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Mesurer les propriétés électroniques des solides 1 Mesurer les propriétés électroniques des solides Cours pour le M2 Concepts Fondamentaux de la Physique Parcours Matière Condensée 2015-2016 Fabrice Bert, Laboratoire de Physique des Solides, Université Paris Sud 11 https://www.equipes.lps.u-psud.fr/m2structure/ Ce polycopié a été rédigé par J. Bobroff ([email protected] ) qui a créé ce cours en 2012 pour le M2 ICFP et en a assuré l’enseignement de 2012 à 2015

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Mesurer les propriétés électroniques des solides

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Mesurer les propriétés

électroniques des solides

Cours pour le M2 Concepts Fondamentaux de la Physique

Parcours Matière Condensée 2015-2016

Fabrice Bert, Laboratoire de Physique des Solides, Université Paris Sud 11

https://www.equipes.lps.u-psud.fr/m2structure/

Ce polycopié a été rédigé par J. Bobroff ([email protected]) qui a créé ce cours en

2012 pour le M2 ICFP et en a assuré l’enseignement de 2012 à 2015

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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Toutes les figures sont des courbes expérimentales obtenues sur une même famille de matériaux, les pnictures supraconducteurs à base de Fer.

Mesure par chaleur specifique de la transition supra

Mesure par RMN du taux de relaxation

Mesure par ARPES de la structure de bande

Mesure par neutrons de l’ordre magnétique

Cartographie par Microscope à effet Tunnel

Oscillations de Haas Van Alphen

Mesure de la surface de Fermi et du gap supra par ARPES

Mesure par RMN de la susceptibilité de spin

mesure par optique de la conductivité

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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Table des matières

I. Fonctions de réponse et corrélations ........................................... 7

A. La théorie de la réponse linéaire ................................................................... 9 1. Susceptibilité uniforme 0 ......................................................................................... 9 Susceptibilité non uniforme (q,) .......................................................................... 11 Relations de Kramers Kronig .................................................................................... 12 4. Lien entre susceptibilité et dissipation ..................................................................... 15 5. Les fonctions de corrélation .................................................................................... 15 6. Théorème de Fluctuation-Dissipation ...................................................................... 17

B. Réponse à un champ magnétique ............................................................... 19 1. Susceptibilité magnétique uniforme 0 .................................................................... 20 2. Mesure de 0 par magnétométrie............................................................................ 27 1. Mesure de 0 par RMN ........................................................................................... 29 2. Susceptibilité magnétique non uniforme (q,) ...................................................... 35 3. Mesure de ’’(q,) par diffusion inélastique de neutrons ........................................ 38 4. Mesure par relaxation en RMN de ’’(q,) .............................................................. 41

C. Réponse à un champ électrique .................................................................. 46 1. Formulation générale .............................................................................................. 46 2. Le cas des métaux : réponse dynamique uniforme ................................................... 47

II. Mesures de la surface de Fermi ................................................. 51

A. Oscillations quantiques ............................................................................... 53 1. Origine des oscillations : les niveaux de Landau ....................................................... 53 2. Les expériences montrant les oscillations ................................................................ 56 3. effets de la température et du desordre, informations accessibles........................... 59

B. ARPES et STM .............................................................................................. 60

Bibliographie 61

Remerciements chaleureux pour leur aide à : Henri Alloul, Fabrice Bert, Frédéric Bouquet, Véronique Brouet, Tristant Cren, Marc Gabay, Antoine Georges, Françoise Hippert, Peter Hirschfeld, Ricardo Lobo, Hadrien Mayaffre, Philippe Mendels, Olivier Parcollet, Cyril Proust, Sylvain Petit, Sylvain Ravy, Yvan Sidis.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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Mesurer les propriétés électroniques des solides

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Dans ce cours, nous allons décrire les approches expérimentales pour déterminer certaines propriétés électroniques dans les solides. En effet, une partie importante des propriétés qui caractérisent la matière condensée est liée aux électrons : la couleur, les propriétés électriques, le magnétisme, la solidité, etc. Les cours de matière condensée généraux proposent en général une approche théorique qui décrit le problème d’un grand nombre d’électrons dans un réseau cristallin (structure de bandes, niveaux de Fermi, etc). Mais ces cours négligent parfois la façon de mesurer expérimentalement ces propriétés. Il ne s’agit pas en général d’un à priori négatif pour les expériences, mais juste d’une impossibilité pratique : il est à peu près impossible de décrire de façon complète les techniques disponibles, tant elles sont nombreuses et complexes. De plus, ces techniques sont souvent en pleine évolution, certaines datant d’il y a seulement quelques années, et ce genre de cours devient donc vite obsolète. Un parti pris consiste à enseigner les aspects théoriques à l’étudiant, et à lui d’apprendre dans le détail pendant sa thèse la technique expérimentale qu’il aura choisie.

Cependant, le physicien théoricien ou expérimentateur doit pouvoir comprendre les résultats expérimentaux publiés dans son domaine en dehors de sa propre technique d’expertise. Prenons l’exemple d’une famille de composés récemment découverts, des supraconducteurs à base de Fer, les pnictures. Limitons nous juste à un des tous premiers articles « de revue » paru un an après la découverte des composés, c’est à dire un article destiné à résumer pout tous de façon simplifiée les résultats déjà obtenus par l’ensemble de la communauté. Les figures de la couverture du polycopié sont pour la pluspart extraites de cet article (http://arxiv.org/abs/0812.0302) :

neutrons chaleur spécifique shift RMN

relaxation RMN conductivité optique photoémission résolue en angle

On voit tout de suite la diversité des notations, des quantités mesurées, et même des modes de représentation. L’objectif de ce cours est de permettre de s’y retrouver dans cette foison de mesures .

Nous allons donc ici essayer de brosser un panorama non exhaustif de quelques techniques représentatives de la mesure des solides. Pour éviter un effet de « catalogue », nous choisirons deux fils directeurs : la mesure des fonctions de réponse des électrons (réponse à un champ magnétique, réponse à un champ électrique...), et la mesure des bandes électroniques (structure de bande, niveau de Fermi, densité au niveau de Fermi...). Nous essayerons pour chaque

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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technique de donner un ou deux exemples caractéristiques dans des systèmes simples bien connus (un métal, un isolant) et également sur un ou deux exemples plus récents emprunts aux recherches actuelles (un système fortement corrélé, un liquide de spin, un supraconducteur à haute température...). Nous essayerons de limiter au maximum le formalisme et les démonstrations, préférant plutôt développer une « culture générale » de ce qu’est la mesure d’un électron dans un solide, et le lecteur trouvera le bagage théorique nécessaire à la compréhension de ce cours dans le cours d’Antoine Georges et Olivier Parcolet.

Enfin, les techniques que nous exposerons concernent pour l’essentiel des matériaux massifs ou des films minces, mais pas des objets de taille nanométrique. Nous ne traiterons pas d’un aspect pourtant également très riche, celui de la mesure des électrons dans des composés nanométriques (la nanophysique) et renvoyons là aussi vers le cours de R. Deblock et T. Kontos.

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I. Fonctions de réponse et corrélations

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Mesurer les propriétés électroniques des solides

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A. La théorie de la réponse linéaire

L’étude des systèmes quantiques solides hors équilibre est très complexe. Une approximation souvent efficace est proposée par l’approximation de la réponse linéaire. On part d’un système à l’équilibre thermodynamique auquel on applique un champ extérieur h(r,t) et on cherche à définir son effet sur une grandeur conjuguée A.

L’approximation de la réponse linéaire consiste à supposé que h est suffisament faible pour que la perturbation A engendrée par h varie linéairement avec h (A ~ h).

est la susceptibilité, qui caractérise la réponse linéaire du système. Le formalisme de la réponse linéaire permet de montrer que est seulement dépendant des propriétés intrinsèques du système non perturbé. Autrement dit, mesurer la réponse d’un système à une perturbation renseigne sur le système lui même à l’équilibre. On peut en particulier montrer que les fonctions de corrélations du système sont directement reliées aux susceptibilités, ainsi que le taux de dissipation de l’énergie. C’est donc un formidable outil pour mesurer les propriétés de la matière comme ses fonctions de corrélation.

Ce formalisme peut être développé classiquement ou quantiquement : dans un fluide classique, dans un système de spin quantique, etc.

Nous allons ici montrer ici quelles susceptibilités il est possible de mesurer dans un solide, et quelles informations on en tire alors. En particulier, nous évoquerons les cas suivants, car ils sont souvent parmi les plus étudiés par les expérimentateurs et théoriciens de la physique des solides dans les laboratoires actuellement :

excitation h grandeur A répondant à cette excitation et mesurée expérimentalement

susceptibilité ou fonction de réponse

A ~ h

corrélations associées

faisceau de Rayons X S(q,) intensité diffusée

densité-densité

champ magnétique H aimantation M susceptibilité magnétique

spin-spin

champ électromagnétique E

polarisation P susceptibilité diélectrique d

charge-charge

champ électromagnétique E

courant électrique j conductivité électrique

courant-courant

faisceau de neutrons partie magnétique de la section efficace

indirectement susceptibilité magnétique

spin-spin

1. Susceptibilité uniforme 0

On considère une perturbation uniforme )( th , c’est à dire la même dans tout l’espace par

exemple un champ magnétique ou électrique homogène appliqué à un échantillon. Ce champ considéré comme perturbation est couplé à une observable A à travers un terme dans l’Hamiltonien (par exemple l’aimantation pour un champ magnétique ou la polarisation pour un champ électrique):

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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)(.)( thAtV

Il en résulte un changement de A . L’approximation de la réponse linéaire propose que ce

changement se traite en perturbation et qu’on garde le premier ordre . La modification de A s’écrit alors :

')'()',()( dtthttAtA

où )',( tt est la réponse linéaire du système, appelée en générale susceptibilité1. <> désigne la

moyenne

n

E nenAnZ

AtrZ

A

00

1)(

1

L’intérêt de cette réponse linéaire est qu’elle ne dépend que des propriétés du système non perturbé. En mesurant la perturbation A du système, on apprend donc quelque chose sur le système à l’équilibre. L’approche de la réponse linéaire constitue un outil très pratique et puissant pour mesurer les propriétés intrinsèques du système à partir de sa réponse à des perturbations extérieures.

Dans la suite, nous supposerons 0A (dite centrée) à l’équilibre thermodynamique. C’est en

général le cas car A n’apparaît que quand le champ h est non nul (par exemple l’aimantation ou la polarisation dans un métal n’apparaît qu’en présence d’un champ magnétique ou électrique et se moyenne à 0 sinon).

Une remarque importante : dans ce cours, nous écrirons la susceptibilité comme un coefficient simple mais c’est en fait un tenseur car elle n’est pas nécessairement isotrope et peut varier avec la direction du champ appliqué.

Nous pouvons maintenant déduire quelques propriétés de base de cette susceptibilité .

Invariance par translation du temps : Le système considéré est en général invariant par translation du temps, donc dépend seulement de t-t’ :

')'()'()( dtthtttA

Si la perturbation est une impulsion très courte, )'()'(0

thth d’où 0)()( httA

donc (t) représente la réponse à un temps t après une impulsion de champ uniforme.

Causalité : la réponse d’un système doit apparaître après la perturbation. Donc en reprenant l’exemple ci dessus d’une impulsion en t=0, (t) est non nulle seulement pour t>0, et plus généralement 0)'( tt seulement quand 'tt . Cette causalité entraine

notamment les relations de Kramers-Kronig que nous verrons plus loin.

Nous laissons le traitement rigoureux de ce formalisme au cours de A. Georges et O. Parcollet, et nous donnons ici un traitement approximatif qui permet de sentir le sens physique des quantités en jeu.

))(*)((')'()'()( thtdtthtttA

La stratégie employée consiste à passer en transformée de Fourier mieux adaptée quand on traite d’intégrales de ce type, car le produit de convolution *h devient un produit simple :

)()()( hA

1 parfois, on préfère reserver le terme “susceptibilité” pour la transformée de Fourrier de .

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)( peut être complexe, et on la sépare alors en une partie réelle ’ et imaginaire ’’ :

)('')(')( i

’ caractérise la réponse en phase avec la perturbation et ’’ la réponse hors de phase.

Susceptibilité non uniforme (q,)

On peut généraliser la réponse linéaire si h n’est pas uniforme et dépend de r . Le terme de

couplage dans l’Hamiltonien s’écrit :

),().,()( trhtrArdtV

La réponse linéaire devient :

')','()',',,('),( dttrhtrtrrdtrA

Cette fois, en plus de l’invariance par translation du temps, supposons une invariance par translation dans l’espace. D’où :

')','()','('),( dttrhttrrrdtrA

On peut à nouveau passer en transformée de Fourier à la fois temporellement (t->) et spatialement (r->q). On définit dans ce cas la susceptibilité en q et et on obtient la réponse du système via :

)'()'.()','()'()'(),(

ttirrqieettrrttdrrdq

),(),(),( qhqqA

où ),( qh est la transformée de Fourier spatiale et temporelle de la perturbation.

Cas uniforme et statique : si on applique tout le temps un champ uniforme statique 0h , alors sa

transformée de Fourier est un pic de Dirac centré en 0q et 0 donc la réponse du

système est :

)0,0()()(),(

),(),(),(),(

0.

0

..

qheeqhqdqd

eeqhqdqdeeqAdqdtrA

rqiti

rqitirqiti

Si on note 0

)0,0( q alors

00),( htrA

La réponse est uniforme et statique et fait juste intervenir la susceptibilité uniforme statique 0. On peut visualiser la réponse sondée dans l’espace des q et des pour différentes excitations :

Avec une excitation uniforme, on sonde ():

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t

Avec une excitation oscillante de période 2/, on sonde ():

t

Avec une excitation impulsionnelle courte, on sonde à tous les :

t

Relations de Kramers Kronig

Tout le raisonnement qui suit ci-après ne concerne que la partie temporelle de donc affecte seulement la dépendance en t et en mais pas la dépendance spatiale en r et q. On pourra donc dans la suite remplacer (q,) par () indifféremment.

La causalité implique que la réponse ne peut précéder la perturbation. On peut alors montrer mathématiquement que cela implique des relations entre les parties réelle ’ et imaginaire ’’ de la susceptibilité (q,) :

t

on sonde(=0)

excitationstatique

t

on sonde()

excitationoscillante

/

t

on sonde(=0)

excitationstatique

t

on sonde()

excitationoscillante

/

t

on sonde(=0)

excitationstatique

t

on sonde()

excitationoscillante

/

t

on sonde(=0)

excitationstatique

t

on sonde()

excitationoscillante

/

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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''

)'('1)(''

''

)'(''1)('

dvp

dvp

relations de Kramers Kronig

Un argument qualitatif pour expliquer le lien entre causalité et le fait qu’absortion et dispersion sont reliées : supposons une expérience où on applique un champ via une impulsion h(t) à un système (voir figure). A chaque composante de Fourier à de h(t), la réponse à a

pour amplitude )()()(000

hA . Mais dans cette écriture, on voit que la réponse démarre

à t<0 ce qui viole la causalité. En fait, cette réponse à 0 doit s’accompagner d’autres composantes qui interférent avec elle destructivement pour que la somme soit nulle à t<0. Ces autres composants devront de plus être déphasées donc faire intervenir ’’ si on sonde ’ et

réciproquement. Autrement dit, )('0

est nécessairement liée à )(''0

ce que montrent

les relations de Kramers Kronig.

une excitation impulsionnelle h(t) la réponse correspondante (t)

une des composantes de Fourier de h : tieh 0)(

0

la réponse associée tieh 0)()(

00

t

t

h(t)

une des composantes de Fourier de h(t) : h()e

-it

t

(t)

une excitation impulsionnelle h(t)

la réponse correspondante (t)

t

la réponse correspondante : ()h()e

-it

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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signification de « valeur principale » :

Démonstration :

Mesurer les propriétés électroniques des solides

15

Application : cette relation est utile pour déduire ’ si l’on connait ’’ sur une large plage de fréquences et réciproquement. Son usage est cependant toujours sujet à caution car on ne peut jamais mesurer la susceptibilité à toutes les fréquences. Il faut donc nécessairement imposer une coupure ou supposer une extrapolation à très haute fréquence ce qui peut poser problème. Cette méthode est utilisée notamment en optique ou en diffusion inélastique de neutrons comme nous le verrons plus loin.

4. Lien entre susceptibilité et dissipation

On peut montrer que lorsqu’on applique h(t) pour perturber un système et qu’il répond via A(t),

le terme d’énergie correspond )(.)( thAtV induit l’apparition d’un travail et donc d’une

puissance instantanée absorbée qui vaut :

dt

tAdth

dt

dW )()(

Pour un champ oscillant tiehth

0)( , on peut alors montrer que la puissance dissipée au cours

de ce travail vaut :

)("2

)(

2

0

h

dt

dWp

La partie imaginaire de la susceptibilité )(" est donc reliée à la puissance dissipée et est

parfois appelée « dissipation ». La quantité )(" est donc nécessairement positive.

5. Les fonctions de corrélation

Les fonctions de corrélation sont essentielles pour caractériser l’organisation statique et dynamique d’un système, pour mesurer les mises en ordre à courte ou longue distance et pour caractériser la physique en jeu.

On définit une fonction de corrélation classique par :

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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)','(),()',',,()',',,(

)','(),()',',,(

trBtrAtrtrCtrtrS

trBtrAtrtrC

ABAB

AB

On supposera dans la suite que A et B sont centrés, donc que ABAB

SC . La fonction d’auto-

corrélation s’obtient alors pour A=B :

)','(),()',',,( trAtrAtrtrCAA

Elle caractérise la corrélation entre A à l’instant t au point r et A plus tard et plus loin. Dans un

système invariant par translation, C ne dépend que de 'rr et 'tt donc par un changement de

variable que de 'r et t . On peut passer en transformée de Fourier d’abord spatialement :

rdetrAtqA

rqi .),(),(

et ré-ecrire avec des transformée de Fourier de la fonction de corrélation :

)0,';,(')0,'(),(')0,(),(.'..'.

rtrCerderdrBtrAerderdqBtqAAB

rqirqirqirqi

Par invariance par translation par rapport à t et r, ', rr peut être remplacé par 0,r et

)',',,( trtrCAB

ne dépend que de )','( ttrr . D’où :

),(),()0,0(),(')0,(),(..

tqVCtrCerdVBtrAerdrdqBtqAABAB

rqirqi

Puis on procède à la transformée de Fourier temporelle des deux membres de l’égalité :

dteqBtqAV

qCti

AB

)0,(),(1

),(

On utilise souvent pour la fonction d’auto-corrélation en q et la notation :

)0,(),(),( qAtqAdteqSti

fonction d’auto-corrélation associée à A

Pour la fonction de corrélation quantique, A et B ne commutent pas nécessairement, ni A(t) et A(t’). Il existe alors plusieurs définitions, comme par exemple :

BAABBAtSAB

2

1,

2

1)(

ou encore :

0

)(1

)( 00 dtBAeetKHH

AB

A la limite classique, ABABAB

CSK .

Exemples de fonctions de corrélation : considérons des chaînes de spin à 1 dimension

caractérisées par un Hamiltonien de Heisenberg

j

iiSJSH

1 avec J>0 c’est à dire un couplage

Mesurer les propriétés électroniques des solides

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antiferromagnétique entre spins voisins. La fonction de corrélation s’écrit différemment pour des chaînes de spin ½ et de spin 1. Pour des chaînes de spin 1, elle prend la forme pour sa partie statique :

xeASxSxx

/)1()0,0().0,(/

c’est à dire que les corrélations sont à courte portée ( est de l’ordre de quelques mailles) et décroissent exponentiellement. La longueur de corrélation sature vers quelques mailles quand la température tend vers 0 : le système ne s’ordonne pas.

Pour une chaîne de spin ½, les corrélations ont un profil différent, et surtout, elles sont à plus longue portée avec une décroissance à grande distance en

)sinh(/)1()0,0().0,( xxASxSx

. La portée des corrélations diverge quand la

température tend vers 0. Le système ne s’ordonne cependant pas non plus car c’est impossible à une dimension, mais on parle alors de quasi-ordre à grande distance.

Les fonctions de corrélation montrent donc des comportements très différents pour ces chaînes de spin en fonction de la valeur du spin et une physique radicalement différente, ce qui montre tout l’intérêt de les mesurer expérimentalement.

6. Théorème de Fluctuation-Dissipation

Il existe un lien direct entre les susceptibilités et les fonctions de corrélation à l’équilibre. Ainsi, à nouveau, en mesurant une réponse à une perturbation hors équilibre, on accède à une quantité, la fonction de corrélation, qui caractérise le système à l’équilibre.

On peut alors démontrer une relation entre la fonction de corrélation en q et et la

susceptibilité (voir cours Parcollet/Georges pour la démo) :

chaîne de spin 1

chaîne de spin 1/2

Mesurer les propriétés électroniques des solides

18

Théorème de Fluctuation-Dissipation

),())(1(2)0,(),(''

qnqAtqAdteti

een

1

1

1

11)(1

),(12

1),(

''

qSeq

Il y a donc un lien entre la fonction de corrélation de A à l’équilibre de thermodynamique et la partie imaginaire de la susceptibilité associée à la mesure de A. Ce théorème s’applique à de nombreux systèmes classiques ou quantiques : systèmes browniens, magnétiques, etc.

Un exemple direct : dans un système de spins électroniques, ce théorème montre le lien entre la fonction de corrélation spin-spin et la réponse du système à un champ magnétique.

Un exemple indirect: le bruit Johnson associé aux fluctuations thermiques dans un circuit

électrique : fRTkVB

42 Ici, R est la résistance électrique, V la tension, f la largeur de

bande du circuit. C’est une forme du théorème car il relie le bruit présent aux bornes du circuit à l’équilibre (les fluctuations donc) et la résistance R elle-même liée à la dissipation dans le circuit quand on applique un champ électrique.

Un argument qualitatif pour voir le lien entre fluctuations et dissipations : dans un système présentant un mouvement brownien (quelques grosses particules dans un ensemble de petites particules, par exemple du pollen flottant sur un liquide), si on applique un champ électrique extérieur et que les grosses particules sont chargées, ells vont être accélérées mais freinées par les chocs subis. Ces chocs se traduisent par une force visqueuse proportionnelle à la vitesse et donc liée aux chocs subis. Il apparaît alors une dissipation dans le système liée à ’’. La mesure de la réponse à ce champ E est donc reliée aux mêmes quantités (nature et nombre de chocs) que le mouvement brownien à l’équilibre, c’est à dire les fluctuations aléatoires des grosses particules. Il y a un lien entre les fluctuations à l’équilibre et la dissipation liée à ’’.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

19

B. Réponse à un champ magnétique

Comme application de la réponse linéaire, nous nous concentrons ici sur la réponse à un champ magnétique, ce qu’elle permet d’apprendre sur le système sondé, et comment la mesurer expérimentalement. Nous ne traiterons par contre pas du problème de la mise en ordre ou du gel magnétique (ferromagnétisme, verres de spin, etc) qui ne rentrent pas dans le cadre de la réponse linéaire. Nous nous attacherons également à décrire la mise en œuvre des mesures expérimentales de ces réponses.

L’opérateur A est donc l’aimantation M dont la grandeur conjuguée est le champ magnétique H :

HM

H

La fonction de réponse ou susceptibilité magnétique relie ici l’aimantation et le champ

magnétique. On rappelle ici qu’en réalité est un tenseur car la susceptibilité n’est pas

nécessairement isotrope. En composantes de Fourier, ),( q est donc liée à l’aimantation par :

),(),(),( qHqqM

Cette susceptibilité est reliée à la fonction d’auto-corrélation spin-spin notée en composantes de Fourier par :

)0,(),(),( qStqSdteqSti

et le théorème de Fluctuation-Dissipation relie susceptibilité et fonction de corrélation spin-spin par :

)0,(),(12

1),(1

2

1),(

''qStqSdteeqSeq

ti

où ’’ est la partie imaginaire de .

Mesurer les propriétés électroniques des solides

20

Le formalisme de la réponse linéaire ne permet pas de déterminer la susceptibilité magnétique, il donne juste des outils qui suggèrent comment la mesurer et quelles informations en extraire. Mais seul un vrai calcul microscopique permet de calculer la susceptibilité. Menons ce calcul dans quelques cas simples.

1. Susceptibilité magnétique uniforme 0

a) Forme générale

La susceptibilité uniforme )0,0(0

q caractérise la réponse à un champ magnétique

uniforme et statique 0H :

00HM

Pour calculer 0, on utilise une approche thermodynamique : on calcule l’effet d’un champ

magnétique ArotB sur un solide en perturbation en B (ce qui est cohérent avec

l’approximation de la réponse linéaire où B est aussi nécessairement petit). On suppose pour l’instant le solide composé d’ions sans interaction, et on considère donc le cas d’un seul de ces

ions, avec Z électrons, de spin total S. Son Hamiltonien s’écrit en présence de B :

SBgV

m

rAepB

Z

ielectrons

i

el

ii .2

)(

1

2

H

On choisit une jauge 2/rBA d’où

Z

ielectrons

i

i

i

i

Z

ielectrons el

ii rBm

erBp

m

e

m

p

m

rAep

1

222

1

2

82.

22

)(

On reconnait le moment orbital L dans

LBprBrBpi

ii

i

ii.)().(

En écrivant elB

me / il vient finalement :

Z

i

iBrB

m

eSgLB

1

22

8).(

0HH

où H0 est l’Hamiltonien non perturbé. On déduit la susceptibilité de HM0

en calculant M

par un traitement en perturbation de l’Hamiltonien dans une base d’états propres notés n

d’énergie perturbée nnn

EEE 0 :

B

E

V

N

BM

0H

or 0

BM d'où

B

E

BV

N

00

On exprime la perturbation en énergie au second ordre. Pour cela, on choisit B selon l’axe Oz, d’où

)(0,,2222

2

iiiii yxBxyBrB

et on garde au plus les termes quadratiques d’où :

Mesurer les propriétés électroniques des solides

21

nn nn

BZ

i

iiB

nn nn

BZ

i

iB

nn nn

n

EE

nSgLBnnyxnB

m

enSgLnB

EE

nSgLBnnrB

m

ennSgLnB

EE

nnnnE

' '

2

1

222

2

' '

2

1

22

' '

2

0

0

').()(

8)(

').(

8)(

'

HH

HH

Détaillons le sens physique de chacun de ces 3 termes qui contribuent à la susceptibilité uniforme. Nous verrons que le premier terme, si il existe, domine largement les deux autres.

b) Diamagnétisme de Larmor (2nd terme)

Etudions la contribution du 2nd terme nyxnB

m

e Z

i

ii

1

222

2

)(8

à la susceptibilité d’un solide composé

de N ions dans un volume V, qu’on notera dia. A suffisamment basse température, seul l’état

fondamental noté 0 contribue significativement. On simplifie

2

1

22

3

20)(0 rZyx

Z

i

ii

d’où

22

2

000

3

2

8rZB

m

e

BBV

N

B

E

BV

Ndia

2

2

06

rZm

e

V

Ndia

susceptibilité diamagnétique de Larmor

C’est la susceptibilité diamagnétique de Larmor (“diamagnétique” car “dia” signifie « s’oppose à »). Elle est négative et présente dans tous les matériaux. Sa valeur absolue est en général faible. Elle est la seule contribution à la susceptibilité dans les solides isolants à couches pleines où

0 SL et où les deux autres termes sont donc nuls. Elle ne dépend pas de la température.

Vérification expérimentale : elle se mesure dans les isolants à couche pleine où on trouve bien qu’elle est proportionnelle à la quantité Zr2 où r est le rayon ionique.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

22

Susceptibilité diamagnétique de Larmor en fonction de Zr2 dans différents composés (S. Blundell)

On peut faire léviter un matériau présentant ce diamagnétisme à condition que la susceptibilité correspondante soit elevée et le matériau léger. Pour cela, il faut placer le matériau dans un gradiant le plus élevé possible de champ magnétique, la force qu’il subit sera alors en

BMF . et peut s’opposer à la gravité si M est opposé à B , comme l’illustrent les images

ci après :

Mesurer les propriétés électroniques des solides

23

c) Paramagnétisme de Van Vleck (3ème terme)

Si les niveaux électroniques ne sont pas tous pleins, i.e. L ou S non nuls, alors le 3ème terme

nn nn

B

EE

nSgLBn

' '

2

').(

est non nul. De la relation B

E

BV

N

00

on déduit par

identification :

nn nn

zzB

VleckVanEE

ngSLna

' '

2

')(

Là encore, on ne retient que l’effet sur l’état fondamental en supposant B selon Oz :

0 0

2

)(0

n n

zz

VleckVanEE

ngSLa susceptibilité paramagnétique de Van Vleck

Cette contribution est paramagnétique car positive car En>E0. Elle est non nulle seulement si les

niveaux électroniques ne sont pas tous pleins, i.e. L ou S non nuls. En général, VleckVan

est

positive, faible en valeur, et indépendante de la température car la différence en énergie entre le fondamental et les états d’énergie plus élevés est très supérieure à kBT.

d) Isolants à couches non pleines : Paramagnétisme de Curie (1er terme)

Si les niveaux électroniques ne sont pas tous pleins, i.e. L ou S non nuls, alors le 1er terme dans

E0 , nSgLnBB

)( , est non nul. Pour un isolant, L et S sont déterminés par les règles de

Hund. Dans l’état fondamental, pour B selon Oz, ce terme se calcule dans l’état caractérisé par les

nombres quantiques z

JSLJn ,,, . Cette fois, il faut tenir compte du fait que même à basse

température, le décalage entre les niveaux JJJz

,... peut être faible devant kBT et qu’il faut

faire un calcul de physique statistique tenant compte du poids de Boltzmann associé à chaque niveau. On en tire finalement, pour un champ appliqué H :

)(Tk

JHgJBg

V

NM

B

B

JB

où )

2coth(

2

1)

2

12coth(

2

12)(

J

x

Jx

J

J

J

JxB

J

BJ est la fonction de Brillouin. L’aimantation M n’est plus linéaire en H et on ne sait plus définir une susceptibilité. C’est logique car H peut ici devenir grand par rapport aux écarts entre

niveaux. Cependant, quand x petit, xJ

JxBJ 3

1)( . On retrouve un comportement linéaire

pour M fonction de H :

HTk

JJg

V

NM

B

B

3

)1()(2

pour TkJHg

BB

D’où on peut alors définir la susceptibilité si TkJHgBB

donc à suffisamment haute

température et bas champ :

T

CCurie

où B

B

k

JJg

V

NC

3

)1()(2

0

Susceptibilité paramagnétique de Curie

C’est la susceptibilité de Curie, qui varie en inverse de la température. Elle est paramagnétique comme celle de Van Vleck car M va dans le même sens que H. Ce comportement décrit bien le

Mesurer les propriétés électroniques des solides

24

paramagnétisme des ions de terre rare dans les solides isolants où il y a peu d’interaction entre spins voisins.

Cas particulier des isolants d’ions de transition (orbitales d) : la susceptibilité de Curie décrit bien le comportement des ions de métaux de transition dans les isolants où il y a peu d’interaction entre spins voisins, mais à condition de supposer que seul S intervient et que L est nul. Pourtant, le moment orbital pour les ions d n’est pas nul, mais il y a « quenching » ou blocage du moment orbital. En effet, les électrons d sont très sensibles au champ cristallin dû aux atomes qui les entourent, ce qui modifie les règles de Hund. Le champ cristallin est dans ce cas en effet très supérieur au couplage spin-orbite qu’on peut négliger. Ce champ ne lève pas la dégénérescence de spin S car il agit sur les variables spatiales, mais il lève fortement la dégénérescence du

moment orbital L. L’état fondamental correspond donc à une situation où 0L . Ce

raisonnement est moins vrai pour les ions 4d ou 5d et faux pour les terres rares d’orbitale f.

Résumé pour les isolants :

couches pleines : 0dia

couches non pleines CurieVanVleckdia

Tdeindepfaibledia

.0 ; TdeindepfaibleassezVanVleck

.0 ;

TbasseàfortTenCurie

/10

e) Métaux : paramagnétisme de Pauli et diamagnétisme de Landau

Pour un métal, L et S viennent des électrons de conduction et ne peuvent pas être traités comme

des moments localisés sur les atomes. Les contributions de S et L dans nSgLnBB

)(

doivent être séparées. Dans un métal parfait sans interaction :

le spin des électrons de conduction contribue via la susceptibilité de Pauli :

)(2

0 FBPauliEn Susceptibilité paramagnétique de Pauli

Mesurer les propriétés électroniques des solides

25

où )(F

En est la densité d’états au niveau de Fermi EF

Elle vient d’une levée de dégénérescence à EF entre les électrons de spin up et down. C’est un terme paramagnétique, faible et en général indépendant de la température, sauf si n(EF) dépend de la température ce qui arrive dans les ions de transition. On observe ici que les spins des électrons de conduction s’alignent moins bien à H que les spins localisés, car pour un métal, c’est le principe d’exclusion de Pauli qui empêche les spins à EF de bien s’aligner, alors que pour les isolants, c’est la température ce qui est moins efficace.

le moment orbital des électrons de conduction contribue via la susceptibilité de Landau. On peut montrer que :

PauliLandau

3

1 Susceptibilité diamagnétique de Landau

Finalement, dans un métalLandauPauliVanVleckdia

Mesurer les propriétés électroniques des solides

26

f) Cas des systèmes corrélés En présence de couplage entre spins dans un isolant ou de corrélations dans un métal, la susceptibilité est modifiée. C’est souvent par son comportement anormal en température qu’on détecte ces anomalies.

Voici quelques exemples :

dans un isolant où les spins se couplent,

T

C où est liée à la force du couplage

et son signe au type de couplage ( couplage ferromagnétique : >0, couplage antiferro, <0)

dans un métal avec des spins localisés, un effet Kondo se développe. A haute température

KTT

C

et à basse température cste

dans un cuprate (nouveaux supraconducteurs) avec un pseudogap, la susceptibilité chute quand la température décroit.

dans un isolant à gap de spin, comme par exemple une échelle de spins ½ ou une chaine de spin 1,

Texp

dans un supraconducteur, l’effet Meissner impose à bas champ 1

On le voit, la variété des comportements possibles de 0 en fait un outil de choix pour révéler la physique en jeu dans un matériau et c’est une des premières mesures qu’on effectue en général lors de la découverte d’un nouveau composé.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

27

2. Mesure de 0 par magnétométrie

Pour mesurer la susceptibilité uniforme, on applique un champ magnétique et on détecte l’aimantation correspondante. L’aimantation se mesure par

la mesure d’une force HMF . dans un gradiant de champ

la mesure d’un couple force HM quand M n’est pas aligné à H (cas anisotropes)

la f.e.m. induite dans une bobine dtdU / en faisant varier l’aimantation M au cours du temps

des techniques de résonance : RMN, RPE, SR...

une magnétométrie de surface (magnétooptique, Hall, décoration, MFM...) mais en général, ces techniques conviennent à de fortes aimantations, donc plutôt des ordres magnétiques et pas dans le cas de la réponse linéaire.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

28

Mesurer les propriétés électroniques des solides

29

1. Mesure de 0 par RMN

a) Principe de base La RMN (résonance magnétique nucléaire) consiste à mesurer l’effet Zeeman d’un spin nucléaire I placé dans un champ statique H0. L’Hamiltonien Zeeman du spin I s’écrit

znnoyau IHHM00. H

où n est le rapport gyromagnétique du noyau considéré (il varie selon les noyaux). Le champ H0 lève par effet Zeeman la dégénérescence entre les niveaux du spin, d’un écart en énergie :

0HE

n

Les mesures « statiques » consistent à mesurer les champs magnétiques locaux dans le voisinage immédiat du noyau. Le spin nucléaire I sert de sonde.

Effet Zeeman

-5/2

-3/2

-1/2

1/2

3/2

5/2

.

.

.

.

.

.

m=I à -

I E = ħ H0

= h n

n

nRMN = /2 H0

0 0.n o y a uh f z

H M H H I

résonance

Mesurer les propriétés électroniques des solides

30

Les mesures dynamiques consistent à mesurer le temps de relaxation c’est à dire de retour à l’équilibre du spin nucléaire après inversion de population. Ce retour à l’équilibre peut entre autres s’effectuer grâce aux fluctuations locales temporelles du champ magnétique. Cela permet

entre autres de mesurer la partie imaginaire ’’(q,RMN) à la fréquence 0

HnRMN

.

La RMN permet de nombreuses autres mesures dont nous ne parlerons pas ici : diffusion ionique, caractérisation des molécules en chimie, imagerie médicale, etc.

Dans ce chapitre, on va déterminer comment la RMN permet de déterminer la susceptibilité de spin uniforme des électrons 0 et pourquoi cette mesure est complémentaire et parfois plus pertinente que la mesure macroscopique par magnétométrie. Nous traiterons plus loin des mesures dynamiques.

b) Méthode de mesure Une des méthodes les plus utilisées est celle de la RMN impulsionnelle par transformée de Fourier.

On place l’échantillon dans un champ statique 0H (selon Oz)

On applique une impulsion carrée de champ alternatif )cos(1

tHHrf

perpendiculaire à 0H en créant une impulsion de courant alternatif dans une bobine

perpendiculaire à 0H . A la fréquence de résonance 0

HnRMN

, cette impulsion fait

tourner l’aimantation nucléaire moyenne dans un plan perpendiculaire à 0H .

Après cette impulsion, l’aimantation précesse perpendiculairement à 0H d’où une f.e.m

induite dans la bobine. En mesurant la fréquence de cette f.e.m, on déduit RMN

Pour un calcul précis du comportement de l’aimantation nucléaire, on peut là aussi utiliser un formalisme de réponse linéaire. Attention, il ne faut cependant pas confondre la susceptibilité RMN associée à l’aimantation nucléaire que l’on mesure ici et la susceptibilité électronique à laquelle on s’est intéressé jusqu’à présent. Cette susceptibilité nucléaire n’est pas très intéressante en tant que telle, mais permet juste de sonder indirectement les électrons. Nous renvoyons vers les références bibliographiques pour voir le traitement précis de ce problème.

Mais on ne fera pas ce calcul ici car on ne s’interesse pas à la réponse des spins nucléaires dans ce cours. Voir les références biblios pour un traitement propre.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

31

c) Mesure de la susceptibilité électronique par RMN Décrivons l’effet des électrons dans un solide sur le spectre RMN. Pour cela, nous considérons le

couplage entre le spin nucléaire I et un éléctron de spin s de moment orbital l :

rsIr

rsrI

r

sI

r

lInenene

.3

8..3

.. 2

53

2

3

2

H

où n est le rapport gyromagnétique du noyau considéré, e celui de l’électron. Ces termes ont le même effet que des champs magnétiques additionnels qu’on fait apparaître en écrivant l’Hamiltonien selon :

contact

effn

dipolaire

effn

orbital

effn

electron

effnnHIHIHIHIHI ..... 0 H

avec 3

r

lH

e

orb

eff

53

.3

r

rsr

r

sH

e

dip

eff rsHe

contact

eff

3

8

Mesurer les propriétés électroniques des solides

32

Ces champs fluctuent très vite au cours du temps par rapport au temps de mesure RMN et sont en général très faibles par rapport au champ extérieur H0 (au moins dans les systèmes où les spins ne sont ni gelés ni ordonnés). On peut donc traiter l’effet des électrons comme un champ moyen en perturbation par rapport à H0. La théorie de la réponse linéaire s’écrit pour le spin moyen de l’électron :

e

electrons

e

electron

B

electron HM

g

Ms

00 d’où

3r

lH

e

orb

eff

053 0

.3

1H

r

rur

rH

electronszdip

eff

003

8HrH

electronscontact

eff

Dans le vide la condition de résonance s’écrivait : z

nH

00

Dans le solide en présence d’électrons elle est maintenant décalée :

zelectrons

n

zelectronsz

n

z

orbn

z

nHrH

r

rur

rHH

00530 00)(

3

8.3

1

On l’écrit en notant ces décalages “K” (appelés shift) :

)1(0 contact

i

dip

i

orbKKK décalage de la pulsation RMN dans un solide

Le spectre est donc décalé :

- d’un terme orbital Korb qui renseigne sur la nature des orbitales et est au cœur de la RMN en chimie.

- de termes Kdip et Kcontact regroupés en général sous le nom de “spin shift” ou “Knight shift” qui sont directement proportionnels à la susceptibilité uniforme magnétique 0 des électrons :

Mesurer les propriétés électroniques des solides

33

electrons

hfspinAK

0 Décalage (“shift”) de spin

où le terme hf

A représente les différents couplages hyperfins entre I et s, d’origine dipolaire et

de contact2. La formule ci-dessus ne tient pas compte des anisotropies venant du terme dipolaire qui n’est pas le même dans toutes les directions.

L’intérêt d’utiliser la RMN pour mesurer 0 via le shift de spin

Un effet détectable : le couplage hyperfin entre le spin nucléaire et le spin des électrons est très faible, et peut donc être facilement détecté, la résonance RMN étant en général peu décalée, et avec précision, la RMN étant une technique de résonance permettant de mesurer RMN avec une très grande précision.

Un effet local : le couplage hyperfin est à très courte portée, donc le spin nucléaire se couple aux électrons sur son propre site atomique ou au pire sur l’atome voisin par hybridation. La RMN mesure donc le champ magnétique dû aux électrons très proches du noyau. Si différents types d’environnements magnétiques sont présents, la RMN en fournit l’histogramme et pas la moyenne.

Si la susceptibilité uniforme n’est pas la même dans l’ensemble d’un matériau, on peut, grâce à la RMN, en établir l’histogramme. C’est le cas par exemple dans des composés où différents types d’atomes ont des contributions différentes, comme les alliages ou les oxydes de basse dimension.

Un effet intrinsèque : toute contribution à la susceptibilité uniforme 0 qui ne provient pas directement de l’échantillon sondé donne en général un signal à une fréquence différente. Autrement dit, toute phase parasite liée à un problème de synthèse de matériau pourra être distinguée ce qui n’est pas le cas d’une mesure par magnétométrie.

Du côté des inconvénients, les mesures par RMN sont plus délicates à mener que celles par magnétométrie, souvent bien plus longues, et ne permettent en général pas de mesurer la valeur absolue de la susceptibilité car le couplage hyperfin est souvent difficile à déterminer de façon ab-initio.

2 A noter qu’il peut y avoir une autre source de couplage hyperfin, dît de cœur, venant de la polarisation interne d’orbitales s dans certains cas.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

34

Mesurer les propriétés électroniques des solides

35

2. Susceptibilité magnétique non uniforme (q,)

La susceptibilité non uniforme est reliée au champ appliqué par :

),(),(),( qHqqM

Pour la mesurer, on devrait donc appliquer un champ oscillant spatialement et temporellement. Autant c’est faisable temporellement sans difficulté (en faisant circuler un courant alternatif dans une bobine), autant spatialement, on a une difficulté de taille : il faut faire varier le champ avec une période de l’ordre de la distance entre atomes ce qui est impossible avec un électroaimant traditionnel. On doit donc faire appel à des techniques indirectes de mesures : diffusion inélastique de neutrons ou techniques de résonance et de relaxation (RMN, RPE,

SR...). Mais aucune n’est parfaite et la mesure de ),( q est souvent très incomplète et parfois

impossible.

Avant de détailler ces méthodes de mesure, nous indiquons le comportement de ),( q dans

quelques cas typiques sans le démontrer.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

36

Lien entre susceptibilité et corrélations entre spins

De façon générale, la structure en q de ),( q informe sur les corrélations spatiales entre

spins. Par transformée de Fourier inverse de la fonction d’auto-corrélation

dteqStqSqSti

)0,(),(),( et grâce au théorème de fluctuation-dissipation, on a :

e

qedeqSedeSS

tiRRqi

q

tiRRqi

q

jijiji

1

),(''),(

)()(

En se plaçant à haute température,

TkB

1 d’où

e1 :

)0,('1),(''

1

),(''q

qed

e

qed

titi

(par Kramers-Kronig)

)()0,('

1ji RRqi

q

ji eqSS

Si )0,(' q est par exemple piquée en 0

Q , cela signifie que les spins sont corrélés avec une

période spatiale 0

/2 Q . Par exemple à une dimension on trouve dans ce cas:

)(cos)0,(')0,('00

)()(

000

jiRRQiRRQi

ji RRQQeeQSSjiji

Si 00Q , cela correspond à un alignement entre spins voisins, donc des corrélations de type

ferromagnétiques. Si aQ /0

où a est paramètre de la maille, cela correspond à un anti-

alignement entre spins voisins, donc des corrélations de type antiferromagnétiques.

Susceptibilité non uniforme dans les isolants paramagnétiques

En l’absence de corrélations la susceptibilité )(0

q n’a pas de structure en q et reste identique

à la susceptibilité uniforme :

T

Cq )(

0 susceptibilité d’un système de spins sans interaction

Effet des corrélations : si il existe une interaction entre spins de type Heisenberg

iji

jiji SSRRJ,

.)(H , c’est à dire qu’ils sont corrélés, une approche RPA (champ moyen où

toutes les composantes de Fourier sont indépendantes) permet de déterminer la susceptibilité :

C

B

TT

C

qg

qJ

qq

)()(

)(1

)()(

02

0

susceptibilité d’un système de spins en interaction Heisenberg

où 2)/()(

BCgCqJT et

ji

RRqiji

jieRRJqJ)(

)()( . L’effet de l’interaction entre spins J

est d’augmenter )( q aux vecteurs 0Q où )( qJ est maximum. A haute température, les spins

vont se corréler préférentiellement à ce vecteur 0Q . Ces corrélations peuvent éventuellement

Mesurer les propriétés électroniques des solides

37

mener à un état ordonné de spin à grande distance à basse température, au vecteur 0Q pour

lequel il y a la divergence de )( q à la température critique la plus élevée 2

0)/()(

BCgCVQJT .

Par exemple considérons le cas d’une interaction J seulement entre premiers voisins dans un réseau cubique de paramètre de maille a, alors

)cos()cos()cos()( aqaqaqJqJzyx

Si 0J , )( qJ est maximum en 00Q donc l’alignement entre spins est favorisé et la

première divergence de )( q quand la température décroit a lieu pour 0q qui mène vers un

ordre ferromagnétique des spins sous TC.

Si 0J , )( qJ est maximum en aaaQ ;;0 donc l’anti-alignement entre spins est

favorisé, qui mène vers un ordre antiferromagnétique sous TC.

Susceptibilité non uniforme dans les métaux

La susceptibilité non uniforme statique d’un métal s’écrit à partir de la fonction de Lindhard (voir TD) :

k kqk

FDFDqB qkfkf

V

mHgq

)()()()(

2

2

0

où fFD est la distribution de Fermi-Dirac. Pour un gaz d’électrons libres, elle s’écrit :

f

f

f

f

Paulikq

kq

kq

kqq

2/1

2/1ln

2/2

2/11

2

1)(

2

susceptibilité d’un métal

où )(4

)(

4

)()0(

2

022

2

0 F

BFB

PauliEn

gmkgq

est la susceptibilité uniforme. Cette

susceptibilité présente une anomalie en q=2kF qui a de nombreuses conséquences.

Effet des corrélations :

Pour de faibles corrélations, la théorie des liquides de Fermi montre que l’effet des interactions

est de modifier la masse effective des électrons qui intervient dans Pauli

. Si on veut tenir

compte des interactions coulombiennes entre électrons U, on peut utiliser là encore un modèle de champ moyen, ici le modèle de Stoner. Il permet de montrer que :

)()(

21

)()(

02

0

qg

U

qq

B

susceptibilité d’un métal en interaction dans un modèle de Stoner

)(1)0(

F

Pauli

EUnq

On trouve un résultat analogue pour un modèle de Mott-Hubbard : )( q est renforcée par les

corrélations d’un terme du type en ))()(1/(10

qqI . Là encore, il peut y avoir divergence ou

Mesurer les propriétés électroniques des solides

38

forte augmentation de )( q aux vecteurs d’onde où )()(10

qqI d’où mise en ordre du

système à ce vecteur : c’est le critère de Stoner.

3. Mesure de ’’(q,) par diffusion inélastique de neutrons

Les neutrons thermiques sont une bonne sonde de la structure et du mouvement des atomes dans les solides. En effet, leurs énergies sont de l’ordre de 1 à 100 meV pour des longueurs d’onde de l’ordre de 1 à 3 Å. Par rapport aux Rayons X, l’énergie est plus faible donc ces neutrons permettent de sonder des excitations « thermiques », comme les phonons (voir cours de S. Ravy). De plus, le neutron portant un spin, ce dernier est également sensible aux spins et moments orbitaux des électrons donc aux ordres ou aux excitations magnétiques (spinons).

Dans la pratique, considérons une expérience de diffusion inélastique de neutrons : un faisceau de neutrons est envoyé sur l’échantillon puis on en mesure l’intensité diffusée à un angle quelconque.

Si on caractérise le neutron par une onde plane k , une énergie E, et un spin et le matériau

étudié par un état n d’énergie , alors on peut noter :

l’état initial : ii

Ek , et ii

n , l’état final : ff

Ek , et ff

n ,

Il y a un transfert d’énergie )(2

22

2

fi

n

fikk

mEE

par conservation de l’énergie.

Il y a un transfert de moment fi kkQ par conservation de la quantité de mouvement.

On peut traiter l’interaction entre neutron et matière en perturbation, et la règle d’Or de Fermi permet alors de calculer la section efficace de ce processus :

fi n

ifiiifff

n

i

i

f

f

nkVnknpk

km

dEd

d)()(

2

22

2

2

i

ij

n

jeenp

/)(

Il y a plusieurs sources possibles de diffusion:

une diffusion nucléaire venant de l’interaction entre les noyaux des atomes et les neutrons. On la traite via un potentiel V localisé sur les noyaux, d’où la section efficace apparait proportionnelle à un facteur de structure dynamique S :

),(

2

QSk

k

dEd

d

i

f

f

S a pour transformée de Fourier inverse la fonction de corrélation densité-densité 3

)0,0(),( tr . Cette diffusion permet donc de mesurer la structure cristalline de façon

3 ne pas confondre la densité de matière sondée ici et la densité de charge électrique mesurée dans une expérience d’optique

Mesurer les propriétés électroniques des solides

39

analogue aux rayons X. La dépendance en Q renseigne sur l’organisation spatiale des

atomes, et la dépendance en leur mouvement (donc les phonons)

une diffusion magnétique venant du fait que le neutron porte un spin Ce spin peut en particulier interagir avec le spin des électrons et leur moment orbital, de section efficace

),(2

0

2

QSk

kr

dEd

dmag

i

f

f

Dans ce cours, nous nous intéresserons spécifiquement à ce terme d'interaction dans le cas de systèmes non ordonnés.

Cas d’un métal et de neutrons non polarisés en spin :

Traitons ainsi de cette contribution dans un métal. Dans ce cas, le moment orbital peut en général être négligé devant le spin des électrons non appariés. Nous allons montrer que la section efficace est alors liée à la susceptibilité non uniforme de spin du métal ’’(q,).

Pour exprimer mag

S , on exprime le champ dipolaire créé par le moment lié au spin des électrons

sur le moment porté par le neutron. D’où on déduit après calcul que :

ti

magetQMtQMdtQS

)0,(),(

2

1),(

),( tQM est la transformée de Fourier de l’aimantation de l’échantillon mesuré, elle est liée aux

spins ),( tRs i des électrons aux sites iR du matériau via :

i

iRQi

zyx

QQ

iatomes

iRQi

iatomes

QiQRQi

tRseuu

tRseutRsuetQM

i

ii

),(

),(),(),(

.

),,(,

,

..

avec Qu vecteur unitaire dans la direction de Q . Le produit QiQ utsu )( sélectionne la

composante perpendiculaire du spin et de l’aimantation des électrons. Donc seule la composante

de l’aimantation des électrons perpendiculaire à Q contribue à ),( QSmag .

L’aimantation M mesure le spin des électrons non appariés S donc

)0,(),( tQMtQM est proportionnelle à la fonction d’auto-corrélation spin-spin

)0,(),( tQStQS . Or par le théorème de Fluctuation-dissipation :

),())(1(2)0,(),,(''

qnqStqSdte

ti

avec ),,(, zyx

Ici, on ne sélectionne que les composantes perpendiculaires de spin à Q d’où finalement on peut

montrer que :

),("))(1()(),(,

,

2)(

QuuneQFQS

QQ

QW

mag

Structure de facteur dynamique magnétique pour la diffusion de neutrons ),,(, zyx

Mesurer les propriétés électroniques des solides

40

où F(Q) est un facteur de forme qui dépend de l’ion qui diffuse et )( QWe

est un facteur de Debye-

Waller lié au mouvement des noyaux avec 2).()( juQQW proportionnel à la valeur moyenne du

carré du déplacement des ions projeté sur Q .

La section efficace est reliée à la partie imaginaire dynamique ),(" Q de la susceptibilité de

spin (composantes perpendiculaires à Q ). Par exemple si OzQ // alors yyxxmag

S ""

La diffusion inélastique de neutrons permet donc de sonder ),(" Q expérimentalement. Mais

il y a des limites importantes :

- les neutrons sont très couteux à produire, donc les signaux ne peuvent être mesurés qu’avec des statistiques en général assez limitées

- la résolution expérimentale est en général faible en Q

- il faut bien viser dans l’espace des Q

De ce fait, les mesures de susceptibilité dynamique dans un métal non corrélé sont presqu’impossible à réaliser dans les conditions actuelles 4. Par contre, la diffusion inélastique de neutrons est très utile pour mesurer les corrélations dans des métaux corrélés, car ceux-ci présentent des susceptibilités avec des pics bien marqués dans l’espace réciproque et d’intensité

importante, donc mesurables. La position de ces pics en Q renseigne directement sur la nature

des corrélations (antiferromagnétique, ferromagnétique...) et leur dépendance en renseigne sur les comportements dynamiques.

4 En effet, dans un métal simple, ’’ est très distribué dans l’espace réciproque et de ce fait, l’intensité est très faible, de l’ordre de 1

/eV/f.u, typiquement 100 fois plus faible que dans un métal corrélé comme le cuprate YBa2Cu3O7 ou Sr2RuO4. De plus, ce signal est superposé à un bruit de fond nucléaire pour des mesures de neutrons non polarisés ce qui le rend difficile à détecter. Une mesure suffisament longue pourrait renseigner sur ’’ mais elle serait extrêmement couteuse en temps de faisceau, et peu motivante pour étudier des métaux « standard » qu’on connaît déjà bien.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

41

4. Mesure par relaxation en RMN de ’’(q,)

Une autre façon de sonder la susceptibilité non uniforme est la mesure du temps de relaxation T1 en RMN. En RMN, on sonde la résonance Zeeman d’un spin nucléaire dans un champ magnétique. Il s’agit d’une mesure hors équilibre où on modifie les populations des niveaux Zeeman. Il est alors possible également de mesurer le temps de relaxation, c’est à dire le temps de retour à l’équilibre de ces populations. Considérons le cas d’un spin nucléaire I=1/2 dans un champ magnétique statique H0 supposé selon l’axe Oz. On note N- et N+ les populations des deux niveaux, et W les probabilités de transition entre niveaux.

A l’équilibre thermodynamique : TkHTkE BB ee

N

N //

0

0

0

I = - ½

I= + ½

A l’équilibre

N-

N+

W WE=hH0

Mesurer les propriétés électroniques des solides

42

On place les populations hors équilibre par application d’une impulsion d’un champ radiofréquence perpendiculaire au champ statique H0 de longueur telle que l’on égalise les populations :

On a :

WNWN

dt

dN

On pose

NNn et

NNN d’où )(2

1nNN

.

d’où l’équation devient :

WnNWnN

dt

nNd)(

2

1)(

2

1)(2/1

1

0

T

nn

dt

dn où

WW

T1

1 et )/()(

00

0 WWWWNNNn

La solution s’écrit 1/

0)(

TtAentn

et pour une condition initiale n(0)=0 :

)1()( 1/

0

Ttentn

A l’équilibre, 0

dt

dN d’où TkE Be

W

W

N

N /

0

0

A suffisamment haute température, pour 0

HTkB

,

WeWW

TkE B/ d’où

WT

21

1

Cette relaxation de l’aimantation nucléaire n(t) vient du faire que, lors du retour à l’équilibre, les

spins nucléaires doivent « rendre » au solide l’énergie Zeeman absorbée 0

HE . Le temps de

retour à l’équilibre appelé T1 dit « temps de relaxation longitudinal » mesure donc la capacité qu’a le solide d’absorber cette énergie. Ce processus peut se faire par de nombreux canaux, en particulier si des champs magnétiques fluctuant au cours du temps dans le voisinage du noyau sont capables d’absorber cette énergie. Dans ce cas particulier, on peut calculer T1 :

on suppose que le spin du noyau I est couplé à ces champs locaux via un Hamiltonien :

)(. thIH locn

alors la règle d’or de Fermi permet de calculer la probabilité de transition entre états :

égalisation des populations

application d’un champ radiofréquence

pendant une impulsion « /2 »

égalisation des populations

retour à l’équilibre

Mesurer les propriétés électroniques des solides

43

)0(),(2

1

)0(),(2

1

2

1)0(.

2

1

2

1)(.

2

112

)()()exp(21

22

2

2

22

,1

StSAdte

hthdte

hIthIdte

EEnhmEEnhmEWT

hf

ti

n

ti

n

locnlocn

ti

nnmlocnnmloc

mn

n

n

n

n

où )()()( tihththloc

y

loc

xloc

et {A,B}=1/2(AB+BA) et <> est la moyenne statistique, c’est à dire :

)(/))0()(()0(),(// HitHitHH

eTrhetheeTrhth

H étant l’Hamiltonien des électrons.

Supposons que le champ local est dû au couplage hyperfin entre le spin du noyau et les électrons

voisins situés en ri : ),()(

)(sin

trSrA

thi

n

ihf

ivoi

loc

Pour un couplage hyperfin à un seul site, soit Ahf (r)=Ahf (r), on peut montrer que :

)0,(),,(1

2

1)0,(),,(

1

2

1100 2

222

2

1

ii

ti

hfihfihf

ti

n

nrStrSdteArSAtrSAdte

T

d’où on peut montrer que :

)0,(),,(2

11 2

2

1

0 qStqSAdteT

hf

q

ti

Le théorème de fluctuation-dissipation permet de relier la fonction de corrélation spin-spin ici et la susceptibilité de spin du système. On passe pour cela en transformée de Fourier :

),(2

coth)0,(),,()(''220

qAqStqSqAdte

hf

q

hf

q

ti

A suffisamment haute température,

TkB

22

2coth

d’où :

n

n

hf

q

B

qATk

T

),(''11 2

2

1

Plus généralement, pour un couplage hyperfin non ponctuel en un site,

iriq

ihf

ivoi

hferAqA

.

sin

)()(

n

n

hf

q

B

qqATk

T

),('')(

11 2

2

1

taux de relaxation RMN dû aux spins des électrons

Le couplage hyperfin agit ici comme un filtre en q : il sélectionne préférentiellement certaines valeurs de q.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

44

La mesure de T1 par RMN permet donc de sonder à la fréquence RMN n la partie imaginaire de la susceptibilité magnétique. L’utilisation de différents noyaux dont le profil en q des couplages hyperfins A(q) est différent permet de sonder ’’ à différents q. Par contre, la mesure est à la pulsation des noyaux, seulement quelques eV, à comparer aux meV des neutrons. On peut

donc dire que la RMN sonde essentiellement )0,(''

q .

Avantages et limitations :

C’est une mesure plus dure à interpréter que la mesure par neutrons de la même quantité et qui s’effectue seulement à presque nul. Mais elle est complémentaire, car bien plus sensible, et à énergie bien plus faible. Elle peut de plus être réalisée dans presque tous les matériaux, quelque soit leur forme (poudre, cristal...) ou leurs corrélations, alors que la mesure équivalente par diffusion de neutrons nécessite en général de gros monocristaux souvent difficiles à synthétiser et suffisamment corrélés pour avoir un signal appréciable. Il est par exemple presqu’impossible de mesurer ’’ dans un métal par neutrons, alors que c’est élémentaire par RMN.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

45

A noter enfin qu’une autre façon de sonder (q,) est de mesurer la réponse des électrons d’un solide à la présence d’impuretés atomiques portant des moments magnétiques. En effet une telle impureté correspond à un champ magnétique très localisé sur le site de l’atome donc étendue dans l’espace réciproque. La mesure d’un tel effet s’effectue là aussi par RMN qui permet de mesurer la réponse à différentes distances de l’impureté, donc en gros ’(r) (voir TD).

Mesurer les propriétés électroniques des solides

46

C. Réponse à un champ électrique

L’interaction entre un champ électromagnétique et un solide se traduit à travers sa conductivité optique ou sa réponse diélectrique. Les deux sont bien sûr reliées. La forme utilisée pour l’expression de cette réponse dépend également du type de matériau étudié : diélectrique ou métal.

1. Formulation générale

On peut traiter la réponse de deux façons différentes, liées entre elles : soit à travers la réponse

du point de vue diélectrique où le champ E induit une polarisation P , soit à travers la réponse

du point de vue de la conduction où E induit un courant électrique j . Nous allons montrer

qu’en régime dynamique, les deux types de réponse sont liées entre elles.

point de vue diélectrique

Le traitement est analogue au cas magnétique : la polarisation diélectrique P est analogue à l’aimantation et elle est reliée au champ électrique par la fonction de réponse (ou susceptibilité)

diélectrique d

:

),(),(),(0

qEqqPd

On distingue dans le matériau la charge et le potentiel total tot

et tot

, la charge et le potentiel

polarisés dans le milieu (dîte « induite » ou « liée ») ind

et ind

et la charge et le potentiel

associés à la présence possible de charges extérieures ext

et ext

(“extérieur” signifie ici

distinctes des dipôles du matériau, mais cette charge peut se trouver dans le milieu, par exemple, un ion placé en impureté de charge différente des atomes d’un solide).

L’équation de Gauss s’écrit :

0

totEdiv ou ext

Ddiv avec EPEDr

00

et indPdiv

Si ces quantités sont non uniformes spatialement, on peut linéariser ces équations en raisonnant

sur les composantes de Fourier : EqiEdiv .

Pour relier la susceptibilité d

aux charges, on multiplie par qi la relation initiale pour faire

apparaître 0/. EqiEdiv et ind

PqiPdiv . :

totdind

d

qq

qEqiqqPqi

),(),(

),(.),(),(.0

La susceptibilité apparaît donc également comme fonction de réponse de la charge induite créée par la charge totale.

La susceptibilité peut aussi s’exprimer en fonction du potentiel électrique grâce à l’équation de

Poisson qui s’écrit pour tot

,ind

ou ext

en transformée de Fourier :

0

2

0

),(),(

qqq

Mesurer les propriétés électroniques des solides

47

D’où ),(),(),(),(2

0 qqqqq

dtotdind

point de vue de la conductivité

Cette fois, c’est la loi d’Ohm qui s’écrit comme une réponse linéaire du milieu pour le courant en réponse au champ électrique :

),(),(),( qEqqj

La conductivité électrique joue le rôle de la fonction de réponse. On peut la relier à la susceptibilité diélectrique en utilisant la conservation de la charge :

0),(.),(),(),(.0

),(),(),(),(...0

qEqiqiqEqqi

qqiqEqqiijqit

j

d

totdind

ind

d’où la relation entre conductivité et susceptibilité diélectrique :

),(),(0

qiqd

qu’on peut aussi exprimer en fonction de l’indice diélectrique :

0

),(1),(

qiq

r

Voila pourquoi on appelle ),( q la conductivité optique du milieu. A la limite =0 et q=0, on

retrouve la conductivité habituelle mesurée dans la loi d'Ohm.

La susceptibilité diélectrique est liée aux fonctions de corrélation associées aux densités de charge électrique <> et la conductivité électrique est associée de même à <j,j>.

Dans le cas général non uniforme, l’expression de ),( q dans les métaux fait intervenir la

fonction de Lindhard de façon analogue au cas magnétique. La forme en q est identique au cas magnétique et fait apparaître une structure liée à la présence d’une surface de Fermi. Celle-ci se traduit par des oscillations de Friedel analogues aux oscillations RKKY pour les spins. Le traitement identique ne sera pas détaillé ici. La mesure expérimentale de cette susceptibilité non uniforme est délicate et met là encore en jeu des effets d’impuretés cette fois électriques :un ion substitué à un atome dans un solide, de valence différente peut créer un champ électrique local auquel le système répond alors. Par contre, il n’existe pas de mesure équivalente aux neutrons ou à la relaxation RMN pour les aspects électriques. Ce n’est pas le cas pour la réponse uniforme que nous détaillons maintenant.

2. Le cas des métaux : réponse dynamique uniforme

Pour mesurer la réponse uniforme, on peut avoir recours à des mesures d’optique. Dans le cas général des solides, les mesures d’optiques sont complexes à analyser car le champ électromagnétique interagit avec les métaux de très nombreuses façons mettant en jeu des transitions interbandes, des réponses diélectriques, les vibrations atomiques, les gaps, les excitons les différentes formes de luminescence etc… Sa compréhension mériterait un cours complet.

On peut cependant proposer un modèle simple classique pour décrire la réponse optique d’un matériau () si on ne s’intéresse qu’aux électrons libres dans un métal: c’est le modèle de Drude.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

48

Le modèle de Drude consiste juste à supposer qu’un électron est une particule chargée électriquement au comportement classique. Quand l’électron est accéléré par le champ extérieur E , il est ralenti par les chocs qu’il subit dans le solide, ce qui se traduit par un effet moyen de force force visqueuse proportionnelle à la vitesse de l’électron :

vmf

1

où est un temps typique de parcours moyen, c’est à dire le temps moyen entre deux chocs subis par l’électron. Raisonnons ici à une dimension selon Ox. On applique le principe fondamental de la dynamique :

eEdt

dxmeEf

dt

xdm

2

2

où est la conductivité électrique (on reconnait ici la loi d’Ohm dans sa forme locale). On résout

en régime harmonique, pour un champ alternatif tieEtE

0)( :

eEim

x

eExmi

xm

2

2

11

La réponse linéaire se traduit ici par la loi d’Ohm : la réponse du système à un champ électrique E est un courant électrique linéaire avec E. La fonction de réponse est ici la conductivité :

Edt

dxNej

iim

Ne

i

m

NeeE

i

i

Em

Nexi

E

Ne

dt

dx

E

Ne

11

1

1

1 0

22

2

A la limite statique du modèle quand 0 , mNe /2

0 est la conductivité continue, pour

un champ E statique ou une tension V continue.

On sépare la partie réelle et imaginaire :

22

2

22

2

22

2

11

1

1

1'''

m

Nei

m

Nei

m

Nei

modèle de Drude pour la conductivité optique

On appelle “pic de Drude” le pic formé par la partie réelle ’(), dont la largeur est inversement proportionnelle au temps de diffusion . Meilleur est le métal, plus long est et plus étroit sera ce pic. On identifie donc un « bon » métal par la largeur de son pic de Drude.

Si on veut tenir compte dans ce modèle classique de la statistique de Fermi-Dirac, Sommerfeld montre que le modèle reste en gros correct, mais pour un libre parcours moyen entre chocs gouverné par les

/

'

"

Mesurer les propriétés électroniques des solides

49

électrons au niveau de Fermi, donc l=vFermi et la masse devient une masse effective traduisant la nature des bandes.

On peut relier cette conductivité optique et la réponse diélectrique du métal :

020

111

11i

eim

Nedr

où )(d

est la susceptibilité diélectrique uniforme du système. On appelle () la conductivité

optique car elle se mesure via des mesures d’optique puisqu’elle est reliée à la constante diélectrique et donc l’indice optique du milieu. Ici, r représente seulement la contribution des électrons libres du métal. Les autres électrons, par exemple des électrons liés dans un semi-conducteur ou dans un diélectrique isolant peuvent aussi se polariser, et en général :

0

)(iautre

r

tot

r

D’un point de vue de la mesure, on peut relier () et la réflectivité R, quantité mesurable, par : 2

2

1

1

1

1

r

r

n

nR

Pour le modèle de Drude, R() a le comportement suivant :

calcul dans le modèle de Drude de la réflectivité pour un métal parfait ( infini) ou non parfait ( fini)

Mesure expérimentale dans l’aluminium. Le petit creux observé vers 1.5 eV vient de transitions interbandes entre deux bandes parallèles sous EF et au dessus de EF caractéristique de l’aluminium

Le métal réfléchit presqu’entièrement la lumière sous p puis devient transparent au-delà. La

pulsation plasma p mNep 0

2/ est de l’ordre de 1015 rad/sec donc dans le visible ou

l’ultraviolet. Le cas infini correspond au métal parfait.

En réalité, dans une description plus réaliste, le temps peut dépendre de et la mesure expérimentale de la réflectivité permet alors de déduire ().

Les relations de Kramers-Kronig permettent de relier la partie réelle et imaginaire de d() donc de r. On peut également utiliser ce type de relations pour lier la partie réelle et imaginaire de

1

p

R

infini

fini

Mesurer les propriétés électroniques des solides

50

l’indice complexe r

n . Cela présente l’intérêt de pouvoir déduire des relations sur la

réflectivité. En effet, si on définit une quantité complexe :

)()(

1)(

1)()(

ie

n

nr

alors 2

2

*

1

1)()()(

n

nrrR

Une mesure de réflectivité R fournit l’amplitude De plus, par Kramers-Kronig, on peut montrer que la phase de r s’exprime (voir Wooten Ch 6) :

0

22'

'

)'(ln2)(

dvp

Donc si on parvient à mesurer la réflectivité expérimentale sur une plage de fréquence suffisamment large, on peut retrouver par Kramers-Kronig la phase et pas seulement l’amplitude. D’où on peut alors tirer à la fois la partie réelle et imaginaire de l’indice ou de la susceptibilité diélectrique. Le problème vient de la mesure qui doit se faire à suffisamment haute fréquence pour autoriser une telle transformation mathématique.

Il y a plusieurs méthodes expérimentales pour mesurer la conductivité optique :

Par réflectivité : en utilisant Kramers Kronig (voir ci-dessus). Interêt : mesurer l’échantillon en incidence normale donc pouvoir travailler sur de petits matériaux. Problème : devoir travailler sur la plus large bande possible spectrale.

Par Ellipsométrie : on accède directement à la phase donc la mesure complexe de mais on étudie l’échantillon en incidence rasante et pas perpendiculairement comme la reflectivité donc moins sensible. Il faut un meilleur cristal (et problèmes si effets anisotropes). Voir Tompkins & Mc Gahan

Par technique pulsée THz (voir Ch.2 par Nuss et Orenstein dans Millimiter and Submillimeter Wave Spectroscopy of Solids, edited by G. Grüner)

Mesurer les propriétés électroniques des solides

51

II. Mesures de la surface de Fermi

Mesurer les propriétés électroniques des solides

52

Mesurer les propriétés électroniques des solides

53

Dans un métal, la façon la plus simple d’obtenir des informations sur la surface de Fermi est de mener une mesure thermodynamique. En effet, seuls les électrons près du niveau de Fermi contribuent à ce type de mesures et on peut ainsi déduire leur densité d’état n(EF). C’est par exemple le cas de la susceptibilité uniforme de spin dans un métal (dite de Pauli) décrite précédemment, et proportionnelle à n(EF). Mais pour aller au delà de la simple mesure de n(EF), il faut avoir recours à des méthodes plus sophistiquées.

Nous décrivons ici trois de ces méthodes, les oscillations quantiques (de Haas), la photoémission résolue en angle (ARPES) et la spectroscopie par effet tunnel (STM), qui permettent d’accéder à la forme de la surface de Fermi dans l’espace réciproque, aux relations de dispersion reliant E et k, et à l’éventuelle variation spatiale de la densité de Fermi.

A. Oscillations quantiques

Si on applique un champ magnétique B à un métal, les électrons tournent hélicoïdalement

autour de B , gouvernés par l’équation du mouvement semi-classique :

Bvedt

kd

Dans l’espace réciproque, cela correspond à une orbite circulaire perpendiculaire à B qui

s’appuie sur la surface de Fermi. Le temps orb

t mis pour parcourir cette orbite correspond à la

fréquence cyclotron orbc

t/1 avec :

E

A

eBc

2

2

où A est l’aire de l’orbite. Si on peut mesurer c

, on en déduit alors A et donc des informations

sur la forme de la Surface de Fermi.

Nous allons montrer qu’en effet, lorsqu’on fait varier B , des oscillations apparaissent pour différentes grandeurs expérimentales (aimantation, résistance électrique, température...) et que

la période de ces oscillations en B peut être reliée à la valeur des aires extrémales de la surface de Fermi. C’est un moyen de mesurer indirectement les surfaces de Fermi.

1. Origine des oscillations : les niveaux de Landau

Nous voulons dans un premier temps calculer l’effet d’un champ B sur une bande d’électrons dans un métal, dans l’approximation des électrons libres. Choisissons une bande centrée en

0k et OzB // . Pour une jauge de Landau, le potentiel vecteur s’écrit ),,( OBxOA .

L’équation de Schrödinger d’un électron s’écrit en remplaçant p par Aep :

E

m

p

m

eBxp

m

pzyx

222

222

Mesurer les propriétés électroniques des solides

54

et on peut remplacer zzyy

kpkp ; car 0],[],[ xpxpzy

. On réécrit cette équation

comme celle d’un oscillateur harmonique selon Ox grâce à :

2

0

2

2222

)(2

1

2

/(

2xxm

m

eBkxBe

m

eBxpc

yy

où m

eBc et

eB

kx

y

0

L’équation de Schrödinger est donc celle d’un oscillateur harmonique à une dimension selon x et celle d’électrons libres selon z :

Em

pxxm

m

pz

c

x

2)(

2

1

2

2

2

0

2

2

L’énergie propre s’écrit :

m

knE z

cn22

122

où n entier

Comparons cette situation à celle sans B où on aurait juste :

En l’absence de B, on aurait des états d’énergie mkkkEzyx

2/)(222222

séparées entre

elles dans l’espace réciproque par L/2 (L côté du solide dans la direction considérée) et une surface de Fermi sphérique.

En présence de B : perpendiculairement à B, le mouvement des électrons est coincé sur des orbites, mais il reste libre parallèlement à B. On a maintenant des états orbitaux jusqu’au niveau de Fermi kF autorisant seulement certaines énergies quantifiées :

kx

ky

surface deFermi

kx

ky

surface deFermi

n=0

n=1

n=2

n=3

B

kx

kz

n=0n=1

n=2

B

ky

sans champ B avec champ B

tubes de Landau

n=3

Mesurer les propriétés électroniques des solides

55

A trois dimension, les états autorisés sont donc situés sur des tubes dîts de Landau, car tous les kZ sont autorisés. Au lieu d’avoir des états discrets contenus dans une sphère de Fermi, on a des états sur des tubes de Landau contenus dans la sphère (voir ci-contre).

On peut généraliser le calcul à un métal quelconque dans le cas quantique. Le résultat est le même mais la masse qui intervient dans c est renormalisée :

*

CR

cm

eB où

E

EAm

CR

)(

2

2

*

où A(E) est l’aire de la section de la surface de Fermi et d’un plan perpendiculaire à B dans l’espace réciproque. Cette aire est quantifiée :

eBnBEA

n

2),(

1

condition d’Onsager

et est une constante, proche de 0.5 pour un métal. L’énergie des électrons correspondants s’écrit :

m

knE z

cn2

22

La densité d’états des électrons dans ce cas de figure se déduit en considérant qu’il s’agit d’une collection d’électrons libres selon z à une dimension, de densité chacuns :

c

zDnEh

mL

1221

d’où au total :

0

1)(

n cnE

E

Quand on fait varier le champ B, les états autorisés sont portés par les tubes de Landau repérés par leur indice n. La section des tubes augmente avec B et croise la surface de Fermi en quelques points. Mais quand un tube arrive sur un bord de surface de Fermi, le nombre d’états à l’intersection est bien plus important, ce qui arrive quand :

eBnA

extremum

2

Pour chaque tube n passant par ce bord, il y a « forte » intersection au champ B et dans ce cas, beaucoup d’électrons qui participent au phénomène observé. Cela a lieu quand:

extremum

A

en

B

21

kz

E

hc

EF

Mesurer les propriétés électroniques des solides

56

Quand le champ B augmente, le tube de Landau s’étend et croise la surface de Fermi (ici une sphère). A la 3ème figure, il y a intersection bien plus importante, car le tube rencontre un bord de la surface.

Pour chaque surface extremale de la surface de Fermi donnée, il peut donc apparaître des oscillations en 1/B de période :

extremumA

e

B

2)

1(

Si il y a plusieurs extremas de la surface de Fermi, on observera la superposition de plusieurs oscillations.

2. Les expériences montrant les oscillations

Ces oscillations peuvent être observée via la mesure de grandeurs sensibles à la densité d’électrons à la surface de Fermi dans les métaux :

- l’aimantation M en fonction de B (oscillations de Haas Van Alphen) : ici, l’aimantation étant proportionnelle dans un métal à la densité au niveau de Fermi (susceptibilité de Pauli), elle sera sensible au croisement entre tubes et surface de Fermi.

- la magnéto-résistance en fonction de B (oscillations Shubnikov de Haas)

- la magnéto-résistance en fonction de l’angle (AMRO)

- la longueur

- la température

- l’effet thermoélectrique

- la conductivité thermique

- l’atténuation sonore

B augmente

oscillations

Mesurer les propriétés électroniques des solides

57

Aimantation (gauche), Atténuation du son (droite) en fonction de 1/B

température (gauche), Magnétorésistance (droite) en fonction du champ B

Effet Peltier (gauche), effet Thermoélectrique (centre), conductivité thermique (droite)

Mesurer les propriétés électroniques des solides

58

On peut, en faisant varier la direction du champ, sonder les différentes surfaces extrêmales. Voici quelques exemples de surfaces et d’oscillations associées :

Notons enfin qu’on peut mesurer directement la résonance cyclotron d’une autre façon, en utilisant une mesure d’ondes millimétriques ou infrarouge lointain (vers le THz), qui excitent directement des transitions entre niveaux de Landau. Pour cela, on applique un champ parallèlement à la surface d’une cavité résonante où on a placé le matériau à étudier dans un champ électrique oscillant. L’absorption de la cavité est alors mesurée à fréquence constante en faisant varier B. Des pics d’absorption sont observés en 1/B.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

59

3. effets de la température et du desordre, informations accessibles

La température élargit le niveau de Fermi en EF d’une largeur typique kBT. Le désordre (induit par la diffusion sur des impuretés ou autres) élargit les niveaux de Landau en énergie de / où est le temps de diffusion (temps entre deux chocs subis par un électron). Pour observer des oscillations quantiques, il faut donc à la fois :

cBTk et

c /

Cela implique des mesures à la fois à basse températures et dans des matériaux de bonne qualité sans impuretés.

Plus quantitativement, on peut montrer (traitement Lifshitz-Kosevich) que la magnéto-résistance ou l’aimantation dans une mesure d’oscillation quantique s’écrit :

B

FRRRMouR

SDT2sin

La période des oscillations en eAextremum

2/ donne l’aire extrémale de la surface de

Fermi perpendiculaire à B comme nous l’avons déjà indiqué.

le termeT

R s’exprime:

)sinh( x

xR

T où

B

Tmx

CR

*7.14

Il vient de l’élargissement en kBT du niveau de Fermi. La mesure de sa dépendance en

température permet de déduire *

CRm

le termeD

R (de “Dingle”) s’exprime:

C

CRDB

TmR exp7.14exp

*

Il est lié à l’élargissement des niveaux de Landau en 1/. Le désordre dans l’échantillon impose ce temps (temps de diffusion) : plus l’échantillon est désordonné, plus est court, et plus RD est exponentiellement petit. La mesure de RD renseigne donc sur le désordre dans le matériau.

le termeS

R s’exprime:

)2

cos(*gmR

S

où m* est la masse effective de la bande (ne pas confondre avec *

CRm ).

kz

E

hc

EF

h/

kBT

Mesurer les propriétés électroniques des solides

60

La mesure de la variation en B et T permet donc de déduire les aires extrêmes des surfaces de Fermi, la masse cyclotron, le taux de diffusion associé au désordre dans l’échantillon, et la masse effective m*.

Ordres de grandeur et limitations :

- champs nécessaires : dans un métal standard, Bc

1.0 en meV/Tesla, or

KmeVTkB

/1.0 . On veut TkBc

donc il faut des champs B très supérieurs à 1

Tesla et des températures de l’ordre du Kelvin.

- qualité d’échantillon nécessaire : le terme de Dingle RD décroit très vite avec le desordre.

F

C

D

v

leBR

expexp

où l est le libre parcours moyen et vF la vitesse de Fermi.

Si l=500 Angstrom, alors à 40 Tesla, 410

DR

Si l=100 Angstrom, alors à 40 Tesla, 2010

DR

C’est la limitation technique la plus importante pour ce type de mesures : avoir des échantillons extrêmement purs pour éviter tout désordre sans quoi les oscillations sont trop petites et indétectables.

B. ARPES et STM

Voir le cours de Véronique Brouet.

Mesurer les propriétés électroniques des solides

61

Bibliographie

Niveau des ouvrages : niveau L3-M1 niveau M2 niveau plus spécialisé

Ouvrages généraux recouvrant plusieurs sujets du cours :

Physique des solides, N. Ashcroft, D. Mermin, EDP Sciences Principles of Condensed Matter Physics, Chaikin & Lubensky Physique de l'état solide, C. Kittel, Dunod Physique des électrons dans les solides, H. Alloul, Les Ed. de l’école Polytechnique

Réponse linéaire :

Physique statistique hors d'équilibre - Processus irréversibles linéaires, Noelle Pottier, CNRS Editions Entropy, Order Parameters, and Complexity, James P. Sethna, Oxford Master Series Many-Body Quantum Theory in Condensed Matter Physics: An Introduction , H. Bruus, K. Flensberg, Oxford

Magnétisme et Susceptibilités magnétiques:

Magnetism in Condensed Matter, S. Blundell, Oxford Master Series Quantum Theory of Magnetism, R. White, Springer The theory of magnetism made simple, D. Mattis

Neutrons :

JDN 16 Diffusion Inélastique des Neutrons pour l'Étude des Excitations dans la Matière Condensée : http://www.neutron-sciences.org/index.php?option=com_toc&url=/articles/sfn/abs/2010/01/contents/contents.html

Optique :

Optical Properties of Solids, Mark Fox, Oxford Master Series Electrodynamics of Solids: Optical Properties of Electrons in Matter , M. Dressel, G. Grüner, Cambridge Optical Properties of Solids, F. Wooten

RMN :

Principles of Magnetic Resonance, C.P. Slichter, Springer Principles of Nuclear Magnetism, A. Abragam, Oxford The NMR probe of High Tc Materials, R. Walstedt, Springer Understanding NMR Spectroscopy, K. Keeler, Ed Wiley

STM :

Introduction to Scanning Tunneling Microscopy, C. JULIAN CHEN, OXFORD

Mesure des surfaces de Fermi :

Band theory and electronic properties of solids, J. Singleton, Oxford Master Series

Mesurer les propriétés électroniques des solides

62