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1 The Republic of Uganda Mobilisation des ressources dans le cadre de la politique de décentralisation et de création des richesses au niveau local : l’expérience de l’Ouganda Exposé présenté lors de la Réunion conjointe de la Conférence ministérielle africaine sur la décentralisation et le développement local et de la Conférence sur le renforcement des capacités de leadership sur les questions de gouvernance locale et de réduction de la pauvreté en Afrique Yaoundé, Cameroun, du 28 au 30 mai 2008 PAR M. Patrick K. Mutabwire Commissaire, Unité d’aménagement des Communes Ministère des Collectivités locales décentralisées de l’Ouganda

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The Republic of Uganda

Mobilisation des ressources dans le cadre de la politique de

décentralisation et de création des richesses au niveau local : l’expérience de l’Ouganda

Exposé présenté lors de la Réunion conjointe de la Conférence ministérielle africaine sur la décentralisation et le développement local et de la Conférence

sur le renforcement des capacités de leadership sur les questions de gouvernance locale et de réduction de la pauvreté en Afrique

Yaoundé, Cameroun, du 28 au 30 mai 2008

PAR

M. Patrick K. Mutabwire

Commissaire, Unité d’aménagement des Communes

Ministère des Collectivités locales décentralisées de l’Ouganda

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MOBILISATION DES RESSOURCES DANS LE CADRE DE LA POLITIQUE DE DÉCENTRALISATION ET DE CRÉATION DES RICHESSES AU NIVEAU LOCAL : L’EXPÉRIENCE DE L’OUGANDA 1.0 Introduction Nombre de pays africains ont adopté la décentralisation1 comme outil fondamental de transformation de leurs sociétés, même si les formes retenues à cet effet varient d’un degré élevé de contrôle central à une grande dévolution des pouvoirs aux collectivités décentralisées2. Il s’agit-là d’une évolution significative, un passage des approches dites « centralisées » à une gouvernance locale qui avait cours pendant la période coloniale et s’est poursuivie de plusieurs années après les accessions à l’indépendance. Ce système n’a pas pu promouvoir la bonne gouvernance au niveau local ni donner lieu à une prestation de services efficiente. Pour améliorer sensiblement le vécu quotidien des populations et les tirer résolument du carcan de la pauvreté, les gouvernements ont adopté l’approche de développement décentralisée. La question essentielle qui continue à préoccuper les administrations demeure néanmoins celle du financement de la décentralisation.

1.1 La décentralisation en Ouganda L’objet principal de la politique de décentralisation en Ouganda est de démocratiser la société, de promouvoir la bonne gouvernance, d’améliorer la prestation de services, de réduire la pauvreté et d’impulser le développement durable. La décentralisation n’est pas uniquement perçue comme un moyen d’autonomiser les populations, mais également comme un cadre de mise en œuvre d’autres politiques gouvernementales visant à améliorer leur qualité de vie et leur bien-être. La décentralisation est également perçue comme un acte de bonne gouvernance permettant de promouvoir la transparence, l’obligation de rendre compte, l’intégrité et la représentation dans la gestion de la chose publique. Elle a souvent été utilisée comme un moyen permettant de mettre en œuvre les principales politiques et les programmes définis par le gouvernement, à savoir : le programme d’Éducation primaire pour tous (UPE), dont la vocation est de veiller à ce que chaque enfant en 1 ‘La décentralisation’ réfère ici au transfert de pouvoir du gouvernement central aux unités administratives locales. Ledit transfert pourrait sous-entendre un contrôle significatif accordé par le centre (la déconcentration), un certain niveau de discrétion locale (la délégation de pouvoirs) ou des pouvoirs extensifs de prise de décision locale (la dévolution des pouvoirs). 2 Centre des Nations unies pour le développement régional, Décentralisation et participation des citoyens en Afrique, vol. 21, no 1, printemps de l’an 2000.

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âge scolaire aille à l’école ; le programme des Soins de santé primaire (PHC), dont l’objet est de promouvoir l’accès des populations à des services médicaux essentiels ; et le Plan de modernisation de l’agriculture (PMA), dont la vocation est de transformer l’agriculture pour la faire passer d’une agriculture de subsistance à une agriculture commerciale. Ces programmes sont mis en œuvre avec succès par les collectivités locales décentralisées, lesquelles sont dirigées par des représentants élus démocratiquement, donc proches du peuple, qui disposent d’un mandat clair leur permettant d’initier et de réaliser des plans de développement local reflétant les priorités locales définies avec la participation active de la population concernée. Le but global recherché par le gouvernement de l’Ouganda est d’éradiquer la pauvreté et de permettre aux Ougandais de jouir d’une meilleure qualité de vie. Pour ce faire, le pays applique un vaste programme de développement dont les principales articulations sont les suivantes : réforme macroéconomique, promotion d’une productivité accrue et des exportations, réforme de la fonction publique, décentralisation. La vision nationale et les objectifs de développement sont exécutés à travers le Plan d’action d’éradication de la pauvreté (PEAP). Ce dernier constitue le cadre national ougandais de planification, dont l’objet est d’orienter l’action publique dans le sens de la promotion de la croissance et de l’éradication de la pauvreté abjecte. Plus de 85% de la population ougandaise, qui s’élève à 30 millions d’âmes, vivent en zone rurale. Près de 80% de la population rurale s’adonnent à l’agriculture de subsistance. Seuls quelque 61,5% des Ougandais des zones rurales et 68% des Ougandais vivant dans les grandes agglomérations ont accès à l’eau potable et à des services d’assainissement. Jusqu’au lancement du Programme d’éducation primaire pour tous en 1996/1997, près de la moitié des enfants en âge scolaire n’étaient pas scolarisés. À ce jour, 98% des enfants scolarisables fréquentent l’école et la pauvreté absolue a été réduite de 31%. Certes, la Loi sur les collectivités locales décentralisées fournit le cadre de la décentralisation et définit clairement les fonctions de chaque niveau de gouvernement, mais sa mise en œuvre a fait l’objet d’une approche consciente et pragmatique, dans laquelle les fonctions sont transférées de manière ordonnée du centre vers les collectivités décentralisées, au fur et à mesure que s’y développent des capacités. La décentralisation budgétaire a suivi une démarche similaire, la décentralisation du budget de fonctionnement ayant été la première à être appliquée de manière graduelle, afin de s’assurer que les collectivités locales élaborent des plans de développement et créent suffisamment de capacités leur permettant de concrétiser lesdits plans.

1.2 Fonctions et responsabilités des collectivités locales Les collectivités locales se sont vu confier la responsabilité d’assumer des fonctions spécifiques et de prestation de services. La raison d’être de leur autonomisation est que les populations locales connaissent elles-mêmes les priorités et peuvent donc mieux gérer les ressources, y compris financières. L’implication des riverains dans l’élaboration et la mise en œuvre des programmes locaux crée un sentiment d’appropriation combien nécessaire à l’obtention de meilleurs résultats. Elle entraîne

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également une réduction des coûts, étant entendu que le personnel du gouvernement central n’est pas obligé de faire la navette entre les bureaux du gouvernement central et des collectivités décentralisées. En effet, ces dernières assurent elles-mêmes la réalisation, la supervision et le suivi de leurs programmes. La Loi sur les collectivités permet d’exécuter toutes ces fonctions car elle définit le mode de financement des activités. 2.0 Financement de la décentralisation Les ressources destinées au financement de la décentralisation proviennent pour l’essentiel de trois sources : le gouvernement, ses partenaires au développement et les recettes locales.

2.1 Transferts du gouvernement central Toutes les collectivités locales de l’Ouganda sont habilitées par la constitution à recevoir des subventions inconditionnelles et conditionnelles. En outre, certaines d’elles ont droit à une subvention compensatoire, en fonction de leur niveau de prestation des services, comparé au niveau national moyen de prestation des services. La part de ces trois sources de ressources dans le budget des collectivités locales varie d’une source à l’autre. En général, toutes les trois sont applicables. Une subvention inconditionnelle est accordée à une collectivité locale pour le fonctionnement de ses services, tandis qu’une subvention conditionnelle est censée permettre à une collectivité de financer des programmes ayant fait l’objet d’une convention avec le gouvernement central. Une subvention compensatoire est accordée à une collectivité locale dont la prestation des services se situe en deçà de la norme nationale moyenne pour une gamme de services particulière. Le gouvernement central transfère jusqu’à 90% des budgets des collectivités locales. D’une manière générale, les transferts aux collectivités locales, en pourcentage du budget national, ont crû d’environ 16,6% au cours de l’exercice budgétaire 1997/1998 et de 36% environ au cours de l’exercice 2007/2008. L’augmentation des transferts a effectivement amélioré les niveaux d’activité des collectivités locales et permis de mettre en œuvre le Plan d’action d’éradication de la pauvreté (PEAP). Toutefois, les subventions conditionnelles du Fonds d’action contre la pauvreté (PAF) ont été les plus prisées. À l’heure actuelle, elles représentent plus de 85% des taux de transfert aux gouvernements locaux. Puisque les dépenses du PAF ont pour vocation de permettre la réalisation des objectifs du PEAP, l’essentiel de l’augmentation des transferts s’est faite grâce à l’accentuation des subventions conditionnelles.

2.1.1 Le Fonds d’action contre la pauvreté (PAF) L’Ouganda fut l’un des premiers pays pauvres très endettés à se qualifier pour l’Initiative PPTE mise au point par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. C’était le résultat de la stratégie de réduction de la pauvreté que le gouvernement de ce pays a mise en place avec bonheur. Les collectivités locales affectent prioritairement les financements obtenus du Fonds d’action contre la pauvreté (PAF) à des Programmes prioritaires (PPA) préalablement convenus, relatifs notamment à l’éducation primaire, aux soins de santé primaire, à l’eau et à l’assainissement de l’environnement, aux routes d’accès

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rurales, à la vulgarisation agricole et à l’alphabétisation fonctionnelle des adultes. Par conséquent, le niveau d’investissement dans le secteur des services a enregistré un bond phénoménal, passant de 20 millions de $EU en 1993 à plus de 500 millions de $EU. L’investissement massif dans ce domaine a transformé la physionomie de la prestation des services dans le pays. Ainsi, le nombre de salles de classe construites dans le primaire a crû de manière substantielle. Le nombre d’enfants inscrits à l’école primaire est aussi passé de 2 millions d’élèves en 1995 à plus de 7 millions de nos jours. Transferts du gouvernement local par catégorie TRANSFERTS Transferts du gouvernement central (en milliards d’UGX)

- Subvention inconditionnelle - Subvention conditionnelle - Subvention compensatoire - Total transferts

EXERCICES BUDGÉTAIRES Le tableau ci-dessus présente la croissance des transferts effectués par le gouvernement central de 1997 à ce jour (lesquels sont passés de 224,9 milliards en 1997/1998 à 1.048,9 milliards en 2007/2008, soit, en valeur relative, une augmentation de 366,4%). La hausse des subventions a permis aux collectivités locales décentralisées de fournir aux populations une gamme de services variée. Toutefois, le pourcentage élevé de fonds débloqués a réduit l’autonomie des collectivités locales concernant l’utilisation des ressources dans des domaines où le besoin se fait le plus sentir (cf. figures ci-dessous).

2.2 Contribution des partenaires au développement Les partenaires au développement participent au financement de la décentralisation par leur soutien aux initiatives des collectivités locales. Ce financement permet à celles-ci d’accéder à davantage de ressources dont elles ont besoin pour une meilleure prestation de leurs services.

2.3 Les finances locales Une bonne assiette de recettes locales s’avère importante pour assurer la durabilité des programmes de décentralisation. À cet égard, les recettes locales constituent le socle de l’édification d’un système de gouvernance locale indépendant et responsable. Elles constituent en outre une source sécurisée de fonds favorisant la prestation de services. Lorsque les contribuables paient leurs impôts, ils sont plus enclins à exiger des « politiques » qu’ils rendent compte de leurs actes. Les conseillers, pour leur part, seront plus à même de répondre aux besoins et priorités des populations si :

- le public paie directement ses impôts à la représentation politique qu’il a élue grâce à des élections locales ;

- l’infrastructure existante, propriété d’une collectivité locale, est soutenue par cette dernière grâce aux recettes locales ;

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- les collectivités locales, grâce à leurs ressources propres, dynamisent sans cesse l’investissement et la fourniture de services.

En Ouganda, la mobilisation des recettes locales constitue donc un outil important de réussite de la politique de décentralisation. Une chose est sûre : les collectivités locales qui disposent d’un bon système de collecte des recettes locales peuvent jouir d’une meilleure autonomie. En principe, elles peuvent alors mieux satisfaire les attentes et les priorités de leurs populations. La constitution prévoit diverses sources de recettes locales pour les collectivités décentralisées, en fonction des régions et sur la base, entre autres, de leurs pratiques économiques et de leurs ressources naturelles. La Gradated Tax – une sorte de taxe échelonnée – à elle seule, dont la contribution représentait généralement 80% des recettes locales des collectivités décentralisées rurales et 30% environ des recettes des collectivités locales décentralisées (CLD) urbaines, a été abolie en juillet 2005, ce qui a porté un rude coup aux recettes locales des CLD. Pour y pallier, le gouvernement a affecté une enveloppe de 43,86 milliards de shillings à la compensation des collectivités locales. Une taxe locale sur les services a été adoptée pour remplacer la gradated tax. Depuis 1997, les recettes locales diminuent sans cesse, en valeur absolue comme en valeur relative. Conséquence, les collectivités décentralisées dépendent de plus en plus des subventions du gouvernement central. Une part de plus en plus importante de ces subventions est assortie de conditionnalités. Une telle dépendance vis-à-vis du gouvernement central a pour corollaire une perte d’autonomie pour les collectivités locales. La loi dispose également de la manière dont les recettes générées localement doivent être partagées entre les diverses collectivités locales et autres unités administratives. L’importance du partage des revenus n’est plus à démontrer puisque chaque CLD ou unité administrative doit remplir certaines fonctions obligatoires. Le partage constitue un indicateur du volume des fonctions et des activités réalisées à chaque niveau de la collectivité ou de l’unité administrative. La remise de fonds accordée à des communes plus petites vise à encourager les populations à payer leurs impôts puisque plus les régies financières collectent des impôts, plus les collectivités ont des revenus et peuvent ainsi assurer le financement de leurs activités prioritaires. Une collectivité locale peut aussi prélever des frais ou taxes en lieu et place du gouvernement central dont elle est l’agent, auquel cas ladite CLD, en vertu de l’accord passé entre les deux parties, est habilitée à retenir pour son compte une partie des fonds collectés.

2.3.1 La tendance à la baisse des recettes locales Si les transferts du gouvernement central constituent la principale source de revenus en vue du financement de la prestation de services décentralisés, il n’en demeure pas moins que la mobilisation des recettes locales reste un élément essentiel à la mise en œuvre durable de la politique de décentralisation. Malheureusement, les recettes locales sont en chute libre depuis quelques années déjà, et les données disponibles montrent par exemple que les recettes locales au niveau des districts, qui

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s’élevaient à 86 milliards de shillings ougandais (Ushs) en 1997/1998 sont passées à 78 milliards de Ushs au cours de l’exercice 1999/2000 et ont continué à piquer du nez pour se situer à environ 34 milliards de Ushs en 2002/2003. Cette courbe baissière constitue une contrainte pour le développement et la durabilité de la décentralisation. La mauvaise performance en matière de collecte des recettes a été attribuée aux adversaires politiques de la graduated tax et à la dépendance des CLD vis-à-vis des transferts du gouvernement central, qui ont mis à mal leur capacité à générer des ressources propres. La baisse absolue des revenus frappe avec encore plus de sévérité les collectivités locales rurales. 3.0 Autres questions liées à la mobilisation des ressources

3.1 Utilisation et obligation de rendre compte des ressources

Les autorités locales sont autonomes dans la préparation, l’approbation, le contrôle, le suivi et la supervision de l’exécution de leurs budgets. Le budget d’une collectivité décentralisée doit être équilibré en recettes et en dépenses. C’est dire donc qu’il doit tenir compte de toutes les recettes, y compris des fonds locaux, des subventions gouvernementales, des financements des bailleurs de fonds, etc. La loi dispose que les budgets des collectivités décentralisées doivent être équilibrés et basés sur un plan de développement triennal adopté par chaque collectivité et les priorités nationales. La loi demande à tous les conseils exécutifs des CLD et unités administratives de tenir des registres comptables appropriés et d’apprêter des comptes annuels, ainsi que des états financiers devant faire l’objet d’un audit. Les officiels publics sont personnellement responsables de tous les fonds employés et prélevés sur la « cassette » du Conseil régional ou municipal. En effet, ce dernier doit rendre compte de sa gestion aux populations, qui constituent la cible ultime de ses prestations.

3.2 Réglementation en matière de génération des revenus Les Conseils ont le pouvoir de promulguer leurs propres règlements intérieurs ou des réglementations susceptibles de renforcer la gestion et la responsabilité financières, ainsi que la mobilisation des ressources permettant de financer leurs activités.

3.3 Financement des responsabilités transférées aux collectivités locales

Aucune obligation financière ne saurait être transférée à une collectivité locale par le gouvernement central ou une agence centrale sans faire préalablement l’objet d’une mise à disposition de financements permettant de la remplir.

3.4 Emprunt des collectivités locales Le conseil exécutif d’une collectivité locale peut, avec l’aval du ministre en charge des collectivités décentralisées, emprunter ou lever un prêt, à condition que son montant n’excède pas 25% des recettes générées localement et n’empêche pas la collectivité de remplir ses obligations réglementaires. L’on considère, en principe,

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que la collectivité décentralisée sera capable d’honorer ses créances et que les fonds obtenus par elle seront utilisés à bon escient. 4.0 Questions liées à l’augmentation des transferts du

gouvernement central et à la baisse des recettes locales L’on a relevé que l’augmentation des subventions accordées aux collectivités décentralisées améliore leur capacité à assurer des prestations de services, et que la baisse des recettes locales, a contrario, sape l’obligation de rendre compte au niveau local. En général, l’augmentation disproportionnée des financements prévus par rapport aux revenus discrétionnaires grève l’autorité et le pouvoir discrétionnaire des collectivités locales.

Accorder plus de subventions aux CLD améliore leur capacité de prestation de services

● Subvention compensatoire (en milliards de Ushs) ● Subventions inconditionnelles (en milliards de Ushs) ● Subventions conditionnelles (en milliards de Ushs)

- Entre 1994/1995 et 1996/1997, des subventions en bloc et conditionnelles ont été accordées à toutes les CLD

- Depuis 1997/1998, il y a eu de grandes augmentations de subventions ● Les subventions conditionnelles ont été alimentées, dans le cadre des priorités du DSRP, par les fonds PPTE et le soutien budgétaire (du Fonds d’action contre la priorité notamment)

Mais la baisse des recettes locales sape l’obligation de rendre

compte au niveau local 13% des recettes des CLD (2002/2003) (en milliards de Ushs) 37% des recettes des CLD (1997/1998) (en milliards de Ushs)

- Une augmentation accentuée des subventions met à mal l’incitation des CLD à collecter des revenus

- Certains politiques ont fait barrage à la source de revenus principale, la graduated tax, au motif qu’elle est « inique »

- La législation sur la taxe foncière n’a été améliorée que récemment - La Loi sur l’alternative à la graduated tax est actuellement sur la table des Parlementaires

Recettes discrétionnaires Subventions conditionnelles prévues

L’autonomie s’effrite - On est passé de 9 subventions conditionnelles prévues en 1997/1998 à 37 en 2003/2004 - Des plans de travail et des rapports séparés sur les subventions conditionnelles doivent

être apprêtées et adressées au gouvernement central 5.0 Renforcement de la base des ressources de la

décentralisation 5.1 Initiatives d’amélioration des recettes locales dans les

communautés décentralisées

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Ayant pris bonne note des défis posés par la baisse des recettes locales et de la nécessité d’élargir l’assiette des régies financières locales, le gouvernement a pris un certain nombre d’initiatives allant dans le sens de booster la mobilisation des recettes au niveau local, notamment :

i) des initiatives visant à accroître les revenus de la taxe foncière dans les communes urbaines et les collectivités locales rurales (arrondissements et districts) ;

ii) la mobilisation efficace (à tous les niveaux) et la mise en place de mesures incitatives permettant de réaliser les objectifs ciblés (octroi de primes) ;

iii) des programmes financés par les bailleurs de fonds ayant des éléments spécifiques d’appui aux activités d’amélioration des recettes locales ont été élaborés par le ministère en charge des collectivités décentralisées ;

iv) une nouvelle législation, en l’occurrence la Loi (portant régime de notation) des collectivités locales décentralisées de 2005, a été promulguée ; cette loi en cours de vulgarisation et d’opérationnalisation a pour vocation d’accroître les sources de revenu locales ;

v) des études sur les pratiques optimales en matière d’imposition locale ont été réalisées et des études sur la manière de multiplier les sources de revenus sont en cours ;

vi) l’harmonisation et la dérégulation de l’octroi des licences d’exploitation commerciale ont été réalisées à titre expérimental dans quantité de collectivités décentralisées ;

vii) la taxe sur les services locaux et la taxe hôtelière ont été introduites ; selon des estimations, elles devraient générer plus de 80 milliards de dollars lorsqu’elles auront atteint la vitesse de croisière.

5.2 Création des richesses au niveau local

L’un des objectifs de la décentralisation entreprise par l’Ouganda est d’améliorer le développement économique local afin d’accroître les revenus locaux et l’assiette fiscale locale. Le changement de cap au niveau de la politique de décentralisation avait pour but de combler le fossé apparent relevé dans le projet originel de politique de décentralisation qui n’a pas réellement tenu compte de l’impératif de développement économique local. Il est demandé aux collectivités décentralisées de réorienter leur investissement vers les économies locales, ce qui permettra notamment de rehausser les revenus des ménages des localités dont elles ont la charge. À terme, la base de ressources des collectivités décentralisées sera élargie car les populations pourront payer leurs impôts.

5.2.1 Actions visant à améliorer directement la capacité des pauvres à accroître leurs revenus

En Ouganda, certaines des actions menées en vue de créer des richesses au niveau local sont énumérées dans le Plan de modernisation de l’agriculture (PMA). Ce dernier est une stratégie de transformation rurale visant à éradiquer la précarité sociale via l’amélioration de la productivité agricole et la diversification durable des sources de revenu des populations rurales. Les sept axes prioritaires définis dans le PMA sont : la recherche et le développement technologique ; les services de conseil agricole ; l’éducation agricole ; l’amélioration de l’accès à des financements ruraux ; la transformation et le marketing agricoles ; l’utilisation et la gestion rationnelles des ressources naturelles ; et la mise en place d’infrastructures physiques. Ces axes prioritaires sont à divers stades de mise en œuvre.

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L’accès à des actifs productifs tels que la terre constitue une question majeure lorsqu’on parle de création des richesses au niveau local. L’accès à des ressources financières reste l’un des autres principaux obstacles à l’amélioration des revenus des personnes démunies. Certes, la libéralisation économique et financière entreprise par le gouvernement a démultiplié les opportunités d’accès au crédit, mais 43% des Ougandais ne peuvent toujours pas accéder à des services financiers. Cela est dû en partie au fait que les institutions de microfinance sont basées en ville (au service surtout des commerçants). Le gouvernement a déployé des efforts d’élaboration des programmes dans lesquels les pauvres peuvent se voir accorder des crédits, mais les résultats de cette politique sont mitigés, à tout le moins. Il est regrettable de constater, une fois encore, que les plus pauvres des pauvres ne peuvent pas accéder à des services de microfinance parce qu’ils sont trop pauvres pour remplir les conditions minimales requises, invariablement : possession d’un lopin de terre ou de tout autre nantissement, production d’une preuve que le demandeur de crédit n’a aucun emploi productif, recommandation des dirigeants locaux, production d’une preuve d’épargne, etc.

5.3 Développement économique local : le nouveau programme des collectivités décentralisées

Comme nous l’avons relevé plus haut, le Développement économique local (LED) est également en cours d’intégration dans le portefeuille d’investissement des collectivités décentralisées en vue d’élargir leur assiette fiscale et de rehausser les revenus des populations. Une politique et une stratégie de Développement économique local sont en cours d’élaboration. Le but global de cette stratégie de LED est de contribuer à l’éradication de la pauvreté, grâce à l’accent mis sur :

i) l’amélioration de la gouvernance locale pour une croissance économique locale durable ;

ii) la création des emplois ; iii) une production et une productivité améliorées des entreprises ; iv) la hausse des revenus ; et v) l’élargissement de l’assiette fiscale des collectivités locales qui leur

permettrait de fournir les services pour lesquels elles sont mandatées. Tout ce qui précède ne pourra être obtenu que si l’on met sur pied des systèmes et mécanismes d’implication accrue des populations dans l’économie monétaire :

i) en aidant les collectivités décentralisées à créer une plateforme propice à la mise en œuvre du LED et en rendant les localités attractives pour les investisseurs ;

ii) en soutenant l’initiative privée pour la rendre plus productive et compétitive ;

iii) en permettant aux organisations communautaires de devenir des facilitateurs et des agents de promotion du développement économique local ; et

iv) en développant des partenariats public-privé productifs permettant d’obtenir des systèmes utiles de gouvernance économique locale.

Il sera question d’aider les collectivités décentralisées à s’approprier leur nouveau rôle de vecteurs et promoteurs du LED, qui est susceptible de rehausser la qualité de

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vie dans leurs localités. Pour ce faire, il faudra s’assurer que les processus de planification accordent la priorité au développement économique :

i) en aidant les collectivités décentralisées à élaborer des stratégies de LED. Les CLD devraient également faciliter les évaluations économiques locales en prenant des dispositions claires et en adoptant des stratégies de mise en œuvre de partenariats public-privé ;

ii) en révisant les directives de planification pour intégrer le volet LED, sur la base d’expériences pratiques ;

iii) en aidant les collectivités décentralisées à planifier et garantir la participation de l’ensemble des parties prenantes, y compris le secteur privé et les entreprises ;

iv) en mettant à disposition des financements destinés à des activités de LED et en s’assurant que le registre des investissements dans les collectivités décentralisées accorde la priorité au développement économique local.

6.0 Stratégies majeures en vue d’une meilleure mise en œuvre de

la politique de décentralisation Parmi les stratégies majeures adoptées par le gouvernement de l’Ouganda pour renforcer la mise en œuvre de la politique de décentralisation, on peut citer : la création d’un environnement favorable pour les citoyens, les ONG, les organisations communautaires et le secteur privé pour qu’ils puissent jouer un rôle de supervision et de contrôle de la gestion des fonds par les collectivités décentralisées ; la promotion de partenariats public-privé dans le domaine de la prestation des services ; le renforcement des capacités des dirigeants locaux et centraux à bien appréhender leurs rôles et fonctions ; l’amélioration de la « responsabilisation » politique, administrative et budgétaire, du sommet à la base et inversement ; une importante éducation civique sur les droits et obligations des uns et des autres en matière de développement local ; l’élaboration de normes minimales de prestation des services et d’indicateurs de performance des services. 7.0 Conclusion Les gouvernements engagés dans la décentralisation fournissent généralement l’essentiel des ressources destinées à son financement. Cette tendance est appelée à se poursuivre dans un futur proche. Toutefois, cela expose les collectivités locales à des chocs financiers lorsque le gouvernement central éprouve des difficultés de génération des ressources nécessaires. Une solution probable de financement de la décentralisation serait donc d’initier des politiques favorisant la création des richesses et l’amélioration de la qualité de vie des populations tout en élargissant l’assiette fiscale des collectivités décentralisées. La politique des collectivités locales doit être réorientée vers la réalisation de ce nouvel agenda, ce qui leur permettra de mettre en place des initiatives qui créent un environnement propice et promeuvent le développement de leurs économies. En effet, des économies locales fortes et soutenues sont susceptibles de générer une base locale de revenus à partir de laquelle les collectivités locales peuvent mobiliser des ressources permettant de financer leurs mandats dans le cadre d’un système de gouvernance décentralisée.