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Math. Nachr. 281, No. 5, 645 – 649 (2008) / DOI 10.1002/mana.200710632 Op´ erateurs diff´ erentiels lin´ eaires ` a coefficients constants et sch´ emas de Hilbert ponctuels Jean D’Almeida 1 1 Laboratoire Paul Painleve, Universit´ e des Sciences et Technologies de Lille, 59655 Villeneuve d’Ascq, France Received 15 January 2007, revised 20 July 2007, accepted 29 July 2007 Published online 7 April 2008 Mots-cl´ e Equations and systems with constant coefficients, Hilbert schemes MSC (2000) 35E20, 35N05, 14C05 We use algebraic methods to study systems of linear partial differential equations with constant coefficients. c 2008 WILEY-VCH Verlag GmbH & Co. KGaA, Weinheim 1 Introduction On consid` ere un ouvert convexe de R n (resp. C n ). Si P est un polynˆ ome appartenant ` a C[x 1 ,...,x n ] on note P ( ∂x ) l’op´ erateur diff´ erentiel obtenu en remplac ¸ant dans l’expression du polynˆ ome la variable x j par l’op´ erateur ∂xj . On consid` ere alors le syst` eme P i ( ∂x ) f = g i ,i =1,...,k, u les g i sont des fonctions connues efinies sur et f est la fonction inconnue. Le sous-sch´ ema de C n efini par l’id´ eal I =(P 1 ,...,P k ) de C[x 1 ,...,x n ] joue un r ˆ ole important dans l’´ etude du syst` eme. On supposera que les fonctions g i sont C (resp. holomorphes) sur . Si n =1, C[x 1 ] est principal et I est engendr´ e par un polyn ˆ ome P 1 et la dimension sur C de C[x 1 ]/(P 1 ) est ´ egal au degr´ e de P 1 et on a une ´ equation diff´ erentielle lin´ eaire ordinaire ` a coefficients constants. La nature des solutions d´ epend des racines du polyn ˆ ome et en particulier de leurs multiplicit´ es. On associe donc ` a l’´ equation diff´ erentielle un sous-sch´ ema de dimension z´ ero de la droite affine. Pour n arbitraire les id´ eaux I de C[x 1 ,...,x n ] tels que C[x 1 ,...,x n ]/I soit un C-espace vectoriel de dimension finie ´ egale ` a t sont param´ etr´ es par le sch´ ema de Hilbert Hilb t C n . Pour n =2, le sch´ ema de Hilbert est lisse et est une r´ esolution des singularit´ es de la puissance sym´ etrique t-i` eme de C 2 via le morphisme de Hilbert–Chow. On ´ etudiera d’abord les syst` emes homog` enes. Il faudra pr´ eciser la nature des solutions. On s’interessera ensuite aux syst` emes avec second membre. Il faudra d´ eterminer les conditions n´ ec´ essaires et suffisantes pour que le syst` eme ait une solution. Les conditions ´ evidentes P i ( ∂x ) g j = P j ( ∂x ) g i sont n´ ec´ essaires mais non suffisantes. On ´ etablira un th´ eor` eme qui permettra de ramener le probl` eme ` a un exercice d’alg` ebre lin´ eaire. On peut donc d´ eterminer compl` etement les conditions ec´ essaires et suffisantes pour qu’un syst` eme de cette nature ait une solution. Le probl` eme est donc enti` erement esolu. 2 Syst` emes homog` enes Soit un ouvert convexe de R n (resp. C n ) et P i ( ∂x ) ,i =1,...,k, une famille d’op´ erateurs diff´ erentiels lin´ eaires ` a coefficients constants o` u les P i appartiennent ` a C[x 1 ,...,x n ]. On s’interesse au syst` eme P i ( ∂x ) f = 0, i =1,...,k. On cherche les solutions dans C (Ω) (resp. holomorphe dans Ω). On a ´ etabli le th´ eor` eme suivant: Th´ eor` eme 2.1 [1] On consid` ere le syst` eme P i ( ∂x ) f =0,i =1,...,k. On cherche une solution f C (Ω) (resp. holomorphe dans Ω) o` u est un ouvert convexe de R n (resp. C n ). On suppose que la dimension dim C C[x 1 ,...,x n ]/I = t est finie o` u I est l’id´ eal engendr´ e par les polynˆ omes P i dans C[x 1 ,...,x n ]. Alors l’ensemble des solutions est un C-espace vectoriel de dimension t. Toutes les solutions sont des combinaisons e-mail: Jean.D’[email protected] c 2008 WILEY-VCH Verlag GmbH & Co. KGaA, Weinheim

Opérateurs différentiels linéaires à coefficients constants et schémas de Hilbert ponctuels

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Math. Nachr. 281, No. 5, 645 – 649 (2008) / DOI 10.1002/mana.200710632

Operateurs differentiels lineaires a coefficients constants et schemas deHilbert ponctuels

Jean D’Almeida∗1

1 Laboratoire Paul Painleve, Universite des Sciences et Technologies de Lille, 59655 Villeneuve d’Ascq, France

Received 15 January 2007, revised 20 July 2007, accepted 29 July 2007Published online 7 April 2008

Mots-cle Equations and systems with constant coefficients, Hilbert schemesMSC (2000) 35E20, 35N05, 14C05

We use algebraic methods to study systems of linear partial differential equations with constant coefficients.

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1 Introduction

On considere un ouvert convexe Ω de Rn (resp. Cn). Si P est un polynome appartenant a C[x1, . . . ,xn]on note P

(∂∂x

)l’operateur differentiel obtenu en remplacant dans l’expression du polynome la variable xj par

l’operateur ∂∂xj

. On considere alors le systeme Pi

(∂∂x

)f = gi, i = 1, . . . ,k, ou les gi sont des fonctions connues

definies sur Ω et f est la fonction inconnue. Le sous-schema de Cn defini par l’ideal I = (P1, . . . ,Pk) deC[x1, . . . ,xn] joue un role important dans l’etude du systeme. On supposera que les fonctions gi sont C∞ (resp.holomorphes) sur Ω. Si n = 1, C[x1] est principal et I est engendre par un polynome P1 et la dimension sur C deC[x1]/(P1) est egal au degre de P1 et on a une equation differentielle lineaire ordinaire a coefficients constants.La nature des solutions depend des racines du polynome et en particulier de leurs multiplicites. On associe donca l’equation differentielle un sous-schema de dimension zero de la droite affine. Pour n arbitraire les ideaux I deC[x1, . . . ,xn] tels que C[x1, . . . ,xn]/I soit un C-espace vectoriel de dimension finie egale a t sont parametrespar le schema de Hilbert HilbtCn. Pour n = 2, le schema de Hilbert est lisse et est une resolution des singularitesde la puissance symetrique t-ieme de C2 via le morphisme de Hilbert–Chow. On etudiera d’abord les systemeshomogenes. Il faudra preciser la nature des solutions. On s’interessera ensuite aux systemes avec second membre.Il faudra determiner les conditions necessaires et suffisantes pour que le systeme ait une solution. Les conditionsevidentes Pi

(∂∂x

)gj = Pj

(∂∂x

)gi sont necessaires mais non suffisantes. On etablira un theoreme qui permettra

de ramener le probleme a un exercice d’algebre lineaire. On peut donc determiner completement les conditionsnecessaires et suffisantes pour qu’un systeme de cette nature ait une solution. Le probleme est donc entierementresolu.

2 Systemes homogenes

Soit Ω un ouvert convexe de Rn (resp. Cn) et Pi

(∂∂x

), i = 1, . . . ,k, une famille d’operateurs differentiels

lineaires a coefficients constants ou les Pi appartiennent a C[x1, . . . ,xn]. On s’interesse au systeme Pi

(∂∂x

)f =

0, i = 1, . . . ,k. On cherche les solutions dans C∞(Ω) (resp. holomorphe dans Ω). On a etabli le theoremesuivant:

Theoreme 2.1 [1] On considere le systeme Pi

(∂∂x

)f = 0, i = 1, . . . ,k. On cherche une solution f ∈

C∞(Ω) (resp. holomorphe dans Ω) ou Ω est un ouvert convexe de Rn (resp. Cn). On suppose que la dimensiondimC C[x1, . . . ,xn]/I = t est finie ou I est l’ideal engendre par les polynomes Pi dans C[x1, . . . ,xn]. Alorsl’ensemble des solutions est un C-espace vectoriel de dimension t. Toutes les solutions sont des combinaisons

∗ e-mail: Jean.D’[email protected]

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646 D’Almeida: Operateurs differentiels

lineaires de solutions du type P (x) exp〈λ,x〉 ou P est un polynome,〈λ,x〉 =∑n

i=1 λixi, λ est un point fermedu sous-schema de Cn defini par I . Pour un λ donne le sous-espace vectoriel des solutions associees a λ est dedimension µ ou µ est la multiplicite de λ comme point du sous-schema defini par I .

Ce theoreme peut etre complete par la proposition suivante:

Proposition 2.2 Avec les notations ci-dessus, si P est un polynome tel que P (x) exp〈λ,x〉 est une solutiondu systeme alors le degre de P est inferieur ou egal a µ − 1 ou µ designe la multiplicite de λ comme point dusous-schema defini par I .

P r e u v e. L’ideal I definit un sous-schema de dimension zero et de longueur t de Cn. De maniere precise,l’anneau artinien C[x1, . . . ,xn]/I s’ecrit comme produit direct d’un nombre fini d’anneaux locaux artiniens. Siλ1, . . . ,λr sont les points fermes de Cn ou s’annulent tous les elements de I , on a un isomorphisme

C[x1, . . . ,xn]/I r∏

l=1

Ol/IOl

ou Ol designe l’anneau local de Cn en λl. La multiplicite en λl du sous-schema defini par I est µl = dimCOl

IOl

et on a t = µ1 + · · · + µr. Nous devons montrer que si P (x) exp〈λ1,x〉 est une solution du systeme alorsdeg P ≤ µl − 1. On se ramene au cas ou r = 1 et λ1 = 0 = origine de Cn. L’anneau local OO , Cn estegal au localise C[x1, . . . xn](x1,...,xn). Le quotient OO/IOO est de longueur finie egale ‘a µ. L’ideal IOO estdonc un ideal de definition de OO et contient Mµ ou M = (x1, . . . ,xn)OO . On a en particulier que toutmonome q de degre µ en x1, . . . ,xn appartient a IOO c’est a dire que q =

∑ Ai

B Pi avec Ai ∈ C[x1, . . . ,xn],B ∈ C[x1, . . . ,xn], B /∈ (x1, . . . ,xn). Il en resulte que Bq

∑AiPi ∈ I . Mais B /∈ (x1, . . . ,xn) et I est

(x1, . . . ,xn)-primaire donc q ∈ I . On a donc etabli que I ⊃ (x1, . . . ,xn)µ. Une solution du systeme est unpolynome qui doit etre solution de tout operateur differentiel associe a un monome de degre µ. Un tel polynomea necessairement un degre inferieur ou egal a µ − 1.

On va maintenant s’interesser aux systemes tels que le sous-schema defini par I ait son support a l’origine.Il est important de comprendre cette situation car il est facile d’en deduire (par translation) des resultats dansle cas general. L’anneau C[x1, . . . ,xn]/I est ici local et est un C-espace vectoriel de dimension t. Les solutionsdu systeme sont alors d’apres le theoreme et la proposition des polynomes de degre ≤ t − 1. Nous devonsdonc rechercher des polynomes qui sont solutions d’operateurs differentiels lineaires a coefficients constants.Or a operateur est associe un polynome. On va decrire cette situation de maniere plus intrinseque. Soit R unanneau, M un R-module et S(M) =

⊕h Sh(M) l’algebre symetrique. Un operateur differentiel homogene

d’ordre h lineaire a coefficients constants est une application R-lineaire φ : S(M) → S(M) de degre −htelle que φ(m1 . . . mp) =

∑J φ(mJ )mJ′ pour tout p ≥ h, mi ∈ M , J = (j1, . . . ,jh) = suite croissante

de h entiers 1 ≤ j1 < . . . < jh ≤ p, J ′ designe la suite croissante [1,p] − J et mJ = mj1 . . . mjh. Si

h ≥ O et si f est une forme lineaire sur Sh(M), alors il existe un et un seul operateur differentiel homogeneφ d’ordre h sur S(M) qui prolonge f . Si p ≥ h, on a φ(m1 . . . mp) =

∑J f(mJ)mJ′ . Si 0 ≤ p < h,

φ/Sp(M) = 0. Le module ∇hS(M) des operateurs differentiels homogenes d’ordre h est isomorphe au moduledes formes lineaires sur Sh(M). L’algebre ∇S(M) =

∑h≥0 ∇hS(M) des operateurs differentiels s’identifie

a l’algebre U =∑

h Uh, Uh = HomR(Sh(M),R). Dans notre situation, on a M = V espace vectoriel dedimension n sur C. L’algebre des operateurs differentiels sur S(V ) s’identifie a S(V ∗) = algebre symetriquedu dual de V . Si f1, . . . ,fp ∈ V ∗ et v1, . . . ,vp ∈ V , on a f1f2 . . . fp(v1 . . . vp) = permanent de fi(vj)) ouper(Cij) =

∑π∈Sp

c1π1 . . . cpπp . On considere un ideal I ⊂ S(V ∗) et il s’agit de determiner son annulateur dansS(V ). On s’interesse donc a un ideal I qui definit un sous-schema ayant pour support l’origine. Les solutionsdu systeme sont des polynomes de degre ≤ t − 1 si dimS(V ∗)/I = t. On a vu dans la demonstration de laproposition qu’on avait alors I ⊃ (x1, . . . ,xn)t. Si I = (x1, . . . ,xn)t l’espace des solutions est l’espace despolynomes de degre ≤ t − 1. Le cas suivant est I =

((x1, . . . ,xn)t,L

)ou L est un polynome. L’espace des

solutions est alors forme des polynomes de degre ≤ t − 1 qui sont solutions de l’operateur differentiel L(

∂∂x

).

Le resultat suivant peut alors etre utile.

Proposition 2.3 [6] Soit L ∈ C[x1, . . . ,xn] = S, L = 0, et L(

∂∂x

)l’operateur differentiel associe. Alors

L(

∂∂x

): S → S est surjectif. Plus precisement si l = mult 0 L designe la multiplicite de L a l’origine

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Math. Nachr. 281, No. 5 (2008) 647

L(

∂∂x

) ( ⊕m+10 Sk

)=

⊕m0 Sk ou Sk designe la partie homogene de degre k de S. En particulier, si Hm

est l’espace des polynomes de degre ≤ m qui sont solutions de L(

∂∂x

), on a

dimHm = dm − dm−1 = dm si m < 1

avec dm = dim⊕m

0 Sk.

On peut alors traiter le cas generique lorsque n = 2. On a une description assez precise de HilbtC

2 [8].Si π : HilbtC2 → SymtC2 est le morphisme d’Hilbert–Chow, on sait que π−1(t[0]) est irreductible [2] et dedimesion t − 1. Le point generique correspond a l’ideal I =

(xt

1,x2 − a1x1 − · · · − at−1xt−11

).

Proposition 2.4 Soit I =(xt

1,x2 − a1x1 − · · · − at−1xt−11

) ⊂ C[x1,x2] l’ideal correspondant au pointgenerique de π−1(t[0]) ou π est le morphisme de Hilbert–Chow π : HilbtC2 → SymtC2. L’espace vectorieldes solutions du systeme associe a I est de dimension t et admet une base (Q0, . . . ,Qt−1) ou Qj est un polynomede degre j.

P r e u v e. On sait que les solutions sont des polynomes de degre ≤ t− 1. Tout polynome de degre ≤ t− 1 estsolution de ∂t

∂xt1

. Nous devons donc nous interesser aux polynomes de degre ≤ t−1 qui sont solutions de P2

(∂∂x

)

ou P2 = x2 − a1x1 − · · · − at−1xt−11 . On utilise la proposition avec L = P2. On a l = 1 et n = 2 et on obtient

dim Hm = m + 1, 0 ≤ t − 1. On prend Q0 non nul dans H0, Q1 ∈ H1 − H0, . . . ,Qt−1 ∈ Ht−1 − Ht−2.

On va maintenant considerer un cas ou les polynomes Pi sont homogenes.

Theoreme 2.5 Soit Pi

(∂∂x

)f = 0, i = 1, . . . ,n, un systeme de n equations ou Pi ∈ C[x1, . . . ,xn]. On

suppose que les polynomes Pi sont homogenes de degre ki et admettent l’origine comme seul zero commun dansCn. Alors toute solution C∞ (resp. holomorphe) du systeme est un polynome de degre inferieur ou egal a Σki−n.Plus precisement il existe une solution g de degre Σki − n telle que toute autre solution est de la forme Q(g) ouQ est un operateur differentiel lineaire a coeficients constants.

P r e u v e. On rappelle la methode des systemes inverses [3]. Si (A,P ) est un anneau local de dimension deKrull zero, on note ωA l’enveloppe injective de A/P . C’est a isomorphisme pres l’unique extension essentielleinjective de A/P . Le foncteur M → D(M) = HomA(M,ωA) est alors dualisant. On dira que A est Gorensteinsi ωA = A. Si S = k[x1, . . . ,xn] et T = k

[x−1

1 , . . . ,x−1n

] ⊂ k(x1, . . . ,xn), on munit T d’une structure deS-module de la maniere suivante: p ∈ S, q ∈ T etant des monomes alors p ·q = pq dans k(x1, . . . ,xn) si pq ∈ T ,p · q = 0 sinon. On a alors une bijection entre les S-sous-modules de type fini M ⊂ T et les ideaux I ⊂ S telsque I ⊂ (x1, . . . ,xn) et S/I local de dimension zero.

M −→ (0 :S M) = annulateur de M dans M,

I −→ (0 :T I) = sous-module de T annule par I.

Si M et I se correspondent alors M = ωS/I . Les ideaux I ⊂ (x1, . . . ,xn) ou S/I est local, Gorenstein dedimension 0 sont exactement les ideaux de la forme I = (0 :S g) ou g est un element non nul de T . Le S-module T s’identifie donc au dual gradue

⊕d Hom(Sd,k). On a l’interpretation suivante en termes d’operateurs

differentiels et de solutions polynomiales : Si S/I est local Gorenstein de dimension zero avec I ⊂ (x1, . . . ,xn)alors il existe une solution polynomiale g commune a tous les operateurs differentiels associes aux elements deI telle que tout autre solution polynomiale s’obtienne en appliquant a g un operateur differentiel. On dira queg est une solution generatrice. Passons a la demonstration du theoreme. Les solutions sont toutes polynomialescar le sous-schema defini par I = (P1, . . . ,Pn) a pour support l’origine. On note R =

⊕Rk l’anneau gradue

S/I = C[x1, . . . ,xn]/I . Le theoreme de Macaulay [9] affirme que dimC RN = 1 pour N = Σki − n et que lamultiplication Rk ×RN−k → RN est non degeneree. L’anneau R est artinien Gorenstein. Il resulte du theoremede Macaulay que Rk = 0 si et seulement si 0 ≤ k ≤ N . En particulier tout polynome homogene de degre N + 1appartient a I . Toute solution du systeme est donc un polynome de degre ≤ N . Il existe une solution generatrice.

Il faut montrer qu’elle est de degre N . Comme dimSN = dim IN +1 on a une application SN(f1,...,fu)−−−−−−→ Cn ou

(f1, . . . ,fu) est une base de IN . Chaque element de cette base est vu comme un operateur differentiel homogened’ordre N, c’est a dire comme une forme lineaire sur SN . Le noyau de cette application est de dimension 1.Il y a donc (a un coefficient non nul pres) une seule solution polynomiale de degre N . C’est donc la solutiongeneratrice.

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648 D’Almeida: Operateurs differentiels

3 Systemes avec second membre

On considere un ouvert convexe de Rn (resp. Cn), des fonctions gi ∈ C∞(Ω) (resp. holomorphes sur Ω) etPi ∈ C[x1; . . . ,xn], i = 1, . . . ,k. On cherche les solutions du systeme Pi( ∂

∂x )f = gi, i = 1, . . . ,k avec f ∈C∞(Ω) (resp. holomorphe dans Ω). Les conditions Pi

(∂∂x

)gj = Pj

(∂∂x

)fgi, 1 ≤ i < j ≤ k, sont evidemment

necessaires pour qu’il y ait une solution. Le theoreme d’Ehrenpreis–Malgrange–Palamodov [4] donne une condi-tion necessaire et suffisante pour que ce systeme ait une solution: si Q1, . . . ,Qk sont des polynomes tels queΣQiPi = 0 on doit avoir ΣQi

(∂∂x

)gi = 0. On note I = (P1, . . . ,Pk) l’ideal de S = C[x1, . . . ,xn]. On a un

morphisme Sk ϕ→ I: (Q1, . . . ,Qk) → Q1P1 + · · · + QkPk. Le noyau de ce morphisme est le premier moduledes syzygies de I . C’est un S-module de type fini dont il faut determiner un systeme generateur. Si on a une

presentation libre S1 A→ Sk ϕ→ I les l colonnes de la matrice A donnent un systeme generateur du noyau de ϕ.Pour un ideal arbitraire I ⊂ S la determination explicite du premier module des syzygies de I est loin d’etre aisee.Lorsque la dimension dimC C[x1, . . . ,xn] = t est finie on peut etablir une majoration du degre des polynomesQi qui apparaissent dans un systeme generateur de kerϕ. La recherche des polynomes Qi est donc ramene a unprobleme d’algebre lineaire.

Theoreme 3.1 Soit I = (P1, . . . ,Pk) un ideal de C[x1, . . . ,xn] tel que dimCC[x1,...,xn]

I = t < ∞. Soit S1 A→Sk → I une presentation libre. Si t(Q1, . . . ,Qk) est une colonne de la matrice A alors max1≤i≤k deg Qi ≤t + 1 − min1≤i≤k deg Pi.

P r e u v e. On plonge Cn dans Pn et on utilise la notion de regularite de Castelnuovo–Mumford. Ceci ne posepas de probleme car le sous-schema defini par I est fini dans Cn et n’a pas de point a l’infini. Un faisceau coherentF sur un espace projectif P est dit m-regulier si Hi(P,F(m − i)) = 0 ∀i > 0. D’apres [7], si F est m-regulieralors pour tout l ≥ 0, F(m + l) est engendre par ses sections globales et F est m + l-regulier. De plus lesapplications naturelles H(P,F(m)) ⊗ H(P,O(l)) → H(P,F(m + l)) sont surjectives. On pose P = P (V )ou dimV = n + 1 et S′ = SymV . Si F est un faisceau coherent sur P tel que H(F(l)) = 0 pour l 0, onpose F =

⊕l H(P,F(l)). C’est un S′-module gradue. Il admet une resolution libre graduee minimale:

0 −→ En+1 −→ . . . −→ E1 −→ E0 −→ F −→ 0

ou chaque Ep est un S′-module libre gradue. Les fleches sont donnees par des matrices de polynomes homogenesne contenant pas de constantes non nulles comme entrees. On pose Ep =

⊕h S′(−ap,h) et ap = maxhap,h. Si

F est m-regulier on a ap ≤ p+m [5, p. 107]. On utilisera ceci en prenant pour F le faisceau d’ideaux definissantdans Pn le sous-schema defini par I dans Cn. Les polynomes Qi (apres homogeneisation) apparaissent commecoefficients de la matrice E1 → E0. Il en resulte que deg Qj ≤ a1 − mini(deg Pi). On dit qu’un sous-schemade Pn est m-regulier si son faisceau d’ideaux l’est. Pour conclure il suffit de remarquer qu’un sous-schema finide longueur t est t-regulier ([5, p. 109]) et d’utiliser a1 ≤ 1 + t.

Remarque 3.2 Ce theoreme ramene donc la recherche des conditions necessaires et suffisantes d’Ehrenpreis–Malgrange–Palamodov a un exercice d’algebre lineaire. En effet il s’agit de determiner les polynomes Qi tels queΣQiPi = 0, les degres des polynomes Qi etant majores par t + 1 − mini(deg Pi). Des que les polynomes Qi

sont determines il faut s’assurer que∑

i Qi

(∂∂x

)gi = 0. La majoration donnee par le theoreme est optimale. En

effet, si on considere l’ideal I = (P1,P2) de C[x1,x2] avec deg P1 = 1, deg P2 = t, la resolution est donneepar un complexe de Koszul. Dans ce cas, la condition necessaire P1

(∂∂x

)g2 = P2

(∂∂x

)g1 est suffisante. On a

Q1,Q2) = (−P2,P1) et donc deg Q1 = t = t + 1 − min(1, t).

References

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