANCE Les
Lais,
éd. J.
Rychner,
hampion,
aris,
977
Lais
anonymes
es XII
*
et XIII*
siècles
édition
ritique
e
quelques
ais
bretons
par
Prudence
O Hara
Tobin,
Droz,
Genève,
976;
Les
fabliaux
français
u
Moyen
Age
éd.
Ph.
Ménard,
roz,Genève,
979.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 58/155
56
Partant
de
là,
J. Bédier
3)
concluait
un
divorce
plus
fondamental
encore celui
du
public
pour
les
lais,
un
public
noble et
nourri ux
règles
courtoises
pour
les
fabliaux,
n
public bourgeois
u
populaire,
au rire
facile,
ux
exigences
ittéraires
moindres.
es
grandes
ritiques
qui
suivirent,
elles de
Per
Nykrog
4)
et
de Jean
Rychner
5)
restèrent
dans
le
sillage
ouvert
par
J. Bédier. Elles s attachèrent
n considérant
conjointement
ais et fabliaux démentir
ette
cission,
t
à reformuler
les
rapports
entre ces
œuvres et leur
public public
beaucoup
plus
homogène
elon
P.
Nykrog,
ui par
ailleurs
menaçait
les frontières
existant ntre ais et fabliaux,œuvrescapables d adaptation tylistique
en fonction u
public
auquel
elles étaient ues.
Ainsi
la
notion de
«
récit
bref
sous
laquelle
on associerait
ces
genres
en vertu d un caractère formel
met un
terme à ce débat
de
type
thématique
t socio-littéraire.e
genres
nnemis,
ais et
fabliaux
devenaient
enres umeaux.
A ce
stade,
la
critique
s est
faite
plus
discrète,
peu
soucieuse
de
justifier
e
regroupement,
en
explorer
a
pertinence,
est-à-dire e
regarder
ces œuvres
à la lumière de leur
brièveté,
t de
montrer
comment
et
aspect
commun,
mais secondaire
priori pouvait orga-
niser de manière imilaire a narration e ces récits.Si la brièveténedoit rester
qu un
caractèreexterne ces
genres,
a notionde « récit
bref» est vide. Il
convient
donc
de sonder un
peu
les arcanes
de la
brièveté,
e se demander i une
commune
rièveté
mplique
des modes
de fonctionnement
t des écritures ommunes
u lai et au fabliau.
En
considérant
ci
le
seul Lai de Doon
(6),
nous
nous sommes
appliquée
à
repérer
ur
quels points
de
la
narrature
ouvait
influer
la brièveté
e ce lai
(seulement
86
vers).
Si
l on tient
compteparallè-
3. J.
BEDIER,
Les
Fabliaux,
ibl.
de l Ecole des Hautes
Etudes,
Paris,
1898.
4.
PER
NYKROG,
es
Fabliaux
études
d histoireittérairet
de
stylis-
tique
médiévale,
unkaarg,
openhague,
957.
5. JEAN
RYCHNER,
Contribution
l étude des
fabliaux,
ariations,
remaniements,
égradations,
roz,Genève,
960,
ol. 1.
JEAN
RYCHNER,
Les
fabliaux,
enres,
tyles, ublics
,
dans Littéra-
turenarrative
imagination,.U.F.,
Paris,
1961,
.
41-52.
6. Le Lai de
Doon,
dité
par
P.M.O Hara
Tobin,
p.
cit.
En voiciun bref
résumé
La Demoiselle
rgueilleuse,
éritière e
Daneborc,
oumet ses
prétendants
une
épreuve
traversée
e la mer
cheval)
vouée,
édoublée
par
une autre
non avouée les
prétendants
ont
ccueillis,
n leur
propose
de dormir
ils
en meurent. oon
passe
outre a
premièrepreuve,
t
déjoue
la
seconde
ui
est un
piège.
La Demoiselle
ontinue e refuser a
main,
et soumet
oon à une nouvelle
preuve
mortelle
il survit.
a
Demoiselle
doit e
marier.
près
e
mariage,
oon abandonne
n lui confiant
n anneau
qu elle devraremettreu filsqu elle porte, orsqu il era en âge d êtreadoubé.Doonpart.Plusieurs nnéespassent,onfils raversea merpour
venir
riompher
ans
le
pays
de son
père.
Ayant ppris
existence
e ce
ieune
t
valeureux
hevalier,
oon
e rencontre
ansun tournoi son fils
st
le
plus
fort,
mais
Doon
reconnaît
anneau.
ls retournent
nsemble
uprès
de la Demoiselle
rgueilleuse.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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57
lement
de la
longueur
de l histoire
qui
se
déroule
sur
plus
de
vingt
ans),
il
convient
e se demander
de
quelle
économie
narrative
se
le
texte
pour
résoudre
e
hiatus entre
emporalité
u récit
ou
diégétique)
et
temporalité
e l aventure
ou
intradiégétique).
l faut
bien
que
la
«
façon
de dire soit
sur-signifiante,
our
compenser
a
brièveté
du
récit.Le
récit,
dans
le creuset
de
l écriture,
ans sa
«
matérialité
,
dit
Paul
Zumthor,
e doit
de
doubler,
e
supporter
t d enrichir
e
signifié.
Nous avons concentré
notre
attention ur
l organisation
es
diffé-
rents ypesde discours direct,ndirect,t pseudo-indirectibre,pourceux
qui présentaient
ne
ambiguïté
en cherchant voirde quelle
manière leurs
enchaînements,
eurs alternances
pouvaient
servir
la
narration
rève,
et
d une certaine
manière
y
suppléer.
Le choix
d un
discours
plutôtqu un
autre,
consacré
à
un
personnage
lutôt
qu un
à
un
autre,
repose
sur
une
volonté
signifiante
ui
vient
doubler,
et
parfois
même
dépasser
le récit
même.
De cette
manière,
n
pouvait
avancer
que,
faute
de
place,
e
récit
bref ravaillait
es
moyens
expres-
sion,
sa
matérialité,
n
vue d un
complément
e
signifiance.
Dans
le
peu
d espace/
emps
textuel
mparti
au
lai,
les
éléments
narratifs
ont
être
organisés
n
vue d une
efficacité
aximale
le
sens
des discoursva doubler le sens de l histoire la valeur propre de
chaque
type
de discours
direct,
ndirect
t
retransmis)
omme
a nature
de leurs
enchaînements t
de
leur succession
nous
paraissent
redire,
à leur
niveau,
a structure
niveau
muet,
mperceptible,
ais
cepen-
dant
parlant.
Une
analogie
s établit
d elle-même
ntre
la structure
urbaine,
qui
faute
d espace,
utilise
la
hauteur,
es
étages
et le sous-
sol,
et
le récit
bref,
ontraint
ne
pas
s étendre,
ui produit
du
sens
à
chaque
degré
de sa
construction.
L histoire
st
avant tout
celle
d un
rapport
de force
engagé
entre
la Demoiselleorgueilleuse, vide d indépendance,t ses prétendants,soumis à une mortelleet
maligne
épreuve.
Doon aura l heur et le
malheur
d en
triompher.
n
passe
d un
état où
la Demoiselle
orgueil-
leuse est
«
supérieure
à
Doon,
à
un état
inverse,
ù elle se
trouve
en
position
e
faiblesse, t,
plus généralement,
e
la mésentente
nitiale
qui
déclenche
e
lai
à
la concorde
finale. e
discours
direct
orrespond
à la
position
de
supériorité
e
celui
qui
le
tient,
par
rapport
au(x)
autre(s)
personnage(s)
il
est,
ogiquement,
éservé
la demoiselle
u
début
du récit.
Parallèlement
e discours
ndirect raduit
a
faiblesse
de
celui
à
propos
duquel
on en
use,
c est-à-dire
elle de
Doon
à l ouver-
turedu lai.
L ordredes discours,redoublant analysede la tramediégétique,
permet
e
repérer
uatreépisodes.
Le
premier
écrit
a donnée
nitiale
la demoiselle
y
affirme on
indépendance
n refusant
e
mariage.
Le
défi
qu elle
lance aux
prétendants
st retranscrit
n
discours
direct
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opposition,
n
établissant
oncorde t
égalité
de
statut
ntre es
person-
nages.
Un tel exercice
n a d ailleurs
pas
lieu directement
ntre Doon
et la
demoiselle,
ésormais exclue
de
la
parole,
mais entre
Doon
et
son
fils,
plus apte
à
se
placer
sur le même
terrain
(guerrier
ou
discursif)
ue
son
père.
L ensemble
de
ce
quatrième
pisode
est
placé
sous le
signe
du
discours
direct,
enforcé
ar l usage systématique
e
prolepses
8)
:
aussi
bien les
paroles
de Doon
que
celles
de son
fils
sont
jugées dignes
d une relation
exacte,
qui
insiste
sur
leur statut
équivalent.
L extrêmehabiletéavec laquelle la narrationutilise les discours
dépasse par
sa
perfection
a seule économie
de la brièveté.
e
principe,
selon
equel
s établit
un
parallèle
entre
e sens de
l histoire t
la valeur
de ces discours
et de leurs
enchaînements,
érited être étudiée
dans
ses
nuances.
Le cas du discours
évoqué,
tout
d abord,
attire
particulièrement
l attention
en
effet,
l
est
porteur
une neutralité
u
d une
ambiguïté
assez forte
t ne se conforme
as
à
la
simple
mathématique
u renver-
sement. our se
servir
des
catégories
e G.
Genette,
e discours
voqué
correspond
une scène
de
dialogue
traitée
de manière
«
sommaire
,
et où
la narrationne cède
pas
la
place
à
la
représentation.
r le
sommaire ésume, où sonévidentntérêt our e récitbref. l permet,
sans
les
gommer,
e
passer rapidement
ur certains
propos,
néces-
saires à la
compréhension
u
déroulement e
l action mais
cependant
tenus
en
second
plan.
Le
discours
voqué
et son utilisation
elèvent
e
la
hiérarchisation
es
séquences
narratives,
ssentielle l économie
du
récitbref.
Dans le lai de Doon
si l on s en tenait
ce
que
l histoire t
l épreuve
que
la demoiselle nstaure semblent
être,
les
scènes transmises
u
discours
évoqué
devraient être
au discours direct.
Théoriquement
c est-à-dire,
i la demoiselle
ne trichait
pas,
ne
pipait pas
l épreuve.
Et, à lui seul, le discours évoqué offreun indice de suspicion si
l épreuve
était dans la traversée
de
la
mer,
pourquoi
le récit n en
ferait-il
as
plus
de cas ? Mais
la tricherie e
la
demoiselle
st double.
La
première
use,
est
l épreuve
dissimuléedu sommeil.
Doon
ayant
déjoué
le
piège
du
sommeil
mortel
demande la
récompense
due
aboutissement
ormal et
primordial
e
l épreuve.
Or la demande
du
«
covenanz
est
au discours
évoqué.
Ensuite,
a demoiselle
redouble
l épreuve,
e
qui
explique
l effacement es succès
précédents.
Ayant
triomphé
e cette
econde
preuve,
oon obtient
ettefois satisfaction
c est
encore e discours
évoqué
qui
est en
usage.
La fin
n est
pas
où
elle
devrait
être;
d autres
finalités,
autres
intentions ont en
jeu.
8. Nous
utilisons ette
notion u
sens
défini
ar
BERNARD
CERQUI-
GLINI
dans la
Parole
médiévale,
ditions
e
Minuit,
aris,
1981.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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60
Ces
trois
fins
de récit
possibles
et
chaque
fois
différées évèlent
l existence un
ordre
apparent
de
motivation,
t d un
ordre dissimulé
(et
réellement
onducteur)
ans le récit. Ces
ordres
répondent
irec-
tement ux
fausses ntentions t aux
intentions
achées des deux
prota-
gonistes.
Dans la
premièrepartie
du
récit,
c est la
demoiselle
qui
impose
un
ordrefactice t un
ordre
réel,
apparent
t le caché.
Après
la
seconde
épreuve,
est Doon
qui
gère l apparent
t
le
caché,
ordre
double,
de
l immédiat t
du
lointain.
Le
récit
va
au-delà
de sa
fin
annoncé le
mariage.
Les deuxrusess inscrivent ans la matérialité u
récit,
par
le biais
de
ces
discours
évoqués,
qui trompent
attentede l auditeur.Ecrire
ces fausses
fins au
discours
évoqué
revient les
dénoncer
mmédia-
tementet
«
stylistiquement
comme
fausses. Le
paradoxe qui
naît
entre
attented un
moment
final
et donc
culminant t l effacement
avec
lequel
on
les
traite,
elance
mmédiatement
e
récitvers sa suite
et l on
peut
noter
que
la
narration
n use
pas
des
moyens
courants
(intervention
u
narrateur)
our ndiquer
une
suite de
l intrigue.
Muet-
tement,
mécaniquement,
e
discours
évoqué
relance e
récit,
n
faisant
l économie de
toute
explication.
L attente
trompée
du lecteur se
détrompe la compréhensionmplicite et insensible de la valeur
du
discours
mployé.
En
ce
qui
concerne
es discoursdirects t
indirects,
a situation st
beaucoup plus
simple
le
personnage
n situation
de force
bénéficie,
on
l a
dit,
du
discours direct de manière
exclusive.Ce
partage
des
discours
déjà
été
établi en ce
qui
concerne es
rapports
de
la
demoi-
selle
orgueilleuse
t de
Doon
il
reste à voir
comment
e
postulat
se
comporte
ans la
relationfinale t conclusivede
Doon
et
de son fils.
Ce fils st à la fois
chargé
de
conquête chevaleresque,
t de recon-
quête
affective
celle
du
père).
Il
œuvre à la
fois
pour
lui et
pour
ses
parents sa missionest de ne vaincreson père (chevaleresquement)
que
pour
mieux soumettre a mère
(affectivement).
lus,
de rétablir
ce faisant a concorde.Porteurde
l anneau,
igne
de
circularité,
l
est
le
messager
e
la
réconciliation,
e la
réunion,
ont a
figure ymbolique
est
aussi celle de
l anneau.
Doon et
son fils
s affrontent
n
tournoi,
gnorant
un
comme
l autre
identité
espective
e leur
adversaire. e filsde
Doon est victo-
rieux.Cette situation
mbiguë
se
reflète,
u niveau
des
discours,
par
l utilisation
un
intermédiaire,
t d une
prise
de
parole
de
Doon au
style
ndirect
« ...Doonfet e vallet mander
que
il
venist lui
parler.
»
(vers 233-234)
Ce n est
qu ensuite
ue
le
dialogue
pourra
s établir
directement
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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62
récit
auprès
du discours
directne
disparaît
u à
la
dernière
éplique
celle
qui,
instaurant a
réconciliation,
met
fin,
ustement,
u
récit.
Si
chaque
discours
revêt,
par
ce
qu il
est,
un
sens
qui dépasse
ce
qu il
dit,
agencement
es discours ntre
eux,
au niveau
de
l ensemble
du
texte,
st aussi
porteur
de sens.
L assemblage
des
différents
ypes
de discours
déploie
une
signifiance
laquelle
nous allons nous
attacher.
Le
rapport
de force
qui
pose l impossible
nion
de Doon et de la
demoiselle
orgueilleuse,
a
discorde
dont
est
faite leur
relation
se
trouvent critsnon seulementpar l histoire,mais aussi par l énon-
ciation. l
semble
à ce
point
de vue fort
ymbolique
ue
les
échanges
entre Doon et la demoisele ne
se
fassent
amais
sur le même
plan.
Au discoursdirectde
l une ou de l autre ne
correspond amais
que
le
discours ndirect.
eur communicationst
toujours
discursivementis-
jonctée.
Ce
phénomène
éécrit
a
discordedes
personnages,
épend
de
la
situation
de
tromperie
t
de
ruse
qui
par
ailleurs
gère
l ensemble
des
échanges
discursifs.
La ruse
consiste
bien
à mener
quelqu un
ou
quelque
chose en un
but
donné,
tout
en le lui
laissant
ignorer.
On
ne
parle
que
d un
but
factice, n parvenant u but visé et caché. Elle impliquedonc un jeu
sur
les
finalités,
uvrant ur des êtres ou
des choses
qui,
eux,
sont
fixes. Elle
commande
qu en
sa
fin,
un
parcours
signifiant ui
se
donnait
pour unique
s avère double.
Que
l ime
des finalités e
soit
que
le
moyen
de
l autre. Reste
enfindans
la ruse
l obligatoire
présence
d un
être
oué, dupé.
Dans la
ruse,
e sens se
déplace
le
sens est là
précisément
ù on ne
l imaginepas.
Or,
dans Doon
tour à
tour,
a
demoiselle,
oon,
et
le narrateur e
montrent usés. La
demoiselle n
truquant
t en doublant
épreuve
elle
n est
pas
là où
elle se
pro-
clame être
dans
la
traversée,
mais,
en
fait,
dans le
sommeil).
Plus
généralement,
a finalité
est
pas
de
se trouver n
époux,
mais de
les
éliminer. oon alliant a force l ingéniosité e dortpas,puis triomphe
de la seconde
épreuve.
Mais son
défi,
ui
consiste
partir
u
moment
où il a
triomphé,
attaque
au
fondement e la
ruse
de la demoiselle
sa
volonté
d indépendance.
oon,
après
avoir
conquis,
décide
qu il
doit
à
son
tour
être
conquis
il
laisse cette
tâche
à
la
demoiselle
mpre-
nable,
qui l accomplit ar
l intermédiairee
son
fils. l
ruse
en
dédai-
gnant
a
dédaigneuse,
n
abandonnant
pour
être
reconquis,
t
pour
mieux
triompher.
A trne
use en succède
une autre c est ce
qu explique
a
disjonc-
tion des
discours,
ui
en
provient
ailleurs
directement.
a
demoiselle,
puis Doon, ayantchacun des desseins cachés,n entrentamais dans
une
relation
franche
ils
s échappent
mutuellement.
a
dernière
séquence
du
récit,
n réunissant es
égaux potentiels,
oon
et son
fils,
marque
aboutissement e la
ruse et
la
mise
au
jour
du dessein
caché.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 65/155
63
D une
manière
significative,
anneau
de
reconnaissance
ue
porte
le filsde
Doon
est
aussi
le
signal
et le
symbole
de
la
réunion
t
de la
réconciliation. est
par
l intermédiaire
e
la ruse et de
l anneau
que
se
forge
une entente éelle. S il
faut
ces
médiateurs ans
l histoire,
l
en
faut
aussi
dans
le
passage
du récit
au
discours,
es
prolepses,
comme,
plus
concrètement,
l
faut entremise
un
valet
pour
que
le
dialogue
commence.
Jusqu aux
16
longs
vers
narratifs e
Doon,
l inter-
vention
du
narrateur st
au
cœur des
échanges.
Ce
n est
qu à
la
dernière ntervention
u
fils
vers
271
«
-
Sire,
fet
l,
s est
vérité.
)
que le discoursdirect établit ans le recoursdu narrateur les paroles
du fils
succèdent,
narrativement
ans
rupture,
celles
de
Doon.
La
parole,
à
l image
de
l anneau,
circule une
parole
franche,
e
même
nature et
sans
intermédiaire,
riomphe
t
s impose
en
même
temps
que
la concorde installe.Cette
parole
franche
tant
rétablie,
e
récit
se
tait,
comme
s il n était
généré
que par
ce
conflit.
Esthétiquement
t
symboliquement,
anneau
régit
la
structure
finale au cercle de la
bague correspond
elui de la
parole
et celui
des
êtres.
Le
texte,
n son
début,
mettait u
contraire n scène
(et
en
écriture)
image
de
la
disjonction
t de
l incommunicabilité,
ont
ce
vers
paraît
une
belle
inscription
«
Baiart
erre,
e
cisne vole.
»
(vers
145)
La
répartition
es discours en fait
e
porte-parole.
insi es
discours
sont-ils
oublement
orteurs
de
sens
par
ce
qu ils
disent et
par
la
manière
dont ls le disent.Dans l ordredu
récit,
our adopter
a termi-
nologie
de E.
Benveniste,
es discours
font
objet
d une
mise en scène
muette,
ui
raconte
ncore,
sa
manière,
histoire.
L étude
des
discours
en
leur
nature
propre
ne
peut
se
départir
d une
observation
ur a
nature t la
signification
e
leurs
agencements.
La
volontéde faire
ressortir
n
premier lan,
a
volonté
de
varier,
ui
entrepour beaucoupdans le souci de brièveté,ont ici les guidesdes
choix
qui s opèrentpour
la retransmission un
dialogue.
Non seulement
fficaces
u
point
de vue de
la
brièveté,
ar
leur
aspect
partiel,
t
leurs variations
e
style,
es discours
des
personnages
ne se contentent
as
de surcoder
e
récitbref. ls en
organisent
e
sens,
orchestrenta
progression
t
son
dénouement. es
discours
en
disent
donc
plus
qu ils
ne
sont
pparemmenthargés
de
dire.A
la findu
texte,
la
réconciliation
este si
implicite, u il
convientbien de
penser
que
sa
compréhension
mane
directement e celle de
la
naturedes
discours.
L énonciation
ouble,
u
dernier
moment,
énoncé
la narrature
rend
le relais
de
la
narration.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 66/155
Jean-Charles
HUCHET
L' «
AMOR
DE LONH »
DU GRAMMAIRIEN
Avec
ses
quelque cinq
cents noms de
troubadours,
es deux
milleseptcentspièces réparties ur à peinedeuxsiècles et demi, a lyrique
occitane
médiévaledemeureune
des
textualités es
plus
denses et
les
plus
importantes
e
l'Occident.
Alors
que
le
MoyenAge
avait
disparu
de la
scène
culturelle,
'intérêt onstant
qu'elle
ne
cessa
de
susciter,
de Jeande
Nostredame
Sade,
de
Stendhal Péladan et
à
Ezra
Pound,
tient ce
qu'elle
parvint
s'identifier la
langue
même
de
l'amour.
Que
cette
poésie
ait
enté ses
plus
chastes
efflorescences
t
ses
louanges
mariales sur
les
pièces
obscènes du
comte de
Poitiers
constitueun
paradoxe,
bientôt doublé
d'un
second
l'amoureux
pourpris,
où
la
«
reverdie
appelait,
u XIIe
s.,
au
renouveaudu
désir,
ne
laisse
plus
éclore, u XIVe s.,qu'unefleur e rhétorique. e testament ans lequel«
Amors édicté
es lois aux
mainteneurs e la culture
roubadouresque
n'est
qu'un
édifiant
raité
de
grammaire.
Aux affres u
désir et aux
folies du
corps,
les
Leys
d'Amor de
Guilhem
Molinier
substituent
l'amour de
la
langue.
Cet
austère
infléchissemente
la
«
firiamors
,
qui
paraît
épouser
la
courbe
descendantedu
désir
satisfait,
ourrait
n'être
que
l'avatar
ultime d'une
décadence
de la tradition
roubadou-
resque,
impulsée
par
la
reprise
en main
idéologique
et
religieuse
consécutive la
Croisade
contre
es
Albigeois
1).
Dans
le
prologue
de
la
version
courte
(2)
de
ses
Leys
d'Amors
G.
Molinier
reconnaît e
pouvoir
moralement
épressif
dévolu à
la
1.
C'est,
implifiée
l'extrême,
a thèse
de R.
NELLI.
Cf.
L'Erotique
es
troubadours,
ééd.
Paris,
10/18,
974,
.
2,
p.
75-198.
2.
La version
ongue
es
Leys,
n
cinq
ivres
Ms. X,
Toulouse,
Archives
de
l'Académie
es Jeux
Floraux,
00.007),
ommencée
ers 1328
t
terminée
vers
1337,
été
éditée
par
A.F.
Gatien-Arnoult
Las
Flors del
Gay
Saber
estier
dichas as
Leys
d
Amors, vol.,
Toulouse,
841-48).
ette
ditionne
satisfait
lus
aux
exigences
hilologiques
nous
y
recourons
ependant,
faute
d'avoir
eu
accès à
l'édition
artielle
e
cette
version
ournie
ar
G.
GonfroyLa
Rédaction
ongue
n
prose
des
Leys,
Thèse
pour
e
doctorat
de
3®
ycle,Poitiers,
981).
La
version
ourte,
n
trois
livres
Ms. Z,
Toulouse,
Archives e
l'Académie
es Jeux
Floraux
500.006),
onstitue
a
version
éfinitive
n
prose
des
Leys
commencée
n mai
1355,
lle
a été
achevée u débutmai 1356Ed. J.Anglade, as LeysdAmors,Manuscritde l'Académiees JeuxFloraux, vol.,Toulouse-Paris,919-20).e manus-
crit Y
(Barcelone,
iblioteca
entral,
39) contient,
u
folio 82
recto au
folio 157
verso,
une
rédaction n
vers
des
Leys
exécutée
e 1337
1343
(Ed.
J.
Anglade,
Las Flors
del
Gay
Saber
,
Membriese
l'Institut
'estudis
catalanes,
/2,
926,
. 33-121).
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 67/155
65
grammaire
t voit dans
la
«
fin'amors
un
excès,
un dévoiement
ď
«
Amors
qu'il
faut redresser
«
L'autra
razos es
per
refrenar
os avols deziriers
els
dezonestz
movemens
del enamoratz
e
per
essenher
de
qual
amor devon
amar»
(Gatien-Arnoult,
p.
cit., ,
p.
2).
«
La dernière
aison
(de
composer
es
Leys)
a été
de
réprimer
es
désirs insensés
et les
mouvements éshonnêtes
es
amoureux
et
pour enseigner
e
quel
amour
l convient 'aimer
.
De
quelles
vertus
«
thérapeutiques
et
«
pédagogiques
les lois de
la
grammaire
ont-elles
otées
pour
ainsi
dissiper
e malaise
qui
entoure
«
Amors
?
pour
ainsi s'identifier
celles ď
«
Amors
enfinrendue
à son essence
? Dans le
livre de
la
version
ourte,
G.
Molinier
épond
à cette double
question par
une
allégorie.
Les
Leys
ď Amors
y
appa-
raissent
comme
la formalisation
e la
«
Gay
Scienza
»,
elle-même
émanation
e
«
Philozophia
représentée
coma
una
dona
de tan
gran
valor
e nobleza
(Anglade,
,
p.
72).
Objet
du désir
épistémologique,
«
Philozophia
remplace
a
«
domna des
«
antics trobadors
. Elle
se
divise en troisdisciplines en « logical (la logique), « natural (les
sciences
naturelles)
t
«
moral
(l'éthique).
a
«
Grammatica
,
où sont
édictées
es
«
leys
,
fait
partie
de la
«
scienza
logical
qui
abrite tous
les
modes de
formalisation.
'autre
part,
grâce
à
un
rapprochement
«
étymologique
comme es
aime le
Moyen
Age,
«
Philozophia
équi-
vaut à
«
Amors
:
«
Philozophia
e
deshen
e.s
deriva
d'aquesta
dictio
greca
"philos"
que
vol dire
Amor,
per
so Amors
pot
esser
dicha
mayres
de
Philozophia
er
que premierament
avemmostrat
u'es
Amors
ue
tractat
philozophia
(Anglade,
,
p.
72).
«
Philosophie
rovient
t dérivedu mot
grec
"philos" qui
veut dire
"Amour",
c'est
pourquoi
"Amour"
peut
être dite
mère
de Philo-
sophie
et
c'est
pourquoi
nous
avons montré
qu'amour
traite de
philosophie
.
La
«
grammatica
,
dans le
temps
où elle édicté es lois
de la
langue,
promulgue
elles
de
l'amour.
L'allégorie
mage
une
logique
et fictionne
une continuité ntre
e redressement
«
Amors
et la
grammaire,
à
où
la
critique
n'a voulu voir
qu'une
rupture,
voire un reniement.
Soumettre
a
langue
et l'amour
une
même
oi,
n'est-ce
as proposer
a
langueà l'amour fairede la langueun objet d'amour et,d'unmême
geste,
nviter
se retourner
ers l'excès des
«
avols
deziriers
qui
laissent
«
Amors
sans
lois,
en
proie
à
l'indicible,
fin de dévoiler e
fantasme
upportant
e désir
du
grammairien
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 68/155
66
La
«
fin'amors
»
et le «
sobreplus
»
Les
«
avols
deziriers
ls
dezonetz
movemensdel
enamoratz
vitu-
pérés
par
G. Molinier ne laissent
pas
de
nous
ramener
au
«
juoc
d'amor
auquel
le
comte
de
Poitiers,
premier
troubadour
connu,
conviait on
auditoire.Avec
génie,
e
troubadour réussi à fairenaître
l'érotique
a
plus
continente e toute
a
culture ccidentalede
«
gab
»
obscènes.
L'obscénité
dévoile e malaise sexuel où s'enracine a
«
fin'
amors et en nomme a cause du côté de la femme.Dans Companho,
farai
un vers
covinen,
e comte se déclare
partagé
entre« dos cavais»
qu'il
lui
faut chevaucher
si
l'une
des
juments
accepte
d'être
montée,
l'autre
«
dei bailar
si
defen
(v. 15) (3),
se dérobe
à l'étrille.Le
sens
sexuel de la
métaphore
se dévoile dans l'avant
dernière
«
cobla
»,
lorsque
les
deux
juments
cèdent la
place
à
deux
femmes
Agnes
et
Arsen. a
proximité
honétique
es deux noms
4)
donne
penserqu'il
s'agit
d'une même
figure
édoublée,
d'une
image
de la femme
divisée
par
la
jouissance
qu'en
tire e comte
et
incomplètement
ossédée.
Le
«
jauzimen
pris
au
corps
de
la femmene livre
pas
le
secret
de son
altérité
cf.
a bestialité
des
«
cavais
»)
mais,
à
l'inverse,
élimiteune
partd'insaisissable ui est aussi un indicible. Lo fach , l'acte sexuel,
n'est
pas
rapport,
t la sexualité 'avère
marquée
d'une faille
magée
par
la
division e
la
femme.
'image
demeure
ependant
n
instrument
impropre
la saisie de ce
qui
se dérobe elle fait
voir,
dans un autre
registre.
La faille
sexuelle
n'est
pas représentable,
u domaine
de
l'imaginaire.
Les
«
dos
cavais
»,
Agnes
et
Arsen,
réapparaissent
ous
les
traits
d'Agnes
et
Ermessen,
que
le
comte,
déguisé
en
pèlerin,
doit
foutre
«
cent
et
quatre
vinz
et ueit
vetz
(
Farai un
vers,
pos
mi
soneh,
v.
80).
La
part
dérobéeest excès. Marcabru
onne
contre es
«
putas
ardens
dont
les
«
con
son
deziron
e raubador
(5) ;
la dame
avec
laquelle
tensonneMontandévoile, vec une impudeurnégaléeau MoyenAge,
la
nature
sexuelle
de cet excès
«
canc
de fotrenon sui assazonada
e ai
tengut
os
anz
un
capellan,
e(s)
clergues
tota
sa
masnada
»
(6)
«
jamais
de foutre
e
ne
suis rassasiée et
j'y
ai
employé
durantdeux
ans un
chapelain,
es
clercs
et
toute
sa
domesticité.
3.
Ed. N.
PASERO,
Guglielmo
X
ďAquitania.
oesie,
Modena,
973.
4.
Cf.
D.
RIEGER,
«
Guillaume
X
d
Aquitaine
t
1
déologie
rouba-
douresque. emarques
ur
l'emploi
des noms
propres
hez le
"premier"
troubadour, Romania, I, Paris,1981,t notre rticle Obscénitét "fin'amors"
,
à
paraître
ans la Revuedes
Langues
omanes.
5.
MARCABRU,
es l estornei
on
sobhda,
éd. J.M.
Dejeanne,
oulouse,
1909,
.
9.
6.
Eu venh vas
vos,
Senher,
fauaa
levada,
éd.
I.
Cluzel,
Mélanges
Rostaing, iège,
974,
.
161,
. 3-5.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 69/155
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 70/155
68
poraines
retiennent ous
le
terme
de
«
réel
(8).
L'éro
ique
et
la
poétique
des troubadours
peuvent
se lire comme
l'édification 'un
rempart
ontre
ce
«
réel
»
dont l'obscénitédéfinit
a
nature sexuelle.
Au
plan
de
l'érotique,
a
crainte du
«
réel
»
conduit à
renoncer
au commerce exuel.
Le
«
fach
devient
e
«
sobreplus
,
au
sens
de
ce
qui
est
en
trop,
promesse
ncertaine
lus
que
réalitévécue. Le
«
jauzi-
men est
exclu de
l'ordreď
«
Amors
:
«
Ben sai
c'anc de
lei
no.m
auzi,
Ni ja de mino.s auzira»«
Je
sais bien
que
je
n'ai
jamais
joui
d'elle
ni
qu'elle
ne
jouira
jamais
de
moi
»
dit JaufréRudel
(9),
et
remplacépar
la
valorisation
es
plaisirs préli-
minaires
qui
maintiennent
ntacte a tension
du désir où s'enracine
le chant.
BernartMarti
supplie
Dieu de le laisser embrasser
a dame
«
Mas si.m vaïlla Dieus
la bais
»
(10)
Raimon
Rigaut
vante crûment
la
supériorité
u
baiser
«
Per
qu'ieu
am
mais baisar soven
Que.l
con,
qu'amorta
o talen
(11)
« C'est pourquoi e préfèrea boucheque je baise souvent u con
qui
tue le désir .
Bernart
de
Ventadorn éclame e droit de
caresser
«
Ara
cuit
qu'e.n
morrai
(...)
si.lh
bela lai
on
jai
no
m'aizis
pres
de se
qu'eu
la
manei..
(12)
«
Présentement,
e
crois
que je
mourrai
...)
si la belle
ne
m'accueille
pas
là où
elle
couche afin
que
je
la
caresse
.
Arnaut e Mareuil oue le désirqui metà l'abri de la jouissance
«
Mais am
de vos lo talen e.l désir
que
d'autr'
aver tot
so c'a
drut s'eschai
(13)
«
J'aimemieux e désir de vous
que
d'avoir d'une autre tout ce
que
reçoit
un amant .
8.
Cf. J.-Cl.
MILNER,
L'amour
de la
langue
Paris,
1978 t Les Noms
indistincts
Paris,
1983.
9.
No
sap
chantar
ui
so
non
i,
ed. A.
Jeanroy,
es
Chansons e
Jaufré
Rudel,C.F.M.A., aris, 974,
. 25-26.
10.
Amar
dei,
éd. E.
Hoepfřner,
es Poésiesde
Bernard
Marti, .F.M.A.,
Paris, 929,
.
24.
11.Tota
domna
que.m
don s'
mor,
d. P.
Bec,
Burlesque
t Obscénité
chez es troubadours,aris,1984, . 54,v. 16-17.12.Poitzpreyatzme, senhor, d. M. Lazar,Les Chansons 'amourde
Bernart
e
Ventadorn,aris, 964,
. 30-34.
13.Si
cum i
peis
an en
raiga
lor
vida,
éd. R.C.
Johnston,
es
Poésies
lyriques
u troubadour
rnault e
Mareuil,
latkine
eprints, enève,
973,
v. 19-20.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 71/155
69
La
«
fin'amors promeut
une
éthique
de
l'affinage
u désir
(Guiraut
Borneilh
parle
de
«
fin
talan esmerai
)
conduisant
un culte de la
souffrance.e troubadour
ouit
de la croix d'un désir voué à l'insatis-
faction t
mime,
dans la
langue
du
poème,
'acte
auquel
il a
renoncé.
La
sensualité
erceptible
hez
maints roubadours e doit
pas
leurrer
elle ne
témoignepas
d'un
débordement
e lascivité
en
cela elle ne
fournit
as
un
reflet es
comportements
moureux
réels),
elle ne fait
que
rêver,
l'optatif,
ces
débordements elle
ignifie
a
langue
du
poème
de
l'incandescence
u désir et
conduitun deuil heureux
de
la
jouissance. Plus réaliste,Matfred'Ermengautntroduira, la fin du
XIIIe
s.,
le
«
fach
dans le
cadre
du
mariage
cf.
Le Breviari
ď
Amors,
v.
32656-62).
enoncement
l'adultère,
ui,
mal
gré
qu'en
ait nombre
de
critiques,
ut
a
pierre
d'angle
de
la
«
fin'amors
,
le
mariage
ontient
le
«
jauzimen
dans un cadre
symbolique
suffisamment
ort
pour
domestiquer
es
effets
e
«
réel . Le
«
fach
n'apparaît plus
comme
le lieu de la désunion e l'homme t
de la femme
uisque
Dieu
garantit
le succès
de la
rencontre
l'enfant naîtreen
fournira
ltérieurement
le
signe.
La
«
fin'amors
oscille entre
e
sacrifice
u
«
jauzimen
et
l'élévationde
garde-fous
ymboliques
onstituant
n renoncement
son
esprit.L'art poétique des troubadours 'enracine ui aussi au cœur du
malaise sexuel dévoilé
par
l'obscénité.
L'excès de
lubricité dont
le
misogyne
rédite
a femme
ui revient omme un
trop peu
affligeant
sa
propre
sexualité.Le
mari
refusant,
hez Guilhem
de
Saint
Didier,
de donner e
«
sobr
plus
»
à son
épouse
est
déclaré
carent
par
celle-ci
le comte de Poitiers
voit une dame
lui
reprocher
'insuffisance
e
dés
(«
vostre
datz
son
menuder
)
l'empêchant
e
redoubler a mise
(«et
ieu
revit vos
a
dobler
)
(14).
A
celui
qui
connaît
a
défaite
dans
le
«
juoc
dousa
»,
il
ne
reste
plus
qu'à
se montrer maistre
erta
dans
l'art
du
«
trobar
,
à
inventer
n «vers»
(cf.
les
«
Farai un vers
..»),
puis à vanter es talentsde poète (« ieu portd'aicel mester a flor ,
Ib.,
v.
4),
commeil a exalté ses méritesd'amant
(«
ieu soi be d'est
mester
, Ib.,
v.
39).
«
Fotře et
chanter 'avèrent
ncompatibles,
insi
que
le
laissent
deviner
es termes
volontairement
mbigus
de
cette
«
cobla
»
échangée
par
Peire Cardenal
et
Uc de Maensac
«
E
quan
vos enformatz
on
gant,
Autre
nforma
son)
lauri
Dont
vos
anatz
brezanejant
(15)
«
Et
tandis
que
vous
lui enfilez
on
gant,
un autre
ui enfile 'oreille.
C'est
pour
cette
raison
que
vous
grommelez
.
A la
place
d'une
copulation
une
«
cobla
»,
une
strophe,
mot
dont
l'étymologiequivoque de « copulare ) assure e passage du sexuelau
14.Ben
vueill
ue sapchon
i
pluzor.
. 51-52.
15.
Ed. P.
Bec, op.
cit.,
p.
45,
v. 10-12.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 72/155
70
poétique.
La
copulation
des mots
et
des
sons,
génératrice
e
l'ivresse
du
«
joy
»,
maintiendra ans le
poème
la
fiction e l'union
des
corps
dans
le
«
jauzimen
. L'
«
entrebescar
e
los
motz
donnera à voir
l'enlacement
«entrebescar»)
des
corps
dans
l'amour;
la
langue poé-
tique,
affinée
par
le
désir
insatisfait,
ente
de
suppléer
au malaise
sexuel
«
C'aisi vauc
entrebescant
Los motz e.l
so afinant
Lengu'entrebescadaEs en la baizada.»
(B.
Marti,
Bel m'es lai
latz
la
fontana
v.
60-63)
«
J'enlace
les mots
et
j'affine
a
mélodie,
comme la
langue
est
enlacée
dans le baiser ».
Il
appartiendra
la
poésie
de solder es
comptes
du
con
(cf.
Companho,
tant
ai
agutz
ďavols
conres du comte
de
Poitiers)
par
un
compte
des
syllabes
du
«
compas
»
(du vers)
la dérisoire
rithmétique
e la futu-
tion,
ncertaine
pproche
du
«
sobr
plus
»,
cédera la
place
à
la virtuo-
sité
métrique
qui
fait,
plus
que
la
thématique
moureuse,
'essentiel
de
cette
poésie.
La
rythmique,
ont
se soutient
'écriture
poétique,
délimitera a place du « sobreplus et en délivrera, u-delà des mots,
dans le
pur eu
musical.
La
langue
et le «
sobreplus
»
Lubricité
t
tromperie
'équivalent
la
quête
effrénée
u
«
jauzi-
men
conduit
es femmes u
mensonge
«
Eyssamen
on domnas trichans
E sabon trichar t mentir,
Per
que
fan
los
autrus enfans
Als
maritz
enere
noyrir,
(Marcabru,
Hueymaisdey
esser
alegrans
v.
22-25)
«
Les
dames sont
également
rompeuses
t
elles savent
tromper
t
mentir,
'est
pourquoi
lles font
arder
es
enfants es
autres leur
mari
.
Le
mensonge
st la
part
dérobée
de la
vérité
t
de
langue
appelée
à la
dire.
Dans le même
temps,
e
«
fach
divise
a vérité t
la
langue
il
délimitedans la
langue
un
«
sobreplus
(du
«
réel
)
à
quoi
les
mots
manquent.
n
d'autres
termes,
l
y
a du
«
réel
»
dans la
langue parce
qu'il y a un « réel» sexuel.ChezMarcabru, e dévoiement e la vérité
par
les mauvais troubadours
qui
font le
jeu
de
«
Fais
Amors
,
ď
«
amar
»,
de
l'amour
sensuel,
se lit dans la
brisure
affectantes
mots
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 73/155
71
«
E
fant os
motz,
per
esmanssa,
Entrebeschatz
e
fraichura,
(Per
savi.l
tene ses
doptanssa
v.
11-12)
«
et
font,
ar
à
peu
près,
es mots entremêlés
e
brisures .
Divisé,
e
plan
sémantique
de
la
langue
est
la
proie
du
«
sobreplus
;
les
connotations exuelles du verbe
«
entrebescar font
s'équivaloir
la
faille
du
langage
et la division exuelle.La brisure
des mots
met en
péril
a
production
u
sens les
«
fais
amadors
acceptant
e
«
fach
accordentqu' «Amors s' mor ia » (Ib., v. 52), qu'Amourdevienne
amoureux.
A
terme,
'ensuit une confusion
généralisée
du
langage
«
Costans es
costanssa
,
Constantdevient
constance,
e oui
s'enlace
au
non
(«
Entrebescat
oc e no
»,
L'iverns
vai e.l
temps
'aizina,
v.
40).
Impossible
dès
lors de discriminer
e nom
propre
du
nom
commun,
le
masculin
du
féminin,
e
oui du non la
langue
est vouée
au chaos.
Le
«
sobreplus
de la
langue
se
présente
omme un
défaut
de
discer-
nabilité,
'absence de
«
leys
(de lois)
permettant
e fonctionnement
du
principe
de
contradiction
«
hoc
»
vs
«
no
»)
à
partir
duquel
se
déploient
es
paradigmes
outenant ous
les niveaux
de
la
langue.
Le
«
sobreplus apparaît
simultanément
omme
une
déchirure
(une
brisure),une insuffisanceadicale,et comme le non structuré e la
langue
il
porte
en
lui
l'exigence
'une combinatoire
tructurante
ont
la
«
ley grammaticale
ournirait
'épure.
On le
voit,
il
n'y
a
pas
rupture
ntre e
champ
du
«
jauzimen
et
celui de
la
langue
ce
qui,
dans
l'un
et
dans
l'autre,
touche
au
«
sobreplus
demeure ndicible
et
passible
d'une formalisation
raçant
a limite d'oubli
à
partir
de
laquelle
un discours est
possible
et la sexualité
heureuse.
Les
gram-
maires
occitanes,
ui
éclosent
u
XIIIe
s.,
apparaissent
omme
autant
de
façons d'apprivoiser
e
«
sobreplus
de la
langue,
au même
titre
que
la
«
fin'
mors
déploie
son
érotiquepour
oublier
e
malaise sexuel
où elle s'enracine.
e
parallélisme
utorise
e
grammairien
jouer
les
moralistes t la grammaire tenter e rémunérera faille sexuellequi
affecte
ussi la
langue.
D'où,
sans
doute,
ces
«
grammaires
rotiques
,
dont a tradition atine
se
renouvelle
n
langue
d'Oc.
La
nomenclature
grammaticale
resse
ainsi
la taxinomie
es
postures
moureuses
«
Midons
m'es
emperativa
Car
mi
consent
optatiu,
E
si.m
fos
indicativa
Que.m
mostres on
conjunctiu,
For' amors
infinitiva
E
quar
em
correlativa,
Volgra
de mi
far
actiu
E de lei fairepassiva. (16)
16.Cobla
d'un bâtarddu roi
d'Aragon,
d. P.
Bec,
op.
cit.,
p.
129-30,
v. 1-8.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 74/155
72
«
Ma
Dame m'est
mpérative
ar
elle me
permet
'optatif,
t si elle
m'était indicative et me
montrât
son
conjonctif,
nos
amours
seraient
nfinitives et
comme
nous
sommes une
corrélative,
e
voudrais moi
me
rendre ctif
pour
la
rendre
lle
passive
.
Les
termes
grammaticaux
la
rime,
ous
empruntés
la
morphologie
du
verbe,
nventorient
es
modalitésd'un
«
procès
amoureux
qui
ne
se
réalise
pas
;
la
grammaire
'entretient
as
l'illusion
d'un
accomplis-
sement
de
l'acte
mais,
à
l'inverse,
ouligne
une désunion
radicale,
rapportéepar
l'alternance
des
rimes
en
/a/
et
/iu/,
la
différence
sexuelle t au « sobr plus» incarnépar le plus grandnombrede rimes
féminines
cinq
en
/a/
pour
trois
en
/iu/).
Convoquée
au secours de
la
poésie,
la
grammaire
rend
acte du
non
rapport
structural ntre
les
sexes.
L'équivoque
propre
à
chaque
terme met en valeur un des
thèmes
de la
«
fin'
mor
»
:
l'inexorabilité e la Dame
(«
imperativa
),
la
valorisation u
désir
«
optatiu
)
aux
dépens
du
«
fach
,
a
prégnance
de la
pulsion
scopique
visant
l'inaccessible
objet
cause du désir
(«m
mostres
son
CON-junctiu
)...
Lorsqu'elle
leste
d'imaginaire
es
paradigmes
n
empruntant
la
«
fin'amors
ses
thèmes,
a
grammaire
échoue à
rémunérer
a faille
exuelle.Elle
n'y
parviendra ue
dans son
champpropre, n affinantes
«
leys qui définissenta combinatoiredont se soutient a dimension
ymbolique
de la
langue,
sans
laquelle
rien
n'est
articulable,
a vérité
e
mêle
au
mensonge,
'
«
entrebescat
hoc
e
no
».
L'apparition
des
grammaires
occitanes
prend
acte de
l'échec de la
«
fin'amors
à
oublier e malaise
sexuel mis à
jour
par
les
pièces
obscènes de
quelques
troubadours.
Que
les
grammairiens
soient aussi
des
poètes
(cf.
Raimon Vidal de
Besalu,
Joffre e
Foixa,
Raimon du
Cornet,
Guilhem
Molinier...)
souligne l'impuissance
du
«
trobar à
rémunérer n
défaut sexuel et
témoigne
de
la
volonté
de
le traiter
dans le
champ propre
de la
langue,
sans référence
la
sexualité.Cet
infléchissemente la
pratique troubadouresque,
utre
qu'il explique e moralismed'un G. Molinier, ignel'avènement e la
linguistique
ccitane.
es derniers
ers
de la
Doctrinaď Acori de Terra-
magnino
e
Pise
(fin
XIIIe
s.)
illustreraiente
changement
e
perspec-
tive.
Après
avoir étudié la
morphologie
u substantif t du
verbe,
l
achève sa Doctrinaen
suppliant
es
amants d'intercéder n sa
faveur
auprès
de la Dame
sans merci
ui
lui
a
inspiré
e traité urant eur
sépa-
ration
cf.
v.
803-08) 17)
le texte e clôt sur le mot
«
Acort dont le
double
sens
de
«
traité
,
de
«
genrepoétique
,
et ď
«
accord
(gram-
matical et
sexuel),
de
«
concorde
,
assigne
au
traité de
grammaire
a
fonction 'établir
a
«
concorde entre es
sexes,
là
où elle
manque.
17.Proemi e Doctrina
Acort,
d. J.H.
Marshall,
he
Razos
de Trobar
of
RaimonVidaland associated
exts,
ondon,
972,
.
29-53.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 75/155
73
Le
troubadour,
le
grammairien
et la
«
ley
»
L'activité
du
grammairien
rolonge
elle
du troudabour.
e
propos
de Raimon
Vidal de
Besalú
(début
du
XIIIe
s.)
se
veut
résolument
pédagogique
ses
Razos
de
trobaront
pour
but de
faire
connaître
e
«
corpus
troubadouresque,
quais
trobadors
n
mielz
trobat
t
mielz
ensenhat
et
«la dreicha
maniera
de
trobar
(18).
Le troubadour
détient
un savoir
sur le
«
trobar
et la
«
parladura
qui
lui donne
corpsque le grammairiene propose
de recueillir
t de
divulguer.
a
créationd'un concourspoétiquepar les septmainteneurs u «Consis
tori del
Gay
Saber
»
de Toulouse
en 1323
n'a
d'autre
fonction
ue
de
faire
venir de
«
diversas
partidas
de
la terra
d'Oc
»
«
mant
trobador
am lor
dictatz
(
Les
Leys
ď
Amors,
éd.
Anglade,
,
p.
13)
et
d'en
recueillir
e savoir
afin
de
préparer
es
«
leys
de
la
«
Gay
Scienza
».
Dans tous
ces
traités,
a maîtrise
du
troubadour
ur
la
langue
n'est
affirmée
ue
pour
être
aussitôt
démentie,
ue jusqu'au
point
où
l'on
dévoile
a faille
qui
la
mine
«
veses
molt dels
trobadors
faillir
per
no
saber en llurs
trobar
»,
dit Jofre
e Foix à
(fin
XIIIe
s.) (19).
Sujet
à
l'erreur,
ujet
de
l'erreur,
e
troubadour
oit
céder
le
pas
au
gram-
mairien, ésormaisdétenteur e toutle savoir sur la langue en tant
que
sa
pratique
a faitexister
n dehors
de ses
incarnations
ittéraires.
Objet
étudiable,
a
«
parladura
naît de
la décision
du
grammairien
qui, supposant
ne
«
droiture
appelée
à
faillir ans
toute
performance,
la rend
autonome,
rréductible
ux
«
cansos
»
et aux
«
sirv
ntes
où
elle
prend
orps.
L'arbitraire e
cette
«
droiture
(«
la
dreicha
maniera
de trobar
)
fonde a
«
ley
permettant
'épurer
a
«
parladura
utilisée
dans
les
pièces.
La
«
fina
parladura
,
tout comme
la
«
fin'
mor
»
produite
par
l'affinage
«
Amors
à
partir
de
l'obscénité,
'identifie
à
la
«
ley
,
au
titre
de ce
qui
se
déduit
des
poèmes,
à
un
«
objet
»
sans
consistance,
dreyt
nien
,
ou
«
objet
»
d'un
«
amor de
lonh
.
La
«parladura « fina , tout comme 1' « amor de lonh de Jaufré
Rudel
(20)
est
l'objet
d'un
désir,
e
produit
d'une
tension,
'un
travail
qui,
l'identifiant
la
«
ley
,
en fait
un
pur jeu
formel,
ne
combina-
toire.
La
«
fina
parladura
incarnerait
a dimension
ymbolique
de
la
langue.
Le concours
poétique
instauré
par
les mainteneurs
e
Toulouse
connut,
ous
dit e
prologue
de
la version
ourte
des
Leys,
un
immense
succès.
Les
nouveaux
poètes,
se
mettant
l'école
des
«
antics
troba-
dors
»,
produisirent
antde
pièces
que
les
juges
eurent
es
plus grandes
difficultés
départager
es
concurrents.
'impossible
réapparaît
ici
18.
Razos
de
Trobar,
d. J.H.
Marshall,
p.
cit.,p.
2.
19.
Regles
de
Trobar,
d.
J.H.
Marshall,
p.
cit.,
p.
56.
20.
Cr.
Lanquan
U
jorn
son
ione en
may.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 76/155
74
sous
la forme
'un
impossible juger
une
textualité
ui,
passant pour
être 'héritière irectede celle
attribuable ux
«
antics trobadors
,
la
métaphorise
t
incarne un
«
sobreplus
. Dans sa
profusion
t son
renouveau
narchique,
a
production roubadouresque eprésente
'im-
possibilité
e
discriminere
«
bon
»
du
«
mauvais
,
le
«
poétique
du
«
non
poétique
,
e
«
grammatical
de
1'
«
a-grammatical
.
Le
prologue
désigne
dans
l'exubérance
roubadouresque
n
impossible
structurer.
La
langue
des
«
antics
trobadors
supporte
donc le non
structuré,
e
non
réflexif,
e
«
sobreplus
de la
langue,
ce
qui jouit
de sa
propre
proliférationans l'exercice d'une poésie sans théorie et en attente
d'ime
«
ley
,
de
l'édification
'une
grammaire
e la
langue
du
«
trobar
fixantdans
une taximonie
a
part
de
discernable.
Voici ce
que
dit
G.
Molinier
«
aquestas
leys
d'amors fam
per
so
que
ayssi
hom
puesca
trobat
plenierement
ompilât
e
ajustai
tos
so
que
denan era
escampat
e
dispaers
(Gatien-Arnoult,
,
p.
2)
«
nous avons fait
ces lois
d'amour afin
que
chacun
puisse
trouver
entièrement
éuni
et
rangé
avec
ordre
ce
qui auparavant
était
épars
et disséminé .
Les Leysmettent n terme la dispersion,tructurenta diversité t
rendent
isible
ce
que
l'exubérance
le
«
sobreplus
)
et
le morcelle-
mentrendait
mystérieux
«
Et encaras
per
autra razo
per
so
quel
sabers
de trobar o
qual
avian
tengut
escost
i
antic trobador
t
aquo
meteyst
uen
havian
paužat
escuramen
puesca
hom
ayssi
trobar claramen
(lb.)
«
Nous
avons
encore
eu
une autre
raison c'est
afin
que
cette
science
de
"trouver",
que
les
antiques
troubadours uraient tenu
cachée,
ou
qu'ils
n'auraient traitée
qu'obscurément, uisse
être
clairement
onnue
de tous
».
Les Leysdéfinissentes conditions e lisibilité es troubadourspartant,
elles
ménagent
ans
la
langue
a
place
d'un
métalangage
«
Quar
ayssi
poyra
hom
trobar
mots
enssenhamens,
motas
doc-
trinas as
quais
degus
dels anticz
trobadorsnon
han
pauzadas
»
(Ib.)
«
Aussi
l'on
pourra
voir
bien des
règles
et
bien
des doctrines
ui
n'ont
été
posées par
aucun des
anciens troubadours .
Prospectives,
es
«
leys
informeront
a
pratique
à
venirdu
«
trobar
,
rétrospectives,
lles rendrontisible ce
qui
a
déjà
été
«
trouvé
;
elles
visent
structurer,
e bout
en
bout,
e
champ
du
«
trobar
,
à ordonner
et à contenir e « sobreplus .
Le même souci de mise à
distance
de
l'impossible,
e
conjuration
de ce
que
nous avons
appelé
le
«
réel
,
œuvre dans la définition e
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 77/155
75
la
«
parîadura
et dans la délimitation
éopolitique
de la
«
lenga
d'Oc ».
A Vidal commence
ar
définira
«
parîadura
naturals
ni drecha
del nostre
ingagne
en circonscrivant
ne
aire très
large
(elle
inclut
la
«
Franza
»)
baptisée
«
lemozi
:
«
Totz hom
que
vol
trobarni
entendre eu
primierament
aber
qe
neguna parîadura
non es
naturals
ni
drecha del
nostre
lingage,
mais acella
de Franza et de Lemosi et de
Proenza et
d'Alvergna
et
de Caersin. er
qe
ieu vos die
qe, qant
ieu
parlarai
de
«
Lemosy
,
que
totas
estas terras ntendas t totas lor vezinas et totas celias
que son entreellas» (op. cit.,p. 4)
«Tout
homme
ui
veut "trouver" et
comprendre
oit tout d'abord
savoir
qu'aucune
langue
n'est
plus
naturelle et
correcte
pour
"trouver"
que
celle
de
France,
de
Limousin,
de
Provence,
d'Au-
vergne
et de
Quercy.
C'est
pourquoi,
e
vous dis
que
quand
je
parlerai
de
«
Limousin
,
il
conviendra 'entendre outesces
terres,
leurs
voisineset
celles
qui
sont entreelles.
»
Terme
générique,
e mot
«
lemozi
rassemble il
homogénéise
t
gomme
les
failles
géo-linguistiques
la
«
parîadura
doit
former n
tout.
Le
«
lemozi
désigne
moins une
langue
que
le
lieu
où
fleurit
a
poésie
dans
laquelle
s'incarne a
«
parîadura
;
cette
région
poétique
se divise
en
micro-aires
orrespondant
ux différents
enres poétiques«
parîadura
francesca
al
mais et
(es)
plus
avinenz a
far
romanz
e
pasturellas,
mas cella de Lemosinval mais
per
far
ver e cansons
et serventes
(op.
cit.,
p.
6)
«
la
langue
française
st
meilleure
t
plus apte
à faire des romans
et des
pastourelles,
e
«
limousin
à faire des
chansons
et des
sirventes .
Le
«
lemozi
se définit ontre a
«
parîadura
francesca
,
dans
le
jeu
d'une différence.
G. Molinier
pécifie
ussi
la
«
îenga
d'Oc
»
en fonction
des terri-
toiresoù elle est
parlée
« Los autres han en lor arrest
Nostras LEYS
ques
Oc
oz
O
dizon,
Cum
so
per
so
que
mi
els s'avizo
Li
Peyragosc
.lh
Caerci
Velays,
Alvernha,
emozi,
Rozergue,
otves,Gavalda,
Agenes,
Albeges,
holza
Yssamens son
de nostra mers
Carcasses,Narbona,
Bezer
E
tug
cil
que
son
lor sosmes
E
Montpeslier
t...
(Anglade,
I,
p.
178-79).
«
Les autres ont en leur
jugement u'appartiennent
nos
lois
les
contrées ui disent Oc" ou "O", comme on s'en aperçoitmieux
avec
le
Périgord,
e
Quercy,
e
Velais,
l'Auvergne,
e
Limousin,
e
Rouergue,
e
Lodevois,
e
Gevaudan,
'Agenais, 'Albigeois,
e Tou-
lousain.Sont
aussi de notre oi
Carcassonne,Narbonne,
éziers et
tout
ce
qui
leur
appartient,
e
même
Montpellier
t...
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 78/155
76
Cette délimitation e
la
«
lenga
d'Oc
»
s'effectue
râce
à
un double
retranchement,
ui
porte
en
premier
ieu
sur les marchesorientales
les terres
l'est du Rhône
Provence
t
Dauphiné)
ne sont
pas
nommées,
et
sur la marcheméridionale
la
Catalogne
st exclue en
second
ieu
à l'intérieurmême
du domaine
par
le
rejet
du
gascon
défini omme
«
lentgaje
estranhs
(21)
«
Et
appeļam lentgatge
stranh
francés,
ngles,
espanhol,
gaseo
lombart,
avares,
ragonés
granre
'autres
(Anglade,
II,
p.
164).
«
Nous
appelons angues étrangères
e
français, 'anglais,
'espagnol,
le gascon, le lombart, e navarrais, 'aragonais,et une grande
quantité
d'autres
.
G.
Molinier
relègue
dans les
marges
de
la
«
lenga
d'Oc
»,
le
«
réel
»,
le
«
sobreplus
,
en
l'enfermant ans la
catégorie
de 1'
«
estranh
.
Circonscrit,
pprivoisé,
'
«
estranh n'entrave
lus
l'activité
du
gram-
mairien
la
«
ley
qui,
jusqu'alors,
a fonctionné omme
pur pouvoir
de
discrimination,
ourra prendre
a
«
parladura
dans
le
filet
ymbo-
lique
tissé
par
le
déploiement
e ses
paradigmes.
La
«
parladura
,
comme
«
Amors
,
est enfin
«
fina
,
pure,
sans
faille,
à
l'abri d'une
faillitemesurable l'aune de la sexualité.Tout de
la
«
parladura
et
ď «Amors pourradonc se dire,puisqu'elless'avèrent ans au-delà,sans «
sobreplus
résistant la
symbolisation.
a «
parladura pourra
ainsi
être toute
possédée,
comme cette
«
dita nobla
poderoza
e
vertuoza
Dona trobar
(Anglade,
,
p.
9),
grâce
aux
«
leys
qui
l'édictent.Posséder toute
la
langue grâce
aux
«
leys
pour
oublier
que
la
«
domna
,
ou
«
Amors
,
ne
peut
l'être
toute,
telle serait
la
visée du désir
du
grammairien.
La lettre et
le
tout de la
langue
Circonscrite ans ses limitesgéographiques t administratives,a
«
lenga
d'Oc
»
peut passer pour
le
«
tout
de la
langue.
L'instrument
d'approche
de ce
«
tout
sera la lettre.Pour
G.
Molinier,
l n'est
de
langue
qu'écrite.
Les
Leys
ignorent
a distinction
u
signifiant
t
du
signifié.
haque partie
du discours
st définie imultanément
n termes
phonétiques,morphologiques
t
sémantiques.
Ainsi le
«
son
»
intéres-
sant G. Molinier
ignifie
t
peut
s'écrire
«
ses
votzno
pot
hom
forma
araula
e entendem e
votz
significativa
ques puesca
escriure
(Gatien-Arnoult,
,
p.
10).
«
sans
un
son,
on ne
peut
former
e
parole
et
nous entendons
ar
là
son qui signifiet puisse s'écrire .
21. Cf.
R.
LAFONT,
Les
"Leys
'Amors"
t
la
mutation
e la conscience
occidentale
,
Revuedes
langues
omanes,
ontpellier,
976,
.
13-59.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 79/155
77
La lettre
se définira lors
comme
part
indivisibledu son
pouvant
s'écrire
«
Letra votz es no devisabla
E
per
escriure onvenabla
Letra
per
miels esser
exposta
Es menor
part
de votz
composta
(Gatien-Arnoult,
,
p.
12)
«
La
lettre st un
son non
divisible,
ui
peut
s'écrire.La lettre st
encore
mieuxdéfinie
insi la moindre
artie
d'un
son
composé
.
Son
lien au
sens
apparaît
lorsque,
prise
dans la série des
nombres
(«
u
»,
«
dos
»,
«
tres
),
«
u
»
signifie
'unité. Matrice de
la
langue,
a
lettre
noue en
elle la
parole,
'écriture
t le
sens,
et
organise
a série
des
nombres.
Aussi n'est-il
as
surprenant
ue
la lettre
ègle
a norma-
lité
grammaticale,
ue
son
parcours
définisse
e
«
barbarisme
,
le lieu
où
commence
1'
«
estranh
,
l'impossible,
n
l'espèce
du
non-gramma-
tical.
G.
Molinier e
définit n
ces termes
«
Barbarismes se
fay
regularmen
n
quatre
manieras
per
mer-
manen,
per ajustamen,
er
mudamen,
er transportamen
e
letra,
de sillaba o de tempse d'accen (Gatien-Arnoult,V, p. 4)
«
Le
barbarisme a
lieu
ordinairement e
quatre
manières
par
adjonction,
par
suppression,
ar
mutation,
ar
transposition
e
lettre,
e
syllabe
ou
d'accent .
Ainsi,
ar
adjonction
de lettre
«
vertuos
engendrera
vertudos
,
par
suppression
colombier
produira
colomier
,
par
mutation
e lettre
«
Catarina
donnera
Catalina et
par
transposition
n aura
«
cramba
pour
«
cambra
(Ib.,
p.
9).
Le mouvement
narchique
de
la
lettre éins-
talle
l'impossible
u
cœur de la
langue
cadré
par
une
structure
ont
les
pôles
sont
«
mermamen
,
«
ajustamen
,
«
mudamen
et
«
trans-
portamen
,
il
délimite
cependant
en
creux ce
qui
appartient
la
langue et ce qui doit lui demeurer estranh . Etendu au syntagme,
le
mouvement
narchique
de la
lettre
ngendre
e
solécisme
«
Quar
barbarismes s vicis
ques
fay
es
dictio e
solecismes es
vicis
ques
fay
en
oratio.Et en
ayssi
barbarismes e
fay
en
respieg
de
sengles
dictios e
soloecismes
n
respieg
de
motas
dictios mal
pauzadas
en
oratio»
(Gatien-Arnoult,
V,
p.
6).
«
Car le
barbarisme st un
vice de
mot,
et
le
solécisme
un
vice de
discours.
Ainsi
e
barbarisme lieu
par
rapport
à
un
seul
mot,
et le
solécisme
par
rapport
plusieurs
mots
qui
sont
mal
placés
dans le
discours .
La normalité rammaticale,a « ley de la « lengad'Oc» et ď «Amor ,
dépend
donc
du
bon
réglage
du
mouvement t
de la
place
de la
lettre
tous les
niveaux du
discours.La
position
de la
lettre
permet
de dire ce
qu'est
la
«
ley
et
d'enfermer
ans
une
combinatoire
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 80/155
78
l'impossible
ui
y
contredit.
a
lettre,
n
tant
qu'épure
du
«
tout de
la
langue,
permet
de maîtriser
e
«
sobreplus
en
le soumettant
ux
règles
d'une combinatoire.
L'hégémonie
e
la
lettre 'étend
au
domaine
de
1'
«
inventio
poé-
tique qu'elle
règle
uivant
une
logique
serrée,
ue
seul décrit e livre
V
de la version
ongue
des
Leys.
Dans
le
prologue
du
premier
ivre,
G.
Molinier,
vant de donner
une
définition
énérale
du
«
trobar
(«
Trobar es
far
noels dictais
en romans
fis
be
compassai
, I,
p.
6
;
« Trouver 'est faire une nouvellecomposition,n romanpur et bien
mesuré
),
distingue
eux
manièresde
«
trouver
:
par
hasard
(«
per
aventura
)
et
par
effort
«
per
bona cura
»,
Ib.
p.
9).
Le
premier
mode
de
«
trobar
repose
sur
la
rencontre,
ur le
surgissement
nopiné
la
rencontre
moureuse,
ou l'éclosion
de
la
jouissance,
en livrerait
a
structure.
l
paraît
désigner
1'
«
inventio
troubadouresque
radition-
nelle,
celle
d'un
comte
de Poitiers
par
exemple, ui
«
trouva un vers
en dormant
sur le dos de son
cheval
(«
qu'enans fo
trobatz
en
durmen/sus
n
chivau
)
(22).
Cheval
qui
n'est
pas
sans
faire
penser
aux
juments-femmes
es
pièces déjà
évoquées.
Ce
n'est
pas
celui
qui
intéresse
G.
Molinier,
ans
la mesure où rien ne
peut
s'en dire faute
d'une « ley qui le cadre.Par contre,e secondmode de « trobar est
l'objet
d'un
long
développement
ans
la
seconde
partie
du
livre V.
G.
Molinier a
inventorier
es
moyens
de faire
surgir
une
«
canso
»
ou
un
«
vers
de
rien,
non
pas
un
«
vers
qui
ait la substance
du
«
rien
,
comme
elui
du comtede Poitiers
hantant
e
«
dreyt
nien
(cf.
«
Farai
un vers de
drey
nien),
mais un
«
vers
qui,
grâce
à des
règles
précises,
se
détache
du
silence,
éclose
sur
fond
d'impossible.
remière
âche
chercher
quatre
espèces
de rimes
(«
hom deu
primieramen
ercar
quatre
manierasde rimes
,
Gatien-Arnoult,,
p.
377).
La
rime
s'avère
soumise
au
régime
de
la lettredans
la mesure
où elle constitue
me
certaine suite
de
syllabes
(«Rim
es
certz
nombres
de
sillabasi, II,
p. 140) et la syllabe le son de plusieurslettres (« Sillaba votz es
lettres
, ,
p.
146).
La
«
trouvaille
des
rimes
a
donc
s'organiser partir
des
lettres
de
l'alphabet
le besoin de
rimes en
«
aris
»
conduira à
inventorier
ous les mots
en
«
aris
»
commençant
ar
«a»
(«
adver-
saris
»...),
puis
tous
ceux
commençant ar
«
b
»
(«
breviaris
)
et ainsi
de suite.
L'ignorance
omplète
du
lexique peut
être
compenséepar
la
généralisation
u
procédé.
Ainsi
pour
trouver
es rimes en
«
ori
»,
on
ajoutera
d'abord
a lettre
a
»,
mais
«
aori
»
ne
signifiant
ien,
n inter-
calera
alors
la lettre
«
b
»,
«
arbori
ne
signifiant
oujours
rien,
la
lettre
c
»
remplacera
e
«
b
»
pour produire
e mot
«
acori
»
qui
a un
sens. Les rimes
«
trouvées, il ne resteraplus qu'à compléter
e
qui
22.
Cf.
Farai
un vers
de
dreyt
ien,
. 5-6.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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79
précède
dans
le
vers en
respectant
es
«
leys
de
l'accentuation,
e la
grammaire,
e la
rhétorique
t de la
bienséance. Le
poème
devient
alors
une
expansion
de la lettre.Ce
formalisme
igoureux
oumet
a
poésie
à une
combinatoire
ui
la
transforme n
«
tout .
Il
combat
à la fois
a
«
trouvaille
surgie
nopinément
omme
a
jouissance
et le
silence,
es
impossibles
dire. Soumettre
'
«
invento
»
poétique
à
la
logique
formelle
e
la
lettre 'inscrit ien
dans le cadre
de ce
renfor-
cement
ymbolique
ui
vise à colmater
dans la
langue
e
«
sobreplus
qui peut
difficilement'être dans la
sexualité.
L'amour voué à la
langue
par
le
grammairien
médiéval
produit
la
fictiond'une
langue
sans
«
sobreplus
remémorant
'indépassable
faille sexuelle
qui
laisse l'hommeet la
femme u seuil
d'une
union
totale.Prise dans les
rêts des
«
leys qui
édictent,
a
langue peut
ainsi
s'offrir
l'amour comme
objet
de
substitution,
ais
d'un
«
amor
de
lonh
,
dont la
perfection
era
pâlir
l'aura
de
la
«
domna et
tiendra
éloigné
de
l'amourhumainet de
ses
imperfections.
CAHIERS
DE LA
CINEMATHEQUE
Numéro
42-43
LE
MOYEN
AGE
AU CINÉMA
•
Une
imagerie
et
des
structures
mentales
•
L'Histoire
imaginaire
• Cinéma et littérature
•
Cinéma
et
chevalerie
•
Une vision
du
monde
•
L'héroîc
fantasy
et les
mythes
médiévaux
Pour
tous
renseignements
INSTITUT JEAN
VIGO
«
Les
Cahiers de
la
Cinémathèque
»
Palais des Congrès66000PERPIGNAN
Tél.
16
(68)
34
13
13
poste
333
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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François
JACQUESSON
DARÈS,
VOYAGEUR
DU
TEMPS
ou
:
Comment
revint
le
roman
Position
du
problème
Le
statut
des
romans
à
l'antique
au
XIIe
s.
Le
roman
français
commence avec
les
intrigues
ombinées des
œuvres
n
vers
de
la fin
du XIIe
siècle. Dans cette
genèse,
es
romans
«
à
l'antique
jouent
un
rôle
critique,
puisque
c'est
grâce
au
décor
antique
que
va
se
former
a
distance
nécessaire
une lecture
qui
soit
à la
fois
passionnée
et non
engagée
romanesque.
Le
narrateur, ui,
va trouver ans l'immense épertoire es histoires réco-romainesne
variété de
personnages
t de
thèmes
qui
en
disent
ong
sur sa
nou-
velle
liberté
à
l'égard
des
pressions
contemporaines
pour
lui
aussi,
c'est
une
évasion.
Mais dans un
cas comme
dans
'autre,
ette
uverture u
romanesque
manifeste
ne
transformation
es habitudes u
des
nécessités ntellec-
tuelles
si
l'épopée
assure la
cohésion
d'un
groupe
social,
comme elle
le
faisait
depuis
Gilgamesh
d'une
façon
quasi
sacrale,
le
roman
sort
du
clan et
suggère
entre
ecteurs
des
connivences
ifférentes.
'héri-
tage épique
s'y
marque
encore
dans le fait
que
souvent ces
conni-
vences
sont
sentimentales il
en va
ainsi
de
nos
jours quand
un film
ou un livreforme, cause de ses « qualités dramatiques, une sou-
riante ou
tendre
confraternité
mais
ce
genre
de
drames
«
roma-
nesques
,
s'il
convoque
un
instant
es
frayeurs,
es
charges
de
mystère
pour
les
laisser
partir
ils
sont
nos boucs
émissaires,
nous
donnent
pour
un
soir l'illusion
de
la
grandeur,
t
passent
prestement
u
pathé-
tique
à
l'oubli.
Nous
ne
gardons
ientôt
ue
le souvenir
'avoir
éprouvé
cette
grandeur
Aristote ût-il té
surpris
Aussi le
sentiment
emble-t-il
tre
l'effort
ontinué
par
quoi
la
religio
qu'entretient
'épopée,
se
transforme n
une
socialité
plus
abstraite,
ù
prêtres
t rites
s'absorbent
dans le
courant
variable
des
métaphores.l est indubitable ue le roman a joué un rôle essentiel
dans l'éveil
et
la
subtilité
roissante es
individus il
le
joue
toujours.
On
y
voit
vivre
'autre en
soi. L'acte de la
lecture,
vant
même
qu'il
fût
silencieux,
tait un acte
majeur
d'intériorité.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 83/155
81
Dans
l'épopée,
l'autre
reste l'autre.
Même si l'on
en
porte
le
prénom,
n
n'est
pas
Roland,
en tout
cas
pas
celui
qui
vainquit
sa
mort
à
Roncevaux
on est
plutôt
le
«
furioso .
L'enfant
mime
les
gestes
du
héros,
son
masque,
et il
envie ses
armes,
comme
déjà
Perceval
e
faisait.Mais le
héros
de
l'épopée,
ustement,
e fait
rien
de
toutcela :
il
est
simplement
e
héros.
Que
Perceval
désire
'héroïsme,
montre
éjà
tout ce
qui
le
sépare
de
l'épopée.
Le roman
qui
porte
son
nom
indique
très
bien,
dans la
différence
ntre
ui
et
Galaad,
ce
qui
était
en
jeu.
Le caractère
«
appris
de
Perceval e
disqualifie
uand
il
s'agitd'entrer e plain-pied ans le mythe. n ce sens l'épos précède
le
roman,
non
pas
tant
chronologiquementquoique
bien
sûr cet
aspect
ait son
importance
nos
yeux)
qu'ontologiquement.
e
même
qu'aux
yeux
de Saint-Preux l
y
eut une
Nature,
d'ailleurs encore
présente.
Donc
le roman a besoin d'un
arrière-plan.
e
«
décor
dont
nous
parlions peut
bien être
hasardeux,
l
n'est
pas
artificiel,
u
contraire.
Que
les romans
l'antique
des années 1160
nous
semblent
eu
archéo-
logiques
ou,
comme
n dit
un
peu
vite,
rès
peu
«
vrais
,
démontre
ue
c'était
moins
une
filiation tudiée entre
Rome
et leur
siècle,
qui
semblaitnécessaire, i une stratigraphieontinue,u'unefiliation abu-leuse avant
l'Amérique
u Tahiti, 'AncienMondefut e
premier
des
NouveauxMondes.
Grâce à
la
distance fabuleuse
qui
les
séparait
de
l'Antiquité,
os
romanciersdu XII* siècle
purent opérer
la
rupture
d'avec
l'épopée,
qu'elle
fût celle
du
clan,
de la
région,
u
de
l'empire,
t ils
apprirent
à
substituer,
ans
des
intrigues
e
complexité
roissante,
e
vertige
de la
profondeur
ndividuelle
l'enivrement e la
gloire.
Il
faudra
attendre e
XVII*
siècle,
au roman
comme au
théâtre,
our que
cette
thématique
trouve
une
formulation
éellement
nouvelle
Don
Qui-
chotte ou le Cid en sont
le
débat. Le
point
de
départ,
t
comme
le
terraind'expérience e cette littérature omanesque, st le romanà
l'antique.
l fallut à
peu près
une
vingtaine
'années
pour qu'on
ose
passer
du
prestige
de
l'antique, qui
servit
de
tremplin,
ux
espaces
fictifs e
la matièrede
Bretagne.
Ce
passage
était
celui
de
l'histoire
à
la
légende,
t
correspondit
un
accroissement
écisif de
l'audace
de
la fiction. l est certain
que
ces
romanciers
'avaient
pas
idée
de
ce
que
nous
appelons
'histoire
nous
allons
reparler
e
cette
question),
mais
il
est
certain ussi
qu'ils
faisaient
a
différencevec
la
légende
une
fois
la
matière
antique quittée,
ls
n'y
revinrent
lus.
Le
pas
était fait.
Ainsi es
quatre
romans à
l'antique
que
nous
connaissons
urtout,
le roman de Troie,Eneas le roman de Thèbes et les versionscom-
plexes
du roman d'Alexandre
ont-ilsun rôle
très
particulier
dans
notrehistoire
ulturelle. ls furent
es
quatre
temps
complexes
d'une
révolution
rofonde
dans l'ordre des
sensibilités,
ls
furent
es
expé-
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 84/155
82
riences ittéraires ù le
goût
de
l'intrigue,
t
sa
valeur,
'emportaient
sur la
valeur de la force
t du
droit,
t même
sur
la
noblesse,
ui
est
le
droit
de la
valeur.Enfin l
y
eut
à
plus long
termeune
conséquence
étonnante.
Dans
l'épopée,
comme
dans
le droit
archaïque,
tout réclame sa
compensation
des
morts
de
part
et
d'autre,
parce
que
le
combat est
la
forme
a
plus
intense
de
l'échange,
a
plus
haute. Roland retarde
de
sonner,
t
admet
le
massacre de ses
compagnons, roupe
contre
troupe,parce qu'il
sait
que
ces
pyramides
de
sacrifices
éciproquess'unissent n un seul monument,ue sa mort finalementouronne
mais
il
sonne,
t ce
son attirera
Charlemagne
u
pied
de ce monument
pour qu'il
ait un
sens,
et
qu'au
delà
de lui la
mort
du
corps
de Roland
s'équilibre
dans le
supplice
de Ganelon.Ce
retard
est le
génie
de
la
Geste,
comme le
retard de
la
parousie
est le sens
génial
du monde
chrétien.
Mais dans l'univers
roman,
e Dernier Jour avait
un
sens
concret,
t la
grandeCompensation
urait lieu.
Dans l'univers
ui prend
forme n
cette
finde XIIe
siècle,
comme
après
qu'un
décalage
minime
d'un
objet
fortuit ans
le
kaléidoscope
change
a
géométrie
e la
vision,
e
délai de la
compensation
u
le
retardgagné ur la mort hangenta dimension la qualiténouvellede
la
fictionntensifie
a
vérité
du
réel,
mais
en
déroute
e coût la mort
sublimen'est
plus
tant une
mort
retardée
qu'une
mort
maginée
on
parle
de
trésors,
'horizons ù
la
vie n'est
pas
comme
ci Alexandre
alla
plus
loin
que
ce
qui s'appelle
loin Enée
vécut
des
temps qu'on
ne
pouvait
classer
-
à
tel
point
que
Dante choisit
Virgile
pour
guide,
faute
d'oser e
situer
dans
l'espace
des Cercles.
La
guerre
de
Troie,
où
convergèrent
ous les
temps
de
l'Antiquité éroïque,
utune
assemblée
où
l'événement
épasse
le héros
dans la mémoire
elle
dépasse
d'autant
l'économie
de la
rédemption.
a fiction non seulement e caractère
d'irréalité
quoi
on
la
réduit,
mais
enseigne
une
théologieparticu-
lière en elle, 'esprit pprendà prendre n compte 'irréel t l'infini.
On va si loin
qu'on
n'en revient
plus.
Un roman est
un
voyage
dont
on
ne revient
lus.
Un romanest
un
voyage
dont on ne revient
amais.
Le
coup
de
pistolet
de
Werther,
ix
siècles
plus
tard,
nscrira
oncrète-
ment
mais
fera retomber
ans
le drame
le
roman
populaire
naît de
là)
cette
évidence
usque
là sentie.
Alors a mort
se
métamorphosera
de
nouveau.
Situation
romanesque
de
Darès
Sur les quatreromans à l'antique, rois sontfaitsd'aprèsnature
l'auteur
de 1Eneas
avait sous
les
yeux
l'Enéide,
e
roman de Thèbes
est
une
transposition
e la Thébaide
de Stace les romans
d'Alexandre,
dont
'histoire
st
plus
complexe,
eposent
ussi
sur des œuvres
nté-
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83
grales,
inon
ntègres.
e roman de
Troie,
de
Benoît
de
Sainte-Maure,
est
toutdifférent.es
24000
premiers
ers
reposent
ur les
vingtpages
d'un texte
atin,
vraisemblablement
raduit
du
grec,
et
qu'une
préface
attribuée Cornelius
Nepos
(sous
forme 'une ettre
Salluste)
attribue
à son tour à
Darès de
Phrygie,
uerrier
ommé
par
Homère dans
le
camp
troyen.
epos
(ou
l'imitateur
ui
en tient
ieu)
dit avoir
retrouvé
par
hasard le
manuscrit
rec
en fouillant
ans une
librairied'Athènes.
Un
tel
goût
de la
supercherie
ittéraire conviendrait
plusieurs
époques
de
l'histoire
omaine,
t nous verrons
u'il
y
a
mieux
à
faire
que se perdre n conjectures.
Le
plus
intéressant,
'est
la dilatation hurissante u
texte,
ans son
«
utilisation
par
Benoît.
A vrai
dire,
beaucoup
de choses sont éton-
nantes
dans cettecourtehistoire atine si Benoît
y
a
eu
recours,
'est
qu'il
tenait
là
la
source essentielle ur
la
guerre
de
Troie,
et
cette
source
était,
elon la
préface
atine
nterprétée ar
lui,
bien meilleure
qu'Homère, qui
ne chanta les faits
que
longtemps
près
eux. Darès
était
un
vivant témoin.
Aussi naïve
qu'en
soit
la
formulation,
'idée
n'est
pas
si fausse l'étude des
cycles
épiques grecs
montre
qu'en
effet xistaitun
montage
ncyclopédique
ont les
Byzantins
nous ont
conservé es
résumés
chématiques, ui
couvrait 'ensemble
u
matériel
historico-légendairerec. Ce montage mythographiqueaisait défaut
précisément our
es
épisodes
traitésdans l'Iliade
et
l'Odyssée,
omme
si le
prestige
es œuvresd'Homère avait déclassé les
épisodes
corres-
pondants
des
«
poèmes
cycliques
. Glorifier arès contre
Homère,
comme e fait
e
pseudo-Nepos,
'est
revaloriser
'entreprise
ncyclopé-
dique
aux
dépens
des
prétentions oétiques.
Bien
sûr,
glorifier
arès contre
Homère,
à
l'aube du siècle des
encyclopédies,
omme
e fait Benoît de
Sainte-Maure,
'est
prendre
un
brillant
pari
sur les
temps.
Que
ce
pari
ait été
gagné
alors,
et
que
l'œuvre e
Benoît,
utre on
grand
uccès
auprès
des
lecteurs
t
traduc-
teurs, it pu êtremenée à bienmalgré a longueur,montre a situation
exceptionnelle
u texte ource est-il
un
vestige
des
anciennes
parties
perdues
du
Cycle grec,
-t-il
té effectivementetrouvé
ar
l'historien
abréviateur ornelius
Nepos,
ou
même un Romain
qui
sut mettre n
valeur ces
vingt
pages
? Voilà des
questions qui préoccupent epuis
fort
ongtemps
es
spécialistesd'Antiquité.
Mais
en
fait,
e texte
en
question
est si
court,
t dans un
latin
si
rudimentaire,
u'il
offre
eu
de
prise
à
l'analyse grammaticale
t aux
procédés
ordinaires
e datation
tylistique.
n lui dénie
régulièrement
toute
valeur
ittéraire,
vec le même zèle
qu'on
a
pour
s'étonner
ar
contraste
e sa
singulière
osition
historique.
e
livretde Darès
«
Sur
la chutede Troie De excidioTroiae, échappe à l'analysecomme il
échappe
au
temps.
Né on ne sait
comment,
mais
paré
encore
aujour-
d'hui
de
l'aura du
témoignage
rchaïque,
omme un témoin
balbutiant
et maladroit
es
temps
révolus,
l a
secrètementraversé e
temps
pour
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 86/155
84
éclater oudain en
pleine
umière omme a
source fondamentale 'un
des
premiers
omans
de notre
histoire
uropéenne.
Même la
préface,
elle-même
rophétiquement
omanesque,
u
pseudo-Nepos
ouche
uste
ce
texteretrouvé
ar
hasard
semble
n'avoir
pas
d'histoire.
t en
effet,
s'il nous
revient ommeun
texte
ntérieur
Homère,
equel
est comme
la
conquête
de l'écriture
ar
la
Grèce,
l nous faut
admettre,
urcroît
de
paradoxe,
ue
nous avons
là un
texte
préhistorique.
Nous verrons
u'il permet
ne sorte
d'étiologie omparée
e
l'histoire
et du roman.
Physiologie
de la résurrection
En
vérité,
ous avons des traces de
l'existence u
De
excidio
Troiae
avant Benoît. Darès
est cité
par
un
compilateur grec, Antipater
d'Acanhos
dans
un
fragment
ité
par
Ptolémée
Hephestion,
ui-même
conservé
par
Photius,147a26)
et son
résumé
est utilisé
par
la
chro-
nique
de
Frédégaire
du
VII*
s.
(édictée
par
Gaston
Paris,
dans
Romania III, 1874, . 138-144,uis dans Script,rerumMerov.,
t.
II,
Hanovre, 888,
oir
annexe).
Notre Darès
commence
par
raconter 'histoire
es
Argonautes
ui,
dans
leur routevers
a
Colchide,
bordent
n
Troade
et
sont
repoussés
par
le roi Laomédon
injure que
Hercule
ne
tolère
pas
: il
revient
ar
la suite
mettreTroie à
sac et
emporte
Hésione;
Priam reconstruit
Troie et envoie
deux ambassades
successives
pour
réclamerHésione
la
seconde,
conduite
par
Alexandre-Paris,
evient avec
Hélène;
la
Guerre
e déclenche.
arès
poursuit
on récit
notons
u
passage
qu'il
ignore
ou
néglige
'épisode
du
cheval de
Troie)
jusqu'à
la
prise
de la
ville,
uivie
des
funérailles
'Achille.
enoît,pour poursuivre
on récit
par les retoursdes héros,utilisaalors un autretexte, lus consistant,
attribué
elui-là
Dictys
de Crète selon
un schéma
similaire
celui
de Darès.
Toute
l'efficace u
récit de Darès tient
la
façon
dont
il
organise
la succession
des événements.
'est
parce
qu'il parvient
donner a
forme
a
plus
compréhensive
la série a mieux
rganique
d'événements
qu'il
a
pu
ainsi,
de
même
qu'une
graine
oncentre ous forme codée
»
la
plante
antérieure
pour
rejaillir plus
tard,
à
la
fois
«
voyager
à
travers
e
temps
et
ressurgir
ussi
puissamment.
e texte de Darès
tire
sa
puissance
de sa
syntaxe
curieusement
udimentaire,
omme
nous verrons commesi à une époque avancée de l'histoire u latin
(puisque
c'est
le
résumé
en latin
que
nous
connaissons)
a
résorption
dans
une
phraséologie
rchaïsante
ngageait
une
façon
de
repliement,
une
intériorisation
u
propos
et
une
paradoxale
subtilisation ormelle.
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85
Naturellement,
es
implications historiques
de ce
processus
sont
considérables
si,
en
des
moments
péciaux
d'une
tradition
ulturelle,
la
poursuite
d'une élaboration
prend
une
forme de
contraction,
e
sectorisation rchaïsante
e
la
syntaxe
ppliquée
à une
imagerie égen-
daire élevée
au
rang
de
témoignage,
'est dire
que
la
tradition
e
prépare
à
quel
degré
de
conscience ou
plutôt
comment e trans-
forme 'idée mêmede conscience
ans ce cas
?)
une
sortede
nymphose,
une
léthargie
ou,
pour
conserver
'image botanique,
une dormance.
Comme on
sait,
beaucoup
de
la
civilisation omaine
ntique
s'assimile
à un suicide,à une disparition onsentie,dont l'évolutiondu style
littéraire ans le latin
chrétien
opulaire
est une
des formes.
Que
ce
suicide ait des
aspects
de
léthargie
alculée
transformea
perspective.
Ce
qu'il
faut examinerdans
cette
perspective,
'est
«
comment n
en
est venu là
»,
comment
e
produisit
t s'effectua
e
pseudo-Darès.
Une
première
version
de
l'enquête
mène
dans
la
littérature
recque,
une
seconde,
en
précisant
es
analogies
entre e
processus
antique
et
le
médiéval,
«
remonte vers le XIIe
s. et forme a
perspective
n
question
en
décrivant a
résorption
u
temps
«
entre
temps
.
Techniques
:
Homère
et les
mythographes
Les histoires
de Troie connaissent ne
dispersion
upérieure
dans
ce
que
les
Grecs et les Gréco-romains
nt raconté
des
causes de
la
Guerre.Ce
propos
conduit faire 'histoire
de l'Histoire.
Pour le Priam
d'Homère,
e sont
les dieux
qui
sont cause de la
Guerre.Au chant III
de
l'Iliade,
qui
ouvre une chance de
règlement
du conflit
ar
le
combat
ingulier
t solennel
de Ménélas et d'Alexandre-
Paris,
Priam
disculpe
Hélène
«
Pour
moi,
tu
n'es en rien
responsable
pour
moi
plutôt
es dieux sont
responsables»
v. 164).
Et
de
fait,
es
dieuxdétournente combatsingulier, phrodite érobe Paris et force
Hélène
à le
rejoindre,
andis
que
Héra marchande
vec Zeus le sort
de
Troie.
Le
même thème e trouve
mûri
au chant
VII,
quand
Hector
défie es
Grecs
et
que
le
sort
désigne Ajax,
fils de
Télamon,
pour
le
combattre la
nuit survient ans
qu'ils
aient
pu
se
vaincre,
t
Nestor
en
profite our proposer
une
trêve,
u'on
utilise
pour
construire n
mur dont Poséidon e montre
aloux
c'est lui
qui
bâtit autrefois
our
Laomédon e
rempart.
eus le
rassure
et en
profite
son tour
pour
interdire ux dieux d'intervenirésormais.Pendant e
temps,
des nefs
venues
de Lemnos
-
où Jason
autrefois,
n route
pour
la
Colchide,
laissa un
fils
apportent
u
vin
aux
Grecs.
Le défi d'Hectoraura une issue différée ans son combat ultime
contre
Patrocle
qui
entraîne e
sort d'Achille
en
même
temps que
l'effondrement
irtuelde
Troie. Le
jeu
des retards
thématiques
hez
Homèreest
indissociable
u retarddes dieux leur
responsabilité
eur
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86
pèse,
ils
en
éprouvent
a
gravité
cette
«
humanité des dieux homé-
riques,
si souvent
moquée,
est
un
ressort essentiel
de l'œuvre.
La
technique
de
composition
e l'Iliade est dans
l'organisation
es inter-
ventions
réciproques
d'un
monde
dans
l'autre,
deux mondes aux
passions
similaires,
t
pourtant
trangers.
'est
pourquoi
e
point
de
départ
en est
le
mot
mênin
«
colère,
passion
de
l'esprit
,
qui
donne
la
tonalité e l'œuvre et non
pas
le
jugement
e
Paris.
Homère
évite ou détourne 'effet inéaire des causes
elles sont
pour
lui
autant
verticales,
des dieux aux hommes et
inversement,
qu'horizontales, vénementielleshez les dieux ou les hommes le
poème
est leur tissu.
On
trouvedans l'Iliade
beaucoup
d'éléments
ui
deviendront éterminants
ans le récit de
Darès,
La
chute
de Troie
si l'Iliade
ne
cite
pas
cette histoire
d'Hercule maltraité ors de son
passage
avec
es
Argonautes,
t revenumettre sac
la
cité
de
Laomédon,
pour emporter
Hésione comme
un
contrepoint
'Hélène,
elle
n'ignore
pas
Laomédon
ni
ses
rapports
vec Hercule.
Au
contraire,
'est là
un
des
arrière-plans
ui
jouent
un rôle
important
ans l'histoire trois
facettes n sont
évoquées.
D'abord ce
mur
que
Poséidon
construisit,
puis
Hercule cherchant es
chevaux de
Laomédon,
enfin e
rempart
qu'Athéna ida
les
Troyens
construire
our protéger
Hercule
contre
un monstreamphibie.Les efforts es mythographes,ont le plus
complet
st
Kerenyi, our
organiser
ne seule histoire
vec des
frag-
ments
qui
se chevauchent
t
s'excluent,
emblent
gnorer
comment
précisément
es
mythographies
aissentainsi
par bouturage
t
varia-
tions
si Hercule est
un doublet de
Poséidon,
l est difficile e
les
inclure dans
une
histoire
unique.
Hésione n'est
pas
un cheval dire
qu'elle
est une forme
du thème du cheval aide
à
comprendre
es
histoires,
on
pas
à
raconter
ette histoire
cf.
tableau
I).
Du
point
de vue
d'Homère,
ui
n'a à
craindre
de
personne
n
fait
de
composition
hématique,
ette
confusion
es
plans apparus
à des
endroitsdistincts u poème joue un rôle déterminant ans l'impres-
sion
de
décor
volumique
d'où
l'intrigue
entrale
e détacheet
acquiert
un relief
propre.
A la
limite,
l est
utile
que
ces
arrière-plans
oient
contradictoires,
on seulement
arce
qu'un
beau désordre
st un effet
de
l'art,
mais
afin
que
ces facettes restent
des
facettes,
t ne se
constituent
as
en
système
e causes
contraignantes
ui
paralyseraient
le libre
eu
des dieux et
des hommes.
Pour
le
mythographe
ncyclopédiste,
'imbrication es récits
n'est
réductible
un récit
unifié
que
si des thèmes
superposés par
leur
genèse,
t distincts
nsuite
par l'agglomération
e faits
qu'ils
concen-
trent
utour
d'eux,
omme Poséidon
et Hercule avec
chacun eur
mur,
sont considéréscomme successifs.Et même c'est l'inversequi est
encore
plus
vrai la
mythographie
oit
ustement
on ordonnancement
des faits
ce
qu'elle
transforme
n successivité
arrative ne
superpo-
sition
«
généalogique
:
ce
qui
est
homologue
devient
argument
de
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 89/155
87
liaison. La
superposition
aradigmatique
st
«
traduite
syntagmati-
quement
d'abord Poséidon a été
trompépar
Laomédon,
puis
il
s'est
fâché et
a
envoyé
e monstre
ui
«
explique
l'intervention
'Hercule
à
qui
l'on
promet
n
récompense
es chevaux
soustraits Poséidon et
(dédoublement
raduit
n
coordination)
Hésione
lequel
Héraclès sera
à son tour
trompé.
Critique
la
mythologie
vue
par
Euripide
Ce
dédoublement
hématique,
ar
reflet,
st le
principe
même de la
prolifération
mythographique.
l
rend
compte
de l'extraordinaire
richessede
textes
égendaires,
e la
logique
embalée
du
conteur.Ainsi
avons-nous aris
dédoublé en
Alexandre,
on ambassade
préfacéepar
celle
d'Anténor,
es
errancesde
Ménélas
(dans
l'Odyssée
dédoublant
celles
d'Ulysse,
t Circé
sur l'île d'Aia
dédoublée
par
la Médée de Jason
sur
Aiaia,
sans
parler
du
rapport
entre
la
délivranced'Hésione
par
Hercule et
celle
d'Andromède
ar
Persée,
du
doublage
d'Hercule
par
Télamon
dans
l'assaut
contre
Troie,
etc. On trouverade ces doubles
fonds
d'autant
plus qu'on
en cherchera.
Euripidea magistralementcrasé cettetechniquemaniaque en en
démontrant
e
fonctionnement
ans son Hélène celle
de Troie
n'était
qu'un
double,
un
fantasme,
a
véritable
était
en
Egypte,
terre des
mages
elle
attendait
ue
les dieux se
lassent de
jouer,
et
qu'on
lui
rende
son
Ménélas. La
combina oire
mythographique,
n
aplatissant
les
superpositions
on
pourrait
ire
plus
flatteusementen
inventant
a
successivité),
détruit cette
position
de
partenaires
la
fois intou-
chables
et
contemporains u'avaient
les dieux réduits à l'état
de
cause,
eursdébats
t tâtonnements
'arbitrage
eviennent
ncompréhen-
sibles
et
gratuits.
es
querelles
des
dieux,
essentielles
hez
Homère,
deviennent candaleuses dès que ceux-cideviennent es initiateursrigoureuxt univoquesdes actions humaines.Ce
parcours
théologique
de
réduction ausale
qui
est décisif
dans
la
genèse
de
l'intellectualité
antique,puis
de
la
nôtre,
peut
être
parfaitement
uivi à travers es
grandstragiquesgrecs.
l
aboutit chez
Euripide
à mettre n
évidence
l'absurdité e la
prédiction,
orollaired'un
pessimisme
pieux.
Il
n'est
pas
étonnant
ue
ce soit
précisément
ar Euripide que
nous connais-
sions le mieux le thème du
Jugement
e
Paris,
qui
fait
apparaître
crûment
a
causalité linéaire divine au
début
sont les
dieux,
et ils
jouent.
Dans son
chapitre
sur
Dictys
de Crète
(Homer,
the
origin
&
the
transmissionOxford1924,rééd. 1969, h. VII) T.W. Allen concluait
que
Dictys,
qui
devait
être
l'écrivain
crétois
Anténor,
ransmet a
version
raditionnelle
e
la
Guerre t du
retourdes
héros
jusqu'à
la
mort
d'Ulysse,
ersion
omparable
celle des
anciens
cycles
épiques
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88
qu'Homère
au
contraire
remodelé ette
matière
sa
façon
dans ses
deux
poèmes.
Qu'en
somme
a
«
préface
disait
vrai
en
ce
qui
concerne
l'antériorité
e
Dictys
sur
Homère. Le
même raisonnement
'appli-
querait
à Darès.
Mais
le défautde ce tableau
est
qu'il n'y
a
pas
de
vérité
des
Cycles
épiques,
ni
d'authenticitén
un sens
recevable.
es travauxde
Severyns
(Le
cycle
épique
dans l'école
d'Aristarque, iège,
1928)
t
de ses
élèves,
ou de G.L.
Huxley
Greek
pic poetry,
aber, 1969)
mettent n
évidence
la
difficultée ramener
ous ces thèmes
t variations
une
«
matière
grecque unifiée, 'est-à-dire une Histoire.Mieux encore,ou pire
nous
avons vu comment
e
processus mythographique
uppose
un
trucage,
ù les
épisodes
se dédoublent
our
s'enchaîner.
ès
lors,
la
simplicité
e
mythographe
u'Allen
prêtait Dictys,
st une
simplicité
truquée
elle fournit
ne concaténation
lausible
d'événements
arce
qu'elle
en omet
d'autres,
omme
nous le
verrons ans le
détail.
Homère
paraît
stylistiquement
ostérieur
u fait
que
nous
pouvons
percevoir
la
logique
de ses choix
en étudiant
a
composition
e son
œuvre,
andis
que
nous ne
percevons as
les raisons
de
Dictys
ou de
Darès,
qui
nous
paraissent
n
conséquence
plus
naïvement
onstruits,
onc
plus
vrais
parce que moins artistes, t donc plus fidèles une véritétoujours
supposée
antérieure.
Si nous
apercevons,
n
examinant
e
processus mythographique,
comme
déjà
Strabon
'avait entrevu
n
rapprochant
ia de
Aiaia,
que
s'il
est
moins artiste
l
n'en est
pas plus
vrai
et même
qu'à
l'inverse,
comme
'a montré
uripide,
l
est
la
production bligée
du
faux,
lors
il
n'y
a
pas
d'antériorité
tylistique
ui
tienne
le conte est
de tous
les
âges,
Darès s'enfuit
nouveau
hors
du
temps.
Toujours
de nouveau es
doublages
n reflet
ntraînent,
ar
réduction
de
la
similitude
hématique
un
«
point
commun
,
l'induction
équen-
tielle
de la
mythographie.
u
superposable
paradigme
sortent
es
syntagmes uccessifs l'un et l'autre s'ouvrent t se ferment omme
des
ciseaux.
Quand
Lacan utilisa
pour
sa
description
e
l'inconscient
les axes
en
croix
de
Jakobson eux-mêmes
aits
paradigmes
,
avait-il
lu Homère
Développement
de
l'historiographie
Corollaire
de
la
critique
de la
mythographie,
'élabore
l'historio-
graphie.
Quand
les versions
roliférantes
eviennent
ontradictoires,
t
les contradictions
idicules,
e souci
est de
ramener
a
dispersion
du
fantasme l'honnêteté u vrai. Pour l'historiographelacé devant e
pullulement
es
on-dit,
e
moyen
est de
les
comparer,
puis
de
les
réduire,
a fin
est
de les
ramener
une cohérence
les versions
mul-
tiples
deviennent
lors
autant
d'arguments
e
critique
nterne
pour
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89
rétablir e
qui
fut,
d'où la
contradiction st
absente.
Remarquons
ci
qu'entre
'histoire
u'on
ordonne
dans
une
perspective
istorienne
t
celle
qu'on compose
dans une
perspective
omanesque
le
mot
«
his-
toire»
a
encore
en
français
es deux
sens),
la
différence st
moins
d'abordde méthode
ue
d'objet,
omme n
voit
trèsbien chez
Hérodote,
contemporain 'Euripide.
Et
la différenciationltérieure es méthodes
peut
n'être
qu'une conséquence
de la différence es
objets,
ou
de la
prise
de
conscience,
ans
doute liée aux
implications olitiques,
de la
différencees
objets.
Dès
lors,
a
différenciatione
la
«
méthode
histo-
rique» connaît plusieurs stades et avatars. Si l'on en trouveune
première
ormulation
hez
Thucydide,
'est sous une formede vaccin
il
faut
parvenir
dégager
un
acquis
(
ktêma
qui
ait
la soliditédu vrai
dans
la
fluence es
apparences
t
des
forces ù
l'on vit
c'est
pourquoi
cet
acquis
est un
modèle,
un
enseignement our
l'éternité ktêma es
aêi
.
Il en résulte
que
cet
acquis
est
fragmentaire,
ne
île,
comme
la
cité
grecque.
Avec le
développement
e
l'aristotélisme,
t l'alexandri-
nisme,
'enseignement
istoriqueprend
des formes
plus
ambitieuses
l'historiographe
e
peut
plus
considérer eulementdes
fragments
ui
aient eu
un
rôle
décisif,
uisque
le
système
du monde
oblige
à consi-
dérer a variétédes modes
de
décision,
t la
polyvalence
es influences.
En somme, l n'y a alors d'histoire ue totale,puisque la cohérence
n'a
pas
d'autre sens
(nous
retrouverons
u
XIII* siècle
cette coïnci-
dence entre
ristotélisme
t
encyclopédisme).
'où des œuvres comme
celle de Pline
l'Ancien,
'Histoirenaturelle Naturae historiarum ibri
où
le
mot
latinisé historia
tient encore du sens
d'Hérodote,
u
celle
de
Diodore de
Sicile,
a
Bibliothèquehistorique qui
retraçait
'histoire
depuis
les
origines
usque
vers
60 av.
J.C.,
oit
presque
le
temps
de
sa
rédaction.
Le
projet
seul d'une
telle
histoire,
uppose
la
possibilité
pratique
de réduire out
événement
sa
vérité,
t
la
vérité
des événements.
Diodoreprêtedoncune attention articulièreux groupementsvéne-
mentiels,
ui
sont comme a
syntaxe
de sa vérité.
C'est
chez lui
que
nous trouvons 'articulation
omplexe
des trois Gestes
Argonautes-
Hercule-Troie,
ans
l'épisode
de
Laomédon,
rticulation
ui
trouvera
sa forme éfinitivehez Darès.
Le
traitement iodorien
voir
tableau
II)
commence
dans
le
cadre
des
Travaux d'Hercule
(premier
volet,
que
nous
appellerons
A dans
la
suite),
en
IV,
32.
«
Car
partant
avec Jason
vers
la
toison d'or et
ayant
tué
le
monstre,
l
avait été frustré
ar
Laomédon
des chevaux
convenus
n
récompense,
e
quoi
il
sera
question
dans
l'histoire
des
Argonautes
;
la liaison est
simple
ce
passage
avec Jason se
présente
commeun Travail non récompensé,t Herculerevient ur Laomédon
après
l'expédition
e Jason tout comme
plus
tard,
cette
affaire
lle-
même
une fois
réglée,
l
reviendra ur la
récompense
que
lui
doit
Augias
(IV,
50)
le schéma
est
clair,
quoique
ambitieux.
«
Retardé
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alors
par l'expédition
ntreprise
vec
Jason,
et saisissant
plus
tard
un
moment
avorable,
l
marcha contreTroie . Diodore
insère ci une
variation
d'opinions
ur la
flotte
ui
accompagnait
Hercule. Mais
ce
qui
n'est d'abord
qu'une
variation n
passant,
ussi bizarre
qu'elle
soit
(puisqu'il
semblait
clair
que
la flotted'Hercule était
justement
elle
des
Argonautes
Argo)
se révèle ensuite être tout
un
changement
e
programme.
n
effet,
ors de la remised'Hésione à
Télamon
pour prix
de sa
vaillance,
t
du
royaume
e Troie à
Priam
pour prix
de sa neutra-
lité,
l n'est
plus question
des
Argonautes,
eulement 'Hercule.Ensuite
de quoi Diodorepoursuit e récit des travauxdu héros.
L'histoire es
Argonautes
ient nsuite
B),
et est coordonnée omme
prévu
«
Des
Argonautes,
uisque
Héraklès
partit
n
guerre
vec
eux,
il
serait convenablede traiter...
(IV, 40).
Venant
d'Iolkos,
longeant
l'Athos t
Samothrace,
es héros
essuientune
tempête ui
les
pousse
sur
le
mont
Sigée
(IV,
42,
2).
Là,
en
débarquant,
ls trouvent
une
jeune
fille ntravée.
A
ce
point,
nouvelle
rupture
hronologique,
ette
fois
en flash-back
la
demoiselleraconte
qu'à
ce
qu'on
dit
«
Poséidon
s'étaitfâchécontreLaomédon cause
de la construction es murailles
de
Troie et avait
envoyé
e
monstre,
tc. Survient onc
Héraklès
qui
apprend ette histoire cette «péripétie dit le grec) de la bouche de
la
jeune
fille,
a
délie,
et va offrir Laomédon ses servicescontre
e
monstre,
tc. Il
convient
yntaxaménon
dit le
grec
un mot du
même
groupe
que
«
syntaxe
)
avec le
roi
qu'il
prendra
au retour Hésione
et les chevaux.
Au retour
B2:
IV,
49),
passant l'Hellespont,
es voici
en
Troade.
Héraklès envoie
ses
messagersqui,
malgré
'avis isolé de
Priam,
sont
jetés
en
prison,
tc.
La
ville est
prise
d'assaut.
Le
tour
est
joué
: la
prise
de
la ville
s'est déroulée cette
fois au
retourdes
Argonautes.
t le lecteurest
persuadé que
le
retard de
la
« livraison est dû au voyageen Colchide, omme Diodore le suggé-
rait
en A
(IV,
32,
2),
ce retard
qui
justifiait
u'on
ne
parlât
de
cette
affaire
u'avec
l'histoire es
Argonautes
u retourde
qui
s'affirme
a
fraudede Laomédon.
Naturellement,
n
examen
précis
maintient
es
doutes
décrits n
A,
malgré
'adroite
omposition
e B
1
avec
B 2
(aller,
puis
retourdes
Argonautes),
t de
A
avec B entier en
B,
au retour
des
Argonautes,
Héraklès est bien
sûr
accompagné par
eux,
alors
qu'en
A,
si mentiond'eux est faite
en
tête
et
plus
loin
en
raccord
(IV,
40),
il
n'en
est en
pratique pas
question.
Nous
avons
noté
les
scrupules
de Diodore.
De
plus,
en
A il
n'est
question que
de
chevaux,
en
B
surtout 'Hésione
nous
savons à ce
propos
que
Homère connaît
les versionsdivergentesui entraînent ci l'auteur à mettredans la
bouche
d'Hésione,
comme
une note en bas de
page,
le
récit
des
murailles
royennes).
iodore
s'ingénie
donner
ne
version
homogène,
en
signalant
honnêtementes
divergences
omme des
«
variantes
:
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91
énioî
paradédôkasin
«
certains ont
rapporté
de
leur côté
que...
»
(IV,
49,
7).
Sa
méthode
st subtile
parce que,
au lieu
de
passer
sous silence
les
variantesou de les
juxtaposer
en histoires
distinctes,
l
les coor-
donne
en
entretant
a
confusion ur
les
deux
types
d'erreur n
jeu.
Après
voir
été
trompé,
éraklèsreviendra vec
une
flotte
après
avoir
touché
e
Sigée
à
l'aller,
es
Argonautes
e toucheront e
nouveau
au
retour
dans le
premier
as,
il
y
a
fraude,
ans
le
second
le
délai
du
voyage.
Les deux
histoires,
es deux
thèmes,
ne sont conciliables
que
si l'on fait passer adroitementa fraudepour le délai lui-même à
l'aller
on est
trompé,
u retour
on se
venge
-
et le
processus
est
d'autant
plus
convaincant
ue
la
vengeance
est bien un
retour,
un
combat
retardé.
Mais
ce n'est
pas
tout à fait ce
qui
se
passe.
En
B,
la version
a
plus
«
complète
,
la
fraude
n'a
lieu
qu'au
retour,
uand
les
envoyés
d'Héraklès
sont
incarcérés,
t
la
vengeance
st
immédiate. e
rapport
avec le
voyage
ller ne
tient
u'à
la
supposition ue
Laomédon médite
cette fraude
depuis
le
premier
passage,
et c'est cette
supposition
ue
le
dissentiment
ppuyé
de
Priam,
raude ans
une
fraude
qui
deviendra
le délai au-delà du délai le ferment e la secondeGuerre), hercheà
étayer.
Inversement,
i nous isolons la version
A,
où Héraklès
réclame des chevaux
pour
prix
d'un
de ses
Travaux,
on retour vec
une
flotte,
ombreuseou
non,
se fait de
Grèce,
parce que
la force
étonnée
par
la ruse est
allée chercher à-bas du
renfort. utrement
it,
la
collusion des deux
histoires,
iées
thématiquement,
st
opérée par
Diodore non
pas
dans une successivité
mythographique,
ais dans
un subtil
système
de
«
superposition
es
manques
:
les histoires
e
chevauchent ans
l'identité réée du
parcours
d'un
voyage
vec le délai
d'une
vengance.Coupant
n
deux
chaque
histoire ous
prétexte
u'elle
regarde
'autre
«
...il
sera
question
dans l'histoire es
Argonautes...
),
Diodoresuperpose n fait eurcoupemême.La « convention ( yntaxa
menon)
du
retour,
vec
Laomédon,
st bien une
syntaxe.
Pour l'ordonnateur onsciencieux t
érudit,
comme
Diodore,
les
symétries
ui
sont comme l'effet e la
production
proliférante
es
histoires
apparaissent
d'autant
plus
nettement
u'on
cherche à les
relier.
Plus on veut
y
repérer
une linéarité
définitive,
lus
elles
se
cristallisent
éométriquement.
ais
tandis
que pour
les
mythographes
la liaison des
événements
n'est
possible que
dans la
ressemblance
qu'ils produisent,
iodore a à rendre
ompte
du
produit
la continuité
qu'il
ordonne
n'est
plus
une
concaténation
ibre,
mais une
lecture
calculée.Non
plus
des
histoires,
mais une
Histoire
Cette lecture diodorienne nagnorisis n grec ressemble assez à
notremot
«
lecture au
sens
pédant
«
d'interprétation
)
est
une inter-
prétation
véritablement n ce
que
son discours
historique
reconnaît
dans
chaque
histoireune
partie
d'une autre
qui
lui
est
conséquente
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92
elle
lit,
au rebours de
l'induction
mythographique,
omment
haque
histoire
articipe
'une autre et
opère par
cette
homologie ui apparaît
dans la
disposition
nterne e ses
péripéties
u
histoires,
a
cohérence
globale
de
l'Histoire.Pour
lui,
l'homologie
onstatée st
une
conjonc-
tion,
t la
syntaxe
n
est
la
synthèse,
andis
que pour
le
mythographe,
chaque
ressemblance onstatée st
l'argument
'une
disjonction,
t la
production
'une
nouvelle
histoire
n
parataxe.
On
peut
faire
des
observations
imilaires
propos
de
l'histoire es
géométries,u desmathématiques. 'abord l s'agitde lierdes figuresen effet
haque
figure
racée sur le sable est un
arrangement
e traits
comme
toute
autre
figure
toute
figure
oit donc
ressembler
toute
autre au
moins
par
un
point
ou un
trait. l
y
a
là comme
e matériel
de base de la
géométrie,
n train
de se
définir.Mais
quand
il
s'agit
de
bâtir une
science,
comme
Diodore bâtit
une
Histoire,
alors le
parcours
des
figures
possibles
doit
découvrir,
u-delà
des
«
lieux
communs de
ces
parcours,
es
articulations e ces
lieux,
donc la
nécessitéd'un
système
ohérent
ui
épuise
le
possible,
t non
plus
des
recettes
graphiques.
C'est ce
que
montre
parfaitement,
ans toute sa
force
polémique,
a
première
ommunis
ententia
d'Euclide,
premier
tempsde l'alexandrinismeQuae eidem aequalia, et adinvicem unt
aequalia,
soit
à
peu près
«
deux
éléments
dentiques
un
troisième
sont
égaux
entre eux
». Ce fameux
principe
st
exactement
'arrêt de
la
production
mythographique,
ù
deux histoires
ui
ressemblent ime
troisième
ont
précisément
our
cette
raison
différentes
ntre elles.
Diodore
de Sicile
est,
vec Nicolas de Damas
et
Denys
d'Halicarnasse,
un
des
grandspersonnages
e
langue
grecque
de
ce siècle de
Cicéron
où monta le
goût
des
biographies,
es
généalogies,
t
des
histoires
historiennes. ais il
n'est
pas
moins certain
que
son habileté
pour
le
«
digest
,
voire sa
philosophie
du
«
compact
,
préfigurant
oèce et
Cassiodore. Car dès que la diversitéde l'histoire st ramenée à un
parcours,
i
complexe
oit-il,lle est
proche
de ressembler un
bagage,
ce
que
la
Préface
de
Diodore disait
déjà
clairement
«
Un
enseigne-
ment
qui comprend
n une
composition
'un
seul
ensemble
yntaxis
le récit des
faits,
permet
la fois une
lecture
alerte et une
assimi-
lation
facile,
continue t
complète.
l
en
ressort
finalement
ue
cet
enseignement
st
supérieur
ux
autres de même
que
le
tout est
plus
utile
que
la
partie,
t
ce
qui
se tient
plus
utile
que
ce
qui
est
divisé
en
outre,
e
qui
met
au
point
es
temps,plus
utile
que
ce
qui
ignore
dans
quelles
circonstances
n a
agi
».
Darès l'anachronique
Diodore
ne traversaita
première
istoire e
Troie
que
comme
une
étape
de son
parcours,
t
parce
que l'épisode
de
Laomédon ui
faisait
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 95/155
93
une
liaison
historique
ntre
a
geste
d'Hercule t
celle
des
Argonautes.
Pour
Darès,
ces calculs sont une
introduction
xemplaire
u
thème
de
Troie,
qui
est devenu le
symbole
du drame
historique,
omme
en
témoignent
es Carmina
Burana Le thème
des
Argonautes
de
quoi
il
part
est
bientôt courté
Demonstrare os
qui
cum Jasone
profecti
sunt non
nostrum st:
sed
qui
vult eos
cognoscere Argonautas
égat
(«
Faire la
liste de ceux
qui
sont
partis
avec
Jason,
n'est
pas
notre
propos
mais celui
qui
veut es connaître
eut
ire
"Les
Argonautes"
,
ch.
2)
de
même
que
Diodore renvoieén
tois
Argonautaïs
aux
Argo-
nautes alors qu'il parle d'Hercule. l est probable que le renvoi de
Darès
vient,
sinon de la
segmentation
même
que
fait
Diodore,
du
moins un
exposé
des histoires
ui
suit sa
Bibliothèque
Darès
en effet
ne va
pas pas
raconter
'expédition
Diodore,
n
A,
renvoie
B
;
mais
la
raconte
ntre et
B2)
repoussés
du
rivage
de Troie
par
la
méfiance
de
Laomédon,
es
Argonautes
partirent
pour
la
Colchide,
s'empa-
rèrent
de
la
Toison,
revinrent hez eux»
(ch. 3)
et c'est
ensuite,
donc
depuis
la
Grèce,
ue
Hercules
graviter
ulit
rege
Laomedonte
ontu-
meliose
sese
tractatum,
t
eos
qui
una
profecti
rant Colchos
cum
Iasone
«
Hercule
supporta
mal
d'avoir été honteusement
raité
par
le
roi
Laomédon,
ui et
ceux
qui
étaient
partis pour
la
Colchide
avec
Jason . Herculeva à SpartealerterCastoret Pollux, Salaminepour
Télamon,
Phtie
pour
Pélée,
à
Pylos pour
Nestor voilà
manifestement
la
génération
'avant a Guerre
de Troie
il
prépare
douze
navires et
des
soldats.
Quand
tout est
prêt,
l
convoque
es amis
susdits
comme
avait
faitJason
par
lettre)
t
ils
se
transportent
u
Sigée.
Là,
Castor,
Pollux et
Nestorrestent
arder
a
flotte Laomédon fond
sur eux
avec
de la
cavalerie
pendant
e
temps
Hercule
est monté
l'assaut d'Ilion
ce
qu'apprenant,
aomédon
fait
demi-tour,
oit les
Grecs
arriver
sa
rencontre,
t
est tué
par
Hercule. Comme Télamon
était entré le
premier
dans
Ilion,
Hercule
ui
attribueHésione. Le butin
est
chargé
sur les navires,et on s'en va. TelamónHesionam secum convexit,« Télamon emmenaHésione avec lui ».
Priam,
qui
était en
Phrygie,
apprend
tout cela bientôt
t revient Trois
(cf.
tableau
III).
Tel
est le traitement
ue
fait Darès de
notrehistoire.On
remarque
que
toutes es
discordances
ntre ui
et
Diodore
ont trait ux
éléments
qui
prennent
e
l'importance
ans la version
B
de celui-ci la
légende
d'Hésione
et la
trahisonde Priam.
Que
cette
composition
n
A-B
ait
existé
dans
l'archéologie
e
Darès,
cela est
patent,
dans la
mention
non
ustifiée
'Hésione,
dans le
rôle
ex
machina de
Priam,
t dans la
mention
'un
récitdes
Argonautes
ui,
dans
l'idée
de
l'auteur,
ouvait
être
plutôt
ultérieur
u'extérieur.
e
fait
nouveau
qui
en
résulte,
'est
la résorptionn un temps uniquede la conjonction ar quoi Diodore
rassemblait
t
composait
on Histoire.
Pour
bien
des
critiques,
e
De
excidio
Troiae est un
résumé. Le
style
de
ses
phrases,
à vrai
dire,
suggère
fortement ette
hypothèse
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différente
et
implique
e
texte dans un
destin différent.
La
technique
du
De
excidio Troiae
-
et il
faut
bien
lui
en recon-
naître
une
si
Ton
veut
s'expliquer
son
succès
à la fois
secret et
immense
se
comprend
mieux
ous
ce
nouvel
angle.
Constansremar-
quait
encore
ibid.
p.
193,
n.
2)
que
les
subordonnées inales
y
étaient
fort
rares en
effet,
e
simple
ien
du
sujet
à
l'objet,
ou
du
sujet
au
prédicat,
ient ieu
d'orientation
emporelle
l'intention
e
cède à
l'his-
toire
orientée,
t
les
consécutives ont
dans les consécutions. e
temps
comme
dimension
ndépendante
'efface
n
même
temps que
les
struc-
turesdioscoridiennes, ais dans leur élan les archesentre es événe-
ments
et
leurs
vides
disparaissent our
ne laisser
que
le
plein
ou
le
plat
il
en
va de
même
dans l'art
impérial,quand
la
perspective
s'aplatit
dans
les
mosaïques,
les
bas-reliefs,
es
peintures. Après
l'historiographie
ioscoridienne,
'ensemble evient
ontractable
uisque
nulle
variantene
peut plus
interférer
ainsi
Darès est-il
une sorte de
Diodore
voué à
l'hypertélie.
Avec
cette
trange lasticité
late, ui
n'est
ni la
syntaxe
istorienne,
ni
la
parataxe profuse
des
légendes,
mais
glissement
isé des
faits
sur
eux-mêmes ans un
temps
t
une
intention
éduits
l'extension u
discours,
e De
excidio
Troiae,
récit
de
la
fin
d'un
monde,
devenait
immune u temps ui-même. on curieux« archaïsme syntaxiqueui
faisait
un
sauf-conduit
'anachronisme,
t cela en tout
temps
de
la
latinité,
u
de la
grécité
'il
s'en trouveune forme
grecque
similaire.
En
d'autres
termes,
'absorption
du
temps
dans
l'historicité élesco-
pique
de
sa
syntaxe,
ropre
à
la
contraction
voyez
en
annexe les
remarques
ur l'extrait
e la
Chronique
de
Frédégaire)
u à la dilata-
tion,
réalisaitune
sorte
de
machine
voyager
ans le
temps.
C'est cet
aspect
qui
va
maintenant
xiger
notre
ttention.
Darès, le temps, et le roman
L'attribution
e
ce texte
«
panchronique
à un
guerrier
e l'Iliade
témoigne,
u'elle
fût
volontaire u
hasardeusement
ancée,
de l'effet
qu'il
a
pu produire
ur les
contemporains
e l'attribution l'anachro-
nisme radical du
texte,
ussi
calculé
qu'il
nous
paraisse
maintenant,
ne
pouvait manquer
d'être
compris
d'abord comme
«
primitif
;
c'est
d'ailleurs
le
sens lâche du mot
«
anachronique
.
Dans le contexte
culturel
ui procède
des
Lumières,
a
primitivitéupposée
du
texte
e
glissait
vers deux
pôles, l'archaïque
ou le
barbare,
t c'est
en
effet
e
débatqui s'est institué. e texte taitorganisépourfuir a civilisation,c'est son
premier
mouvement.
Un
mouvement
imilaire,
mais
pour
des raisons
différentes,
st
celui du
roman.Avant a
découverte es
premiers
apyrus
ittéraires,
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les
grands
romans
grecs
étaient
presque
unanimement
repoussés
vers les siècles tardifs. 'est
aussi un
papyrus
du IP
siècle
qui
a
fait
reconnaître
'historicité
u texte
de
Dictys,
en même
temps que
la
vérité
artielle
de
la
préfaceromanesque
ui
le
disait traduitdu
grec.
Les
préfaces
du De excidio
Troiae,
la fameuse lettre
de
Nepos
à
Salluste sur sa trouvaillechez un
libraire
d'Athènes,
u celle
des
Ephemeridi
belli
Troiae,
cette histoire d'une tombe
ouverte
par
un
tremblement
e
terre,
ù
l'on
trouvades
tablettes
n vieux
caractères
grecs
(ordinairement
nterprétés
omme
phéniciens),
ans un
coffret,
ont un caractèreromanesque qui a « repoussé aussi les critiques.
Les
plus
honnêtes,
pourtant,
avaient fait
remarquer
que
la Vie
d'Apollonius
e
Tyane signalait
n tel tremblemente
terre,
ustement
sous le
règne
de
Néron et l'exhumation 'un tel texte
n'aurait
pas
été
plus
extraordinaire
ue
le retour
du
Phénix,
dont
parle
Tacite.
On a
reconnu,
uoique
la
langue grecque
alexandrine e
rende
pas,
elle
non
plus,
facile la datation
stylistique
ou
philologique,que
beaucoup
de ces
romans
devaient tre
contemporains
u Haut
Empire.
En même
temps,
'extension e la
recherche
istorique
ux
«
faits
de
civilisation» a montré
que
beaucoup
d'éléments
concrets dans ces
romans,
qui
paraissaient
décor
fantasque,
trouvaient ette
fantaisie
dans le roman, t beaucoupde supportdans la réalité.Nous avons vu
de
notre côté
que
la
possibilité
du
roman,
ses
conditions la fois
mentales t
linguistiques,
ort de la transformatione la
mythographie
en
historiographie,
uisque
cette transformation
orrespond
à la
formation 'ensembles ordonnés
ou,
pour reprendre
e
lexique
de
Diodore,
la formation 'une
syntaxe énérale
du texte
ce
que
nous
appellerions
a
composition.
Au
temps
de
Diodore,
qui
est aussi le
temps
des soucis
archéologiques,
out est
prêt pour
les
romans
composés
Il
est bien connu
qu'un
roman
est
une
mise en
scène
du
temps
on en saisit chez Diodore,au carrefour u Roman et de l'Histoire(dans
l'ambiguïté
du mot «histoire ), la
genèse.
Le romanest une
conjonction
des
temps,
une
composition
et cela
différencie adica-
lement
on
historiographie
e cette successivité
ar
déboîtements
ui
faisait
la
mythographie
es contes. Mais
lorsque,
comme dans le
De excidio
Troiae,
a
composition
insi
acquise
se résume ou
plutôt
se
résorbe
en une
successivité
nouvelle,
e relief du
temps
en est
exprimé,
t
rejeté
en
préface
dans
la
mise
en
scène
archéologique
u
texte
ui-même,
on
plus
dans
son étoffe. e
plus,
le texte
acquiert
en
effet,
ar
cette
résorption éléscopique
'une Histoire ses
formules,
une
«
téléchronie
,
un
au-delàde
ce
tempsqu'il transporte par quoi
il se trouve n deçà du temps.Une composition insi contractée, 'est
une
composition ui
vient de
loin,
et les lecteurs de
«
Darès
»
en
avaient
parfaitement
onscience,
out comme
le vrai
ou faux
Népos
qui
le
découvrit
hez
l'antiquaire
thénien.
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97
Le
plus
intéressant
ans toute
cette
histoire st
que
«
le
système
a
fonctionné
,
que
ce
projectile
ancé
par
contraction
travers
e
temps
en effet raversé n
temps
aussi résorbé
que
lui-même 'était.
La
machine à
voyager
dans le
temps
existe,
et son moteur
est
un
«
moteur
langage
.
De
même
qu'impliquée
dans une
forme
u une
phrase,
e trouve a
qualité
d'oubli
qui
la fera
«
surgir
en un
autre
temps
(«
je
me
rappelle...
),
de
même
la
syntaxe
truquée
de Darès
est
une
machine contraction
ui
résorbe
e
temps,
ngendre
'oubli,
et
se
retrouve au-delà à
déplier
sa
composition
dans la
syntaxe
romanesqued'où elle provient. e dépliantchez Benoît.
Car
il
y
a cette
symétrie
ans
le destin
de
Darès,
que
les conditions
de sa contraction ont inverses de celles de son
épanouissement
contracté à
partir
d'une
historiographie
omanesque,
l
se
déploie
sous
formed'un roman
historiographique.
e sorte
que
nous
pouvons
mieux
apercevoir
le
«
fonctionnement
e
la
machine
,
et mieux
comprendre
es
conditions
d'apparition
du
roman,
en
cette fin de
XII* siècle dont nous étions
partis.
Le De excidio
Troiae n'est
pas
un
simple
résumé,
nous l'avons
vu,
pas plus
que
les bas-reliefs
e
Septime
Sévère ne sont une
projection implifiée
es reliefs
d'Auguste
ou de
Trajan l'aplatissement yntaxique
n'est
pas
un
sous-produit,à peineun produit il est une méthode.Nous avons vu quels stades
successifs 'ont rendue
possible,
et nous
voyons
maintenant ombien
cette méthode
ontient es conditions dès
qu'on
la
déploie,
elle
rend
ce à
partir
de
quoi
elle
a
été
contractée mais cette
symétrie
ui
apparaît
a
posteriori
st
complémentaire
'une
asymétrie ngagée
a
priori
dans
la facturede
Darès cette
réduction
tait
certainement
anti-romanesque,
e voulait
rupture,
e même
que
les Pères de
l'Eglise
grecque
ou latine s'accoutraient
d'une
grammairepasse-partout,
t
d'autant
plus
violemment
u'ils
connaissent
mieux
la belle
langue
du roman.
Ce
passe-partout
ut
efficace,
t
démultiplia
sa
façon
le
rêve romainde l'Empire.
Cette subversion
ar
réduction onservait insi
la
mémoirede ce
contre
uoi
elle se faisait.De sorte
que
la
polémique
de la
Renaissance
contre e
«
Moyen
Age
se voit subvertie
son tour
par
ces renais-
sances
démultipliées
u'une
observation
lus
attentive
econnaîtdans
l'épaisseur
des
moyens
ges
là
encore,
e
temps
est
tuilé. Et si
la
technique
de Darès
se
révèle
opératoire,
'est
que
le
temps
ui-même
n'a
pas l'intégrité
ue
lui
supposse
la
notion
d'époque.
Ces
âges
sont
moyens
utant
qu'ils produisent
es méthodes.
On
pouvait
dans un
premier emps
restituer
ne
«
évolution
,
et
dire
que
les réciteurs u
rédacteurs
d'épopées
ou
de
contes avaient
« peu à peu» atteintune « suffisante habileté dans la manipulation
des
épisodes
successifs
pour
que
»
se
présente
'ambition e
compo-
sitions
plus
vastes.
Qu'en
somme,
forced'exercices vec des
épisodes,
on est
passé
à la
composition
es
péripéties,
t du
conte
au
roman,
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98
ou de l'anecdote l'Histoire.Et donc
que
ce recours u
décor
antique
fournissait,
omme
nous disions
au
début,
'alibi
(au
sens
propre
du
terme l'exostisme voire
'utopie)
d'un terrain
neutre
où
composer
loisir.
Que
cet exercice sur
l'antique,
à son
tour,
«
rendit
possible
les
compositions
ans-filet,
irectement
ans la
fiction,
ue
sont les
romans
arthuriens le roman
ayant
finalement
écouvert
qu'il
pou-
vait créer son
propre
terrain.
Oui,
mais cette
perception
rogressante
u
progressiste
e
l'Histoire
n'est
qu'une image
elle occulte ce fait essentiel
à
l'Histoire
que
le
temps ui-même varie dans les méthodes u récitou de l'intelligence.
L'évolution u
«
peu
à
peu
»
a
l'avantage
de décrire e
rapport
entre
eux
de certains
tades,
de certains
points
nodaux
mais en faisant
des
étapes
sur
un
chemin,
lle isole un
temps
prioriqui
serait comme e
tapis
roulant
dans un seul
sens)
de
cette
évolution
alors
que
juste-
mentces différents
oints
nodaux
varaient
ussi
sur
le
traitement u
temps.
La
démultiplication
'histoires imilaires
ordonne
la
successivité
myhtographique
le
temps
de l'itération
'y
défférencien
répétition
u
en variation. 'est
pour
e
temps
ui-même,
n
temps
de
différenciation.
Ces variantes ont nterrogéesontradictoirementar 'historiographe
qui
les
compose
dans une
syntaxe,
ù le
temps
ui-même
st
composé.
Ainsi
'Histoire,
omme
le
Roman,
sont-ils
e
temps
de la
mémoire,
comme
hez
cet Hercule
qui
se souvint
'une
njure,
u de ce
qu'on
lui
devait.
Résorbédans des
formules
ue
la
composition
mit à
jour,
e
Roman/
Histoire e
métamorphose
n
manuel,
n
«
digest
;
le récit e linéarise
en
un
seul
trajet
nécessaireet
suffisant andis
que
le récit
ui-même,
achrone,
ésorbant e
temps, 'y
confond.
Nous le retrouvons
onc,
télé-
chrone,
ur
la
trajectoire
u
temps.
Le cas de Darès met en évidence ue « l'évolution en question des
traverses,
u
plutôt
des recours.
Ce ne sont
pas
des retours
puisque
nous avonsvu comment
ouent,
pposées
comme
deux faces de
la
même
vitre,
'asymétrie
olémique
et la
symétrie
ranique
de l'effetde la
résorption.
uand
Benoît de Sainte-Maure
éveloppe
es trente
mille
vers
du
Roman
de
Troie,
l
ignore
Diodorede
Sicile,
Héliodore,
t même
le
texte
d'Homère
parler
de
«
renaissance tient
de
l'imposture,
e ce
côté de
la vitre.Mais
de
l'autre,
'énorme ittérature
ui
«
dépend
de
lui
(voyez
Sommer,
History
of
the
Troy
legend,
ou
plus
récemment
M. R. Scherer
The
legends
of
Troy
n
art and
literature, 963),
Guido
delle
Colonne
par
exemple,
u le
Recueildes histoires e Troie de Raoul
LefevredontCaxtontira le premier ivre mprimé nglais,déploieun
volume
mental où
l'on saisira
la
profondeur
u
rapport
à
l'antique,
réhistorisé.
Le
temps
e
joue
dans les
formes
u
langage.
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99
Ánnexe:
Traitement
de l'affaire en contexte
mérovingien
On trouve
dans une série de mss. de la
Chronique
de
Frégédaire,
parmi
ceux
qui
contiennent
es
«
Continuations
,
une Historia Daretis
(ou
Daregitis)
Frigii
De
origine
Francorum.G. Paris
l'a
éditée
d'après
3 mss.
en
1874,
t Krusch dans
les M.H.G.
(
Scrpt
Merov.)
sur
8
mss.,
enprenant ourbase le VaticanusReg.Christ. 13,du X* siècle.Le titre
montre
éjà
qu'il s'agit
d'un
montage énéalogique
ésireux,
partir
de
la
Grèce
fabuleuse,
assant par
la
généalogie
omaine elon
Jérôme,
e
montrer
'antiquité
es
Francs.
Deux
grandes
différences
éparent
ette
chronique
de Darès.
1)
Cette
hronique
u
plutôt
ette
«
histoire
,
qui
part
comme
Darès
de la
légende
des
Argonautes
mais
ignorant peu
près
tout
d'Argo
t
des
moyens
de la
conquête, ue
Darès
ne
lui
indiquait
guère),
ne
cite
Hercule
aucun moment.
lle
sort
ainsi
complètement
e la
volonté
de
synthèse iodorienne.
2)
Sa
syntaxe
st
notablement ifférentee celle
de
Darès,
dont elle
n'est
certes
pas,
là où elle s'en
inspire,
n résumé.Les
phases
y
sont
aussi
longues
ue
le narrateur
ime
'intrigue.
n voici e début.
Eodem
itaque tempore pud
Grecorum
egna, que
instar mare
magnum
irata
vel sita
sunt,
egnum
sic)
primus
t maximus etias
celeber
habebatur
omnesque reges
Grecorum
uasi imperio
ubia
ceníes,
eius Consilio boedientes
erebant
Eratque
ei
proximus
x
fratre
enitus
am
defunctis
uprestis
sic,
pour
superstis)nepusque
illius
regis
ason
nomine,
ir
egregius
tque efficax,
trenuus
uippe
etprocerus, tilisvaldeConsilio,orde et animoferocissimo
En
comparant
vec
le début
de Darès
(
Pelias rex
in
Peloponeso
Asonem
fratrem
abuit Aesonis
filius
erat
Iason,
virtute
praestans),
on
comprend arfaitementourquoipar exemple
e
biographe
e Saint
Didier
VIP
siècle,
textefinVIII* siècle
Ed.
Pompardin,
icard,
1900)
pouvait
rouver
xagérée
on ubertatem
loquii gallici,
t
juger
utile
que
nitorem ermonis
ravitas
omana
temperarei
Il semble
que
sous
ime
orthographe
elâchée,
es beaux
esprits
d'avant
a
gravité
arolingienne
aient
adoré
les
beaux discours.Mieux
encore,
l est
probable
que
l'élan
de
leurs
phrases
(avec
fréquentes
uirlandes
d'appositions,
t
propo-
sitions similairementonstruites traversdes collectionsde complé-
ments
irconstanciels),
n réduisant
e hasard de
la
place
des
mots,
it
été
corollaired'une
dégradation
es
déclinaisons,
vec certaines
bizar-
reries
yntaxiques
ues
précisément
une
sorte
d'emportement
ral
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 102/155
100
Haec
(l'arrivée
de
Jason)
audiens
Laodemon,
pater
Priamo rex
Troianorum,
duenisse navale
evectioneGrecorum xercitum
due-
nisse
sie)
in
terram uam Priamum
egem
f
lium
uum,
um hostile
apparatu
contra eos
perrexit.
De sorte
que
les
complications u'entraînait
a
présence
d'Hercule
étaient
ncompatibles
vec
cette
façon
de
raconter.
epoussé
par
«
Lao-
démon
,
Jason
va
en
Colchide,
pille
le
royaume, rend
la
Toison
et
revient
a
présenter
«
Pélias
»
avec
le
récitde ce
qui
s'est
passé
à
Troie.
In predio regale sororemPriamo rege filia Laodemonisregis,
Hesionam
nomine,
ülchram
nimis,
legantům tque
decoram
valde
repperiunt
psamque captivatam
um
magna
praeda
et
multa
spolia
in
Gretiam
erduxerunt.
Aprèsquoi
Priam
essaie de la
récupérer,
n vain Alexandre
nlève
Hélène à
Cythère,
tc.
Cette
histoire st nettement
evenueun
«
récit
des
temps
mérovin-
giens
. La
contraction
ntense
aractéristique
e
Darès,
qui
parvenait
à conserver nterrelation
des trois
gestes
(Argonautes
Hercule
-
Troie)
exigeait
une
différenciationtricte
des
cas
;
ici,
la linéarisation
de l'histoire
gagné
son
contenu,
a
composition
ernaire
ssue de
Diodore est réduite une causalité binaireArgonautes Troie. Nous
sommes u bord de la
mythographie
t des
montagnes ycliques
de
la
mythologientique.
Tableaux
TABLEAU I :
Technique mythographique
a) Poséidonbâtit e mur Laomédon e trompe Poséidonenvoie
le
monstre
chevaux)
a
-f
b)
Héraklès
bâtit e
mur.
b)
Héraklès
tue le monstre Laomédon
le
trompe
Héraklès
attaque
Troie
(Hésione)
Le
tout
se trouve ous
la forme uivante
Poséidon
bâtit e
mur
chevaux)
Laomédon
e
trompe
Poséidon nvoie e monstre
Hésione
est
exposée
Héraklès tue le monstre chevaux et Hésione) Laomédon le
trompe
Héraklès
ttaque
Troie Télamon
prend
Hésione
Alexandre-Paris
rend
Hélène
2*
Guerrede Troie.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 103/155
101
TABLEAU II
:
L'exposé
de
Diodore
(historiographie
encyclopédique)
Les
2
thèmes combiner
a)
thèmed'Hercule t de Troie
Héraklès vient chercher
es chevaux.
Trompé,
l
revient vec
renforts.
b) thèmede Jason et de Troie.
Jason
passe
à Troie
en allanten Colchide.
Chassé,
l
repasse
au
retour.
Le traitement
A)
Geste d'Hercule.
l
part
contreTroie
car
H. et
J.
passant
à
Troie,
H. tue
un monstre.
. le
«
frustre es
chevaux
convenus
(«
voyez
le
récit des
Argonautes
).
H.
«
retardé
ar
l'expédition puis
«
saississant
un moment
avo-
rable
»,
revient ontreTroie.
Flotte u 6 navires Récitdu doublecombat Oïlée Télamon
(mer)
(terre)
Héraklès
(contre
Laom.)
B)
Geste des
Argonautes
IV, 0),
«
puisque
H.
partit
en
guerre
avec eux».
B1
(IV,
2).
Poussés
vers le
Sigée,
ils
débarquent,
rouvent
Hésione
récit.H.
la
délivre,
ffre
L. de tuer
e
monstre
chevaux
promis.
Hésione ditqu'elle suivra H.H. laisse toutà L.
jusqu'à
son retourde Colchide.
Expédition
ers a Toison.
B2
(IV, 9)
au
retour,
H. envoie
Iphiclès
et
Télamon
chercher e
dépôt.
L.
les
jette
en
prison,malgré
'avis de
Priam
qui
leur
facilite
a fuite.
Evadés,
ls annoncent
la flotte
'attaque
de L.
Combat
H.
tue
L.,
la ville est
prise
par
Télamon,
etc.
«
Certainsdes anciens
poètes rapportent
ue
Troie
fut détruite
«
pour
des chevaux
par
H.
seul,
partit
vec 6 navires et
non
«
avec les
Argonautes.
(IV, 9, )
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 104/155
102
TABLEAU
III :
Schéma des
premières pages
de
«
Darès
»
Pélias,
aloux
de
Jason,
'envoie
uérir
a toison.
Jason,
ue
ses amis ont
assuré
de
leur
soutien,
es
prévient.
L'équipe
s'en
va
sur
l'Argo,
fait escale
au
Sigée,
dont
elle est
chassée
par
L.
L'auteurnote en quelquesmotsque la toisona été prise.
H. a du
ressentiment
ontreL.
Il
s'assure e soutiende ses
amis.
Il les
prévient
tous
s'embarquent
e
Grèce,
vec 12 navires.
Combatdouble
près
de la
flotte,
t diversion ur terre.
.
est
tué.
Pillage.
H.
attribue
Hésione à Télamon. ls
s'en
vont.
Priamrevient
Troie,
u'il
rebâtit. éclameHésione.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 105/155
Marie-Laure LE
BAIL
LE DROIT
ET L'IMAGE
:
SUR UN CAS
D'ESSORILLAGE
Bien
que n'ayant usqu'à
présent
uscité
que peu
d'intérêt
uprès
des
historiens
u
droit,
'iconographie
es chartes
de
coutumes
méridionales
constitue
n
champ
d'étude
prévilégié
our
l'anthropologie
istorique.
Par les
symboles
u'elle
met en
jeu
dans
la
représentation
u
supplice,
par
les
significations
ue
l'on
peut
en extraire
n termes
de confessions
involontaires,
émoin
des réalités
uridiques
«
matérielles
mais aussi
du
regardporté
sur
elles,
elle
apparaît
parfois
plus
révélatrice
ue
le
discours
crit.
L'image
que
nous avons choisie
d'analyser
llustre
'un de
ces
châti-
ments
qu'au
XIXe siècle les
humanistes
ualifièrent
nanimement
e
barbare l'essorillage. 'essorillage anctionnee plussouvent u Moyen
Age
le vol de faible
mportance.
l est attesté
dans les
coutumes
de
l'Agenais
1),
à Marmande
milieu
XIV*
siècle),
à
Gontaud
début
XIVe
siècle),
à Montréal
milieu
XIIIe
siècle),
à Mézin
(début
XIV siècle
vol entre
20 et 60
sous),
dans les
Coutumes
du
Quercy,
Ca arc où
en
1316
un
vagabondn'ayant
plus
d'oreilles
voue
que
l'une
d'elles
a été
coupée
à la suite
d'un vol de 8 deniers
Cahors et
l'autre
pour
le vol
d'une
serpe
dans les
Charentes
2),
mais aussi
dans le
nord
de la
France,
dans le
bailliage
de
Senlis au début
du XVe siècle
(3).
Il semble
donc
que
cette
pratique
ait été
largement
épandue
dans
la
majeure
partiedu pays et
durant 'ensemble
de
la
périodequi
nous intéresse
(XIIIe-XVe
iècles).
L'image
est extraite u
corpus
de
miniatures
ui
enlumine
'un des
manuscrits es
Coutumesde
Toulouse,
e
manuscrit atin
9 187
de la
Bibliothèque
nationale.Ce
manuscrit,
édigé
sur
parchemin
la fin
du
XIIIe
siècle,
mesure
427
mm
de
hauteur sur
270 mm de
large
et
compte
47
feuillets
critsd'un
seul
jet par
une même main
en
grosse
écriture ite
méridionale.
'image
a été exécutée
dans l'un des
espaces
initialement
révus
pour
a
transcription
u commentaire
es coutumes
1.
Paul
OURLIAC
et
Monique
GILLES,
Les
Coutumes e
l'Agenais,
tome .Montpellier,976,01p. tome , Paris,Picard, 981,98p.
2.
L.
D'ALAUZIER,
Causerie ur les Coutumes e Cahors.
Les
péna-
lités
,
Bull.
Soc.
Lot.,
LXXVII, 1956,
.
26-31.
3.
B.
GUENEE,
Tribunauxt
gens
de
justice
dans e
bailliage
e Senlis
à la
fin
du
Moyen
ge
vers 380vers
550),
trasbourg,
963,
87
p.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 106/155
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105
hommes
figurés
ebout
aux
effets
roduitspar
l'écart des
positions
se
conjuguent
eux
causés
par
la
similitude es situations.
Les
doigts
pointés
du
juge,
représenté
a bouche
fermée
t
les
lèvres
serrées,
montrent
vec
autorité,
non
pas
une
chose
visible,
ni
un
objet
existant,
mais
ce
qui
doit être. Le
juge
prescrit
a
norme,
prononce
a
«
règle
mpérative
,
la
«
formule
ui
règle
e sort
,
il dit
le
droit
(4).
Il donne ici l'ordre à ses subordonnés
d'accomplir
une
action dont
on connaît a nature
parce qu'elle
est
déjà
en
voie de
réalisation. e condamné 'est substitué
u
juge
dans
le rôle
de
person-
nage essentiel. Sa positioncentrale dans cette partie de l'image le
désigne
omme
principal rotagoniste,
elui autour
duquel
va se déve-
lopper
l'action. Encadré
d'un côté
par
le
soldat,
de
l'autre
par
le
bourreau,
a
condition
de
prisonnier
e fait aucun
doute.
Prisonnier
dans
l'espace,
l
l'est
aussi réellement son
corps
est
l'objet
d'une
prise
de
possession
mise en
évidence
par
la
pressionopérée par
chacun des
gestes figurés
le
geste
du bourreau dont
la
main droite est
posée
sur
l'épaule
du
condamné,
e
geste
du
soldat
dont le
pied gauche
recouvre
'extrémité u
pied
droit
du
coupable.
Les
effets
onjugués
de ces
deux
relations
gestuelles
onfèrent
u
condamné,
privé
de sa
liberté
d'agir
et
engagé
dans
une
action
dont
il
n'est
pas
le
maître,
un statutd'objet manipulé.
Ce
face à face des
regards
t
des
positions
ntre e
juge
et le
groupe
des trois hommes
fig.
1) (5)
donne à la
scène une
singulière
uto-
nomie.Construite sur
elle-même
,
pause plutôt
que
révolution ans
le
mouvement
énéral
de la
gauche
vers la droite
de
l'image,
elle
suggère
n huis-clos ont 'ouverture ur l'extérieur
aît de la
rupture
qu'instaure
sur le
plan
formel a
représentation
dos
à
dos
»
du
bourreau
et du
trompettiste.
elui-ci,
ont la
proximité
vec la
scène
précédente ignifie
eut-être
e
peu
de
temps qui
sépare
la sentence
de
son exécution
t donc l'immédiateté u
châtiment,
eprésenté
e
profil,es jambes l'une devant 'autre,plus ou moinspliées, le pieden arrièrene
reposant
ue
sur la
pointe,
mime un
déplacement,
elui
que suppose
l'annonce
publique
du
supplice.
L'action
véritable,
ttendue tout au
long
de la
trame
picturale,
n'est
figurée
u'à
l'extrémité roite
de
l'image.
Cette mise
en
fin
de
lecture
n'apparaît stratégique,
e
désigne
le
supplice
comme
épisode
décisif,
ue
si l'on se
place
sur le
plan
de
l'organisation
lastique
de
l'espace (fig.
1).
La
direction
rédominante
de
«
gauche
à droite
,
définissant
e
fil
du
récit,
ecoupe
ci le
jeu
des
4.
E.
BENVENISTE,
Vocabulaire
es
institutions
ndo-européennes
Paris,
Ed. de Minuit, 969,ome ,p. 107-110.5.Relevé inéaire t simplificateurmise en évidence es principales
lignes
e construction
le sens
prédominant
e
lecture
e
gauche
droite,
l'interruption
e ce
mouvement
énéral
figurée
ar
le
changement
e
direction es
regards
t
des
positions
es
pieds, 'élargissement
u
champ
visuel.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 108/155
Figure
1
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 109/155
107
forces
graphiques
«
du
plus
étroit
au
plus
ouvert
.
Le
mouvement
vertical
de la dernière
scène,
figurépar
les fortes dimensions
du
bourreau
dont
e
sommetdu crâne et la
pointe
des
pieds
constituent
les
pôles
d'un
champ
immenseface
auquel
la
petitesse
du condamné
contraste
ingulièrement,ouligne 'ampleur
de
cette ouverture.Aux
effets
roduits
par
cette verticalité
oudaine
s'ajoutent
ceux nés de
la
rupture
de
la trame
horizontale,
aille
qui s'opère
entre les
deux
dernières
séquences
et
que
suture
partiellement
a
présence
d'une
trompette. 'oblique que
matérialise elle-ci
dans
son inclinaison end
compte
de cet
élargissement
u
champ
visuel et
pictural
en faisceau
où le
regard
ne se
fixe
pas
mais
se
déploie.
La distance insi
instaurée,
renvoyant
celle
parcourue
ar
le
trompettiste
omme
u
temps
coulé
entre
'annoncedu
supplice
et son
exécution,
ignifie
urtout
a
néces-
saire mise
à
l'écart du
châtiment,
a
crainte
d'une
contaminationvec
cette
sorte
d'expiation mpurequi
réunit
orps
et
sang.
Nous n'insis-
terons
pas
davantage
sur ce
qui
est
désormais
un
topos
historiogra-
phique,
savoir e
tabou du
sang,
à
la
fois exécré
l'Eglise
n'a-t-elle
as
horreur u
sang
?)
et
vénéré
Cf.
le
sang
du
Christ).
Nous reviendrons
plus
loin
sur
sa
responsabilité
ans la
représentation lutôt
négative
de certainesde nos figures e bourreaux.
L'organisation lastique répond
en définitiveux
exigences
du récit
proposées par l'image,
à savoir la
punition
comme
la
part
la
plus
montrée
u
processus pénal
médiéval.
L'exécutionde la
peine,
reven-
diquée par
le
pouvoir,
st au centre
même
de la
procédure
udiciaire
la
punition,
nstaurée
n
scène,
conclue a narration
t le crime.
L'essorillage
mis en scène
n'apparaît pas
comme le
déploiement
d'une force
rrégulière
u
sauvage
mais
plutôt
comme une
technique.
Celle-ci
répond
à certaines
xigences
formelles u nombre
desquelles,
inévitable
orollaire,
a
souffrance.es
multiples
manifestationse lisent
dans l'exagération
es traitsdu
visage (fig. ) et concernent
ussi bien
le
nez,
busqué,que
le
front,
rop
haut,
ou encore e
menton,
n
galoche,
les
sourcils,
a
bouche,
es
cheveux.
Autant
d'éléments
qui
permettent
d'en
apprécier
l'importance
comme
d'en
souligner 'ambiguïté.
insi
'angle
formé
par
l'orientation
des sourcils à l'extrémité
esquels
se détache a
prunelle
dessine
un
mouvement
scendant
dentique
celui de l'ensembledu
corps, qu'ac-
centue la
ligne
quasiment parallèle
du
front,
imulant
a
colère,
la
douleur,
mais aussi
la volonté e se
soustraire
l'emprise
u bourreau.
(Nous
soulignerons
ans la suite de
l'exposé
l'importance
de cette
attitude).
a bouche
ouverte,
es dents
pparentes,
éritables
igurations
sonores, chèvent e donner u personnage n aspectparticulièrement
redoutable.
La
souffrance ont le bourreau s'est fait
«
l'anatomiste
immédiat
apparaît
alors comme
«
élément onstituant e la
peine
,
jouant
«
au terme
de ce rituel
judiciaire
le rôle
d'une
épreuve
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 110/155
108
Figure Condamnédernièrecène
ultime
(6).
La vérité clate
sur ce
visage
dont
les déformations
en-
voient de
manière
plus
ou moins
explicite
aux anomalies
d'ordre
psychologique,
ocial,
moral dont souffre
e
personnage.
La
position
de
profil
manifeste
ci
plus
que
tout
autre
élément
'identité
de
la
personne
eprésentée.
ne
étude
plus globale
de
l'iconographie
médié-
vale
révèle en effet
u'en
règle
générale
ucun
personnage
de
qualité
n'est ainsi
représenté.
i l'on considère
ue
sur l'ensemble
des
person-
nages
figurés,
rois
d'entreeux
seulement
ont
représentés
e
profil,
qu'au
nombre
de
ces
trois
figurations,
l
faut
soustraire
celle
du
trompettisteont nous avons vu qu'elle était entièrementéterminée
par
le mouvement
e la
marche,
es deux
figures
estantes,
elle du
bourreau
de
la
première
cène,
celle
du condamné
de la
dernière,
apparaissent
omme
des
exceptions.
a valeur
de cette
position
n'est
alors
plus
accidentelle
mais
essentielle,
on
plus
liée à
une
conjoncture
passagère
mais
correspondant
ien à
une altération
profonde
de la
nature.
L'auteur de
la
représentation,
idèle
cette
équation
fondamentale
de
la
pensée
et de
l'imagerie
médiévales n vertu
de
laquelle
l'ordre
figure
e
bien et le
désordre
e
mal,
révèle
ainsi
la nature résolument
négative
du
condamné.
Ses
traits
crispés,
a
dispositionparticulièrede sa chevelure
comparable
celledu coupablede la première cène),
6. M.
FOUCAULT,
urveiller
t
punir
Naissance
de la
prison,
aris,
Gallimard,
975, .
49.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 111/155
109
en désordre
ous forme
de flamèches
aunes
laissant
e
front
dégarni,
référence
mplicite
u feu
de
l'enfer,
e
désignent
omme vecteur
du
mal,
identique
au démon
décrit
par
Raoul
Glaber
(7)
comme aux
possédés
et à tous
ces
personnages
de démesure
si
bien
représentés
dans
la
sculpture
omane
8).
La mise en scène
du
supplice,
ouant
ici
sur la
perméabilité
es
frontières
ntre
deux
mondes,
terrestre t
infernal,
aisse deviner
ce
que
sont ces
peines
de
l'au-delà,
montre
a
gravité
de
ce
qui
se
joue
dans
l'éternité.
u châtiment
errestre
la
punition
divine,
l
n'y
a
qu'un pas.
Si les scènes de suppliceinfernal alquées sur les châti-
ments terrestres
ont
nombreuses,
l n'est
qu'à
se
rappeler
a masse
des
réprouvés
condamnée à
être
bouillie,
enfouie,
ou
pendue,
nous
n'en
avons trouvé
ucune
qui
nous
rappelle
e
supplice
de
l'essorillage.
Peut-être
e
parallélisme
ne
s'établit-il
ue
dans
les cas de
peine
de
mort
seul
le condamné
à
mort serait
obligatoirement
oué
aux
géhennes.
Offrant
chacun le
spectacle
de son
devenir,
e
supplice signifie
ici
l'irrémédiable estinée
du
condamné
ui
crie et se révolte
n vain.
«
Assailli
à la fois
par
les
douleurs
physiques
t
par l'angoisse
devant
le sortqui l'attend,l se trouvedans l'incapacitéde réagirdans le bon
sens
les démons
e
pressent,
es attaches
terrestres
'empêchent
e
se
repentir
(9).
La
culpabilité
ransparaît
ans
cette humanité
pitto-
resque,
cette
prolifération
u
monstrueux,
éritable
nomalie
perçue
comme
présage
qui,
en
violant
l'ordre
naturel des
choses,
souligne
l'infidélité
u
coupable
aux
principes
hrétiens,
a double
irresponsa-
bilité,
devant Dieu
et devant es
hommes.
Le
spectacle
du
supplice,
antichambre
e
la
mort,
uscite
et
entretientci
la
peur
de celui
qui
y
a décelé
a
parodie
du
Jugement
ernier
figuration
uccessivedu
juge,
de
la
trompette,
u
châtiment).
l invite lors à l'examen
de
conscience,
à
penser
la fin
ragique
de l'homme
mort ans
préparation,
réfléchir
sur ce passage périlleuxqu'il n'est permis de franchir u'au prix
d'une
constante
vigilance
de l'âme et du
corps.
Cette
mise
en
image,
dialectique, appelle
'illustration
ue François
Villon fit dans l'un
de
7.
«
Une
espèce
de
çetit
homme orrible
voir...de stature
médiocre
avec
un cou
grêle,
n
visage
macié,
es
yeux
fort
noirs,
e front
ugueux
et
crispé,
.. la bouche
proéminente,
es
cheveux
érissés n broussaille...
(Raoul
GLABER,
es
histoires,
,
1).
8. Nous
pensons
otamment
ux
chapiteaux
e
l'église
de la Madeleine
à
Vézelay
le désespoir
t la luxure
la
figure
u
désespoir
st
représentée
les
cheveux
n forme
e
flammes,
a
bouche
uverte,
es
dents
pparentes
et
la
langue irée),
a
légende
e Saint Benoît
un
démon
rès
semblable
à celui évoquépar Raoul Glaberoffre l'imaginatione Saint Benoît,
brûlant
e
volupté,
a
femme
u'il
a
aimée
dans
sa
jeunesse)]
et de
la
Cathédrale
aint Lazare
à
Autun
La
pendaison
e
Judas].
9.
J.
DELUMEAU,
e
Péché et
la
Peur,
a
culpabilisation
n
Occident,
XIII'-XVIII*
iècles
Paris,
ayard,
983,
.
72.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 112/155
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 113/155
Ill
les traits
de
Tun
s'oppose
à l'animalité
de
l'autre. Ces différences
témoignent
'une double
ambiguïté.
La
première
ient
aux
multiples
ignifications
e
la
souffrance.
i
«
les douleurs
d'ici-bas
peuvent
valoir
comme
pénitencepour alléger
les
châtiments e
l'au-delà
,
elles
peuvent
aussi
figurer
la damna-
tion
imminente et
«
loin
de
gager
une absolution
future
,
signifier
l'irrémédiablebandon
du
coupable
aux
mains des
hommes
11).
Autant
d'aspects,
autant de
réponses
à
ces
«
moments
de
vérité
que
l'on
interroge temps
de
la
sentence,
emps
de
l'exécution,
n
y
décèle
tour à tour 'innocence t le crime, e présent t le futur,'ici-baset
l'éternel.
Chaque
trait du
visage,
chaque
grimace,
e
corps
soumis
ou
le
corps qui
résiste,
tous ces
éléments
acquièrent
valeur
de
signe.
La seconde
ambiguïté
elèvede
l'exemplarité
u
supplice.
La
plura-
lité
d'impressions
roduites,
e
sentiment
'un condamné
«
plus
mau-
vais
que
l'autre
,
renvoient ux
principes
de ce
que
Michel Foucault
appelle
«
la
liturgie unitive
u
supplice
(12).
Le
châtiment
mprime
sa
marque
à
la
victime
c'est son
exécution
ui
la
désigne
de manière
univoque
comme
sujet
négatif.
La cicatrice
nfamante
aissée
sur le
corps
du
coupable souligne
définitivementon altérité.Au mêmetitre ue celui à qui on a apposé
le
fer
rouge,
percé
l'œil ou
brûlé
la
bouche,
'essorillé
devient 'exclu
visible
d'une société
qui
est
avant tout
celle
du
paraître.
Le
supplice
s'écarte
alors
de toute
volonté
réconciliatrice.
quivalent
ci-bas de
la
décomposition
es
corps
au-delà
de la
mort,
l s'en
éloigne
quant
à
la
finalité.
i l'une
vise à
la
réintégration
u
corps
des
élus, l'autre,
paradoxalement
urificateur,
'amorce
aucune
«
résurrection ociale
».
La trace
qu'il
laisse
sur
le
corps
du condamné
s'avère
indélébile
chacun
se souviendra
du
spectacle
de la torture
t de
la
souffrance,
du
pouvoir
démesuré
ui
s'est exercé
sur
le
corps
du
coupable.
L'évi-
dence
du
déséquilibre
une
simple
valuation es
dimensions
e chacun
des protagonistes e cettedernière cène suffisant prouver a dissy-
métrie)
onfirme
a
supériorité
ant
uridique
que
matérielle t
physique
d'un
pouvoir
dont a
légitimité
épend
aussi
de cette
publicité
faiteau
«
fonctionnement
olitique
de
la
pénalité
(13),
aussi
proche
de l'œuvre
de
justice
que
de
l'épreuve
de force.
L'image,
figurant
e
coupable
encadré
d'un soldat
et d'un
bourreau,
rend
compte
de
ce dualisme.
Le
déploiement
e
force
qu'incarnent
es
deux
personnages
émoigne
e
la
pluralité
es
rôles tenus
tout
au
long
de
la
procédure.
a
première
cène s'intéresse
la nature
des
person-
nages
et
à la fonction
ue
l'usage
leur
assigne.
Ainsi le soldat ne
devrait
pas
avoir
à
se
servir
d'une
épée
rangée
dans son fourreau
t
de ce fait seulement arantede l'ordre par contre, e bourreau dont
11.M.
FOUCAULT,v. cit..
d. 50.
12.M.
FOUCAULT,
p.
cit.,
p.
38.
13.M.
FOUCAULT,
p.
cit.,p.
53.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 114/155
112
l'épée
de
justice
brandie
oue
le rôle d'un
attribut,
evra
névitablement
agir.
Cette
double
figuration
e
l'épée
conduit à une
appréciation
différentiellee l'avenir.A
la nature
hypothétique
'une
action dont
la réalisation béit
à tout
un
jeu
de
probabilités,
envoie a certitude
de
l'accomplissement
utur 'une autre.
Cette
première équence
définit
ainsi les
limites déales d'une situation
qu'elle
ne
figure as.
Il
faut
attendre
a
dernièrescène
pour
en
visualiser
es
multiplesaspects.
Cette
partie
de
l'imagereprésente
n
combat,
ertes
gagné
d'avance,
mais dont n'est
pas
tout
à fait exclue la dimensionde lutte. D'un
côté il met un termeà celle que se sont livrés le condamné et le
pouvoir
tout
au
long
de la
procédure
cette clôture est
figurée
ci
par
la mise
en
fin de
lecture,
l'extrémité roite de
l'image,
de la
scène
de l'exécution. 'un autre
côté,
e
supplice
exacerbe
ce moment
de
lutte,
e définit omme
temps
fort
d'une
action
au
déroulement
stéréotypé.
l
n'y
a aucun doute
sur
la
signification
e
l'attitudedu
condamné
représenté
a tête en
arrière)
comparable
à celle
décrite
par
Bernard
d'Angers
ans
les Miraclesde Sainte
Foy
Gerbert
ppose
une
longue
résistance,
e débat
vigoureusement,
gite
vivement a
tête
de côté et d'autre sous
la
pression
des
doigts
de
ses bourreaux
14).
Ce
qui
se
joue
ici
relève
de
l'affrontementl'affrontemente
deux
types
de violence, 'une régléeet légitime, elle de la justice incarnéepar
le
bourreau,
'autre
illégale
et
sauvage,
celle du Mal
incarné
par
le
condamné.
Figure
Bourreau
dernière
cène)
Le couteau
que
tient e bourreau
ans la main
droite,
a main
gauche
étantoccupée à tenir 'oreille,n'est plus perçucomme attributmais
14.A. BOUILLETet
SERVIERES,
Sainte
Foy,vierge
t
Martyre,
odez,
1900,
.
451-453.
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113
comme
moyen,
nstrument
'une action
qui
s'effectue
ous
nos
yeux.
Inversement ce
que
nous
avons constaté
dans
la
première
cène,
c'est ici
l'action,
a
manipulation
echnique,
qui
est
privilégiée
u
détriment
e
l'agent
fig.
).
Les traits
de ce
dernier,
uasiment
nexpressifs,
ontribuent
déper-
sonnaliser
'exercice
d'un
pouvoir
qui
se veut
anonyme.
Les formes
arrondies
du
menton
t
de la tête sont
la
marque
d'une
indifférence,
celle
qui
caractérise
e mouvement
mécanique
de
la main
qui
sectionne.
A la maîtrisedu geste répondcelle de l'expression.
e
bourreau dont
l'impassibilité
contrasteavec le désordre
apparent
du
visage
du
condamné,
pparaît
alors
dans toute
a
légitimité.
on
image ustifie
elle
seule
l'acte
de
justice
celle-ci,
roide et
impersonnelle,
olle
au
personnage,
xécutant
ans
visage.
L'assurance
du bourreau e
lit encore
dans le contraste
u'instaurent
les
positions
des
différentes
arties
du
corps.
Le
profil
de la
moitié
inférieure
éterminé
ar
le sens de
l'action
s'oppose
à
la
position
de
trois-quart
e la moitié
supérieure.
out se
passe
comme
si l'auteur
avait voulu conserver
son
personnage
a
valeur
positive
d'une
posi-
tion
de
trois-quart
éniée
au
coupable
représenté
e
profil.
Celui-ci,
apparemmentmmobile, es jambes parallèles,serréeset droites, e
trouve
pourtant
dans une
position
instable,
comparable
à celle
du
pendu,
a
pointe
des
pieds
tendue,
ne
reposant
nulle
part.
Cette sou-
mission
du
corps
coupable
à la
pesanteur symboliserait
'idée de
chute,
n accord avec
celle de
péché.
Si
de
ce
corps
à
corps,
le
bourreau est
sorti
indemne,
ertaines
images
de notre
corpus
(B.N.
ms.
lat.
9187)
prouvent
u'il
n'en est
pas toujours
insi. L'examen
rapide
de
la
série
de
couples
«
condamné
(1)
-
bourreau
2)
»
que
nous
présentons
fig.
5)
(15)
montre
u'il
fait
parfois
'objet
d'un
désaveu
dentique
celui
qui
touche e
condamné.
Une
étude
comparative
e
chacune des
figurationsui
en sont faites
dans notre
mage
sembleconfirmeretteambiguïté. a seconderepré-
sentation
ont nous avons
remarqué 'expression
mpassible
contraste
en effet
vec
l'impression
e
sévérité
roduite
par
la
première fig.
).
Le nez
busqué,
e menton
marqué,
a lèvre
proéminente,
a bouche
en
retrait,
a
position
de
profil,
roduisent
es
mêmes effets
égatifs
que
ceux mis
en évidence ors
de
l'analyse
des deux
représentations
de
condamné.
Justice
t crime e
côtoient ans
cette
partie
de
l'image
où nous
ne
sommes
pas
sûrs
de
pouvoir
dentifiere
mal aussi claire-
15.
Mise
en évidence e similarités
ans la
représentation
es
visages
des couples«condamné-bourreau(deux premiersouples) t «condamné-
spectateur
(dernier
ouple).
Le
spectateur
t le bourreau ont assimilés.
Le
premier
articipe
u
même itre
ue
le second
l'acte
de
justice.
En
fonction
es critères
éfinis
ans
l'analyse,
es
bourreaux t
le
spectateur
apparaissent
plus
mauvais
que
les condamnés
cf.
visages
marqués,
très
«
découpés
,
de
profil).
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116
De
là,
ces différencesonstatées
dans
la
double
figuration
u
couple
condamné-bourreau
d'un
côté,
le
bourreau
représenté
n état et le
condamné
pitoyable,
e
l'autre
e bourreau
représenté
n
action,
t le
condamné
démoniaque,
hacune de ces
représentations
orrespondant
à un momentde la
procédure udiciaire,
tantôt
'énoncé de la
sen-
tence,
antôt 'exécution
ublique
du châtiment
18).
Nous concluerons
n
insistant ur
la
pluralité
d'aspects
du châti-
ment
mise en évidence
par
cette ecture.
Situé
à la limite du bien et
du
mal,
touchantde
près
au monde
infernal,
e châtimentn'en est
pas
moins une
pratique
juste.
En
punissant
e
coupable,
l
participe
l'ordonnance
u monde terrestre.
Occasion
de désordre le condamnéhurle
-
il
acquiert
sa
légitimité
au sein d'une
image qui,
composée
de scènes
successives,
e châtiment
précédé par
l'énoncé de la
sentence,
st
celle de
la
justice,
donc de
l'ordre.
Ainsi
chaque
scène
a son
importance
aucune n'est
prétexte
ou alibi
plastique.
L'organisation
e
l'image
en
séquences
soudées
les
unes aux
autres
oblige,
tant au niveau
de la
perception u'à
celui de
l'analyse
héorique,
une
compréhensionragmentée.
haque partie
de
l'image
doit être confrontée
un
autre ensemble
qui
voit
ainsi
sa
significatione préciserpar le jeu des correspondancest des oppo-
sitions
19).
Cette
perception
équentielle
e
l'image
renvoie différentes
oncep-
tualisations
du
temps,
parfois
contradictoires.
u
temps
de
l'action,
du
ugement
sentence),
e
l'annonce
t
de
l'exécution,
'oppose
e
temps
de la
réflexion,
elle du
juge,
du
condamné,
u
spectateur,
mais aussi
le
temps
à
venir,
ui
est celui
de la
justice
suprême.
L'image
n'est alors
plus
un
espace
seulement
voqué.
Il
importe
davantage
ue
l'on croie à
sa réalité.Le
juge
est
bien là
devant
nous
et
l'espace
reste à
parcourir,
e nous
à
lui,
de lui à l'exécution
e
la
sentence.
Ce
qui,
semble-t-il,
ntéresse
'auteur,
'est
la véritédu récit
qu'il propose, etterelationfantasmagorique'un supplice aperçu,au
service
de
laquelle
il met toute entière
une
«
intelligente
fficacité
visuelle .
Au besoin d'abuser
les sens
pour
faire vrai s'allie
alors la
simplicité
onventionnelle
u trait. Le dessin
privilégie
a sensibilité
comme
forme e
connaissance,
omme
moyen
de
reconnaissance
e la
culpabilité,
u bien
et
du mal. La
charge
contenue
dans
chacune de
ces
figures
st alors
efficiente
elle n'est
pas
une
simple
indication
mais
l'amorce
de
l'interprétation.
'image prend
clairement
position
par
rapport
u
sujet
représenté.
lle
proclame
'idée de
justice
tout en
18.Si la publicité es audiences st encore ttestée la findu MoyenAge,elle reste toutefoismoins mportanteue celle de l'exécutione la
sentence
laquelle
oute a
population
e
la
juridiction
oit assister.
19.Cette
nécessité
st
parfaitement
émontrée ans
les travauxde
Jacques
t Ariette
AUCHE,
a bataille
u Louvre
u la
leçon
de
peinture
Contribution
l'analyse
e
l'Espace
pictural
Diplôme
HESS,
Toulouse,
983.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 119/155
117
nuançant
es formesde son
exercice.Par
le statut
qu'elle
se
donne,
indépendante
u texte
écrit,
lle
se définit
omme
e
reflet otalement
subjectif
de la réalité.
Le dessin ne résulte
pas
d'un
hasard
mais
bien d'une volonté
de
schématisme ont es
stéréotypes
nt valeur de
signe.
La
simplicité
e
l'image,
on
absence de
cadre,
son
plan unique,
la
proportion
elativement
aible
de
personnages,
n font un
espace
dont
la
rigueur
ejoint
celle
de la
loi.
La
lecture
inéaire de
l'image
se
calque
sur
l'immuabledéroulement
'un
scénario
Cf.
la
systéma-
tique
de
la
procédure
t de
la
pénalité)
stigmatisant
'idée
maîtresse
d'unesouffranceégale,d'unebonnesouffrance,éniant u corpstoute
morbidité,
e
moralisant
omme
'eut
fait
a
règle
de
droit.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 120/155
Chiara FRUGONI
Odile REDON
ACCUSÉ GUIDO RICCIO DE FOGLIANO,
DÉFENDEZ-VOUS
Vous vous
rappelez
ce
chevalier,
ous
le
connaissez
bien.
Appelé
ur
les
pages
des livres
d'histoire
l
répond
militairement
«
Moyen
âge
présent
». Vous savez
qu'un
jour
autrefois
1328,
'est écrit
sous
les
pieds
de son
cheval)
il était arrivé
glorieusement
Sienne,
retour
d'une brillante
xpédition
ans
les arides collines
du Sud.
Depuis
long-
tempsdonc l chevauche n fresque u hautd'unmurdu Palais Public
de
Sienne
sa
photo
est
partout,
vec
pour légende
«
Guido
Riccio
de
Fogliano
à
Montemassi,
ar
Simone
Martini,
328
.
Au
premier lan
au
centre,
Guido
Riccio,
bâton
de commandement
en
main,
profil
uté,
conduit
on cheval vers
la
gauche
de la
fresque.
L'homme
t
la bête ne
font
u'un
-
«
une statue
équestre
(1)
-
vêtus
des mêmes
draperies
ux armes
de
l'homme. a
position
déséquilibrée)
des
pieds
du
cheval a
déjà
éveillé
l'attention;
a statue
risquait
de
tomber.
A
gauche
la forteresse e Montemassi
coiffe
une éminence
rocheuse,
ntourée
d'une
palissade
garnie
de lances dressées
elle se
trouvedevant Guido Riccio mais déplacée en arrière-plan. errière
Guido
Riccio,
ur
le même
plan
que
Montemassi,
ne construction
ui
ressemble
à
une forteresse
erait
la
tour
d'assaut
(«
battifolle
)
construite
ar
les
assiégeants
pour prendre
Montemassi sur sa tour
gauche
flotte
a
Balzana,
la
bannièrede
Sienne,
mi-partie
lanche et
(1)
C'est a définition
onnée ans
Giugurta
OMMASI,
elVHistoriei
Siena,
G.B.
Pulciani,
enise
1625,
ivre
X,
p.
319
«
Gli
fu fattohonorata
sepoltura
San
Domenico,
ssendo
per
prima
tato honorato
ella
Repu-
blica
d'una statua a
cavallo
dipenta
nella Sala
delle Balestrehora
del
Conseglio i manodi SimonMartini ommo ittore e' suoitempi, tanto
amico
del
Petrarca,
he si vede
fin'hoggiopra
l
Mapamondo
on
l'impresa
di
Montemassi
. La
même
expression
statua
equestre
est
reprisepar
Guglielmo
ELLA
VALLE,
Lettere anesi
sopra
e belleArti G.
Salomoni,
Rome
1785,
ome
I,
p.
88 lui-même
e
réfère G.
Tommasi.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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/';-=09 )(8*
=-0/']
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 122/155
120
noire,
l'opposé
a
bannière ux
armes
de Guido
Riccio. Sur la
droite
le
campement
es
armées
siennoises st
établi
pour
l'essentiel
u
pied
des
collines,
l'angle
en bas
à droite
de
la
fresque.
es
tentes
lternent
avec
des
vignes
bien
alignées,
bien
taillées. Au
fond,
e ciel
est d'un
bleu
nocturne.
Aucun
être
vivant
n'anime
cette
scène,
car
l'homme et le cheval
sont une
statue la
forteressen'est
pas
défendue,
es tentes et le
«
battifolle
sont vides.Le
peintre
glacé
l'image étrange
'une
guerre
sans
cadavres, ans ruines t sans plaisir.Mais l'imagenoue un charme,entreces durs paysages,cette
guerre
abstraite,un chevalier
pétrifié,
et
nous,
spectateurs
'un
autre
âge,
confortés
ependantpar
les sécu-
rités de
l'histoire Simone Martini
bien
peint
sur ce
mur,
en
1330,
la
prise
de
Montemassi,
éalisée en l'an du
Seigneur
1328
par
Guido
Riccio de
Fogliano,
apitaine
de
guerrepour
la
république
de Sienne.
Or
les
sécurités ont menacées le
doute,
d'abord
honteux,
explosé
en
1977,
uand
Gordon
Moran,
méricain
t chercheur n histoirede
l'art
a
commencé
contester
'identité ntre a
fresque
offerte nos
yeux
et celle
qui,
le
2
mai
1330,
ut
payée
16 livres
Maître Simone et
qui
représentait
Montemassi t Sassoforte
2).
Et
depuis
1977
Moran
accumule es preuves, énouant es charmes t déchaînant es fureurs.
La
polémique
active la recherche. ur
le même
mur,
au
registre
inférieur,
e
travail des
restaurateursmet
à
jour
en
1980
une
fresque
jusqu'alors
nconnue un
village, ignifié
ssentiellement
ar
son
église
et
un
palais
fortifié,
merge
du
rocher.
A
droitedu
palais
s'appuie
ime
tour
basse
grossièrement
maçonnée
un
arbre est
planté
dedans. Le
village
est
entouréd'une
palissade
de bois dans
laquelle
s'ouvre me
porte.
Devant
cette
porte,
deux
personnages
n
robe
longue,
comme
on la
portait
u
début
du XIVe
siècle,
changent
n
regard
t
des
signes.
L'homme
de
droite
commande
de son
corps
l'entréedu
village
ceint
de l'épée, il la souligneen y appuyant a main gauche.De sa main
droite evée
il
accueille
'autre homme
qui
ne
porte pas
d'armes mais
tient
en
sa main
gauche
des
gants.
Là
s'interrompt
rutalement a
fresque,coupée par
la
surimposition,
n
1529,
du
Saint
Ansano de
Sodoma.
Face
à
cette
scène
«
abrégée
un
nouveau
charme
se
noue,
dans
l'extrême
affinemente la
couleur
et du
dessin,
celui
de
l'inconnu
à
nommer.
t
si l'on
retrouvait
à Guido
Riccio?
(2)
Gordon
MORAN,
An
nvestigation
egarding
he
Equestrian
ortrait
of Guidoriccioa
Fogliano
n the
Siena Palazzo
Pubblico
,
dans
Paragone
333,XXVIII,
1977,
p.
81-88
nous
renvoyons
cet
article
our
a biblio-
graphie
t
les
sources.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 123/155
121
Un
personnage
contesté
On
sait
que
ce
magnificus
miles
appartenait
une noble famille
de
Reggio
Emilia. En
avril 1327 l
fut élu
capitaine
de
guerre
de
la
république
e
Sienne
pour
six mois il
resteradans
cette
charge, égu-
lièrement
éélu,
pendant
ix
ans et demi
(3).
En
ces
années,
gouvernée ar
les
Neuf,
Sienne est sur le versant
guelfe
de
l'Italie,
alliée des
Florentins.
on essentieleffort e
guerre
regarde,
au Sud
et au
Sud-Ouest,
a
Maremme,
sa
«
frontière
,contestée n ses pointsfortspar les seigneurs ocaux que viennent
soutenir
es
tenants
e
l'Empereur
ouis de
Bavière,
es
troupes
de son
puissant
allié
lucquois,
Castruccio
Castracani,
ou les forces
pisanes.
La
puissance
de
Sienne,
ffirméeà sur
le
terrain,
st
renforcée
ymbo-
liquement
par
la
figuration
ur
les
murs
de
son Palais Public des
«
castelli
faits
siennois
déjà
en 1314
Giuncarico
Montemassi et
Sassoforte n
1330,
Arcidosso t
Castel del Piano en 1331
4).
Or
Guido
Riccio
a
dirigé
'offensive
ontre Montemassi
les chro-
niques
et
les
histoires iennoises ui
attribuent
e
mérite
principal
de
la
victoire
emportée,
'est-à-dire e la reddition
égociée
de la forte-
resse, e 27 août 1328, près septmois de siège (5). Le 2 mai 1330, es
services
de
la
Biccherna nt
payé
un
maîtreSimone
«
pour
avoir
peint
Montemassi t
Sassofortedans le
Palais de la
commune
(6).
Notons
que
ces termes du
paiement spécifient
es
forteresses
mais
où est
Sassoforte
)
et
non
e
capitaine.
Et
les
chroniques voquent
eulement
les fêtes élébrées
Sienne à
l'annoncede la
victoire.
Les Neufdu
gouvernement
aintiennentonc
eur
confiance Guido
Riccio.
Mais,
à travers e
triomphalisme
iennois des
chroniques,
n
perçoit
ue,
passée
la
phase périlleuse
e
la
conjonction
ibeline
ntre
Castruccio et Louis
de
Bavière,
les
opérations
guerrières
tendent
autantou
plus
à
razzier e
«
contado
de
Pise
qu'à
gagner
t assurer a
fidélité es forteresses u Sud.
En avril
1329,
e
capitaine
de
guerre articipe
la
répression
ontre
le
«
popolo
minuto de Sienne ému
par
la famine.
(3)
Voirnotamment
rlando
MALAVOLTI,
elVHistoriai
Siena,
S. Mar-
chetti,
enise
599,
éimpression,
orni
968,
e
partie,
ivre
V, pp.
86-94.
(4)
Ces
documents
ont ités t commentés
ar
Max
SEIDEL,
«
Castrum
pingatur
n
palatio
1. Ricerche
toriche
iconografiche
ui
castelli
dipinti
nel
PalazzoPubblico
i
Siena
,
dans
ProspettivaXXVIII,1982, p. 17-41,.
25.
(5)
Le
long
iège
e Montemassist
rapporte
ussi
par
Giovanni
ILLANI,
Istorie
iorentine,
.
Bettoni,
ilan
1834,
ivre
X,
chapitre
9,
p. 341,
t
101,
§.
rentine
49
cependant
?)
ne nomme
illani
pas
trop
Guido
réoccupé
Riccio.
de montrer
'importance
e l'aide
orentine
)
ne nomme
as
GuidoRiccio.
(6) Cf.note4 et Agnolo I TURADEL GRASSO, ronaca enese,dansRerumtalicarumcriptores,uova dizione, V-6,d. A.Lisini, . Iacometti,
Bologne
939, .
496
«
Montemassi
Sassoforte
i féro
dipegnare signori
Nove
di
Siena a
l'esenplo
ome
rano,
quali
furo
ipenti
el
palazo grande
di
sopra
nella
sala,
e
fu
il
maestro imonedi Lorenzoda Siena ottimo
maestro,
u
d'aprile
330».
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122
En
1330 t
1331,
e
versant
Ouest du
Mont Amiata et
la Maremme
de
Grosseto sont
agités
par
le nouveau
vent
impérial
de Jean
de
Bohême,
allié à
la fronde
permanente
des comtes
Aldobrandeschi
de
Santa
Fiora.
Guido Riccio est
sur
le front
il
prend
Scansano
et
Castel del
Piano
et
s'attaque
à
Arcidosso
qui
se rend
après
un
long
siège,
en
août 1331. Commentant
a
guerre
d'Arcidosso,
es
chroni-
queurs
émettent eurs
premiers
doutes
Guido
Riccio
aurait,
sans
raison
apparente,
efusé
e combat
aux
troupes
des comtes
et du
roi
Jean.
Aurait-il té acheté
(7)
?
Les
Siennois
décident
ependant
e faire
peindre
Arcidosso,
cansano
et Castel
del Piano
le
peintre
MaîtreSimone ra sur
place
les observer
dans la
fin
d'août
(8),
et
il
sera
payé
le 14 décembre
pour
avoir
peint
Arcidosso
t
Castel del
Piano. Entre es deux
dates,
e
18
novembre
331,
Sienne
a fait
a
paix
avec les
comtes
Aldobrandeschi t
négocié
avec
eux la restitution
e
Scansano
(qui
ne
sera donc
pas peint)
et
l'acqui-
sitiondes
seigneuries
e
Castel del Piano et Arcidosso
9).
En décembre
1332,
Guido Riccio
attaque
sans succès Massa
Marit-
tima
mais,
près
de
Giuncarico,
l
remporte
ur
les
troupes
alliées de
Massa et de Pise,une victoire ssez glorieuse our ui valoirune entréesolennelle
Sienne,
a consécration e la chevalerie t ime
prime
de
500
florins
'or.
Cependant
'armée
pisane
maintient a
pression
sur
le
contado
siennois
de Massa
elle remonte
presque jusqu'à
Sienne,
en février
t
mars
1333,
mettant
feu et à
sang
les
«
castelli et les
villages,
sans
que
le
capitaine
Guido Riccio
juge
bon
d'y
mettre
obstacle.
Les
chroniques
siennoises
censurent ette
passivité
et de
(7)
Cronaca
nonima el
secolo
XIV dans
R.I.S.,
n.e.,
XV-6,
ité
«
E
Guido
Ricci
nostro
hapitano
i
giente
'arme
non
volse che
vi
s'andasse,
e la chagioneonsi seppe ma
in Siena ne
fu un
grande
omore
nperochela gientede'Sanesifu moltopiù che quella de'chonti. per questo la
brighata
enne
he Guido
Ricci
s'intendesse
ho' loro e lui
ne
portò
grande
biasimo
,
p.
146 et
Agnolo
I
TURA,
ité
«
E
l'oste
de'
Sanesi
che
era
presso
tre
miglia,
entendoa
venuta
i
quelli
di Santafiored
Arcidosso,
si
mossero
er
conbattere
o'
loro,
'1
capitano
misser
Guido
Riccio non
volse,
la
cagione
on
si
sepe
e certo rano
rotti
conti,
erochè
Sanesi
erano
più
altretanti
meglio
n
punto.
Unde
l dettomisser
Guido
Riccio
portògran
biasimo
,
p.
503. Et
plus
loin
Agnolo
appelle
«
E anco
fe'
Suando
re
l
detto
ra a
castello
ste
d'Arcidosso,
che lo'
potea
assò
contastare,
ornire
e
e
e
non
enti
lassarlo
e' Conti
fornire,
i Santa-
e
peruando
re
l
detto
astello
he lo'
potea
contastare,
non assarlo
fornire,
per
li
più
si crede
he
muneta
icavasse
a'
nemici
,
p.
511.
(8)
Ce
déplacement
st
payé
en
septembre
ar
les
services e
la Bic-
cherna
«
Maestro imone
dipegnitore
ie
avere adì
VI
di setenbre
er
VII
di che stete
n
servigio
el Chomune
hon
un chavallo
uno
fante la
tera
d'Arcidoso
di
chastello
el
Piano e
di
Schançano,
avene
pulicia
da
Nove,mesi scitanel dì f. 33 a ragione i venticinqueoldial dì, lib. 8 e
s.
15
,
cité
par
M.
SEIDEL,
article
ité,
p.
34,
note97.
(9)
Il
Caleffo
vecchio
del
Comune
di
Siena
IV,
éd.
M.
Ascheri,
G.
Cecchini,
.
Forzini,
.
Santini,
ienne
984,
ctes
1081-1087,p.
1835-1853,
et acte
1101, p.
1811-1813.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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123
nouveau mettent n doute l'honneurdu
capitaine
(10).
Pourtant es
Neuf le
réélisent ncore une
fois,
mais ils l'envoient e refaireune
vertu
aux
dépens
des
villages
pisans
d'où
il
revient,
crit Malavolti
«plus
riche de butin
que
chargé
de
gloire».
Orlando
Malavolti,
qui
publie
son Histoire de Sienne
en
1574,
ustement 'interroge
ur ce
personnage ui, longtemps
onoré
de la
confiance e
Sienne,
a
quitte
en
septembre
1333
«
con
poco
honor suo e
poca
sodisfattione ella
città».
Il
rapporteplusieurs
hypothèses,
e
lâcheté,
de
corruption
u
trahison,
mais
il
reste
perplexe,
ar
il lui
semble
impossible qu'un
personnage restigieux,ongtemps onorépar la communede Sienne,
ait
pu
tomber dans une telle
ignominie.
l
préfère penser que
la
Seigneurie
des Neuf lui avait dicté une
stratégie
de dérobade
que
l'ignorance
u menu
peuple
avait
interprétée
ontre on honneur
11).
Mais
sa
perplexité ejoint
nos incertitudes
'aujourd'hui.
Pourquoi
un
personnage
ussi douteux
aurait-il
ontinué chevaucher ur les
murs du
Palais
Public Avait-il ait autre chose
que
razzier des cam-
pagnes
et
prendre
l'usure des
forteresses
L'histoire
de
Sienne de
Giugurta
Tommasi,
publiée
posthume
en
1625,
st
peut-être
a
première
citer la
fresque
du Palais comme
représentationn gloirede Guido Riccio. Tommasi l'évoque en com-mentant a mortdu
capitaine,
ar Guido Ricciomourut Sienne où
il avait été
rappelé
dix-sept
ns
après
ce
départ
furtif.
ienne
lui fit
des
funérailles oûteuses t
grandioses
t Tommasi
joute qu'
«
il
avait
déjà
été
honoré
par
la
république
d'une
statue à cheval
peinte
dans la
salle des
arbalètes,
ujourd'hui
alle du
conseil,
de la main de Simone
Martini,
rand peintre
de ces
temps
et
proche
ami
de
Pétrarque,
ue
l'on voit encore
aujourd'hui
dans la salle de
la
Mappemonde
avec
l'expédition
e Montemassi
(12).
(10)
Agnolo
I
TURA, ité,
pp.
508-509,
otamment
«
La
gente
e'Sanesi
con misserGuidoRiccio sua gente e ritornaron Siena domenica dì28 di marzo 1333) parevano modo di sconfitti,on vergogna danno
del comuno
i Siena
p. 509).
G. VILLANI ite ussi cet
épisode eu
glorieux
des
guerres
iennoises,
n
«
oubliant
encore
Guido
Riccio,
storie
cité,
X-212,
.
386.Puis
Agnolo
I TURA ommentee
départ
e
Guido
Riccio
n
septembre
333
«
MesserGuido Riccio de la casa da
Fogliano
i
Regio,
capitano
e la
guerra
el comuno
i
Siena,
fini
l suo uffitio non
fu
più
rifermo
er
cagione
e
la
cavalcata he féro Pisani u
quel
di
Siena nnno
a
Rosia,
hé
Ciupo
oro
capitano
ichiese
i
battaglia
l detto
misserGuido
Riccio,
lui non volse
conbattere,
he avea
più gente
di lui e
meglio
n
Sunto
note
on
7)
Or
iù
come
antagio,
si
fusse,
ome
all'ultimo
n
dietro
di suo
eto
offitio
.
(Ici
si
a
portò
ernière
villanamente,
itation e
là
unto
note
)
Or come
i
fusse,
ll'ultimo
i suo
offitio
i
portò
illanamente,
à
dove
molti
inprocci
be
dal
popolo
minuto
da
altri
di
Siena,
partissi
l
detto
ì
28
di
settembre
on
poca
aude con
molti amarchie
partissi
non
pagò
a molti
ittadini
i Siena molti
denari
he
gli
avevanodato
di loro
robe
marcantie,
he fu n
somma i 2000 ibre
(p. 511).
(11)OrlandoMALAVOLTI,p.cit., epartie,ivreV, pp.93-94.
(12)
Voir e texte
riginal
lus
hautnote1 maisce
texte,
existant
as
dans e
manuscrit
utographe
e l'histoire
e
Sienne
de
Tommasi,
st une
glose
e
'éditeur,
f. a contributione Mario
Ascheri ansLa
Nazione
Siena)
du 28 mars
1985,
ous
le titre
Perché
'Economist
a
preso
un
granchio
.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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124
Au début du XVIIe
siècle,
malgré
es doutes
pesant
sur la mémoire
de Guido
Riccio
-
que
Tommasi
évoque
lui aussi
-
l'identification,
qui
a couru
plus
glorieusementusqu'à
nous,
était
donc
déjà
accomplie.
Guido Riccio à Arcidosso ?
Dans son
offensive ontre le Guido Riccio de Montemassi
13),
Gordon Moran
était
parti
de
cette
interrogation
le conseil de la
commune e Siene pouvait-ilontinuer se réunir, près 1333, ous le
regard (peint)
d'un
suspect
ou d'un
traître
La
réponse
étant
non,
Guido Riccio
n'était
pas
Guido Riccio.
Nous
allons
voir
que
la
restauration
t
l'étude de la
«
nouvelle
fresque»
peuvent
onfirmerette
condamnation.
n effet es
person-
nages
qui
y
sont
peints
ont
été,
certainementvant
1345
14),
masqués,
c'est-à-dire
ue
la
fresque
été
à
cet endroit
badigeonnée
e
peinture
noire
et
d'azurite,
i
soigneusement
u'en
1980-81
l
a
été
extrêmement
laborieux
pour
les
restaurateurs 'arracher
es
figures
l'oubli
auquel
elles avaient été
sciemment ondamnées.
Or si le village ci représenté taitArcidosso,e
personnage
rmé
pourrait
ien êtreGuido
Riccio
qui
justement
eçut
n 1331
des
comtes
Aldobrandeschi iovanni
et Stefano a
soumission
de
ce
«
castello
.
Guido Riccio
dont a
conduite,
Arcidosso
déjà,
n'était
ustement as
restée
u-dessus e tout
oupçon
t
qui
se trouveraitur e mur
marqué
de
la
damnatiomemoriae.
ette
fresque
erait donc celle
qui
fut
payée
à Simone Martini
en décembre 1331. Telle
fut
en
effet
a
première
orientation
e
la
commission
hargée
de
l'enquête
n 1980-81
le
village
représenté
essembleen effet
eaucoup
à
l'actuel
Arcidossoet nous
avons vu
que
Simone
fit e
voyage
pour s'inspirer
u
site réel.
Mais
cette dentificationondamnaite Simone Martinid'en-haut ui devait
pour
être
Simone,
Montemassi
t Guido
Riccio,
voir
été
peint
en 1330
alors
que,
au
contraire,
ecouvrant
a
partie
haute de
la
«
fresque
d'Arcidosso
,
il
lui était
nécessairement
ostérieur.
Un
point
pour
Moran
(13) Depuis
'article e
1977,
An
nvestigation...
cité,
Gordon
MORAN
a
plusieurs
ois
repris
t infléchi
es
arguments
t
ses
conclusions.
our
ou
contre
ui a
polémique
ait
age
n
Italie,
vec
des
prolongements
ux
Etats-
Unis. Un
exposé
récent
e
ses
positions
ans
Michael
MALLORY,
ordon
MORAN,
Precisazioni
aggiornamenti
ul
*
caso"
Guido
Riccio»,
dans
Bullettino
enese i
storia
atria,XCII, 1985,p.334-343.(14)A cettedate a été posée devant ettefresquea fameusemappe-
monde
ui
a donné
on nom
à
la
salle,
cf.
Agnolo
I
TURA,
ité
«
El
Napamondo,
he è in
palazo
de'
SegnoriNove)
di
Siena,
fu
fatto n
questo
anno
(1345)
f
celo maestro
Ambruogio
orenzetti
ipentore
a
Siena
,
p.
547.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 127/155
125
Mais
décidés,
contre
Moran,
à sauver le Guido Riccio de Monte-
massi,
des historiens
d'art ont
cherché
pour
la
«
nouvelle
fresque
un autre
peintre,
une autre situation.
Max Seidel a trouvé Giunca-
rico
(15)
dont
on sait
qu'il
fut
peint
en 1314
sur
les murs du
palais
public
et
dont la soumission
prétendument acifique
16)
correspon-
drait à
l'image
qui
nous
est
offerte.
omme artiste Luciano Bellosi
choisitDuccio
(17),
Enzo
Carli
propose
Memmo
di
Filippuccio,
e beau-
père
de Simone
là
au
moins
on reste en
famille)
18),
Cesare
Brandi
propose
Pietro Lorenzetti
19).
Cependant
Federico
Zeri,
John
Pope-
Hennessy, rigantiprennent artipour Moran. Et la valse des attri-
butions nous
conduit à
une certaine
perplexité
face
aux
méthodes
stylistiques.
Mais revenons
la
fresque
où nous
croyons
voir Arcidosso.
La
ressemblance
ntre a
fresque
t
le
site,
qui
a
justement
rappé
les
«
découvreurs
correspond
ffectivement
la
volontédu
gouverne-
ment
siennois
puisque
nous
avons
vu
qu'il finança
e
voyage
d'obser-
vationdu
peintre
imone.
On
peut
donc
parler
d'un réalisme
politique
de
la
peinture
l'homme
l'épée représente
ien celui
qui reçut pour
Sienne
la
reddition
d'Arcidosso,
nous
avons nommé
Guido Riccio.
L'homme au gant (brutalement oupé en deux par la fresque de
Sodoma)
sera l'un des
Aldobrandeschi,
e
gant soulignant
a
noblesse
et sa soumission
20).
L'azurite
respecté
Arcidosso,
ésormais
ntégré
u territoire ien-
nois,
et exécuté
la condamnation es
personnages.
Or
l'azurite est
justement
a
couleurdes traîtres à Venise
aussi
quand,
e 16 avril
1366,
(15)
Max
SEIDEL,
article
ité,
pp.
30
sq.
(16)C'est a thèse e MaxSEIDEL, article ité, . 30.Maison a constatéavec étonnement
ue,
dansle document u 30 mars1314
u'il publiepour
étayer
ette hèse
document
,
pp.
36-37)
n membre
e
phrase
été
sauté
qui
attestait
ustement
e
caractère
militairementontraint e la
soumis-
sion
de Giuncarico.
près
umque
d
acquisitionem
anquent
es
mots
dicte erre
uerit
abor
nonmodicus dhibitus
ersonarum
iribus
orporis
t
armorum nsistentibusirca
acquisitionem
la citation
ontinue nsuite
correctement
prefatam
t
stuaium
etiam
sapientium.
oir à ce
sujet
M.
MALLORY,
.
MORAN,
rticle
ité,
p.
342.
(17)
Luciano
BELLOSI,
«
Castrum
pingatur
n
palatio
2. Duccio e
Simone
Martini
ittori
i castelli
enesi a
l'esemplo
ome
erano"»,
dans
Prospettiva
XVIII, 1982,
p.
41-65.
(18)
E.
CARLI,
La
pittura
enese
del
Trecento, ienne,Electa,
1981,
pp.
258-260.
(19)C. BRANDI, I restidi affreschicoperti Siena fanno iviverelMappamondootante, dans e CorriereellaSera,28 mars 1981.
(20)
On
peut
citer
l'appui
de cette
nterprétation
e défilé
es
nobles
qui,
es
gants
n
main,
urent
idélité Charles
'Anjou,
ans le Palais du
Peuple
San
Gimignano
fin
XIIIe
siècle).
ur la
symbolique
u
gant,
oir
B.
SCHWINEKÖRPER,
er
Handschuhm
Recht,
938.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 128/155
126
on décida
d'effacer
our
trahison
a
figure
du
doge
Marin
Faliero
peinte
dans la nouvelle alle
du GrandConseil
du
palais
ducal,
on
vou-
lut laisser cette
partie
du mur
vide,
peinte
en
bleu
pro
crimine
rodi-
tionis
21).
Moran
avait
remarqué
qu'un
sceau d'Arcidosso
mais sans doute
tardif
présente
une curieuse ressemblance
vec un
détail de la
fresque.
Le
sceau
représente
ne tour
émergeant
'une
large
base cir-
culaire à
deux
étages
du
premier
étage
s'élève
un arbuste incliné
vers
a droite
22).
Cette
figurationappelle
fort
a
tour
ronde
grossière-mentmaçonnée droitedu palais,d'où jaillitun arbre, ncliné ui aussi
vers
a
droite,
nique
élément
égétal
de ce
paysage
de
pierres
façonné
par
l'homme.Ce
détail de
la
fresquegarantissait
elon
Moran l'iden-
tification
u
village
avec Arcidosso.
Oui,
si le sceau est antérieurmais
nous
n'en
avons
pas
la
preuve.
Nous
pouvons
cependant reprendre
l'argumentation
e
Moran,
infléchie ans un
autre
sens.
Sur
le sceau
de
la Comunitas
Arcidossi,
ntre la tour et l'arbre
-
qui
peut
être
un olivier
un
écu
-
qui peut
être
la
Balzana de
(21)
G.B.
LORENZI,
Documenti
er
servire lla storia el
Palazzo
Ducale
di VeneziaVenise 868, ° 104.
(22)
Voir A.
SEDGWICK
WOHL,
The
case of
the
Century,
startling
Discovery
hips
away
at
the
Identity
f one of the
World's
most
famous
Frescoes
,
dans
Art nd
Antiques,
ctobre
984,
p.
68-73,
eproduction
u
sceau
p.
73
redessiné
our
nous
par
CécileArnould.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 129/155
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128
la
bataille
du
Val
di
Chiana,
peinte
en
1364,
ur
le mur
qui
revient
angle
droit
droite
du
spectateur
e
plus
en
plus perplexe
25).
Le vieux
Guido
Riccio
Ce
cavalier
naguère
familier,
nous
commençons
à
le
regarder
comme
un
étranger,
t
un
étranger
ui
s'est
oué
de nous.
Nous
décou-
vrons alors des détailsétonnants.GordonMoran avait remarquéces
deux carrés
de
vigne
qui
alternent
izarrementvec les tentesdu cam-
pement.
Remontant
u
mot latin
vinea,
l
rappelait
ue
ce terme
peut
avoir
deux
sens
vigne,
mais
aussi
machine
de
guerre,
tructure
e
bois
construite
ar
les
assiégeants
pour
arriver
couvert
usqu'aux
remparts
26).
Sigismondo
Tizio,
dans
sa
monumentale
hronique
siennoise
n
latin,
omposée
u
début
du
XVI*
siècle,
nédite,
crivait
«
Les
Siennois
assiégèrent
a forteresse
e Montemassi
machinéis
c
vineis
oppugnantes
(27).
Mais
les
défenseurs
du
vieux
Guido
Riccio
citent
la
chronique
d'Agnolo
di
Tura,
écrite
en
italien.
Elle
rapporteque
les
Siennois
mirent e siège devantMontemassi e 21 janvier 1328, joutant « Le
dit ost resta
ongtemps
Montemassi,
e sorte
que
ceux
de
l'ost
mirent
une
grande
vigne
dans
le
campement
t ils
eurent
dans
le
campement
du vin
de cette
vigne»
(28).
Et
plus
loin,
après
avoir
exposé
la
prise
de
la
forteresse,
e
27 août
1328,
lle
conclut
«
Le
siège
avait
duré
sept
ans,
et
ils
y
avaient
mis des
vignes
(29).
La
chronique
videmment
pèche
sept
ans
pour
sept
mois,
ce
pourrait
tre
une erreurde
copiste,
mais cette
erreur
st
curieusement
elayéepar
le
discours
ur
la
vigne
et
le vin.
Or,
i
Agnolo
i
Tura écrit
bien
au XIVe
siècle,
a
chronique
e
(25)GiuseppeGAVAZZI, sperienze ul restaurodel «Guidoriccio,
communication
ue au
Colloque
ur
Simone
Martini
e mars
1985 Sienne.
La
superposition
u
«
vieuxGuido
Riccio
à la
bataille
du Val di
Chiana
est
admise
même
ar
L.
BELLOSI,
article
ité
p.
50
«
un
saggio
seguito
durante
lavori
i
restauro
u
una
stuccatura
ituata
ove fanno
ngolo
a
Í>arete
"battaglia
el
Guidoriccio
di Valdichiana"
quella
adaciente
ha
mostrato
u
cui
che
ippo
il
bordo
anni
di
segui
quest'ultimo
el
1373
Í>arete
"battaglia
di Valdichiana"
ha
mostrato
he il
bordo
di
quest'ultimo
affresco
i inoltra
er
un
centimetro
due
sotto
l livello
della
parete
del
Guidoriccio,
ome
se fosse
stato
dipinto
rima
.
BELLOSI,
pour
ustifier
cette
anomalie
,
invoque
uelque
remblement
e
terre.
(26)
Voir
M.
MALLORY,
.
MORAN,
Guido
Riccio
le
"vigne
i Monte-
massi",
dans
I Gallo
Nero
VI, mai-juin
983,
p.
11-12,
t aussi
VIOLLET-
LE-DUC,
istoire
'une
forteresse
,
Paris
1874, eimpression
.
Mardaga
978,
pp.
73
et 366.
___
(27) Sigismondo
IZIO,
Historiarum
enensium
om.
ll,
bienne,
iDiio-
tecaComunale, anuscrit III 8,p. 74. . .(28) Agnolo i JLKA, ite «La dettaoste a ivioniemasMi atc gì u
tenpo,
n modo
che
quelli
dell'oste
osero
una
grande
igna
n
canpo,
et
ebero
del
vino
di
quella
vigna
n
canpo
(p.
464).
(29)
bidem
p.
478)
«
eravi
tato
'assedio
ette
nni,
ne
vi
posero
e
vigne
.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 131/155
129
nous
est
connue
que
par
des manuscrits ardifs ce
passage
même
sur Montemassi
est
cousu
de
reprises,qui
sont
probablement
des
interpolations ostérieures.
es invraisemblables
ropos
sur la
vigne
pourraient
onc
avoir leur source soit
dans
une
chronique
atine mal
comprise,
oit dans
l'observation 'une
image...
nous revenons
notre
fresque.
Durant
les récents travaux
de
restauration
n s'est
aperçu
que
toute
la
partie
gauche
de la
fresque,
e
«
castello
de
Montemassi,
avait été refaite vant 1529,probablement la suite de dégâts pro-
duits
par
une
infiltration'eau. De même a été refaite a
partie
cen-
trale
du cartouche
portant
a
date
ANO DNI
MCCCXXVIII,
c'est-à-
dire MCCC.
Or comme le
notait le restaurateur
G.
Gavazzi,
ce
sont
justement
la
figuration
e Montemassi
-
qui peut
effectivement
rappeler
'actuel
«
castello
-
et cette
date
-
évoquant
la
victoire
de Guido
Riccio
-
qui permettaient
'identifierà
le noble
capitaine.
Ces
preuves
nt
perdu
eur
validité t le chevalier on sens.
Et
puis
il
y
a le fameux battifolle
,
plusieurs
fois
cité
par Agnolo
di
Tura
(30),
édificehérissé de tours sur
lesquelles
flottentes
ban-
nières
de Sienne et de Guido
Riccio. La restauration
montré
que
deux immenses annièresde Guido Riccio avaientété peintesen plus
de celle
qui
flotte
ur la
tour
de
droite,
ans
doute
pour
accentuer
l'identification
u
capitaine,
mais
troppour
a
vraisemblance
istorique
et
politique
(31)
elles
avaient donc
été aussitôt effacées.D'ailleurs
même
'image
actuelle
est
douteuse
la
république
de Sienne
pouvait-
elle
tolérer
ue,
en
son
proprepalais,
a bannière
d'un
simple
capitaine
de
guerre,
tranger,
lottât
la même
hauteur
que
la sienne
La
chroniqued'Agnolo
di
Tura,
dans
une de ses
reprises
sur le
«
battifolle
,
le
définit
«
bastion
fortifié omme
un
«
castello
;
or
«
battifolle
était un terme
d'usage
courantdans la
langue
toscane
du
MoyenAge, désignantnormalement n édificeen bois, provisoire,
construit
ar
les
assiégeants
32).
Dans un texte
du XIVe siècle
l'expli-
(30)
bidem, p.
464, 70,
74, 77,
78 certaines e ces
notations
ur
le
«
battifolle
sont
reprises
ar
Orlando
MALAVOLTI,
uvrage
ité 2e
partie,
livre
V,
p.
86
v
«
Al
capitano
de'Sanesi,
havendo
rovato l Castello
di
Montemassi)
ssai
forte i
sito,
di
muraglia,
ben
guardato, arve
poterlo
pigliar
più
facilmente
er
assedio,
che
per
assalto,
perciò
del
mese
di
gennaro
ggi
domandan
327
i
pose,
bastione
ome
ò
dicevano,
forte,
atto
n
di
attifolle,
terra,
ch'era
di
legname
imile
e
à
havendovi
uel
che
gennaro
ggi
domandan astione
forte,
atto
i
terra,
di
legname
havendovi
fatti ntorno
grandi
steccati,
non lassava
entrarvi,
è
uscirne,
lcuna
persona
.
(31)
Voir e
rapport
e restauratione G. GAVAZZI
e
juin
1981,
éposé
aussiau Kunsthistorischesnstitut e Florence.(32)Pouréclairere sens du mot«battifolleon peutciterunephrase
de
la
chronique 'Agnolo
I
TURA,
décrivante
siège
de Pistoia
par
les
Florentins,
con battifolli
con
gatti grilli
torri
di
legname
rmate
(p. 474),
tructures
rovisoires
onc
et non
pas
forteresses.e commentaire
de
MALAVOLTI,
ité
plus
hautnote
30,
va
dans
e même
ens.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 132/155
130
cation
du terme ne
s'imposait
pas
et
c'est seulement
la troisième
citation
ue
la
chronique
vance ime
justification
33).
On
peut
donc
penser
qu'ici
comme
pour
la
vigne
un rédacteur
ardif serait inter-
venu,
ne
comprenant lus
en son
temps
e sens
du
mot
et
le
définis-
sant
d'après
l'observation
de la
fresque
car le
«
battifolle
de
la
fresque
st sans aucun doute
une forte onstruction
e
pierre.
ourtant,
à le
regarder
mieux,
l
apparaît que
le
crénelage
est localement n
bois
-
par exemple
ur la deuxième
our à
partir
de la
gauche
et sur
la
voie d'accès
aussi à
gauche
-
comme si
par
endroit
a
pierre
avait
été transforméen bois par une intervention âtive ugée suffisante
pour
changer 'impression
e
qui
regarde
de
loin
en
bas,
pour
donner
à voir
un
«
battifolle
plutôt
qu'une
forteresse.
l
n'est
pas
déraison-
nable
de
penser que
cette
modification
pu
intervenir
peu près
en
même
tempsque
celle de
la
date et de
Montemassi.
Qui
a
voulu
afficher uido Riccio a saisi
la date de son incontes-
table
victoire,
328,
t le
lieu,
Montemassi. l a
recouru ux
sources
de
l'histoire iennoise
t,
comme es
comptes
de
la Biccherna
apportaient
le
paiement,
n
mai
1330,
our
la
représentation
einte
de Montemassi
et
Sassoforte,
l a fait
peindre
deux forteresses.Mais à
regarder
lus
avantdans les sources, l voyaitbienque la date de 1328ne convenait
que pour
Montemassi
34)
puisque
Sassoforten'avait
été acheté
par
Sienne
qu'au
début de 1330
il insistait lors sur Montemassi t trans-
formait assoforte
n
«
battifolle
.
Plusieurs siècles
après
la
critique
d'art
suivit
e
même
chemin,
econnaissant
'abord Sassoforte
puis
se
résignant
la machinede
siège.
En
1985,
le
spectateur perplexe
Il est désormais assez convaincuqu'il voit Arcidossopeint par
Simone
Martini.
à-haut
l ne
sait
plus
et
même
es
historiens e
l'art
abandonnent
eu
à
peu
des
arguments
tylistiques
ui
se
sont révélés
insuffisants,
urtout
près
la récenterestauration.
lors sûrement
as
Simone,
mort
en 1344.
Montemassi ui
mais
repeint
et Guido Riccio
masquerait
un autre
capitaine.
Qui
?
Le
restaurateur
ropose
pour
la
date
(en
considérant
'espace
qui
reste
entre
ANO DNI et
VIII)
MCCCLXXVIII
ou
MCCCCXXVIII
il
faudrait chercher dans ces
années-là.
(33)Agnolo I TURA, p. cit.,p. 477 «Montemassissendo ssediatoda le genti e'Sanesi he v'avevanoatto nobattifolle,vero astia,murato
d'uno
castello
fortificatoloon
grossi
tecati
n modo
he da niuno anto
potea
ntrare
è uscire
i Montemassi
.
Cette
éfinition
araît
urajoutée
t
nous
renvoie
u texte
e
O.
MALAVOLTI,
iténote
30,
ui
atteste
bandon
au
XVI" siècle
du
mot
«
battifolle
,
justifié
ar
l'incise
«
come
dicevano
.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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133
La marelle
Solutions
des
problèmes
roposés
dans le
numéro8
de
Médiévales
(elles
supposent que
les deux
joueurs
sont de force
égale
et,
bien
évidemment,
u'aucun
ne
commetde
fautes
d'inattention).
a. Le
nombre
minimum
st
de
six
coups.
Il
suppose que
le
joueur
jouant
en
premier
e tente
pas d'alignement
vant le
quatrième
oup,
mais
place
au contraire es
trois
premiers ions
sur des intersections
éloignées
es unes des autres (touten contrôlante
jeu
de son adver-
saire).
Sinon,
le
joueur
jouant
en second
se
livrera
à
un
blocage
illimité.
b. Si
aucun des deux
oueurs
ne commetde
faute,
ni l'un ni
l'autre ne
peuvent
gagner
avant
la
pose
de
son
cinquième pion
par
le
joueur
jouant
en second.La
partie
véritable e commence
u'après
ce
coup-là.
Les chances
de
gagner
du
joueur
qui n'occupe
pas
le
centre
sont
faibles elles existent
ependant
'il
réussit à
placer
deux
pions
sur
les intersections oisines
et
situées
sur
les
deux
carrés
autres
que
le
carré intérieurt le carré extérieur.
c. Oui.
Sur ce
type
de
figure,
e
joueur
jouant
en
premier
ne
doit
pas
perdre,
uel que
soit le
nombrede
pions que possède
son
adversaire.
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135
question
de
la
forêt,
ableau
déjà
utilisédans
un autre
ivrede
l auteur,
Racines
des
cathédrales)
ui
montre
travers
un réseau
complexe
de
flèches es liens entre
es éléments
ui
«
font
la forêt t
les facteurs
qui
la
font
évoluer.
Le
livre commence
n
évoquant
es
composantes
matérielles e cette forêt consistance
u
sol, faune,
égétation,
ocali-
sation,etc.,
et continue
par
la
description
es
différentesormes
de
son
exploitation,
e ce
qui peut
être considéré omme
e
plus
simple,
la
cueillette,
a
chasse,
usqu à
des utilisations
lus
sophistiquées,
éfri-
chement,
levage,
combustible,
our,
dans
un troisième
volet
passer
aux problèmesde législation t de politiqueavant de finir ur un
chapitre
onsacré la
place
de la forêtdans
l imaginaire
médiéval.
Le
système
interrelations
omplexes, éjà
évoqué,
n est
pas appli-
qué
seulement
ux
questions générales,
l
l est
à chacun
des
points
particuliers
voqués, toujours
présenté
sous
le
plus
grand
nombre
de facettes
possibles
quitte
à
s éloigner
momentanément
e
la forêt
elle-même.
insi,
par
exemple
est
exposé
le
système
de
la villefranche
qui
en
un
sens
donneau
paysan
une certaine
ibertéd action
en
même
tempsqu il
le
conduit
travailler
ans des
conditions
ui
sont
moins
bonnes
que
celles des
serfs...Un des
exemples
es
plus
curieux
dans
cette tentative e rendrecomptede toutes les raisons est celui qui
consiste
à
s interroger
ur
la
prépondérance
ersistante
e
la
cognée
sur la scie
pourtant
lus
efficace.
auteur
n y
cherche
pas
une
raison
unique,
une
explication
imple
et
finie
mais,
sans
tenterd en
mettre
une
particulièrement
n
avant,
il
expose
une somme
de raisons
-
matérielles,
eligieuses
uridiques,
financières... Une
telle forme
laisse aussi
place
à des
anecdotes
vivantes et
exemplaires
celles-ci
ponctuent
e
livre,
est l histoire
e la forteresse
e bois
du comte de
Bourbourg rigée
en
une
nuit,
aspect
ludique
de certaines
réglemen-
tations
ocales
concernant
e bois à brûler...
La profusion es informations empêchepas que l on voie aussi
se dessiner
es
grandes
ignes
de l histoire e la
forêt
acquisitionpro-
gressive
de biens
forestiers
ar
des
personnalités
on
seigneuriales,
changement
u tournant
u
XIIe siècle où
l augmentation
e la
popu-
lation commence
faire ressentir
omme
népuisables
es ressources
forestières
t
appelle
donc à
prendre
des
mesuresconcernant
avenir
de la forêt...
e thème
entraldu
livre,
e
«
revers de
la forêt st
bien
sûr celui
du
défrichage.
oland
Bechmann
en
précise
utilement
es
termes
t les
moyens.
ritiquant
es thèses
trop rapides
de
certainsde
ses
prédécesseurs,
l
souligne
à encore
l intrication
es
composantes
du
problème
t
relativise
es
points
de vue
traditionnelsomme
celui
du rôle dévolu ux moinesdans ces travaux u il ne fautpas dissocier
du fait
que
ceux-ci
ont
aussi
leurs
propres
chroniqueurs,
oubliant
pas,
par
exemple
d allier
au
besoin
de
nourriture ans les mobiles
du
défrichage
e besoin
de boisson
donc
de
vignes.
Tout
au
long
du livre
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 138/155
136
aussi,
même
si
un
chapitre spécial
est
consacré
aux
problèmes
de
législation
lobale
de la
forêt,
st
évoquée
la
question
de la
réglemen-
tation oncernant ous
les
aspects évoqués, progressivement
nifiée t
couchée
par
écrit.
Si certaines
nformationsont
répétées
d un endroit
à
l autre de
l ouvrage
est
qu on
le
conçoit
un
peu
comme
un
manuel
auquel
on
se
reportera
our
tel ou
tel
aspect
de l histoire
e
la forêt.
Cependant
il
arrive
que
certainsfaits
soient
abordés
partant
d un contexte
rai-
ment trèsgénéraldont la définitione nous est pas forcémentndis-
pensable.
On
préférerait
arfois
davantage
d interventions
irectes
des
textesde
l époque
qui
en dehors
de
YOpusculum
uraliumCommodium
de
Pierre de
Crescence t
de
quelques
courts
extraits
de
romans ou
de
contes,
ont
peu
sollicités
on
appréciera,
n revanche
es
explica-
tions
d éthymologies
t de vocabulaire
ur
la
terminologie
e la forêt
qui apparaissent
la
fin de certains
hapitres).
Le dernier
chapitre,
ur
la
place
de la
forêt
dans
l imaginaire
médiéval
est assez
décevant
comparé
à
l ensemble
de
l ouvrage.
On
peut l expliquerpar
la volonté
de
l auteur
de nous
faire sentir
une
forêt
médiévale
matérielle,
ncrée dans
le
quotidien pratique
de
l homme
médiéval,
ar
sa volontéde lutter ontre
image
répandue
t
simpliste
de l homme
médiéval terrifié
ar
la forêt.
Pour ce
faire,
l
insiste
davantage
sur les
comportements
positifs
comme
celui
de
la vénération
e certains
arbres.
Cependant,
n aurait
pu
souhaiter
dans cet
ouvrage
par
ailleurs
si vivant
t
agréable
à
lire,
une attention
plus grande
ux
problèmes
e
l image
ou des
images
qu ont
de
la forêt
ceux
qui
y
vivent
t
l exploitent
u
Moyen
Age.
Christine
apostolle
Jean-Claude
onne,
L art
roman
de
face
et de
profil.
Le
tympan
de
Conques
Le
sycomore,
aris,
1985,
62
p.,
15
pl.
Il
est des
comptes
rendus
dont on
peut
penser qu ils
dispenseront
d une
plus
longue
ecture.
Ce n est
pas
le cas
pour
le
livre
que
Jean-
Claude Bonne
consacre
au
Jugement
ernier
de
l église
Sainte-Foy
e
Conques.
La
double
densité
de
l ouvrage
interdit
non seulement
l
constitueune explorationminutieuse u tympan, oussée aussi loin
et
aussi
complètement
ue
possible,
mais
encore la
rigueur
de la
démarche
nécessite
exposé
patient
de ses
principes
t la
critique
des
impensés
de
l histoire
e l art
traditionnelle.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 139/155
137
Surtout,
on
se
garderait
bien
de
priver
quiconque
de la fête
à
laquelle
nous
convie
ce
livre
à
moins
que
la
difficulté
une méthode
qui
se
cherche en
détourne
ertains mais
plaisir
ignifie-t-iloujours
facilité
)
: une
véritablefête du
sens. Car la
validité
de
la méthode
se
mesure au
fait
qu elle
produit
une densification
es
significations
de
l œuvre.
Par
là,
elle rend
notre
regardplus
aigu
en lui
donnant
voir
des
traits
énéralement
enus
pour non-signifiants
t mis au
compte
soit du
hasard,
soit d un
déterminisme xtérieur
du
cadre,
par
exemple), oit du stylepropre l artiste u à l époque,toutesnotions
qui permettent
e s endébarrasser
peu
de frais. e défide J.-C. onne
consiste
suspecter
u
sens aussi bien dans
l emplacement
une
ins-
cription,
ans
l arrondid un
visage que
dans
l identificationes
élus
et
des
damnés,
aussi
bien dans
l agencement
es
nuées
que
dans le
geste
du
Christ.
L exhaustivité
st
la
première
ondition une
démarche
our aquelle
aucun
élément
n est
ugé
marginal
u
seulement écoratif. our
garant
de
ce
principe,
n
remarqueque
le
plan
du
livre suit
pour
une
large
part
le
découpage
même des
pierres
qui
forment e
tympan.
La
première
artie
nalyse
es éléments
ui
structurenta
représentation
les anges, e Christ,a zone de partagedes âmes, les nuées,auxquels
s ajoutent
deux
éléments
non-iconiques,
e
champ
(le
cadre
architec-
tural à
propos
duquel
l auteur
critique
idée d une
soumission
de la
sculpture
l architecture t
montre es
relations
dialectiquesqui
les
unissent)
t
le
fond,
uquel chaque
figure
st,
d une
façon
u
d une
autre,
référée.
Dans la
seconde
partie,
les
mondes
célestes et
infernaux
prennent
lace
dans le
système
insi
articulé.
Une fois
reconnus t
décrits,
es
éléments
ui
composent
a
repré-
sentation
e
sauraient
tre us
à l aide
d un
dictionnaire
ui
donnerait
la
clé
d un
code fixé
une
fois
pour
toute
pour
l art roman.
A
l inverse,
l analysesyntaxiquede J.-C.Bonne suppose que chaque œuvre créeson
propre
code il
importe
donc de
porter
son
attention ur
les
rapports
qui,
au
sein
même
de
l œuvre,
nissent t
font
ouer
entre
eux
les
éléments
de la
représentation.
ar
exemple,
uffit-il
e
voir
dans le
geste
du
Christ
indication e
la
place
qui
revient ux
élus
d une
part,
ux
damnés
de
l autre,
uand
de
nombreux raitsen
enri-
chissent e
sens
(soumission
e
l avant-bras
roit la
mandorle,
uxta-
position
n
signe
de
promesse
de la
main
droite t du
phylactère
non-
çant
e sort
réservé ux
élus,
cassure du
poignet pérée
afin
de
pointer
la
voie en
chicane
qui
s ouvre vers le
haut
entre la
corniche
et la
croix,
association de la
main
gauche,
non
seulement
au
bas,
mais
encoreà la notionde fermeturear la positiondu pouce strictement
aligné
avec le
candélabre
enu
par
l ange,
tc.)
?
D autres
précautions
imposent,
omme
de tenir
ompte
de
la
struc-
turation u
champ
haut/bas,
entre/périphérie...)
t
plus
généralement
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138
des
règles générales
qui régissent
a
représentation
omane.
Ainsi,
a
discontinuité
ui
la caractérise
end
nopérants
etrains
modes de
per-
ception
utilisés
pour
l art des
périodes postérieures
il
n y
a
pas
d espace homogène
mais des
lieux
hiérarchiquement
éfinis.
ussi,
ntre
les
figures
u
les scènes
qui
y
sont
représentées,
n ne
saurait
définir
ni
rapport
de taille
ou
de
proximité,
i enchaînement arratif.
Si
ces
principes
de méthode aident à
lire
Conques,
inversement
l approche
du
tympan
permet
à l auteur de
définir
ix
grandes
caté-
gories yntaxiquesdésignant es « opérations lastiquessignifiantes)
dont e
jeu
combiné
st,
en
première pproche, roposé
comme
caracté-
ristique
de
l art
roman.
Ce sont
a
pliure
césure
marquée
par
un
axe),
le
compartimentageséparation
iolente es
termes),
e
franchissement
(qui
en est la
transgression
ocalisée),
a
fusion
soudure
entre deux
éléments
emblables),
a torsion
un
élément
partagé
entre
deux
pola-
rités
contraires)
t
Y
ntrecroisement
jonction
conflictuelle e
deux
éléments
istincts u
contraires).
A
Conques,
l
est
clair
que
dominent
les
catégories
de la
pliure
et du
compartimentage,
t
marginalement
du
franchissement,
andis
que
l entrecroisement
onstitueune
figure
interdite
ar
le
principe
même
du
Jugement
ernier.
L analyse
st
poussée
plus
loin,
u-delà des
motifs
dentifiés,
usqu à
la
prise
en
compte
du
graphe
encore
nommé
opo-gramme),
est-à-dire
de la matérialité
ui
distingue
haque
exécution d un
motif.
Ainsi,
quantité
de
graphes
différents
euvent ignifier
e motif nuée
». C est
précisément
ur
l analyse
méticuleusedes nuées
figurées
u
tympan
que
l auteur ente ette descente
u
plus
finde
l œuvre,
usqu au point
où
apparaissent
es traits
dont on ne
peut plus
décider ils sont
signi-
fiants u non
(une
infime ifférencentre
a
droite et
la
gauche,
par
exemple).
On reconnaît lors les
signes
d une résistance
du
matériau,
et
plus généralement
a
marque
du
procès
de
production
e
l œuvre,
commeà nu et non plus transmué n signe.En outre, art n a pas
seulement
our
but
de
produire
n
sens,
mais de
créer,
ur
un
mode
non-sémantisable,
ne
appréhension
u
monde
par
le
corps.
Elle s insère
ainsi
dans un
mode de
pensée par
le
rythme,
ne
«
musica
généralisée
qui
constituait
l une des
bases
anthropologiques
de
la
culture
médiévale .
L analyse
du
Jugement
e
Conques
montre
vec
quelle
rigueur
t
quelle
subtilité
père
a
pensée
plastique
t
impose
une réévaluation
e
cetteœuvre ascinante.
énéralement,
es
commentateurs
nsistent ur
e
pittoresque
es
détails,
a rondeur es
corps,
e naturalisme
es
gestes
et des regardspour rapprocher onques davantagede l art gothique
que
du
souffle
pocalyptique
ui
porte
es chefs-d œuvreomans.
L ana-
lyse syntaxique
prouve
au
contraire
a
très stricte
ppartenance
du
tympan
e
Conques
au
champ
de
la
plastique
romane.
Et,
si
la
formi-
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 141/155
139
dable
originalité
e
l œuvre
ne
peut
être
esquivée,
lle doit être refor-
mulée
afinde
prendre
ens.
De
ce
point
de
vue,
a
démonstration
appuie
sur
les
indices
d une
ambiguïté
ui
travaille
œuvre,
lors
même
que
le
Jugement
st le
moment
ù le
Christ
père
la
séparation
bsolue du
Bien et du Mal.
Ainsi,
enfer
e
s oppose pas
terme
terme u
domainecéleste
il
est
porteur
d un
certain
nombre de
positivités
vitalité
carnavalesque,
dénonciation t en
même
temps
hommage
ux
gestes
du
travail,
pré-
sence sous les pieds de Satan d un «beau damné» dont le canon
physique
t
l attitude
ranquille
ont rien à
envier
ux
élus).
Surtout,
le
sculpteur
figuré,
n
position
de
franchissement
ar
rapport
l axe
séparateur
e
tympan,
n
«
rescapé
de
la 25eheure
,
arraché n
extremis
aux
griffes
e
Satan.
Tranché ui-même
ar
la
limite entre
les deux
mondes,
l
est le
symbole
de
l homme
pécheur
(à
qui
s adresse le
tympan),
n
qui
le Bien et
le
Mal
sont mêlés et
qui,
malgré
tout,
era
sauvé.
Un tel
mélange
st cela
même
qui
caractérise e
présent
e
l Histoire,
au
contraire u
moment e
la
Révélation
schatologique
ù
l opposition
diamétrale u
Bien et du
Mal suffit
lire le
monde. Attaché
omme
toutes es imagesduJugementernier articulere présent t le futur,
le
temps
historique
t
le
temps
de
l au-delà,
e
tympan
de
Conques
tire son
originalité
e
la
place
considérable
u il
fait
à
l histoire la
catégorie
de
l intermédiaire
ue
le monde
force à
prendre
n
compte
se
donne
encore
à voir au
momentde sa
fin. Face aux
difficultés,
propres
au
système
féodal ou
relatives à
l émergence
de nouvelles
structures
ociales,
qui
sont
clairement
voquées
en
enfer,
e
tympan
réaffirmees
valeurs
bénédictines
raditionnelles
en
premier
ieu,
le
rôle
médiateur es
moines).
Ces
derniers ont
ubir au
combateschato-
logique
une
actualisation,
t
mêmeune
localisation
rès
poussée
(sainte
Foy,
montrée dans
son
église même,occupe une position-clé ansl économie du
Jugement).
tel
point
que
le Christ doit se
départir
de
sa
position
riomphale,
énéralisée
ans l art
roman,
our
accomplir
lui-même,
n
un
geste
dissymétrique
nique,
un
partage
plus que
jamais
problématique
t en
même
temps
nécessaire
pour
perpétuer
la
puissance
des
moinesde
Conques.
Le
triple
mérite de ce livre
est de
proposer
une
méthode,
d en
mettre n
œuvre
expérimentation
t
d en illustrer
a
réussite. Une
méthode
qui n appartient
as
en
propre
à
l auteur
puisqu elle
repose
en
particulier
ur
les travauxde M.
Schapiro
et
que
d autres n
savent
les vertus.Une
expérience,
uisque
pour
la
première
ois a
démarche
syntaxique insi définie emploieà rendre ompted une œuvreaussi
complexe,
ans
son unicitié
t sa
totalité.Un
succès
tant
l entreprise
est menée avec
brio,
déterminationt
finesse on
n en
finirait
as
de
rapporter
es savoureux
détails
que
l auteur
met en
lumière.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 142/155
140
Le
livre de J.-C. onne est un
guide
précieux
dans un
domaine
de
l art encore étonnamment
nexploré,
aissé
presque
vierge par
une
histoire
e
l art
dépourvue
outils,
énéralement
ondée ur le
principe
d une déroutedes
significations
t encombrée
ar
des modes de lecture
anachroniques.
Aussi,
l
n est
pas
abusif de
dire
qu avec
ce
livre nous
commençons
e voir l art médiéval.
Jérôme
Baschet
Monique
Bourin
-
Robert
Durand,
Vivre
au
village
au
Moyen
Age.
Les
solidarités
aysannes
du XIe au XIIIe siècle. Collection
a
passion
de
l histoire,
Messidor
/
Temps
Actuels, aris,
1984,
58
p.
Cetteétude claire aborde d une manière
riginale
a vie des
paysans
médiévaux
dans leur
village depuis
le
XIe
siècle,
où naissent
les
villages
et où se mettent n
place
deux
systèmes
d encadrement es
hommes la
paroisse
et la
seigneurie,usqu au
XIIIe
siècle,
période
où
la vie
villageoise
onnaît on
apogée,
avant de s essouffler.es auteurs
ont
choisi comme
trame
es
solidarités u
pratiques qui
amènent es
hommes
se
rapprocher
es uns des autres dans
le
cadre
du
village
quelles que
soient es
différencese
plan,
d aspect général,d apparte-
nance
géographique.
e thème articule utour de deux
grands
axes
-
les
types
de
rapprochement
es hommes
•
solidarités amilialesnotamment
ans
le
cadre de la cellule
conju-
gale qui
semble
être
la normeen
milieu
paysan
• solidarités
aroissiales,
nracinées utour de
l église
et du
cimetière,
se manifestantssentiellement
ar
les
pratiques
de dévotion
messes,
fêtes,
donations... et les institutions haritables
confréries,
ôpi-
taux,
éproseries...
sous
la
plus
ou moins
grande
autoritédu
curé
•
solidarités
illageoises
ace au
ou avec le
seigneur ui
impose
très
souventdes
usages
communs,
léments
uridiques
de
rapprochement
notamment
ans la
fixation
es coutumes
villageoises.
-
la
pratique
de
ces
solidarités,
u comment ont vécues ces formes
communautaires
•
par l opposition
u
monde
extérieur,
a
différence,
a méfiance
oire
le
rejet
de
l étranger,
ar
le sentiment
appartenance
une
même
communauté
ui
a
tendance
gommer
es
tensions
nternes
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 143/155
141
•
par
les
pratiques agraires
notamment n
certains
ieux
-
moulin,
four,
pressoir,
ommunaux et
à certains
moments
de
l année
agri-
cole
-
moissons...
,
mais surtout
par
l intermédiaire
es
usages
collectifs
•
par l organisation
e la
défense,
e
la
justice
mais
plus
encore
par
l attitude ace à
la
seigneurie
anale afin d en
contrer es éventuelles
exactions
•
par
la créationd institutionsommunales
omme es assemblées
des
villageois,
lorissantesux XIIe et XIIIe
siècles,
périodeque
les auteurs
qualifient
e
«
démocratie u
village
.
Avec e
XIVe
et le
XVe
siècles surviente
temps
des
grandes
révoltes
paysannes
t de leur échec
qui marquent
e
temps
de
«
l ouverture
géographique,
ociale
et
peut-êtredéologique.
Les
exemples
qui
jalonnent
ce
livre,
pris
dans
l espace français
-
avec
quelques
aperçus
dans le monde
britannique
t
germanique
et dans
l espace
méditerranéen
deux
cartes
précisent
a
localisation)
permettent oujours
de
nuancer,
parfois
même
d opposer,
es
aires
géographiques.es conclusions es auteurs onttirées vec de multiples
précautions
afin d éviter toute
généralisation
busive. Cet
ouvrage
sérieux,
fruit
d une
enquête
et
d une réflexion
minutieuses,
met en
lumière n
aspect
assez méconnu e la
vie rurale les
villageois
cteurs.
Nicole
Defoug
ChiaraFrugoni, nalontana ittà.Sentimenti immagini el Medioevo
Einaudi,
Turin,
983.
On s est
déjà beaucoup occupé
de
l évolution
u
phénomène
rbain
à
travers
e
MoyenAge,
t
ce,
sous des
angles
divers
politique,
cono-
mique, organisation
e
l espace,
etc. La forme de réalité à
laquelle
s intéresse,
ans
l ouvrage
dont
il
est
question
ici,
l historienne
et
historienne es
images)
italienneChiara
Frugoni
est
celle
des
repré-
sentations
mentales. our cerner
u
plus
près
cet
imaginaire
médiéval
de
la
ville,
elle a recoursà
la
fois
aux
textes
et à la
peinture, xpli-
quantau débutde son livre ombien l lui paraîtrait rtificiel e traiter
séparément
es
types
de
documents ontc est
ustement
a
coexistence,
l éclairage réciproque
qu ils jettent
es
uns sur les autres
qui
cons-
tituent
ujourd hui
notre
hance de
saisir
quelque
chose de la
percep-
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 144/155
142
tion médiévale
de
la
ville.
Images
et textes sont
donc
sollicités
en
proportions
gales.
On
tente
d en conserver
a
spécificité
t,
dans les
rapprochements
ui
s imposent,
e
ne
pas
les
prendre,
omme cela
a
trop
souvent
été
fait,
comme
simples
illustrations
u
commentaires
les
uns des autres.
Il existait
déjà
un
certain
nombred études
ponctuelles,
ur
la
ville,
vue
par
un auteur
particulier
u à
un
moment
précis
du
MoyenAge.
C est
un
aperçu
d ensemble
de la
conception
médiévale de la
ville,
d Isidore de Sévilleaux sermonsde Giordanode Pise, au XIV* siècle,
des ivoires
carolingiens
ux
fresques
des
Lorenzetti
u de
Masaccio,
que
veut
nous donnerChiara
Frugoni.
e
travail
ne
consiste
pas pour
autant faire
un
catalogue
des
images
et des textes e
rapportant
la
ville. C est
au contraire
ar
des
choix,
des
juxtapositions,
es confron-
tations habiles et
parlantes
que
l on tente
de mettreen
place
les
contours
de
ces villes
telles
qu on
les
voyait
u
Moyen
Age.
Pour
rendre
ompte
au
plus
près
des
changements
t des facettes
de
l image
médiévale de la
ville,
Chiara
Frugoni
travaille dans
un
jeu
de va-et-vient
ermanent
t serré non
seulement ntre
es textes
et les images peintesmais entre e généralet le particulier,ntre e
recours
ux
exemples
raditionnels
Isidore
de
Séville,
es
fresques
des
Bon et Mauvais Gouvernements
e
Sienne...)
t
l appel
à des documents
peu
utilisés
usqu alors,
ou
l interrogation
u
«
connu sous
un
angle
nouveau
le
panneau
de la Tentation
u Christ e la Maestà
de
Duccio,
par exemple).
L organisation
u
livre est
telle
qu elle
rend tout à fait
praticable
la
lecture
ndépendante
e chacun des
six
chapitres,
hacun
pouvant
être vu comme un
essai
autour
d un thème
particulier
citons
au
passage l analyse
très ntéressante
u rôle tenu
par l image
de la
ville
antiquedans l attitude e Théodoric l égardde Ravenne ch. 2), les
précautions
prises
pour
éviter anachronisme
ans le traitement u
genre
ittéraire
ypiquement
taliendes Laudes
civitatum
ch. 3).
L évo-
lutionde
l image
de la ville à travers e
Moyen
Age
ne
suivant
pas
ime
linéarité
hronologique imple,
l arrivera
réquemmentu un chapitre
«
revienne n arrière du
chapitre qui
le
précède par
le
choix de
certains
de
ses
textes u de ses
images
ainsi à
l époque
du
Bon et
du
Mauvais Gouvernement e
Sienne,
dans d autres contextes
picturaux
commecelui des
scènes de
la vie de saint Nicolas de Bernardo
Daddi,
la ville
pourra
être
figurée
d ime
manière
plus proche
de certaines
imagescarolingiennes
ue
de
celle
d Ambrogio
orenzetti des
peintres
commeFraAngelico tiliseront,ciemment ans doute,dans leurrepré-
sentation
de la
ville,
des traits
que
l on
aura
repéré
comme carac-
téristiques
de
périodes
bien antérieures.
outefois,
n
peu
de recul
fait
apparaître
la
perspective
chronologiquegénérale
qui
organise
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 145/155
143
l ensemblede
l ouvrage.
n
pratiquant
ne lecture
ordonnée,
n verra
se
préciser
image
d une ville
plus
terrestre,
roître
on
humanisation,
émerger
u sein de ses
représentations
a
figure
umaine,
de
plus
en
plus
tangible,
e
plus
en
plus grouillante,
ar
le
biais du saint et
de
l évêque
d abord,
puis
du
donateur,
des différentes
atégories
de
la
sociétéurbaine t de leurs valeurs
aïques.
Temporellement
t
spatialement,
analyse
se
resserre
u fur et à
mesure
que
l on
avance dans le livre. On
part
d une
description
généralede la ville occidentalepost-antique,e ses muraillesprotec-
trices
et
omniprésentes ui
coupent
court à toute
autre tentative e
figuration,
e sa
référence
irecte
t
quasimentunique
à
la Jérusalem
Céleste,
mage
de la ville
qui change peu malgré
a variété des docu-
ments,
mage
où le détail
et
l anecdotique
n ont
pas
de
place.
Et l on
finit ur un
chapitre,
e
beaucoup
le
plus long,
entièrement onsacré
à
l analyse
de la
fresque
des Bons
et
Mauvais
Gouvernementsu
palais
public
de
Sienne,
nalyse
qu éclairent
es textes
ontemporains
u cités
par
des
contemporains.
a
findu
livre
s oppose
au début
qui
diversifie
les citations t les
images.
Mais si le
rapport
de l auteur à ses docu-
ments est
tel,
ce
n est
pas
que
l on
passe
d une volonté de rendre
compted une image généralede la ville au Haut MoyenAge à un
intérêt
our
une ville
unique
du
XIVe
siècle ce sont les
images
elles-
mêmes
qui
changent
t
impliquent
ette concentration
e l attention
aux
constructions
temporelles
t
répétitives
u début du
Moyen
Age
répondront
partir
de la fin du XIIIe
siècle,
des
œuvres
comme
la
Fontaine
Majeure
de Pérouse
ou les
fresques
des Bon et Mauvais Gou-
vernements e
Sienne
qui
sont
à
elles seules
de véritables
rogrammes
iconographiques,quivalents
n
quelque
sorte sur
le
plan politique
et
social des
grands
programmes ncyclopédiques
écrits
par
Emile
Mâle
pour
es cathédrales
rançaises.
Qu en avançantdans le Moyen Age, on voie, dans les nouvelles
images
de la
ville où
figurent
es éléments
architecturaux aracté-
ristiques
d une ville
particulière
t les citadinsdans
des scènes de leur
vie
quotidienne,
merger
es
valeurs urbaines
aïques
est
aujourd hui
une idée banale Una lontana città n est
pas
la
simple
llustration
e
cette idée. Une des
grandes
qualités
des
analyses
de Chiara
Frugoni
est de
ne
pas
«
croire les documents. lle nous
montre
ue
le
«
réa-
lisme
plus grand
de la
peinture
e la
findu
MoyenAge
est
tout aussi
fabriqué,
out aussi
éloigné
du réel
que
les murailles
plates
des minia-
tures
carolingiennes.
es
effets
des
Bon et Mauvais
Gouvernements
qui
se fontface sur les murs
du Palais Public
de
Sienne et où
l on
peut à son Dôme,à ses portes,reconnaîtrea ville,sont en quelque
sorte es
transpositions
aïques
et
terrestres es Paradis
et des
Enfers
des
images
de
Jugement
ernier.
a Sienne du XIVe siècle
qui
connaît,
on le sait
par
les
textes,
ne
période
difficile
émeutes
t de famines
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 146/155
144
au moment où
Ambrogio
Lorenzetti
peint
les murs
de
son Palais
Public,
n est
pas,
sinon
par
des
détails comme ceux du costumeou de
l architecture,
ur les
fresques
que
nous
voyons
aujourd hui.
C est la
nouvelle
mage
du bien et du
mal,
de
la
perfection
t de l horreur
qu analyse
Chiara
Frugoni
en éclairant es
fresques
par
des textes
contemporainsRemigio
de
Girolami,
Giordano
da
Pisa)
ou
antiques
cités
par
des
contemporains
textes
d Aristote,
e
Cicéron...),
es nou-
velles valeurs
de
paix,
de
tranquillité,
ù chacun
vaque
gaiement
ux
occupations
ui
conviennent son
rang,
aleurs
qui
viennent
emplacer
une autre ville où la perfection tait synonyme e muraillesbien
closes
et
de
pierresprécieuses.
L expression
t ses
moyens
nt
changé
mais
c est
toujours
a ville déale
qui
est
peinte
la
manière,
emblé-
matique,
universelle,
iératique
est devenue
discursive,
lle
raconte,
multiplie
es
détails,
s organise
dans un cadre
qui
devientun
espace
et le lieu
d une
temporalité.
Une
des
grandes
réussites
du livre
de Chiara
Frugoni
est,
pour
décrirecete
nouvelle
ville
en
formation,
en
répéter
dans
sa forme
le
mouvement. n
est
pris
à
sa
lecture,
omme dans ces
images
des
XIV
et XV*
siècles
qui,
commençant
travailler a troisième imen-
sion,montrent la fois une villeou un édificedans son ensemble n
même
temps que,
encore
médiévale,
elles
échappent
aux
règles
du
point
de fuite
unique
pour
mettre n valeur tel ou tel
aspect.
Le livre
contient
9
images
noir et blanc de bonne
qualité
où
se
mêlent
es
représentations
rèscélèbres d autres
ui
le
sont
beaucoup
moins.
Ce
cahier est une
partie
essentielle e
l ouvrage.
l
donne
corps
par
les
agrandissements
e certains
détails,
les
juxtapositions
par-
lantes
qui
y
sont
faites,
au discours de Chiara
Frugoni.
Une
telle
exploitation
e
l image
serait à souhaiter
pour
bien
des
sujets.
On
y
abandonne es critères
de l histoire
e l art
classique,
on sait trouver
dansdes œuvres« secondaires un intérêt u pointde vue de l histoire
de la
figuration.
ême
si l on
passe parfois apidement
ur
des
analyses
formelles
ui,
à
être
développées
renforceraient
ncore e
discours de
l auteur,
n
y
dépasse,
c est
certain,
a
problématique
conographique
traditionnelle.
Christine
apostolle
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 147/155
QUADERNI
MEDIEVALI
N° 19
-
giugno
1985
Mario
SANFILIPPO,
Ricordo
di
Raoul
Manselli
SAGGI
Paolo
GOLINELLI,
Dal santo
del
potere
l santo del
popolo
Culti
mantovani
all'alto
al
basso
Medioevo;
Walter
HABERSTUMPF,
Tra
Monferrato
Bisanzio
un testamento
del
1338 di
Teodoro
I
Paleologo MelitaCATALDI, arabola della poesia della natura Lettura
di
cinque
testi antico-irlandesi
II.
L'ALTRO MEDIOEVO
:
Fabio
TRONCARELLI,
«
Nella
mia
fine
è
il
mio
principio
. Il
fantasma
del Medioevo
n
Joyce
Ed. Eliot Mario
SANFILIPPO,
l
«
Parsifal
di
Wagner
a mito mito Vito
ATTOLINI,
Tre
altri Medievi
ugli
schermi
INCONTRI
AnnaLaura
TROMBETTI
BUDRIESI,
Politica e cultura
nell'Italia
di Federico
I
;
Raffaele
ORIO,
Icona e
linguaggio
eligioso
a
Bisanzio;
Andrea
ZORZI,
I
forestieri
elle realtà locali Massimo
VALLERANI,L'orìginedell'Università l'organizzazione el sapere;
Giovanna
PAOLIN,
Donne e uomini nella
vita
spirituale;
Sandra
ORIGONE, Genova,
Pisa e
il
Mediterraneo;
Rosa
Maria DENTICI
BUCCELLATO,
Tecnica e società
nell'Italia dei secoli
XII-XVI
LETTURE
Enza
COLONNA,
essicografia
mediolatina
Schede Incontri avvicinati
Libri
ricevuti
Direttore
Giosuè
Musca.
Redatori:
Pasquale
Corsi,
Raffaele
orio,
Vito
Sivo. Redattori
orrispondenti:
ranco
Cardini,
Massimo
Monta-
nari,MarioSanfilippo, iuseppeSergi, alvatoreTramontana.ndirizzo
della
redazione:
Giosuè
Musca,
Via
Che Guevara 37
D,
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80/510445.
Nel 1985
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spa,
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0100Bari. Telefono
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JOURNÉES
RÉMOISES
1984
«
LE
TEMPS ET LA
DUREE
AU MOYEN
AGE
ET A LA
RENAISSANCE
»
Colloque
organisé
par
le
Centre
de Recherche sur la
littérature
du
Moyen
Age
et de la
Renaissance
de
l'Université de Reims
les
28,
29 et 30
novembre
1984
Ce
colloque
était le
premier
organisé par
le
Centre
universitaire
rémois.
Des
participants
'étaient
déplacés
de
plusieurs
régions
de
France
et de
l'étranger our
y
assister. On a
généralement pprécié
qu'il
réunisse
médiévistes
t
seiziémistes,
abituellement
éparés
quand
il
s'agit
de
travaux
ntéressants
Le
thème,
ort
riche,
n'a
pas
été
épuisé
par
les
cinq
demi-journées
de
communications,
l
s'en faut.
Les
approches
n
ont été
fortdiverses»
Si
tous les
conférenciers,
u
presque,
rencontraient
e
temps
dans
son
aspect
grammatical,
eul
J. BATANY
n fit
e centrede
sa
réflexion.
a
fonctionittéraire u tempsfutplus souvent traitée par les médié-
vistes,
E.
BAUMGARTNER,
J.
CERQUIGLINI,
M.-G.
GROSSEL,
A.-J.
URDEL et
B.
GUIDOT,
sans
parler
de
plusieurs
seiziémistes).
D'autres
R. COLLIOT)
parlèrent
u
temps
comme cadre
d'événements
divers.
Mais cette
répartition
st
simplificatrice
l'excèset ne se
justifie
que
commefacilité
e
présentation
les Actesde
ces Journées
émoises
(à
paraître
ourant1985 la
Librairie
Nizet)
rendront
lus
exactement
justice
aux
mérites
t à
l'originalité
e
chacun.On ne
sera
pas surpris
de
constater
que
le
temps
est
partout
mais
toujours
insaisissable.
Bien des
questions
intéressantes 'ont
pas
ou
guère
été
posées
il
reste à
interroger
es
musicologues,
es
philosophes,
es historiens.
Espérons qu'un secondcolloque sur le temps,un peu plus tard,com-
plétera
ce
qui
n'a
pas
été dit.
Peut-être
es travauxde novembre
984
à Reims serviront-ilse
points
de
départ
à de
nouvelles
recherches
t
favoriseront-ilse nouveaux
ontacts C'est le souhait
e
plus
cher des
organisateurs
u
colloque.
Les
prochaines
Journées
émoises auront ieu
en
janvier
1986 le
16
sera
une
journée
d'études sur Thibaut de
Champagne;
les
17,
18
et
19
serontconsacrées un
colloque
interdisciplinaire
ur
le Sonnet
à la Renaissance.
Pour tousrenseignements,'adresser YvonneBellenger u Danielle
Quéruel,
Faculté
des Lettresde
Reims,57,
rue
Pierre
Taittinger,
1100
Reims.
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 149/155
-
ï
ARCHÉOLOGIE MÉDIÉVALE
TOME
XIV/ 1984
•
volumes nnuels
omprenant
es articles e
fond
souvent
surdes fouilles
écentes),
ne
chronique
vec notice
onsacrée
à chacun es chantiersuvertsnFrance t unbulletinritique.
•
à
propos
de
quelques
types
de
fibules nsées de
l'époque
des
grandes
nvasions
rouvées n Gaule
nécropole
t habitat
de Saint Jean
des
Vignes
à
Montfrin
Gard)
à
propos
de
quelques
exemples
de
pratiques
médicales t
chirurgicales
n
Basse Normandie
endant
e
MoyenAge
etc.
résumés
rançais-anglais
19
x
25 /432
p.
/broché
5 tabi. 8
cart. 105
pl.
fig.
u
phot.
ISBN
2-222-03323-3
60 F
librairie,
entes,
ublicité
■
295,
rue
saint
acques,
75005
paris
tél.
26.56,1
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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L'ÉCRIT-VOIR
revue
d'histoire des arts
publiée par
le
Collectif
our
'histoire e
Vart
t
les Publications
e
la
Sorbonne
L'ECRIT-VOIR ouvre
ses
colonnes
aux
articles d'étudiants
et de
chercheurs fin
qu'ils
puissent
communiquer
un
plus
vaste
public
le
résultatde
leurs
travaux.
Par
la
publication,
es
maîtrises
et des thèses
soutenues
chaque année,
des
informations
oncernantles bibliothèquespécialisées, es centres e rercherchet des colloques
L'ECRIT-VOIR
tentede rendre
a
recherche
moins
obscure et
le
droit
à
la
parole.
Reste la
lecture de
6 numéros
déjà
publiés
:
N° 5
Approches
de
l'art
actuel.
N°
6
Autour de
Jean Laude.
Dialogue
entre les
cultures.
N° 7 A paraître.
M.
Guillaume:
De
scriptione
Christi in
terra
/
E. Jollet D'un
sujet
générique
la
question
de
la
figure
dans les fêtes
galantes
d'AntoineWatteau
/
C.
Bernard
Textiles noirs-américains t Antil-
lais :
approche
d'un
art
contemporain
/
M.
Costantini
Un
moment
dans
l'histoire
du
nimbe
/
B.
Vouilloux: De l'écrit
à
l'image.
Esquisse
d'un
programme
/
L.
Kirby:
La femme
et le
train
dans
le
cinéma
primitif,
lassique
et
expérimental
(1895-1929) /
B.
Gervais Le
versant de la
création. Réflexions
ur
l'acte
créatif
de Hegel à Ehrenzweig/A. Günthert Détruire a peinture.Contri-
bution à l'étude d'une
logique politique
de
l'image
totalitaire
/
M.
Lamy
De l'œil
charnel à l'œil
spirituel
/
Trad.
P. Dubus.
E.
Panofsky
Nebulae
in
pariete.
Notes
sur
l'éloge
de Dürer
par
Erasme
/
Dossier
sur l'histoire de l'art en
Grande-Bretagne,
es
entretiens vec
F.
Haskell,
E.
H.
Gombrich,
L.
Nead,
A.
Potts.
N°
8 A
paraître
Les
arts
visuels
et
la mort.
Figures
du
trépas,
figure répassée.
L'ECRIT-VOIR,
renseignements
et abonnements
(deux
numéros
100
F
pour
la France et 150 F
pour
l'étranger)
au
3,
rue
Michelet,
75006 Paris.
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vente dans toutes
les
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8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 152/155
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livres E.
MARTIN,
Le
Moyen
Age
Paris,
1922. our es
articles O.
MAROTIN,
«
Le
Bas
MoyenAge
,
dans
Archives
u
Massif
central, X, 1915,
.
4-23.
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Les
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constituant
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simple
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L'auteur
n'indiquera
pas
d'espace
supplémentaire
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para-
graphes, auf s'il souhaite ndiquer medivisionparticulière e son
texte.
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convient
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8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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Imprimerie
raphosprint
44,boulevardFélix-Faure
92320
Châtillon-sous-Bagneux
Dépôt légal
4* trimestre
985
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
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seront
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La
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se
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e droit
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un
numéro sur les
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dans
l'Orient
Byzantin,
ous la
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d'E.
Patlagean
et
un
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«
MoyenAge
et
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Toutes
les
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et
propositions
d'articles
sont
les bien-
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LISTE DES LIBRAIRIES DEPOSITAIRES
DE
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Librairie
Saint-Michel-Sorbonne,0,
rue
de la
Sorbonne,
75005
Paris
Librairie
Gallimard, 15,
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Raspail,
75007 Paris
Librairie
Tschann,
84,
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75006
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Daudet-Alésia,
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Bonaparte,
75006 Paris
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La
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Champion,
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quai Malaquais,
75006 Paris
FNAC
Montparnasse,
136,
rue de
Rennes,
75006 Paris
FNAC
Forum,
Forum
des
Halles,
1 à
7,
r.
Pierre-Lescot,
5001
Paris
FNAC
Strasbourg,
La
Maison
Rouge,
22,
place
Kléber,
67000Strasbourg
8/9/2019 Medievales - Num 9 - Automne 1985
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-9-automne-1985 155/155
ISSN
0751-2708
SOMMAIRE N° 9 / AUTOMNE 1985
Page
Avant-propos
François
JACQUESSON
3
L'histoire ntre
e
Cosmos et
le Hasard
entrevue
vec Robert
DELORT
7
LANGUES
La
parole
de l'autre
Yvonne
REGIS
CAZ
AL
19
Expliquer
-
Justifier Grammaire t
poétique
de la cause
en ancien
français
Annie
DELBEY
35
Le lai de
Doon,
ou le fonctionnement
e
la brièveté
Catherine
RIZZA
55
L' «Amorde Lonh» du grammairien
Jean-Charles
UCHET
64