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Le pouvoir en chantant. Tome II: Une affaire d'État… impériale by Sabine TREBINJAC Review by: Aurélie Névot Cahiers d'ethnomusicologie, Vol. 22, mémoire, traces, histoire (2009), pp. 287-290 Published by: Ateliers d'ethnomusicologie Stable URL: http://www.jstor.org/stable/20799695 . Accessed: 17/06/2014 07:20 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Ateliers d'ethnomusicologie is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers d'ethnomusicologie. http://www.jstor.org This content downloaded from 188.72.126.25 on Tue, 17 Jun 2014 07:20:28 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

mémoire, traces, histoire || Le pouvoir en chantant. Tome II: Une affaire d'État… impérialeby Sabine TREBINJAC

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Le pouvoir en chantant. Tome II: Une affaire d'État… impériale by Sabine TREBINJACReview by: Aurélie NévotCahiers d'ethnomusicologie, Vol. 22, mémoire, traces, histoire (2009), pp. 287-290Published by: Ateliers d'ethnomusicologieStable URL: http://www.jstor.org/stable/20799695 .

Accessed: 17/06/2014 07:20

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Livres 287

Sabine TREBINJAC: Le pouvoir en chantant Tome II: Une affaire d'?tat... imp?riale. Nanterre: Soci?t? d'ethnologie, 2008. 214 p.

Dans le premier tome du Pouvoir en chantant consacr? ? Hart de fabriquer une

musique chinoise, publi? en 2000, Sabine Tr?binjac -

charg?e de recherche au CNRS (LESC, Nanterre)

- montre par quels processus, en Chine contemporaine, la ?tradition? devient le ?traditionnalisme d'?tat?. En appuyant son analyse sur

les transformations de la musique ou?goure par l'?appareil gouvernemental? afin

de la rendre harmonieuse avec le r?gime en place, elle conclut que ?le monde

des sons est envisag? comme un champ symbolique de l'ensemble du politique? (2000: 375). S'interrogeant sur la continuit? historique entre la Chine contem

poraine et la Chine ancienne ? propos de la musique et de ses institutions, elle

propose de remonter la chronologie des faits dans le second tome du Pouvoir en chantant intitul? Une affaire d'?tat... imp?riale. Elle entreprend alors d'embrasser

un vaste champ historique allant du XIIe si?cle av. J.-C. au XXe si?cle.

La premi?re partie, ?Un rescrit ancien sur la musique?, met en avant que les confuc?ens furent les premiers ? conceptualiser l'importance accord?e ? la

musique en Chine. L'auteure base son argumentation sur le Yueji, Notes sur la

musique, un trait? ?crit au Ier si?cle av. J.-C, dont elle propose une traduction in?

dite (pp. 24-48) avec le texte original en annexe (l-XV). L'analyse du texte r?v?le

que les pratiques ayant trait aux ?affaires musicales? ?taient plus politiques que musicales, ? tel point que Sabine Tr?binjac intitule le premier chapitre ?Le Yueji: un trait? ?a-musical??. Yue, la musique

- s?mantiquement associ?e ? la danse et

? la po?sie - ?tant reli?e ? la structure sociale par le biais des rites qui r?gulent le

monde, l'harmonie musicale est l'harmonie cosmologique et universelle. L'organisa tion du monde influe sur la musique qui a ?galement une incidence sur l'ordre uni

versel (p. 50). De la sorte, observer la musique de son peuple permet au souverain

de prendre connaissance de l'?tat de son gouvernement. A l'inverse, la ?bonne?

musique compos?e par un ?bon? souverain et entendue par le peuple g?n?re des

sentiments vertueux. Et chaque nouvel empereur ?tant porteur d'une nouvelle vertu

li?e au mandat c?leste, chaque dynastie ?tait rythm?e par un style musical diff?rent. Dans la deuxi?me partie, ?Du symbole politique aux institutions musicales

d'?tat?, S. Tr?binjac s'int?resse aux institutions responsables des ?affaires musi

cales? dans une analyse diachronique (llle-XXe si?cle). Le deuxi?me chapitre, intitul? ?Histoire du yuefu des Han?, porte sur le bureau de la musique, yuefu, inaugur? par l'empereur Wu des Han au IIe si?cle Avt J.-C. Ce bureau prit la

place d'institutions ant?rieures. Mais, s'il s'agissait auparavant d'une ?bureaucratie

symbolique?, une efficacit? r?elle fut pr?t?e au yuefu. Ses trois plus hauts fonc tionnaires avaient d'ailleurs un titre militaire: musiciens, ils ?taient comme des

soldats en charge de pr?server l'harmonie (p. 79). Ils devaient assurer la coh?sion

territoriale en int?grant les traditions musicales de l'ensemble de l'empire (p. 76).

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Dans le troisi?me chapitre intitul? ?les diff?rentes institutions musi cales d'?tat au fil des dynasties?, l'auteure rel?ve les passages contenus dans

les vingt-cinq ?Histoires dynastiques? en rapport avec la musique; les textes

en chinois - datant de la dynastie des Wei (220-264) jusqu'? celle des Qing (1644-1911)

- et leur traduction sont plac?es en annexe (pp. 98-133), un tableau

r?capitule les instances de tutelle, les titres des responsables et leurs status

(pp. 134-140). Il appara?t que ?toutes les dynasties successives ont eu au moins une institution musicale rattach?e aux plus hautes instances de l'organisation

?tatique? (p. 95). S. Tr?binjac remarque par ailleurs que les dynasties non han accord?rent la plus grande importance aux institutions musicales - comme pour

prouver qu'elles ?taient aussi vertueuses que les autres (p. 96). Les t?ches des fonctionnaires de ces diverses institutions musicales sont ?tudi?es dans la der

ni?re partie: ?Le travail musical effectu? dans les institutions d'?tat?. Le quatri?me chapitre, ?Du tube de bambou ? l'embl?me politique?, s'in

t?resse ? la manipulation des ?talons sonores qu'il fallait r?gler ? chaque chan

gement de dynastie, d'o? le lien que l'auteure ?tablit avec l'embl?me politique: ces tubes de bambou ?taient li?s aux rites, tous deux associ?s au souci confu

c?en d'ordre et de hi?rarchie sans lesquels l'empereur ne pouvait gouverner. S.

Tr?binjac explique dans le d?tail la th?orie de la construction des tubes sonores, la fa?on de calculer leur longueur physique, le syst?me de progression par quinte et par quarte altern?es. Proposant de les ?entendre?, elle conclut qu'une variation de plus de cinq demi-tons est observable entre les fondamentaux des

diverses dynasties. Le dernier chapitre, ?Quelques t?moignages anciens de musiques

transform?es?, traite des collectes, de l'int?gration puis des remaniements des

musiques non han : incorporer les musiques ?trang?res, c'?tait valider l'expansion de l'empire. La transmission entre les r?pertoires locaux et la tradition musicale

de l'empire se faisait par un changement de statut: les musiciens locaux deve

naient des musiciens officiels. Ils enseignaient ensuite aux musiciens fonction

naires puis assistaient ? la transformation de leur propre tradition musicale. Ils diffusaient finalement cette nouvelle tradition dans leur pays d'origine (p. 174). La premi?re compilation po?tico-musicale chinoise n?e de collectes est le Livre des odes, shijing. La r??criture a port? sur la forme linguistique et sur la forme musicale que les fonctionnaires ont tent? d'accorder avec la musique rituelle et le

go?t des ?gens de bien?. L'auteure ?voque aussi la pi?ce Mohedoule, originaire de l'ouest. Int?gr?e sous la dynastie des Han, elle faisait partie du r?pertoire mili taire. D'apr?s S. Tr?binjac, en entendant ?sa? musique, l'ennemi ?tait d?concert?

et le voleur excit? par la possession du ?mana? de l'autre qui ?tait un vainqueur

potentiel (p. 190). Ce travail de longue haleine est remarquable. La clart? du propos

- bien

qu'un peu r?p?titif dans les deux premiers chapitres - est d'autant plus impres

sionnante au regard de la masse d'?crits traduits et analys?s. Diff?rents champs

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disciplinaires interviennent: l'anthropologie, la philosophie et l'acoustique - l'au

teure souligne elle-m?me que la mesure de la variation entre les fondamen

taux des diverses dynasties est ?une avanc?e musicologique notoire dans la

recherche sinologique? (p. 193). Le panorama historique examin? est par ailleurs fort impressionnant. La d?marche entreprise par S. Tr?binjac trouve son enti?re

coh?rence par le biais de la musique dont l'imbrication au politique sert de fil conducteur.

Les collectes musicales permettaient de prendre le pouls du peuple. Les donn?es recueillies traduisaient la force du mandat c?leste qui l?gitime le pou voir imp?rial, ? tel point que l'expression ??pr?sentation des chansons et des rumeurs? serait devenue synonyme de ?rapport administratif?? (p. 71, citant

Di?ny (1968: 12)). Si la continuit? historique entre la Chine ancienne et la Chine

contemporaine est incontestable, que dire de la situation actuelle, la Chine ayant ratifi? le trait? de l'UNESCO en 2003 et certaines de ses musiques ?nationales? ?tant d?sormais class?es au patrimoine culturel mondial ? De quel ordre universel

parle-t-on alors? Par ailleurs, si le trait? confuc?en Yueji met au premier plan le

caract?re politique du traitement musical, faut-il pour autant le consid?rer comme

un trait? ?a-musical??

? propos d'un passage du Yueji \ appara?t dans les M?moires historiques de Sima Qian et dans le Livre des rites, S. Tr?binjac nous apprend que des carac t?res d'?criture distincts sont employ?s dans les deux livres (note 56, p. 36): dans un cas est calligraphi? le caract?re qique l'auteure traduit par ?inspiration?; dans l'autre cas appara?t le caract?re homophonique qi, ?instrument?, transcrip tion que S. Tr?binjac retient. Elle traduit donc: ?Ces trois moyens [po?mes, chants et danses] sont ?labor?s dans le c ur humain. Ce n'est qu'apr?s que les instru

ments entrent en sc?ne?. Pourquoi ne pas garder les deux traductions possibles et sp?cifier que qi, ?inspiration?, se rapporte ?galement aux ?souffles?, ? une

?nergie vitale - dans les repr?sentations chinoises, le corps n'est pas s?par? de

l'esprit, il est per?u comme un compos? de substances diff?rentes, fluctuantes et

instables, d'?nergies vitales : qi, jing et shen5 - ? En effet, la musique est le produit d'une ?laboration interne en ce sens

que les sons sont g?n?r?s par les sensations int?rieures comme les sons g?n? rent des sentiments, c'est ?l'intellect qui transforme en sons les sensations pro

voqu?es par les impressions re?ues de l'ext?rieur? (p. 15). ?Les souffles?, qi, semblent ?tre en ?jeu?, au sens propre du terme, au sein des affaires musi

cales. L'apprentissage de la musique ne servirait donc pas seulement ? faire

comprendre que la musique est un symbole et un outil politiques: cette initiation

passe par le corps en relation avec l'ordre cosmique et l'ordre social. De m?me, les coups de tambour donn?s lors d'activit?s militaires ont des ?effets?. Ce qi,

5 Cf. Mark Edward Lewis, The Construction of Space in Early China (New York, State University of New

York Press, 2006:21).

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instrument, influen?ait le moral et l'?nergie qi des troupes adverses (p. 185). De la m?me fa?on, la pi?ce Mohedoule interpr?t?e par les cavaliers de l'empereur sur

le champ de bataille, si elle engendrait sans doute un ??nervement? ou un ?amu

sement?, influen?ait peut-?tre ?galement les qi, les ?nergies vitales des guerriers du camp inverse. Autant de questionnements sur le rapport de la musique au

corps qui enrichiraient la probl?matique de d?part d?j? si passionnante.

AUR?LIE N?VOT

Kelly M. FOREMAN : The Gei of Geisha: Music, Identity and Meaning Ashgate, Hampshire, England, 2008, 143 p.

La geisha japonaise attise la curiosit? et la cr?dulit?. L'Occident la d?peint plus ou moins comme une prostitu?e de luxe, mythe qui d?rive de l'occupation am?ri

caine de l'apr?s-guerre. Des prostitu?es se faisaient passer pour des geishas afin

d'attirer les soldats ?tasuniens qui ont rapidement propag? ce leurre. Ce mythe est tellement enracin? dans l'esprit occidental que beaucoup refusent de croire

qu'il puisse en ?tre autrement. Encore aujourd'hui, la majorit? des textes journa

listiques et autres qui en font ?tat entretiennent cette affabulation, m?me si des documentaires r?cents ont tent? de r?tablir la v?rit?.

Dans ce livre, l'ethnomusicologue am?ricaine Kelly M. Foreman aborde

un aspect de la vie de geisha qui est ignor? par l'ensemble des auteurs et cher cheurs: elle serait au d?part une artiste, la syllabe gei signifiant ?art?. Le temps et l'argent qu'elle consacre ? l'?tude de la musique, du chant et de la danse lui accordent une comp?tence artistique au m?me titre que les acteurs et musiciens

du kabuki] par exemple. En 1629 le shogun ?mit un ?dit qui interdisait aux femmes de monter sur sc?ne; les seuls lieux o? elles pouvaient faire de l? musique et danser devant un public ?taient les salons de th? des quartiers de plaisir.

Cet ouvrage d?crit un m?tier dont la formation est extr?mement exigeante. Traditionnellement au Japon, un artiste de sc?ne ne doit se consacrer qu'? une

forme d'art unique. Celui qui pratique plusieurs arts ou plusieurs styles d'un m?me art sera critiqu? et m?me banni de son ?cole. Chaque ?cole, ou ry?, poss?de son propre style. Un artiste qui est affili? ? un ry? particulier ne peut apprendre le r?pertoire ou les techniques d'un autre ry?. Lorsqu'il obtiendra son shi-han, ou

titre de ma?tre, il recevra un nom d'artiste qui sera indicatif du ry? dont il est issu.

? l'oppos?, les obligations du m?tier exigent de la geisha qu'elle connaisse plu sieurs styles de chants et de danses. Elle doit prendre des cours dans plusieurs ?coles diff?rentes, poss?dant donc plusieurs shi-han. Elle semble ?tre la seule artiste dont cette licence artistique est cautionn?e. D'autre part, ce livre pr?sente un m?tier artistique qui est incompris, m?me au Japon, du fait que le milieu o?

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