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Gastroenterol Clin Biol 2006;30 707 C17 MÉTABOLISME OXYDATIF DES CELLULES ÉPITHÉLIALES COLIQUES MUCOSÉCRÉTRICES HT29-CL16E P Fança (1), F Blachier (2), F Kozlowski (1), A David (1), C Hoebler (1) (1) CRNH-UFDNH-INRA-BP71627, 44316 Nantes Cedex 03 ; (2) UNSA-INRA, Domaine de Vilvert, 78352 Jouy en Josas. Le butyrate, Acide Gras à Chaîne Courte (AGCC) produit lors de la fermentation des fibres alimentaires par la flore colique, est le substrat énergétique majeur, via la ß-oxydation, de l’ensemble des cellules épithéliales coliques normales. De plus, il exerce de nombreux effets géniques, dont la modula- tion de l’expression des gènes MUC codant pour les mucines coliques, constituants majeurs de la couche protectrice de mucus tapissant l’épithélium. Le métabolisme oxydatif a été bien étudié dans les cellules épithéliales coliques absorbantes mais reste mal documenté dans les cellules mucosécrétrices, ayant une activité de biosynthèse importante. Notre hypothèse est que cette stimulation génique pourrait être liée au métabolisme énergétique du butyrate. L’objectif de cette étude était donc d’étudier le métabolisme oxydatif des cellules épithéliales coliques tumorales différenciées et muco- sécrétrices HT29-Cl16E. Pour cela, nous avons mesuré les niveaux de consommation de butyrate 2 mM (ajouté en milieu apical) et de glucose 25 mM (présent dans le milieu de culture) et les niveaux d’apparition de certains métabolites (lactate, corps cétoniques) dans les cellules mucosécrétrices HT29-CL16E différenciées en monocouche polarisée. Les capacités d’oxydation de différents substrats énergétiques ([1- 14 C] butyrate 2 mM, [1- 14 C] acétate 2 mM, [U- 14 C] glutamine 4 mM et [1- 14 C] ou [6- 14 C] glucose 25 mM) ont été déterminées par mesure du 14 CO 2 libéré sur 1,5 heures. Les cellules HT29-Cl16E consommaient 88,8 ± 27,0 nmoles de butyrate.10 -6 cellules en 24 heures d’incubation soit 30 % de la quantité initiale de butyrate (2 mM) ajouté au milieu de culture. L’ajout de butyrate n’augmentait pas la quantité de corps cétoni- ques produits par les cellules. Le glucose disparu du milieu de culture représentait 32 % (4,22 ± 0,12 μmoles.10 -6 cellules en 24 heures) de la quantité initiale et était en grande partie converti en lactate (40 %). Les capacités d’oxydation des deux AGCC (acétate et butyrate) étaient similaires (8,09 ± 1,42 et 9,47 ± 1,91 nmoles.10 -6 cellules.h -1 respectivement). L’extrapolation des résul- tats d’oxydation du butyrate sur 24 heures indiquerait que la tota- lité du butyrate consommé serait transformée en CO 2 à des fins énergétiques via la ß-oxydation. La capacité d’oxydation de la glutamine (2,54 ± 0,32 nmoles.10 -6 cellules.h -1 ) était intermédiaire à celles des AGCC et du [1- 14 C] et [6- 14 C] glucose, très faible- ment oxydés (1,32 ± 0,04 et 0,10 ± 0,05 nmoles. 10 -6 cellules.h -1 respectivement). Le glucose était donc majoritairement utilisé pour la glycolyse, plus faiblement utilisé dans la voie des pento- ses phosphate ([1- 14 C] glucose) et très peu oxydé via le cycle de Krebs ([6- 14 C] glucose). Les principaux substrats oxydatifs des cellules mucosécrétri- ces HT29-Cl16E sont donc le butyrate, l’acétate et dans une moindre mesure la glutamine. Sachant que l’acétate et le butyrate empruntent les mêmes voies métaboliques en aval de l’acétyl-CoA et que les effets géniques du butyrate sont supérieurs à ceux de l’acétate, il semblerait que les effets géniques du butyrate sur les gènes MUC, observés dans les cellules HT29-Cl16E, ne seraient pas liés à son métabolisme oxydatif mais plutôt à un effet direct du butyrate. Mots-clés : Cellules mucosécrétrices, métabolisme, butyrate.

Métabolisme oxydatif des cellules épithéliales coliques mucosécrétrices ht29-CL16E

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Gastroenterol Clin Biol 2006;30

707

C17MÉTABOLISME OXYDATIF DES CELLULES ÉPITHÉLIALESCOLIQUES MUCOSÉCRÉTRICES HT29-CL16E

P Fança (1), F Blachier (2), F Kozlowski (1), A David (1),C Hoebler (1)(1) CRNH-UFDNH-INRA-BP71627, 44316 Nantes Cedex 03 ;(2) UNSA-INRA, Domaine de Vilvert, 78352 Jouy en Josas.

Le butyrate, Acide Gras à Chaîne Courte (AGCC) produit lorsde la fermentation des fibres alimentaires par la flore colique,est le substrat énergétique majeur, via la ß-oxydation, del’ensemble des cellules épithéliales coliques normales. Deplus, il exerce de nombreux effets géniques, dont la modula-tion de l’expression des gènes MUC codant pour les mucinescoliques, constituants majeurs de la couche protectrice demucus tapissant l’épithélium. Le métabolisme oxydatif a étébien étudié dans les cellules épithéliales coliques absorbantesmais reste mal documenté dans les cellules mucosécrétrices,ayant une activité de biosynthèse importante.Notre hypothèse est que cette stimulation génique pourraitêtre liée au métabolisme énergétique du butyrate. L’objectif decette étude était donc d’étudier le métabolisme oxydatif descellules épithéliales coliques tumorales différenciées et muco-sécrétrices HT29-Cl16E.Pour cela, nous avons mesuré les niveaux de consommation debutyrate 2 mM (ajouté en milieu apical) et de glucose 25 mM(présent dans le milieu de culture) et les niveaux d’apparition decertains métabolites (lactate, corps cétoniques) dans les cellulesmucosécrétrices HT29-CL16E différenciées en monocouchepolarisée. Les capacités d’oxydation de différents substratsénergétiques ([1-14C] butyrate 2 mM, [1-14C] acétate 2 mM,[U-14C] glutamine 4 mM et [1-14C] ou [6-14C] glucose 25 mM)ont été déterminées par mesure du 14CO2 libéré sur 1,5 heures.Les cellules HT29-Cl16E consommaient 88,8 ± 27,0 nmoles debutyrate.10-6cellules en 24 heures d’incubation soit 30 % de laquantité initiale de butyrate (2 mM) ajouté au milieu de culture.L’ajout de butyrate n’augmentait pas la quantité de corps cétoni-ques produits par les cellules. Le glucose disparu du milieu deculture représentait 32 % (4,22 ± 0,12 μmoles.10-6 cellules en24 heures) de la quantité initiale et était en grande partie convertien lactate (40 %). Les capacités d’oxydation des deux AGCC(acétate et butyrate) étaient similaires (8,09 ± 1,42 et 9,47 ± 1,91nmoles.10-6cellules.h-1 respectivement). L’extrapolation des résul-tats d’oxydation du butyrate sur 24 heures indiquerait que la tota-lité du butyrate consommé serait transformée en CO2 à des finsénergétiques via la ß-oxydation. La capacité d’oxydation de laglutamine (2,54 ± 0,32 nmoles.10-6cellules.h-1) était intermédiaireà celles des AGCC et du [1-14C] et [6-14C] glucose, très faible-ment oxydés (1,32 ± 0,04 et 0,10 ± 0,05 nmoles. 10-6 cellules.h-1

respectivement). Le glucose était donc majoritairement utilisépour la glycolyse, plus faiblement utilisé dans la voie des pento-ses phosphate ([1-14C] glucose) et très peu oxydé via le cycle deKrebs ([6-14C] glucose).Les principaux substrats oxydatifs des cellules mucosécrétri-ces HT29-Cl16E sont donc le butyrate, l’acétate et dans unemoindre mesure la glutamine.Sachant que l’acétate et le butyrate empruntent les mêmesvoies métaboliques en aval de l’acétyl-CoA et que les effetsgéniques du butyrate sont supérieurs à ceux de l’acétate, ilsemblerait que les effets géniques du butyrate sur les gènesMUC, observés dans les cellules HT29-Cl16E, ne seraient pasliés à son métabolisme oxydatif mais plutôt à un effet directdu butyrate.

Mots-clés : Cellules mucosécrétrices, métabolisme, butyrate.