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N° 22 • Automne 2008 Rencontre LES FRÈRES BOGDANOV BALLADE INTEMPORELLE Entretiens ALAIN LAMASSOURE THIERRY ROLAND L’OSR > Darfour CHRONIQUE D’UNE MORT ANNONCÉE UN JEUNE ORCHESTRE DE 90 SAISONS

No 22 France Magazine

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France Magazine, le magazine des Français établis hors de France

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N° 22 • Automne 2008

RencontreLES FRÈRES BOGDANOVBALLADE INTEMPORELLE

EntretiensALAIN LAMASSOURETHIERRY ROLAND

L’OSR

> DarfourCHRONIQUE D’UNEMORT ANNONCÉE

UN JEUNE ORCHESTREDE 90 SAISONS

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FRANCEMAGAZINE N°22 3 AUTOMNE 2008

La Coupe du monde de football s’estdéroulée sans incident, en Suisse eten Autriche. Malgré – ou à cause –

de cela, les médias se sont emparés detoute une série d’épiphénomènes pour

remplir les colonnes de pages spéciales qu’ils avaient probablement tropgénéreusement planifiées. Parmi les divers sujets spéciaux ou spécieux,la fameuse polémique de portée internationale – c’est le cas de le dire – surl’obligation ou non d’arborer le drapeau suisse lorsqu’on est étranger etqu’on affiche son propre pavillon à son balcon ou à sa fenêtre. Doctement,un quotidien populaire nous a expliqué à cette occasion que cette obli-gation n’existait pas, et s’est interrogé sans succès sur l’origine de la«rumeur» qui, paraît-il, semait la perplexité à l’approche de la grand-messe sportive.Nous avons des journalistes d’investigation. En tout cas,ceux que nous méritons, si l’on en croit l’adage. Nousapprîmes donc que le fils d’un restaurateur italien deLancy « refusait que sa mère affiche le drapeau suisseau côté de la bannière vert-blanc-rouge ». On nousexpliqua que « les Portugais, souvent doubles-nationauxou couples mixtes, ne rechignent pas à suspendre lesdeux drapeaux », on interrogea enfin un fonctionnairefacétieux qui estima « indispensable de chanter leCantique suisse(hymne national)tous les matins surson balcon, souspeine d’amende ».Au passage, un reporter inspiré lança l’idée que s’il yavait peu de drapeaux français aux fenêtres, c’était parcrainte du fisc hexagonal qui pourrait ainsi repérer leslieux où habitent les exilés; il serait peut-être utile designaler à ce jeune homme que nous sommes au XXIe

siècle et que la consommation excessive de certainsproduits dérivés du chanvre indien n’est pas dangereuseque pour la conduite d’un véhicule. En conclusion, lejournal suggéra à chacun d’arborer le drapeau qu’il vou-lait. A aucun moment et nulle part, l’un de nos éminentsconfrères n’a eu l’idée de regarder vers ce beau Lac quiunit France et Suisse. Il aurait pu remarquer que lesbateaux de la CGN portent les deux pavillons, selon latradition diplomatique et marine qui veut que l’on arbo-re son drapeau national et, par courtoisie, celui du paysdans lequel on se trouve, qu’on visite ou dont on reçoit unreprésentant. Désuet, sans portée, anecdotique, cetusage ? Sans doute, surtout lorsqu’il s’agit finalementde manifester son appui à onze ou vingt-deux athlètesqui tapent dans un ballon. Mais la courtoisie, la recon-naissance de l’autre, le respect témoigné à l’invité, àl’adversaire, au rival – qu’il se manifeste de façon solen-nelle ou bon enfant – reste une valeur ancrée chez cequ’on appelle les gens civilisés. C’est un héritage qu’ondevrait conserver avec davantage de soin. Derrière lesdeux drapeaux de la famille portugaise, et sans qu’ellele sache peut-être, il y a un peu du souvenir de Vasco deGama.

OriflammesOriflammesÉditeur, Directeur de la Publication, Rédacteur en chef Serge Cyril VinetÉditorialiste Thierry OppikoferDirecteur de la Communication Victor NahumDirecteur du Comité de Rédaction Bernard DaudierEdito : Thierry OppikoferSanté animale : Dounya ReiwaldSanté prévention : Jean-Jacques DescampsEvasion : Patrick BlaserVivre à l’étranger : Pascal BardouxExpatria Cum Patria : Coralie Masle-CalluIntime conviction : Samira AguerguanJ’aimerais vous dire : Serge Cyril VinetImplantation francophone : Didier AssandriLe saviez-vous ? : Daniel A. SijerolsAnniversaire : Kathereen AbhervéExposition : Corinne CharlesLe billet de Dany : Dany VinetRencontre : Anne Catelain-Le DuCarnets de voyage : Kathereen AbhervéArt de vivre : Véronique BidingerPeinture : Robert BergheHistoire : Dominique OrtizGastronomie : Jean-Jacques PoutrieuxBridge : Yorick CazalRégie publicitaire Daedalus Publi FMConception graphique Raphis > 06 62 30 14 53 Imprimerie Weber Color SATirage : 80.000 exemplaires vérifié par attestation notariale

Expatria Cum PatriaAssociation nationale des Français établis hors de France - Loi 1901Président-Fondateur : Serge-Cyril VinetVice-Président : Jean-Jacques PoutrieuxSecrétaire Général : Marie-Thérèse Clausen

N° 22 • Automne 2008Le Darfour à la dérive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 04Survivre à la paix au Sud-Soudan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 07Darfour Chronique d’une mort annoncée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 10L’homéopathie pour animaux : une réalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 14Le bonheur est dans le pied ! Et dans les bains de mains ! . . . . . . . . . P. 182 trucs intelligents à faire suivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 21Entretien avec Thierry Roland . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 22Le tour du monde des marathons : Boston. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 26De l’opportunité fiscale de s’installer à l’étranger . . . . . . . . . . . . . . . . P. 30Les 50 ans de la 5e République. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 36Bronislaw Gérémek est mort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 39Entretien avec André Lamassoure. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 40Information . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 43Le hasard fait bien les choses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 44Faire rimer Jeunesse et Avenir ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 48La Fnac s’installe en Suisse alémanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 50Il était une fois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 54L’OSR, un jeune orchestre de 90 saisons. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 62Mes années cannibales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 66Igor et Grichka Bogdanov Ballade intemporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 68Marianne Shaw la fille de l’air . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 74L’Abbaye d’Ambronay ou l’histoire d’une reconversion réussie. . . . . . P. 78Alain Baraton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 82École dans la ville école de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 86“Histoire de la Prusse” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 90La cuisine du gibier à poil d’Europe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 92Bridge. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 94

ÉditorialSommaire

Thierry Oppikofer

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FRANCEMAGAZINE N°22 4 AUTOMNE 2008

Humanitaire

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Le camp de Gereida et d’autres campsde fortune ont récemment accueilli denouveaux arrivants, qui redoutent de

nouvelles attaques ; parmi eux, denombreuses personnes âgées.

Des combattants de l’Armée delibération du Soudan assistent à une

séance d’information sur le droithumanitaire organisée par le CICR à Durum.

La formation des agents communautaires de santé vétérinaireest destinée aux gardiens de troupeau, pêtres et nomades qui

parcourent des distances considérables afin de suivre un coursde base dispensé par le CICR.

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FRANCEMAGAZINE N°22 5 AUTOMNE 2008

Humanitaire

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Dans des zones isolées deDarfour, une équipe chirurgi-cale mobile du CICR apportedes soins vitaux aux soldats

comme aux civils.

Le DarfourLe Darfour à la dériveà la dérive

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FRANCEMAGAZINE N°22 6 AUTOMNE 2008

La situation continue à se dégra-der au Darfour. L’insécurité estencore montée d’un cran au

cours des derniers mois, privant denombreux habitants de leurs moyensd’existence et d’une assistance vita-le.En raison du conflit interne, despopulations entières continuent à êtredéplacées, ce qui empêche les cultiva-teurs d’ensemencer leurs champstout en perturbant l’accès aux marchéset aux services de santé.Face à l’ampleur des besoins, leCICR et ses partenaires duMouvement de la Croix-Rouge et duCroissant-Rouge ont missur pied une opérationd’assistance massive, laplus importante duMouvement à l’heureactuelle.« Être du Darfouraujourd’hui - quelle quesoit votre origine eth-nique - signifie survivredans une insécurité tota-le, à mille lieues desdéclarations des diplo-mates. Cela signifie ladouleur d’avoir toutperdu hier, la crainte del’insécurité aujourd’huiet l’incertitude pourdemain. Cette situationterrible ne peut êtreréglée que par desmoyens politiques. Enattendant, une actionhumanitaire authenti-quement indépendanteet neutre est plus néces-saire que jamais, maisles conditions sont deplus en plus dange-reuses », expliqueJacques de Maio, chefdes opérations du CICRpour la Corne del’Afrique.De fait, les conditions desécurité sont de plus enplus précaires pour leshumanitaires engagés auDarfour. Plusieursemployés d’agenceshumanitaires ont ététués ou blessés lors

d’attaques. En août, un employé duCICR a été enlevé, puis tué. Bien quel’accès à certaines régions soitintermittent, le CICR poursuit sesactivités dans les trois États duDarfour.La priorité absolue consiste à aiderles résidents et les personnesdéplacées dans les zones rurales,notamment en leur fournissant dessemences, des outils et des secoursappropriés à leurs besoins.L’approvisionnement en eau, ainsique des programmes médicaux nesont pas moins vitaux.

Des millions de personnes sontdéplacées à l’intérieur du pays, tan-dis que 220 000 personnes ont cher-ché refuge au Tchad. Dans la régiondu Darfour Sud, plus de 100 000personnes déplacées vivent dansdes camps de fortune qui s’étendentsur plusieurs kilomètres carrésautour de la ville de Gereida. Unprogramme de nutrition y est menéavec les Croix-Rouge britannique etaustralienne. Une équipe chirurgi-cale de quatre personnes est baséeà Nyala et peut être déployée enquelques heures dans les zonesd’affrontement pour soigner soldatset combattants blessés de toutes lesparties du conflit. Le CICR a renfor-cé son soutien aux campagnes devaccination menées par le ministèrede la Santé soudanais, ainsi que sesprogrammes vétérinaires, afin depallier les carences et d’encouragerl’autosuffisance des populations.Pour soulager les épreuves de lapopulation civile, le CICR maintientun dialogue confidentiel avec toutesles parties, à tous les niveaux, afinde leur rappeler leur obligation, auregard du droit international huma-nitaire, de veiller à ce que les civilssoient protégés.Le conflit du Darfour a dispersé denombreuses familles. Rechercherles personnes disparues et aidercelles qui sont séparées à commu-niquer entre elles - et si possible àse regrouper - est un travail delongue haleine qui s’opère avec lesoutien effectif du Croissant-Rougesoudanais.En l’absence de perspectived’apaisement, le Mouvement estplus que jamais mobilisé pour faireface à une urgence qui dure.

JEAN-FRANÇOIS BERGERRÉDACTEUR EN CHEF CICR

DE CROIX-ROUGE, CROISSANT-ROUGE

Cet homme fait partie des 100 OOOpersonnes déplacées vivant dans

le camp de Gereida, au Darfour Sud.

Humanitaire

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FRANCEMAGAZINE N°22 7 AUTOMNE 2008

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En cette chaude matinée de janvier,l’hôpital universitaire de Juba (le “ JTH ”,comme tout le monde l’appelle ici), d’une

capacité de 500 lits, semble encore plusgrouillant d’activité que d’habitude. Une sectionde quarantaine a été créée pour des maladessoupçonnés de souffrir du choléra. Les ailesmédicales et pédiatriques sont surpeuplées, etdans la salle des urgences, le personnel soigneles victimes d’un accident de la route, le premierde la journée. Des patients épuisés gisant sur des litsmétalliques, dans des salles à la peintureécaillée, les nuages de poussière soulevéspar le balai des nettoyeurs dans les couloirs,la multitude d’effluves dans l’air : tout celadonne une petite idée de la dévastation que

peut apporter un conflit à une société déjàappauvrie, même longtemps après la fin deshostilités.Parmi les patients dans les services de chi-rurgie, plusieurs hommes blessés par balleet un autre, par une lance. Une femme dunom de Larisa, amputée d’une jambe, allon-gée dans son lit, vaporise du parfum bonmarché sur son moignon pansé. A sescôtés, une femme et son bébé, blessés tousdeux pendant un affrontement intertribaldans leur village.Le service de pédiatrie est débordé. Desmères sont allongées, serrées l’une contrel’autre sur les lits éraflés, berçant desenfants malades, d’autres sont assises surdes couvertures à même le sol, si serrées

LA GUERRE CIVILEQUI A PRIS FIN EN2005 APRÈS AVOIRRAVAGÉ LE SUDDU SOUDANPENDANT 22 ANS,A LAISSÉ DESSÉQUELLESPHYSIQUES ETPSYCHOLOGIQUESDURABLES,SURTOUT POURLES PAUVRES,COMME L’AMONTRÉ UNEVISITE EFFECTUÉEAU DÉBUT DEL’ANNÉE ÀL’HÔPITALUNIVERSITAIRE DEJUBA, LACAPITALE DU SUDDU PAYS.

Survivre à la paixSurvivre à la paixau Sud-Soudanau Sud-Soudan

L’hôpital univer-sitaire de Juba.

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FRANCEMAGAZINE N°22 8 AUTOMNE 2008

Un médecin duCICR opère un

genou.qu’il est difficile de progresser sans poser lepied sur un enfant prostré. Dans tout ce chaos, des enfants atteints depaludisme et de diarrhée gisent, immobiles,reliés à des goutte-à-goutte, sur descouvertures grises de l’armée ou sur destissus de coton délavés. Les pleurs couvrentle bruit des conversations. Un seul infirmierest de service : Patrick, étudiant en médeci-ne de première année.Le CICR soutient le JTH depuis 14 ans. Desdizaines de chirurgiens, anesthésistes,médecins, infirmières et administrateursont travaillé ici pour épauler le personnelsoudanais (près de 1 000 employés), ensei-gner à l’école d’infirmiers et apporter unsoutien administratif. Le CICR continue àfournir la totalité des médicaments et desfournitures médicales, des réactifs pour lelaboratoire et des articles non médicaux :pansements, gants chirurgicaux, draps etuniformes d’infirmières. Aujourd’hui,cependant, deux ans après la fin de la guer-re, le CICR a commencé à réduire son sou-

tien, et en décembre 2007, il s’est retiré duJTH, passant le relais au ministère de laSanté du gouvernement du Sud-Soudan.Cette perspective angoisse le directeur del’hôpital, Samuel Salyi. « Rome ne s’est pasfaite en un jour, dit-il. Les gens émergentde la guerre, et il faut du temps pour queles choses changent ; ils sont toujours trau-matisés. »La Banque mondiale, par l’intermédiaire deson Fonds d’affectation multidonateurs,verse maintenant des millions de dollarspour la remise en état de l’hôpital. Maisc’est le personnel, plus encore que les infra-structures, qui préoccupe Samuel Salyi.« Les médecins de la diaspora sont tou-jours réticents à revenir au pays »,explique-t-il d’une voix où pointe la désillu-sion. Lui-même n’a pas quitté Juba pendanttoute la guerre.L’unique radiologue de l’hôpital est resté, luiaussi. Lorsque les combats ont éclaté en1983, il a emmené sa famille en Ouganda,puis il est revenu à son poste pendant toutela durée de la guerre. « Les besoins aug-mentent, affirme-t-il. Il y a davantage devéhicules dans les rues, et donc plusd’accidents. Par ailleurs, la population estplus nombreuse, nous faisons 30 radios parjour. » Il craint aussi que les ancienscomme lui ne soient pas remplacés par dupersonnel plus jeune.« J’ai parlé aux autorités, explique-t-il, et jeleur ai demandé de nous envoyer desjeunes, car nous, les anciens, on disparaîtpeu à peu. »De nombreux collaborateurs, marqués parle conflit, semblent frappés d’un profondmalaise. « Certaines de nos infirmières ontperdu leur mari pendant la guerre et ellesélèvent seules leurs enfants », expliquesœur Christine Akongo, une nonne qui tra-vaille ici depuis de nombreuses années.L’absentéisme est important, car le person-nel cherche à compléter son revenu par undeuxième emploi, ou à cultiver des vivrespour nourrir sa famille.« La guerre a abîmé l’âme des gens », ditLouise Vuillermin, responsable de projetCICR , l’une des 15 expatriés qui travaillentactuellement au JTH.L’hôpital est administré par le gouverne-ment ; le CICR joue un rôle d’appui. L’équipene peut guère qu’encourager ses homo-logues soudanais à prendre leur tâche plusau sérieux. Mais Claire Gripton, infirmière

• Le ministère de la Santé du gouvernement du Sud-Soudan est res-ponsable du JTH et s’apprête à engager une société qui adminis-trera l’établissement à long terme.

• Les ressources financières nécessaires au JTH sont garanties parl’allocation, décidée par le gouvernement, de 220 millions de dol-lars pour les trois ans à venir pour le secteur de la santé.

• Le recrutement du personnel spécialisé pour les principaux dépar-tements (médecine générale, pédiatrie et gynécologie) est mainte-nant achevé, avec l’engagement de médecins soudanais.

• Les conditions sont maintenant réunies pour que le CICR se retireà la fin de 2008.

Préparer l’avenir

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Humanitaire

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FRANCEMAGAZINE N°22 9 AUTOMNE 2008

Humanitaire

en chirurgie, pose la question cruciale :« Comment motiver des gens qui ont perdul’espoir ? »Dans un contexte où la prise en chargeattentive du patient n’existe pas, la moindrepetite amélioration est une grande victoire.Voir une fillette tuberculeuse de 9 anss’asseoir et s’intéresser à ce qui l’entoureaprès une longue période de léthargie, parexemple, éclaire une journée entière. Savoirque la mortalité infantile dans le service depédiatrie a baissé de 7 à 5 % suscite un sou-pir de soulagement. Voir le plaisir sur lesvisages des patients qui assistent à une pro-jection du Roi Lion est un moment à savou-rer.Patrick, l’étudiant de 21 ans du service depédiatrie, confie qu’il a choisi la carrièremédicale alors qu’il était en exil en Ougandaet collaborait à des campagnes sur leVIH/sida. Il est revenu en 2005 pour revoirson père, dont il était séparé depuis plus de15 ans, et s’est inscrit peu de temps après àl’école d’infirmiers du JTH. « C’est moi quiai décidé de rentrer, explique-t-il. Au fondde mon cœur, je veux aider les autres. »Aux urgences, une foule de personnesattendent. C’est maintenant la fin del’après-midi, mais il y a autant de mondeque ce matin. A l’ombre d’une véranda, unevieille femme agonise, la tête sur les genouxde son fils.Les victimes d’un nouvelaccident de la route attendent qu’ons’occupe d’elles ; sous un arbre, la familled’un patient prépare le repas sur un feu debois et s’apprête à passer la nuit sur place.Ces scènes d’intimité à l’heure du crépuscu-le rappellent les paroles de William Penn :« Je ne parcourrai qu’une fois le chemin dela vie, et si je puis faire le bien ou témoignerde la compassion à mon prochain, c’estaujourd’hui qu’il faut agir, car je ne repas-serai plus par ce lieu. »Ces paroles semblent avoir été écrites pourles nombreux hommes et femmes, délé-gués CICR et Soudanais, qui ont tant donnéd’eux-mêmes pour aider les victimes de lalongue guerre civile soudanaise, et qui lesaident désormais à survivre à la paix. Le motde la fin revient à une infirmière norvégien-ne du JTH, Turid Andreassen : « Pour fairece travail, on utilise non seulement tout sonsavoir-faire d’infirmier, mais aussi tout sonbagage d’être humain. »

JESSICA BARRYDÉLÉGUÉE COMMUNICATION DU CICR

Vue générale du camp de

Gereida, au Darfour Sud.

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FRANCEMAGAZINE N°22 10 AUTOMNE 2008

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> Kaële : Pouvez-vous nous expli-quer les conséquences humani-taires du conflit au Darfour ?

Jakob Kellenberger : Être darfou-rien aujourd’hui, indépendammentde l’origine ethnique, signifie sou-vent survivre dans un environne-ment d’insécurité. Les communau-tés rurales ont été particulièrementtouchées. Les moyens d’existence

de la population sont menacés parle pillage, une liberté de mouve-ment restreinte et le manqued’accès aux services médicaux etvétérinaires essentiels. Des méca-nismes de survie, tels que le petitcommerce, sont mis à mal par ladestruction des cultures etl’instabilité des lignes de front.L’insécurité touche également les

civils qui ont fui leur village en quêted’une relative sécurité dans lescamps pour personnes déplacées àl’intérieur du pays. Malgré la réduc-tion des confrontations militairesces derniers mois, il n’y a pas euune amélioration globale sur le plande la violence et de l’anarchie. Lepersonnel humanitaire a donc plusde difficultés à atteindre les vic-

LE DARFOUR, PROVINCE OCCIDENTALE DU SOUDAN, VIT DEPUIS PLUS DE QUATREANS LES AFFRES D’UNE GUERRE CIVILE QUI A ESSAIMÉ PLUS D’UN MILLION DEDÉPLACÉS INTERNES, SELON LA TERMINOLOGIE DU HAUT COMMISSARIAT DESNATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS (HCR), ET AURAIT CAUSÉ LA MORT DE 200 000PERSONNES. CE PAYS, GRAND COMME QUATRE FOIS LA FRANCE, CONTINUED’EXPORTER PLUS DE 70%(1) DE SON PÉTROLE VERS LA CHINE, QUI VIENT DENOMMER UN REPRÉSENTANT SPÉCIAL POUR L’AFRIQUE ET DONT LA PREMIÈREMISSION SERA CONSACRÉE AU DARFOUR. AU NORD, LES PAYS EXPORTATEURSD’ARMES NOURRISSENT LA VIOLENCE, MALGRÉ LE DROIT HUMANITAIRE. ÀGENÈVE, LE PRÉSIDENT DU COMITÉ INTERNATIONAL DE LA CROIX-ROUGE (CICR),JAKOB KELLENBERGER, DÉFEND INLASSABLEMENT LE DROIT INTERNATIONALHUMANITAIRE « POUR PROTÉGER LA VIE ET LA DIGNITÉ DES CIVILS ».

Darfour

Jakob Kellenberger,président du CICR,visite Gereida, un

camp pour person-nes déplacées situéau Soudan (février

2007). Ce camphéberge environ

90 000 personnesdont certaines

depuis déjà deuxans ; le CICR ydistribue de la

nourriture, de l’eauet des soins.

DarfourChronique d’une mort annoncée

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FRANCEMAGAZINE N°22 11 AUTOMNE 2008

Humanitaire

times. Ce drame humain ne peutêtre réglé que par des moyens poli-tiques.

> K. : Considérez-vous que noussoyons en présence d’ungénocide ?

J. K. : Le CICR a notamment pourmandat d’œuvrer à la compréhen-sion et à la diffusion du droit inter-national humanitaire, tout enmenant une action humanitaireindépendante et neutre. Enrevanche, le CICR n’a pas pour voca-tion de se prononcer sur l’existenceou non d’une situation de génocide.La Commission d’enquête instituéepar la résolution 1564 du Conseil desécurité des Nations unies a concluen 2006 qu’il n’y avait pas de génoci-de au Darfour. Quelle que soit laqualification de la situation dans larégion, la violence engendre tou-jours des souffrances.

> K. : Quelles sont les marges demanœuvre du CICR ?

J. K. : En collaboration avec leCroissant-Rouge soudanais etd’autres sociétés nationales de laCroix-Rouge et du Croissant-Rouge,le CICR n’a cessé de renforcer sonaction face à la crise, surtout dansles zones reculées. Le dialogueconfidentiel que nous entretenonsavec toutes les parties du conflitnous permet d’avoir l’accès aux vic-times nécessaire pour pouvoircontinuer notre travail et acheminerl’aide là où elle est la plus urgente.Malgré l’insécurité qui prévaut dansde nombreuses régions du Darfour,le CICR est encore présent dans sestrois États. Bien que toutes les par-ties du conflit acceptent, dansl’ensemble, la présence du CICR auDarfour, cela ne signifie pas pourautant que le personnel del’institution ne court aucun risqued’attaque. Le grand problème, c’estle banditisme et la criminalité.J’insiste donc sur la nécessité derespecter la mission du CICR.

> K. : Vous avez effectué troisvisites au Darfour depuis 2004.Qu’avez-vous pu constater de

l’évolution du conflit ?J. K. : Je suis retourné au Soudanen février, principalement pour voircomment la situation avait évoluédepuis ma dernière visite en 2004.J’ai rencontré des représentantsdes autorités locales, des comman-dants rebelles et des chefs de tribuset de communautés. J’ai été trèsinquiet de voir à quel point lesconditions de sécurité étaient deve-nues précaires dans de nombreusesrégions. Je l’étais plus encore devoir les terribles souffrances endu-rées par la population civile danstoute la région. Et j’étais frustré deconstater les difficul-tés auxquelles le CICRet d’autres organisa-tions humanitaires seheurtent alors qu’ilsessaient d’apporter del’aide. Ce sont despréoccupations dontj’ai fait part à toutesles personnes que j’airencontrées sur leterrain, mais aussiaux ministres du gou-vernement et àd’autres personnes, àmon retour àKhartoum.

> K.: Le CICR porteassistance à plusde 300 000 personnes, il yaurait plus d’un million dedéplacés internes. Quelsmoyens de pression avez-vouspour obtenir que la populationcivile du Darfour soit mieuxprotégée ?

J. K. : Il est vrai que la situation desdéplacés mais aussi des autrescivils touchés par la crise actuelleest inquiétante. Si les conditions desécurité ne sont pas réunies, il y apeu d’espoir de voir ces personnesretourner un jour dans leur village.Pour y parvenir, toutes les partiesdu conflit doivent pleinement res-pecter les règles du droit internatio-nal humanitaire. Pour soulager lesépreuves de la population civile, leCICR maintient un dialogue confi-dentiel avec toutes les parties, à

tous les niveaux, afin de leur rappe-ler leur obligation, au regard dudroit international humanitaire, deveiller à ce que les civils soient pro-tégés. Le CICR continue à suivre deprès les violations du droit et à lesporter à l’attention des autorités etparties concernées, conformémentaux modalités de travail habituellesde l’institution. Là où il y a des pro-blèmes, nous demandons qu’ilssoient résolus. C’est la responsabi-lité des parties de respecter ce droitqui a pour but de protéger la vie et ladignité des civils.

> K. : Commentjugez-vous la res-ponsabilité de lacommunautéinternationale ?

J. K. : Selon lesConventions deGenève, les États ontl’obligation non seule-ment de respecter lesrègles du droit inter-national humanitaire(DIH), mais égaIementde les faire respecterpar d’autres. Unmeilleur respect duDIH par toutes lesparties impliquéesdans le conflit auDarfour aura un effet

positif et immédiat sur la popula-tion.

> K. : Aujourd’hui, quellesinformations vous parviennentdu terrain ?

J. K. : Les affrontements et lesmauvaises conditions de sécuritédans de nombreuses régions vulné-rabilisent encore davantage lapopulation civile. Les conditions devie sont de plus en plus difficilespour les millions de personnes quiont été forcées de quitter leur foyerdepuis le début du conflit. L’accèsaux victimes devient de plus en plusdifficile aussi. Dans certaines zones,la distribution d’aide humanitaire aété interrompue à cause des inci-dents de sécurité. Comme vousvoyez, il n’est pas facile de travailler

‘‘‘‘

Les conditions de

sécurité de plus en plus

précaires pour les

humanitaires ont eu un

impact très négatif sur

leur capacité d’agir.

>>

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FRANCEMAGAZINE N°22 12 AUTOMNE 2008

Humanitaire

dans un contexte où même leshumanitaires, en violation desrègles du droit international huma-nitaire, sont souvent pris pourcibles.

> K. : Selon vous, pourquoi leconflit soudanais ne mobilise-t-il pas les États occidentauxcomme le font les guerres auMoyen Orient ?

J. K. : Le conflit et la situationhumanitaire du Darfour continuentpourtant à attirer l’attention inter-nationale. Le niveau de financementdu CICR montre qu’il y a un intérêtpour secourir les victimes de ceconflit.

> K. : Malgré la présenced’organisations humanitairesau Soudan, la situation ne s’est,semble-t-il, pas améliorée.Quel constat tirez-vous de ceque l’on pourrait considérercomme un échec del’intervention humanitaire ?

J. K. : Je ne parlerais pas d’unéchec, mais il est vrai que les condi-tions de sécurité de plus en plusprécaires pour les humanitaires onteu un impact très négatif sur leurcapacité d’agir. Plusieurs employésd’agences humanitaires ont été tuésou blessés lors d’attaques. Enl’absence de perspectived’apaisement, le CICR et leCroissant-Rouge soudanais sontplus que jamais mobilisés pour faireface à une urgence qui dure. Maisl’action humanitaire seule ne suffitpas. La situation ne peut être réso-lue que par des mesures politiques.

> K. : Quelles sont les actions duCICR au Soudan ?

J. K. : À partir du début de 2004, lesbesoins cruciaux de la région duDarfour ont fait de l’action menée auSoudan la plus importante opéra-tion du CICR dans le monde. Depuis2004, une réponse structurée a étéélaborée sur la base d’un dispositifdiversifié et d’une logistique solide,avec des programmes allant de laprotection à plusieurs formesd’assistance : aide alimentaire,

et du matériel agricole distribué àdes milliers de personnes. Le conflitdu Darfour a dispersé de nom-breuses familles. Rechercher lespersonnes disparues et aider cellesqui sont séparées à communiquerentre elles - et si possible à seregrouper - est un travail de longuehaleine qui s’opère avec le soutienefficace du Croissant-Rouge souda-nais.

> K. : Le CICR gère-t-il les campsde déplacés ?

J. K. : Le CICR ne gère pas lescamps de déplacés. Cette tâcherevient aux autorités sur place.Néanmoins, le CICR a entrepris desactivités pour fournir les moyens desurvie pour les populations dépla-cées, là où les autorités ne sont pasen mesure de le faire. Au début de lacrise en 2004, le CICR a commencéà travailler dans les camps pourpersonnes déplacées au Darfour,mais comme d’autres organisationssont arrivées pour aider les dépla-cés, nous nous sommes progressi-vement concentrés sur les zonesrurales où il ya très peu

approvisionnement en eau et fourni-ture de soins médicaux. Au Darfour,en 2006, l’institution a distribué enmoyenne 19 000 tonnes de vivrespar mois à environ 177 000 per-sonnes, dont un tiers étaient desdéplacés internes. La majeure par-tie de la nourriture a été remise auxpersonnes vulnérables résidantdans des régions rurales éloignées,dans le but d’éviter qu’elles ne vien-nent grossir les rangs des per-sonnes déplacées vivant dans descamps déjà surpeuplés. Les ingé-nieurs du CICR ont alimenté en eauplusieurs camps pour déplacésinternes et diverses zones urbaines,et ils ont réparé les réseauxd’approvisionnement en eau dequatre villes. En 2006, des centainesde pompes à eau ont été réparées,plus d’une cinquantaine de puits ontété creusés ou nettoyés. Le CICR aégalement modernisé quatre hôpi-taux et douze centres de soins desanté primaire auxquels il a fourniune assistance médicale et du per-sonnel. En 2006, l’équipe chirurgi-cale du CICR a été déployée 60 foiset a procédé à presque 500 opéra-

Dans un rapport publié le 8 mai dernier, Amnesty International révèle quel’embargo des Nations unies sur les transferts d’armes aurait été violé

entre janvier et mars 2007 par le gouvernement soudanais, et détaille lestypes d’armes fournis au Soudan par la Chine et la Russie, rappelant que cesdeux pays (qui ont démenti ces accusations) sont « membres permanents duConseil de sécurité des Nations unies. Cet armement a lui aussi servi à violerl’embargo, pourtant décrété par le Conseil de sécurité. » À l’appui, Amnestypublie des photos dont celles d’un hélicoptère d’assaut (type MI-24) àl’aéroport de Nyala au Darfour (mars 2007). Selon le rapport, le Soudan aimporté de la Chine pour 24 millions de dollars d’armes et de munitions, laRussie pour 21 millions de dollars d’équipements aériens. L’organisation nongouvernementale dénonce « la formulation assez vague de l’embargo duConseil de sécurité des Nations unies concernant le Darfour, et l’absenced’un mécanisme suffisamment efficace pour le suivi, le contrôle et les rap-ports publics, certains États et personnes peuvent violer cet embargo en touteimpunité. » Amnesty International appelle la communauté internationale àrenforcer l’application de l’embargo et à réduire les flux d’armes à destina-tion du Darfour, et milite depuis 2003 pour un traité mondial sur le commer-ce des armes « afin d’empêcher que ces dernières alimentent des conflitsaussi catastrophiques. »Le rapport en anglais sur : http ://web.amnesty.org/library/index/engafr540192007

Violation de l’embargo sur les armes au Soudan

>>

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FRANCEMAGAZINE N°22 13 AUTOMNE 2008

d’organisations humanitaires, afinde porter assistance aux personnesvivant encore dans leur village. C’estune priorité pour nous d’aider lesgens à rester chez eux afin qu’ils nerejoignent pas les camps. Nous sou-tenons les résidents et les per-sonnes déplacées dans les zonesrurales,notamment en leur fournis-sant des semences, des outils etdes secours appropriés à leursbesoins. L’approvisionnement eneau ainsi que des programmesmédicaux sont non moins vitaux .Fin janvier, nous avons exception-nellement décidé de reprendre encharge dans le camp de déplacés deGereida l’approvisionnement en eauet en vivres, la supervision des ser-vices sanitaires, la gestion desdéchets, la provision de soins desanté primaire et la gestion d’unprogramme de nutrition en collabo-ration avec les Croix-Rouge britan-nique et australienne. Cette déci-sion était prise suite au départ desautres organisations humanitairesqui ont dû quitter la ville après unincident de sécurité grave.> K. : Quelles mesures politiques

pourraient mettre un terme au

> K. : Vous êtes le président duComité international de laCroix-Rouge depuis 2000. Quelbilan tirez-vous de ces septannées ?

J. K. : Je me suis rendu compte qu’ilest possible, malgré toutes les diffi-cultés, d’améliorer la vie de millionsde personnes particulièrement vul-nérables par une action humanitairedéterminée.

> K. : Humainement, qu‘avez-vous appris sur vous-même etle monde qui vous entoure ?

J. K. : Pour ce qui est du monde, laproximité du pire et du meilleur. Surmoi-même : une volonté forte baséesur des convictions solides est utile,

conflit ?J. K. : Il faut des mesures qui pro-mettent de réconcilier les aspira-tions politiques et économiques dugouvernement central et desgroupes d’opposition au Darfour.Toute solution politique doit être enaccord avec les droits de l’homme etle droit international humanitaire.

> K. : Selon vous, comment faut-ilenvisager l’avenir ?

J. K. : Il y a pour le moment peu designes d’une solution politique soli-de et la fragmentation des groupesarmés complique encore un contex-te déjà dangereux. Un banditismeaccru, la fragmentation des groupesarmés, les accrochements entre lesforces gouvernementales et lesgroupes rebelles non signatairesainsi que les luttes tribaless’inscrivent en toile de fond d’unconflit local de plus en plus politiséet d’un état grandissant d’anarchie.Les rivalités pour les terres et lesressources d’eau continuentd’alimenter la violence et lesconfrontations armées au sein destrois provinces.

À Abata, région isolée au pieddu Jebel Mara, des

bénéficiaires de l’aide du CICRattendent la distribution de la

nourriture (mai 2006). Desgroupes armés entretiennent

l’insécurité, ce qui a renduimpossible toute plantation

agricole au cours de la dernière saison.

Humanitaire

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FRANCEMAGAZINE N°22 14 AUTOMNE 2008

Santé animale

LA MÉDECINE ALTERNATIVENOUS SUBMERGEAUJOURD’HUI DEMÉTHODES DE GUÉRISONSDIVERSES. LA MÉDECINEVÉTÉRINAIRE EN ESTAFFECTÉE DE MÊME :L’ACUPUNCTURE, LAPHYTOTHÉRAPIE,

L’HOMÉOPATHIE, LES FLEURS DE BACH, LES TERMES N’ENFINISSENT PLUS ET L’ON NE SAIT PLUS TROP QUE PENSER.QUELLE SIGNIFICATION CELA A-T-IL D’AMENER SON CHIENCHEZ UN HOMÉOPATHE, OU DE FAIRE VENIR UN SPÉCIALISTEEN HOMÉOPATHIE POUR SON CHEVAL ? QUELLES SONT L ESDIFFÉRENCES FONDAMENTALES ENTRE LA MÉDECINECONVENTIONELLE ET LA MÉDECINE ALTERNATIVE ?

L’homéopathie pour animauxL’homéopathie pour animaux

une réalitéEn temps que spécialiste en homéopathie

et médecine comportementale chez lesanimaux, je vais me contenter de préciser

les particularités de ces deux disciplines, touten décrivant brièvement les autres médecinesalternatives dans l’encadré. L’homéopathien’arrête pas d’être accusée de sorcellerie, deplacebo, de charlatanerie. L’incompréhensionde certains phénomènes physiques nousamène à douter de la vérité de certaines réali-tés. L’homéopathie se base sur la croyance àune énergie inhérente à chaque être vivant,permettant la vie et la survie de cet être.D’après le fondateur de l’homéopathie SamuelHahnemann, docteur et chimiste du 19e siècle,cette énergie s’appelle “Lebenskraft”, ou

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FRANCEMAGAZINE N°22 15 AUTOMNE 2008

Santé animale

forces afin qu’ils ne réapparaissent plus.Des millions d’observations permettentaujourd’hui d’affirmer que les médicamentshoméopathiques hautement dilués guéris-sent des humains et des animaux quotidien-nement, quand il est possible d’administrerdes globules correspondant le plus exacte-ment aux symptomes du patient. Ceci, aprèsavoir contrôlé que le patient ne souffre pasd’une maladie qui nécessite d’autres traite-ments (chirurgie, diète etc.) et avoir obtenula confirmation que l’environnement dupatient ne nuit pas à sa santé. Ceci est par-ticulièrement important chez les animaux,dont les propriétaires méconnaissent par-fois les besoins.Afin de pouvoir reconnaître et juger desbesoins des animaux, il faut en connaître le >>

énergie de vie. Les médicaments homéopa-thiques ne sont donc pas décelables avec unPCR ou d’autres moyens chimiques ou phy-siques contemporains. Ils sont dilués audelà du nombre d’avogadro, et ne se retrou-vent donc plus dans le liquide représentantle médicament.Cela pose évidemment problème à nos cer-velles rationelles et sceptiques.L’effet placebo, de son côté, représente uneréponse positive du corps à un médicamentexempt de principe actif, soit de contenu. Lecorps réagit donc par soi-même à uneimpulsion inconnue. Dans ce sens,l’homéopathie peut en effet être appeléetraitement placebo, car c’est exactement cequ’elle fait : elle donne l’impulsion au corpsde rassembler ses forces immunitaires afinde guérir.Elle lui donne cette possibilité grâce à unmédicament qui va agir au niveau del’énergie globale, de la “Lebenskraft” ouénergie de vie. Le médicament homéopa-thique va en effet entrer en résonance avecles cellules du corps vivant, tout comme undiapason entre en résonance avec un autreet adopte le même ton.La biologie déborde de phénomène oscilla-toires qui ne peuvent être abordés avec nosinstruments de mesure actuels. Lesrythmes circadiens chez les animaux ou lafréquence du cœur sont d’autres phéno-mènes témoignant de la résonance et de lasensibilité des systèmes biologiques. Cessystèmes sont complexes et difficilementdécryptés par des moyens d’analyses sou-vent adaptée à une technologie “humanmade”, incapables d’atteindre le niveau desensibilité nécessaire.Au temps de la découverte del’homéopathie, la mécecine conventionellene traitait pas ses malades de main morte.Beaucoup de patients mouraient de leurtraitement. L’homéopathie doit égalementson succès aux réactions secondaireslégères qui la caractérise. La grande diffé-rence entre une méthode alternative oucomplémentaire et la médecine convention-nelle, reste cependant le but du traitement.La médecine conventionelle veut éliminerles symptomes du désagrament présent,alors que la médecine alternative va abor-der son patient en temps qu’ensemble etessayer de traiter la cause du symptome etdu désagrément. L’homéopathie va per-mettre à l’humain ou au cochon d’inde desurmonter ses symptomes de ses propres

Coffret detraitement

homéopathiquepour animaux.

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FRANCEMAGAZINE N°22 16 AUTOMNE 2008

Santé animale

fonctionnement exact. La médecine généra-le permet de distinguer différents mauxsomatiques, la médecine comportementalepermet de son côté de juger de la santémentale d’un animal. Depuis des années, jeme passionne pour ce domaine trop oubliéet je me suis rendue compte à quel point ilest difficile de cohabiter avec d’autresespèces sans en violer, involontairementbien sûr, certains besoins ou instincts. Lechien nous accompagne depuis plus de15 000 ans. Le chat partageaitdéjà la vie des Égyptiens et lecheval sert de moyen detransport depuis des siècles.Ces animaux nous sont utilesà différents niveaux, travail,hobby ou simplement compa-gnon de vie ; ils ont cepen-dant chacun leur propresmoyens de communication,leur propres besoins et habi-tudes. En temps qu’animalplus intelligent, c’est àl’homme d’essayer de com-prendre ces particularitésafin de permettre une vieagréable à tout le monde. Carun chien développant uneanxiété due à une mauvaisecommunication entre hommeet animal peut devenir trèspénible pour son environne-ment. Il en va de même pourun chat souffrantd’incontinence ou faisant dumarquage urinaire. La dou-leur qui engendre un pasincertain du cheval doit êtrediagnostiqué certainementavant de penser à un troubledu comportement, même sicelui-ci suit de près la dou-leur . Il n’est pas rare de trou-ver une douleur intimementliée à un problème comporte-mental.Voici deux exemplesd’animaux, auquelsl’homéopathie et ou la méde-cine comportementale ontpermis de retrouver un équi-libre corporel et psychique.• Le chat de race main coonMay est très faible et ne pèseque 1.4 kg pour ses 6 mois. Lasœur du chaton mourut un

>> jour avant que je ne rencontre la propriétai-re. Les chatons ne présentaient aucunsymptome particulier, à part la grande fai-blesse et surtout un manque d’appétitacharné. May se montre cependant trèscurieuse, ses yeux sont grand ouverts etsuivent tous mes mouvements. La proprié-taire m’explique que le chaton n’a pas eu unbon accès au lait maternel et qu’il aime secoucher surtout au chaud, sur le chauffageou sur la propriétaire elle-même.

Chat de racemain coon et

Labrador.

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FRANCEMAGAZINE N°22 17 AUTOMNE 2008

Il n’y a pas de temps à perdre, le médica-ment doit avoir un effet immédiat etj’administre quelques globules ayantcomme caractéristique principale lemanque de lait maternel et le besoin dechaleur. Un quart d’heure plus tard, Mayquitte enfin les genoux de sa maîtresse etvient inspecter mon bureau sur des jambestremblantes. Nous décidons d’en rester là.Le lendemain, la propriétaire de Maym’appelle en disant que le chaton dortmoins. Deux semaines plus tard, le chatonmange un peu mieux et se promène parfoisdans l’appartement.Après trois ans, May est devenue une chattetrès sûre d’elle-même, n’ayant jamais deproblème de santé.• Le labrador Mori a 6 mois et est hyperac-tif. Il ne sait pas s’arrêter quand on joue, iltourne en rond pendant toute la consulta-tion en reniflant trois fois le même endroit, ilse lèche les pattes antérieures et dort troppeu. Le diagnostic étant clair, les proprié-taires et tous les humains s’occupant deMori vont s’efforcer de suivre mes conseilsconcernant la communication et la manièrede tenir Mori. De plus, le labrador reçoit unmédicament homéopathique s’apparentantle plus possible à son caractère, ce quiinclut l’hyperactivité.Les propriétaires étant très conséquents etle chien jeune, cela dure quatre mois jus-qu’à ce que le comportement de Mori sestabilise. Un chien plus âgé aurait mis plusde temps à retrouver un équilibre. De plus,les efforts des propriétaires jouent un rôlenon négligeable : la conséquence, l’absencede punition, la patience sont d’une grandeimportance.Les succès de l’homéopathie dépendent deplusieurs facteurs : la qualité des médica-ments est importante, les connaissances del’homéopathe concernant les milliers demédicaments différents est fondamentale.Mais la netteté des symptomes joue égale-ment un rôle primordial, l’âge et le poidsd’un animal seuls ne pouvant en aucun casnous permettre de choisir les globules adé-quates. C’est pourquoi il est nécessaire devoir l’animal pour pouvoir juger de son com-portement et de ses traits de caractère. Ilfaut ensuite en savoir davantage sur lamanière dont il mange, ses places de cou-chage préférées, si les yeux restent ouvertsquand il dort, s’il émet des sons pendant lesommeil, s’il mange proprement, s’il boitbeaucoup, etc.

Car ce sont les détails qui peuvent paraîtreanodins qui nous mènent au médicamentadéquat. Par exemple, un chien qui ne metjamais les pattes dans une flaque d’eau, afroid mais évite la chaleur, ou la jument quin’aime pas que l’on sert la sangle, ou le chatqui a mal à une patte mais se couche tou-jours dessus.Les médicaments homéopathiques peuventagir rapidement ou pendant des mois, selonla dilution administrée, et le diagnostic.Une homéopathie pratiquée professionelle-ment aide toujours à retrouver un équilibre,ou du moins, à reconnaître les bienfaits ouméfaits de certaines habitudes ou actes.Lorsqu’une guérison totale n’est pas pos-sible, l’homéopathie et la médecine com-portementale, toutes deux méthodes visantà traiter l’ensemble de l’individu, accompa-gnent l’animal et les propriétaires sur lechemin qui mène à une solution.

DR. DOUNYA REIWALD, MÉDECIN VÉTÉRINAIREPOUR EN SAVOIR PLUS : WWW.REIWALD.CH

Santé animale

PhytothérapieL’utilisation des plantes médicinales avec toutes les plantes adéquates (en forme liquide ou extraits alcooliques)

HoméopathieLes informations extraites de plantes, d’animaux, de métaux ou detissus organiques sont inscrites sur des globules ou liquides et affectent directement l’énergie de vie des patients. L’être vivant estperçu dans son intégralité, les symptomes ayant une valeur de signe.

Fleurs de BachCertains états d’âme correspondent à certaines fleurs. Ces fleurssont préparées avec de l’eau de source.

Thérapie aromatiqueL’acquisition d’arômes (inspiration, bain, massage) transforme l’étatémotionnel du patient.

Sels de SchüsslerL’absorption de ces sels incite la cellule à absorber davantage de selprovenant de la nourriture. Ceci permet la guérison.

Acupuncture et médecine chinoiseL’acupuncture est un des traitements principaux de la médecine chinoise traditionelle. Elle est appliqué surtout pour la prophylaxie,soit l’évitement du déclenchement de la maladie. Le fondement decette médecine est une conception de l’être vivant dans son intégralité avec des mots clefs tels le Yin/Yang, les cinq éléments(bois, feu, terre, métal et eau) ainsi que huit critères de base.

Glossaire

Dounya Reiwaldhom

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FRANCEMAGAZINE N°22 18 AUTOMNE 2008

Santé prévention

TRAITER LESPROBLÈMES DESANTÉ PAR LESPLANTESMÉDICINALES,AUJOURD’HUIENCORE LES GENSSONT DIVISÉS.D’UN CÔTÉ LESINCONDITION-NELS, CE SONTGÉNÉRALEMENTLES CONSOMMA-TEURS DEPRODUITS NATU-RELS ; DE L’AUTRELES SCEPTIQUES,QUI ESTIMENTQUE SEUL UNTRAITEMENT DECHOC PEUT VENIRÀ BOUT DE LEURSPETITSPROBLÈMES. SIPOSSIBLE VITE !

loin, d’une tradition orale qui s’était trans-mise dans notre famille. J’ignorais encoreque les Romains utilisaient, de cette maniè-re, les eaux thermales. Qu’à Royat, au des-sus de Clermont-Ferrand, on faisaitprendre des bains de pieds aux artéri-tiques. Il y a bien longtemps qu’on nemoque plus les traitements par osmose. Onconnaît leurs vertus curatives et le proces-sus scientifique de leurs effets. Ce n’estplus, depuis déjà bien des années, del’empirisme ! »

Les bains de mains et les bains de pieds Le turbo de votre circulationAlors, si en plus des tisanes et autresrecettes de grand-mère dont on vous assu-re qu’elles ont un pouvoir étonnant, on vousparle de bains de mains et de pieds dansune macération de plantes pour soulagervos maux, là vous allez décourager mêmeles meilleures volontés.Il y a des siècles pourtant que l’on connaîtl’efficacité des bains de plantes. Les peuplesles plus divers le savaient et les prati-quaient.Dans un de ses pre-miers livres, le célèbrep h y t o t h é r a p e u t eMaurice Mésségué ledisait : « J’aurais étéincapable de donner laraison de ces bains. Jel’ignorais. Mon père lesdonnait, je faisaiscomme lui. Lui avait-onexpliqué que la paumedes mains et la plantedes pieds étaient plusréceptives ? Qui ? Je nesais pas. Cela venaitcertainement de très

Jean JacquesDescamps

jjdes

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ps@

ther

mal

p.ch Le bonheur est dans le

Et dans les bains depied !

mains !REPROGRAMMERET ACTIVER SONORGANISME

« Comment peut-il mourir l’homme qui a de la sauge dans son jardin ? »

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FRANCEMAGAZINE N°22 19 AUTOMNE 2008

Santé prévention

Dans le centre de cure de Crans-Montana,après avoir travaillé une dizaine d’annéesavec Maurice Mésségué, j’ai moi-mêmetenté l’expérience de remettre en pratiqueces bains de mains et de pieds pour lescuristes. En plus de vingt ans, je n’ai jamaisrencontré une personne qui ait refusé defaire ces bains de mains et de pieds.

Il n’y a pas de saison pour se faire du bienUne cure de bains de mains et de pieds sefait en toutes saisons.En hiver, elle permet de passer une saisonfroide sans problèmes. Quant à la durée dela cure, elle est fonction de votre état desanté. Précisons qu’en premier lieu, cesbains activent la circulation du sang et larégularisent. C’est donc une prévention effi-cace pour vos problèmes circulatoires desmembres inférieurs, varices, jambeslourdes, œdèmes, cellulite et fourmille-ments. Ces bains de pieds et de mainsredonnent force et vitalité, régénèrent lescellules, favorisent le travail de digestion,calment les nerfs et les douleurs.

La potion magique de votre peau et voscheveuxLes peaux sèches ne résisteront pas à unecure de dix jours de bains de mains et debains de pieds.

“Depuis l’âge de deux ans, je souffrais d’eczéma.Mon état ne faisait qu’empirer. J’avais égalementde l’asthme. J’étais dans un état lamentable. Les

médecins consultés y perdaient leur latin. Ils me fai-saient prendre de la cortisone à grandes doses. C’estalors qu’avec l’autorisation de mon médecin traitant,qui a fait preuve, ce faisant, d’une grande largeurd’esprit, j’ai pris contact avec un spécialiste qui soigneau moyen d’herbes médicinales. Il m’a ordonné desbains de pieds tous les matins, avec un liquide que lui-même m’a donné, et il m’a prescrit après le déjeunerune tasse de tisane (un mélange de thym, romarin etsauge).J’ai commencé à aller mieux après douze jours de trai-tement. J’ai enfin pu dormir la nuit. Auparavant, si jedormais trois ou quatre heurs, c’était le maximum. Acause des démangeaisons et de la toux. Le matin, je mesentais encore plus fatigué qu’au moment d’aller mecoucher. Au bout d’un mois et demi, le résultat étaitspectaculaire.Maintenant, je poursuis mon traitement. Car sil’eczéma est parti assez vite, j’ai éprouvé encore uncertain temps des démangeaisons. Quant à l’asthme,cela est plus long. Au début du traitement, on m’avaitsignalé qu’il faudrait au moins six mois pour obtenir unrésultat dans ce domaine. »Ce mélange est composé de sauge officinale,

Ils l’ont vécu, ils témoignent

>>

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FRANCEMAGAZINE N°22 20 AUTOMNE 2008

Santé prévention

Un autre moyen de lutter contre les aller-giesVos allergies ne seront plus qu’un mauvaissouvenir après quelques semaines de bainsde mains et de bains de pieds.

Le chiendentIl suffit de suivre votre chien ou votre chatdans un champ pour observer les bienfaitsde cette plante que seuls les jardiniers et lesagriculteurs considèrent comme une mau-vaise herbe. Les animaux, par nature,l’utilisent depuis la nuit des temps pour sepurger, la rongeant, la mastiquant oul’avalant pour mieux la régurgiter. Nos ani-maux de compagnie nous montreraient-ilspas tout simplement l’exemple à suivre ?Le chiendent, certes, ne présente pas beau-coup d’attraits, la croyance populaire vou-lant que l’on se méfie généralement desplantes rampantes. Graminée vivace quicroît en abondance dans les terrainsincultes, elle a des tiges très fines etnoueuses et ses feuilles sont linéaires,plates et nervurées. C’est essentiellementdu rhizome rampant, que l’on appelle vul-gairement racine, très riche en sels depotassium et en fructosane (la triticine), quela médecine tire ses bienfaits. L’origine deson nom commun viendrait de l’allusion auxjeunes extrémités des rhizomes quis’apparentent à des canines de chien.L’exemple à suivre ne se limite pas seule-ment à l’imitation des chiens et chats etautres chevaux et cochons, mais égalementaux usages des anciens, puisque déjà, au Ier

siècle après J.-C., le médecin grecDiscoride, approuvé par le naturalisteromain Pline, conseillait l’utilisation duchiendent pour traiter les affections uri-naires et faciliter la dissolution des calculsrénaux.De nos jours, cette plante extraordinaire estessentiellement utilisée comme diurétiqueet comme calmant d’états inflammatoiresde l’appareil urinaire (cystites, calculs, etc.).Mais on lui reconnaît également une actionbienfaisante en tisane dans les maladiesfébriles. Diurétique, antiseptique et anti-inflammatoire, les propriétés du chiendentsont précieuses dans les traitementsd’œdèmes des membres inférieurs, derétention d’eau, de coliques néphrétiques etde goutte, notamment.

>>

Préparation du bain de mains et bain de pieds• Rajouter dans 4 litres d’eau froide le paquet de mélange (200g).• Porter à ébullition, cuire 5 minutes.• Laisser macérer pendant 4 heures puis filtrer.• Cette macération que vous ferez chauffer vous servira pendant 10

jours pour faire vos bains.• Le matin, à jeun, faire un bain de pieds tiède pendant 10 minutes.• Le soir, un bain de mains le plus chaud possible, également pen-

dant 10 minutes.Cure minimale conseillée : 2 fois par an.

Cure dépurative. À faire deux à trois fois par an pendant deuxsemaines• Mettre 3 pincées de chiendent dans un litre d’eau froide.• Porter à ébullition pendant 5 minutes.• Filtrer et boire chaud ou froid au courant de la journée.

A vos cuisines !

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FRANCEMAGAZINE N°22 21 AUTOMNE 2008

« ICE » (pour InCase of

Emergency).C’est le code à

entrer dans sonmobile pourappeler les

secours.

1> POUR LES URGENCES

Les ambulanciers ont remarqué que trèssouvent, lors d’accidents de la route, lesblessés ont un téléphone portable sur eux.Toutefois, lors des interventions, on ne saitjamais qui contacter dans ces listes intermi-nables de contacts.Les ambulanciers ont donc lancé l’idée quechacun d’entre nous rentre dans son réper-toire la personne à contacter en casd’urgence sous le même pseudonyme. Lepseudonyme international connu est « ICE »(= In Case of Emergency).C’est sous ce nom qu’il faut entrer le numé-ro de la personne à contacter, utilisable parles ambulanciers, la police, les pompiers oules premiers secours. Lorsque plusieurspersonnes doivent être contactées, on peututiliser ICE1, ICE2, ICE3, etc. Facile à faire,ne coûte rien et peut apporter beaucoup. Sivous croyez en l’utilité de cette convention,faites passer le message afin que celarentre dans les mœurs.

2> ACCIDENT VASCULAIRE CÉRÉBRAL

Cela peut servir ! Prenez quelques minutespour lire ceci et peut-être sauver une vie etcontribuer à faire connaître le danger quereprésente l’Accident Vasculaire Cérébral.Lors d’un barbecue, Julie trébuche et faitune chute. Elle affirme aux autres invitésqu’elle va bien et qu’elle s’est accrochée lespieds à cause de ses nouveaux souliers. Lesamis l’aident à s’asseoir et lui apportent unenouvelle assiette.Même si elle a l’air un peu secouée, Julieprofite joyeusement du reste de l’après-midi... Plus tard, le mari de Julie téléphoneà tous leurs amis pour dire que sa femme aété transportée à l’hôpital… Julie meurt à18h. Elle avait eu un Accident VasculaireCérébral lors d’un barbecue. Si les per-sonnes présentes avaient été en mesure

d’identifier les signes d’un tel accident, Julieaurait pu être sauvée. Un neurologue dit ques’il peut atteindre une victime d’AVC dans lestrois heures, il peut renverser entièrementles effets de la crise. Il affirme que le plusdifficile est que l’AVC soit identifié, diagnos-tiqué et que le patient soit vu en moins detrois heures par un médecin. Si la vistimed’un malaise a de la difficulté à répondrepositivement aux questions qui lui sontposées (« pouvez-vous sourire, lever lesdeux bras, prononcer une phrase simple »),appelez le 144 (Suisse) ou le 112(Europe)... et décrivez les symptômes aurépartiteur.Selon un cardiologue, si tous ceux qui reçoi-vent cet e-mail l’envoient à leur tour à 10personnes, une vie au moins pourrait êtresauvée par jour.Merci à toutes et à tous.

Poser trois questions très simples à la personne en crise :1. Lui demander de SOURIRE.2. Lui demander de lever LES DEUX BRAS.3. Lui demander de PRONONCER UNE PHRASE TRES SIMPLE(ex. Le soleil est magnifique aujourd’hui).

Reconnaître les symptômes d’un AVC

Bon à savoir

2trucsintelligentsà faire suivre

Pour une fois

PAR JEAN-JACQUESPOUTRIEUX

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FRANCEMAGAZINE N°22 22 AUTOMNE 2008

Entretien avec…

> France Magazine : « Quand on a vécuça, maintenant, on peut mourir ! »Toujours d’actualité ?

Thierry Roland : Ha oui ! Mais le plus tardpossible, si vous le voulez bien. Ça, c’est vraique c’était quelque chose. Sur les Champs-Elysées et toutes les voies environnantes, ily avait, je ne sais pas moi, deux, trois mil-lions de personnes. Communion totale.Impressionnant. Phénoménal !Vous savez, je suis d’une génération avant laguerre. Je compare cet événement, toutesproportions gardées, à des images de laLibération de Paris.J’avais 7 ans, et quand on a cet âge-là, vousmémorisez toutes les images. Les champsétaient noirs de monde, les Américains, en

LA CÉLÈBRE MAISON DE CIGARES GERARD INSTALLÉE DANSL’HÔTEL KEMPISKI AU BORD DU LAC LÉMAN, JUSTE EN FACEDU MAJESTUEUX JET D’EAU, AVAIT CONVIÉ QUELQUES AMISPOUR PARTAGER LE BONHEUR DE S’ENTRETENIR AVEC“MONSIEUR FOOTBALL”, J’AI NOMMÉ THIERRY ROLAND.

ThierryRoland

libérateurs qu’ils étaient, nous offraient duchewing gum, je ne savais pas ce que c’étaitauparavant. Ils nous distribuaient des bon-bons de toutes les couleurs, du chocolat.Les filles avaient droit aux bas nylon.Je vous dis cela, parce que ces images du 12juillet 1998 m’ont remémoré les mêmesflash qu’à la Libération. C’est vous direl’impact. C’était une grand-messe de laFrance unie, universelle.

> FM : A la lecture de votre périple, je mesuis souvenu d’un tout jeune et frin-guant reporter qui officiait à l’ombred’un géant. A l’ombre d’une voix, celledu regretté Georges Briquet.Souvenirs ?

TR : Je pense bien, c’était mon premierpatron. On a souvent des pensées affec-tueuses pour son premier patron. C’est luiqui m’a appris mon métier sur les antennesde la radio qu’est devenue France Interdepuis et sur Europe 1 où j’ai commentépendant 11 ans le Tiercé.

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FRANCEMAGAZINE N°22 23 AUTOMNE 2008

Entretien avec…

J’ai deux vices, c’est pas beaucoup, hein ?Le Dada et le cigare. D’où ma présence iciaujourd’hui chez mes Amis Gérard, danscette belle cité Calvin au bout du lac.Oui, le Père Briquet, c’est comme ça qu’onl’appelait, avait été chagriné de me voirmuté en compagnie de Robert Chappatte dela radio vers la télé. Je n’y étais pour rien,c’était Raymond Marcillac, à l’époque grandpatron de l’unique chaîne de télé, en noir etblanc s’il vous plaît, qui en avait eu l’idée.Il est mort en 1968. J’étais aux jeux olym-piques d’hiver de Grenoble et n’ai pu mal-heureusement assister à son enterrement.j’en ai été très affecté.

> FM : Beaucoup d’entre nous sesouviennent de l’épopée des Verts.Oui ! Mais laquelle ? Les amis de notregénération se rappellent des frèresTylinski, notamment Richard, de RachidMékloufi, de N’Joléa, de BernardBosquier, un vrai défenseur et deBéretta un remarquable ailier quisavait déborder. J’en oublie, Carnus,bien entendu. Desanecdotes ?

TR : Vous faites référence auxannées 60, c’est vrai qu’àl’époque, les Verts tournaient déjàbien avec les frères Tilinsky,Michel et Richard, Claude Abbedans les buts, Rachid Mékloufi etN’joléa.Ha, ce N’joléa, les Forézienness’en souviennent encore. Il tiraitsur tout ce qui bouge. Un vraicavaleur. Il est mort, le pauvre.Non, pour moi, la véritable épopéedes Verts, c’est celle des années70. C’est d’ailleurs la seule équipedes Verts qui soit allée en finale decoupe d’Europe.Curcoviks dans les buts, Janvionet Sinaegel à l’arrière, Fernandez devenudepuis un excellent golfeur, Bathenay,Oswaldo Piazza, argentin légendaire à lacrinière de jais aux allure de tarzan, chauvecomme un genou aujourd’hui. Les frèresRévelli, Domique Rocheteau et Jean-MichelLarqué, confrère et longtemps condisciple.

> FM : Je garde en mémoire une discus-sion que j’avais eue avec Jo Havelangeau Brésil. Entre sa prise de fonction àla tête de la FIFA en 1974 et son départde celle-ci, après la dernière coupe du

monde du 20e siècle en 1998 enFrance ; son budget a été multiplié par1000. N’est-ce pas la nature de toutesles dérives ? N’est-ce pas là l’originede tous les maux du sport de hautniveau en général ?

TR : C’est vrai ce que vous dites, mais à quila faute ? Si un joueur est sous contrat etqu’il est transféré, le grand gagnant, c’estson club. Lui, le joueur, touche le reste...Par contre, si le joueur est libre de toutengagement, alors il reçoit le pactole.Moi, je peux les comprendre, les gosses.Regardez Cristiano Ronaldo, combiencroyez-vous qu’il soit payé ? 300 000 eurospar semaine. Plus de quinze millionsd’euros par an ! Il a 23 ans. Comment vou-lez-vous que devant tant d’argent, certainsgamins ne pètent pas les plombs ?

Quand on voit les sommes engagées parCanal Plus, cela donne le vertige. D’ailleurs,je pense qu’ils seront obligés de négocier uncertain nombre de retransmissions.Autrement ils ne pourront pas tenir.Regardez, déjà M6 a versé 450 000 eurospour se positionner envers les prochainescoupes du monde de 2010 et 2014.Pour ma part, je suis sous contrat jusqu’à lafin de la saison 2009. Après on verra. Voussavez, j’ai fait 11 coupes du monde, alors...

> FM : Le football de la fin des années 50,avec des joueurs mythiques commeJust Fontaine, Robert Jonquet, ArmandPanverne, Glowaki, Jean Vincent, RogerPiantoni, François Remetter ; sansoublier la star de l’époque : RaymondKopa, premier joueur français et long-temps le seul expatrié au non moinsmythique Réal de Madrid aux côtés deGuiseppe Di Stéfano, Férenc Puskas etde Rento. Il y a là une réflexion quis’impose : aujourd’hui, bon nombre denos footballeurs tricoloress’émancipent dans des clubs étrangersde très haute réputation. A quoi peut-on imputer cette différence entre il y a50 ans et aujourd’hui ? Et comment sefait-il qu’avec des joueurs à la renom-mée internationale et reconnus comme >>

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FRANCEMAGAZINE N°22 24 AUTOMNE 2008

tels par les clubs étrangers, nousavons été quasiment inexistants audernier Euro ?

TR : On a été nuls de chez nuls à l’Euro2008. Les années cinquante nous rappellenttous ces grands, pour beaucoup disparusaujourd’hui. Raymond Kopa et JustoFontaine sont toujours solides, RobertJonquet est parmi nous mais très fatigué...C’était le temps du légen-daire stade de Reims et dunon moins mythique Réalde Madrid. Mais vousvoyez, si nous avons gagnéla coupe du monde en1998, c’est grâce à toutesces préparations, à tousnos joueurs qui sont alléss’aguerrir à l’étranger. Ilsont progressé en Espagne,en Italie, en Angleterre.Regardez notre champion-nat national, c’est minable, ça manque derythme. Vous allez en Angleterre pour assis-ter à un match de milieu de tableau, vousavez l’impression d’être en présence d’unmatch de coupe. L’engagement est total, dudébut jusqu’à la dernière seconde. C’esttypiquement britannique.Chaque semaine, les équipes anglaises sontconfrontées à des équipes étrangères, cequi permet aux joueurs autochtones de sefrotter, malgré tout, à la compétition inter-nationale et donc de progresser. En France,vous en avez 4 par an...

> FM : Vous semblez manifesterquelques doutes sur les capacités de lanouvelle direction du Paris Saint-Germain ? La solution ? Des noms ?...

TR : (rires). Arrêtez... C’est pas qu’il estmauvais, il n’y connaît rien. (CharlesVilleneuve). Songez qu’à l’heure où nousparlons, Paris Saint-Germain est le seulclub de 1ère division à n’avoir recruté aucunélément. C’est n’importe quoi !Dans le fond, Lilian Thuran à qui l’on vient dedécouvrir une anomalie cardiaque, dont onespère seulement qu’elle restera au niveaude l’anomalie et que la gravité s’estomperaavec l’arrêt de sa carrière sportive. Cettedécouverte va lui éviter, le pauvre, des’enférer dans une histoire pas possible auterme de sa carrière. Lilian n’a pas besoinde cela. Nous lui souhaitons surtout unebonne santé. Non, ce que je crains, si lesrésultats espérés ne sont pas au rendez-

vous, c’est que les supporters mécontentsaillent chercher Villeneuve chez lui. Et là, çarisque de faire du vilain.

> FM : C’est un Jubilé ! Plus de cinquanteans au service du sport, au service dupartage des émotions avec les audi-teurs en premier, puis avec les télé-spectateurs ensuite. Des joies et despeines. Des déceptions, des frutrations,mais aussi... un immense bonheur.Bonheur et joie de vivre encore parta-gés dans la célèbre émission dePhilippe Bouvard “Les Grosses Têtes”sur RTL où votre présence nous estsignalée par votre rire sybillin. Quelleépopée, Thierry !

TR : Bien sûr, de découvrir les premièresjoies télévisuelles aux côtés de RobertChappatte et de Roger Couderc. Mais aussides déceptions, celle d’avoir été viré en 1968pour des raisons de “non conformités” dumoment. On dira ça comme cela.De nouvelles émotions, toujours en 1968,j’ai fait le Tour de France ave MauriceSéveno, dans la caravane publicitaire. Onvendait un journal. Plus de 120 000 exem-plaires écoulés en 22 étapes. Fallait quandmême le faire.Nous étions derrière l’accordéonisteAimable et une voiture transformée enbanane. Ha ! j’en ai mangé des bananes.Heureusement que j’aimais ça... (rires).Vous dites sybillin pour qualifier mon rire,

moi je dis que j’ai un rire à la con. Ça prouvetout simplement que vous avez une meilleu-re éducation que moi (c’est lui qui le dit).Quand j’étais petit, j’allais au cinéma voirLaurel & Hardy. Je riais tellement fort queles spectateurs assis devant moi, étaientobligés de se lever et s’asseoir dans les ran-gées arrière pour mieux entendre les dia-logues. Je vous dis pas l’ambiance. J’ai tou-jours eu un rire à la con. Des joies et despeines, ça c’est sûr ! C’est la vie...Joie de se retrouver dans les studios deRTL, toute une bande copains. Du fantas-tique comédien Francis Perrin qui sait toutfaire à l’inénarable Kersauzon qui tourne ledos au public (j’veux pas voir ces cons !) etpuis la peine de ne plus les voir revenir...Rien que l’an dernier : l’inimitable Carlos,Jean-Claude Brialy le gentleman, MichelSerrault l’unique, sans oublier l’élégantPhilippe Noiret. Quelle hécatombe !

> FM : Tout à fait Thierry !

Entretien avec…

>> Tous fous defoot : on recon-naît, au côté deThierry, Michel

Drucker,Bernard Pivot et

Jean-MichelLarqué.

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Évasion

Avec ses 112 ans d’âge, le marathon deBoston fait office de vénérable vétéran dela discipline, tous pays confondus. A cela

s’ajoute que le marathon de Boston fait partiedes Big Five avec ceux de New York, Chicago,Londres et Berlin. Par ailleurs, ce marathon estquasiment élitiste puisque des temps minimasont exigés (rassurez-vous ils sont variables enfonction de… l’âge !). Enfin, dernière caracté-ristique, les trois quarts du marathon deBoston se courent à l’extérieur de la ville, dansune campagne où la nature a été étonnammentpréservée, avant d’atteindre le cœur de la villeoù l’expression « Nouvelle Angleterre » prendtout son sens. Voilà autant de bonnes raisons

APRÈS LESMARATHONS DENEW YORK(FRANCEMAGAZINE N° 20)ET DE CHICAGO(FRANCEMAGAZINE N° 21),PATRICK BLASERVIENT DEBOUCLER LETRIPTYQUE DESMARATHONSAMÉRICAINS LESPLUS PRESTIGIEUXAVEC CELUI DEBOSTON QUI S’ESTDÉROULÉ LE 21AVRIL DERNIER.UNE OCCASIONRÊVÉED’APPRÉCIER LEPAYSAGE URBAIND’UNE VILLEAMÉRICAINERESTÉE SIBRITANNIQUE.

BostonLe tour du monde des marathonsLe tour du monde des marathons

d’inscrire impérativement le marathon deBoston à son agenda, puis à son palmarès !

Le Freedom Trail (chemin de la liberté)Comme le marathon de Boston ne traversequ’une partie des quartiers historiques de laville, il est recommandé de parcourir l’autrepartie la veille en guise de parcours« d’échauffement ».Et dans ce cadre, Boston bénéficie d’un iti-néraire « pré-marathon » fait sur mesure. Ils’agit du Freedom Trail, ou chemin de laliberté (qui porte très bien son nom puisqu’ilcomprend plusieurs « témoins » de la luttepour l’indépendance dont Boston est le ber-

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FRANCEMAGAZINE N°22 27 AUTOMNE 2008

ÉvasionBostoniennes !) à l’encontre de leursancêtres, les Anglais. Depuis, ce bâtiment,étonnamment préservé des marteaux-piqueurs, est tout naturellement devenu lemusée de la Révolution américaine.Ensuite, le joggeur tombe sur le Old StateHouse, construit en 1713 (ce qui en fait l’undes bâtiments les plus anciens des Etats-Unis qui a aussi été miraculeusement sau-vegardé de la destruction). On a peine àcroire que ce bâtiment de briques rouges etsurmonté d’une tour blanche, ait été l’undes plus grands de son temps. Mais la gran-deur de ce bâtiment réside surtout dans sonhistoire : c’est en effet de son balcon qu’aété lue publiquement pour la première foisla Déclaration d’Indépendance. Par ailleurs,c’est à quelques mètres de là qu’eut lieu lemassacre de Boston (en fait seules cinq per-sonnes trépassèrent) qui a lancé la rébellioncontre les Anglais.Plus loin (une pause n’y est pas interdite etmême fortement conseillée), les ancienneshalles de Boston ont été, et c’est une réus-site architecturale, radicalement rénovéeset transformées en marchés, boutiques etrestaurants. Le touriste y est roi etl’animation reine. C’est l’un des lieux lesplus fréquentés de Boston.En poursuivant son footing, il ne faut pasmanquer, après avoir traversé le quartierdes restaurants italiens (très recherchéspar les marathoniens) de visiter la Old NorthChurch, d’abord parce que c’est l’une desplus anciennes églises de Boston (1723)avec une architecture très… britannique.Comme on le voit, l’émancipation architec-turale de Boston a mis beaucoup plus detemps à s’affranchir du joug britanniquequ’il n’en a fallu aux Bostoniens pourgagner leur indépendance.En tout état, ce qui frappe dans le paysageurbain de Boston, c’est que des bâtimentshistoriques isolés, hauts d’à peine quelquesétages, côtoient de gigantesques gratte-ciels ultramodernes qui les dominent deplusieurs dizaines d’étages. Le contrasteentre ces deux genres de bâtiments estd’autant plus frappant que plus de deuxsiècles les séparent sans aucune quel-conque transition architecturale.Ensuite, la voie est libre pour prendre legrand large en enjambant la rivière Charlespar le pont de Charlestown et rejoindre surl’autre rive le Bunker Hill Monument (quicommémore l’une des nombreusesbatailles qui menèrent finalement àl’indépendance) d’où l’on a, du haut de

ceau), lequel part du parc central de Boston(le Boston Common) pour rejoindre, del’autre côté de la rivière, Charles le BunkerHill Monument en traversant plusieursquartiers historiques de Boston. Cet itinéraire (sur 4 km) est facile à suivrepuisqu’il est marqué au sol par une lignerouge (peinte ou en brique) continue.Impossible de se perdre (sauf les jours demarché !). Pour éviter d’avoir les yeux rivéssur le trottoir, il suffit de longer, si possibledepuis le trottoir d’en face, la file de tou-ristes processionnaires qui ne voudrait pourrien au monde s’écarter de la ligne rouge !

L’avantage indéniable duFreedom Trail, c’est qu’ilpermet de ne manqueraucun des monuments etbâtiments historiques essen-tiels de Boston. Un véritableécomuseum de l’architectureet de l’histoire de Boston. Le départ est situé au BostonCommon qui est le plusancien parc public des Etats-Unis. C’est l’équivalent duCentral Park de New York(mais en version miniature).Lieu privilégié de pendaisonspubliques vers 1800, ce parcest devenu un centre incon-tournable de délassement etde manifestations culturelles

(patinoire en hiver et concerts en été).

Un chemin de contrastes architecturauxLe long du chemin de la liberté, l’œil estimmanquablement attiré par une premièrevaste construction de briques rouges. Ils’agit de la Old South Meeting House ; en faitun temple construit en 1729. Ce temple ser-vait aussi de lieu de rassemblement poli-tique d’où partit d’ailleurs l’une des pre-mières insurrections des Bostoniens (et >>

Boston

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Trinity Church.

Évasion

>> l’obélisque de granit, une magnifique vuesur Boston, ses gratte-ciels, ses parcs etson port. Au passage il ne faut pas manquerde visiter le magnifique vaisseau USSConstitution, dont l’authenticité est garan-tie, qui a vaillamment résisté en 1812 aucanardage des navires anglais.Le retour peut se faire par le même chemin,ce qui donne l’agréable impression deremonter le temps au gré des bâtimentshistoriques, sans risque de s’y perdre, ligne

rouge oblige !Et demain c’est le marathon !

Un marathon par monts et par vauxLe départ du marathon est donné dans levillage de Hopkinton qui se situe à 26 miles(la distance du marathon) du centre deBoston. Les 25 000 heureux élus s’y rendent, depuisle parc central de Boston, grâce à plusieursdizaines de ces célèbres longs bus jaunesaméricains « school buses » qui sont mis àleur disposition. A eux seuls, ces bus valentdéjà le déplacement. Les chauffeurs de busn’hésitent en outre pas à profiter del’événement pour rivaliser de vitesse surl’autoroute qui mène à Hopkinton.L’ambiance y est garantie. Et là, mais c’estune « tradition » des grands marathons

comme ceux de New York ou de Londres, lesparticipants sont condamnés à « poireau-ter » pendant 2 à 3 heures avant le départ.A l’heure H, tout s’enchaîne rapidement.C’est d’abord l’hymne américain écoutéquasi religieusement (ou en tout cas dans leplus grand des silences) par l’ensemble desparticipants (même non américains)debout, immobiles, la main sur le cœur (entout cas les Américains). Le drapeau améri-cain ne manque évidemment pas à l’appel.Au coup de feu à 10 heures pile, c’est la déli-

vrance et un départen trombe. A sedemander si les par-ticipants sontconscients que cesont 42 km qui lesattendent. A déchar-ge de l’inconscience :le parcours com-mence par unelongue descente.Ceci peut expliquercela. De toute façonon suit le rythme.C’est ensuite unesuccession de forêtsbordant rivières etlacs. Outre la beautésauvage des sites, leparcours est loind’être monotonepuisqu’il est particu-lièrement vallonné(c’est presqueMorat-Fribourg !).C’est aussi une suc-

cession de villages (à l’américaine) où lesmaisons en bois se côtoient dans un festivalde couleurs. Chacune de ces maisons indivi-duelles en bois semble, par son volume, sesfaçades, sa couleur et… son degréd’entretien, devoir représenter, au mêmetitre que la voiture, la carte de visite socialede son propriétaire. Cela donne en tout casun cachet architectural très diversifié àchaque village traversé.Et partout une foule compacte, sortie d’onne sait où, qui ne ménage pas sa ferveur aupassage du marathon avec, en pointsd’orgue, le passage devant le collège defilles Wellesley (km 20) puis celui de Boston(km 34).Le vif du sujet est déjà très largement enta-mé lorsque le marathon aborde la banlieue(manifestement aisée !) de Boston par ses

Park StreetChurch.

Museum of Science.

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FRANCEMAGAZINE N°22 29 AUTOMNE 2008

Évasion

artères principales que sont laCommonwealth Avenue dans le quartier deNewton, puis la Beacon Street à Brookline.Au passage, les marathoniens ne peuventmanquer d’admirer le fameux cinéma ArtDéco situé au Coolidge Corner puis de repé-rer un monumental panneau publicitaire (de18 m sur 18 m !) de la marque CITGO qui estun point de repère visiblede loin et qui marque tantle km 40 que le mile 25 !(chacun y trouve son comp-te ; l’arrivée est proche !).La foule, de plus en pluscompacte, transporte (et lemot n’est pas faible ! onpourrait d’ailleurs presqueparler d’« agoraphine »)littéralement tous lesmarathoniens, quel quesoit leur rythme, sur lesderniers kilomètres jus-qu’à l’arrivée.

Un charme très… britishCet engouement populairene doit toutefois pas empê-cher d’apprécier le charme très british del’une des plus belles avenues de Boston, laCommonwealth Avenue.Cette large avenue se caractérise par laprésence en son centre d’un magnifiquechemin piétonnier qui mène tout droit surenviron 2 km au principal parc public deBoston situé à son extrémité. Cette avenueest bordée d’arbres et de magnolias quasicentenaires qui donnent de l’ombrage àl’alignement de maisons de briques rougesérigées sur trois étages. On se croirait dansune banlieue aisée de Londres. Le calme etla sérénité de cette avenue contrastentd’ailleurs sans aucune transition avec la rueparallèle, la Newbury Street, qui est la ruecommerçante par excellence, animée par denombreux commerces et terrasses de res-taurants. Dans ce quartier, la Nouvelle-Angleterre n’usurpe manifestement pas sonnom.

L’arrivée à l’ombre de la John Hancock TowerEnsuite, et enfin, le marathon débouche surla Boylston Street qui mène tout droit à lacélèbre arrivée du marathon de Boston,haute en couleur, qui se situe à la hauteurdu Copley Square.L’arrivée franchie, sous les acclamations

exubérantes d’un public qui restera chaleu-reux jusqu’au passage du dernier des25 000 marathoniens, un temps nécessaireet salutaire de récupération permetd’admirer les monuments architecturauxles plus caractéristiques de Boston quientourent le Copley Square.Il s’agit d’abord de la tour John Hancock qui

est le plus haut bâti-ment de Boston. Cegratte-ciel vitré de 62étages a étéconstruit en 1975 parl’architecte I. M. Peiet domine de sa sta-ture moderne toutBoston. Retour surterre : c’est le bâti-ment de la BostonPublic Library quiattire le plusl’attention par sesvolumes et façadesimposantes ainsi quepar l’aura qui

l ’ e n t o u r ep u i s q u ’ i ls’agit là de laplus anciennebibliothèquedes Etats-Unis.Enfin, c’est lam a g n i f i q u eTrinity Churchdont lesfaçades engrès et granit,de style

roman, se reflètent magnifiquement sur lesbaies vitrées pleines de modernité de laJohn Hancock Tower dans un contraste sai-sissant de deux époques qui ne s’excluentpas mais se complètent à merveille, l’uneservant de miroir à l’autre.La remise de la médaille et les « congratu-lations » dûment renouvelées mettent fin àla rêverie.La série des grands marathons américains(New York, Chicago, Boston) est ainsi (provi-soirement) terminée.Prochaines étapes : sur le continent euro-péen avec les marathons de Paris, Berlin,Londres et… d’autres.

Hall SamuelAdams.

Coply Square.

Patrick Blaser

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FRANCEMAGAZINE N°22 30 AUTOMNE 2008

Vivre à l’étranger

Sans surprise, la qualité de non-rési-dent français ouvre d’intéressantesperspectives au niveau fiscal.

Toutefois, si certains avantages peuventêtre mis en avant, l’administration veille àéviter l’utilisation abusive de ce statut.

Notion de domiciliationLa domiciliation fiscale d’un contribuablen’est pas toujours aisée à établir. L’article4B du Code général des impôts énoncequ’un contribuable est considéré commeayant son domicile fiscal en France enfonction de trois critères alternatifs :• avoir en France son foyer ou son lieu deséjour principal ;• y exercer une activité professionnelle,salariée ou non, à moins de justifier quecette activité y est exercée à titre accessoi-re ;• y avoir le centre de ses intérêts écono-miques.Un seul de ces critères suffit à déterminerla domiciliation fiscale. Lorsque les cri-tères sont remplis dans deux pays, ilconvient de se reporter à la convention fis-cale, s’il en existe une, qui permet notam-ment d’éviter les risques de double imposi-tion.

L’assurance-vieFiscalité des retraits partiels et totauxEn principe, le non-résident n’est impo-sable en France que sur les revenus desource française (CGI, article 164 A et sui-vants). En matière d’assurance-vie, la taxa-tion se fait par la voie de prélèvementslibératoires (CGI, article 125 A III). C’estl’article 125-0A du CGI qui en fixe le taux.En principe, pour les résidents français quiopteraient pour le prélèvement libératoire,

en cas de rachat moins de huit ans après lepremier versement, le taux est de 35% si ladurée du contrat a été inférieure à quatreans et de 15% au-delà.Pour le non-résident qui révèle son identi-té et son domicile fiscal (4° du III bis del’article 125 A), le taux de ce pélèvementvarie de 35%, lorsque la durée du contrat aété inférieure à deux ans, à 7,5% lorsquecette durée a été égale ou supérieure à huitans pour les contrats souscrits à compterdu 1er janvier 1990 (article 125-0 A du CGI).

Exonération ou plafonnementEn réalité et selon les conventions interna-tionales, il peut y avoir une exonérationtotale du prélèvement libératoire. Tel est lecas si la convention prévoit une impositionpar le seul État de résidence du bénéficiai-re du contrat : il en est ainsi pourl’Allemagne, par exemple.Par ailleurs, la convention peut prévoir unplafonnement de ces prélèvements libéra-toires, en général de l’ordre de 10% à 20%(15% en Belgique). Dans ce cas, le prélève-ment libératoire à retenir est celui qui serévèle le plus avantageux pour le contri-buable : soit celui prévu par la conventions’il est inférieur au taux du prélèvementlibératoire en France, soit, dans le cascontraire, celui prévu en France.Pour cela, le non-résident doit avoir cettequalité au moment de la perception desproduits.

De

à l’de

l’opportunité fiscalel’opportunité fiscales’installers’installer étrangerétranger

LES NON-RÉSI-DENTS FRANÇAISBÉNÉFICIENT DELA LIMITATION DUCHAMPD’APPLICATION DEL’ISF ET D’UNEFISCALITÉ DESCONTRATSD’ASSURANCE-VIEPLUSAVANTAGEUSE. ILSSONT AUSSIEXONÉRÉS DEPLUS-VALUE ENCAS DE CESSIOND’UN IMMEUBLEEN FRANCE.

Le ministère des Affaires étrangères et européennes propose un siteinternet précisant les formalités à remplir par les non-résidents, les

principales modalités d’imposition, ainsi que la liste des pays et territoiresavec lesquels la France a passé une convention fiscale :http://www.mfe.org/.Default.aspx?SID=12100

Sur internet

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FRANCEMAGAZINE N°22 31 AUTOMNE 2008

Vivre à l’étranger

Prélèvements exigiblessur le contratd’assurance-vieConcernant les primesversées avant le 70e anni-versaire de l’assuré, leprélèvement de 20%diminué d’un abattementde 152 500 e, institué parl’article 990 I du CGI,applicable aux sommes,rentes ou valeurs dues autitre des contrats dont lesouscripteur oul’adhérent est une per-sonne physique, n’est pasdû. En effet, il vise lespersonnes physiquesayant leur domicile fiscalen France (au sens del’article 4 B du CGI) aumoment de la date desouscription oud’adhésion au contrat,quels que soient leschangements de domici-liation survenant plustard (D. adm. 7 S-346 n°4,1er octobre 1999).Autrement dit, lorsque lecontrat d’assurance-vieest souscrit par un non-résident français, etmême si, par la suite,l’assuré réside ou décèdeen France, le prélèvementn’est pas dû.Quant aux primes verséesaprès le 70e anniversairede l’assuré, l’article 757 Bdu CGI prévoit qu’ellessont soumises aux droitsde succession pour lafraction supérieure à30 500 e. Toutefois, si laconvention ne prévoit pasque l’imposition estréservée à l’État où a étésouscrit le contrat, il n’yaura pas de droit de suc-cession.

Prélèvements sociauxLes prélèvements sociaux de 11% sontapplicables aux revenus perçus par les

personnes fiscalement domiciliées enFrance. De ce fait, les non-résidents n’ensont pas redevables.

Les plus-values immobilières >>

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FRANCEMAGAZINE N°22 32 AUTOMNE 2008

Lorsqu’un non-résident possède unimmeuble en France, il peut, comme lesrésidents français, bénéficier d’un régimede faveur en cas de cession de cetimmeuble. Ainsi, l’article 150 U, II-2° duCGI (Instruction du 16 février 2006, BOI 8M-1-06) exonère de plus-values immobilièresla cession d’immeubles, de partiesd’immeubles ou de droits relatifs à cesbiens qui constituent l’habitation en Francedes personnes physiques, ressortissantesd’un État membre de l’Union européenne,dans la limité, par contribuable, des deuxpremières cessions.Pour cela, le cédant doit avoir été fiscale-ment domicilié en France de manièrecontinue pendant au moins deux ans à unmoment quelconque avant la cession, et ildoit avoir eu la libre disposition du biendepuis le 1er janvier de l’année précédantcelle de la cession.Pour la seconde cession, l’exonération estapplicable si elle porte sur l’unique pro-priété en France du non-résident et si elleintervient plus de cinq ans après la premiè-re cession exonérée.

L’impôt de solidarité sur la fortuneEn matière d’ISF, le non-résident n’estimposable que sur les biens immeublessitués en France et sur certaines participa-tions mobilières.Néanmoins, sous réserve de résider dansun pays où ce type d’imposition n’existe pas(la Belgique par exemple), le montant dûau titre de l’ISF peut se voir fortementréduit. En effet, les placements financiersne sont pas imposables en France (CGI,article 885 L). Ainsi, les contratsd’assurance-vie ou de capitalisation sous-crits auprès de compagnies françaisesn’entrent pas sans la base imposable àl’ISF.Toutefois, les titres de participation ne peu-vent pas être assimilés à des placementsfinanciers. Selon la doctrine administrative(D. admi. 7 S-346 n° 4, 1er octobre 1999), cesont ceux qui représentent plus de 10% ducapital social et qui ont été souscrits àl’émission, soit conservés pendant un délaide deux ans au moins. Néanmoins, cestitres pourraient, sous réserve de remplircertaines conditions, faire l’objet del’exonération prévue pour les biens profes-sionnels détenus en France.

1Comment déterminer son domicile fiscal ?

L’administration fiscale considère comme domiciliées fiscale-ment en France les personnes qui remplissent l’un de ces troiscritères : avoir en France le foyer et le lieu de leur séjour prin-cipal ; y exercer une activité professionnelle salariées ou non ;avoir en France le centre de ses intérêts économiques. Autantde formules qui nécessitent des précisions pour être bien com-prises. Ainsi, le foyer évoque le lieu où réside (conjoint, enfants)bien que l’un de ses membres travaille régulièrement àl’étranger. Quant au critère de “ séjour principal ”, il est remplilorsque la personne expatriée y séjourne plus de 183 jours paran. Enfin, le “ centre des intérêts économiques ” s’applique aulieu dans lequel le contribuable effectue ses principaux inves-tissements, où il possède le siège de son entreprise ou encore aupays dans lequel il perçoit la majeure partie des revenus.

2À quoi servent les conventions fiscales internationales ?

Afin de déterminer son statut fiscal fiscal, de résident ou non-résident, il faut, avant d’étudier la définition du domicile fiscal,rechercher s’il existe une convention fiscale internationale entrela France et le pays dans lequel la personne travaille ou est ins-tallée de façon plus ou moins régulière. En effet, ces conven-tions fiscales internationales, qui s’appliquent dans plus d’unecentaine de pays, ont une valeur supérieure à celle de la législa-tion interne. Le plus prudent est donc de consulterl’administration fiscale qui vérifie l’existence ou non d’uneconvention puis s’y réfère pour appliquer les critères détermi-nant le domicile fiscal.

3Dans quel cas doit-on s’adresser au centre des impôts des non-résidents ?

Il arrive que la situation fiscale ne relève pas en totalité de laFrance ou du pays d’installation. Ainsi, les expatriés qui conti-nuent à percevoir des revenus de source française sont impo-sables pour ces seuls revenus auprès du centre des impôts desnon-résidents. Il peut notamment s’agir des revenus et plus-values provenant de biens immobiliers situés en France, derémunérations publiques versées par l’État français ou encoredes revenus des valeurs mobilières.

4De quels moyens de contrôle l’administration dispose-t-elle ?

Il n’est pas rare que des contribuables se croient suffisammentmalins pour déjouer le système. Ainsi, des habitants du nord dela France exerçant leur activité professionnelle en Belgiquepeuvent être tentés d’y élire leur domicile fiscal afin, notam-ment, d’échapper au paiement de l’ISF. Mais c’est sans comptersur les pouvoirs d’investigation de l’administration fiscale fran-çaise qui a accès à toutes les données administratives : EDF,France Télécom, inscription dans les écoles ; elle peut ainsilocaliser le véritable lieu de résidence du contribuable.

Votre notaire répond : Le domicile fiscal

Vivre à l’étranger

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Communicationdu Sénateur

André Ferranda.ferrand@sénat.fr)

FRANCEMAGAZINE N°22 33 AUTOMNE 2008

Inconvénients et risques de l’expatriationLe dispositif légal français prévoit cer-taines règles visant à limiter les avantagesdu statut de non-résident. Etl’administration dispose de droits qui luipermettent de vérifier que la situation réel-le du non-résident correspond à la situa-tion qu’il a déclarée.

Les habitations détenues en France sont imposées à l’IRL’article 164 C du CGI prévoit que les per-sonnes qui n’ont pas leur domicile fiscal enFrance, mais qui y disposent d’une ou plu-sieurs habitations, directement ou sous lecouvert d’un tiers, sont assujetties àl’impôt sur le revenu sur une base égale àtrois fois leur valeur locative réelle, àmoins que les revenus de source françaisedes intéressés ne soient supérieurs,auquel cas le montant de ces revenus sertde base à l’impôt.Le tiers visé par le texte peut être un parentou une société civile transparente définie àl’article 1655 ter du CGI. L’article 164 C duCGI s’applique aussi quand le non-résidenta la jouissance de fait de l’habitation sousle couvert d’une société ou d’un organismequelconque (D. adm. 5 B-7112, n°7, 1er août2001). Cependant, ces dispositions nes’appliquent pas :• aux contribuables de nationalité françai-se qui justifient être soumis, dans le paysoù ils ont leur domicile fiscal, à un impôtpersonnel sur l’ensemble de leurs revenusau moins égal aux deux tiers de celui qu’ilsauraient à supporter en France sur lamême base d’imposition ;• l’année du transfert du domicile fiscalhors de France et les deux années sui-vantes, aux contribuables de nationalitéfrançaise qui justifient que ce transfert aété motivé par des impératifs d’ordre pro-fessionnel et que leur domicile fiscal étaitsitué en France de manière continue pen-dant les quatre années précédentes.

Les contrôles de l’administrationL’administration française dispose demoyens efficaces pour vérifier la réalité dela résidence ;• l’assistance fiscale internationale lui per-met d’interroger les administrations étran-gères afin de collecter des informationsrelatives à la domiciliation ;• le droit de communication (articles L 81

et suivants et R 81-1 et suivants du Livre dela procédure fiscale) lui permet derecueillir des documents ; ce droit de com-munication peut être exercé auprès desbanques ou d’autres administrations(Caisse d’assurance-maladie…), mais éga-lement auprès de fournisseurs (EDF, GDF)ou de clients, de manière à vérifier lesinformations fournies par le contribuable.Aussi, afin déviter que l’administrationremette en cause le domicile fiscal du non-résident, certaines précautions doiventêtre prises ;À titre d’exemples, il convient de vérifier :• la nature des comptes bancaires ouvertsauprès d’établissements français : ladétention de livret de développementdurable (ex-codevi) ou de PEA, parexemple, est réservée aux résidents fran-çais ;• les abonnements EDF, GDF ou télépho-niques : résiliation des abonnements,consommation…• l’adresse postale : nom, procuration…• la durée des séjours en France.

La réalité de l’expatriationLa législation s’avère plutôt généreuse àl’égard des Français qui élisent domiciledans un pays étranger. Reste que pourbénéficier de ces avantages, il est impéra-tif de s’installer réellement hors des fron-tières hexagonales.

PASCAL BARDOUXCRIDON (CENTRE DE RECHERCHE, D’INFORMATION

ET DE DOCUMENTATION NOTARIALES) DE LYON

Vivre à l’étranger

• Dans un arrêt du 25 mars 1997 (n°95-1501) rendu par la Couradministrative d’appel de Paris, l’administration avait fait valoirque le contribuable était domicilié en France et non en Italiedans la mesure où il occupait de façon permanente une résiden-ce en région parisienne comme le démontrait, notamment, l’étatdes relevés EDF/GDF.• Dans un arrêt du 21 novembre 1995 (n°94-683) rendu par lamême juridiction, l’administration a démontré que compte tenudes dépenses d’électricité et de téléphone, ainsi que desdépenses régulières et importantes par chèque et par cartes decrédit en France, le contribuable devait être considéré commeayant son domicile fiscal en France.

Deux exemples de redressement

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FRANCEMAGAZINE N°22 34 AUTOMNE 2008

Expatria Cum Patria

UN EXPATRIÉ EST UN FRANÇAIS ÉTABLI À L’ÉTRANGER POUR UNE DURÉE MINIMUM DE 12 MOIS.

Les jeunes expatriés françaisLes jeunes expatriés françaisdes dix dernières annéesdes dix dernières années

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FRANCEMAGAZINE N°22 35 AUTOMNE 2008

Expatria Cum Patria

3sources d’informations sont utilisées danscette enquête :

• le registre mondial des Français établishors de France composé de plus de 2 mil-lions de personnes ;• l’enquête du ministère des Affaires étran-gères et européennes ;• les interviews d’expatriés de 24 à 35 ansen Suisse, Belgique et Canada.

L’expatriation en chiffresSelon le registre français au 31.12.2007, il yaurait plus de 2 millions de Français expa-triés. 39% en Amérique du nord, 20% enAfrique et 19% en Asie. Ce sont des rési-dents de longue durée dont 54% sont des

la première destination choisie à 16% contre25% pour l’Amérique du nord. L’éloignementne semble plus un obstacle mais les paysanglo-saxons conservent leur forced’attraction.

Le profil type de l’expatriéIl est à noter une forte progression desséjours des scientifiques avec 4%. Les étu-diants représenteraient 20% des expatria-tions (NB : en France, les étudiants repré-sentent 8% de la population active).Fait nouveau : 20% des femmes désirents’intégrer à long terme, contre 15% deshommes. 18% veulent fonder une familledans le pays d’expatriation contre 7% deshommes. Les femmes sont plus nom-breuses à s’expatrier que les hommes.A partir de 30 ans, la proportion de séjourrépondant à une demande d’entreprisedouble (raison exposée à 31%). Enfin, pourles 24-35 ans, les deux plus fortes motiva-tions sont une réelle envie de s’installer àl’étranger et/ou le suivi du compagnon.

Les facteurs clefs de réussite80% d’entre eux sont salariés et 1/2 estemployée par une entreprise dont 26%dans une filiale d’une société française. Enpremier lieu sont cités le fait quel’employeur organise ou soutiennel’expatriation, puis le fait que le logement etles conditions de vie soient adéquats, etenfin les questions de facilité en termeadministratif et fiscal apparaissent commeun attrait. Il est à noter que 1/2 personneeffectue un voyage préparatoire pour nouerdes contacts sur place.Les durées de résidence sont à 39.4% de 3 à9 ans. Chez les 24-35 ans, seuls 17.4% envi-

femmes et 6/10 sont des jeunesentre 25 et 34 ans. A 86%, ils tra-vaillent notamment dans le sec-teur tertiaire avec des rémunéra-tions de 30.000 à 60.000 euros netpar an avec des niveaux d’étudesvariant de Bac à Bac+2. 44% sontbinationaux.

L’expatriation en terme socio-culturelLes expatriés ont un but avanttout professionnel mais aussid’enrichissement culturel. 15% d’entre euxsont binationaux notamment canadien(17%) ou suisse (6%), ou américain (14%). Latendance à l’expatriation de cette populationactive française jeune a augmenté de 4%par an depuis 10 ans. Beaucoup de couplesmariés sans enfants s’expatrient (66%) et3/4 maîtrisent la langue du paysd’expatriation (souvent francophone). Pourles expatriés sondés dans l’enquête duministère, leurs motivations sont liées à60% à l’enrichissement culturel, 45% àl’expérience professionnelle et 22% àl’augmentation de leurs revenus.Actuellement, depuis 2 ans, la Chine serait

• Depuis 1980 Michel vit à Bâle en Suisse : « Il serait très difficilepour moi de revenir en France après tant d’années en Suisse ou jesuis très bien intégré et ou j’ai été naturalisé. »

• Depuis 2000, Sylvie vit au Canada à Crabtree, où elle a été peuaisée et connu des difficultés. « Partout où je suis allée, j’ai recher-ché les mêmes conditions et paysages que ceux de la France, lesgens aussi. NON, l’herbe n’est pas plus verte ailleurs, mais juste dif-férente et parfois pire. Comme Ulysse, qui fit un beau voyage, jevais retourner en France. »

• Depuis 1997, Eric vit en Belgique : « J’ai quitté la France pourdes raisons fiscales à cause de la pesanteur administrative et pourtrouver une opportunité de travail avec peu de diplôme. »

Interview d’expatriés de 24-35 ans

Coralie Masle-Callu

Diagramme des pays de résidence des expatriés actuels

NB : la Chine arrive en 18e position.

Diagramme de l’évolutionde l’expatriation par âge etpar sexe. 70% d’entre eux

ont moins de 40 ans.

[email protected]

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FRANCEMAGAZINE N°22 36 AUTOMNE 2008

Entretien

> France Magazine : Monsieur lePrésident, en fin observateur politiqueque vous êtes, vous avez vécu la pro-mulgation la Ve République. Quelquesannées plus tard, en tant que jeune élu,vous avez pu juger de la qualité de nosinstitutions. Cette année, en 2008, il estde bon ton de commémorer, sous tousles angles, l'année 1968. En France,depuis 40 ans, chaque mois de mai seveut particulier... Curieusement, il estpassé sous silence un autre anniversai-re qui revêt actuellement toute sonimportance : les Cinquante ans de la Ve

République. Mais aussi et surtout, leCinquantième anniversaire du Sénat.Curieusement, 1968 et 1958 ; ces deuxdates ont bien un rapport entre elles :celle de 1958 souligne l'accession à laPrésidence du Sénat de laCommunauté, Monsieur GastonMonnerville, ancien Président duConseil de la République depuis le 18mars 1947 et son renoncement à sereprésenter à la Présidence du Sénat le2 octobre 1968. Pouvez-vous nous tra-duire, Monsieur le Président, la diffé-rence entre le Sénat de la Communautéde 1958 et le Sénat d'aujourd'hui ?

Christian Poncelet : La principale différenceréside bien sûr dans la vocation et la raisond'être du Sénat de la Communauté de 1958et le Sénat de la République française de2008. Le Sénat de la Communauté, dontl'existence fut très brève, rassemblait desreprésentants des pays, relativement auto-nomes mais fortement liés à la France, tan-dis que le Sénat de 2008 représente les col-lectivités territoriales de métropole etd'outre-mer ainsi que les Français del'Etranger.

550ansansLesLes de lade la RépubliqueRépubliquee

CHRISTIAN PONCELETPRÉSIDENT DU SÉNAT

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FRANCEMAGAZINE N°22 37 AUTOMNE 2008

Entretien

> Gaston Monnerville, né le 2 jan-vier 1897 à Cayenne en Guyanefrançaise, brillant avocat, dépu-té de la Guyane de 1932 à 1946,sous-secrétaire d'Etat auxColonies 1937-1938 ; est élu enmars 1947 et réélu en janvier1948, à la Présidence duConseil de la République. LaConstitution d'octobre 1958ayant remplacé le Conseil de laRépublique par le Sénat, GastonMonnerville est élu Présidentdu Sénat. Réélu constamment àchaque renouvellement, il auraprésidé la Haute Assembléependant vingt-deux ans en tantque deuxième personnage del'Etat. Mais en septembre 1962,il est au premier rang de ceuxqui s'opposent au Référenduminstituant l'élection duPrésident de la République ausuffrage universel. Cette annéelà voit votre entrée àl'Assemblée Nationale commejeune député. Quels étaient lesgriefs que Gaston Monnervillereprochait à ce Référendum ?

Le projet du Général de Gaulled'inscrire dans la Constitution leprincipe de l'élection du présidentde la République au suffrage univer-sel direct a été très mal accueilli parune grande partie des parlemen-taires de l'époque, et au premierrang d'entre eux GastonMonnerville. Alors que le projet duGénéral de Gaulle déplaçait consi-dérablement le centre du pouvoirsous la Ve République, au profit duprésident de la République, GastonMonnerville, lui, défendait ardem-ment les pouvoirs du Parlement et,en premier lieu, ceux du Sénat qu'ilprésidait. C'est pour cette raisonqu'il s'est élevé avec énergie etconviction contre ce référendum.

> Le 2 octobre 1968 saluel'arrivée à la Présidence duSénat d'Alain Poher. C'est luiqui nommera le 22 février 1974Gaston Monnerville, membre duConseil Constitutionnel, unhomme que vous connaissez

bien pour l'avoir cotoyé dans lemonde syndical avant de leretrouver dans l'univers parle-mentaire. Après l'échec duréférendum de 1969 sur larégionalisation et la participa-tion, le Général de Gaulle quittele pouvoir. Monsieur AlainPoher devient pour la premièrefois Président de la VeRépublique... par intérim. Il estégalement candidat à laMagistrature suprême contreGeorges Pompidou. Ironie del'histoire, Georges Pompidou,devenu Président de laRépublique, décède prématuré-ment le 2 avril 1974. Pour laseconde fois, Monsieur AlainPoher, devient Président de laRépublique... par intérim. Cettefois, il ne sera pas candidat etce sera Monsieur ValéryGiscard d'Estaing qui deviendraPrésident de la République.Vous entrez au Sénat en 1977.Qu'est-ce qui fait que la Franced'alors change ?

Nous sommes à cette époque dansla France d'après mai 68, dont nouscélébrons les quarante ans cetteannée, et la France ressent lebesoin de changer en profondeur.D'ailleurs , des réformes de sociétéimportantes ont été adoptéesdurant cette période, comme lamajorité civile à 18 ans, la loi Veilsur l'avortement...

> Monsieur Alain Poher présideraaux destinées du Sénat pendant24 années, jusqu'en 1992. C’estla date où, en octobre de lamême année, René Monoryaccède au petit palais duLuxembourg pour 6 années, fai-sant la transition entre les 14années de François Mitterrand àl'Elysée et l'arrivée de JacquesChirac au 55 rue du FaubourgSaint-Honoré. Quels sont lesaménagements marquants de laConstitution qui sont à mettreau compte de l'ancien ministrede l'Economie et des Financesde Raymond Barre ? >>

Président du Sénat de 1992 à 1998,René Monory a su mettre le Sénatsur le chemin de la modernité. Eneffet, il a modernisé l'institutionsénatoriale, en y développant lesnouvelles technologies, notammentpar la création, dès 1995, d'un siteInternet, et en ouvrant la Haute

Assembléesur lesrelationsinterna-tionales.Au coursdu mandatdu prési-dent Monory,la Constitutiona été révisée troisfois dont une concer-ne directement le fonctionnementdu Parlement avec la mise en placede la session parlementaire uniquemais aussi la création de séancesréservées à un ordre du jour fixé parchaque assemblée.

> Le 1er octobre 1998, vous deve-nez le 4e Président du Sénat dela Ve République. Depuis votreaccession à la deuxième chargede l'Etat, chacun s'accorde àreconnaître que vous avezénormément modernisé le

Gaston Monnerville.

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FRANCEMAGAZINE N°22 38 AUTOMNE 2008

Palais du Luxembourg. Après lequinquennat du mandat prési-dentiel, vous avez tenu à abais-ser la durée du mandat électifdes sénateurs de 9 à 6 ans.Modernisation, aménagement,ouverture, etc. Quels sont lesfaits significatifs que vousaimeriez que l'on portât à votrecrédit ?

Depuis mon élection à la Présidencedu Sénat, j'ai toujours agi pour quele Sénat soit l'avocat et le promoteurdes collectivités territoriales.Depuis 1998, la Constitution a étérévisée à douze reprises - c'est sansdoute trop - mais le Sénat a su jouerpleinement son rôle notammentlors du vote de la loi constitutionnel-le relative à l'organisation décentra-lisée de la République, qui concerneen premier lieu les territoires fran-çais. J'ai voulu aussi que le Sénats'auto réforme, ce qui est assez rarede nos jours. C'est chose faitedepuis 2003. J'ai souhaité aussi placer monaction sous le signe de l'ouverturedu Sénat vers le monde extérieur.J'ai ainsi lancé, avec le soutien demes collègues sénatrices et séna-teurs, de multiples initiatives vers lemonde économique. J’ai égalementsouhaité que les parlementaires serendent autant que possible sur leterrain, pour mieux legiférer, ainsique l'illustrent par exemple lesstages d'immersion des sénateursen entreprise, dans le monde judi-ciaire et au sein des forces armées...

> Ces trentes dernières annéesont vu se réunir assez fréquem-ment le Congrès à Versaillesdans le but d'aménager laConstitution de la Ve

République. Depuis quelquetemps déjà, d'aucuns réclamentà corps et à cri une VIeRépublique. Votre avis,Monsieur le Président ?

La Ve République se porte très bien,pourquoi vouloir changer de numé-ro ! Alors que nous fêtons cetteannée les cinquante ans de la Ve

Constitution, le système institution-nel français n'a jamais été aussistable. Depuis 1958, notreConstitution a fait l'objet de plus devingt révisions, ce qui est aussi lapreuve que le législateur a su enpermanence l'adapter à son temps.

> 1968, c'est aussi la célèbrationde la mort du pasteur MartinLuther King. 2008. Un autrehomme de couleur, BarakObama, peut-il, selon vous,accéder à la Présidence desEtats Unis d'Amérique ?

Dès lors que le Sénateur de l'Illinoisest désigné par le parti démocratepour le représenter dans la cam-

pagne présidentielle, BarackObama a autant de chances que sonadversaire républicain d'accéder àla fonction suprême américaine. Jesuis convaincu que les Américainsvoteront pour le programme qu'ilsjugeront le plus prometteur.

> En France, nous venons derendre un vibrant hommage àl'homme de lettres, mais aussi

à l'homme politique qu'étaitAimé Césaire. Avant lui, il yavait eu Léopold SédarSenghor, Gaston Monnerville.On se souvient en 1958, lors dela cérémonie des Sceaux de laVe République, de FélixHouphouët Boigny. Il y a bien eupendant la Coupe du monde defootball de 1998 un célèbre“ Black, Blanc, Beur ”. Qu'enreste t-il ?

Je suis convaincu que le formidableélan d'unité nationale, qui s'étaitmanifesté en 1998, existe toujourset qu'il a même pris en dix ans plusd'ampleur. Quelle fierté pour unhomme politique de voir tous ces

jeunes Français, quelle que soit leurorigine, défendre avec énergie lescouleurs de notre pays !C'est à nous, femmes et hommespolitiques, de contribuer à faire ensorte que ce mouvement perdure enleur donnant les moyens de réaliserleur projet. Le Sénat, soyez-en sûrs,y participe pleinement, tant par sonactivité législative et de contrôle,que par les nombreux événementsqu'il organise et sa constante ouver-ture sur la société.

Entretien

>>

Charles de Gaulle.

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FRANCEMAGAZINE N°22 39 AUTOMNE 2008

Hommage

Il avait cette capacité à développer un raison-nement de manière simple, de placer sesobservations dans le long terme, en dehors

de toute gestion de l’instant. En accord ou endésaccord, c’était toujours enrichi que l’on res-sortait d’un entretien avec lui.Citoyen européen, il a toujours été là, enPologne, entre la Pologne et le reste del’Europe et particulièrement de la France,lorsqu’il fallait construire des ponts entrescelles et ceux qui ne parvenaient pas à secomprendre. Il parvenait à nous faire parta-ger notre histoire et nos valeurs. A en faireun moteur pour l’avenir.Visionnaire avant tout. Début 1990, je l’ai vutémoigner devant des proches deGorbatchev déboussolés de sa conviction dela réussite des réformes économiquesentreprises par Balcerowicz, mais aussi del’indépendance inéluctable des pays baltes.En 1993, il témoignait de l’inévitable adhé-sion à l’Union européenne des nouvellesdémocraties, mais aussi des problèmes quecela poserait pour la suite et raison de nosdifférences de perception qu’il convenait decombler au plus vite. Ou de la place del’Ukraine en Europe.Depuis plusieurs années il constatait lamanque de préparation des Européens, à cequ’il appelait un « moment constitution-nel », ce qui le conduisait à vouloir aborderla construction européenne avec un grandpragmatisme. Avec François Gault, nousl’avions interviewé en 2003. Ses réponsesgardent, aujourd’hui, une totale actualité.Il conjuguait une vision du monde, la défen-se de la démocratie, de la liberté dans lasolidarité avec un solide réalisme, qui nousmanquera en Europe.

Il a toujours été une personnalité à partdans les relations franco-polonaises.Lorsqu’en 1994, je me suis présenté pour lapremière fois au CSFE, j’avais souhaité m’enentretenir avec lui et lui demander son sou-tien. Il m’avait aidé dans mes premiers paset la première réunion publique de la cam-pagne, auquel il n’avait pas pu participer,mais avait demandé à Hanna Suchocka,d’être présente.Je sais à quel point il constitue une référen-ce, un exemple, un point fixe pour nombred’entre nous, Français, ayant une relationparticulière avec la Pologne. Aujourd’hui,nous sommes nombreux à être tristes. Dansles jours et les années qui viennent nousmesurerons son absence.

JEAN-YVES LECONTECONSEILLER ÉLU DE L’AFE POUR LA POLOGNE

[email protected]

JE N’AI JAMAIS IMAGINÉ LA POLOGNE SANS LUI.DEPUIS 1989, DATE À LAQUELLE J’AI FAIT SACONNAISSANCE DEPUIS MON PREMIER VOYAGE ENPOLOGNE JUSQU’À AUJOURD’HUI, IL A TOUJOURSCONSTITUÉ UNE RÉFÉRENCE ET UNE MÉTHODE.

Bronislaw GeremekBronislaw Gérémekest mortest mort

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FRANCEMAGAZINE N°22 40 AUTOMNE 2008

Entretien avec…

> France Magazine : Selon vous,Monsieur Lamassoure, « LeRéférendum est l’arme la plus priséepar les dictateurs ». Remarquez,cela équivaut au « VerrouRéférendaire » de Jean Pierre Jouyet.Mais tout cela, n’est-ce pas un peuréducteur ? N’est-ce pas un tant soipeu méprisant ? N’est-ce pas juger lepeuple “forcément” ignare ? Le sagese demande à lui-même la cause deses fautes ; l’insensé la demande auxautres.

Alain Lamassoure : La faute, ici, estd’avoir recouru au référendum. Il n’estpas fait pour ça. Pour ne prendre quel’exemple irlandais, 40% des électeurs quiont voté “non” ont expliqué leur décisionpar le fait qu’ils ne comprenaient pas letexte, et 80% d’entre eux ont déclaré aprèscoup qu’ils souhaitaient que leur pays resteau cœur de l’Union européenne.

> FM : Au NON de l’Irlande, se serait pro-bablement ajouté celui d’autresnations, si elles avaient été consultées

sous les mêmes auspices, qu’ilss’agisse de la France, la Hollande, laPologne et nous dit-on, même le peupleallemand se serait laissé aller à cettedérive négative. Et pourtant, d’aucunsvous diront toute leur satisfaction den’avoir qu’une monnaie. De ne possé-der qu’un passeport reconnu par 27pays. De ne plus souffrir de tracasse-ries douanières. Alors, Comment expli-quez-vous ce rejet des peuples ?Pourquoi cette incompréhension ?

AL : Complétons la question par une autre :pourquoi donc aucune des réformes faitesces dernières années dans les grands pays

européens n’a-t-elle été soumi-se à référendum ? Ni auRoyaume-Uni (sauf pourl’autonomie de l’Ecosse, sujetqui, en effet, se prête à référen-dum), ni en Allemagne, ni enEspagne. Ni en France, qui n’yaura pas même recours pour laréforme de la Constitution laplus ambitieuse dans l’histoirede la Ve République ! Encore une

AlainLamassoureAlainLamassoure

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FRANCEMAGAZINE N°22 41 AUTOMNE 2008

fois, la procédure n’est pas la bonne. Quandles Français ont refusé en 1969 le projet dedécentralisation que de Gaulle avait soumisau référendum, personne n’a dit que lesFrançais étaient désenchantés de la France,ni même qu’ils refusaient la décentralisa-tion : ils ont saisi l’occasion pour dire« non » à de Gaulle.

> FM : En fait, le “Despotisme doux etéclairé” tant prôné en son temps parJacques Delors n’est plus de mise. L’a-t-il été d’ailleurs ? Le “NO” Irlandaisque l’on voudrait nous faire passercomme une banale péripétie, fût-ellepassagère , est beaucoup plus grave,plus conséquente et bienplus profonde. La véritésouffre de ne pas êtreregardée en face. Lespeuples souhaitentl’Europe. Leur Europe etnon point celle que l’onveut leur imposer.

AL : Les peuples souhaitent“leur” Europe : mais laquelle ? Celle des“nonistes” français qui voulaient plusd’harmonisation fiscale, plus de défenseeuropéenne et la garantie du droit àl’avortement, ou celle des opposants irlan-dais au traité de Lisbonne, qui voulaientexactement le contraire ? Et pourquoioublier les Espagnols, qui avaientapprouvé à 75% le traité constitution-nel ?L’Europe qu’“on” veut leur imposer.Mais qui est “on” ? Le traité constitu-tionnel a été élaboré par une assem-blée (la Convention européenne, que prési-dait Giscard) où étaient représentés tous lespartis politiques de tous les pays européens,qui ont adopté le texte final à l’unanimité, àl’exception des seuls conservateurs britan-niques. Le traité de Lisbonne a été négociéet signé par tous les gouvernements, et ilest appuyé par tous les partis d’opposition(sauf, là encore, par les mêmes conserva-teurs). Et il a précisément pour principalobjet de donner le pouvoir aux citoyens :désormais, l’Europe sera gouvernée, nonplus par les dirigeants nationaux dissimulésderrière le bouc émissaire si commode de“Bruxelles”, mais par les élus des citoyenseuropéens. Le Parlement de Strasbourgexercera la plénitude du pouvoir législatif etle Président de la Commission sera élu par

lui - c’est-à-dire, par son intermédiaire, parles citoyens eux-mêmes, comme le sont lesPremiers Ministres des pays parlemen-taires. Croyez-moi : ce jour-là, plus person-ne ne parlera de déficit démocratique enEurope. Et plus personne ne dira « c’est lafaute à l’Europe ». On dira : « c’est la faute àM. Untel ». Et si on n’est pas d’accord aveclui, on le changera aux élections suivantes.

> FM : Vous êtes aussi un élu, issu d’unebien belle région de France, le paysbasque. Que répondez-vous aux pay-sans qui ont privés de produire la nour-riture pour la population par un diktatde Bruxelles ? Lorsque vous prenezvotre véhicule et que vous traverseznotre pays de bas en haut ou de long enlarge, de voir des milliers d’hectaresen jachère, de constater ces étenduesincultes à perte de vue ; c’est d’unetristesse à en pleurer quand on saitqu’un milliard d’êtres humains souf-frent de malnutrition. Montesquieuaimait les paysans. « ls ne sont pasassez savants pour raisonner de tra-vers », disait-il. Un peu de bon senspaysan, voilà ce qui semble singulière-ment faire défaut à Bruxelles.

AL : Mais ce n’est pas “Bruxelles” qui inven-te une politique qui s’imposerait à nos pay-sans ! Toutes les réformes de la politiqueagricole commune ont été approuvées parles gouvernements français, quand ils neles ont pas suscitées ! Et, après coup, toutes

ont été acceptées par lesorganisations agricoles,qui en ont reconnu lebien-fondé. La jachère,comme les quotas laitiers,étaient bien utiles pendantles longues années desurplus agricoles perma-nents. Maintenant que laconjoncture est différente,

il est normal de les supprimer. Tout ensachant que ce ne sont pas les Européensqui nourriront l’Afrique, pas plus que, dansle passé, ce sont eux qui ont mis fin à lafamine en Inde : c’est à chaque territoired’assurer, directement ou indirectement,son autonomie alimentaire. C’est ça le bonsens paysan. Et c’est bien comme cela quel’entendent d’ailleurs, désormais, les diri-geants africains.

Entretien avec…

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FRANCEMAGAZINE N°22 42 AUTOMNE 2008

> FM : Après tant de tentatives infruc-tueuses, que rétorquez-vous à ceux quivous implorent de tout remettre à plat.De définir clairement les frontières del’Europe et pour longtemps ?

AL : Tout remettre à plat, ou tout défaire ?J’attends toujours le “plan B” de M. Fabius,ou une contre-proposition de ces euroscep-tiques qui se disent plus Européens que lesautres mais ne sont pas capables de semettre d’accord entre eux pour présenter unautre projet européen. Par définition, un telprojet ne se fait pas tout seul. Le traité deLisbonne donnant le pouvoir aux citoyens, siune majorité de ceux-ci souhaitent repartirsur de nouvelles bases et soutiennent uncontre-projet, ils pourront le mettre enœuvre immédiatement.Ils pourront aussi décider des frontièresultimes de l’Europe. Aux élections euro-péennes, le PPE devrait faire campagnepour limiter l’Union aux frontières du conti-nent européen, à l’exclusion de la Turquie,comme de la Russie. C’est aux citoyenseuropéens eux-mêmes de décider des fron-tières de la famille.

> FM : Nous nous dirigeons vers un barilde pétrole à 200 $ us. Les matièrespremières et les denrées alimentairesretiennent toute l’attention des spécu-lateurs au grand dam des consomma-teurs. Si cela continue, il est à craindreque nous voyons s’appliquer l’article 35de la déclaration des droits de l’hommeet du citoyen et préambule de la consti-tution du 24 juin 1793 : « Quand le gou-vernement viole les droits du peuple,l’insurrection est, pour le peuple etpour chaque portion du peuple, le plussacré des droits et le plus indispen-sable des devoirs ».

AL : L’insurrection contre qui ? Contre lepétrole cher ? Contre les Chinois qui en achè-tent trop, les Américains qui le gaspillent, lesproducteurs qui n’augmentent pas la produc-tion assez vite ? On évoquait le bon sens pay-san tout à l’heure : quand le prix d’achat d’unproduit augmente, le plus raisonnable est deréduire sa consommation, de trouver desproduits de substitution, et d’augmenter sonpropre pouvoir d’achat en diversifiant sapropre production. Et si les consommateurss’entendent, de s’unir pour négocier en blocavec les producteurs. C’est cela, la valeur

ajoutée que l’on attend de l’Europe. C’estl’union qui fait la force, pas la rouspétance.

> FM : « Plutôt que de savoir ce qui a étéfait, combien il vaut mieux chercher cequ’il faut faire »1. Cela va prendre dutemps, mais il est urgent de toutremettre à plat et d’écouter les

peuples. « Bien des erreurssont nées d’une vérité dont onabuse »2.

AL : A quoi servent nos élec-tions démocratiques, sinon àécouter les peuples ? A quoiservent ces sondages quoti-diens ? Le problème des diri-geants de nos pays n’est pasqu’ils n’écoutent pas, mais qu’ily a trop à entendre et que ce

qu’expriment les uns et les autres est unecacophonie de contradictions. C’est le rôledes hommes d’Etat, et leur grandeur, deguider les peuples dans les moments dedoute. A-t-on jamais conseillé à de Gaulle, àChurchill, à Helmut Kohl, et à combiend’autres, d’écouter leurs peuples avantd’agir ? Quand Robert Schuman a lancé son

appel historique, une immensemajorité de Français etd’Allemands étaient plus dispo-sés à la vengeance qu’à la récon-ciliation. Heureusement qu’onn’a pas fait de référendum alors...

1 - Sénèque

Entretien avec…

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Information

Lors de sa venue à Genève le vendredi 13 juin 2008, Monsieur Xavier Bertrand, Ministre du Travail, desRelations Sociales, de la Famille & de la Solidarité, a désiré s’entretenir à la Résidence de France à l’ONUavec les membres de l’UMP en Suisse et de sa délégation, ainsi qu’avec les Conseillers élus à l’Assemblée

des Français de l’Etranger, et également les conseillers nationaux du mouvement. C’est sous l’égide deson vice-président Nicolas de Ziegler que Géraldine Dunoyer, Mélanie Filippelli, Norbert Danville et

Thierry Mossé se sont fait l’écho du dialogue courtois et libre qui s’est déroulé avec le ministre, secrétairegénéral adjoint de l’UMP. Les deux Conseillers élus de l’A.F.E., Serge Cyril Vinet et Pierre Oliviéro, ont misen exergue les différences notoires entre la Suisse et la France, notamment dans l’approche du code de la

législation du travail et de son application.

Les quatre Conseillersélus à l’A.F.E . fonda-

teurs de “l’AssociationLycée Français Maurice

Druon - Genève” se sontréunis pour entériner latransformation de cette

association enFondation reconnue debien d’utilité publique

du même nom. Degauche à droite : Pierre

Oliviéro, Serge CyrilVinet, Jean-Pierre

Capelli et Marceau Kaub.

Photo Francisco Bonifacio

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FRANCEMAGAZINE N°22 44 AUTOMNE 2008

Une rencontre, une rue, un détour, unesimple modification dans notre emploidu temps peut bouleverser le cours de

notre vie. Ces changements inattendus peuventmodifier collatéralement la vie des autres. Etparfois même les sauver.Robert Badinter déclare dans chacune deses interviews que son plus grand combat,celui qui a modifié à jamais le visage de lajustice française, est né “par hasard”. Il vou-lait enseigner le droit. Transmettre sonsavoir était son plus grand rêve, sa vocation.Il se retrouvera au front, à affronter physi-quement, de tout son être, comme on le litdans son livre “L’Exécution”, la peine demort en France.

Puisqu’aucun événement n’est un commen-cement absolu, quel rôle le destin, le hasardet le déterminisme ont joué dans le combatet la vie de Robert Badinter ?A 80 ans, le regard vif, tranchant et amusé,cet homme a conservé la fraîcheur et larage d’un jeune homme de 18 ans. Avec sonbesoin constant d’exploser les frontièresjuridiques de la Ve République, on ressent sacrainte de voir se refermer les ouverturesdouloureusement acquises de son pays.Robert Badinter a 15 ans quand son père sefait arrêter à Lyon en 1943 par la Gestapo.Un âge où l’empreinte paternelle se posesur le fils pour définir l’homme à venir.Malgré cette tragédie, le jeune homme

Samira Aguerguan

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l.com

AZ-ZAHR. JUSQU’AUXIIe SIÈCLE, CE TERMEFAMILIER DÉSIGNAITCOMMUNÉMENT ENARABE OCCIDENTALUN JEU DE DÉ. AU FILDU TEMPS ET DESCROISEMENTSCULTURELS, LE MOTS’EST TRANSFORMÉPOUR DÉSIGNERHABILEMENT CE QUIÉCHAPPE AUPRINCIPE DESCAUSALITÉS : LE HASARD.

Intime conviction

fait bien les chosesfait bien les choseshasardLeLe

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FRANCEMAGAZINE N°22 45 AUTOMNE 2008

déterminé sort cinq ans plus tard de laSorbonne, diplômé en droit, et obtient par lamême occasion une bourse du gouverne-ment français pour étudier à Columbia, auxEtats-Unis. Robert Badinter aurait pu alorsexercer sa profession outre-mer ; toutefois,le choix du retour au pays natal l’emporte. En attendant de passer l’agrégation, ildevient avocat, “par hasard”, afin d’êtrefinancièrement autonome. Cette décisionsemble être en effet indépendante de savolonté et totalement fortuite, bien que choi-sir initialement le droit, suite aux crimesvécus par sa communauté et sa famille,laisse penser qu’un déterminisme a vrai-semblablement modelé son parcours.

Le choix de son futur patron semble égale-ment peu hasardeux : il doit se trouver unmentor prêt à le guider, à l’initier et à offrirune consistance à sa personnalité. Il se pré-sente chez Henri Torrès en 1951, célèbreavocat d’assises possédant une voix impo-sante et un physique à jouer aux côtés deVentura et Blier. Torrès représente à la foisle Père et la Justice, deux notions symboli-quement liées dans l’histoire personnelle deBadinter.“Le petit Rabbin studieux” comme il aimelui-même se nommer, travaille ainsi pen-dant cinq ans dans l’ombre du géant enbuvant ses paroles et en admirant sa pres-tance et sa gestuelle. Quand Torrès prend sa retraite, son protégé

a 27 ans. Débutant et peu sûr de lui, lesaccusés refusent de confier leur tête entreles mains de ce jeune premier. Il s’orientedonc vers le civil en gardant un œil attentifvers les assises, qu’il considère comme l’artsuprême du droit. Goûtant enfin aux plaisirs de la vie, RobertBadinter profite des avantages de son cabi-net d’avocats très huppé et mène une vraievie de mondain : cette parenthèse se pré-sente telle une douceur qu’on se doit dedéguster avant un pénible et long voyage.En 1971, ce n’est ni le hasard, ni le détermi-nisme qui vient frapper à la porte deBadinter mais l’avocat Patrick Lemaire ainsiqu’une bonne dose de destin. Ce dernier

demande à son ami de l’aider à défendrel’affaire Buffet-Bontemps qui fait, à cetteépoque, les gros titres des journaux. ClaudeBuffet, condamné à perpétuité, et RogerBontemps, condamné à vingt ans, ont égor-gé une infirmière et un gardien lors d’uneprise d’otages à la centrale de Clairvaux. Ils’avère, au cours de l’enquête, queBontemps est un braqueur, mais seul Buffeta commis le crime. Le but est donc de sau-ver la tête de Bontemps. Badinter repose saplaidoirie sur la raison et les faits : pour lui,la justice ne pouvait tuer celui qui n’avait pastué. Mais il manque d’assurance et sent lamort rôder à l’heure du verdict. Les deuxhommes sont condamnés à la peine capita-le et guillotinés le 29 novembre 1972.

Intime conviction

Robert Badinter,fervent

défenseur del’abolition de la

peine de mort età l’origine de la

loi qui porte son nom.

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FRANCEMAGAZINE N°22 46 AUTOMNE 2008

Intime conviction

Bien que depuis longtemps partisan del’abolition de la peine de mort, c’est la mortde Bontemps qui donne naissance aufarouche militant que l’on connaît depuis. Ceprocès éveille de vieilles et profondes bles-sures chez l’avocat. Lorsqu’on lui demandesi cette révolte vient de ce que l’on nommela culpabilité du survivant, l’homme répondavec pudeur qu’il préfère ne pas y penser etqu’il se soigne dans l’action.Se jurant de défendre corps et âme, toutesles personnes susceptibles d’être condam-nées à mort, c’est dans cet état d’esprit queRobert Badinter accepte de défendre letueur d’enfant, Patrick Henry. Ce matin d’hiver 1976, Robert Bocquillon luidemande de l’aider à traiter ce qui devien-dra l’un des plus célèbres procès del’histoire française.Le 30 janvier 1976, Patrick Henry kidnappele petit Philippe Bertrand, âgé de 7 ans, etdemande une rançon d’un million de francsaux parents. N’obtenant pas satisfaction,Patrick Henry étrangle l’enfant d’un foulardet cache le corps dans son appartement.Parti skier avec des amis et laissant lecadavre chez lui, il est toutefois suspectédepuis le début de l’affaire par la police et sefait interpeller à son retour. Un vrai cirquemédiatique se met alors en place autour dususpect, ce dernier clamant haut et fort soninnocence devant les caméras, déclarantmême que le coupable méritait la peine de

mort. La police finit toutefois parl’arrêter le 17 février 1976.Patrick Henry désigne lui-mêmel’emplacement du corps du petitPhilippe, dissimulé sous son lit.C’est le comportement détachéde Patrick Henry qui horrifietoute la France, ses médias etses politiques. On comprendalors que seul un être humainpeut être inhumain : PatrickHenry reflète à cet instant la partla plus obscure de l’humanité et,par conséquent, de nous-mêmes.Robert Badinter n’est plus lemême qu’en 1972. Le procèsBontemps a hanté ses nuits etses pensées toutes ces années :il a du réécrire en secret des mil-liers de fois la plaidoirie quiaurait su convaincre le jury et évi-ter le son tranchant de la lame et

le bruit sourd de la tête qui tombe. En janvier 1977, le jour du procès, Badinterest en transe : tout son être, toutes sesblessures, tous ses sentiments révoltésresurgissent ce jour-là. Il comprend qu’unedéfense rationnelle ne sauvera pas PatrickHenry. Il ne défend donc pas un tueurd’enfant mais déclame avec ferveur un dis-cours contre la peine de mort. Les juréspleurent. Patrick Henry est condamné à la réclusioncriminelle à perpétuité mais sa tête est sau-vée.Badinter fait preuve d’une richesse humaineet d’une dimension intellectuelle horsnormes, puisque malgré les horreursvécues, il croit fondamentalement enl’homme et à sa capacité à évoluer, à tendrevers le bien. Ainsi que laisser le temps à cetêtre complexe et imparfait de saisir la res-ponsabilité de ses actes et apprendre à vivreavec.Si Badinter a si souvent utilisé le termehasard, c’est peut-être parce que le motdestin, du latin “destinare” qui signifie“assujettir”, résonnait comme une fatalité.Et ce n’est pas la fatalité mais la fièvre etl’engagement d’un avocat devenu Garde desSceaux qui changèrent la justice de notrepays ce 17 septembre 1981 à l’AssembléeNationale.« Monsieur le président, mesdames, mes-sieurs les députés, j’ai l’honneur, au nomdu Gouvernement de la République, de

Patrick Henry,meurtrier dupetit PhilippeBertrand en

1972 doitd’avoir sauvé sa

tête à RobertBadinter.

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FRANCEMAGAZINE N°22 48 AUTOMNE 2008

Une fois ces questions posées, ons’aperçoit que les réponses à apportersont beaucoup plus complexes qu’il n’y

paraît. Quoiqu’on en dise, ça n’est pas simple.Mais de là à englober toute la jeunesse danscette frange, ce serait un peu trop facile etpour le moins très réducteur.Comme d’habitude, nous sommes confron-tés à deux cas d’école :1/La minorité agissante. Celle qui fait la Unedes médias.2/La majorité silencieuse. Celle qui étudie,qui bûche, qui cherche, qui construit sonAvenir. Notre Avenir. Si, comme votre servi-teur, vous aviez eu l’honneur d’assister à ladix-neuvième cérémonie de remise des prixde la fondation Arditi, ce 25 juin dernier àGenève, vous auriez dégusté un véritableélixir de jouvence.Cette jeunesse faisait plaisir à voir.Qu’il s’agisse, en lettres, d’Yvan Salamancasur ses travaux concernant l’écrivain japo-nais Tanizaki Junichiro ou la vision très par-ticulière du voyage au bout de la nuit deLouis Ferdinand Céline par Maria Gal, enfrançais moderne, tous ces lauréats étaientheureux de communiquer leurs travaux

avec brio.Je ne peux résister de vous citer Michael dePasquale, dans la catégorie Histoire. Sathèse surprenante du système de prostitu-tion moderne et règlementé du Japon despériodes Meiji & Taishô, en a laissé plusd’un, interrogateur. Oui, vraiment surpre-nant.Touchant de près nos préoccupationsactuelles sur la nourriture, Jérémie Gay-Fradet, en Biologie, s’est penché sur lesanalyses génétiques et notamment sur lesplantes légumineuses.Que les élèves non cités me pardonnent. Ilsont tous talentueux et, du privilège de lesécouter, ne s’écoulait que du bonheur.Je m’en voudrais d’oublier ma préférence.Native du Tessin, Valentina Mercanti, caté-gorie Médecine, nous a enchanté par saprésentation facétieuse de travaux très aca-démiques “ Membrane Sorting In TheEndocytie Pathway “.Elle nous a expliqué ses recherches sur unthème qui n’a pas abouti. Mais... elle a trou-vé autre chose qui lui a permis de com-prendre comment les cellules réception-naient les diverses protéines que nous

Serge Cyril Vinet

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CONSEILLER ÉLUÀ L’A.F.E. POURLA SUISSE ET LELIECHTENSTEIN

LORSQUE L’ON VOIT TOUTE UNE JEUNESSE DÉFERLER DANS LES RUES, PROFITANT DE MANIFESTATIONS,CERTAINES LÉGITIMES, POUR SACCAGER GRATUITEMENT LE BIEN D’AUTRUI, ON NE PEUT QUE S’INTERROGER : QUE VA-T-ON FAIRE DE CETTE JEUNESSE DÉSŒUVRÉE ? QUE LUI RÉSERVE L’AVENIR ?

Avenir?JeunesseFaire rimerFaire rimer

etetAvenir?Jeunesse

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FRANCEMAGAZINE N°22 49 AUTOMNE 2008

absorbons.Pour les profanes que nous sommes,elle n’a pas hésité à comparer la cel-lule souche à un centre de tri postal.Chaque groupe de protéines identi-fiées est enfermé dans un sac postal,oblitéré à l’adresse du destinataire.Les inconnues sont distribuées enPoste Restante.Sa découverte, souffrant la comparai-son avec la poste Suisse plutôtqu’avec la poste Italienne... Vousavouerez quand même, que noussommes très loin de la StarAcadémy !Voilà donc nos lauréats auréolés deslauriers de la fondation Métin Arditi.Il ya 25 ans de cela, lors d’un séjourà l’université de Stanford enCalifornie, ce dernier fut subjuguépar les prouesses d’une fondationcréée par Gérald Kantor, aux TroisMaîtres Mots révélateurs :Excellence. Plaisir. Partage.Le but était de favoriser, dans leursrecherches, des élèves aux talentsprometteurs. Quelques annéesplus tard, nous célébrons cetteannée, les 20 ans de la FondationArditi. Les Trois Maîtres Mots sonttoujours présents.Le But est toujours d’actualité.Modestement, très modestement,Excellence, Plaisir et Partage,voilà bien trois mots qui convien-nent à l’épopée de FranceMagazine :Excellence. C’est ce vers quoinous aspirons en permanence parla qualité de nos réflexions (objec-tif rarement atteint, vousl’avouerai-je).Plaisir. Plaisir d’écrire en pre-mier lieu. Plaisir décuplé ensuite,sachant que nos écrits vont êtrepartagés avec bon nombred’anonymes.C’est dans cette même lignée etavec les mêmes buts que lesfondateurs de “ L’association duLycée Français Maurice Druon -Genève ” ont transformé cettedernière en “ Fondation LycéeFrançais Maurice Druon -Genève “ reconnue d’utilitépublique.

J’aimerais vous dire…

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FRANCEMAGAZINE N°22 50 AUTOMNE 2008

LA FNAC, FÉDÉRATION NATIONALE D’ACHAT DES CADRES, ESTUNE ENSEIGNE BIEN CONNUE DE LA PLUPART DES FRANÇAIS,CAR ELLE EXISTE SUR LE TERRITOIRE NATIONAL DEPUIS PLUSDE 50 ANS ET A SU SE POSITIONNER COMME UNE RÉFÉRENCEPOUR LES PRODUITS CULTURELS ET TECHNIQUES.La

s’implantefnacen Suisse alémanique

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FRANCEMAGAZINE N°22 51 AUTOMNE 2008

Ce qui est moins connu, c’est que la FNACest aussi présente en Belgique, enEspagne, au Portugal, en Italie et en

Grèce. La FNAC a aussi réussi le saut au-delàde l’Atlantique puisqu’elle a ouvert 7 magasinsau Brésil. Plus près de nous, la FNAC a inaugu-ré en 2000 son premier magasin en Suisse, àGenève, avant d’en ouvrir un deuxième toujoursà Genève puis un à Lausanne et finalement un àFribourg. En tout, ce sont plus de 130 magasinset plus de 20 000 salariés qui travaillent pourcette enseigne. Depuis avril 2008, il y a unmagasin FNAC de plus, et il se trouve à Bâle, enplein cœur de la cité rhénane, idéalement situédans la rue piétonne, et juste à côté de plusieurslignes de tram et d’un parking. Autant dire quel’endroit a été bien choisi. Avec 8 étages et plusde 3 000 m2 de surface de vente, la FNAC deBâle a de quoi satisfaire autant les passion-nés du livre que ceux de la vidéo. Mais laFNAC a aussi frappé un grand coup média-tique lors de son installation à Bâle en orga-nisant une opération de “teasing” unesemaine avant l’ouverture. Qu’est-ce qu’uneopération de teasing ? Et bien, c’est unecampagne publicitaire qui dévoile petit àpetit quel est le produit que l’on cherche àpromouvoir. Ainsi, Bâle s’est couverted’autocollants, de banderoles et d’affichesoù il n’était écrit rien d’autre que « HAPPY-BASEL.CH ». La presse locale s’est empa-

rée de l’affaire, essayant de lever le mystère.Au bout de quelques jours, le secret a trans-piré et l’on a su que c’était la FNAC qui étaità l’origine de tout cela. Alors, quel est le butde la FNAC en s’implantant à Bâle qui est unmarché aux mains d’acteurs allemands etquelles sont ces chances de réussite ?Rencontre avec Daniel Bader, responsablecommunication de la FNAC de Bâle.

> France Magazine : Monsieur Bader,merci beaucoup de nous accueilliraujourd’hui et de bien vouloir répondreà nos questions sur l’implantation de laFNAC à Bâle. Monsieur Bader, aprèsGenève, Lausanne et Fribourg, la FNACa décidé de s’implanter en Suissealémanique et a choisi Bâle commepremier lieu. Pourquoi Bâle ?

Daniel Bader : C’est un fait que la FNACcherchait un endroit adéquat pour s’établir

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FRANCEMAGAZINE N°22 52 AUTOMNE 2008

en Suisse alémanique. Il se trouve que Bâleavait ce genre de possibilité disponible rapi-dement et nous avons donc inauguré notreentrée en Suisse alémanique à Bâle. Noussommes particulièrement heureux de cetteopportunité car Bâle est une ville culturellepar excellence au carrefour de trois pays.

> Les livres et la vidéo sonttraditionnellement en mainsallemandes à Bâle. Comment comptez-vous vous diversifier par rapport à laconcurrence ?

Avant de nous établir ici, nous avons fait uneétude de marché afin de vérifier s’il y avaitdes niches ou des domaines qui n’étaientpas encore couverts et qui permettraient denous démarquer et ainsi d’être plus concur-rentiels. Par exemple, les bandes dessinéesoù nous avons mis l’accent sur ce genre depublication. Un autre exemple, les livres dis-ponibles en français ; nous pensions qu’il ya une réelle demande et avons agi en consé-quence mais la demande a été plus forteque prévue et nous avons déjà dû augmen-ter notre offre par rapport à ce qui était dis-ponible à l’ouverture du magasin. Notreclientèle s’attend à trouver des livres enfrançais chez nous. En ce qui concernel’électronique, nous voulons mettre l’accentsur des produits et un conseil de qualité etpas seulement être revendeurs de produitsbas-prix. Nous ne voulons pas proposer leplus grand éventail de produits ni forcémentêtre moins chers de quelques centimes queles autres mais nous voulons offrir unesélection de produits qui nous ont convain-cus et que nous pouvons conseiller etvendre en toute confiance. Cela demandebien sûr d’avoir du personnel qualifié quisoit en mesure de répondre aux attentes desclients. Un autre point qui nous démarquede la concurrence, ce sont nos guides FNACqui décrivent, entre autres, les résultats decertains de nos produits dans nos labora-toires d’essais. Ces laboratoires existentdepuis 1972 et permettent d’offrir auxconsommateurs des éléments comparatifsobjectifs. À chacun ensuite de décider quel-le priorité il veut bien attribuer à chaqueélément comparatif. Si vous voulez un der-nier élément différentiateur par rapport à laconcurrence, je dirais que nous sommes lesseuls à Bâle à réunir sous un même toitlivres, CD, DVD, jeux, logiciels, informa-tique, électronique, ainsi que billetterie, etceci en allemand et en français. De plus,

nous avons aussi un forum dédié aux ren-contres culturelles ainsi qu’un café équipéde bornes sans-fils et qui possède une trèsbelle vue sur la ville.

> Pensez-vous qu’il y ait suffisammentde demande pour qu’une offre enallemand et en français puissecohabiter et être rentable sur le longterme ?

Oui, tout à fait. Comme je vous l’ai dit, nosprévisions ont déjà été dépassées. Nousvoyons aussi une clientèle alémanique à larecherche de livres ou de films en françaisen plus de la clientèle francophone surlaquelle nous comptions. Nous voulonsaussi continuer à nous faire connaître dansla région pour que notre offre atteigne leplus de personnes intéressées possible.

Implantation francophone

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FRANCEMAGAZINE N°22 53 AUTOMNE 2008

> Quels sont vos objectifs à moyen termesur la Suisse ? Est-ce que Bâle estjuste un essai en terre alémanique ?

Notre objectif et d’ouvrir des magasins sup-plémentaires. Fin 2009, nous allons ouvrirune FNAC à Berne ; puis Zurich, Saint-Gallet Lucerne suivront. En aucun cas, Bâle neva rester isolée en Suisse alémanique. Celafait partie d’une stratégie que nous avons etoù nous prévoyons un potentiel de 12 à 15magasins sur tout le territoire suisse. Nouspensons avoir un concept porteur qui a déjàfait ses preuves dans de nombreux autrespays et nous voulons compter parmi lesacteurs incontournables en ce qui concerneles produits techniques et éditoriaux ainsique pour la diversité culturelle.

> Vos employés sont-ils tous bilingues ?

Non. Ce n’est pas le cas. Au niveau cadre,tout le monde l’est mais pas au niveau de lavente. Ce n’est pas une conditiond’embauche non plus. C’est très certaine-ment un avantage mais pas une conditionindispensable de parler français.

> Vous avez évoqué précédemment unForum. Pouvez-vous nous expliquerquel en est le concept ?

Oui, bien sûr. C’est un concept essentiel de laphilosophie de la FNAC. Cet endroit fait par-tie intégrante de la vie du magasin. Nousvoulons que cela soit un lieu de rencontre, dedécouvertes. Nous voulons offrir régulière-ment des représentations gratuites et ellesauront lieu durant les horaires d’ouverture.Dans une grande mesure, il y a un lien avecles produits que nous vendons ; ainsi, nousproposons des lectures de livres où des ren-contres avec des auteurs. Nous voulons quecela profite aux échanges entre public etauteurs, donc ces rencontres seront ani-mées par un présentateur. Il y a aussi desmini-concerts de promotion qui durent entre45 et 60 minutes. Nous voulons aussi organi-ser des événements pour les enfants ou desspectacles de danse. En tout cas, toujours enrapport avec des partenaires locaux.Actuellement, nous avons 2 à 3 événementspar semaine mais à partir du mois d’août,nous voulons avoir un événement quotidien.Nous avons beaucoup d’idées sur ce quenous voulons faire et nous sommes en trainde préparer le calendrier. Nous avons le localet les infrastructures et Bâle a très certaine-ment beaucoup à offrir dans ce domaine.Nous serons heureux de pouvoir partagerces valeurs communes. Ces événements seproduisent en allemand ou, occasionnelle-ment, en français. Le Café est une partieintégrante du Forum. Vous pouvez à toutmoment vous y détendre et y consommer etil y a aussi en permanence une exposition dephotos d’artistes locales.

> Merci beaucoup pour votre temps etpour vos explications Monsieur Baderet nous souhaitons « tout de bon » à laFNAC dans son entreprise en Suissealémanique.

Didier Assandri

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Implantation francophone

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FRANCEMAGAZINE N°22 54 AUTOMNE 2008

Le saviez-vous ?

Daniel A. Siréjols

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Parmi les liens à celui-ci, il y avait la télé-vision française dont il regardait lesinformations, les émissions culturelles,

les variétés, le sport… Pour cela, il avait faitéquiper sa maison d’une parabole, investisse-ment non indifférent (dans les 2 000 francssuisses) et prit une carte TPS pour le décodeur(elle-même dans les Chf 600), mais bon, c’estconnu, quand on aime… Il était enchanté, rece-vant près d’une centaine de chaînes en français,couvrant tous les sujets précités. Et voilà qu’unbeau jour, TPS est passé, en cette année 2008,dans les mains de CanalSat. Bon, pas de chan-gement lui a t-il été expliqué, on vous changevotre carte TPS pour la carte CanalSat. Bien.Sauf que, très vite, quelques chaînes ne pou-vaient plus être ouvertes, et ce, de plus en plus.Cela commença par des chaînes disons “péri-phériques” comme Paris Première ou NRJ 12,puis des chaînes de sport, tel Infosport ou cul-turelles comme Histoire ou Voyage. Ce sont desraisons techniques, lui a t-on dit chez CanalSat.Mais le mal a continué d’empirer au fil dessemaines, pour arriver à la disparition deschaînes publiques : France 2, 3, 4, 5, TF6, 0,et finalement TF1, LCI, M6, TMC, RTL9depuis début juin, pour ne citer que les plusconnues.Les explications fournies sont maintenantque des pays comme la Suisse et laBelgique sont des “marchés gris” (lisez :notre Français recevait la TV française frau-duleusement sans le savoir !).Mais rassurons-nous, la télévision romande(merci amis suisses) et Arte sont toujoursaccessibles. Là, nous commençons à nous poser desquestions : la réception des chaînesPUBLIQUES françaises dépend donc du bonvouloir d’une entreprise PRIVÉE ???CanalSat, entreprise privée, peut doncs’arroger le droit de diffuser ou non, lesémissions produites par les chaînes d’Etat ?Est-ce un abandon de l’Etat ou un abus de

pouvoir technologique ?Que signifie “marché gris” pour CanalSatqui distribue des centaines de cartes, enéchange et en toute connaissance de cause,de celles de TPS, et en tirerait profit ?Comment se fait-il qu’il n’y eut pas commu-nication préalable plutôt que d’exercer cepetit jeu de supprimer les chaînes au fil dutemps ? CanalSat entreprise de communi-cation ?En France, CanalSat retransmet les chaînespubliques via l’abonnement par sa cartepour le décodeur (et ristourne probable-ment, ce qui serait juste, une partie dessommes encaissées à l’Etat). En quoi celane serait-il pas possible ici ? La carte ven-due à l’étranger servant de cotisation à laredevance télé. Le problème est né avecl’arrivée de CanalSat.A titre de comparaison, nous recevons lesémissions radios françaises (est-ce un autremarché gris ?). Celles-ci passant aussi parsatellite pour la plupart, devons-nous nousattendre à ce qu’elles deviennent muettes ?En poussant le résonnement à l’extrême, lesNMPP (Nouvelles Messageries de la PresseParisienne) n’ont qu’à décider de ne plusdélivrer leurs journaux hors France !Nous avons entendu qu’en France, CanalSata l’intention de créer une nouvelle carte quine sera compatible qu’avec son propredécodeur. Une façon d’aller vers un systèmemonopolistique dont il serait intéressant deconnaître l’avis de Bruxelles. Le décodeurprésenterait aussi l’avantage de ne recevoirqu’une seule carte. Adieu donc la possibilitéd’en ajouter une seconde pour recevoir unautre satellite.A l’origine, Canal+, qui a initié le systèmecarte-décodeur, en avait tous les droits :cela ne concernait que ses propres émis-sions d’entreprise privée. D’autre part,CanalSat a décrété que pour obtenir sa nou-velle carte, il faudra attester d’une adresse

l étaitune fois…I l étaitune fois…IIL ÉTAIT UNEFOIS… NON, CEN’EST PAS UNCONTE, ETSURTOUT PAS UNCONTE DE FÉE. IL ÉTAIT UNE FOISUN FRANÇAIS DEL’ÉTRANGERRESTÉ TRÈSATTACHÉ À SONPAYS ET À SACULTURE.

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FRANCEMAGAZINE N°22 55 AUTOMNE 2008

Le saviez-vous ?

en France (!). En s’informant alentour, nousapprenons que la transmission par le câblecommence à être touchée du même mal,ainsi FR3 a disparu à Berne (et peut-êtrechez vous ?).Il serait intéressant de connaître le point devue d’organismes d’origine hors Hexagonecomme RMC et RTL qui doivent être ravisque l’on dispose ainsi de leurs droits.Nous avons contacté la filiale de Canal+ enSuisse. Il nous a été expliqué que la socié-té suisse (mais il y en plusieurs) qui nousa vendu la carte TPS et l’a remplacée parcelle de CanalSat a œuvré via le marchégris et que le groupe Canal a décidéd’interrompre les diffusions sur laSuisse.Aux questions : comment pouvez-vousinterrompre des émissions du ServicePublique - ainsi que celles de territoires nonfrançais (Principauté de Monaco, GrandDuché du Luxembourg) - comment avez-vous accepté de remplacer des centaines decartes TPS par les vôtres (la quantité et leurencaissement n’ont pu passer inaperçus),les réponses ont été éludées par « C’est àParis que cela a été décidé ». Certainement.Puis, on nous annonce une nouvelle carteCanalSat à l’automne pour la Suisse maisles caractéristiques techniques et commer-ciales sont encore inconnues ici-bas.Aucune mention sur le fait que les pro-blèmes seraient nés du refus de Canal depayer les droits de retransmission enSuisse.Enfin, une proposition réconfortante nousest faite : « Donnez-nous le numéro actuelde votre carte et nous allons vous la rem-placer dans les 15 jours et vous pourrezrecevoir tous les canaux que vous aviez aupréalable » (pour combien de temps ?) !!! Bonne idée d’avoir pris l’initiative person-nelle de les appeler.Le Français de l’étranger qui écrit ceslignes, garde le moral, la TSR, en touttemps, est à même de lui donner des nou-velles de son pays, ainsi sera-t-il tenu aucourant quand la Nation lui demandera devoter ! Malheureusement, il se pourrait qu’ilne puisse pas suivre les débats entre lescandidats si les annonces faites par Canalne suivent pas.Le soussigné a aussi la chance que dans safamille, on pratique également l’Allemand,l’Anglais et l’Italien, langues pour lesquellesil reçoit des chaînes à profusion.

A l o r svive la Francophonie, àmoins que le mot n’aitplus de sens et que res-triction budgétaireaidant, on en supprimeles fonds alloués. Caril s’agit bien deFrancophonie, on saitparfaitement que leschaînes françaisesne sont pas suiviesque par les seulsressortissants dudrapeau tricolore.D’ailleurs, si unjournal comme24 Heures (voirarticle du 2 juinci-joint) s’en estému, c’est bienla preuve quel ’ a u d i e n c edépasse celle desseuls porteurs du passeport fran-çais.A ce sujet, nous aimerons avoir l’avis del’Organisation Internationale de laFrancophonie à Genève.Vous qui nous lisez et qui connaissez lesmêmes mésaventures ou qui allez les vivre,nous vous remercions de nous envoyer votrepoint de vue et vos suggestions à votre revueFrance Magazine, car tout ceci… n’est pasun conte de fée.

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FRANCEMAGAZINE N°22 56 AUTOMNE 2008

Anniversaire

L’OSR 1918-2008IL Y A 90 ANS NAISSAIT L’ORCHESTREDE LA SUISSE ROMANDE

Un jeune orchestre de 90 saisons

Ernest Ansermet.

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FRANCEMAGAZINE N°22 57 AUTOMNE 2008

Ainsi, dix-neuf jours aprèsl’armistice de la Grande Guerre,naissait l’Orchestre de la Suisse

Romande qui, depuis, n’a cesséd’enrichir la vie musicale genevoise etlausannoise et est devenu au fil desdécennies l’un des fleurons de lamusique européenne.

Ernest Ansermet, le chef fondateur (1883-1969)Il fallait certes l’énergie, la jeunes-se, la détermination, peut-êtremême le petit brin de folie d’un chefcomme Ernest Ansermet pour selancer dans une telle aventure à uneépoque aussi troublée. Mais le chefromand qui s’était fait connaître enEurope et en Amérique en dirigeant

reprendre le flambeau, ce qui n’atoutefois pas toujours été très facile.Depuis sa fondation en 1918,l’Orchestre s’est étoffé et compteaujourd’hui 112 musiciens perma-nents. Etant soutenu par la Cantonet la Ville de Genève, la Radio-Télévision Suisse Romande, lesassociations d’amis et de nombreuxsponsors et mécènes, l’Orchestredoit assurer les concertsd’abonnements à Genève etLausanne, les concerts sympho-niques de la Ville de Genève, leconcert annuel en faveur de l’ONUet, bien sûr, être présent dans lafosse du Grand Théâtre de Genèvepour pratiquement toutes les pro-ductions. Une activité qui lui laissetout juste le temps de partir en tour-née et de répondre aux très nom-breuses invitations de festivals.Dans l’esprit de son fondateur quisoutenait la musique française et

les compositeursdu début du XXe

siècle dont cer-taines œuvres ontété créées à Genève

(Brittten, Debussy, Darius Milhaudet Stravinski, et, plus près de nous,Heinz Holliger et Peter Eötvös)l’Orchestre poursuit cette politiquede découvreur et encourage la créa-tion suisse par des commandesrégulières à William Blank etMichael Jarrell.

Histoire d’une successionAprès 50 ans de règne (1918-1967)Ansermet laissait un grand vide, etles chefs qui lui succédèrentn’eurent pas la tâche facile. PaulKlecki ne resta que trois ans.Wolfgang Sawallisch conduira l’OSRpendant 10 ans (1970-1980) vers lerépertoire alle-mand, sans tou-tefois délaisserles musiciensfrançais. Den o m b r e u s e stournées et peu

depuis 1915, les célèbres BalletsRusses, a très rapidement conduitson orchestre vers les plus hautessphères musicales de son temps. La Radio Suisse Romande naissanteet les très nombreux vinyles enre-gistrés à partir des années 40 vontpermettre à l’OSR de se faireconnaître du grand public. Les tour-nées organisées par Ansermet dansle monde entier, contribuèrent àaugmenter la renommée del’Orchestre, et ce particulièrement àpartir des années 50, où l’OSR estrégulièrement invité aux Etats Uniset en Asie pour jouer le répertoiresuisse et franco/russe du début duXXe siècle. La voie était tracée et sessuccesseurs n’avaient plus qu’à

Anniversaire

LE 30 NOVEMBRE 1918, ALORS QUE L’EUROPE EST TOTALEMENTANÉANTIE PAR LA GUERRE ET SA POPULATION DÉCIMÉE PAR LAGRIPPE ESPAGNOLE, LE JEUNE CHEF ERNEST ANSERMET RÉALISESON GRAND RÊVE D’ORCHESTRE, EN DIRIGEANT POUR LA PREMIÈREFOIS AU VICTORIA HALL, UNE SOIXANTAINE DE MUSICIENS SUISSES,RAPIDEMENT REJOINTS PAR DES CORDES ITALIENNES, DES BOISFRANÇAIS ET DES CORS AUTRICHIENS.

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Hahn Hilary.

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FRANCEMAGAZINE N°22 58 AUTOMNE 2008

Anniversaire

d’enregistrements. Son successeurHorst Stein ne restera que cinq ans.En 82, il dirigea au Grand Théâtre,un Parsifal mémorable. Mais c’estavec Armin Jordan que l’orchestreretrouve son répertoire d’élection

avec lesc o m p o s i -teurs helvé-

tiques contemporains et les musi-ciens français du début du XXe

siècle, tout en accordant une placeimportante à la musique allemande.L’OSR réalise de nombreux enregis-trements dont l’intégrale Ravel àl’occasion du 50e anniversaire de lamort du compositeur. En 1997,Armin Jordansera remplacéà la tête de lap h a l a n g eromande parle jeune chef Fabio Luisi qui, en cinqans, révolutionnera les habitudes del’Orchestre par des programma-tions inhabituelles, et quil’emmènera au Japon, puis enChine. Il osa même, lors d’unconcert pour les enfants, dirigercostumé en panthère rose… Le chefisraélo-américain PinchasSteinberg lui succèdera pour troisans durant lesquels il a conduitl’Orchestre sur les routes d’Europe,jusqu’au pied du grand mur duThéâtre antique d’Orange, et à NewYork, pour un concert à l’ONU.Depuis 2005, c’est Marek Janowskiqui est passé aux commandes del’OSR, le menant en tournées euro-

péennes avec de la musique fran-çaise et Brucker dont il a commen-cé à graver l’intégrale des sympho-nies (achèvement, fin 2011). Avec cechef polonais de tradition alleman-de, l’Orchestre a retrouvé sa place

dans la cour desgrandes pha-langes d’Europe.

L’OSR, un jeuneorchestre de90 saisonsMais rien n’étantjamais acquis,l’Orchestre, qui,cet automne,fêtera son 90e

a n n i v e r s a i re ,doit, selon Metin

>> Arditi, le président de la Fondation« représenter à la fois le poids de latradition allié à une volonté inces-sante de renouveau. Rien n’est pos-sible, poursuit-il, dans le confort ettout se gagne par un travail inces-sant. » Son objectif : installer leRomand dans le peloton desgrandes formations internationales.Pour cela, l’Orchestre ne doit jamaiscesser d’innover, de se dépasser etdoit être à la pointe des technolo-gies, poursuivre ses tournées inter-nationales, et rester toujours dispo-nible pour son public local qui lesoutient depuis 90 saisons. Metin Arditi a de quoi être satisfaitau regard du taux de fréquentationdes concerts qui dépasse les 90%avec près de 80% d’abonnés. A ce

Maïkki Susanna.

Luisi Fabio.

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FRANCEMAGAZINE N°22 59 AUTOMNE 2008

bilan positif, s’ajoutent un soutieninfaillible des autorités et une aug-mentation de la participation privée.Alors que demander de plus ?

La saison 2008-2009 : un cru exceptionnelLa saison 2008-2009 s’annonce, parconséquent, à la hauteur desattentes de chacun avec la présencede grands artistes tels que CharlesDutoit qui revient pour un program-me Ravel, Beethoven et Rimski-Korsakov avec la pianiste MarthaArgerich ; avec des chefs comme

Fabio Luisi, Christian Zimmermannà la tête de l’Orchestre de Chambrede Lausanne, Joseph Pons ouLeonard Slatkin, des valeurs sûresprogrammées aux côtés de jeunesvirtuoses invités à exécuter dix desplus grands concertos pour violonsdu répertoire symphonique (SérieCrédit Suisse). Autre temps fort dela saison, la venue de la jeune chef-fe finlandaise qui dirigera Lévitation,une création du compositeur hon-grois Peter Eötvös bien connu desGenevois, tout comme MichaelJarrell qui présentera en premièremondiale, sous la baguette deMarek Janowski, Le ciel, tout àl’heure encore si limpide, soudainse trouble horriblement. L’Association genevoise des Amis del’OSR qui soutient les activités del’institution depuis une soixantained’années, participera à la célébra-tion en organisant le 30 novembreprochain, jour officiel de la créationde l’Orchestre par Ansermet en1918, un grand concert sympho- >>

nique et lyrique qui rassemblerasous la baguette de MarekJanowski, la mezzo wagnériennePetra Lang, le ténor NikolaïSchukoff et la basse GünterGroissböck pour le 1er acte de LaWalkyrie. Pour son concert deNouvel An (14 janvier), l’Associationinvitera le chef Leopold Hager à diri-ger un programme d’opérettes vien-noises chantées par la sopranoMichaele Kaune et le baryton BoSkovhus.

Les tournéesOutre lesconcerts pro-posés auxabonnés duVictoria Hall deGenève et du

T h é â t r eBeaulieu deLausanne, dansles séries« Répertoire »,« Grands clas-siques » et« Symphonie »,qui verront sesuccéder aupupitre des chefs comme GerdAlbrecht, Michael Schønwandt, letalentueux chef péruvien MiguelHarth-Bedoya, invité à Genève pourla première fois, l’Orchestre doitégalement entretenir son image àl’étranger et reprendre chaqueannée son bâton de pèlerin. Cesvoyages permettent de stimuler letravail des musiciens (préparationde nouveaux programmes) et ren-forcent leur cohésion. Depuis 2003,l’OSR est régulièrement invité auxChorégies d’Orange. Cet été, lesfestivaliers ont pu apprécier dansCarmen (12 et 15 juillet 08), la for-midable collaboration entre

l’Orchestre et le chef françaisMichel Plasson qui l’avait à plu-sieurs reprises dirigé à Genève surla scène du Neuve dans Hamletd’Ambroise Thomas et dans le cadrede concerts symphoniques. En août dernier, lors du FestivalSeptembre Musical de Montreux,l’Orchestre a été invité avec leRequiem de Berlioz. AutreRequiem, celui de Brahms quel’Orchestre exécutera en compagniedu Rundfunkchor de Berlin ennovembre prochain, à l’occasion duFestival International d’art sacré deRome. Petit détour par la SallePleyel à Paris pour un concert avecle pianiste Nikolaï Lugansky dans unprogramme Schumann et R.Strauss (6 mars 09). L’OSR est ensuite attendu en avril09, en compagnie du pianiste Jean-Yves Thibaudet, dans plusieursgrandes villes d’Allemagne (Berlin,Cologne, Aix-la-Chapelle et

Wiesbaden), puisen mai, ils ’ e m b a r q u e r aenfin pourl’Amérique du Sud.Une grande première, puisquel’OSR, malgré l’énorme travail four-ni en Argentine par ErnestAnsermet durant des décennies,n’avait jamais pu se rendre enAmérique latine. Cette grande tour-née, qui s’imposait absolument pourle 90e anniversaire de l’OSR, passerapar Sao Paulo et Rio de Janeiro auBrésil puis Montevideo en Uruguayet prendra fin à Buenos Aires enArgentine où le chef romand a lais-

Anniversaire

L’OSR auVictoria Hall

à Genève.

L’OSR à Varsovie

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FRANCEMAGAZINE N°22 60 AUTOMNE 2008

Wars et E.T. La saison dernière, laprojection du film Les TempsModernes sur écran géant déployéau dessus des musiciens de l’OSRqui interprétaient en direct lamusique de Chaplin, avait rempli leVictoria Hall d’un public hétérogèneabsolument ravi. L’Orchestre s’intéresse égalementaux jeunes pour lesquels la musiqueclassique est loin d’être une priorité.Mais Philippe Béran qui est le chefde l’Orchestre du Collège de Genève,connaît bien ce public pour lequel ilconçoit depuis l’an 2000, une « SériePrélude » regroupant des concertsadaptés aux jeunes et à leur famille.En commentant les œuvres qu’ildirige, il parvient à capter l’attentionde son public. Environ 15 000 jeunessont ainsi concernés par cesconcerts auxquels s’ajoutent des« Ateliers découvertes » animés parles musiciens eux-mêmes qui pré-sentent aux élèves les différentesfamilles d’instruments. Enfin, lesactivités des « Zamis de l’OSR »orchestrées par un ancien violonistede l’Orchestre, André Piquet, aliasErnesto, touchent, quant à eux, prèsde 800 jeunes de moins de 25 ansqui, moyennant une cotisationannuelle de 10 francs, deviennentmembre du club et peuvent assistergratuitement à des concerts del’Orchestre, à des répétitions auGrand Théâtre et, accessoirement,être parrainés pendant une année

sé une empreinte indélébile. La sai-son de l’Orchestre s’achèvera enjuillet 2009 au Concertgebowd’Amsterdam avec la 5e

Symphonie deBruckner (les 14 et 15juillet).

Les publics de demainLa recherche de nou-veaux publics est unepréoccupation récur-rente pour les institu-tions culturellesd’aujourd’hui, et l’OSRn’échappe pas à cette poli-tique qui demande imagina-tion et persévérance. Bienque le taux de fréquentationde l’OSR soit supérieur à90%, il est indispensablepour son bon fonctionne-ment, de toucher d’autresauditeurs qui remplaceront àplus ou moins long termeceux d’aujourd’hui. Simplebon sens, d’autant que lapléthore d’offres culturelles

proposée rend le public versatile.L’OSR propose donc dans sa sérieMosaïque, trois concerts (les 18

décembre, 25 marset 04 juin 09) quiinvitent mélomanesavertis, béotiens oucurieux sur deschemins de traversdu jazz manouchede DjangoReinhardt à laGrèce de MikisTheodorakis tout enfaisant un petit clind’œil aux musiquesde films aussiconnus que Star

Steve Roger, l’administrateur général de l’Orchestre dela Suisse Romande, en déplacement en Provence avec

l’Orchestre à l’occasion de Carmen de Bizet programméepour deux soirées aux Chorégies d’Orange, avait acceptéavec beaucoup de générosité, de répondre à notre curio-sité.

> France Magazine : Pour son 90e anniversaire, l’OSRpropose une saison particulière. Quels en serontles points forts ?

Steve Roger : Plusieurs événements à Genève, commele concert anniversaire du 30 novembre 2008 ou la SérieCredit Suisse, marquent cet anniversaire. Par ailleurs,l’Orchestre se produira entre autres à Rome, Paris,Berlin, Sao Paulo, Buenos Aires et Amsterdam.

> FM : Ernest Ansermet privilégiait le répertoiresuisse et franco-russe du début du 20e siècle, sansoublier Bélà Bartók. Ses successeurs accordèrentquant à eux une place importante à la musiqueallemande. Cette saison de célébration quidébutera le 10 septembre à Genève, résume-t-elleles 90 ans de musique de l’orchestre ?

SR : Un orchestre doit vivre avec son époque et la pro-grammation est autant influencée par les goûts et affi-nités personnels d’un directeur musical que parl’objectif de répondre aux attentes de publics. On peutaussi difficilement comparer les différentes périodespuisque Ernest Ansermet a programmé 49 saisons etPinchas Steinberg, par exemple, 3. Aujourd’hui, unorchestre doit pouvoir jouer tous les répertoires, et si on

INTERVIEW DE STEVE ROGER

Anniversaire

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Marek Janowski.

Charles Dutoit etMartha Argerich .

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FRANCEMAGAZINE N°22 61 AUTOMNE 2008

regarde la saison 2008/2009, il y a des compositeurs de13 nationalités différentes, de la période classique à nosjours.

> FM : Richard Strauss et Wagner programmés pourle concert anniversaire du 30 novembre prochain.On pourrait s’étonner de ne pas y trouver demusique française.

SR : L’OSR est un orchestre symphonique qui joue éga-lement en fosse. Le 1er acte de Walkyrie en versionconcert fait appel à ces deux qualités. Strauss est éga-lement un des plus grands orchestrateurs et utilisetoutes les couleurs d’un orchestre symphonique.

> FM : Après une importante tournée en Allemagne,l’OSR partira en Amérique du Sud. Le rêve d’ErnestAnsermet, 90 ans après, va enfin se concrétiser.Pourquoi avoir attendu si longtemps ?

SR : Ernest Ansermet n’a pas pu se rendre en Amériquedu Sud avec son orchestre pour des raisons écono-miques. Depuis 10 années que je suis à l’Orchestre de laSuisse Romande, il y a eu une tentative qui a aussiéchoué pour des raisons économiques. Aujourd’hui,l’Argentine et le Brésil peuvent offrir de meilleuresconditions financières et le soutien de mécènes et spon-sors envers l’OSR est beaucoup plus important.

> FM : Pour fêter ces 90 ans, l’OSR a programmé 10concertos pour violon avec de jeunes virtuoses trèstalentueux. Priorité aux concertos pour violon etpréférence pour la jeune génération montante.Pour quelles raisons de tels choix ?

SR : Cette jeune génération représente l’avenir de notreorchestre qui joue un répertoire immense de l’époqueclassique à aujourd’hui. Ces solistes sont au début deleur carrière et vont certainement partager nos 40 pro-chaines années. Le choix du violon est significatif à plusd’un titre. Il est l’instrument soliste préféré du public etmis en concerto, il occupe en principe une place impor-tante de l’œuvre des compositeurs.

> FM : L’OSR rendra hommage à Olivier Messiaen endécembre prochain avec un concert exceptionnel.L’OSR a-t-il entretenu un rapport particulier avecle compositeur français ?

SR : L’OSR non, notre directeur artistique oui. Notre tra-dition d’interprète de la musique française nous permetd’aborder cet anniversaire Messiaen en interprétant l’undes chefs-d’œuvres de sa composition (Des Canyonsaux Etoiles). Olivier Messiaen est l’un des plus grandscompositeurs du 20e siècle ; nous sommes fiers de luirendre cet hommage.

> FM : Malgré le talent multiple des chefs qui ontconduit l’OSR ces dernières années, l’arrivée en2005 de Marek Janowski semble avoir redonné une

énergie nouvelle à l’Orchestre, véritablementconsidéré aujourd’hui comme l’une des grandesphalanges européennes ?

SR : Dans toute matière artistique, et la musique n’y faitpas exception, la qualité atteinte par les interprètes esttoujours perceptible. Marek Janowski fait des mer-veilles avec nos musiciens et le niveau de qualité desconcerts nous place aujourd’hui en concurrence avecles grandes formations internationales. Les relationsentre le chef et ses musiciens (dont les membres vien-nent de voter à plus de 80% leur souhait de poursuivrele travail pour un nouveau mandat) s’intensifient etl’orchestre va encore beaucoup gagner en qualité dansles prochaines années.

> FM : Depuis ces dernières années, l’OSR renforcesa politique d’enregistrement en conciliant les exi-gences de la musique symphonique classique etune technologie particulièrement avancée.Quelques mots sur la production audiovisuelle ?

SR : L’OSR qui n’avait plus de maison de disque attitréea lié un partenariat avec PentaTone et plus de 10disques sont prévus dans les 4 années à venir. Le parte-nariat avec la Radio et Télévision Suisse Romande per-met aussi à l’OSR d’être disponible en DVD avec Tristanund Isolde, Don Pasquale. Egalement sur les chaînes detélévision suisses, mais aussi internationales commeArte et TV5. Le concert de Noël 2007 a été le premierévénement de musique classique diffusé sur la nouvel-le chaîne haute définition de la TSR, en prime time lesoir de Noël.

> FM : Depuis 2003, l’OSR est régulièrement invité àparticiper, en juillet, aux Chorégies d’Orange.L’OSR collabore-t-il avec d’autres festivals musi-caux ?

SR : L’Orchestre est très sollicité et manque cruelle-ment de temps pour se produire dans tous les lieux quile demandent. Nous avons déjà joué 4 productions àOrange, soit devant plus de 100 000 spectateurs. Lapériode estivale, sans activité symphonique en public àGenève, nous permet aussi de consacrer du temps auxenregistrements discographiques. 3 disques serontenregistrés en juillet 2009 avant un déplacement pourdeux concerts au Festival Robeco au Concertgebouwd’Amsterdam, puis le concert d’ouverture du Festival deMontreux. Les projets futurs prévoient, entre autres, unconcert au Festival de Lucerne en été 2010.

> FM : Un vœu pour l’anniversaire de l’OSR ?SR : Le Victoria Hall est une salle de concert magni-fique, hélas inadéquate, de par sa surface scénique etson volume global, au grand répertoire symphonique etsans le confort moderne auquel le public peuts’attendre... A quand la construction d’une salle dédiéeà la musique qui placera Genève sur la carte des

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FRANCEMAGAZINE N°22 62 AUTOMNE 2008

PIANA, CORSE, 1906, h. s/toile collée s/carton, 45 x 60 cmmusée Paul-Dini. © photo D. Michalet Adagp, Paris 2008

Charmy mena une vie mondaine, parfoisfastueuse, qui la mit en contact avec denombreuses personnalités du monde

littéraire ou politique. Elle fut l’amie de Colette,de Roland Dorgelès, de Pierre Mac Orlan et dujournaliste Elie-Joseph Bois, rédacteur en chefdu Petit Parisien de 1914 à 1940, un des jour-naux les plus puissants de la TroisièmeRépublique. Elle réalisa leurs portraits, commeceux de grands hommes politiques de son

temps (Edouard Daladier ou AristideBriand). Pourtant, son parcours artistiquefut volontairement solitaire. Jusqu’à la finde sa vie, elle a poursuivi sa voie en cher-chant avant tout à exprimer sa vision de laréalité.C’est auprès de Jacques Martin (1844-1919), ingénieur chimiste et peintre lyon-nais, que Charmy apprend les rudiments dumétier. Grâce à la modernité de son mentor,

Corinne Charles

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rles LE MUSÉE PAUL-DINI À VILLEFRANCHE-SUR-SAÔNE PRESENTE LA

PREMIÈRE RÉTROSPECTIVE EN DATE DE L’ŒUVRE D’EMILIE CHARMY(1878-1974). LA MANIFESTATION RASSEMBLE PLUS DE CENT TOILESDE LA PEINTRE, DEPUIS LES DÉBUTS DE SA CARRIERE À LYONJUSQU’À SON PLEIN ÉPANOUISSEMENT À PARIS.

Exposition

Émilie CharmyUne expressionniste française

DOCTEUR EN HISTOIREDE L’ART

Petit ParisienPiana, CorseGrand nuAutoportait expres-sionnisteAutoportrait au pei-gnoir ouvertNappeLes Invalides.

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Exposition

AUTOPORTRAIT AU PEIGNOIR

OUVERT, vers 1916-19,

h. s/toile, 92 x 73 cm, coll. privée.

elle se forme dans un climat de liberté quiconvient bien à son caractère indépendantet farouche. En 1903, elle déménage àSaint-Cloud et expose pour la première foisà Paris au Salon des indépendants. Elleentre ainsi en contact avec les protagonistesdu courant artistique d’avant-garde del’époque, le fauvisme. Son style s’affirme

dans une palette colorée proche de la leur.Toutefois, elle n’adhère pas officiellementau groupe, même lorsqu’elle devient lacompagne du peintre fauve Charles Camoin(1879-1965). Entre 1906 et 1910, des séjours sur les rivesde la Méditerranée lui inspirent des pay-sages dominés par les tons bleus du littoral,en contraste avec les ocres et terres deSienne des rochers et maisons du sud(Piana, Corse). Des cernes noirs ou bleussombre entourent les larges aplats de cou-leur. En 1910, lors de son voyage avecCamoin en Corse, elle exécute des toiles quitémoignent de ses échanges artistiques

avec le peintre mar-seillais. Déjà à cettepériode, Charmypeint des tableauxqui montrent certesles contrastes colo-rés de la palettefauve, mais qui sontaussi celles des

GRAND NU, vers 1912, h. s/toile,

140 x 68 cm, coll.privée. © photoA. Ricci Adagp,

Paris 2008

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peintres du groupe Die Brücke au mêmemoment ; et la véhémence de la touche, lesgestes nerveux que l’on pressent appartien-nent à l’univers expressionniste. L’expressionnisme allemand, mouvementpictural mal connu en France jusque dansles années 60, est difficile à préciser sur leplan de l’art plastique car les artistesregroupés sous cette étiquette ont desstyles différents. Ils ont en commun toute-fois de privilégier leur réaction individuelle.Ce fut aussi le cas de Charmy, dont l’espritd’indépendance et la liberté d’action semanifesteront durant sa longue carrière(elle peint de 1895 jusqu’à la fin des années60). Comme les révoltés de la jeune peintu-re expressionniste allemande et autrichien-

Exposition

NAPPE, vers 1945-50

h. s/toile, 46 x 55 cm,

coll. privée. ©photo A. Ricci

Adagp, Paris 2008

Emilie Charmy (1878-1974), une destinée de peintre, cataloguede l’exposition. Textes de Sylvie Carlier, Corinne Charles, SandraMartin et Patrick Seale. Ed. musée Paul-Dini, Villefranche-sur-Saône 2008, 180 pages, 110 reproductions en couleur. 28 E€

Le catalogue

ne, elle est un caractèrerebelle et anti-conformisteégalement dans sa vie pri-vée. Peintre à une époqueoù les femmes ne pou-vaient se former à cemétier que dans des ate-liers privés, les établisse-ments publics leur étantfermés, elle fut aussi unemère célibataire en 1915,au cœur de la PremièreGuerre mondiale. Ce n’estqu’en 1931 qu’elle épouse-ra le peintre GeorgeBouche (1874-1941), pèrede son enfant.Dans une grande partie deson œuvre, elle montre savolonté de s’affirmer endehors des canons clas-siques, ce qui est notam-ment sensible dans sesnus. Certains tableaux ontune telle force d’expressionque les conventions sontbalayées. Elle peignaitrarement en faisant poserdes modèles. Cela freinaitsa liberté de conception etcontrariait sa gestuelle depeintre, spontanée, parfoissauvage. Dans le Grand nu,en représentant unefemme dénudée, maisayant conservé ses bot-tines, elle évoquel’iconographie d’une passerapide avec une prostituée.

En contraste avec les coloris ivoire du torse,elle appose des tons d’un bleu-vert puis-sant, qu’elle reprend sur les cuisses, vigou-reusement zébrées de blanc. Ses contem-porains notent la sensualité troublante et laprovocation qui se dégage de ses nus.A cette touche fougueuse qui habite sestableaux, Charmy ajoute des couleurs vivesqui renforcent l’expressivité des visages. A

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accomplit sur elle-même (Autoportrait aupeignoir ouvert). Elle transforme son appa-rence au gré de sa fantaisie, donnant unevision d’elle toujours renouvelée, comme sielle était toutes les femmes. Ses autopor-traits sont une chronique intime de sonhumeur ou de ses passions. Mélancolique,provocatrice, libertine, coquette, garçonnedes années 20 ou encore fantasque : chaquetableau reflète un état d’âme, que l’on peutapprécier dans l’exposition de Villefranche-sur-Saône. Outre cet aspect de son travail,la manifestation propose un vaste choix denatures mortes et paysages. Ceux de la der-nière période montrent une touche de plusen plus épaisse (Nappe), allant parfois auxlimites del’abstraction (LesInvalides). Une rareoccasion de décou-vrir des œuvres, pourla plupart inédites etconservées en mainsprivées.

Exposition

Emilie Charmy – Une destinée de peintreJusqu’au 15 février 2009 • Musée Paul-Dini2 place Faubert • 69400 Villefranche-sur-Saônewww.musee-paul-dini.comHeures d’ouverture : mercredi–vendredi 10h-12h30 et 13h30-18h,samedi et dimanche 14h30-18h

L’exposition

AUTOPORTRAITEXPRESSIONNISTE, vers 1909-12, h.

s/contreplaqué, 47x 38 cm, coll.

privée. © photo A.Ricci Adagp, Paris 2008

LES INVALIDES,vers 1950-55,

h. s/toile, 92 x 73cm, coll. privée. © photo A. Ricci

Adagp, Paris 2008

la manière des expressionnistes, elle struc-ture les traits en juxtaposant des tonsd’orange et rouge à d’audacieux rehauts debleu-vert (Autoportrait expressionniste).Malgré sa touche vive et bousculée, cettetoile exprime un état d’âme délicat et trou-blé, qui nous mène vers la mélancolie. Lesyeux, par leurs contours noirs épais commeles aimait Kees Van Dongen, et, d’une façon

encore plus prononcée, Alexej VonJawlensly, ajoutent au mystère. Sur le planformel, Charmy est ici proche des fentesnoires qui figurent les yeux sur les masquesafricains, dont la sculpture a influencé despeintres comme André Derain ou ErnstLudwig Kirchner.Comme les expressionnistes, Charmy privi-légie l’introspection et la met en images.Elle a réalisé une profusion d’autoportraits,en quantité difficile à évaluer. En effet, elleest son propre modèle pour de nombreuxtableaux, ce qui n’est pas de prime aborddécelable au vu des transfigurations qu’elle

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Le billet de Dany

> France Magazine : Vous avezécrit plusieurs ouvrages auto-biographiques : J’ai quinze anset je ne veux pas mourir,Grand Prix Vérité en 1954,paru chez Fayard en 1955, suivien 1957 de Il n’est pas si facilede vivre ; Embrasser la vie, en2001, toujours chez Fayard.Aujourd’hui, plus de cinquanteans après vos débutsd’écrivain, vous nous offrez,fidèle au même éditeur, LesAnnées Cannibales, évidem-ment le plus complet. Il m’asemblé que vous jetez surtoutes ces années passées, cesévénements vécus, un doubleregard. En premier, un regardd’historienne qui raconte savie, la vie et les mentalitésévolutives au cours de toutesces années. En second, unregard incommensurablementoptimiste sur l’avenir. Votreavis ?

Christine Arnothy : Lorsque j’ai étéprévenue en 1954 que je venaisd’obtenir le Grand Prix Vérité,j’habitais la Belgique. Je suis venueà Paris avec la seule petite robenoire que j’avais alors. Le GrandPrix Vérité m’a été remis au res-taurant Lucas Carton, place de laMadeleine à Paris (c’est d’ailleursen ces lieux que j’ai signé le pre-mier contrat avec mon éditeurFayard, au dos du menu du restau-rant).Toutes ces années passées auxcôtés de mon mari, ClaudeBellanger(1), m’ont permis d’être encontact avec une multitude de per-sonnalités du monde politique et

Dany Vinet

culturel. Certaines étaientbrillantes. Ce qui est intéressant etqui m’a poussée à écrire LesAnnées cannibales, c’est deconstater la transformation totaledes mentalités et du monde en cin-quante ans.Je n’ai jamais été optimiste. J’aigardé la lucidité noire de mon père,qui était un seigneur et avait unetrès mauvaise opinion sur l’êtrehumain. Au début de ma lutte litté-raire pour essayer de faire com-prendre à l’Ouest ce qu’était l’Est,j’ai cru que mes romans, dont le

contenu était toujours historique,servaient ce but. Je me suis trom-pée. Je me suis alors tournée versdes sujets plus internationaux. LeJardin noir (Julliard 1962) soule-vait, pour la première fois dans lalittérature européenne, la questionsuivante : la culpabilité des pèresest-elle héréditaire ou non ? Il y aeu plusieurs projets d’adaptationcinématographique du Jardin noir.Chaque fois, voyant comment lesujet aurait été déformé, j’ai ditnon. Il y a eu ensuite Un type mer-veilleux (Flammarion 1972), où je

ENTRETIEN AVECMADAME CHRISTINEARNOTHY, ÉCRIVAIN,LORS DE LA SORTIEDE SONAUTOBIOGRAPHIELES ANNÉESCANNIBALES.

cannibalescannibalesMes annéesMes années

Photo John Foley

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FRANCEMAGAZINE N°22 67 AUTOMNE 2008

Le billet de Dany

m’attaquais au problème de latransformation du psychisme d’unêtre humain qu’on a habitué à tuer.La guerre du Vietnam. Ce ne sontque deux exemples. On peutretrouver, en suivant la ligneconductrice de mes livres, un désirprofondément pacifiste et antira-ciste.L’optimisme ? Même le mot m’étaitétranger. La confusion a pu êtrecréée par le fait que je me suis tou-jours attaquée aux difficultésdiverses, ayant hérité de l’immenseénergie de ma mère. Mon père, quiétait un philosophe amer, croyait àla mort, ma mère à la vie. Je suis lemélange parfait de ces deux atti-tudes génétiques.

> Le bonheur que vous avezd’écrire se transcrit dans vostitres. Votre roman paru chezGrasset en 1978 ne s’appelle-t-il pas Le Bonheur d’une maniè-re ou d’une autre ? En 1980,vous obtenez le Prix Interalliéavec Toutes les chances plusune. En 1990, vous publiez chezPlon Une question de chance.La vie ne vous a pourtant pasépargnée. Qu’est-ce qui fait quevotre confiance en la vie soit sicontagieuse ? Est-ce le senti-ment d’avoir eu la “chance” desurvoler et de surmonter bonnombre de difficultés au coursde votre existence ?

Mes titres sont toujours au deuxiè-me degré. Il n’y a aucune “ simpli-cité biblique ”. Le Bonheur d’unemanière ou d’une autre estl’histoire d’un terroriste intellectuelqui veut faire sauter le barraged’Assouan. Toutes les chances plusune, c’est le parcours d’un socialis-te qui devient président de laRépublique et apprend la nouvellede son élection en pleine crise car-diaque. Tous les titres où “ bon-heur ” ou “ chance ” apparaîssentcachent des pièges et des énigmesà résoudre.Mon oxygène, mon équilibre, c’estl’écriture. Ni bonheur, ni malheur,l’écriture fait partie de ma vie

depuis mon adolescence. C’est uneforme d’existence.Par contre, et c’est peut-être là machance, je m’évade assez facile-ment d’un contexte pénible enconstruisant une histoire. Unexemple ? Je suis dans un aéro-port. Mon attention est soudainretenue par un individu à l’allureparticulière qui le différencie desautres. Discrètement, j’observequ’il a pour destination Sydney. Jerentre à la maison et couche sur lepapier les grandes lignes de monnouveau roman. Et c’est là que cebesoin vital d’écrire m’occupeentièrement. Pour être totalementdans la peau de mon personnage,je vais prendre l’avion pour Sydney,descendre dans le même hôtel quelui. Mon roman prend vie, le scéna-rio est en train de naître...

> Avez-vous l’intention ou l’enviede raconter sobrement votredifficile jeunesse à l’aîné devos petits-fils ou préférez-vousqu’il vous découvre en lisantvos ouvrages ?

Je m’en voudrais de l’influencer. Jepréfère qu’à la lecture de meslivres, il m’interroge ; et là, je luirépondrai. Non, vraiment, je préfè-re qu’il me découvre par lui-même.

> Pensez-vous que votremotivation et votre besoind’écrire auraient été lesmêmes si vous n’aviez pas eul’amour et la confiance absoluede votre père ?

Absolument ! Depuis ma plustendre enfance, j’étais habitée parce besoin impérieux d’écrire. Maisle fait que mon père croyait en moim’a beaucoup aidée.

> Si j’ai bonne souvenance, vousavez écrit une trilogieaméricaine sous unpseudonyme. Allez-vousbientôt nous donner la joie deconnaître ce qu’il advient deMrs Clark ?

Oh ! c’était au temps de mon épo-pée américaine. Ces romans vien-

nent d’être réédités sous mon vrainom. J’écris actuellement monnouveau roman. Je suis entière-ment dedans et ne pense qu’à cela.Après, donner une suite aux aven-tures de Mrs Clark... pourquoi pas ?

> D’avance, je sais que c’est unemauvaise question, mais,pardonnez-moi, je vais quandmême vous la poser : parmitous vos ouvrages parus à cejour, s’il vous fallait en choisirun, un seul, lequel serait-ce ?

Chaque roman, chaque récit estune parcelle de moi-même. Je netriche pas, je suis entière. Je lesaime tous. Mais je dois dire que j’aiune affection particulière pour LeBonheur, d’une manière ou d’uneautre.

> Combien de romans ?Je suis occupée à l’écriture de…mon trente-quatrième roman.

> Toutes traductions confondues,et elles sont nombreuses, vousêtes traduite en combien delangues ? Avez-vous une idéedu tirage global de votreœuvre ?

Ayant gagné le Prix Vérité, j’ai eu,en un an et demi, vingt-sept propo-sitions de traduction. J’ai quinzeans… est un des livres les plus lus.Lors du cinquantenaire du Livre dePoche en 2003, il a été annoncécomme l’un des quatre livres lesplus vendus en France ; cela repré-sentait plus de trois millions etdemi d’exemplaires uniquement enlangue française.Mon éditeur vient de me fairesavoir que je vais être traduite enlangue estonienne. C’est donc entrente-cinq langues que mes lec-teurs vont pouvoir me suivre. Quantau tirage global, je crois que nousavons dépassé depuis déjà un bonmoment les dix millionsd’exemplaires.

[1] Monsieur Claude Bellanger, résis-tant et gaulliste de la première heure,fondateur du Parisien Libéré.

cannibalescannibales

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FRANCEMAGAZINE N°22 68 AUTOMNE 2008

Rencontre

B A L L A D E I N T E M P O R E L L E

CONFIDENCES HÉDONISTES À LA MAISON BLANCHE

Igor et Grichka

Bogdanov

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FRANCEMAGAZINE N°22 69 AUTOMNE 2008

Rencontre

> Romantiques, émus par cette lumièreparticulière de la fin de l’hiver, celasemble peu en accord avec vospersonnalités ?

Nous sommes nés et avons passé notreenfance à la campagne, dans le Gers, sen-sibles aux rythmes des saisons, aux chan-gements constants du ciel. Nous restonshabités par cette magie, cette vie lente etforte. Nous en gardons le goût du rêve car

comme l’écrit Bachelard « une des fonc-tions de la rêverie est de réimaginer notrepassé, de nous maintenir en cette enfanceinterdite. » Et puis nous sommes tous lesdeux sensibles aux voyages que nous offrenotre regard, tout simplement.

> Une enfance préparant peu àl’interrogation sur l’origine del’univers ?

Mais si. Nous vivions dans le château fami-lial de Saint Lary, près d’Auch, forteresse duXIe siècle. A trois ans, nous nous projetions àla fois dans le Moyen-Âge, imaginant leschevaliers ayant vécu entre ces murs etdans l’avenir, pensant à ce que serait cettepropriété dans 1 000 ans. Très jeunes, nousnous sommes interrogés surl’intemporalité, voyageant dans le temps parl’esprit et les livres de la bibliothèque fami-liale dont les ouvrages de CamilleFlammarion “ Merveilles célestes ” et “ Lesterres du ciel ”, écrits de vulgarisation >>

Dans le ciel azur de mars éclaboussé de soleil, la Tour Eiffel ins-crit sa mythique silhouette et le Dôme des Invalidess’enflamme. Le double regard ambré des frères Bogdanov

s’attarde sur ce panorama depuis la terrasse du restaurant MaisonBlanche, perché sur le toit d’un immeuble Art Déco de l’avenueMontaigne. Les jumeaux, compteurs et conteurs du temps passé etdu temps à venir, marquent une pause, émerveillés par cet instantoscillant entre deux saisons. Avant de dévoiler des pans méconnus deleur personnalité. de disserter sur l’origine de l’Univers, leur quêteétemelle. La voix de l’un se mêlant à celle de l’autre pour ne fairequ’une. Réellement.

COMPAGNONS DE VOYAGE : IGOR ET GRICHKA. DES GENTLEMENAMOUREUX DE LA TERRE, PASSIONNÉS D’ART, DE CHANT, DE POÉSIE. DESVISIONNAIRES HEUREUX DE PARTAGER LEUR SAVOIR, LEURSDÉCOUVERTES, LEURS INTERROGATIONS. DES HOMMES A L’OPPOSÉ DEL’IMAGE D’EXTRATERRESTRES QU’ON LEUR PRÈTE. AMOUREUX DE LA VIE.

PAR ANNE-MARIECATTELAIN-LE DU

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FRANCEMAGAZINE N°22 70 AUTOMNE 2008

Rencontre

astronomique datant de la seconde moitiédu XIXe siècle. Nous avons, dès 4-5 ans,dévoré des ouvrages de science-fiction, puistrès vite rédigé des notes de lecture quinous servaient de référence.

> Avec, l’un comme l’autre, les mêmespréoccupations

Oui, une curiosité égale, partagée. Aînésd’une dizaine d’années d’une fratrie de six,nous avons vécu en autarcie. Toujoursensemble. Avec la chance de vivre auprès denotre grand-mère, aristocrate autrichienne,très cultivée parlant onze langues. Nousavons bénéficié d’un environnement stimu-lant. Elevés à la fois comme des enfants dela campagne mais dans un milieu intellec-tuel et artiste, tout à la fois. Nous étionsnourris des grandes utopies du XIXe siècle.

> C’est toujours le cas ?Oui, nous avons toujours les mêmes centresd’intérêt et nous dialoguons en permanen-ce. Si nous ne sommes pas ensemble, nousnous téléphonons. Car chacun mène sa viesous son propre toit, avec ses compagnes.Igor a des enfants, moi pas encore préciseGrichka, les deux ajoutant « ces plages deliberté, de récréation alimentent notrecréativité commune ».

> Jamais inscrits dans la rivalité ?Jamais. Nous sommes complémentaires.Cette complémentarité est la force de lagémellité, elle prolonge la magie del’enfance. Nous sommes une entrepriseculturelle “ gémellisée ”. Nous étudions,cherchons, écrivons ensemble commenotre dernière thèse sur “ Les secrets del’origine de l’Univers ” et tous nos livres.

> Leur théorie sur le secret de l’Univers vuepar le professeur Lubos Malt. Jeune physicienthéoricien, spécialiste de la Théorie desCordes. Choqué par les procés intentés auxBogdanov sur leur théorie de l’origine del’univers, il prend contact avec eux en 2005.« Nous connaissions ses travaux et avons étéflattés de l’intérêt manifesté pour nos propresrecherches » confient les deux frères. LubosMalt livre ses conclusions, persuadé que,comme l’affirment les frères Bogdanov, ilexiste un “ code mathématique ” à l’originede l’univers comme il existe un code géné-tique à l’origine des êtres vivants.

L’équation Bogdanov, 235 pages, Pressesde la Renaissance, 19 euros.

> Le commencement du Temps, chezFlammarion parution en septembre. LesBogdanov, de manière pragmatique, résume-ront, pour le grand public, leurs dernièresthèses sur l’origine de l’Univers.

> Un beau livre, à paraître aux Editions duChêne en novembre. Dinosaures et autresêtre vivants disparus, continents, planètes,etc. seront rassemblés dans cet ouvrage.

L’actualité littéraire des Bogdanov

>> Notre gémellité nous permet d’avancer plusvite, de faire coexister nos projets, de divisertous les temps morts par deux, voire partrois. En effet, nous sommes un en deux. Ceque nous bâtissons, nous le bâtissons àdeux.

> Identiques, alors ?Nos différences sont de l’ordre de la nuance.Igor est né le premier avec 300 gr de plus, ilreste celui qui ouvre le chemin, le plus fortphysiquement, le plus rapide, le premier decordée, le plus apte à résoudre les pro-blèmes mécaniques, matériels, possédantune meilleure praxie sur le monde. Il estaussi doté d’un sens de l’humour, de la déri-sion hors du commun et d’une capacitéd’émerveillement étonnants. C’est lui lephysicien. Grichka, plus intellectuel, possè-de une puissance de feu mentale très forte.Au moment de l’écriture commune de leurthèse, Grichka a toujours été le leader. Il nese décourage jamais, fait sienne toute abs-traction. Il possède le vrai courage, celui del’esprit. C’est le mathématicien du duo.

> Voués à la science ?Pas uniquement. Tout nous intéresse. Nouspratiquons la musique, piano, luth, banjo.Nous chantons des airs de la Renaissance,donnons des concerts avec des jeunesfemmes soprano. C’est une façond’entretenir le lien avec l’imaginaire, lepassé, d’approcher une volupté esthétique,poétique, très douce et profonde. Nous pla-nons dans un espace-temps qui n’est pas lenôtre doté d’ailes technologiques grâce à lascience-fiction, poétiques grâce à la lecture,esthétiques grâce à la musique. Comme lespoètes ailés qu’évoquent Baudelaire,

Lorsqu’on boit une

goutte de vin, on

savoure les

premiers moments

de l’univers. Les

premiers noyaux

d’hydrogène.

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FRANCEMAGAZINE N°22 71 AUTOMNE 2008

RencontreRimbaud, Mallarmé. Nous jouissons de lavie dans le sens premier du terme.

> Et dans cet espace, le devenir de notreplanète terre vous préoccupe ?

Nous vivons probablernent la période laplus dangereuse de l’histoire “ humano-technologique ”. Les taux de destruction etde construction étant équivalents, tout peutbasculer, à tout moment et nous pouvonsdonc être empreints d’un certain pessimis-me. Mais comme le disait Malraux, « il yaune réponse de civilisation à tout problè-me de civilisation. » Nous sommes donc àcette époque charnière, passionnante, exal-tante où tout est possible, le pire comme lemeilleur car nous n’avons pas encore inté-gré la rapidité des changements.

> Vous croyez vraiment ?Dans la première moitié du XXe siècle, lesavoir, c’est-à-dire nos connaissances, dou- >>

blait tous les trois ans. Aujourd’hui, tous lessix mois, l’Histoire, la connaissances’accélèrent. Ce sont des faits, pas de lascience-fiction. Nous sommes à la veille dequatre grandes révolutions :• une révolution des sciences de la vie avecune connaissance pointue de notre codegénétique permettant de lutter contre levieillissement des cellules et d’augmenterl’espérance de vie. Elle sera de 200 ans en2020, autant dire demain. D’ores et déjà, lescentenaires ne sont plus une exception. • une révolution des sciences del’information qui accélère nos moyens decompilation, d’accès à la connaissance.Cette révolution est quotidienne, elle nousconcerne tous. • une révolution de l’énergie avec la maîtri-se de l’acquisition d’énergies vertes nonpolluantes : électricité embarquée rempla-çant les hydrocarbures, énergie de fusion

Rien ne remplacera

jamais le bruit

magique du vent

dans les feuilles

’’‘‘

Bacchus est-il un dieu que vousvénérez ?Nous sommes nés dans le Gers, paysdu Madiran et de l’Armagnac. Nousapprécions le vin mais en goûteursplutôt qu’en buveurs. Nousl’appréhendons comme des amateursd’art. Nous aimons ses nuances, sesarômes, son parfum, ses subtilités,particulièrement ceux des grandscrus de bordeaux et de certainsChâteauneuf-du-Pape.

Vos premiers souvenirs liés auvin ?Nous avions des plants de Côtes deGascogne rouge sur la propriété fami-liale. A cinq ans, nous participions àl’élaboration du vin. Préparation dela terre, vendange, foulage desgrappes, distillation, nous étions là àchaque étape. Comment oublier cettefièvre qui anime alors les hommes etles lieux ? Comment oublier cesgrands foudres rustiques alignés dansla cave ? Ce sont des images quiresurgissent aux moments les plusinattendus de la vie.

Quelle émotion vous procure levin ?Toujours la même, aussi intense.

Celle de voyager dans le temps carlorsqu’on boit du vin, on savoure lespremiers moments de l’univers, latoute première seconde après le big-bang. On avale des noyauxd’hydrogène formés à cet ultime ins-tant, ni avant, ni après. Nous possé-dons quelques vieilles bouteillespresque centenaires de vin etd’Armagnac. Lorsque nous lescontemplons, nous sommes hypnoti-sés par cette suspension du temps“ contenue ” dans le verre, suspen-sion qui peut s’éterniser.

Avec qui partagez-vous un boncru, autour de quel type demenu ?Autant, probablement à cause de nosorigines russes, nous sacrifions aurituel du thé plusieurs fois par jour,autant nous ne buvons du vin quedans des moments d’exception, avecdes mets qui le méritent et des hôtesque nous souhaitons honorer. Nousnous contentons pour notre part de legoûter. Pour le plaisir du partage etnon de l’ivresse.

Rêvez-vous de posséder des vinsextraordinaires ?Oui, les premiers qui seront produits

sur d’autres planètes. La premièrecuvée de Mars ou de Vénus parexemple.

Planètes et cocktails sourcesd’inspiration. Quels mélangespour quelles planètes ?Cinq planètes se prêtent à ce jeu desmélanges car elles sont solidescomme la Terre, Mars, Vénus, Titan,Pluton et Europe, satellite de Jupiter.MARS, planète suave, smootie :banane, mangue, un trait de fraisepour l’acidité mais pas d’alcool.VÉNUS, planète chaude, lumineuse,veloutée, un jus de mangue orangé,un zeste de banane, une once derhum blanc et de la glace. TITAN,planète froide, un cocktail à base dechocolat chaud, pourquoi pas viennois comme nos origines, relevéd’une goutte de liqueur de café. PLUTON, planète froide, du thé trèsparfumé, un Earl Grey, avec unelarme de whisky évoquant la tourbe,ou un grog ambré relevé de zestes decitron et d’orange. EUROPE planètede glace, un mélange proche d’unplanteur avec de l’orange, des épices,du rhum en quantité mesurée et unsirop de canne parfumé, venu desTropiques.

Questionnaire enivrant… interplanétaire

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Rencontre

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> Parés à vivre sous bulle alors, privésdes plaisirs de notre planète ?

Nous ne vivrons pas sous une bulle car,alors, l’atmosphère sera respirable et nouspourrons ériger des maisons toutes simplesde pierres et de bois. Et nous pourronsreproduire là-haut, la vie d’en bas. Celle desterriens, en essayant si possible même del’améliorer. Et puis c’est un voyage, avec unretour programmé. Pas une mise en orbitepour l’étemité.

thermo-nucléaire inépuisable qu’on ne saitpas encore extraire. Vers 2050, toujoursdemain donc, on devrait posséder les tech-nologies adéquates pour cela, plusieurséquipes de chercheurs s’y emploient. • une révolution spatiale qui, grâce à la miseau point de systèmes de propulsion ultra-rapides, nous autoriserait à coloniserl’espace et, en priorité, les planètes solides,habitables comme la Lune, Mars, Vénus. LaNasa se penche sérieusement sur cesaspects. Nous en parlons nous-mêmes encommission avec de hauts responsables.Savez-vous qu’en ensemençant avec desalgues bleues la surface de Vénus, parexemple, on créerait de la pluie, de la végé-tation, du ciel bleu ? Dans une trentained’années, des astronautes y cultiveront leurjardin. Ils y planteront des légumes maisaussi des vignes, c’est prévu. Alors, unecuvée de l’espace sur sa table, c’est aussipour demain.

> Prêts pour embarquer au long cours,pour cette mise en orbite ?

Immédiatement, sans l’ombre d’une hésita-tion, sans l’ombre d’une appréhension maisau contraire avec une grande impatience,une extrême curiosité.

> Sans rien regretter du mondeterrestre ?

Si, le bruit du vent dans les feuilles, lapesanteur, la gravité terrestre, le cycle dessaisons. Le reste, on peut, grâce àl’ordinateur, l’embarquer : tous les livres dumonde, toutes les musiques, toutes les pho-tos, toutes les connaissances.

Accroché dans le ciel de Paris, avec pour vis-à-vis laSeine, le Dôme des Invalides et la Tour Eiffel, le res-

taurant Maison Blanche dévoile, derrièreses larges baies vitrées l’un des paysagesles plus romantiques de la Planète.Propice lorsque les lumières de la villescintillent aux tête-à-tête amoureux etgastronomes et la nuit du vendredi à dessoirées trendy au White bar animé par unsommelier expert en cocktails détonantset en champagnes millésimés. Le journalL’Expansion qualifiait récemment MaisonBlanche d’établissement parmi les plus élégants de Paris,tandis que le magazine américain Forbes lui décernait le

titre très enviable du meilleur restaurant d’affaires dumonde devant neuf établissements prestigieux. C’est vrai

que le professionnalisme, la passion,l’imagination, l’accueil de Bruno Frank,directeur des lieux, alliés aux talents et àl’inventivité des Frères Pourcel, consul-tants culinaires, imposent dorénavantMaison Blanche comme une table incon-tournable dans la Capitale. Avec pourrécompenser la fidélité des aficionados,une carte Club Maison Blanche, sésamepour obtenir des conditions privilégiées

et jouir d’un service Montaigne Concierge by MaisonBlanche pour faciliter la vie quotidienne des membres.

Maison Blanche, comète éblouissante

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FRANCEMAGAZINE N°22 74 AUTOMNE 2008

Voltige

1ère DAME DEFRANCE DANS

NOS CŒURS.LA VIE DE

COUPLE EN3 DIMENSIONS

Marianne Shaw

Marianne Shawdonnant des

instructions àCoralie

Masle-Callu.

La fille de l’airLa fille de l’air

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FRANCEMAGAZINE N°22 75 AUTOMNE 2008

Voltige

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Rares sont les patrouilles de voltige aérienne, encore plus lorsqueles pilotes sont des civils. Dans la patrouille, Marianne est le

Leader, et Adam Aillié. Adam et Marianne effectuent 12 figures enmoyenne en 20minutes dedémonstration,leur programmeest visible par lepublic dans unefenêtre restrein-te au dessus desspectateurs.Adam est étagéà 1 m 50 au des-sus du Cap 10de Marianne et2 m derrière. Ilss’entraînent 3fois par semaine. Le rayon de cercle de l’Aillié est plus grand quecelui du Leader qui vole réduis à 20 pouces d’admission au lieu de25 pour l’Aillié. Marianne et Adam jouent sur l’illusion d’optique dupositionnement de la patrouille vis-à-vis du spectateur.

Contraintes techniques

Franc-Comtoise, née à Besançon, issued’une famille de quatre enfants, élevéedans une ambiance bon enfant typique-

ment helvète. Marianne fait partie de l’équipede France Voltige Aérienne, pendant 15 ans. Ellefut 7 fois championne de France et a récolté 17médailles lors de championnat d’Europe et dumonde. Elle totalise 4 700 h de vol. (En Europe,seuls 5% des pilotes sont des femmes). Elle estmère de deux filles.Avec le CAP10 F-GOUM de Marianne et celuiF-BXHE d’Adam, ils totalisent 20 000 vols devoltige. A 250 km/h, les ailes à quelquesmètres, avec la même vitesse et le mêmerayon, ils effectuent des acrobaties fabu-leuses. Lors d’un concours de voltige, voici leslimites de l’espace auxquelles doivent selimiter les avions compétiteurs tels quedéfini par la Fédération AéronautiqueInternationale.D’après un témoignage de Clémence, pilote

de ligne à Air France et Christophe, piloteprofessionel Hélicoptère qui furent passa-gers de Marianne et Adam, la sensationdurant le vol relève de l’effet miroir : « voirce qui se passe dans l’avion comme si tu tevoyais de l’extérieur avec comme toile defond le Mont Blanc et le lac d’Annecy. »Après les avoir admirés au Fly In dePrangins dans le canton du Vaud l’an der-nier, je puis vous assurer qu’il faut surtoutune grosse dose de talent et de confiancemutuelle, un sens du rythme au fil de lamusique et du spectacle tout en restant trèsprofessionnel quant aux règles de sécurité. Sur votre table de chevet, à côté du livre deSt-Exupéry, le Petit Prince, retrouvez unetranche de vie de Marianne Shaw dans sonlivre “JEUDI 12”, une vie à l’envers, paru en1996 aux Editions du Choucas préfacé par

Bernard Chabbert et lapatrouille surwww.CAPTENS.fr Adam et Marianne SHAWnous éblouieront les 2 et 3août à Courchevel et le 20et 21 septembre à Varazzeet San Remo, en Italie.Venez admirer une choré-graphie artistique rythméeavec un programmerenouvelé. La voltige aérienne estcodifiée en un certainnombre de figures de base.Les enchaînements decelles-ci, dans l’un oul’autre sens, gauche oudroite, permettent desvariantes quasi infinies :

Boucle, Tonneau, Vrille, Immelmann ouRétablissement normal, Rétablissementtombé, Renversement, Déclenché, Viragedos, Remontée dos, Passage par l’avant,Tonneaux en virage.Cette année, la patrouille Captens est spon-sorisée par IOA (www.ioa.fr) dont le métierest l’Ouvrage d’Art, les bâtiments publics,Tunnels et équipement autoroutiers.

CORALIE MASLE-CALLU

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FRANCEMAGAZINE N°22 76 AUTOMNE 2008

Voltige

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Carrière et recordsMarianne effectue un baptême de voltigeen Suisse à Porrentruy en Bûckert à 22ans. A la Ferté Alais, elle vole avec JeanSalis. En 1970, Marianne fait le tour deFrance des jeunes pilotes avec Montaine.En 1972, elle croise Philippe Bobet, le filsde Luison Bobet. En 1974, elle effectueson cycle voltige sur Stamp avec JeanEyquem. Elle passe son pilote profession-nel en Suisse à l’école IFR des Ailes. De1978 à 1993, Marianne fait partie del’équipe de France. En 1988, elle partici-pe au Championnat du monde de voltige àCalgary au Canada sur DL260, à celuid’Yverdon Les Bains dans le canton deVaud en 1990, puis à Bex dans le Valaisen Suisse. En 1989, elle tourne un film“Pirouettes” dans le Mont Blanc. Elleeffectue également une traversée de laManche sur le dos. En 1992, elle ren-contre en Floride sur CAP231 la “FrenchConnection” et M. Auguste Mudry lors dela finale Breitling. Elle sera plus tarddirecteur technique pour une saison de lacoupe de voltige Breitling. Autres étudesMarianne a effectué des études à l’Ecolede Commerce de Genève. Elle est égale-ment thérapeute, coach en PNL,Kinésologue. Marianne a réalisé sesétudes à Inteno et à l’Institut desPerspectives Humaines à Genève.

> Comment l’idée de devenir pilote de voltige vous est-ellevenue ?

A 15 ans, Marianne effectue son premier baptême de vol en DR221car elle avait gagné un prix de compétition de ski de l’Aéroclub deDijon. Elle voulait être monitrice de ski. Mais à 19 ans, elle com-mence à piloter.

> Quel est votre héros dans la réalité ?Auguste Mudry, et la French Connection avec lesquels Adam et moiétions amis.

> Pensez-vous que votre côté atypique résulte d’une envie deliberté ?

Peut être, mon père m’avait écrit un poème : « Petit oiseau quit’envoles vers tous les horizons de France. »

> Quels souvenirs gardez-vous de vos multiples crash sanségratignures, surtout celui de 1987 ?

Les autres étaient étonnés que je sois indemne. J’ai un bon “angegardien”.

Questions à la Proust : de ses propres mots, Marianne nous décoif-fe en voltige et nous endort en hypnose.

> Quelle est votre devise ?« Qui sait ce qu’il advient d’un message transmis aux nuages. »

> Quelle est votre recette ?Cette passion exige du temps, de l’énergie, de l’émotion. « La vol-tige m’a appris la vraie valeur de voler de ses propres ailes au senspropres comme au figuré. »

MERCI À MARIANNE & ADAM SHAW

INTERVIEW ADAM ET MARIANNE SHAWPATROUILLE CAPTENS

Notre Marianne de France, d’exploits en bonheurs

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Les carnets de voyage de Kathereen Abhervé

Jeux d’ombre et de lumière dans le cloître

L’Abbaye d’Ambronayou l’histoire d’une reconversion réussie

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Le festivalier qui pénètre dansl’église abbatiale comprend,quand à lui, pourquoi Alain

Brunet, en 1980, y programma les pre-miers concerts fondateurs du Festivalde musique baroque d’Ambronay,devenu depuis, l’un des événementsmusicaux les plus importants deFrance.

Il était une fois l’Abbayed’Ambronay Ainsi pourrait commencer l’histoirede cette abbaye fondée autour del’an 800 par Saint Barnard, officierde Charlemagne. Edifiée en un lieuhabité dès l’antiquité, sur le versantoccidental des monts du Bugey,entre le trio infernal formé par laSavoie, le Dauphiné et la France,l’abbaye d’Ambronay n’a cessé,durant un millénaire, de s’agrandiret de se transformer selon les évé-nements et les congrégations demoines qui l’occupèrent. Echappantà la Révolution en acceptant pen-dant près de deux siècles de servirla république, elle accueille aujour-d’hui un festival de musique et uncentre culturel de rencontre.De l’époque de sa fondation, il restepeu de traces. Mais l’on sait quemalgré l’anarchie qui suivit la dislo-cation de l’Empire de Charlemagneet les invasions dévastatrices desSarrasins et des Hongrois, l’abbayerattachée à la Règle de Saint Benoît,prospéra. En deux siècles, lesmoines étendirent considérable-ment leur domaine et obtinrent laprotection de Rome. Cette prospéri-té attira artisans et commerçants.L’abbaye se plaça alors sous la pro-tection du Comte de Savoie (1282).Un siècle plus tard, la ville etl’abbaye s’abritèrent derrière de

solides remparts dont il subsisteencore la haute Tour des Archives etla Tour Dauphine. Protection illusoi-re qui n’empêcha pas le pillage de laville et l’incendie de l’église.L’abbaye continue toutefois às’enrichir et la Règle se relâche. Laréforme catholique voulue par leConcile de Trente y mettra bon ordreet la Congrégation de Saint-Maurs’installe à Ambronay en 1652.Renouant avec la vie monacaleauthentique, les mauristes restau-rèrent et transformèrent les bâti-ments, rassemblant les archives,

fondant une école, jus-qu’aux jours noirs de laRévolution qui abolit lesordres religieux et disper-sa la Congrégation. Tout d’abord transforméeen prison, l’abbaye abritaensuite des soldats,devint une école, puisaccueillit des logementssociaux. Autantd’attributions étonnanteset de réaménagementssinguliers qui ont évité àl’ensemble des bâti-ments, malgré quelquesmutilations, d’êtredémantelés comme lefurent de nombreux édi-fices religieux vendusaprès la Révolutioncomme carrière depierre ! L’église, quant àelle, après avoir ététemple de la raison,devint l’église paroissialeet le demeure aujour-d’hui.

Un long sauvetageLe visiteur ne se doute pas, endécouvrant la belle harmonie qui sedégage de l’ensemble de l’abbaye,qu’elle résulte d’un savant assem-blage de styles élaboré au coursd’un millénaire. Toutefois, les rema-niements effectués au cours decette longue gestation, particulière-ment ceux du XIIIe et XVe siècles, ontquelque peu effacé les époquesantérieures. L’église, grand vais-seau de 60 mètres de longueur et de17 mètres de hauteur, résume,

quant à elle, plu-sieurs siècles

LE VISITEUR QUI, DE LOIN,DÉCOUVRE LA BLANCHE ABBAYED’AMBRONAY SE DÉCOUPANTSUR L’ÉPAISSE TOISON DEFORÊTS DES MONTS DU BUGEY,COMPREND POURQUOI LESMOINES, IL Y A 1200 ANS,S’ARRÊTÈRENT EN CE LIEUSOLITAIRE.

Ci-contre : Un soir de concert

dans l’abbatiale

Ci-dessous : Sous les voûtes de

l’abbatiale.

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FRANCEMAGAZINE N°22 80 AUTOMNE 2008

d’architecture : piliers rectangu-laires pré-romans, frise de pierre duXIIIe, voûte de la nef et magnifiquesverrières de vitraux du XVe. La partieinférieure du cloître date de lamême époque, surélevé deuxsiècles plus tard par les moinesmauristes qui relièrent les deuxtours par une infirmerie. Ils édifiè-rent également un grand corps debâtiment de 60 mètres long com-prenant cuisine, réfectoire et cel-lules des moines.Face aux dévastations de la révolu-tion, des intellectuels commeCharles Nodier, Victor Hugo ouMérimée combattent contre le van-dalisme et pour lasauvegarde desmonuments deFrance. Créationd’une commissiondes monuments his-toriques en 1837.L’église d’Ambronaydevra attendre 1889pour être classée, lecloître en 1905.Depuis, plusieurscampagnes de res-tauration se sontsuccédées jusqu’auxrécents travauxentrepris depuis1980 pour lesbesoins du Festivalde musique qui, en 93, créel’Académie baroque européenne,puis en 2003, le Centre culturel derencontre. Les festivaliers qui déambulentdans le cloître pendant lesentractes, ne se doutent certaine-ment pas qu’il fut jadis cour de pri-son puis servit de grange aux villa-geois, et que la plupart des magni-fiques dentelles de pierre desfenestrages gothiques avaient dis-paru. D’autres rénovations sont pré-vues qui permettront dès cetautomne d’accueillir récitals etconférences à la Tour Dauphine fraî-chement restaurée. Ces prochainesannées prévoient la réhabilitation dulong bâtiment de l’aile sud datant duXVIIe siècle, qui retrouvera enquelque sorte sa fonction première,

puisqu’il permettra d’accueillir etd’héberger artistes, chercheurs etjeunes musiciens. En attendant latransformation de ces lieux encoreendormis, la plupart des grandsconcerts de la 29e édition du festivalprendront place, du 18 septembreau 12 octobre prochain, dans lamagnifique abbatiale, certains, plusprosaïques, s’installeront sous unvaste chapiteau de toile dressé der-rière l’abbaye, d’autres enfin pren-dront place dans quelques églisesdes alentours, au monastère royalde Brou, au théâtre de Bourg-en-Bresse et à la cathédrale de Belley.Les festivaliers pourront ainsi

découvrir quelques beauxexemples du patrimoinearchitectural de la régionégalement connue pour sa

richesse ornithologique et la beautésauvage de ses paysages.

Femmes, le génie interdit ?Depuis 2003, le festival est devenuune véritable caisse de résonancedes thématiques explorées par leCentre culturel de rencontre. Leprogramme du prochain festivalconcocté par Alain Brunet, directeurdu Centre et fondateur du festival,éclairé par les précieux conseils deCatherine Cessac, chercheur etmusicologue, va donc tenter, à lasuite des réflexions faites par lecentre autour des liens entre lamusique, la femme et le sacré, deréhabiliter les femmes composi-trices, interprètes, du Moyen-Âge ànos jours, d’ici et d’ailleurs, restéespour la plupart inconnues.

La thématique est peu ordinaire carsi les femmes écrivains et peintresfont partie depuis longtemps dupaysage culturel et sont considé-rées comme des créateurs à l’égalde leurs collègues masculins, lescompositrices, en revanche, fontencore exception, surtout dans lessiècles passés. Pourtant, lesfemmes composèrent, mais la plu-part du temps dans l’ombre d’unépoux, d’un père ou d’un frère. Onpense bien sûr à FannyMendelssohn, compositrice detalent qui ne publia jamais sous sonnom et dont les œuvres furent“ récupérées ” par son frère Félix

auteur du célèbreSonge d’une nuitd’été. A ce propos,

une rencontre internationale“ Musique, femme et interdits ”offrant conférences, débats etconcerts, se déroulera à Ambronaysous la direction scientifique d’AlineTauzin, les 3 et 4 octobre prochains.

Les femmes compositricesLe festival s’ouvrira sous la baguet-te de Marie-Laure Teissière, par unconcert dédié aux femmes composi-

Effervescencedans le cloître

avant un concert.

La paix ducloître.

Les carnets de voyage de Kathereen Abhervé

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FRANCEMAGAZINE N°22 81 AUTOMNE 2008

trices du XVIIe au XXe siècle. Avec desextraits de l’opéra Céphale etProcris d’Elisabeth Jacquet de laGuerre, on découvrira le premieropéra écrit en France par unefemme, puis des œuvres choralesde Fanny Mendelssohn entreautres(21.09). Le Concerto Soavedirigé par Jean-Marc Aymes accom-pagnera la soprano Maria CristinaKiehr dans un programme dévoluaux compositrices italiennes duSeicento, présentant des œuvres deFrancesca Caccini, CaterinaAssandra et de la cantatrice virtuo-se et compositrice exceptionnelleBarbara Strozzi (5.10) dont deux

autres concerts révèleront lesmultiples talents (10.10 et 12.10). D’autres femmes compositricesseront célébrées comme la si

talentueuse Lili Boulanger disparueprématurément, sa sœur Nadia,Betsy Jolas, Christine Menneson etAdrienne Clostre (27.09).

Les femmes cachéesChristina Pluhar à la tête del’Arpeggiata ouvrira la thématique“ des femmes cachées ” en propo-sant un concert où PhilippeJaroussky ressuscitera des œuvresécrites en Italie au milieu du XVIIe

pour les castrats remplaçant lesfemmes interdites dans les églises

(18.09). Les femmes cachéescomme Les demoiselles de SaintCyr, jeunes filles nobles maispauvres protégées par Madame deMaintenon dont s’est inspirél’ensemble vocal féminin dirigé parEmmanuel Mandrin qui interpréterales Leçons de ténèbres de Couperin(28.09). Egalement composé pourles jeunes filles des ospedale deVenise, l’oratorio S. Petrus & S.Magdalena de J. Hasse, sera recréépar l’ensemble Akadêmia deFrançoise Lassere (4.10). Autreconcert très attendu, la recréation,par l’ensemble Doulce Mémoire deDenis Raisin Dadre, d’un concertsecret donné à la cour du ducAlphonse d’Este par les célèbresdames de Ferrare, trois musi-ciennes exceptionnelles qui nechantaient que de la musique inédi-te composée pour elles, pour uncercle restreint d’invités prestigieuxdu duc (4.10).

Les femmes représentéesUn troisième hom-mage sera rendu auxgrandes figuresféminines commeSainte Cécile, marty-

re et patronne des musiciens (20.09)ou Theodora qui inspira à Haendell’un de ses plus beaux oratorios,sera dirigé par Christoph Spering(3.10). Une grande poétesse alle-mande du XVIIe, Catharina Reginavon Greiffenberg jusqu’alors incon-nue, inspira, quant à elle, une com-position pour chœur et viole degambe à Philippe Hersant répon-dant à une commande du Centreculturel. Cette création mondialesera donnée par Les Solistes deLyon-Bernard Tétu et ChristinePlubeau à la viole (2.10). GabrielGarrido à la tête de l’EnsembleElyma restituera les pleurs de lapauvre Ariane abandonnée sur sonrocher et la fureur de Clorinde dansun spectacle chorégraphié présentésous le chapiteau (28.09) où serontégalement jouées Les frasques duCapitaine Le Golif dit Borgnefessepar le Concert de l’Hostel Dieu deFranck Emmanuel Comte et par la

Cie Opéra Théâtre. Cet opéra“ maritime et familial ” sera propo-sé dans une mise en espace d’AndréFornier (9.10). D’autres concerts, nombreux, ren-dront hommage aux femmes d’hiercomme la cantatrice italienneLeonora Baroni ou MademoiselleCertain, célèbre claveciniste oubliéedu Grand Siècle, aux femmescheffes d’orchestre et interprètesd’aujourd’hui, Nicole Corty,Laurence Equilbey, Christina Pluharet Marie-Laure Teissèdre, la violo-niste Mira Globeanu et la clavecinis-te Aline Zyberajch, aux femmesd’ailleurs avec les voix d’Assurd,Houria Aïchi, Saira Begum etFrançoise Atlan.Enfin, le festival qui, depuis 1993,s’est doté d’une Académie baroqueen vue de la formation et del’intégration professionnelle desjeunes interprètes, fera peau neuvecet automne en proposant des aca-démies plus adaptées aux besoinsdes chanteurs et des instrumen-tistes.D’une part, l’Académie Solistes pro-posée aux jeunes chanteurs, pré-sentera, sous la direction de SergeSaitta, Les tronqueurs, opérad’Antoine Dauvergne, qui sera pré-senté au Théâtre de Bourg-en-Bresse dans une mise en scène dePierre Kuentz (25.09). L’AcadémieConcert regroupant, quant à elle, lesjeunes instrumentistes del’Académie dirigés par Jean Tubéry,proposera sous les hautes voûtes del’abbatiale, un programme dévolu àGiovanni Gabrielli (26.09). Si ce savoureux programme musicalne vous a pas rassasié, vous pourreztenter une expédition au logis abba-tiale (à côté de l’abbatiale) pourdéguster les menus gastrono-

Centre culturel de rencontrePace de l’Abbaye – BP 3 – 01500 AmbonayLocation : +33 (0)4 74 38 74 04www.ambronay.org

Renseignementset réservations

La façade de l’abbaye.

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FRANCEMAGAZINE N°22 82 AUTOMNE 2008

Art de vivre

Depuis 30 ans, Alain Baraton a le privilègede succéder aux jardiniers en chef du roi,un poste hautement envié et on le com-

prend lorsqu’on sait que Le Nôtreétait le seul devant lequel Louis XIV s’inclinait etque le Général De Gaulle avait une telle affec-tion pour Versailles que, lorsque son emploi dutemps le lui permettait, il démarrait invariable-ment sa journée par la visite des jardins. Unecentaine de jardiniers l’aide à créer, dans les850 hectares de Versailles, de véritables œuvresd’art à l’image des toiles de Claude Monnet ouen s’inspirant de la magiedes grands chefs de la restauration, au gré de

sa fantaisie et… des graines disponibles.

> Véronique Bidinger : Alain Baraton,30 ans au service des jardins deVersailles, pas de lassitude àl’horizon ?

A.B. : Versailles a fait de moi un hommelibre et heureux, peut-on se lasser d’une

telle félicité ? Ma seule contrainte est la sui-vante : « en matière de plantation, celui quia raison est celui qui possède les graines. »Ces derniers temps, les tubéreuses sontredevenues à la mode, on en replante doncdavantage, comme les Lilas (ou Syringua, nepas confondre avec le seringa), je tiens aussicompte des couleurs qui suivent égalementun courant ; ainsi, plus de couleurs vives,jugées souvent vulgaires, mais, au contrai-re, un choix de teintes pastels, douces pourle regard.

> Vous faites un parallèle entre l’art dujardinier et celui du cuisinier.Qu’entendez-vous par là ?

Considérons le jardin comme un plat : desarômes s’échappent de part et d’autre ; lesdeux doivent être agréables à regarder. Ilsreçoivent tous deux le mot partage en héri-tage, on désire en faire profiter ceux que l’onaime ; enfin, ce sont deux applications artis-tiques qui déclinent la manièred’accommoder les restes. Comme en éco-nomie « rien ne se crée, tout se transfor-me », au jardin « rien ne se gâche, tout setransforme », bien que je sois plutôt opposéà la mode des fleurs dans la salade, saufcelles de choux-fleurs et d’artichaut, trèsdécoratives par ailleurs.

> La femme est-elle l’avenir dujardinier ?

Vous savez, j’ai rencontré mon épouseCorine dans les jardins de Versailles. Quipourrait imaginer endroit plus élégant etromantique ? C’est certainement pour celaque le jardin idéal se décline pour moi auféminin, mais ce n’est pas la seule raison.En vérité, les femmes ne sont présentes au

Véronique Bidinger

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AlainBaratonLE JARDINIER LE PLUS CHIC DE FRANCE MAÎTRE D’ŒUVRE DES JARDINS DE VERSAILLES

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FRANCEMAGAZINE N°22 83 AUTOMNE 2008

jardin que depuis 1982, et c’est un bienfaitcar elles y ont apporté tendresse, sensua-lité et courage, et peut-être aussi la touchede fantaisie qui manque parfois chez leurscollègues masculins. Elles montrent unperfectionnisme qui peut paraître excessifet même parfois agaçant, mais le plus sou-

vent de bon aloi, venant contrecarrer unecertaine vulgarité chez ceux dits du sexefort, une sorte de tendance bling-bling, bienen vogue ces temps-ci.

> Une vertu qui vous paraît capitale aujardin ?

« Patience et longueur de temps font plusque force ni que rage »: planter, observer,patienter, le temps de donner une âme aujardin, et puis l’entretenir avec amour : lejardin est vivant, si on l’aime, on le quitte àregret.

> Les jardins de Versailles sont-ils enco-re un lieu recherché pour le cinéma ?

De l’eau est passée sous les ponts depuis lacréation des jardins de Le Nôtre à la fin duXVIIe siècle, et aussi depuis le célèbre filmde Sacha Guitry “Si Versailles m’était conté”en 1954 ; depuis, Versailles n’a cessé d’être

un lieu de prédilection pour les façonniersdu 7e art, comme Patrice Lecomte avec“Ridicule” en 1996,ou Sofia Coppola avec sa“Marie-Antoinette” version américaine en2006 , 300 000 dollars engloutis pour 2 moisde tournage à Versailles, sans compterBruno Podalydès, pour 2008 qui a terminéle 3e volet de sa trilogie versaillaise, “Bancspublics” : il faut dire que Christine Albanel,qui est restée aux commandes du domaineentre 2000 et 2007, a beaucoup œuvré pourpermettre d’utiliser Versailles comme écrin >>

Art de vivre

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FRANCEMAGAZINE N°22 84 AUTOMNE 2008

Art de vivre

au cinéma. L’art contemporains’installe aussi dans les jardins, parla grâce de J.-J. Aillagon, succes-seur de Christine Albanel, notam-ment avec une exposition de JeffKoons (chouchou du Palazzo Grasside Venise dont il a été directeur)prévue dès le mois de septembre,qui précédera d’ailleurs celle desphotographies de Karl Lagerfeld.

> On produit aussi du vin àVersailles, dit-on ?

Absolument. Les premières ven-danges issues des 1900 pieds devigne plantés en 2003 au Châteaude Versailles dans le jardin deMarie-Antoinette, datent d’octobre

2006. Une centaine de bouteilles en ont ététirées. Une récolte aussi exclusive que lechâteau d’Yquem , n’est-ce pas ? La presti-gieuse cuvée Rosé Marie-Antoinette, dont leparrain n’est autre que Francis FordCoppola, est réservée aux aimablesmécènes et amis de Versailles comme EricOrsenna ou Jean-Pierre Coffe, ou encoreNicolas Hayek, président de Swatch Groupqui, grâce à un don de plusieurs millions dedollars, a permis la plantation de milliersd’arbres après la tempête catastrophique de1999.

> Alain Baraton, le jardin idéal est-il levôtre ?

Je possède pour ma part un jardin de 200 m2

à l’Ile d’Oléron depuisde nombreusesannées, cela meconvient parfaitement.Un jardin idéal est celuioù l’on reçoit ses amiset ou l’on passe du bontemps : le jardin, c’estla vie.

Alain Baraton n’est passeulement le jardinieren chef du domaine deVersailles et deTrianon ; son talent aété maintes fois recon-nu ; il est notammentchevalier des Arts etLettres et officier duMérite Agricole. C’estégalement un journa-liste photographed’exception passionné

par la splendeurs des jardinsroyaux qu’il sillonne volontiers aupetit matin, qu’importe s’il estaccompagné du soleil levant ounon. Textes et photos sont prati-quement toujours le résultat d’untravail personnel.Pour lui, le poète ment lorsqu’ildit que « la beauté n’est qu’uneimage fardée » car « tout estbeauté dans les jardins deVersailles, les massifs et bos-quets, les pièces d’eau, les sta-tues, les arbres et les fleurs ».

• Le Jardin de Versailles vu par Alain Baraton.Edition Phare’s. Des photos somptueuses.• Savoir tout faire du bon jardinier. EditeurLa Maison Rustique.

Sur les ondes. France Inter : Indispensableschroniques du WE : de 7 h 45 à 8 h.

Songe d’une belle nuit d’été :« J’ai rêvé d’un endroit extraordinaire où il me serait possible derencontrer Lafontaine, Molière ou Pissaro. J’ai rêvé d’un parc fabu-leux peuplé de petits mammifères espiègles et d’oiseaux de nuit. J’airêvé d’un jardin planté d’arbres rares. »

Alain Baraton auteur

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FRANCEMAGAZINE N°22 86 AUTOMNE 2008

Peinture

L’acquisition des savoirs se fait, bien sûr, àl’intérieur de l’école, mais la vérificationde leur validité se fait à l’extérieur. L’école

se doit d’être ouverte sur le monde. Les institu-tions culturelles, politiques, scientifiques toutcomme les entreprises ouvrent leurs

portes aux élèves de nos écoles : chacunaccepte aujourd’hui l’idée qu’un des objectifs del’institution scolaire est de permettre aux jeunesde trouver leur place dans la vie professionnel-le, dans le monde, sans négliger, évidemment,leur développement personnel.Les musées de la ville seront peut-être lepremier lieu d’accueil puisqu’ils partagentavec l’école le projet d’un travail sur lessavoirs. Posons-nous quelques questionsavant de nous lancer dans la visite des expo-sitions ?Qu’est-ce que la culture ? L’ensemble desconnaissances acquises qui permettent dedévelopper le sens critique, le goût et lejugement. C’est la définition du Robertauquel nous emprunterons aussi les défini-tions suivantes.Qu’est- ce que l’art ? L’ensemble des acti-vités humaines créatrices visant àl’expression d’un idéal esthétique au tra-vers d’œuvres.Qu’est ce qu’une exposition ? La présenta-

tion publique d’œuvres d’art, l’ensembledes œuvres explorées, le lieu ont elles sontexposées.Vaste programme que de trouver desréponses à ces questions ! Mais n’ayonspeur de rien et essayons d’analyserquelques hypothèses proposées par lesexpositions de l’été à Lausanne et àMartigny.

Peut-on traverser la nuit des temps avecune lampe de poche ?« Les murs murmurent ! » au MuséeRomain Lausanne-Vidy et Laurent Flutsch,directeur du musée et humoriste à sesheures, a fait le pari avec les commissairesde l’exposition, de nous faire remonter lessiècles avec la lampe de poche dynamofournie à l’entrée. Ainsi équipés, nous pou-vons, passés d’épais vélums, pénétrer dansl’obscurité d’un dédale dont les parois sonttapissées de tessons, fragments, débris,morceaux, éclats de parements, d’enduits,de revêtements, de briques, de pierres, deterre cuite…Bien entendu, les pièces des puzzles ont étéassemblées, et en promenant le faisceaulumineux, on voit apparaître « les griffuresincertaines ou têtues des passants ances-traux qui ont marqué leur passage furtif surles murailles impériales » dont parleMérimée. Des paroles, des dessins quis’adressent à nous, nous qui les lisonsmême si leur auteur n’a jamais imaginé queson message traverserait 2040 années pournous parvenir : « Moi, Teucer, j’étais ici le 28mars de l’an 32 avant Jésus-Christ ! » biensûr, le graffiti a dû passer par la traduction,l’interprétation pour devenir une informa-tion qui nous parle. C’est là le travaild’expertise du musée. Reviennent enmémoire les mots de Valéry gravés au fron-tispice du Palais de Chaillot : « Il dépend de celui qui passeQue je sois tombe ou trésorQue je parle ou me taiseCeci ne tient qu’à toiAmi n’entre pas sans désir »

L’art nous parle-t-il d’autre chose que delui-même ?La fondation de l’Hermitage à Lausannenous propose, jusqu’au 26 octobre, un par-cours à travers les fastes et les ors de larenaissance italienne. Les cimaises dessuperbes salles de la Fondation sont par-faites pour accueillir la collection deRobert Berghe

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ECOLESANCTUAIRE,CITADELLE DESSAVOIRSDISCIPLINÉS ?ECOLE OUVERTESUR LE MONDE OÙL’INTELLIGENCE ÀL’ÉTAT BRUT SECHARPENTE FACEÀ L’EXPÉRIENCEDU CONCRET ?AUCUNE RÉPONSESIMPLE NESAURAITSATISFAIRE,ENCORE MOINSÉPUISER, LAQUESTION DEL’ÉCOLE. DETOUTE ÉVIDENCE,L’ÉCOLE DOITRESTER LE LIEUOÙ S’ACQUIÈRENTLES SAVOIRSDISCIPLINAIRESDU « LIRE,ÉCRIRE,COMPTER »,JUSQU’AUDÉCRYPTAGEINTELLIGENT DESJOURNAUX, À LAPRATIQUECONSTRUITED’UNE VIE PRO-FESSIONNELLE, ÀL’EXERCICE DESRESPONSABILITÉSCITOYENNES DANSSONENVIRONNEMENT.

ÉcoleÉcoledans la ville

de vie

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FRANCEMAGAZINE N°22 87 AUTOMNE 2008

Peinture

l’Accadémia Carrara de Bergame et lePortrait de Lionel d’Este (1441) parPisanello fut un excellent choix pourl’affiche de l’exposition. Représentation dupouvoir qui s’affirme, le profil est encorecelui des pièces de monnaie, les traits sontencore idéalisés, mais la texture de la peau,l’ourlet des lèvres, la matière du vêtement,tout converge à mettre en avant la personnedu condottiere et sa position dans la sociétéde son époque. Nous sortons de la féodali-té, nous entrons dans la « modernité » :l’Italie devient un laboratoire pour ce quisera appelé bien plus tard « l’Etat-nation ».Macchiavel n’est pas loin. Se dessinent dansl’œuvre les reflets de tout un imaginairepolitique en voie de réorganisation.L’histoire de l’art n’a pas une trajectoire rec-tiligne, sauf peut-être sur les fresquesdidactiques de nos écoles élémentaires.Bonheur qu’offre l’échange vivant que sontles expositions, je suis interpellé par unpassant au fort accent qui me dit devant un

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Graffiti découvert à Augst (Bâle-Campagne) :inscription

indéchiffrée, dessin figurant

Diane et un cerf. (Photo Fibbi-Aeppli,

Grandson)

A gauche :Pisanello, Portraitde Lionello d’Este,1441 (?). Huile surbois, 29 x 19,5 cm

A droite :Raphaël, Saint-Sébastien, vers

1501-1502. Huilesur bois, 38 x 47 cm

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FRANCEMAGAZINE N°22 88 AUTOMNE 2008

Peinture

Raphaël : « On n’a jamais pu faire mieux,n’est-ce pas ? » Oui, bien sûr, chef d’œuvrede virtuosité, mélange volontaire d’unerecherche idéalisée de la forme et de la per-fection du rendu de la matière : hors de laBella Maniera, point de salut ! Parfaitexemple de maniérisme que ce SaintSébastien placide qui tient la flèche qui vientde le transpercer comme d’autres tiennentleur petite cuillère au-dessus de leur tassede thé. Le stéréotype qui s’impose est celuidu Courtisan tel que le dépeint BaldassareCastiglione dans son livre.Heureusement, pour nous rappeler que lapersonnalité de l’artiste l’emporte parfoissur la convention du temps, une petite huilesur bois du Titien rafraîchit par sa simplici-té. Une vierge à l’enfant devant une natureriche et profonde, et des couleurs vives etfranches : une économie de moyens éton-nante qui dépeint malgré la scène de genre,un amour maternel tout simple, si lisible etsi vrai qu’il pourrait être celui d’un instanta-né. Les dieux se sont humanisés, les per-sonnages ne sont plus surhumains, ils ontla fragilité de la chair et du sang.

Peut-on faire l’éloge de l’hétérodoxie ?1934, première exposition de Balthus àParis : « Quel scandale ! s’exclamaient les

visiteurs. C’est du figuratif ! » En effet,comment osait-on proposer à cette époqued’abstraction, de cubisme, de déconstruc-tion de toutes les traditions picturales, uneœuvre aux apparences académiques ? Aumême instant que ces cris d’horreur,l’œuvre de Balthus suscitait l’analysed’Antonin Artaud qui écrivait dans laNouvelle Revue Française à propos de cetteexposition : « La technique de David au ser-vice d’une aspiration violente, moderne, etqui est bien l’inspiration d’une époquemalade où l’artiste qui conspire, ne se sertdu réel que pour mieux le crucifier. » Dansle même esprit, Artaud recherchera plustard dans son théâtre « la libération desinstincts élémentaires parmi lesquels lacruauté, gage absolu de la sincérité. »Georges Bataille qui fait partie du grouped’amis proches, écrit : « L’art est un moyende provocation, de violence nécessaire ten-dant à substituer au langage une contem-plation silencieuse… »C’est bien ce qui ressort des œuvres deBalthus, ce sentiment de contemplationsilencieuse chargé, cependant, du souvenirproche de la Première Guerre mondiale. Onse rappellera alors, à juste titre, que RainerMaria Rilke a eu une influence de premièreimportance dans les années de formation

Titien (TizianoVecello dit), Vierge

à l’enfant, vers1507, huile sur bois,

38x47 cm,Academia Carrara

de Bergame.

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FRANCEMAGAZINE N°22 89 AUTOMNE 2008

du jeune Balthus. C’est sans doute lui qui luia conseillé de prendre comme nom d’artistele diminutif de son prénom. Rilke qui a mar-qué son époque et toute une génération depoètes, continue, d’ailleurs, d’être un suc-cès de librairie avec ses Lettres à un jeunepoète disponibles aujourd’hui en traductionfrançaise dans 15 éditions différentes aumoins.On voit avec l’énumération de ceux qui ontsaisi la sensibilité de Balthus que noussommes dans un phénomène que nousserions tentés d’appeler contre-culture.Bien sûr, nommer le mouvement est insuf-fisant pour le décrire car aujourd’hui,Balthus est au musée, Artaud célébré,Bataille encore souvent cité par les docto-rants. En prenant un peu de recul par rap-port à cette proposition, on pourrait y ajou-ter l’idée que chaque génération d’artistesreconnus par la société et sa pensée domi-nante, engendre d’autres artistes qui vonts’inscrire en opposition avant de devenireux-mêmes, un peu plus tard, les tenantsde l’orthodoxie, ad infinitum ?

Balthus, Les Beaux

Jours, 1944-1946.

Huile sur bois,148 x 200 cm.Smith Sonian

Institution.

Balthus, qui trouve dans la FondationGianadda à Martigny un espace parfaite-ment adapté à sa peinture, a choisi derépondre de façon oblique aux questions del’art et de la société. Il écrit lui-même à pro-pos de son travail : « Je veux y mettre beau-coup, beaucoup de choses, de la tendresse,de la nostalgie enfantine, du rêve, del’amour, de la mort, de la cruauté, du crime,de la violence, des cris de haine, des rugis-sements et des larmes ! Tout cela, tout cequi est caché au fond de nous-mêmes, uneimage de tous les éléments essentiels del’être humain dépouillé de sa croûte épais-se de lâche hypocrisie ! Un tableau synthé-tique de l’homme tel qu’il serait s’il savaitencore être grand. » Il met néanmoins toutson art à garder sa part de mystère à la réa-lité : tout est là mais encore faut-il allerchercher et ne pas croire trop vite que l’on atout compris.Faire ainsi le tour des expositions nousamène obligatoirement à une attituded’humilité face aux questions péremptoiresque les épreuves du Bac en Philo nous

posent chaqueannée. En voiciq u e l q u e s - u n e s ,façon 2008 : « L’artt r a n s f o r m e - t - i lnotre conscience duréel ? Y a-t-il d’autresmoyens que ladémonstration pourétablir une vérité ?Peut-on désirer sanssouffrir ? Est-il plusfacile de connaîtreautrui que de sec o n n a î t r e s o i -même ? La percep-tion peut-elles’éduquer ? Uneconnaissance scien-tifique du vivant est-elle possible ?… »Pour rester maîtredans sa classe, quel-le doit être la postu-re de l’enseignant ?Celle du « grandsachant » ou celled’un éternel apprentilui aussi en quête devérité ?

Peinture

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FRANCEMAGAZINE N°22 90 AUTOMNE 2008

Toutefois, au-delà de ces visionspartielles, on doit bien constaterque les Etats, les territoires et les

villes ont souvent une histoire qu’il estbon de connaître pour en appréciertous les aspects. Surtout quand celle-cis’inscrit au cœur même du continentoù nous vivons et au sein de cetteHistoire, avec un grand H, qui a boule-versé les champs du possible de ceterrible XXe siècle en permettantl’existence d’un couple franco-alle-mand - ce qui, après trois conflitssanglants en moins de soixante-quinze ans, était pour le moinshypothétique - et sonné la fin de laguerre froide lorsque des deuxcôtés de la porte de Brandebourg àBerlin, les populations des deuxAllemagne prirent la parole pourn’en faire plus qu’une.Si la Prusse est en effet un objet his-torique difficile à identifier, le livreremarquable de Jean-Paul Bledpublié chez Fayard permettra de larendre beaucoup plus compréhen-sible et donnera à tout lecteur inté-ressé par l’avenir de notre continentde nombreuses et utiles clés decompréhension de l’Allemagnemoderne et, au-delà, de tout cetensemble qui se situe entre la faceoccidentale et la partie orientale del’Europe.L’histoire de la Prusse, c’est au fondcelle d’une réussite indéniable ettout à fait inattendue qui prouve unefois encore qu’avec des idées claires

et une volonté forte, une entitémodeste peut, au final, compterbien plus que de grands voisins quin’ont que la taille de leur territoireou le nombre de leurs populations àopposer.La Prusse a tout d’abord une histoi-re particulière car contrairement àtant d’autres, elle n’est pas inscriteterritorialement dans une géogra-phie donnée. Son territoire évolueen effet au cours des siècles pourd’abord se situer très à l’Est ducontinent lorsque les chevaliersTeutoniques créent un Empire quis’étend, dans la première moitiédu XIIIe siècle, entre la Vistule et leNiémen aux confins de ces hautesterres allemandes du bord de laBaltique. Face à cet ensemble, del’autre côté de la ligne de front del’évangélisation face aux popula-tions païennes, se trouve leBrandebourg et son ambitieuxMargrave.A cette époque, les destins de cesdeux entités sont encore séparésmais l’Histoire va se charger de rap-procher le Duché de Prusse à l’Estet le Margraviat de Brandebourgsitué plus à l’Ouest. En 1618 scelléesous l’égide des Hohenzollern,l’union de la Prusse et duBrandebourg reste toute personnel-le mais les événements vont per-mettre à l’Electeur de Brandebourg,Frédéric-Guillaume, de d’abord sedégager de toute tutelle étrangère

grâce au traité d’Oliva où le Roi deSuède reconnaît les droits de souve-raineté de l’Electeur sur la Prusse -ce qui constitue le socle sur lequelles Hohenzolern vont pouvoir fonderla puissance de leur maison. Puis, le18 juin 1675, Frédéric-Guillaumeremporte à Fehrbellin une victoireéclatante sur les Suédois pourtantlargement supérieurs en nombre etexpérimentés. Pour l’armée prus-sienne, cette victoire est la démons-tration de ses capacités. Il n’est pasexagéré d’y voir véritablement l’actede naissance de l’armée prussien-ne. Celle-ci s’était en effet déjàillustrée par le passé mais aux côtésd’autres belligérants. A Fehrbellin,l’armée prussienne ne doit son suc-cès qu’à elle seule. C’est une étapedécisive qui annonce bien d’autressuccès, notamment ceux deFrédéric lors de la guerre de Septans (1756-1763), et apporte ladémonstration que la structure dedéveloppement voulue par laPrusse s’appuyant sur une arméeforte et une administration efficacea permis de battre un adversaireconsidéré comme supérieur. Mais il est aussi un événement quiva beaucoup peser sur le dévelop-pement futur de la Prusse et quivient de France : c’est la révocationde l’Edit de Nantes par Louis XIV quicontraint à l’exil bon nombre deProtestants. Grâce à une législationfavorable, Frédéric-Guillaume vamettre en place les conditionsnécessaires à l’accueil d’une fortecolonie française durant cesannées. Ce flux migratoire auracomme conséquence l’arrivée d’unsavoir-faire dans de nombreux sec-teurs tels que la culture, la financeet l’administration où les Huguenotsdémontrent d’indéniables qualitéset aussi dans le domaine culinairedont la trace est attestée jusqu’ànos jours dans le vocabulaire berli-nois notamment. Ce “siècle fran-çais” en Prusse comme l’on qualifiéles Historiens ne prendra finqu’avec Frédéric II.Enfin, le 18 janvier 1701 marquel’acte de naissance de la Prusse etde son développement. En effet, à

“Histoirede la Prusse”PAR JEAN-PAUL BLED

POUR DES GÉNÉRATIONS D’EUROPÉENS, LA PRUSSE EST UN MONDEDÉFUNT DONT ON N’A BIEN SOUVENT RETENU QUE LE MILITARISMEBELLIQUEUX ET LE RÈGNE FASCINANT DE FRÉDÉRIC II.

Histoire

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FRANCEMAGAZINE N°22 91 AUTOMNE 2008

Histoire

cette date, le prince électeur deBrandebourg, Frédéric III, ceint lacouronne royale de Prusse àKönigsberg. Il devient Roi en Prusse- se substituant au margrave deBrandebourg - avant que le GrandFrédéric, grâce à son habileté et sessuccès à la guerre, ne parachèveson œuvre en prenant en 1772 letitre de Roi de Prusse.Comme le montre Jean-Paul Bled,Frédéric II sera le grand Roi dePrusse par excellence. Héritant deson père Frédéric-Guillaume 1er “leRoi-Soldat” un Etat doté d’uneadministration efficace et d’unearmée puissante, ilrestera comme celuiqui a fait fructifierau-delà de touteattente les intérêtsde la maisonHohenzolern et favo-risé le développe-ment de ses Etats.Roi philosopheautant que grandcapitaine il laissel’image d’un grandroi dont la demeurede Sans-Souci àPotsdam dans lesenvirons de Berlindéfinit le caractère etles inclinations.Résidence d’été pré-férée du monarque,dotée d’une biblio-thèque remarquable, il sera le pre-mier serviteur de l’Etat autant qu’unesthète de l’existence en conviant àsa table des hommes de la qualitéde Voltaire et de Maupertuis tout ens’inquiétant de la situation de sessujets.Cette image, ses successeurs s’eninspireront avec des fortunesdiverses. Bismarck en fera un élé-ment essentiel de sa politique afinde réaliser cette Allemagne pour lecompte des Hohenzolern au détri-ment des Habsbourg autrichiensécartés définitivement à Sadowa etsur les décombres du SecondEmpire battu à Sedan. Les Nazis seréclameront, quant à eux, dans leurfolle propagande, d’une filiation

avec le grand Frédéric que Jean-Paul Bled met brillamment enpièces tant la ligne qui va de laPrusse frédéricienne au IIIe Reichest une ligne brisée.Au fond, l’Histoire de la Prusse estbien singulière avec cette unité géo-graphique qui n’avait rien de sûreentre une genèse lointaine sur lesbords de la Vistule avec les cheva-liers teutoniques du XIIIe siècle et ceMargraviat de Brandebourg que peuà peu les Hohenzollern ont affranchides tutelles et puissances étran-gères qu’elle soit polonaise, autri-chienne ou suédoise pour fonder

une entité qui, finalement,sera à la base del’Allemagne moderne alorsque d’autres Etats alle-mands, comme la Bavière, auraientpu y prétendre davantage. Une foisencore, une idée forte, s’appuyantsur un outil efficace (à l’époquel’armée) associé à une administra-tion compétente, opiniâtrementdéveloppée par quelquesmonarques d’envergure et favoriséepar quelques bonnes fortunesadressées par le destin ont permis àla Prusse de développer une desti-née particulière qui, d’une certainemanière, continue encore aujour-d’hui à travers l’Allemagne unifiée.Finalement, le destin de la Prusse et

de cette nouvelle Allemagne - pilierde l’Union Européenne et lien entrel’Est et l’Ouest du Continent - a étéillustré magnifiquement lors duretour des cendres de Frédéric àSans-Souci le 17 aout 1991 - jour du205e anniversaire de la mort deFrédéric - grâce au chancelierHelmut Kohl et au chef de la maisondes Hohenzolern le prince Louis-Ferdinand. Ce jour-là en effet, leGrand Frédéric était enfin inhumé làoù il l’avait désiré - souhait que sessuccesseurs n’avaient pas respecté.Et il l’était dans cette Allemagnerécemment unifiée, à quelques kilo-

mètres de la Porte deBrandebourg, symbolede la grandeur prussien-ne mais aussi de la sépa-

ration de l’Allemagne et de la cou-pure de l’un de ses berceaux histo-riques les plus éminents, Berlin, àl’issue de cette guerre froide quivenait de finale-ment capitulerface à la marchedes peuples duXXe siècle finis-sant qui s’étaientréapproprié leurhistoire autantque leur destin.

Le royaume de Prusseen 1803.

Dominique Ortiz

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FRANCEMAGAZINE N°22 92 AUTOMNE 2008

Son contenu, sa structure va enétonner plus d’un. Les gastro-nomes, les cuisinières et cuisi-

niers, qu’ils soient professionnels ouamateurs, vont y trouver des recettesinédites, tellement claires et bienécrites dans un langage culinaire etcynégétique précis, qu’une ménagèren’aura pas de difficultés pour les réali-ser, en compulsant à la fin de l’ouvrageun lexique qui l’aidera à comprendreles termes vrais

utilisés.

Ce livre sera aussi très apprécié parles amoureux de la nature que sont

les chasseurs, les randonneurs, quiaiment marcher, découvrir, obser-ver, comprendre la nature, et vont yreconnaître l’animal qu’ils ont croi-sé au détour d’un sentier, personnene peut rester insensible à un telouvrage. Son auteur est un cuisi-nier, pour qui son métier est unepassion, et dont la chasse est lehobby, c’est Benoît Violier. Il n’estpas devenu cuisinier par hasard, cesont sa grand-maman et sa maman,“Cordons bleus” comme on en trou-ve dans les vraies familles fran-çaises, qui l’on initié très jeune à lacuisine. Il est né dans une famille

Gastronomie

paysanne, à Montils, charmant villa-ge de quelques centainesd’habitants, partagé entre la cultureet la vigne en Petite Champagne.Vous allez beaucoup mieux situercette bourgade, si je vous dis qu’elleétale ses vignes et ses champs enCharente Maritime, à quelques kilo-mètres de Cognac.Benoît Violier, dont la qualité princi-pale est le respect de la perfection,et ce dans tous les domaines, méri-te que l’on fasse sa connaissance. Auteur d’un tel ouvrage, vous neserez pas surpris d’apprendre qu’ilest, aujourd’hui, chef de cuisine,mais, vous serez peut être étonnéqu’il le soit dans un des plus grandsrestaurants du monde, leRestaurant PhilippeROCHAT à Crissier.J’oserai même direqu’il est le Chef le plusgrand du monde, et jene prends pas beau-coup de risque en écri-vant cela, puisqueHenri Millau, créateur

du guideGaultMillau, n’a pashésité à le qualifier de“meilleur restaurant dumonde” dans le guideGaultMillau 2000. Jean-Claude Ribaud,critique gastronomiquedu Monde, l’a consacrémeilleur table de la pla-nète. Le Point, sous laplume de son chroni-queur chevronné GillesPudlowski, l’a nommé meilleur res-taurant d’Europe…Le Restaurant Philippe ROCHAT,connu aussi sous le nom deRestaurant de l’Hôtel de Ville attireles plus grands gastronomes dumonde à Crissier, dans les hauts deLausanne. Ce n’est pas un restaurant commeles autres, c’est une institution.Fredy Girardet l’a élevé au firma-ment de la Gastronomie en obtenanttrois étoiles au Guide Michelin, etPhilippe Rochat, son chef d’alors, leseul à pouvoir poursuivre l’œuvre deFredy, en a fait un établissement

gibier à poilLa cuisine du

d’EuropeUN LIVRE DE CUISINE PAS COMME LES AUTRES,… DU JAMAIS VU !

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FRANCEMAGAZINE N°22 93 AUTOMNE 2008

Gastronomie

irréprochable, reconnu par lesguides de la terre entière, sa noto-riété n’a pas de frontières. Son Chef,Benoît Violier, cuisinier hors pair,Meilleur Ouvrier de France en 2000,Compagnon du Tour de France desDevoirs Unis, deux qualificatifs suf-fisants pour démontrer sa classe,en est le maître des fourneauxdepuis dix ans. Professionnel hyperexigeant, mais aussi et surtout,hyper doué, il manie la HauteCuisine comme un virtuose, avecune précision d’horloger, et dominel’art de la gastronomie avec aisance.Avant de se lancer dans la créationd’un ixième livre de cuisine, il ad’abord réfléchi à ce qui pouvaitmanquer aux lecteurs malgré le

grand nombre d’ouvrages existants. Il a choisi de construire un livre derecettes comme jamais la cuisinen’aura été expliquée.Il a voulu traiter son sujet parthème, dans les moindres détails,pour ne pas se disperser, pour lerendre encore plus intéressant. Et malgré le travail colossal quecela représente, il espère sortir unlivre tous les deux ans, et que celui-ci soit le début d’une collection mer-veilleuse. Pour son premier ouvra-ge, il a choisi comme thème laChasse, mais il l’a décrite de tellefaçon que le lecteur est envoûté, et

partage avec une intensité débor-dante ses sentiments autant de lacuisine que de la chasse.Je ne voudrais pas vous en dire troppour ne pas gâcher l’effet de surpri-se, quand vous découvrirez ce livre,qu’il faudrait plutôt appeler “l’art dela chasse à travers la HauteCuisine”. C’est un véritable document de 380pages, il a réduit son sujet au gibierà poil d’Europe, pour être certain depouvoir le traiter avec la précision etla rigueur qui lui sont coutumières.Le livre contient quelque deux centsrecettes, et avec chaque recette, lelecteur sera renseigné non seule-ment sur le morceau, la façon del’apprêter, de le cuire, de

l’accompagner, mais aussi surl’animal, ses habitudes, sa nourritu-re, la façon de le chasser.Au fil de la lecture, vous pourrezdécouvrir des hommages à des arti-sans dont les métiers méconnussont en étroite collaboration avec lachasse, tels l’armurier, le taxider-miste, le peintre animalier, le coute-lier, le sculpteur, ou le graveur… Notre auteur montre aussi le grandrespect qu’il a envers ceux quiœuvrent pour que la chasse reste unsport pratiqué par des adeptesd’une chasse sélective, tenantcompte de l’évolution des popula-

tions de gibier, que sont lesPrésidents de société, les guides dechasse, ou encore les conducteursde chien. Ce livre recèle des trucs,des astuces, des tours de main sou-vent oubliés, vous allez retrouverdes légumes vieux comme lemonde, mais inconnus de nos éta-lages modernes.Il nous suffit de se rappeler que nosancêtres vivaient dans la nature, dela nature, que la chasse était, àl’époque, la principale occupation,une occupation vitale pour se nour-rir, pour comprendre que c’est unvéritable hommage à la nature, queBenoît Violier nous présente au tra-vers de son métier.L’être humain a oublié tout ce que la

nature met à sa disposition ; s’il s’ensouvenait, il n’aurait besoin ni de semobiliser, ni de se forcer pour larespecter.Ce livre a été préfa-cé par messieursOlivier Dassault etPhilippe Rochat.Imprimé par lesEditions du GerfautVous pouvez le trou-ver en librairie etnaturellement auRestaurant PhilippeRochat où son auteur sefera un plaisir de vous le

Jean-JacquesPoutrieux

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Bridge

« Cher partenaire - Jouez-vous le 2 SA fitté ? »Les enchères - Entre le naturel et le conventionnel…

Pour cette édition, nous nous proposons dereparler enchères … Si nous traitionsd’habitude de conventions simples et utiles

mais peu usitées, cette fois, nous nous proposonsde revenir sur l’une d’elles qui curieusementsemble peu faire débat tant la majorité des clubset joueurs français semblent l’avoir adoptée…Convention classée auparavant dans la rubriquedes «compléments pour la compétition », le 2SAfitté fait son entrée dans le S.E.F. (Standard desEnchères Français) en juin 2006 – un produit frais

en quelque sorte ! Philippe Cronier, champion et respon-sable de l’enseignement et de l’unité de recherche del’université du bridge nous rappelle la définition très simplesur laquelle s’est arrêtée la Commission NationalePédagogique (qui décide du contenu du S.E.F.): «on utilisel’enchère de 2 SA chaque fois qu’on a de quoi faire unemanche dans la majeur d’ouverture du partenaire, avecexactement trois atouts. » On a le droit de posséder quatrecartes (peut-être même cinq) dans l’autre majeur. Si vousêtes comme moi (un joueur occasionnel et un élève dilet-tante) : avec les 3 atouts exactement, vous avez surtout rete-nu 11-12 points HLD et un jeu régulier ou semi-régulier -je vous laisse choisir…Le côté tout à fait naturel du développement de l’ouvreurest vraiment appréciable, il se présente comme suit :

Développements de l’ouvreur sur le 2 SA fitté

Après 1 ❤ / ♠ 2 SA l’ouvreur

a). revient au palier de 3 dans sa couleur d’ouverturesans espoir de manche ou conclut au palier de 4 si samain le permet.

Exemple : Sud Sud Nord ♠ 10 8 1 ❤ 2 SA ❤ R D 9 7 4 4 ❤ Fin ◆ A V 6 3 ♣ R 5

Sud Sud Nord ♠ R 9 6 3 2 1 ♠ 2 SA ❤ A D 4 3 ♠ Fin ◆ R 9 5 (Sur une propos. de manche ♣ V 2 à 3 P – on aurait passé.)

b). annonce 3 SA avec une main régulière d’au moins 15/16points, ce qui constitue une proposition de jouer ce contratsouvent plus sûr qu’un fit 5-3 avec des jeux réguliers.Exemple : Sud Sud Nord

♠ D V 9 8 3 1 ♠ 2 SA ❤ A D 3 SA Fin ◆ R V 10 ♣ D V 9

c). annonce une nouvelle couleur au palier de 3 pourmontrer un bicolore avec des ambitions de chelem.Exemple : Sud Sud Nord ♠ 2 1 ❤ 2 SA ❤ A R V 6 4 3 ◆ enchère pour ◆ A D V 2 possible ♣ A 9 5 découv. chelem à K d). utilise le splinter au palier de 4 pour indiquer le sin-gleton dans la couleur choisie.Exemple : Sud Sud Nord ♠ A R 10 8 6 5 1 ♠ 2 SA ❤ R D 9 4 ◆ enchère pour pour- ◆ 4 suivre la recherche… ♠ A V 4 du chelem.

Bien que cette convention ait été adoptée par une gran-de majorité des joueurs, les inférences qui lui corres-pondent ne sont pas forcément toutes dominées… Sans caractère exhaustif :

Inférences du 2 SA fitté

1.-Après 1 ❤ / ♠ de l’ouvreur, le répondant qui souhai-te faire l’enchère naturelle de 2 SA doit commencer parun changement de couleur et annoncer 2 SA au tour sui-vant.Exemple : Sud Sud Nord ♠ 10 8 1 ♠

❤ R D 9 7 2 ♣ 2 ♠

◆ D 10 6 2 SA ♣ R V 9 3 2.-Les soutiens différés de la majeur d’ouverture aupalier de 3 deviennent forcing, y compris si l’ouvreurrépète sa couleur – C’est une proposition d’explorationde chelem…Exemple : Sud Sud Nord ♠ A 9 8 1 ♠ ❤ A 8 3 2 ♣ 2 ♠ ◆ R 8 3 ♠ ♣ R D 9 5 4

Alors qu’auparavant, le soutien différé au palier de 3était non forcing - c’est la conséquence essentielle del’utilisation ou non du 2 SA fitté.Exemple : Sud Sud Nord

Yorick Cazal

caza

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Bridge

♠ A V 2 1 ♠

❤ 6 4 2 ◆ 2 ♠

◆ R D 10 6 2 3 ♠

♣ 6 4 2On voit dans cet exemple, qu’avec l’utilisation du 2 SAfitté, on va plus vite à la manche éventuelle et on donnemoins de renseignements à l’adversaire mais on perd ladescription des Carreaux pour trouver un possible beaudouble fit…

3.-Après un changement de couleur 2 sur 1, le retour aupalier de 2 dans la majeur d’ouverture indique désor-mais un honneur second et pas trois cartes.

4.-L’exception au caractère forcing du soutien différéde la majeur d’ouverture au palier de 3 est donnée parla séquence suivante 1 ❤ - 1 ♠ -2 ❤ -3 - la recherchedu fit 4-4 ou 5-4 à Pique impose que l’on continue derépondre 1 ♠ avec un fit de 3 cartes à Cœur et une mainde 10/11 points HExemple : Sud Sud Nord ♠ A V 10 4 2 1 ❤ ❤ R 10 3 1 ♠ 2 ❤ ◆ D V 10 3 ❤ ♣ 6 4 5.-Le soutien direct au palier de 3 rend obligatoire laprésence de 4 atouts.

Conclusion : L’adoption du 2SA fitté par une majorité dejoueurs révèle sans aucun doute son côté pratique etefficace (à condition de ne pas oublier le caractère deve-nu forcing du soutien indirect au palier de 3…). Dans lamesure où la recherche du fit reste un des éléments

majeurs du développement des enchères, le développe-ment d’un outil qui permettait, sans effort de mémoire,de le révéler sans ambiguïté et de manière accélérée sedevait de rencontrer un franc succès. Le caractère natu-rel de la suite de la séquence pour l’ouvreur, ne peut querenforcer l’attrait de cette convention. Toutefois, le prix à payer sera – en perdant le 2 SA natu-relle – de s’obliger à des circonvolutions pour déclarer 3SA, ou tout simplement de rater quelques bellesmanches pour n’avoir pu révéler la concordance desmains… notamment lors de l’existence de doubles fitsrestés sous silence.C’est pourquoi, pour certains, il y a débat – notre cham-pionne du monde Bénédicte Cronier (que l’on félicite aupassage, ainsi que ses partenaires, pour avoir remportécet été les championnats d’Europe à Pau) est de ceux-là : « adaptée au tournoi par quatre parce que favorableà la découverte de chelems, cette convention n’est pasoptimale en tournoi par paires où la découverte de (labonne) manche est beaucoup plus importante et, sonutilisation par des non-champions risque d’être moinsefficace que sa concurrente naturelle ».Finalement, ces mêmes champions qui ont (ou pour quion a…) développé le système, l’utilisent désormais poursignifier la présence de 4 atouts/ 13H min. avec unespoir de chelem !L’avenir dira si « la troupe suivra »… ou si le 2 SA fitté,dans sa définition actuelle, se sera confortablement ins-tallé, et pour longtemps, dans le Standard Français.Bibliographie : « Le petit Partenaire » de Philippe Cronier chez Pole– un mémento complet du système français aussi agréable à lirequ’indispensable !…

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Problème

Donne : De l’art de faire les chosesdans l’ordre…

Pour ce qui est du début des enchères, il n’y a rien de particulier. L’enchèrede 5 ♠ est un effort de chelem sans contrôle à Cœur et à Trèfle – donc avecde beaux atouts. Sud qui est maximum ne peut que conclure dans la joie.L’entame : V de❤, 3 de Nord et Est fournit le 5.

Solution de la donne

Les enchères sont :

Il s’agit d’éliminer le Cœur perdant enle défaussant soit sur un Trèfle soit surun Carreau gagnant.Pour cela, il faut qu’une des 2 impassesau Roi réussisse : 75 % de chance pourautant que l’on joue dans le bon ordre –« on doit toujours commencer parl’impasse indirecte lorsque l’on a lechoix contre l’impasse directe ». Ditautrement : toujours jouer en premierla couleur dans laquelle on doit donnerune levée. Trèfle vers la Dame… raté !La suite permet toujours l’impasse auroi de Carreau… réussie ! Défausse du 2de Cœur sur l’As de Carreau – la messeest dite.

Nord Est Sud Ouest 1 ♠ -2 ◆ - 3 ♠ -5 ♠ - 6 ♠ Fin

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