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Mesures quantitatives de la charge mentale : avance ´es, limites et usages pour la pre ´vention des risques professionnels Quantitative measurement of mental workload: Progress, limitations and practice for the prevention of occupational risks L. Cuvelier Centre d’e ´tudes de l’emploi (CEE), centre de recherches et d’e ´tudes sur l’a ˆge et les populations au travail (CREAPT), 29, promenade Michel-Simon, 93166 Noisy-le-Grand cedex, France Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Summary Purpose. In the present context, ‘‘human factors’’ and occupational health professionals are frequently asked to assess the mental workload of a task and its acceptability for the workers. The creation of methods for measuring mental workload generates an important scientific activity around the world. This review provides an overview of contemporary methods for the measurement of mental workload. Method. A review of the literature in ergonomics and cognitive science has been conducted. It enabled initially to define concepts, and then to identify the methods developed to measure mental workload. Results. The methods for measuring mental workload can be grou- ped into two categories: firstly, methods based on objective indicators that include analysis of performances and measurement of physio- logical indicators and, secondly, methods based on subjective indicators, taking into account the views of the workers on their own workload. These subjective methods are currently the most used for the design and improvement of working conditions. Conclusion. In practice, field studies do not reflect the scope of projects conducted by researchers in order to measure workload. Therefore, the current research aimed particularly at making these existing methods easier to use. Another approach is to focus more on the load factors rather than on the quantitative measurement of mental workload. ß 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Cognitive science, Workload, Mental processes, Methods Re ´sume ´ Objectifs. Dans le contexte actuel, les professionnels des facteurs humains et de la sante ´ au travail sont fre ´quemment sollicite ´s pour e ´valuer la charge mentale d’une ta ˆche et son caracte `re acceptable pour l’ope ´rateur. La cre ´ation de me ´thodes de mesure de la charge mentale alimente une activite ´ scientifique importante de par le monde. Cette revue de question propose une synthe `se des me ´thodes contemporaines de mesures de la charge mentale et de leurs limites. Me ´thodes. Une revue de la litte ´rature en ergonomie et en science cognitive a e ´te ´ re ´alise ´e. Elle a permis dans un premier temps de de ´finir les concepts, puis de recenser les me ´thodes de ´veloppe ´es pour mesurer la charge mentale. Re ´sultats. Les me ´thodes de mesures de la charge mentale recense ´es peuvent e ˆtre regroupe ´es en deux cate ´gories : premie `rement, les me ´thodes base ´es sur des indices objectifs qui regroupent les me ´tho- des d’analyses de la performance et les mesures d’indicateurs physiologiques et, deuxie `mement, les me ´thodes base ´es sur des indices subjectifs, qui prennent en compte le point de vue de l’ope ´rateur sur sa propre charge de travail. Ce sont les me ´thodes subjectives qui sont actuellement les plus utilise ´es pour la concep- tion et l’ame ´lioration des conditions de travail. Conclusion. Les e ´tudes mene ´es sur le terrain ne refle `tent pas l’e ´tendue des projets mene ´s en recherche fondamentale pour mesurer la charge de travail. Les recherches actuelles visent donc notamment a ` rendre plus facile d’utilisation les me ´thodes existantes. Une autre orientation consiste a ` s’inte ´resser davantage aux facteurs de la charge pluto ˆt qu’a ` sa mesure quantitative. ß 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´serve ´s. Mots cle ´s : Science cognitive, Charge de travail, Processus mentaux, Me ´thodes e-mail : [email protected]. Rec ¸u le : 21 de ´cembre 2011 Accepte ´ le : 23 janvier 2012 Me ´moire 120 1775-8785X/$ - see front matter ß 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´serve ´s. 10.1016/j.admp.2012.02.040 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2012;73:120-126

Mesures quantitatives de la charge mentale : avancées, limites et usages pour la prévention des risques professionnels

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Mesures quantitatives de la charge mentale :avancees, limites et usages pour laprevention des risques professionnels

Quantitative measurement of mental workload: Progress,limitations and practice for the prevention of occupationalrisks

L. CuvelierDisponible en ligne sur

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Recu le :21 decembre 2011Accepte le :23 janvier 2012

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Centre d’etudes de l’emploi (CEE), centre de recherches et d’etudes sur l’age et les populationsau travail (CREAPT), 29, promenade Michel-Simon, 93166 Noisy-le-Grand cedex, Francewww.sciencedirect.com�

SummaryPurpose. In the present context, ‘‘human factors’’ and occupational

health professionals are frequently asked to assess the mental

workload of a task and its acceptability for the workers. The creation

of methods for measuring mental workload generates an important

scientific activity around the world. This review provides an overview

of contemporary methods for the measurement of mental workload.

Method. A review of the literature in ergonomics and cognitive

science has been conducted. It enabled initially to define concepts,

and then to identify the methods developed to measure mental

workload.

Results. The methods for measuring mental workload can be grou-

ped into two categories: firstly, methods based on objective indicators

that include analysis of performances and measurement of physio-

logical indicators and, secondly, methods based on subjective

indicators, taking into account the views of the workers on their

own workload. These subjective methods are currently the most used

for the design and improvement of working conditions.

Conclusion. In practice, field studies do not reflect the scope of

projects conducted by researchers in order to measure workload.

Therefore, the current research aimed particularly at making these

existing methods easier to use. Another approach is to focus more on the

load factors rather than on the quantitative measurement of mental

workload.

� 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Cognitive science, Workload, Mental processes, Methods

ResumeObjectifs. Dans le contexte actuel, les professionnels des facteurs

humains et de la sante au travail sont frequemment sollicites pour

evaluer la charge mentale d’une tache et son caractere acceptable

pour l’operateur. La creation de methodes de mesure de la charge

mentale alimente une activite scientifique importante de par le

monde. Cette revue de question propose une synthese des methodes

contemporaines de mesures de la charge mentale et de leurs limites.

Methodes. Une revue de la litterature en ergonomie et en science

cognitive a ete realisee. Elle a permis dans un premier temps de

definir les concepts, puis de recenser les methodes developpees pour

mesurer la charge mentale.

Resultats. Les methodes de mesures de la charge mentale recensees

peuvent etre regroupees en deux categories : premierement, les

methodes basees sur des indices objectifs qui regroupent les metho-

des d’analyses de la performance et les mesures d’indicateurs

physiologiques et, deuxiemement, les methodes basees sur des

indices subjectifs, qui prennent en compte le point de vue de

l’operateur sur sa propre charge de travail. Ce sont les methodes

subjectives qui sont actuellement les plus utilisees pour la concep-

tion et l’amelioration des conditions de travail.

Conclusion. Les etudes menees sur le terrain ne refletent pas

l’etendue des projets menes en recherche fondamentale pour mesurer

la charge de travail. Les recherches actuelles visent donc notamment

a rendre plus facile d’utilisation les methodes existantes. Une autre

orientation consiste a s’interesser davantage aux facteurs de la

charge plutot qu’a sa mesure quantitative.

� 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

Mots cles : Science cognitive, Charge de travail, Processus mentaux,Methodes

e-mail : [email protected].

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1775-8785X/$ - see front matter � 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.10.1016/j.admp.2012.02.040 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2012;73:120-126

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Mesures quantitatives de la charge mentale

Contexte de l’etudeA la lumiere des transformations recentes du travail, la notionde charge de travail devient une preoccupation de tous lesacteurs de l’entreprise et des differentes disciplines qui fontdu travail et des travailleurs leur objet d’etude. Les nouvellesformes d’organisation et les nouvelles techniques de mana-gement (lean management, logique de competence, certifica-tion ISO, qualite totale, etc.), la reduction et l’allongement dutemps de travail sont a la source de la resurgence de ce themedans le debat social.En marge de ces evolutions organisationnelles, les enquetesstatistiques temoignent d’une intensification des rythmes detravail [1]. La relation client fournisseur est desormais pre-gnante a tous les niveaux de l’entreprise. On observe, avec lageneralisation des systemes de production en flux tendu,mais aussi avec le developpement du secteur tertiaire etnotamment des relations de service, une augmentation dessituations d’« auto prescription » de la charge de travail.L’equipe et/ou le travailleur en activite doivent de plus enplus reguler leur propre charge de travail et effectuer desarbitrages sur le terrain, bien souvent de facon quasi clan-destine en transgressant des regles formelles [2]. Cette evolu-tion est certes synonyme d’une plus grande autonomie etd’une augmentation des marges d’initiative pour les opera-teurs, mais elle engendre aussi une plus forte responsabilisa-tion de chacun. Ainsi, selon l’enquete « Conditions de travail »organisee et exploitee par la DARES (1999), 60 % des salariesdisent qu’une erreur dans leur travail les exposerait a unrisque de sanction sur leur emploi ou leur remuneration, alorsqu’ils n’etaient que 45 % en 1991.Dans le meme temps, le travail est progressivement transferedes humains vers des automates specialises et le recours auxnouvelles technologies de l’information et de la communica-tion (NTIC) se generalise, entraınant des changements impor-tants dans la realisation et dans la division des taches al’echelle planetaire [3]. Lahlou, a propos de travaux realisesa EDF sur le travail de bureau et le « debordement cognitif »,ecrit : « En vidant les ateliers, nous avions rempli les bureaux.Et c’est desormais ce travail de bureau que les technologies del’information sont en train de bouleverser » [4]. De meme,dans le contexte automobile d’une part, et dans le contextenucleaire d’autre part, Le Guilcher et Villame [5] sont confron-tees a des questions sur la charge de travail en lien avec lamultiplication des informations et la modification des inter-actions hommes–machines. Ainsi, quel que soit le secteur oule niveau d’intervention (conception, amenagement de postesexistants, organisation du travail. . .), le travail a analyserdevient de plus en plus cognitif et, au premier plan des debatssur la charge de travail, la notion de charge mentale prend del’importance, suscitant de plus en plus d’interrogations.Ces preoccupations se concretisent par l’introduction dans lesenquetes conditions de travail, d’indicateurs de la chargementale (notamment sous forme de questions cherchant a

deceler des exigences contradictoires qui s’adressent auxsalaries) et par la publication en juillet et mars 2000 de lanorme europeenne EN ISO 10075-1 et 2 sur les principesergonomiques concernant la charge de travail mental. Cettenorme utilise le terme « contrainte mentale » pour designer« l’ensemble des influences exercees par des facteurs externessur un etre humain et l’affectant mentalement » et le terme« astreinte mentale » pour definir « l’effet immediat de lacontrainte mentale chez l’individu (et non l’effet a longterme) » (EN ISO 10075-1 et 2) [6]. Ce texte dresse une listede facteurs d’influence de la charge de travail mental, liste quiillustre bien combien ce concept de charge mentale estdifficile a manipuler, mal defini et souvent confondu avecdes concepts proches, tel celui du stress [7]. En effet, malgre larecurrence du terme dans les publications de disciplinesvariees, aucune definition ne fait actuellement consensuset, depuis son apparition, la notion de charge mentale semblepresque embarrasser la communaute des chercheurs, susci-tant meme parfois de vives polemiques.

Interet et objectifs

« La notion de charge mentale [. . .], sans statut precis, [faitpartie] des notions qu’on veut chasser, mais qui reapparais-sent toujours » [8]. Preuve qu’elle porte, malgre son caractere« flou » et « ambigu » un interet a la fois social et economique.A court terme, une augmentation de la charge mentale destravailleurs entraıne une augmentation du risque d’erreurs,eventuellement sources d’accidents. A long terme, meme si lelien entre la sante et la charge mentale est loin d’etre etabli,plusieurs etudes de terrain et enquetes mettent en evidenceles effets pathogenes de certains aspects de l’organisation dutravail. A titre d’exemple, une etude epidemiologique reali-see sur un echantillon d’employees administratives(l’enquete ESTEV) a pu etablir un lien entre la prise demedicaments psychoactifs et le fait de devoir toujours sedepecher [9].Dans le domaine economique et, notamment dans le domainede la gestion, la charge de travail est la resultante d’uneadequation entre, d’une part, la demande d’un marche et,d’autre part, la quantite et la qualite de main d’œuvre neces-saire pour repondre a cette demande. La notion est alors tressouvent inscrite dans des logiques tayloriennes, avec desmesures de temps de travail et une parcellarisation destaches. En phase de conception, la prise en compte du « fac-teur humain » devient un enjeu primordial. Il s’agit de garantirun certain niveau de qualite du produit, d’augmenter lafiabilite des systemes, de preserver la sante des travailleurs,tout en diminuant le cout et la duree de la production. Lesprofessionnels du travail humain sont alors frequemmentsollicites, en particulier lorsqu’il s’agit :� d’emettre des preconisations sur les modalites de pre-sentation des informations ;

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� de formuler un avis sur l’acceptation ou le rejet d’unsysteme ou d’un dispositif nouveau ;� d’assurer une repartition optimale des taches entre lesmachines et les hommes [5].A travers ces thematiques variees, s’impose la necessite dedefinir des criteres permettant d’evaluer la charge mentaled’une tache et son caractere acceptable pour le travailleur. Lacreation de methodes de mesure de la charge mentale estdonc une problematique centrale, transversale aux differentssecteurs de l’entreprise, comme aux differentes disciplines quis’interessent aux travailleurs. Dans le champ de la recherche,le theme de la charge mentale alimente une activite scienti-fique importante. Cette revue de question propose une syn-these des methodes contemporaines de mesures de la chargementale et de leurs limites.

Definitions et presentation des concepts

Charge de travailLes textes relatifs a la charge de travail debutent generale-ment par une definition fondee sur la distinction classique energonomie entre la contrainte (stress en anglais) et l’astreinte(strain) :� la contrainte (ou niveau d’exigence) regroupe a la fois lesexigences de la tache (i.e. les facteurs lies a la charge d’entreetels : les moyens, la quantite et la qualite des informations atraiter. . .) et les exigences de performance auxquelles sontsoumis les operateurs (resultats attendus, qualite a obtenir,delai a respecter. . .) ;� l’astreinte represente le degre de mobilisation, ou l’effortde l’operateur, en reference a l’activite reelle. Elle sera doncfonction de caracteristiques propres aux individus comme lacompetence, l’expertise, la motivation, etc.Dans le langage courant, le terme « charge de travail » estequivoque car il designe a la fois la quantite de travailproduite ou a produire et les effets de ce travail (en etantbien souvent confondu avec le terme « surcharge »). Energonomie, depuis la definition de Sperandio en 1972 [10],le terme de charge de travail est communement reserve al’astreinte [11,12]. Les contraintes sont des facteurs caracteris-tiques qui ne determinent qu’en partie la charge de travail. Defacon presque similaire, Leplat ecrit que la charge de travailest une « consequence de l’activite pour l’agent qui repondaux exigences d’une tache » [8].

Charge physique et charge mentale

L’utilisation du terme « charge mentale » suppose une dis-tinction des aspects mentaux et physiques de la charge detravail. Historiquement, cette separation s’explique par unepredominance des recherches initiales menees en physiologieet en medecine, alors que les astreintes etaient essentielle-ment de nature physique. L’evolution du travail et l’interet des

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chercheurs pour les versants psychologiques et cognitifs del’activite ont conduit a etendre la notion a celle de « chargementale ». Mais cette formulation pourrait laisser croire qu’ilexiste un clivage entre travaux physiques et intellectuels,clivage depuis longtemps combattu en ergonomie. Il est doncimportant de preciser que le terme « charge mentale detravail » est une simplification de l’expression « charge detravail a dominante mentale », qui signifie que l’on s’interesseprincipalement aux aspects mentaux de la tache. Ces nuancessoulevent les reserves de certains auteurs concernant« l’intrication » de ces deux facettes physiques et mentalesde la charge et leur mise en garde envers la tendance plus oumoins implicite a considerer la charge de travail comme lasomme des charges physiques et mentales de travail [13].

Charge mentaleLa notion de charge mentale a ete utilisee a plusieurs epoqueset dans plusieurs secteurs de la psychologie et de l’ergonomie.Etant ancienne (environ un siecle en psychologie et un demi-siecle en ergonomie), les tentatives pour retracer son histoiresont nombreuses. L’origine du concept remonte aux etudes surles limites du systeme humain de traitement de l’information[5,8,14]. La notion de charge mentale est donc fondee surl’hypothese que l’homme possede une « capacite serieusementlimitee pour le traitement de l’ensemble des materiaux a unmoment donne » [14]. Elle a ainsi ete rattachee au modele de latheorie de l’information. Selon ce modele, l’homme est doted’un « canal unique » de traitement de l’information ayant une« capacite limite ». La charge mentale correspond alors a laproportion de cette « capacite limitee » qui est mobilisee pourl’execution d’une tache. Un autre courant, qui s’oppose a celuidu « canal unique », se base sur la gestion des ressourcesattentionnelles. Le modele de reference considere l’attentioncomme un reservoir de capacite, de ressources attentionnellesou de ressources cognitives, susceptibles d’etre mobilisees enplus ou moins grande quantite dans les diverses operationsmentales. Dans ce cadre, la notion de charge mentale est nee dusouci d’operationnaliser les ressources attentionnelles [15].On voit apparaıtre, a travers ces quelques definitions, unecertaine confusion des termes « cognitif » et « mental », refletd’une ambiguıte quant a la place des aspects psychiques dansla charge mentale. En temoignent d’ailleurs les nombreuxsynonymes qui lui sont alloues : effort mental, cout cognitif,charge attentionnelle, astreinte mentale, ressources menta-les, etc. Ainsi, comme evoque precedemment, les notionsrelatives a la charge mentale ne sont pas encore stabiliseeset il n’existe pas actuellement de definition universellementreconnue de ce concept (si ce n’est a travers l’analogiecommunement menee avec la charge physique).

Mesurer la charge mentaleTout comme la definition de la charge mentale, sa mesuredivise depuis des decennies la communaute des chercheurs.

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Mesures quantitatives de la charge mentale

L’un des principaux debats porte sur la prise en compte ou nondu point de vue du travailleur dans l’evaluation de sa charge.En 1977, dans un article entierement consacre a la chargementale, Welford notait : « plusieurs etudes recentes ontutilise l’auto-estimation par des ouvriers comme base d’esti-mation de la charge de travail. En un sens, c’est un pas enarriere, bien que se soit peut-etre le mieux que l’on puissefaire dans bien des cas » [14]. Les textes regroupes dansl’ouvrage collectif « Human Mental Workload » publie en1988 traduisent l’essor impressionnant de ces methodesd’evaluation subjectives durant la decennie qui a suivi laparution de l’article de Welford [16].Aujourd’hui, la plupart des syntheses traitant de la mesure dela charge mentale repertorient les differentes methodes endeux categories distinctes [17–19] :� les methodes basees sur des indices objectifs, quiregroupent les methodes d’analyses de la performance etles mesures d’indicateurs physiologiques ;� les methodes basees sur des indices subjectifs, quiprennent en compte le point de vue de l’operateur sur sapropre charge de travail.Desormais, pour beaucoup d’auteurs, la prise en compte dansl’evaluation de la perception du travailleur sur sa proprecharge mentale de travail est consideree comme essentielleet seuls les resultats d’evaluations basees sur des indicessubjectifs peuvent etre consideres comme de « vrais » indi-cateurs, susceptibles de « toucher au plus pres l’essence de lacharge mentale » [20,21].

Techniques fondees sur des indicesobjectifs

Analyses de la performance

Les methodes basees sur les analyses de la performance partentdu principe que, la capacite mentale d’un sujet etant limitee, laperformance obtenue dans l’accomplissement d’une tache vase degrader si les exigences de cette tache augmentent. Onpeut donc correler des indicateurs lies a la charge d’entree (i.e.aux exigences de la tache) avec des indicateurs de performancesur les resultats, afin d’evaluer la charge mentale (par exemple,mesure du taux d’erreur en fonction du flux d’information atraiter). La limite etant qu’une degradation de performancen’est observable que si les exigences depassent la capacite dusujet : « ce n’est qu’aux limites de compensation du systemeque la relation devient signifiante » [12].Une technique largement repandue pour palier a ce problemeconsiste a ajouter une seconde tache, plus simple et operative(tel reagir a un signal lumineux ou sonore en appuyant surune touche) : c’est la methode dite de la double tache [22].Deux protocoles sont alors possibles :� soit l’on fait varier les exigences de la tache principale (outache primaire, a realiser en priorite) et l’on observe les

variations de la performance de la tache secondaire. Cesvariations sont interpretees comme des mesures de lacapacite residuelle ou capacite laissee disponible par la tacheprimaire. Elles refletent donc les variations de la chargementale de cette premiere tache ;� soit les roles des taches primaire et secondaire sontinverses : la tache primaire devient une tache simple etrepetitive (mais que le sujet doit suivre en priorite) et c’est laperformance de la tache secondaire qui est mesuree (mesurede la deterioration de l’ecriture du sujet par exemple).La principale critique adressee a ces methodes est qu’ellessupposent des modes operatoires constants. Or ce postulatne tient pas si l’on considere des operateurs en situation reelle,executant des taches pour lesquelles ils disposent d’une expe-rience. Les etudes de Sperandio [10] sur l’analyse du travail descontroleurs aeriens montrent en effet que les processus ope-ratoires se modifient avec l’augmentation du niveau d’exigencede la tache : lorsque la charge de travail s’accroıt, les operateurschangent « de strategies » avant d’etre debordes. Ces change-ments de modes operatoires faussent les criteres de perfor-mance et engendrent des problemes de validite ecologique lorsde la mise en œuvre de la methode de la double tache. Parailleurs, ces methodes posent des problemes d’ethique : dansquelles mesures peut-on interferer avec la tache de l’operateursans risquer de compromettre son activite ? Enfin, differentsfacteurs peuvent modifier les criteres de performance, biaisantdirectement l’evaluation de la charge : des enjeux motivation-nels ou strategiques peuvent conduire l’operateur a agir diffe-remment [12], la formation peut donner l’impression que deuxcharges sont equivalentes, alors que l’introduction de contrain-tes fait reapparaıtre une inegalite de charge [8].Malgre ces limites et contraintes, les recherches actuellesutilisent frequemment des analyses de performance, en par-ticulier la methode de la double tache [23]. Mais cette utilisa-tion est generalement reservee a des contextesexperimentaux tres controles.

Mesure d’indicateurs physiologiques

Les indicateurs physiologiques sont multiples et varies et leurutilisation pour l’evaluation de la charge de mentale a donnelieu a de nombreuses recherches et publications [24]. L’hypo-these fondatrice est que le processus de traitement del’information implique le systeme nerveux, et que l’activitedu systeme nerveux se manifeste a travers des parametresphysiologiques mesurables. Parmi les principales mesuresutilisees, on peut citer les mesures des activites cardiaques etrespiratoires, les analyses de mouvements oculaires ou lafrequence de fermeture des paupieres. Le domaine de l’avia-tion est particulierement riche en exemples d’application deces methodes. Le grand avantage de ces methodes est qu’el-les permettent le recueil continu de donnees, eventuelle-ment sur de longues periodes, sans interferer avec larealisation de la tache.

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Mais beaucoup de critiques sont emises a l’encontre desmethodes de mesure de la charge mentale basees sur desparametres physiologiques. Methodologiquement, ellesnecessitent la mise en œuvre de dispositifs techniquescomplexes, souvent tres chers et relativement lourds pourl’operateur (lien physique a un instrument par exemple) [20].De plus les enregistrements obtenus sont difficiles a analyseret generalement « bruites » : les reponses physiologiquesrecoltees ne renseignent rien des evenements qui les ontinduits et le lien avec des parametres observables est rare-ment etabli avec certitude. En outre, l’impact des emotions etdes aspects psychiques sur ces parametres est fortementsuspecte, ce qui renvoie aux ambiguıtes de la definition dela notion de charge mentale. La prise de mesures, le respectdes protocoles operatoires, le controle des perturbations del’environnement tout comme l’interpretation des donneesnecessitent donc une importante maıtrise de la part desanalystes [5].

Techniques fondees sur des indicessubjectifs

Les techniques basees sur des indices subjectifs (ou evaluationsubjective) s’appuient sur des outils de questionnement directde l’operateur. Pour beaucoup d’auteurs, cette prise encompte, dans l’evaluation, de la perception du travailleursur sa propre charge mentale de travail est essentielle. Cesmethodes sont donc les plus utilisees actuellement. Unesimple interrogation, a l’aide d’une echelle analogique, peutetre envisagee. On obtient ainsi une estimation globale de lacharge mentale percue par l’operateur, mais les biais classi-ques du jugement subjectif (effets de saillance et de recence)affectent la mesure. Des techniques multidimensionnellesont donc ete creees afin de questionner l’operateur sur desdimensions qui ne lui seraient pas venues spontanement al’esprit. Un traitement statistique est ensuite realise surl’ensemble des reponses pour obtenir un indice quantitatif

Tableau ILes six dimensions de la charge mentale selon la methode NASA-TLThe six dimensions mental workload according to the NASA-TLX metExigences mentales (EM) Quelle est la demande mentale (p.

chercher, etc.) ? La tache est-elle faExigences physiques (EP) Quel niveau d’activite physique es

etc.) ? La tache est-elle facile ou exlaborieuse, etc. ?

Exigences temporelles (ET) Quel niveau de pression temporellou de ses parties ? Le rythme etait

Performance (P) Pensez-vous avoir reussi a accompperformance dans la realisation de

Effort (E) Quel est le cout du travail (mentalde performance ?

Niveau de frustration (NF) Pendant la tache, vous etes-vous sen securite, recompense, satisfait,

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global de la charge de travail mentale. A la difference desmesures basees sur l’analyse de la performance, qui sontspecifiques a la situation observee et doivent etre « tailleessur mesure », les echelles d’evaluations subjectives (commeles mesures d’indicateurs physiologiques) presentent uncaractere plus generique et peuvent etre utilisees dans diffe-rents domaines : elles autorisent ainsi la realisation d’analysecomparative.Les techniques developpees sont nombreuses : SubjectiveWorkload Assessment Technique (SWAT), Instantaneous SelfAssessment (ISA), les echelles de Bedford ou de Cooper-Harper(d’apres le nom de leurs auteurs), etc. Parmi celles-ci, l’une desmethodes les plus utilisees dans les etudes sur la charge detravail mentale est la NASA – Task Load indeX (NASA-TLX,developpee par la NASA) [21]. Les auteurs justifient le choix decette technique en evoquant sa grande sensibilite et sa facilited’utilisation. Cette technique fournit une note globale de lacharge mentale par agregation de six mesures affectees a sixdimensions de la charge, considerees comme independanteset supposees correspondre a six caracteristiques sous-jacen-tes (ou composantes) de la charge mentale. Ces six compo-santes sont l’activite mentale, l’activite physique, lacontrainte temporelle, la performance, l’effort et le niveaude frustration. Elles sont presentees dans le tableau ci-des-sous (tableau I).A l’issue de la realisation d’une tache, le sujet doit, d’une part,evaluer sur une echelle continue chacune des six dimensions(ce qui permet d’attribuer une note, comprise entre 0 [faible/mauvaise] et 100 [elevee/bonne] a chacune de ces six dimen-sions), et d’autre part, jauger l’importance relative des dimen-sions, en les comparant deux a deux. Ces 15 comparaisonsbinaires refletent le poids de chaque dimension et permettentainsi de calculer, via la moyenne ponderee, un indice global dela charge mentale.Sur le plan methodologique, les methodes d’evaluation sub-jective apparaissent a priori plus faciles a mettre en œuvrepuisqu’elles ne sont « que de simples questionnaires » dontles reponses peuvent etre aisement traitees grace aux moyens

X.hod.

ex., reflechir, decider, calculer, se rappeler, regarder,cile ou exigeante, simple ou complexe, astreignante ou non ?

t necessaire (p. ex., pousser, tirer, tourner, controler, activer,igeante, lente ou rapide, detendue ou epuisante, calme ou

e ressentez-vous du fait de l’allure ou du rythme de la tache-il lent et paisible ou rapide et effrene ?lir les taches allouees ? Etes-vous satisfaits de votres objectifs ?

et physique) necessaire pour atteindre votre niveau

entis en difficulte, decourage, irrite, stresse, gene, ou a l’inversea l’aise ?

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Mesures quantitatives de la charge mentale

informatiques. Neanmoins, ces echelles sont generiques etapparaissent generalement tres eloignees de la situationconcrete de travail, mettant souvent en difficulte les travail-leurs soumis a l’exercice. Il n’est, par exemple, pas du toutevident pour les sujets soumis a la NASA-TLX de comparerdeux a deux les composantes de la charge mentale [25]. Unephase d’explicitation des differents criteres et des proceduresde saisie (avec notamment la diffusion de fiches recapitula-tives des definitions) est donc necessaire, ce qui augmente letemps, deja relativement long alloue a la passation. Enfin,dans la plupart des cas, ces questionnaires ne sont remplisqu’apres la realisation de la tache, ce qui peut avoir uneinfluence sur la qualite des reponses : les biais du jugementsubjectif et la capacite de memorisation peuvent modifier lesdonnees fournies, en particulier lorsque les taches a realisersont longues.Des limites sont aussi soulevees quant a l’utilite et la validitede cette approche. L’indicateur qui est obtenu, de part sonopacite, ne donne aucune piste d’amelioration ou de concep-tion. Il peut meme parfois fermer le dialogue entre les acteursde l’entreprise. Les interrogations sur la validite porte sur lastructure et le fond des methodes. Les questions poseespermettent-elles vraiment de rendre compte de la chargementale, independamment des aspects physiques etemotionnels ? Les composantes des echelles multidimension-nelles sont-elles reellement independantes ? Les criteres deponderation sont-ils valables meme si le sujet ne respecte pasla transitivite de ses jugements (i.e. rien n’interdit au repon-dant de noter A > B, B > C et C > A) ? Car d’un point de vuemathematique, les types d’operation statistiques utilises doi-vent etre autorises et justifies selon des criteres strictes quiconditionnent la validite du resultat.Ainsi, sur les plans methodologique et structurel, les techni-ques de mesure de la charge mentale basees sur des indicessubjectifs presentent plusieurs limites, qui sont a la source denombreuses problematiques de recherche. Les etudes actuel-lement menees portent sur trois axes d’amelioration possi-bles de ces techniques :� faciliter leur utilisation [26] ;� verifier leur validite et preciser des limites sur lesconditions d’utilisation ;� evaluer la pertinence des modeles mathematiques [27].

Discussion

Cette revue met en evidence les efforts engages dans la volontede disposer de methodes d’evaluation quantitative de la chargementale, afin de definir des criteres d’acceptabilite pour lestravailleurs et pour la performance des systemes. Mais lesetudes menees sur le terrain ne refletent pas l’etendue deces efforts. Les chercheurs sont d’ailleurs bien conscients decette lacune : toutes ces echelles de cotation sont developpeeset testees dans des contextes experimentaux tres controles, qui

peuvent paraıtre tres eloignes de la situation reelle de travail.Par ailleurs, meme si toutes ces methodes aboutissent al’affectation de valeurs numeriques a des parametres ou indi-cateurs quantifiables (par exemple : le nombre de clignementsdes yeux ou la frequence cardiaque pour les methodes phy-siologiques, le temps de reaction ou le taux de reponses exactespour celles basees sur l’analyse de la performance ou bien lesvaleurs sans unite de la charge percue, propres a chacune destechniques utilisees pour les methodes d’evaluation subjec-tive), aucune de ces valeurs ne fournit une mesure de la chargementale de travail en tant que telle. « La charge, phenomenecomplexe, ne peut etre, de maniere satisfaisante, resumee dansune mesure unique » [8]. En outre, quelle que soit la methode etla mesure obtenue, il n’existe pas de seuil d’acceptabiliteassocie a ces indicateurs. L’evaluation est donc forcementcomparative. En pratique, les « recherches-actions » contem-poraines traitant de la charge mentale s’orientent donc plutotvers des analyses de facteurs de charge [28,29]. « Ce qui devientinteressant, ce n’est plus l’evaluation de la charge commeconcept methodologique, mais plutot de developper ce quila fait varier » [30].Ces deux approches ne sont pas independantes ni incompati-bles. D’un cote, pour pouvoir apprehender les variations de lacharge mentale, il est necessaire de definir et de preciser descriteres d’observation du niveau de cette charge mentale. Del’autre, les methodes multidimensionnelles (en particulier laNASA-TLX) sont basees sur la definition de composantes de lacharge mentale. En ce sens, elles constituent aussi des outilspermettant de preciser et de comparer les differents facteursde la charge. L’interet de cette notion de « facteurs de charge »reside dans le fait qu’elle permet d’elargir l’angle de vision,des aspects cognitifs ou physiologiques de la charge mentalea une vision plus globale, assimilant des dimensions collecti-ves, emotionnelles ou affectives. Ces dimensions psychologi-ques s’integrent en effet de plus en plus dans les recherchesen ergonomie cognitive et une voie porteuse pourrait etre dereinterroger les modeles et methodes d’evaluation a lalumiere des etudes recentes sur les relations entre emotionet cognition [31–33].

Conclusion

La charge mentale est un concept ancien, mal defini, mais quidesigne un ressenti evident identifie par tous les acteurs.Malgre des critiques fortes et recurrentes, cette notion suscitetoujours une activite scientifique considerable. Cela demontreson utilite sociale. Des lors, « faut-il au motif qu’il est maldefinit, renoncer [a ce concept] ou faut-il, au motif qu’il nousest indispensable, y travailler pour depasser ces critiques ? »[30]. Il semble que l’evolution actuelle des organisations et del’environnement de travail accentue la necessite de considererce concept. Sur le terrain, les etudes s’orientent plutot vers desanalyses qualitatives des facteurs de charge. Mais beaucoup

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L. Cuvelier Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2012;73:120-126

de chercheurs restent convaincus qu’« un outil fiable demesure de la charge mentale, qui reste a definir, pourraitpermettre d’amenager l’organisation du travail de maniere areduire les accidents, reduire l’inconfort et les tensions res-senties par les travailleurs, et par la meme accroıtre le bien-etre et l’efficience au travail » [34]. Les recherches recentes surce theme s’orientent vers la prise en compte dans ces mesu-res, de la gestion de leurs propres ressources par les opera-teurs. Autrement dit, elles s’attachent non seulement acomprendre l’origine du sentiment de charge mais aussi acomprendre comment ce sentiment contribue a la regulationdes modes operatoires.

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