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OÙ L’ON REPARLE ( PARTOUT DANS LES ENTREPRISES ) DE L’ÉTAT D’ESPRIT DES JEUNES CADRES DIPLÔMÉS ... A l’évidence, la compréhension de la mentalité de ces « high po » représente pour l’entreprise un enjeu important. Il y a un certain temps, en effet, que l’idéologie du “travail- sacerdoce”, de la “contribution patriotique”, de l’ “accomplissement de la vie par le travail”, de la “solidarité envers une œuvre, un idéal” … n’anime plus que la nostalgie des « séniors » et des retraités, ainsi que les barouds d’honneur des plus de 35 ans, pris entre deux feux à la charnière de deux mondes … Ceux qui arrivent aujourd’hui dans les affaires n’en ont plus que faire … La loi du marché et le comportement des entreprises ont peu à peu détruit les justifications habituelles de ces idéaux. Les jeunes cadres le leur rendent bien : ils sont des libéraux dans leur vie et dans leur carrière. On entend certaines entreprises se lamenter sur l’ “immoralité” (sic) de ces jeunes ingrats infidèles … Hé oui : il faut désormais les payer pour rester ! C’est le prix de l’amoralité libérale Qui osera leur reprocher ? Il est trop tard pour s’en plaindre. Sur le fond, j’en conviens, cela peut être problématique, à long terme, pour notre société dans son ensemble : un individualisme exacerbé fait, somme toute, mauvais ménage avec le bien commun. Mais il est difficile de reprocher aux gens ce à quoi on les a formé … et “formaté” ! Il me semble pourtant que les comportements de cette population étaient prévisibles : la priorité des jeunes cadres, c’est leur carrière, leur vie personnelle. Certains organisent Gérald Chamming’s - Avril 02 1

Motivation (état d'esprit des jeunes cadres diplomés)

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OÙ L’ON REPARLE ( PARTOUT DANS LES ENTREPRISES )

DE L’ÉTAT D’ESPRIT DES JEUNES CADRES

DIPLÔMÉS ...

A l’évidence, la compréhension de la mentalité de ces « high po » représente pour l’entreprise un enjeu important.

Il y a un certain temps, en effet, que l’idéologie du “travail-sacerdoce”, de la “contribution patriotique”, de l’ “accomplissement de la vie par le travail”, de la “solidarité envers une œuvre, un idéal” … n’anime plus que la nostalgie des « séniors » et des retraités, ainsi que les barouds d’honneur des plus de 35 ans, pris entre deux feux à la charnière de deux mondes …

Ceux qui arrivent aujourd’hui dans les affaires n’en ont plus que faire …La loi du marché et le comportement des entreprises ont peu à peu détruit les justifications habituelles de ces idéaux.Les jeunes cadres le leur rendent bien : ils sont des libéraux dans leur vie et dans leur carrière.

On entend certaines entreprises se lamenter sur l’ “immoralité” (sic) de ces jeunes ingrats infidèles … Hé oui : il faut désormais les payer pour rester ! C’est le prix de l’amoralité libérale … Qui osera leur reprocher ? Il est trop tard pour s’en plaindre.

Sur le fond, j’en conviens, cela peut être problématique, à long terme, pour notre société dans son ensemble : un individualisme exacerbé fait, somme toute, mauvais ménage avec le bien commun.Mais il est difficile de reprocher aux gens ce à quoi on les a formé … et “formaté” !

Il me semble pourtant que les comportements de cette population étaient prévisibles : la priorité des jeunes cadres, c’est leur carrière, leur vie personnelle. Certains organisent effectivement entre eux des réseaux d’entraide, se mobilisent pour les gens qu’ils connaissent. Mais le chômage des ouvriers, cela ne les a jamais beaucoup intéressé. On est finalement assez indifférent aux autres, à partir du moment où « les autres » ne sont pas des intimes, des proches. (Pour les jeunes, la société se réduit un peu à ces petits cercles. La société globale leur paraît, en fin de compte, assez éloignée).Ils vivent dans leur bulle (à part quelques rares exceptions).

Certes !Gérald Chamming’s - Avril 02 1

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Mais, sans jouer sur les mots, un « phénomène de génération » n’est pas le fruit d’une génération spontanée ! …Libéralisme et individualisme sont … “conginétalement” liés : voilà ce qu’il faudrait avoir le courage de dire !Aujourd’hui, la notion de “carrière” n’est plus à entendre comme il y a vingt ans : il existe un zapping de l’emploi chez les jeunes cadres, en constante recherche du meilleur boulot, dans le contenu comme dans la rémunération ( « parce que, disent-ils, ils le valent bien »... ).Il tentent de construire une carrière qui sera de plus en plus courte (à 40 ans, vous êtes trop vieux ! …).Cela pèse sur l’engagement.Et les journées de travail sont denses …

Le Directeur Général d’une grande Banque, avec qui j’en discutais récemment, synthétisait le phénomène de la manière suivante : « On est finalement passé d’une éthique du devoir à une éthique de l’épanouissement personnel …Et alors ??? Il faut le savoir ! Et agir en conséquence … »

Ce qui me semblerait intéressant, d’un point de vue sociologique, serait d’analyser les tenants et les aboutissants de ce paradoxe : la mondialisation libérale produit un repli - pour ne pas dire un retrait - des individus, comme si le monde n’était plus à échelle humaine.Je pense pour ma part que l’individualisme est un réflexe de survie, un mécanisme de défense, une protection contre l’inhumain.Certes, le cynisme qu’il engendre est néfaste, mais la nature humaine invente toujours ce qui est nécessaire (même en mal) pour sauvegarder ses intérêts fondamentaux, ce qui lui permet d’exister malgré tout.Et lorsque la société et son modèle socio-professionnel ne sont plus garants de cette sauvegarde, les individus se désintéressent … et de la société, et du travail.

Constatons pourtant : - que les intérêts fondamentaux de l’homme ne se bornent pas à la

maximisation économique, même s’ils réclament une certaine prospérité ;

- qu’ils ne se réduisent pas au service aliénant de l’économie du « toujours plus », même si le travail comporte une dimension d’accomplissement et de développement de l’homme.

Le nouveau paradigme, c’est la « nouvelle motivation » … 

Les jeunes diplômés, aujourd’hui, savent - quant à eux - que le “bénéfice” (personnel et professionnel) se joue dans la responsabilité du « produit » :

ils “jouent avec l’entreprise” comme ils jouent à la Bourse ! …

… « Mieux vaut être chef de produit ou chef de projet e-business, tant qu’à faire au sein d’un “grand compte”, pour que je puisse me trouver au cœur d’un système où je vais m’enrichir [au sens : servir ma trajectoire personnelle en capitalisant de l’expérience pour mon meilleur positionnement et MES projets futurs] …

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dans une certaine sécurité [être (bien) rémunéré en évitant toute prise de risque non-maîtrisée : cf. start up] »).

… « Tant que j’apprends … je reste ! ».

Et cela ... « parce que je le vaux bien ! » ...

( Une «   génération … L’OREAL  » ! ... ).

… Mais vous allez me dire que ce sont là des considérations philosophiques, c’est-à-dire un bavardage inutile.

Et vous avez raison …« Il faut être réaliste, pragmatique et concret !!! ».

Inutile donc de se poser des questions.

Il est préférable, n’est-ce-pas, de continuer à se plaindre de cette jeunesse trop exigente, et sans scrupules !

Ceci, au fond, nous afflige … ???

Et pourtant …

La réalité, ici, dépasse ... l’affliction !!!

Gérald Chamming’s

Consultant (ISOCEL Management Conseils)

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Bordeaux, 28 avril 2002

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