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No 4 septembre 2007 Portraits

PAGES ROMANDES - Portraits

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Une galerie de personnages romands proches des milieux du handicap. Celui-ci a construit la plus ancienne institution vaudoise pour les personnes avec un handicap mental. Celle-là vit avec un handicap. D’autres ont passé leur vie à réaliser des projets visant à améliorer la vie des personnes avec un handicap…

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No 4 septembre 2007

Portraits

Impressum Pages romandes Revue d’information sur le handicap mental et la pédago-gie spécialisée, éditée par la Fondation Pages romandes, Institution de l’Espérance, 1163 Etoy

Conseil de FondationPrésident : Charles-Edouard Bagnoud

Rédactrice et directrice de revueSecrétariat, réception des annonces et abonnementsMarie-Paule ZuffereyAvenue Général-Guisan 19CH - 3960 SierreTél. +41 (0)79 342 32 38Fax +41 (0)27 456 37 75E-mail: [email protected]

Comité de rédactionMembres: Marie-Christine Ukelo-Mbolo Merga, Olivier Sala-min, Valérie Melloul, Eliane Jubin Marquis, Laurie Josserand, Marie-Paule ZuffereyResponsable de publication: Charles-Edouard Bagnoud

Parution: 5 numéros par anMi-février, mi-avril, mi-juin, mi-septembre, début décembre

Tirage minimal: 800 exemplaires

Abonnement annuelSuisse Fr. 45.--AVS, étudiants Fr. 38.--Abonnement de soutien Fr. 70.--Etranger Euros 35.--

Publicité et annonces - Tarifs1 page Fr. 800.--1/2 page Fr. 500.--1/4 page Fr. 250.--1/8 page Fr. 125.--1/16 page Fr. 50.--Tarifs spéciaux pour plusieurs parutionsLes demandes d’emploi provenant des étudiants des écoles sociales romandes sont gratuites

Délai d’insertion2 semaines avant parution

Compte bancaireBanque cantonale du Valais, 1951 SionEn faveur de K0845.81.47 Pages romandesCompte 19-81-6Abonnement pour la France: faire parvenir vos coordon-nées et votre règlement par chèque bancaire à Jean-Fran-çois Deschamps108, rue Ire ArméeF - 68800 Thann

GraphismeClaude Darbellay, www.saprim.ch

Mise en pageMarie-Paule Zufferey

ImpressionEspace Grafic, Fondation Eben-Hézer, 1000 Lausanne 12

Crédits photographiques et illustrationsFotolia, Photo-club «Vallée de la Sorne», Fabien Hecquet, Eliane Jubin Marquis, Olivier Salamin, Didier Liautaud, Eddy Blandenier, Institution de l’Espérance, Etoy

Photos de couverture: Didier Liautaud

N.d.l.r.: Les articles signés n’engagent que leurs auteurs. La présentation, les titres et les intertitres sont de la rédaction.La reproduction des textes parus dans Pages romandes est souhaitée, sous réserve de la mention de leur source.

©Pages romandes

Sommaire

Dossier: Portraits

2 Marie sourire

Portrait de Marie Raaflaub, Jura Eliane Jubin

3 Editorial Marie-Paule Zufferey

4 Quand l’utopie se fait Espérance Auguste Buchet, fondateur d’institution

Marie-Paule Zufferey

6 De la musique et des couleurs La constellation Blandenier, Savagnier

Olivier Salamin et Marie-Paule Zufferey

9 Du plaisir intellectuel à l’émotion partagée André Baechler et le projet Handi The Cat

Olivier Salamin

11 Avant de déplacer les montagnes Fernand Ballestraz, homme de transports

Olivier Salamin

12 Vieillir ensemble sur un air de musique Claude-Alain et Denise Fromaigeat Laurie Josserand

14 Des bulles d’oxygène pour revenir à soi et rencontrer les autres Marie-Christine Ukelo Mbolo Merga

17 Dépasser le discours sur l’égalité Georges Rais, Jura Noémie Pala

19 Accompagner les personnes en situation de handicap: ACERISH2, projet européen

Norbert Genoud

22 En bref

23 Sélection Loïc Diacon

24 Séminaires, colloques et formations

«Dès le matin il faut penser à des trucs bien et ensuite c’est facile, tu as envie de sou-rire!» Marie a choisi mon bureau comme lieu de rencontre, «ça fait adulte» dit-elle. Elle arrive le visage plein de lumière, les yeux brillants. Un large sourire atteste de son plaisir à répondre à mon invitation. Un cartable sous le bras, Marie s’installe d’abord avec assurance à la petite table puis d’un bond se relève, s’excusant de ne pas en avoir demandé l’autorisation. Le ton est donné, Marie est une jeune femme décidée, légèrement fonceuse mais qui compose avec le bon usage.«J’ai toujours le sourire et c’est cela qui doit être dit de moi» s’exclame Marie en ouver-ture d’interview. «Tout le monde le dit et moi j’aime être comme ça» précise-t-elle. Sa recette? «Si j’ai peur, si j’ai des soucis, eh bien c’est simple, je n’y pense pas!». Pour bien attester que cela fonctionne, elle pré-cise: «Je me suis fais opérer de la cataracte, il y a 2 ans et j’ai parfois un peu peur que ça recommence... Eh bien, je ne veux telle-ment pas y penser que je ne peux même pas m’en souvenir!». Avoir le statut d’adulte est important pour Marie, elle y reviendra plusieurs fois durant notre échange. «Je pense être une personne exceptionnelle» dit-elle «Sinon tu ne ferais pas mon portrait! On dit que j’ai une triso-

mie; je ne sais pas ce que c’est, mais je sais que je fais des trucs plus compliqués que d’autres, tout le monde ne sait pas cuisi-ner... Je chante aussi! Je suis adulte parce que j’ai 23 ans, mais cela ne suffit pas, il faut aussi sortir de chez soi. Si tu as 30 ans et que tu ne sors jamais, eh bien, tu n’es pas adulte!» Marie ouvre son cartable et montre des textes manuscrits créés à l’atelier d’écri-ture. Elle présente des photos qui attestent de sa participation au congrès AIRHM à Lausanne en 2006, sa rencontre avec le mi-nistre jurassien de la santé et du social, à qui elle a parlé des cours de formation continue qu’elle fréquente assidûment. Avec fierté, elle sort ce qui semble être son trésor: le pro-gramme du spectacle Stars d’un instant. Elle est parfaitement consciente que lorsqu’elle entame sur scène sa version de la chanson «Le Sud» de Chimène Badi, le public a de la peine à contenir son émotion. Le regard que pose Marie sur la vieillesse est rempli de sagesse. «A 98 ans je serai vieille, pas à 30. Lorsque je serai vieille, je serai tou-te différente, je n’aurai plus de défauts. Ce sera difficile de les enlever, mais j’ai encore du temps. Mes défauts: compter de l’argent quand il y en a trop. Je ne suis pas naturelle quand on me prend en photo et j’ai, oh là là, très très peur des araignées...»

Marie sourirePortrait de Marie RaaflaubInterview réalisée par Eliane Jubin Marquis

Le plus grand bonheur de ta vie?Difficile j’en ai plein! Je rêve d’être tante, peut-être même marraine. C’est aussi d’être là maintenant avec toi, de répondre aux questions. Cela me fait tellement plaisir de chanter et danser, être sur scène. Je suis soulagée et heureuse quand les gens applau-dissent, j’ai envie de leur dire merci d’être là. S’ils n’applaudissent pas, c’est dommage, mais ce n’est jamais arrivé.Ce que tu aimes le moins?Bonne question…ouuh... là, je trou-ve pas, enfin peut-être aller à la cave. (Marie mime des araignées qui grim-pent). L’hiver, on met une tortue dans la cave, mais elle ne les mange pas. Dommage.Côté cœur?Je n’ai pas de petit ami. En ce mo-ment! Il y a plein de mecs qui me plaisent, je ne suis pas prête pour être amoureuse. De toute façon c’est les mecs qui font le premier pas.Ton plat préféré?Tu me demandes quelque chose d’in-téressant… Les lasagnes. Je suis, (oh oui!) gourmande, mais je dois faire attention!Un voyage préféré?L’Italie, j’aime bien l’italien... Grazie mille…. Per favoreTon chanteur préféré?Il y en a plein, tu dis un garçon ou une fille? Bon, moi je dis Chimène Badi.La politique? Oh! Ça veut dire quoi la politique? moi je ne sais pas!

©Photo-Club «Vallée de la Sorne»

Il y a portrait et portrait. De la fiche signalétique au curriculum vitæ amélioré, en passant par le genre «rubrique nécrologique», sorte d’hagiographie truffée d’ad-jectifs aussi élogieux qu’hyperbo-liques, les modèles à ne pas imiter dans le genre sont aussi nombreux que variés. Ces types de portraits, figés dans leur improbable éternité, me font penser à ces anciennes photogra-phies, couleur sépia, que nous avons tous, un jour ou l’autre, dénichées au fond d’un vieux ti-roir. Comme celles de ces couples d’antan, le jour de leur mariage. Elle est assise. Lui est debout à l’arrière-plan, une main posée sur l’épaule droite de l’épouse. La composition du tableau n’est pas anodine; elle fixe déjà les hiérar-chies. Ils regardent le vide, droit devant eux; ne sourient pas, ou si peu. Pas de faille dans cette ordonnance; rien ne transparaît de leurs possibles incertitudes ni de leurs probables fragilités. Ces deux êtres-là ont l’air d’avoir été soustraits, l’espace d’un cliché, au monde sensible environnant. Il arrive qu’on ait rajouté un peu de rose sur les joues des personnages, mais la vie elle, est restée hors du champ de l’objectif. Tout l’intérêt d’un portrait réside pourtant dans sa capacité à relayer la vie, à prolonger le mouvement.

C’est cette conviction qui a ame-né le comité de rédaction à vous proposer un dossier en forme de galerie de personnages. Ces pages d’automne s’égrènent dès lors comme une suite de ren-contres. Les hommes et les fem-mes qui ont accepté de jalonner notre tour de Romandie, ont en commun d’appartenir au monde du handicap ou de lui avoir ma-nifesté, au cours de leur parcours personnel ou professionnel, un intérêt particulier. Projets, créa-tion de concepts, recherche, réa-lisations concrètes se déclinent au gré d’itinéraires existentiels qui n’ont à aucun moment la pré-tention de s’ériger en modèles. Les mots disent ce qu’ils peuvent; les gestes et les situations en sug-gèrent d’autres; le reste est pal-pitation qu’il faut saisir entre les lignes, dans les instantanés de ces vies racontées. Au fond, le but de cette visite gui-dée, aux étapes arbitraires, n’est autre que de permettre le partage d’expériences et le prolongement d’un certain souffle créatif. Celui-là même qui pousse certains êtres à refuser que les choses de l’humain soient écrites une fois pour toutes; à inventer des temps où les rôles et les destins des uns et des autres ne seront pas définitivement figés sur papier jauni, comme sur des clichés venus d’autrefois...

Edito

La vie et rien d’autreMarie-Paule Zufferey, rédactrice

Soleils

L’adolescentenousapportechaquefoisundessin;oeuvregaucheetmagiqued’handicapéementale;cespetitspersonnagessincèresetmaladroits,tisséedegribouillisetd’azur,cessoleilsdilatéscommesoncœuretcesorchestresdecouleurs.Ellenousl’apportecommelesaintsacrement:lafeuilleentrembled’émotion.Embrassa-desetjoie.Onfaitfanfareetonfaitexposition.C’estsavictoire.Elleenarêvétoutelasemaine.Cesdessinssontincandescentsdecouleurs;ilsvouséclabous-sentdepollensàvousrendreivre.Broderiedemimosas.Scoriesdufeuquirougeoientaucoindelapagepourl’embra-sertoutentièrequandonauratournélatête.Ilestdesdessinsaussiardentsquedesallumettes.Opulencesdecesoeuvresnaï-ves,redondancedessymboles,grandeaventuredecesgestesquel’handicapéeainscritssurlepapiertremblamt.L’adolescenteestvoûtéeparledestin,hirsuteettimide,dansuncarcandepréjugésetdeblessu-res.Maiselleestaussiunedeces fleurs sauvages au bord des talusqu’onfaitsemblantdenepasvoirparfaussedécencemaisquinouslancesescorollesàpleinsrayons.Petiteprocelaineoùsebouscu-lentlatendresse,l’affection,lesfrustrationsetlescrises.Pou-péedeporcelaineauxcheveuxraides:etsionécoutaittamainettonpinceau?

Impatiences, recueil de témoignages de Claude Luezior1, Buchet-Castel 1995

1Claude Luezior est le nom de plume de Claude-André Dessibourg, neurologue et chargé de cours à l’Université de Fribourg. Durant l’année 2006, Claude-André Dessibourg a apporté sa collaboration à Pages romandes, en assurant la rubrique «Les cahiers d’un clinicien». Il est également l’auteur de nombreux autres ouvrages, scientifiques et littéraires.

Quand l’utopie se fait EspéranceAuguste Buchet, fondateur de l’Espérance, EtoyMarie-Paule Zufferey, rédactrice

Le choix d’Auguste Buchet, un homme venu du 19e siècle, pour représenter le canton de Vaud dans une galerie de portraits romands peut sur-prendre. Cette convocation du passé dans un dos-sier d’aujourd’hui est à comprendre comme un clin d’œil au fondateur de l’Espérance, à Etoy. Cette institution est en effet la première structure romande à avoir été spécialement créée pour ac-cueillir des enfants souffrant notamment de re-tards intellectuels. Elle est aussi, depuis quelques années, le siège de la fondation Pages romandes…

Le 1er mai 1872, s’ouvrait à Etoy, la toute pre-mière structure romande accueillant des enfants avec un handicap mental. Jusque-là, ces derniers n’avaient d’autre choix que de rester à la charge de leur famille ou d’être abandonnés dans des institutions psychiatriques. Cette maison d’un nouveau type est la concrétisation d’un rêve, celui d’Auguste Buchet, natif de la commune, alors âgé de 27 ans. «J’ai l’idée de fonder, avec l’aide de Dieu, une institution pour les idiots de Suisse française», écrivait-il dans son journal, en 1870.Les conditions dans lesquelles a lieu l’accueil des 5 premiers résidents de ce qui s’appellera plus tard l’Espérance n’ont rien de banal. Char-gée de l’éducation des pensionnaires, Charlotte Buchet, la sœur d’Auguste n’a que 16 ans. Une jeune femme est engagée pour s’occuper de la cuisine; et si le fondateur lui-même «met la main à tout, avec un entrain infatigable, il ne possède en propre que 800 francs. Cette somme doit lui permettre tout à la fois d’aménager un logement pour 10 à 12 personnes, d’acheter le mobilier, la literie, et d’assurer les provisions…». Ces données de départ, pour minimales qu’elles nous paraissent, n’entament nullement l’ardeur de cet homme qui a fait des trois vertus théolo-gales – la foi, l’espérance et la charité – ses prin-cipes de vie. Militant de la confiance en Dieu et de la compassion envers les déshérités, il ira jusqu’à refuser l’aide de l’Etat: «L’Etat! Je ne peux guère accepter son concours, ayant pour principe de marcher par la foi en Dieu qui est capable d’incliner les cœurs des riches en faveur de ces pauvres enfants».Auguste Buchet a 16 ans lorsqu’il prend connais-sance d’un rapport de John Bost, un Genevois devenu pasteur en France et responsable des

Asiles de la Force (Dordogne). C’est dans cette lecture d’adolescent qu’il faut chercher les pré-mices de son œuvre. L’expérience professionnelle, il l’acquiert à l’Ins-titut genevois des sourds-muets, où il travaille durant 4 ans. Quant à l’approche pédagogique, étant donné qu’à cette époque, les théories édu-catives et du développement en sont encore à leurs balbutiements, Auguste Buchet se forge, à la lumière de ses pratiques, ses propres convic-tions. «A chacun, il faut un régime particulier pour le connaître et diriger ses faibles facultés vers un but éducatif et pratique. Si notre élève vit couché, asseyons-le; s’il est assis, mettons-le debout; s’il ne mange pas seul, tenons ses doigts pendant le repas; s’il ne regarde pas ni ne parle, encourageons-le par le regard et la parole; de cette manière, nous réveillerons sa volonté, son esprit et son cœur». Ce court extrait contient à lui seul les esquisses de bien des principes éducatifs dont la modernité est indéniable: en-seignement différencié, objectifs, projets indi-vidualisés, prise en compte de la globalité de la personne, etc. Depuis sa création, l’œuvre d’Auguste Buchet n’a cessé de se développer. Après «Le Sapin», bien d’autres maisons ont été construites à Etoy et dans les alentours, dans le but d’accueillir au fur et à mesure, non seulement des enfants avec un handicap, mais aussi des adultes. Lors de son ouverture, l’Espérance comptait 5 résidents; en 1922, ils sont au nombre de à 155 et en 1997, on en signale 235.En créant, au 19e siècle, cette structure pour la prise en charge des personnes handicapées mentales en Suisse romande, Auguste Buchet a indéniablement fait œuvre de pionnier. 135 ans plus tard, le modèle institutionnel doit faire face à un questionnement de plus en plus pointu, que ce soit en termes de financement ou d’approche socio-éducative. Des concepts alternatifs de prise en charge commencent à se dessiner ici et là. Qui inventera et quoi, qui sera retenu comme une œuvre d’avant-garde, par les rédacteurs de Pages romandes, dans 135 ans?

Cet article a été écrit sur la base des informations contenues dans les deux ouvrages suivants :«Auguste Buchet, fondateur de l’Espérance», Buchet-Ramuz Berthe, 1971«L’Espérance 1872-1997», Claude Mellot.

Auguste Buchet naît à Etoy le 20 février 1845. «Dès son jeune âge, il est un être à part; on di-rait aujourd’hui un marginal. Né d’une famille paysanne de 5 enfants, il suit l’école du village, supporte mal un enseignement rigide, mais pour plaire à sa mère, se contraint à être un élève attentif». Dans une biographie écrite par le pasteur Raccaud en 1921, Auguste Buchet est décrit comme un enfant très vivant, aimant s’amuser et amuser les autres. A 18 ans, il est requis par le Conseil municipal d’Etoy pour y instruire l’une des deux classes d’enfants de l’école com-munale. Parallèlement à ses acti-vités d’enseignant, il fonde dans son village, une Ecole du diman-che et une société de chant. Puis il part pour Genève, où durant 4 ans, il seconde le directeur de l’institut des sourds-muets.En 1872, année de la fondation de l’Espérance, Auguste Buchet épouse Blanche Vaucher, qui décède trois ans plus tard, après lui avoir donné deux fils, Victor (qui ne vivra pas) et Paul. Il se remarie en 1883 avec Sophie Goetz, avec laquelle il aura éga-lement deux enfants: Blanche et Gustave (qui deviendra un peintre connu).Auguste Buchet meurt à l’âge de 43 ans, le 9 décembre 1888.

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De l’Espérance d’hier à celle de demain…

Questions à Charles-Edouard Bagnoud, directeur de l’Espérance, Etoy

La création d’une structure de prise en charge pour les personnes handicapées a été, pour Auguste Buchet, un acte de foi. Vous sentez-vous héritier de cette posture? Comment se traduit-elle aujourd’hui dans la vie de l’institution?Il serait difficile de renier un héritage tel que celui légué par Auguste Buchet, tant ce pédagogue a fait preuve d’avant-gardisme et d’humanisme dans l’approche du handi-cap. Dans ce sens, en tant que dépositaire de son œuvre, à titre de lointain successeur, je ne peux ressentir que des sentiments très forts où se mêlent humilité, reconnaissan-ce, fierté et responsabilité. Cependant, mes motivations à poursui-vre sa mission trouvent leur inspiration et leur source dans d’autres domaines que celui de la foi. A un niveau général, nous ne renions pas cet héritage chrétien qui, en termes culturels, inspire la vie institution-nelle comme il inspire d’ailleurs la société occidentale dans son ensemble. Toutefois, nous nous définissons et nous nous posi-tionnons clairement comme une insti-tution laïque, respectueuse de toutes les croyances et nous référant à la Déclaration des droits de l’homme, à la Déclaration des droits du déficient mental et, par consé-quent, aux préceptes de l’Humanisme. La très grande majorité de nos résidents étant de confession chrétienne, ils peuvent béné-

ficier librement du concours d’aumôniers. Ces derniers jouent un rôle important, par-ticulièrement lors du cheminement vers la mort. Notre site d’Etoy étant conçu sur le modèle d’un village, il possède naturelle-ment sa chapelle.

A l’époque de la création de cette institution, la recherche dans le domaine du handicap en était à ses balbutiements. Tout en s’appuyant sur les premières publications en la matière, Auguste Buchet a également mené ses propres réflexions concernant la prise en charge des personnes han-dicapées. Aujourd’hui, qui décide (et sur quelles bases) des grandes orientations pédagogiques de l’institution? Statutairement, il appartient au directeur de définir l’orientation pédagogique de l’Institution, dans le cadre fixé par le but de la Fondation et les options du Conseil de fondation. Ainsi, notre socle théorique est aujourd’hui bâti sur 3 axes principaux:• Un concept général de pensée, d’action et de communication: l’approche systémique.• Un concept d’intervention: l’approche globale de la personne.• Un concept d’accompagnement: la valo-risation des rôles sociaux.Ce sont les besoins des personnes handica-pées mentales, sur la base des connaissances issues des sciences humaines, qui nous ont fait opter pour ces 3 piliers référentiels. Ces derniers ont pour objectif de nous aider à mettre en œuvre les actions et les straté-gies les plus pertinentes pour remplir notre mission.Connaissant l’importance de la formation

continue pour nos collaborateurs-trices et la nécessité de se tenir informés des évolu-tions liées au handicap mental, nous avons créé un département chargé, notamment, de gérer la formation de notre personnel et d’effectuer, à l’interne ou en collabora-tion avec les centres de formation, de la recherche.

Il y a 135 ans, créer une institution de ce type, c’était faire acte de pionnier. Comment perpé-tuez-vous l’esprit d’innovation de votre fonda-teur? Quels sont vos projets pour l’avenir?L’esprit d’innovation, mais surtout la concrétisation des projets qui en sont issus, ne peuvent être que la résultante d’un tra-vail d’équipe. Dans ce sens, le fait de diriger une institution de grande importance me permet de rester relativement éloigné des aspects purement opérationnels et de pou-voir ainsi consacrer du temps à la réflexion, notamment en ce qui concerne les visions et les perspectives d’avenir pour l’Espérance. Nous travaillons donc, avec mon équipe de direction, sur un programme d’orientation à moyen et long terme, que ce soit au ni-veau pédagogique, structurel ou financier. Nos projets les plus importants pour l’ave-nir sont la création d’un lieu d’hébergement (internat scolaire et relève des parents) pour des enfants et adolescents en situation de polyhandicap, la mise sur pied d’un service permanent d’animation socioculturelle et la restructuration de l’accompagnement de jour, en fonction des nouveaux besoins liés au vieillissement de nos résidents et aux problèmes psychiques que certains rencon-trent. Nous avons également un certain nombre de projets liés aux évolutions que la mise en œuvre de la RPT va générer mais il est encore trop tôt pour les évoquer plus précisément.

L’Espérance aujourd’hui...

Population accueillie: personnes avec un handicap mental moyen à sévère. Trou-bles associés. Dès le début de la scolarité et jusqu’en fin de vie.

- 270 résidents, dont 215 internes;- 235 postes occupés par 350 personnes;- 17 bâtiments répartis sur 11 hectares; concept du «village» (site d’Etoy);- 1 foyer et 3 structures d’appartements dans les villes environnantes;- 20 ateliers sur le site d’Etoy et 2 en ville de Morges;- environ 30 millions de budget annuel.

«L’Espérance, cette démarche à la limite de l’absurde, qui consiste à croire, à vouloir, à penser qu’il est encore et toujours possible de faire un pas malgré tous les obstacles, toutes les fatalités, tous les échecs… Qu’il y a encore, et malgré tout, un lendemain à vivre, qu’il y a toujours une issue, une porte dans ce monde clos » Dr. Philippe Gabbaï, neuropsychiatre

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On ne rencontre pas Eddy Blandenier, on est accueilli dans la «constellation Blande-nier» de Savagnier. Comme à la maison, on est reçu par une famille en mouvement: Pauline la cadette, qui effectue sa formation d’éducatrice à Lausanne; son frère Jé-rôme, qui passe pour le café. Accompagné de son épouse colombienne, il amène Luisa, leur fille âgée de deux ans, pour l’après-midi. Henriette est aux fourneaux; elle mijote un repas au fumet prometteur, auquel nous serons conviés en toute sim-plicité. Pour dresser son portrait, Eddy a aussi choisi d’inviter Magali Lehmann Meyrat, sa proche collaboratrice. S’il est aujourd’hui «Colporteur’ Couleurs», Eddy Blandenier a aussi été dessinateur en génie civil, éducateur musical, animateur socioculturel, clown et formateur en travail social…

De la musique et des couleursLa constellation Blandenier à SavagnierOlivier Salamin et Marie-Paule Zufferey

Midi, un jour pluvieux de juillet. Nous sommes devant les «Ateliers Sylvagnins», où nous avons rendez-vous avec un col-porteur pas comme les autres. La maison de la rue du Four 5, à Savagnier, est pleine de charme et affiche avec sérénité ses nom-breuses années d’existence campagnarde. Il n’y a pas de sonnerie. Pour alerter ses ha-bitants, il faut ouvrir la porte et s’engager dans le couloir. C’est là que nous croisons Eddy Blandenier. Il arrive d’une entrée si-tuée de l’autre côté de la bâtisse. Une bou-teille de Côtes-du Rhône à la main, il nous invite à le suivre en haut de l’étroit escalier en bois qui débouche sur une cuisine à l’an-cienne où officient Henriette, son épouse et Pauline, sa fille. Deux poignées de mains plus tard, nous voilà invités à partager le repas en train de mijoter sur le feu et dont les arômes flattent déjà délicieusement nos papilles. Magali nous rejoint autour de la grande table familiale.

Visite guidée

En guise d’entrée en matière, nous avons droit aux honneurs de la maison. Cette vieille ferme neuchâteloise a été acquise par la famille Blandenier, il y a quelque 30 ans. Aujourd’hui, des espaces ont été aménagés dans la grange attenante, afin d’accueillir expositions, séminaires et autres rencontres de formation. En ce moment, c’est Catheri-ne Louis, illustratrice de livres pour enfants, qui est l’invitée de ce lieu magique. Magni-fiquement organisée, dans un esprit à la fois didactique et ludique, cette exposition, qui vit ses derniers jours, aura permis aux

élèves de plus de 75 classes d’expérimenter des techniques d’écriture et de dessin. Un très joli succès.

La métaphore de l’axe du pot

L’atelier de poterie d’Henriette Blandenier se trouve au sous-sol, dans l’ancienne écu-rie. Eddy parle avec enthousiasme des tra-vaux de son épouse. En plus de ses propres productions, Henriette donne des cours de travail de la terre à des adultes et reçoit des enfants. Ici encore, il s’agit d’un lieu de rencontre. Avec les autres. Avec soi-même. «Les personnes qui viennent ici doivent se concentrer; ne plus penser qu’à maintenir l’axe du pot, lorsqu’ils tournent de la terre, sinon celle-ci s’effondre et retombe sur elle-même. Cet axe, nous explique Eddy, c’est celui du clown aussi, celui de l’être humain au plus proche de son essence». Cette image reviendra plus tard, lorsque nous évoque-rons avec lui son concept de «clown en ins-titution».

La musique comme fil rouge

La vie professionnelle d’Eddy Blandenier n’est pas un long fleuve tranquille: dessina-teur en génie civil, animateur socioculturel, éducateur musical, clown en institution, formateur en travail social (EESP, Lausan-ne) et aujourd’hui, Colporteur’Couleurs… Ce parcours atypique est traversé par une passion qu’il a reçue de son père: la musi-que. Eddy est une sorte d’homme-orches-tre au grand cœur. Il joue de toutes sortes

d’instruments, notamment de l’accordéon, de l’euphonium… «De la clarinette aussi. Avec elle, on peut jouer de tout; on peut jouer très doux. C’est l’instrument idéal pour improviser dans le regard de l’autre». Cet après-midi-là, dans la chaleur de l’antre des Blandenier, alors que la pluie engrisaille encore la campagne alentour, nous avons droit à un concert improvisé. Taragot pour lui, chant spontané¹ pour Henriette qui s’accompagne également d’une shrutibox sans âge. Moment mythique, presque hors du temps. Nul doute qu’avec de tels argu-ments poétiques, il soit possible d’atteindre des contrées intérieures intouchées, parce qu’intouchables par la parole. C’est le cre-do d’Eddy Blandenier: «Quand les gens ne peuvent plus entendre des mots, la musique passe encore».

D’un Auguste à l’autre

Lorsqu’on demande à Eddy Blandenier ce qui l’a amené à choisir ses métiers dans le domaine social, il a un sourire qui vient d’aussi loin que le souvenir qu’il évoque. «Cela remonte à mon enfance. Mon grand-oncle, Georges Vuilleumier, directeur de l’Espérance à Etoy, invitait mon père, qui était pianiste, à venir jouer dans l’institu-tion vaudoise (voir portrait d’Auguste Bu-chet, p. 4). C’était un moment de fête pour les résidents: «Y’a M’sieur Raoul qui est là!». Ils venaient tous me dire bonjour. Je n’avais guère plus de 4 ou 5 ans, mais je suis resté très touché par ces images. Disons que je suis passé d’un public de fous à… fou de public…»Né de parents engagés, Eddy va côtoyer très vite les problèmes de certains jeunes et de ce fait, orienter résolument son parcours professionnel vers les métiers du social… Il développe des ateliers de peinture pour enfants selon les préceptes d’Arnaud Stern. Pris dans l’histoire des débuts de la civilisa-tion des loisirs, il surfe sur la vague, devient animateur et y ajoute ses compétences mu-sicales. S’appuyant sur la méthode Willems, puis celle de Madame Orff, il s’attache à trouver des modalités d’approche de la

musique pour les enfants et pour les per-sonnes handicapées. Mais la crise horlogère renvoie le luxe des camps de musique au placard et Eddy doit reprendre une activité plus «institutionnelle». Durant 9 ans, il va s’occuper de la formation des moniteurs de camps au sein du Mouvement de la Jeu-nesse Suisse Romande (MJSR). Puis il de-vient formateur à l’Ecole d’études sociales et pédagogiques de Lausanne (EESP), où il enseignera durant 14 ans. Actuellement Eddy Blandenier travaille à mi-temps pour l’Association neuchâteloise de services bé-névoles.Lors d’un voyage d’études en Belgique avec ses collègues de l’EESP, Eddy Blande-nier flashe sur une affiche qui présente un concept qui le séduit immédiatement, celui du «clown relationnel». Il retourne en Bel-gique, se forme et importe cette formation en Suisse. L’idée est de développer les com-pétences relationnelles des accompagnants.

Racontez-nous cette histoire de clown…Eddy Blandenier: Le clown relationnel est un personnage qui évolue sans artifice de spectacle et sans projet pré-établi, mais c’est bien sûr un personnage habité, par les émotions et par le vécu de son occupant. Ce n’est pas quelqu’un qui cherche à faire rire, c’est quelqu’un de disponible. Pour mettre en place ce concept, que nous avons intitulé «clown en institution», nous nous sommes appuyés sur les bases décrites par Christian Moffart (voir encadré ci-des-sous), auxquelles nous avons ajouté une 5e dimension: la temporalité. C’est souvent dans cet espace intemporel de la disponibi-lité que les choses se passent…

Habiter un clown, est-ce une technique qui s’apprend?E.B.: L’histoire des clowns réfère à trois clowns principaux: le clown blanc, Mon-sieur Loyal et l’Auguste. Le clown blanc exprime la verticalité, la beauté et la séduc-tion. Monsieur Loyal est celui qui cadre les activités du cirque. Quant à l’Auguste, c’est un clown rouge, un clodo, quelqu’un de posé dans son bassin. Eh bien, habiter un clown, c’est d’abord une histoire de corps, c’est une posture, un centre de gravité… Dans le clown relationnel, nous habitons l’Auguste (Eddy Blandenier se lève, replie légèrement ses jambes et s’assied dans son bassin). Nous baissons notre centre de gra-vité et nous descendons dans notre ventre, comme les bébés qui marchent (nous don-nons soudain à Eddy Blandenier quelques années de moins…). Ce n’est pas une in-fantilisation, c’est une rencontre de l’enfant qui est en chacun de nous.

Vous ne jouez pas d’autres clowns dans votre répertoire?Disons qu’il y a suffisamment de clowns blancs dans les institutions…

Quel type de réaction un clown peut-il susciter?Magali Lehmann Meyrat²: Je me souviens d’une résidente de Foyer Handicap. Elle nous a montré un accordéon dans son ar-moire, comme si elle voulait en jouer (ce qui ne lui était plus possible). Cette envie de jouer, nous l’avons saisie en l’assistant, pour lui permettre de faire quelques no-tes d’un morceau improvisé à «trois voix».

Il suffit parfois de peu de chose pour voir revivre des personnes que nous rencontrons d’abord dans un repli avancé…Il y a aussi cet autre souvenir: un matin, toujours au Foyer Handicap, alors que les résidents attendaient le repas de midi, l’un d’eux a dit: «On fait un colloque!» et cha-cun a repris des épisodes de la vie de l’insti-tution, singeant les éducateurs pour parler de tel ou tel résident et cet épisode a été un véritable exutoire pour chacun. Dans le jeu et l’exagération, on se réapproprie sa vie…

Qui avez-vous formé à cette approche? E.B: Nous n’avons jamais voulu créer une nouvelle spécialisation ou faire du clown une relation thérapeutique, nous avons plu-tôt voulu offrir un cadeau, un moment, une ouverture pour gérer un paquet d’émotions retenues. Nous l’avons donc d’abord voulu pour les professionnels qui accompagnent, afin qu’ils puissent donner cette ouverture nouvelle à leur approche relationnelle du patient. Les patients se livrent au clown, peu importe que les secrets soient vrais faux, nous les prenons. M.L.M.: Quand nous avons travaillé à Foyer Handicap, c’était plus difficile, il s’agissait d’une autre souffrance, d’une souffrance qui ne se dit pas avec les mots, mais malgré tout, nous avons eu des expé-riences inouïes... E.B.: Aujourd’hui, au plan romand, c’est l’Association Auguste qui a pris le relais…

Vous vous êtes alors tournés vers l’idée du «Colporteur’ Couleurs»?E.B.: Nous avons voulu élargir le profil du clown relationnel à la gérontopsychia-trie. Nous avions pris conscience que les ressources des personnes âgées étaient à chercher du côté de la sensorialité.

Le clown relationnel

Selon Christian Moffart, le concepteur liégeois, les fondements du clown relationnel sont les suivants:1. Psycho-corporel: position physique, disponibilité corporelle;2. Relationnel: importance du regard et du toucher;3. Ludique: le jeu, l’humour, le plaisir de la découverte;4 Symbolique: avec le nez rouge, comme masque qui cache et qui révèle, on entre dans l’imaginaire, la dimension de l’archaïque.

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A partir d’un projet avec l’Association Alzheimer Suisse, nous avons posé un certain nombre d’hy-pothèses:1. des couleurs vives comme support de travail;2. un objet, vecteur de la rencontre;3. un intervenant relationnel;4. une intervention courte;5. … et individuelle.Habillés en jardiniers - deux personnages symbo-liques qui font pousser les fleurs - nous arrivons avec nos valises de couleurs et nous allons vers la création collective de jardins extraordinaires.

Vos hypothèses se sont-elles vérifiées?E.B.: L’effet couleur est indéniable et les objets utilisés sont tout à fait pertinents. Seules les deux dernières propositions ne se sont pas vérifiées et c’est plutôt de l’ordre des bonnes surprises. Nous avons en effet expérimenté qu’il était tout à fait possible de travailler en collectif, puisqu’une dy-namique de groupe semble s’installer à chaque fois et que les participants sont capables de par-ticiper à des séances qui durent jusqu’à 1 heure et demie!

Vos objets sont-ils identifiés?M.L.M.: Ce sont des objets neutres et non figu-ratifs: coussins, foulards, écharpes, etc. Lorsqu’au début de nos activités nous avons pris des our-sons de couleur, chacun les voulait, mais il y avait ensuite un repli et plus rien. Cela nous a d’abord étonnés, puis nous a confortés dans le choix de tissus de couleurs.Nez rouge, musique, couleurs… Autant de sup-ports que Blandenier et Cie ont patiemment ap-privoisés au cours des années, pour en faire des outils relationnels aujourd’hui clairement définis. Outils dont le secret d’utilisation et de réussite repose sur le respect des rythmes individuels. «Nous prenons toujours le temps nécessaire. Avec un enfant IMC, il a fallu près de 6 mois pour

établir un contact, mais ensuite quelle richesse dans l’échange!» C’est Magali qui nous livre cette réflexion, à propos d’une intervention-clown à Foyer Handicap. Un mot qui servira de conclu-sion à ce voyage au sein de l’univers Blandenier, où nous avons tutoyé durant tout un après-midi, dans un oubli absolu du temps, une sorte de poé-sie universelle et apaisante. Et si la disponibilité offerte par ces deux personnages - clown et col-porteur’couleurs - était la réponse la plus perti-nente que nous puissions donner aux nombreux problèmes de communication et d’enfermement développés par notre société?

¹Henriette Blandenier propose une initiation au chant spontané répartie sur 4 samedis après-midi (renseignements et inscriptions: +41 32 853 43 66).²Magali Lehmann Meyrat a découvert le monde des personnes âgées à l’âge de 17 ans. Elle est aujourd’hui animatrice, soignante, clowne et colporteur’couleurs.

Colporteur’ Couleurs

Conception du programme: Eddy BlandenierRéalisation: ARC EN JEU, Eddy Blandenier, Magali Lehmann, Corinne NeuenschwanderDes séances d’information à l’intention du personnel, sont organisées gratuitement dans tout établissement qui en fait la de-mande. Le programme comprend une description de la démarche, le visionnement d’une vidée de 20 minutes, la présentation du matériel, une discussion ouverte. Durée de l’intervention: 1 h 30Des présentations «en situation» sous la forme de visites de Colporteurs’ Couleurs sont envisageables.Une sensibilisation au concept Colporteur’ Couleurs est proposée sous la forme d’une journée de formation.Une formation complète à la pratique du Colporteur’Couleurs est organisée par ARC EN JEU: elle comprend 4 sessions de 2 jours et un accompagnement en institution pour les premières rencontres avec les résidents.

Pour tous renseignements: Association ARC EN JEU, rue du Four 5, 2065 SavagnierTél. +41 32 853 43 66 - 032 724 06 [email protected] – www.colporteur-couleurs.ch – www.ateliers-sylvagnins.ch

Les Colporteurs’Couleurs sont des personnages faci-lement identifiables par leur habillement hautement coloré, apparenté à celui d’un jardinier un jour de fête: tablier vert, chemise, jupe ou pantalon bigarrés, sabots et chapeau de paille.

L’intervenant «Colporteur’Couleurs» est au centre du dispositif. Il fait le lien entre les personnes et les objets. Il donne le cadre et guide le processus. Avec son habit de jardinier, il peut entrer dans un rôle qui le distingue de celui de soignant......Le Colporteur’Couleurs arrive sans projet défini préalablement. Il n’a pas la préten-tion de réussir une démonstration qui le mettraitr en valeur personnellement. Il doit rester humble et accepter les limites qui sont dictées par la maladie et le grand âge....L’animation est au service du résidant et non l’inverse. Le résidant doit toujours rester le sujet, le centre de la démarche, et non devenir objet d’animation. C’est en respectant ce principe éthique que des dérapages vers des formes d’infantilisation seront évités.

Extraits du dépliant de présentation du concept «Colporteur’Couleurs»

Jeune retraité d’une carrière d’animateur pédagogique à la Castalie à Monthey, André Baechler s’est très vite fait remarquer pour son inventivité et son savoir-faire. Fondateur d’Alphalogic, il a déve-loppé plusieurs logiciels d’enseignement spécialisé, mais sa passion, il ne vous le cachera pas longtemps, c’est la voile!Initiateur à l’Asa-Valais d’un cours très structuré qui permet à des personnes handicapées mentales de se former aux techniques de la voile, André Baechler entraînera son groupe en septembre dans une régate d’une semaine en Méditerranée. Les plus sportifs rejoindront un club régate qui disputera la part belle aux autres voiliers sur le Léman, les plus «relaxes» rejoindront un club plai-sance pour des sorties en week-ends.Plus récemment, André Baechler a permis à l’Asa-Valais de faire l’acquisition d’un catamaran adapté: Handi The Cat. Le bateau permet aux personnes polyhandicapées ou qui disposent d’une mobilité très réduite d’accéder à une activité voile sur le Léman.

Vous avez mis votre vie au service des personnes handicapées, diriez-vous que c’est une vocation?Il n’y a guère de hasard dans le choix d’une profession et chacun a un chemin de vie à parcourir. Cela me semble vrai pour tout être humain, quelle que soit son activité et en particulier sa profession. Il reste après la mise à l’œuvre, jour après jour en équilibrant ses choix, ses priorités, ce qui est loin d’être simple. Tant que j’ai du plaisir à faire ce que je fais et que l’élan créatif est toujours présent, c’est que je suis sur le bon chemin.

Quelles sont les gratifications personnelles que vous avez tirées de vos activités professionnelles?Depuis le début de ma carrière, le plaisir intellectuel de chercher et de trouver des solutions à des problèmes pédagogiques et tech-niques m’a toujours stimulé. Mettre en place des moyens d’évalua-tion, qui rendent compte du chemin positif parcouru et des erreurs commises même lorsque l’évolution est minime et très lente, a un côté grisant, peut-être davantage que si tout est facile et correspond à ce que l’on pouvait prévoir. Depuis plusieurs années, j’accède à une nouvelle dimension plus émotionnelle et plus spirituelle et là non plus, ce n’est pas du ha-sard si cela m’arrive grâce au contact avec les personnes polyhan-dicapées qui m’invitent à regarder au-delà des apparences, ce qui ébranle mes convictions d’homme «normal».

Une passion comme celle de la voile peut-elle se résumer en quelques mots?La voile est pour moi une activité de sport et de loisirs qui peut s’adapter à mes états d’âme. Si je recherche le calme, il me suffit de sortir du port et de laisser filer le bateau pour que le stress disparais-se en quelques minutes. Si je cherche le défi, je m’affronte à d’autres concurrents dans un monde où tout est fluctuant et relatif, avec des règles à la fois complexes et interprétables. En mer, et notamment en navigation côtière, il faut tenir compte du vent, des marées, des courants, des dangers de la côte, des signalisations.

Lancer Handi The Cat en inscrivant le catamaran au Bol d’Or Mirabaud 2007 c’était un peu fou non?Oui, si on analyse après coup tout ce qui a dû être fait pour y parve-nir depuis la mise au point du bateau et de ses adaptations jusqu’ à l’organisation concrète de notre participation à cette grande régate: inscription et jauge du bateau, organiser les changements d’équi-page au milieu du lac, contacter les sociétés de sauvetage, s’assurer des relations avec les médias, synchroniser les communications en-tre tous les intervenants, …Si on se lance dans un tel projet, c’est que l’on a comme une envie irrésistible au départ qui ne fait que s’intensifier chaque fois qu’on y pense et que les premières grandes lignes sont tracées. Après, c’est au jour le jour qu’il faut avancer en sachant qu’on peut compter sur des amis et des personnes de confiance qui feront le maximum pour que le pari fou se réalise. J’ai vécu trois mois de préparation intense où j’ai dû faire l’expérience du lâcher-prise et où «mira-culeusement» tout a fonctionné comme il le fallait et quand il le fallait.C’est stimulant, mais cela ne doit pas pour autant devenir une drogue! Alors je reprends un rythme un peu plus cool.

Du plaisir intellectuel à l’émotion partagéeAndré Baechler, initiateur du projet Handi The CatInterview réalisée par Olivier Salamin, psychothérapeute FSP, directeur Asa-Valais

Dire d’André Baechler que c’est un grand personnage serait un peu facile pour décrire cet homme mince et élancé qui avoi-sine les 2 mètres. Pourtant, ce n’est pas sa taille qui impres-sionne… Il s’agirait plutôt de cette forme de calme à la fois réfléchi et décidé qui le caractérise. Une fois que vous aurez partagé une franche poignée de main avec lui, sachez que vous avez déjà un pied dans ses projets et que ce pied, il vaut mieux l’avoir marin...

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Faire de la voile, ce n’est pas rien! Qu’est-ce qui vous fait dire que le sourire d’un participant n’est pas celui qu’on retrouve parfois comme réponse à un stress intense?Depuis bien de années je me suis aperçu que le fait de partager ses passions a le gros avantage de renforcer son propre plaisir et celui des personnes en relation. L’activité voile est une belle occasion de le prouver et ceci quel que soit le niveau d’autonomie. Je constate des demandes claires de participer aux manœuvres en tenant la barre, en tirant sur un cordage. Pour d’autres, davantage contraints dans leur corps ou leur psychisme, on peut relever une détente si-gnificative, des sourires, une attention particulière au passage d’une vague ou lorsque le moteur s’arrête par exemple, voire une ma-nifestation claire d’opposition au moment de l’arrêt de l’activité. En se concertant entre les membres d’équipage, nous arrivons aux mêmes constatations. Ce n’est donc pas que notre rêve, de plaisir et de faire plaisir!

Ne nous cachez rien, vous avez déjà 5 ou 6 nouveaux projets sous la manche?Oh! Doucement! Je tiens en premier lieu à assurer le fonctionne-ment des projets autour de la voile mis en place avec l’aide de l’Asa-Valais en collaboration avec d’autres organismes, en lançant chaque année si possible une petite aventure.Je vais aussi profiter de ma retraite anticipée pour aborder des acti-vités que je n’ai guère pu explorer durant mon engagement profes-sionnel, notamment la communication facilitée avec des personnes privées de parole. Je me suis formé dans cette approche qui nous pose bien des questions et qui, à mon avis, nous ouvre à une large compréhension de la personne humaine.

Ci-dessus: le catamaran Handi The Cat à Genève (Photo Fabien Hecquet)En haut, à gauche: transfert sur le bateau d’une personne en fauteuil En haut, à droite: participants au Bol d’Or Mirabaud 2007

Les photos qui illustrent cet article sont de Didier Liautaud

Références

Alphalogic est un centre de compétence qui a pour but de promouvoir la création et l’application d’outils informatisés au service des personnes handicapées mentales et polyhandicapées, en particulier dans les domaines de l’éveil sensori-moteur, de la communication et de l’autonomie dans la vie quotidienne.Sur son site http://alphalogic.sourceforge.net de nombreux logiciels sont libres d’accès. On y trouve notamment «A moi les paquets!» logiciel d’aide à l’apprentissage de la lecture ou encore «La poule aux œufs d’or» pour l’approche du nombre.L’Asa-Valais est une association qui apporte une aide aux personnes handicapées mentales, en leur proposant une offre de formation continue, de séjours et de loisirs.Handi The Cat est un catamaran équipé de quatre sièges coques et d’un bras de levage qui permet à des personnes en chaises roulantes d’être transférées sur le bateau. Celles qui ne pourraient pas quitter leur fauteuil peuvent également participer puisqu’il est possible de sangler deux chaises roulantes à l’arrière du bateau.Vous pouvez dès à présent réserver des sorties sur le Léman au +41 27 322 17 67 ou via le site Internet www.asavalais.ch

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Foin de grands discours chez Fernand Ballestraz. Des décisions ou, mieux en-core, des réponses concrètes aux pro-blèmes du quotidien!

Jeune éducateur diplômé, Fernand Balles-traz postule, après une première expérience professionnelle, auprès d’adolescents en rupture, comme enseignant en activités créatrices manuelles. Cette activité lui lais-sera, comme il dit: «le champ libre pour de nombreux projets d’animations culturelles et sociales dans la région sierroise...» Pour-tant, après 19 ans d’enseignement, et pour la première fois de sa carrière, il punit un élève, puis un second la même journée. Il s’interroge, prend une année sabbatique et décide finalement de tourner une page...Fernand Ballestraz ouvre alors un atelier de réparation de moyens auxiliaires. La deman-de est énorme, le rendement lucratif. Mais là n’est pas la question; tout l’argent est investi dans la création de l’Association Handicap Services. De cette Association découleront bien d’autres projets, dont une école qui a été construite au Burkina Faso et Transport Handicap qui mobilise aujourd’hui 130 chauffeurs bénévoles pour plus de 760’000 km de déplacements de personnes à mobi-lité réduite en Valais à ce jour... Fernand Ballestraz, vous aviez 3 enfants et vous en avez adopté 6 autres, dont certains en situation de handicap. C’est un choix pour le moins crucial?Le choix d’avoir un enfant est toujours en partie égoïste... Lorsque nous avons voulu un quatrième enfant, nous nous sommes dit avec mon épouse Elisabeth que nous pourrions offrir une famille à un enfant qui n’en avait pas. Nous avons alors réalisé qu’il y avait une liste d’attente, que 50 familles attendaient un enfant suisse à adopter et nous n’avons pas voulu gonfler les rangs…Divali Adoption Service à Genève propo-sait d’offrir des familles à des enfants han-dicapés et non d’offrir un enfant à une fa-mille. La démarche nous a plu, et après une discussion avec nos propres enfants, nous en avons accueilli un, trois mois plus tard,

puis 5 autres au fil des années...Créer Handicap Service, c’était un concept, un défi, ou un choix de vie?C’est surtout une réponse concrète aux pro-blèmes sur lesquels nous avons buté avec nos enfants. Nous étions mal desservis et avons rapidement rencontré des difficultés avec les moyens auxiliaires de nos enfants han-dicapés. Pour réparer un fauteuil, il fallait quasiment se rendre à Bâle! Je me souviens aussi des 16 sorties du mercredi après-midi pour les thérapies, les courses, le sport et les loisirs…Avec mes amis Christian Ballestraz et Alain Perruchoud, nous avons d’abord ouvert un atelier de réparation. Nous avons ensuite investi l’argent gagné dans l’Associa-tion Handicap Services pour éviter de faire du business sur le dos des personnes han-dicapées et mener à bien d’autres projets, notamment des actions de sensibilisation dans les écoles. Enfin, nos deux véhicules familiaux étaient adaptés, mais ils ne suffi-saient plus à satisfaire les besoins en mobili-té de nos enfants. Et nous avions dans l’idée que, grandissant, ils allaient avoir envie de ne pas toujours dépendre de leurs parents. A la sortie d’une discothèque, on préfère ne pas avoir ses parents dans les pattes...

Tout en restant dans une approche pragma-tique, vous vous dites donc qu’il faut faci-liter la mobilité des personnes en situation de handicap?En 2003, l’Association Handicap Servi-ces a créé Transport Handicap et elle a en effet vendu le secteur des moyens auxiliai-res à Helios Handicap pour se consacrer pleinement à cette nouvelle activité. Nous avons alors reçu nos trois premiers véhicu-les de l’Association Emera qui assurait alors des déplacements dans la mesure de ses moyens. Une nouvelle fois, la demande n’a cessé d’augmenter. En quatre années d’exis-tence, nous avons triplé le nombre de nos véhicules et celui des kilomètres parcourus.Le bénévolat joue un rôle considérable dans le bon fonctionnement de Transport Han-dicap. La participation des bénévoles, je l’avais imaginée 5 ans plus tôt. Aujourd’hui, ce n’est pas moins de 130 chauffeurs béné-

voles qui œuvrent dans l’Association. Nous avons un lien très fort avec cette équipe. Ils fournissent un travail de qualité et sont souvent les confidents des personnes qu’ils déplacent. Nous avons aussi tenu à leur donner les rênes de l’Association. Les bénévoles sont membres de l’Association et prennent les décisions à l’assemblée géné-rale; sept d’entre eux composent également le comité de l’Association.

Transport Handicap c’est aussi un effort constant pour trouver des fonds…Nous sommes très soutenus car nous trou-vons en effet CHF 250’000.- par année. Les premières années du lancement de l’Association, j’ai beaucoup travaillé avec la presse pour faire connaître notre action. Un article sur l’Association passait tous les quinze jours dans un média régional ou local et je dois dire que les journalistes ont bien joué le jeu. Hormis celui qui m’a demandé mon signe astrologique et qui a ensuite écrit que j’étais fan d’astrologie…

Et vous êtes de quel signe?Disons de celui qui est convaincu qu’une plus grande mobilité permet d’acquérir un statut social à part entière… Participer à nouveau alors que ce n’était plus ima-ginable, voilà le bol d’air que Transport Handicap peut donner.

On vous suppose, à suivre rapidement votre trajectoire, que vous ne manquez pas d’autres projets?Transport Handicap a de l’avenir, mais c’est vrai que j’aimerais par exemple favoriser les échanges linguistiques entre personnes handi-capées et leur permettre ainsi de voyager…

Avant de déplacer des montagnes… Fernand Ballestraz, un homme de transportsOlivier Salamin, psychothérapeute FSP, directeur Asa-Valais

Transport HandicapL’activité de l’Association a pour objectif de favo-riser l’intégration des personnes à mobilité réduite dans un environnement social, culturel et familial.Association Transport Handicap, rue de la Piscine 10, CP 4027, CH-1950 Sion 4Tél. 027 323 9000 – www.transporthandicap.chCCP 17-366110-2Témoignage: Ballestraz, Elisabeth. 1991. Ils pren-dront racine, Fully, éditions Art et Foi.

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Parfois, quand on entend une chanson comme «Les Vieux» de Brel, on réalise que ce dernier a perçu avec une formidable acuité les craintes, les joies, les rythmes de vie de nos seniors… Toutefois, on a du mal à percevoir la notion de vieillesse chez nos retraités handicapés; on parvient quelquefois à estimer, par leur verbe d’antan, le chemin qu’ils ont parcouru; on hume alors comme un parfum d’éternité… Lorsqu’on rencontre Claude-Alain et Denise Fromaigeat, la notion de vieillesse ou de retrai-te n’apparaît pas tout de suite. On est surpris par l’étincelle de vie et de complicité qui brille dans leurs yeux, comme deux «frangin-fran-gine» à l’aube de leur vie; comme si le feu d’un ancien volcan qu’on croyait trop vieux rejaillis-sait (Ne me quitte pas, J.Brel) pour nous dire que tout n’est pas fini, que tout n’est pas perdu, que la vie est encore devant soi…Tous deux sont pourtant bel et bien retraités. L’un est pensionnaire dans un établissement spécialisé tandis que l’autre vit seule, tout en gardant une chambrette pour le premier; chambrette investie un week-end sur deux par l’intéressé... Par établissement spécialisé, on entend lieu de vie de caractère familial, destiné aux personnes mentalement handicapées.

Claude-Alain a travaillé pendant près de qua-rante ans à l’atelier polyvalent, pratiquement sans aucun jour d’absence. Aujourd’hui, le voilà retraité! Ce qui devait être quelques jours de convalescence après un malaise, s’est trans-formé en cessation d’activité, car le médecin lui a interdit de retourner au travail! Alors même qu’il refusait de reconnaître des signes de fatigue, il y a trois ou quatre ans, il semble aujourd’hui avoir parfaitement intégré le fait de ne plus avoir d’activité professionnelle.Ce qui était autrefois réservé aux vacances et week-ends est désormais quasi quotidien: d’abord il a un petit temps de lecture au tea-room du village, à l’heure du café. Il prend le temps, après le repas de midi, pour débarras-ser la table et la nettoyer, porter les poubelles à la déchetterie du village, à son rythme, très tranquillement. Quand il fait cela, il n’oublie jamais d’observer ce que font les autres autour de lui, de leur adresser éventuellement la parole tout en restant très concentré. L’après-

midi, Claude-Alain s’installe dans sa chambre pour «bouquiner», c’est-à-dire qu’il passe en revue sa pile d’«Illustrés», tournant lentement les pages, observant ici et là plus longuement une photo, lisant un titre au passage, selon un rythme immuable depuis des années… Grâce à cette lecture instructive, nous sommes tenus informés de la mort de Mitterrand, de celles de de Gaulle ou du pape ou de la victoire de Servette contre Lugano. Précisons que Claude-Alain ne se sépare pas des anciens numéros!

Denise, confrontée de plain-pied au réel, est aujourd’hui face à un double défi à transcen-der: l’âge comme expression d’une limite et le handicap comme expression d’une autre limi-te. Pas question d’abdiquer et de parquer son frère handicapé vieillissant: ce n’est pas parce que Claude-Alain est senior qu’il n’a plus de curiosité et ce n’est pas à cause de son âge que les buts dans l’acquisition d’autonomie, de compétences sont atteints.Elle est alors face à une double question: celle du passeur et celle du lien. Avec toute son ex-périence de militante sensibilisée aux problé-matiques du social, de l’équité, Denise ne peut se résoudre à considérer la figure du handicap comme celle de la vie absente, évidée, expulsée d’elle-même (cf. Emmanuel Hirsch). Il lui est impossible d’abandonner Claude-Alain à un état de simple survivant: l’âge d’or, c’est quand on dort… (L’âge idiot, J.Brel).Elle regrette alors qu’aucune activité n’ait été mise en place, ou même à la rigueur un amé-nagement de son temps de travail. Elle est dans l’attente d’une proposition d’atelier des-tiné aux aînés par exemple, où il serait possible pour son frère de se réaliser relationnellement, d’être membre à part entière de la communau-té ou, comme ce vocable est toujours plus à la mode, de se sentir intégré. Parce que depuis que Claude-Alain est retraité, c’est comme s’il avait été plongé du jour au lendemain dans la vieillesse et non dans la retraite… Elle sait bien que l’absence d’activité accélère le vieillisse-ment chez chacun d’entre nous et à plus forte raison chez les personnes trisomiques, qui n’ont pas les capacités de se créer elles-mêmes de nouvelles occupations, de nouveaux centres d’intérêt et dont la résistance au changement

Claude-Alain et Denise sont frère et soeur; elle est responsable de lui, qui vit avec un handicap mental. Ils n’habitent pas ensemble mais cheminent de concert vers ce que l’on nomme le troisième âge. Tou-tefois, la fraternelle et joyeuse complicité qui les lie n’empêche pas certaines questions de surgir avec acuité, comme celle, récurrente depuis quelques années, de la prise en charge des populations handi-capées vieillissantes...

Vieillir ensemble, sur un air de musiquePortraits fraternels: Denise et Claude-Alain Fromaigeat, GenèveLaurie Josserand, Insieme Genève

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est très élevée. Il serait donc difficile désormais pour Claude-Alain d’entrer dans une nouvelle logique autre que celle de la retraite: d’abord on lui dit de se reposer et ensuite on le force-rait à reprendre une nouvelle activité. Un tel bouleversement demanderait tout un travail éducatif de préparation, d’autant plus néces-saire que les facultés mentales sont réduites. Car le questionnement de Denise quant à la retraite de son frère outrepasse leur cas person-nel: quel projet construire pour les populations vivant avec un handicap mental entrant dans l’âge senior? Leur prise en considération dans les institutions se fera-t-elle aussi longuement attendre que les prémices d’intégration mis en place dans le système scolaire?Néanmoins ce glissement de retraite à vieilles-se, Claude-Alain ne le perçoit nullement com-me sa sœur: pour lui la retraite est synonyme de grandes vacances après son malaise dans le bus, de farniente, de «bouquiner avec la chaise», bref d’être assis et de lire ses journaux. Et quand Denise le taquine lors de balades, alors qu’il marche lentement, très lentement: «Dis, tu marches comme un vieux!», Claude Alain de rire sous cape et d’accélérer le pas en la regardant d’un air complice et de finir par un «Dis pas de bêtises!»… ou un peu énervé de rétorquer par un «Mais non je ne suis pas vieux!». La notion de vieillesse, pour lui, est synonyme de maladie, de perte d’autonomie ou de capacités physiques: les vieux ne bougent plus, leurs gestes ont trop de rides, leur monde est trop petit, du lit à la fenêtre, puis du lit au fau-teuil et puis du lit au lit (Les Vieux, J. Brel). On comprend alors aisément qu’il ne se sente pas

du tout concerné par la vieillesse!Par ailleurs, comment se sentir âgé avec sa sœur, à déambuler dans tout Genève, à distribuer les tracts pour le parti, à participer aux réunions de féministes dans son «stamm» à Carouge, à se taquiner l’un l’autre comme à l’époque de la guerre des boutons… Leur relation est finalement exceptionnelle car l’asymétrie y est partiellement gommée, elle ne se résume pas à la dialectique de la personne aidée et de la personne aidante, incarnée par l’éducateur; asymétrie qui tend à augmenter, vu l’âge de Claude-Alain. Avec Denise, il partage une rela-tion fraternelle à l’état brut (avec toutefois un caractère asymétrique ponctuel), perceptible dans leurs échanges de regards tant stimulants, qui donnent sens et vie à l’autre. Le handicap est accepté, il tend à devenir possibilité d’aller avec l’autre, de mettre le pas de l’un dans celui de l’autre, de découvrir sa proximité et d’avan-cer dans l’âge ensemble, comme à l’heure de l’enfance où vieillir, c’était atteindre l’heure du déjeuner (L’enfance, J. Brel)…Et Denise de rêver aux belles années qu’elle a envie de passer avec Claude-Alain, et de croire que le temps est aboli lorsqu’il lui annonce fièrement que Mitterrand est mort...

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Quel projet construire pour les populations avec un handicap mental entrant dans l’âge senior?

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Des bulles d’oxygène pour revenir à soi et rencontrer les autres…Anne Chassot, directrice, Centre de formation continue pour adultes avec handicap, FribourgMarie-Christine Ukelo, formatrice, HEF-TS, Givisiez

Ce printemps, le Centre de formation continue pour adultes handicapés de Fri-bourg a fêté ses 20 ans d’existence. Il faut préciser le contexte favorable sous-jacent à la création du Centre. En 1983, Pro In-firmis suisse lance un projet pilote de for-mation continue pour adultes à Zürich. D’emblée, une étude de cette expérience est effectuée, qui se révèle positive à tous les niveaux. Cette année-là, la campagne de recherche de fonds annuels de Pro Infirmis suisse est dévolue à la formation continue des personnes handicapées en Suisse.Le premier Centre de formation continue pour adultes handicapés voit le jour dans le canton de Zurich. Cécile Savoy donne vie au Centre de formation continue au prin-temps 87, avec 3 ou 4 cours. En automne 91, Anne Chassot reprend le flambeau…Aujourd’hui, 20 ans plus tard, 42 cours sont proposés sur une durée de deux semestres et 60 enseignants sont mobilisés sur des temps partiels. Les cours sont fréquentés par 300 étudiants en moyenne par année. Le 1er support juridique du Centre a été Pro Infirmis Fribourg. Au 1e janvier 91, le Centre est devenu une fondation. Bien que ce projet ait été au départ soutenu sur le plan suisse, chaque Centre de formation continue présente des particularités, qui sont liées aux contextes culturels, légaux, juridiques et politiques dans lesquels les Centres sont implantés. Fribourg présente trois particularités: - Le bilinguisme: en effet, le canton étant bilingue, les cours sont dispensés en alle-

mand et en français. De plus, certains cours sont même donnés dans les deux langues.- Sur le plan légal, il existe la loi du 20 mai 19861, garantissant le déficit d’exploitation des institutions spécialisées2. Dans d’autres cantons, ce financement n’existe pas sous cette forme.- La collaboration avec un Centre ordinaire de formation continue, l’Ecole-Club Mi-gros de Fribourg, qui permet une mobilité pour des chaises roulantes dans l’ensemble de son bâtiment, a permis une ouverture sur de nouvelles possibilités. Questions d’avenir: la loi du 20 mai 86 sera-t-elle remise en question? Comme le Centre est régi sous le couvert de l’article 74 de la LAI3, il ne devrait en principe pas être concerné par les répartitions qui seront mises en place dans le cadre de la nouvelle péréquation financière. Depuis l’an 2000, le Centre de Fribourg a signé un contrat avec Pro Infirmis suisse pour ce qui est de la négociation des mandats de prestations avec l’AI (durée de 3 ans).

Un travail de partenariat; une toile tissée par et pour des liens solides et durables au fil des annéesAnne Chassot tient beaucoup à ce partena-riat avec les institutions, les professionnels du terrain et l’entourage direct de l’étu-diant. Il s’agit d’être en lien, tout en gar-dant chacun son indépendance. Il ne s’agit pas d’un partenariat au niveau du discours, mais bien d’un lien qui s’est construit dans le temps, qui permet aujourd’hui que les

interlocuteurs se connaissent, connaissent les besoins des uns et des autres.Durant toutes ces années et encore aujourd’hui, Anne Chassot s’est attelée à faire passer le message de la nécessité de la formation continue des personnes han-dicapées, afin qu’elles puissent développer les compétences leur permettant d’accroî-tre leur autonomie. Elle s’est octroyé les moyens de donner une forme à ce fil rouge qui soit en cohérence avec ses valeurs. Ain-si, les cours sont toujours donnés à l’exté-rieur des institutions spécialisées, dans des lieux publics. Elle trouve important que les cours, ces bulles d’oxygène, puissent être un réel espace pour l’étudiant, lui permet-tant de vivre des moments en dehors de sa quotidienneté institutionnelle, «à l’abri» des regards «spécialisés» sur son compor-tement et ses attitudes. Comme dit Anne Chassot: «Une bulle, c’est transparent, elle émet autour d’elle. Quand on est à l’inté-rieur de celle-ci, on ne perd pas le contact avec l’extérieur, mais c’est un temps où l’on est complètement dans cet espace-là. C’est une heure qui doit être un temps privilégié pour eux, en dehors des soucis quotidiens, qui peut leur permettre de faire le vide pour sortir plus léger». Le partenariat se légitime aussi par la nécessité d’expliciter réguliè-rement le sens des actions et des valeurs y relatives, afin que les différents partenaires puissent faire leur choix en toute connais-sance de cause. Anne Chassot tient forte-ment au partenariat, qui permet la connais-sance et la reconnaissance des limites de chacun et situe l’offre du Centre de forma-tion en complémentarité avec les offres ins-titutionnelles: «Il s’agit d’autre chose!»

Des bulles, des bulles, encore des bulles…Anne Chassot, en tant que directrice à 85% et pour des raisons structurelles, est omniprésente… Son cahier des charges en effet stipule la gestion et l’organisation des cours, le suivi pédagogique des enseignants. Elle est partout, tout en ayant la capacité de se voir comme une des pièces d’un rouage où chacun met sa pièce à l’édifice pour que

Je cours vers mon rendez-vous de 17h00. C’est hier que j’ai eu Anne Chassot au téléphone. Je lui ai parlé de ce numéro de «Pages Romandes» que vous avez entre vos mains, dans lequel il s’agit de présenter une mosaïque de portraits de personnes engagées dans le monde du handicap mental, dans les différents cantons romands. Elle accepte rapidement, tout en précisant que ce n’est pas d’elle qu’elle souhaite parler, mais bien des enseignants, des étudiants et des partenai-res qui contribuent à l’existence du Centre de formation continue pour adultes handicapés. Au téléphone, elle a compris d’emblée que «Madame votre serviteur» était «courte» dans les délais; elle s’est montrée immédiatement disponible. Je cours donc… Anne m’accueille avec une poignée de main chaleureuse, un café, dans un bu-reau impeccablement rangé, mais néanmoins chaleureux, ouvert sur le monde avec une multi-tude d’affiches qui invitent à aller voir et se voir ailleurs. À bâtons rompus, nous nous lançons immédiatement dans l’interview… Qui prendra rapidement les contours d’un échange en toute simplicité.

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cela fonctionne. «Ne jamais se prendre la tête, car on n’est jamais qu’une pièce du puzzle». Elle se considère plutôt comme un point de ralliement. Ainsi, elle visite une fois par année l’ensemble des cours (il y en a 42), organise deux soirées par année pour que les enseignants se rencontrent et échan-gent autour de leurs expériences. Les cours ayant lieu essentiellement le soir, c’est après sa 1re journée, qu’Anne Chassot poursuit son travail sur le terrain, à la rencontre des étudiants et des enseignants. Engagement total, qui la mobilise énormément, mais qui la ressource également, tant elle s’estime chanceuse du parcours professionnel qu’elle a pu faire. L’engagement est total, elle le dit; en même temps, c’est en parlant de cet en-gagement, de la rencontre avec les personnes que ces yeux brillent, qu’on sent qu’elle se réchauffe et se ressource à ce soleil: «Cet in-vestissement, c’est aussi mon moteur. Je suis passionnée par ce que je fais». Un parcours en alternance… Lorsque je demande à Anne Chassot d’évo-quer le parcours qui l’emmène vers le Cen-tre, je sens qu’on ne va pas faire long sur le sujet… J’ai envie de savoir néanmoins, quel est le déclic, le point de départ, ou le chemin, qui fait souvent sens après-coup, qui la conduit à la tête du Centre, mais surtout qui la mobilise au quotidien dans son travail. Elle a fait son école normale, le brevet d’enseignement primaire, secteur dans lequel elle a enseigné ensuite quelques années. D’emblée, elle perçoit chez elle une «attirance», un intérêt pour les enfants en difficulté. Ce souci d’offrir un accompa-gnement adapté à ces enfants va la conduire à poursuivre des études dans le champ de l’enseignement spécialisé, afin d’apporter

une aide plus spécifique aux enfants en dif-ficulté. Après les études à l’institut de péda-gogie curative (IPC), elle enseigne durant 11 ans dans les classes spéciales. Enfin, se profile pour elle une opportunité au Secréta-riat Suisse de Pédagogie Curative4 à Lucerne, en tant que déléguée romande. Ce lieu, elle le considère comme une riche étape dans son parcours, autant au niveau personnel que professionnel, comme une possibilité de prendre du recul par rapport au terrain, de faire de la formation continue profession-nelle, puis de revenir ensuite sur le terrain avec une vision très enrichie globalement par rapport au monde du handicap: appro-ches diversifiées, politique sociale, etc.

La rencontre avec la personne adulte présentant un handicap…Un défi pour Anne, à ses débuts à la tête du Centre de formation continue: la ren-contre avec la personne adulte handicapée mentale. Un constat: «Ce sont des person-nes comme tout le monde, avec les mêmes émotions, les mêmes sentiments, mais une façon différente de les gérer en raison de leur particularité…» Il ne s’agit pas là d’un regard naïf sur les personnes niant toute forme de handicap, mais bien d’un regard empli d’humanité, sur des personnes vivant une réalité particulière. Anne précise sa pensée: «La connaissance du handicap est importante, non pas pour enfermer la per-sonne et la stigmatiser, mais pour que les professionnels puissent adapter leur enca-drement à la personne et à ses besoins». La rencontre avec ces personnes si différen-tes et si semblables à la fois est un véritable bonheur émergeant aussi dans le cadre de la formation continue. L’espace de liberté qui est proposé, est une véritable bulle d’oxy-

gène tant pour les étudiants que pour les différents partenaires du projet. Cet espace de liberté, nécessite un certain nombre de contraintes, afin que chacun puisse profiter pleinement de cet espace. Ainsi, pour être engagés, les enseignants doivent répondre aux critères suivants: être spécialistes de la branche enseignée, posséder des formations et/ou de l’expérience de la formation si possible aux adultes et avoir des connaissances, formations et/ou expériences dans le monde du handicap. D’autre part, il faut que l’étudiant soit en mesure de s’inté-grer à la vie d’un groupe. Anne Chassot est en questionnement depuis des années par rapport aux personnes qui présentent des handicaps très importants: «Qu’est-ce qui pourrait leur être offert en groupe, compte tenu des besoins d’accompagnement indivi-dualisé liés à leur handicap?» L’acceptation des limites de ce que peut réellement offrir le Centre de formation permet d’éviter la nais-sance d’illusions et de déceptions aux diffé-rents partenaires; mais Anne Chassot tient cependant à préciser: «La porte est toujours ouverte pour essayer».C’est ce cadre qui permet cet espace de li-berté. Un minimum d’information passe de l’intérieur de la bulle vers l’extérieur et réciproquement. Les informations qui permettent d’assurer la sécurité de la per-sonne et du groupe sur un plan physique et psychologique peuvent être échangées et discutées. L’étudiant arrive en quelque sorte vierge de tout regard spécialisé le défi-nissant, lui permettant peut-être de se voir différemment dans le regard des autres et de lui donner ainsi des conditions et des possibilités d’apprendre.

Simplement la vie…Nous abordons la question des étudiants, qui sont souvent des fidèles du Centre. Quand je demande à Anne Chassot si elle constate des évolutions chez les étudiants, d’emblée elle tient à soulever un élément important: les personnes qui s’inscrivent aux cours aujourd’hui en tant qu’adultes, sont des personnes qui ont eu tout un parcours auparavant, suivi par des inter-

Le canton de Fribourg et le Centre de Formation ContinueMis sur pied par Pro Infirmis en été 1987, le Centre de Formation Continue pour adultes handicapés mentaux du canton de Fribourg devient la Fondation pour la formation Continue pour personnes handicapées mentaux du canton Fribourg devient la Fondation pour des personnes handicapées adultes en 1990. Elle est reconnue par l’Etat de Fribourg en décembre de cette même année. La Fondation reçoit le prix 1997 fribourgeois d’encouragement à la formation des adultes.

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venants, des parents qui leur ont permis de dévelop-per des compétences et devenir ce qu’ils sont devenus aujourd’hui. Elle rend hommage à ces éducateurs et ces parents pour ces immenses investissements. C’est une constante durant l’entretien avec mon interlocutrice du jour… Mettre en perspective le présent, avec son passé, et son devenir… Reconnaître le travail de chacune et de chacun. Pour revenir à la question, oui, bien sûr, elle a eu la joie de constater des évolutions chez les personnes. Elle re-marque aussi que les étudiants amènent plein de choses aux enseignants, ainsi qu’à elle-même… Finalement, tout le monde met sa pièce à l’édifice, afin que la bulle fasse son plein d’oxygène. Une anecdote qu’Anne Chassot raconte volontiers: chaque année, un certain nombre de cours varient, d’autres s’arrêtent, de nouveaux émergent afin de mo-tiver les étudiants à découvrir d’autres choses. Il se trouve, qu’une année, un groupe d’étudiants n’étant pas d’accord avec la suppression d’un cours, s’est orga-nisé pour faire circuler une pétition pour que ce cours se poursuive. Les étudiants n’étaient pas tous dans la même institution…Elle parle aussi des contacts qui ont lieu entre les étu-diants… La formation de couloir dans laquelle les ren-contres se prolongent au-delà du contenu du cours. Ainsi des petites histoires s’installent, des amitiés nais-sent. Toute une vie engendrée par la formation conti-nue. «Une bulle d’oxygène, c’est une bulle de vie, profi-tons de tout ce qu’elle nous offre». Depuis toujours, Anne Chassot insiste pour que l’éven-tuel futur étudiant prenne lui-même contact avec le Centre de formation continue pour s’inscrire à un cours. Cette démarche est en adéquation avec ce qui est visé par le Centre: un acte d’autonomie, lors duquel l’étudiant est acteur au maximum de ses possibilités. De façon gé-nérale, elle constate avec plaisir que le regard porté sur la personne handicapée a progressivement évolué au fil des années. Déjà au niveau du discours, l’accent est mis sur les potentialités de la personne handicapée, et non plus uniquement sur les difficultés liées à leur handicap. Bel héritage de Feuerstein entre autres…

Des rêves … En toute simplicitéQuand on parle du futur, Anne fait forcément le lien avec le présent: «Que la reconnaissance qui existe aujourd’hui continue. Que le Centre, avec sa ligne, qui est quelque chose de simple, puisse poursuivre, car il correspond vraiment à un besoin. Que l’engagement des différents partenaires perdure». La pérennité du projet du Centre est aussi liée au regard que l’on porte sur cette structure et ce qu’elle implique. Ces bulles d’oxygène qu’offre le Centre de formation continue aux étudiants peuvent en faire émerger une quantité d’autres. En guise de rappel: l’oxygène, c’est la vie…Je sors de mon rendez-vous avec Anne Chassot. Le temps semble s’être arrêté. Je crois bien l’avoir vécue de l’intérieur, cette bulle; comme un espace qui ouvre, qui permet de découvrir, en toute simplicité. Trois appels en absence sur mon natel, je suis en retard... Je reprends ma course.

Le Centre de Formation Continue

Pour qui ? - Pour toute personne handicapée mentale de plus de 18 ans.

Pourquoi ? - Pour continuer à apprendre; - Pour maintenir et développer les connaissances acquises à l’école et poursuivre un développement personnel et culturel; - Pour continuer une formation pratique en vue de devenir plus indépendant dans la vie quotidienne; - Pour rencontrer d’autres personnes. Où ? - À Fribourg: cours en français et bilingue français-allemand; - À Bulle, Romont, Estavayer-le-lac et Châtel-St-Denis: en français; - À Tavel et Morat: en allemand; - Dans différents lieux de formation mais en dehors des institutions.

Comment ? - 1 programme par année scolaire; - 43 cours de 1 à 3 heures par semaine selon les thèmes; - 1 ou 2 enseignants par cours appliquant une pédagogie spécialisée; - 5 à 10 participants par cours; - Les lieux de cours sont accessibles aux personnes se déplaçant en fauteuil roulant.

Organisation -Les participants s’inscrivent une fois par année, en automne, pour un ou plusieurs cours; - Chaque participant reçoit au plus tard une semaine avant le début du cours, une lettre du Centre de formation continue avec les renseignements utiles pour le cours choisi.

Le Centre offre cette année 6 cours organisés en collaboration avec l’Ecole-Club Migros.

Centre de Formation Continue pour adultes handicapés Rue de Locarno 31700 FribourgTél. 026 322 65 66 Fax 026 3341 76 66E-mail : [email protected]

1 Loi du 20 mai 1986 d’aide aux institutions spécialisées pour personnes handicapées ou inadaptées2 Loi du 20 mai 1986, art. 7, Contribution des pouvoirs publics3Art. 74: Associations d’aide aux invalides et centre de formation de personnel spécialiséL’assurance alloue aux associations centrales de l’aide privée aux invalides et aux organismes formant des spécialistes de la réadaptation professionnelle des subventions pour l’exercice des activités suivantes, en particulier:183 a. Conseiller et aider les invalides; b. Conseiller les proches d’invalides; c. Favoriser et développer l’habileté des invalides en organisant des cours spéciaux à leur intention. d. Former et perfectionner le personnel enseignant et spécialisé dans l’assistance, la formation et la réadaptation professionnelle des invalides. 4 Aujourd’hui nommé Centre Suisse de Pédagogie Spécialisée

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Dépasser le discours sur l’égalitéPortrait de Georges Rais, DelémontNoémie Pala, étudiante en travail social HEF-TS

«Rien ne se crée sans une équipe, des col-laborations multiples et une volonté politi-que, en suivant un principe de permanence d’action, conduite avec des personnes en situation de handicap».Tels sont les propos de Georges Rais, militant actif auprès des personnes en situa-tion de handicap. Intéressé dès ses débuts professionnels à la prise de décision des personnes handicapées, il co-écrivit avec Jean Hoffmeyer un livre sur ce thème (voir encadré ci-dessous). Passionné par l’idée de donner à la personne des moyens d’autodétermination, d’autono-mie, d’indépendance et de décision, il s’inté-resse à promouvoir chez la personne handi-capée, la capacité réelle de diriger sa vie. Le principe d’égalité se traduit pour lui par l’autodétermination et par les moyens qui permettent à la personne en situation de handicap de prendre en main sa destinée.

Georges Rais est né en 1939 à Delémont. Marié et père de trois enfants, il entreprend une formation d’instituteur, puis d’ensei-gnant spécialisé. Par la suite, il suivra une formation de superviseur en travail social et obtiendra sa licence en pédagogie curative à l’Université de Fribourg.Son parcours professionnel débute dans l’enseignement primaire.A 29 ans, il devient directeur du Foyer jurassien d’éducation à Delémont (actuel-lement Fondation Pérène) qui accueille des enfants en situation de handicap mental.Il effectuera ses dernières années profes-sionnelles en tant qu’adjoint au chef du Service de l’enseignement de la République et Canton du Jura.Georges Rais mène en parallèle plusieurs activités politiques. Il sera notamment député libéral-radical au Parlement juras-sien et co-président de l’Assemblée interju-

rassienne. D’autres mandats ayant trait à la pédagogie lui seront également confiés sur le plan romand et fédéral.Tout au long de sa carrière professionnelle, et encore actuellement, il rédige plusieurs ouvrages et articles en lien avec le handicap.Actuellement, supervisions, mandats, appuis techniques auprès de directions d’institu-tions jurassiennes, suivis de mémoires d’étu-diants, jalonnent la retraite de Georges Rais. Ces activités lui permettent d’être en phase avec les exigences des écoles sociales notam-ment, mais cela l’oblige également à lire, à s’intéresser et à être d’une certaine manière au front de l’innovation pédagogique.Après plus de 40 ans d’expérience, le but de sa relation avec les personnes en situa-tion de handicap est de contribuer à la mise en place de moyens pour qu’elles puissent participer effectivement à la prise de déci- sion en des lieux qui les concernent.

La prise de décisionJean Hoffmeyer, Georges Rais, Editions Delval, Cousset, 1990 Chaque jour, la plupart des individus prennent un certain nom-bre de décisions, le plus souvent inconscientes, qui déterminent leurs actions. En fait, chaque acte de la vie quotidienne est le résultat d’une décision.Généralement mini-décisions qui n’engagent qu’une partie de l’être, mais aussi parfois grandes décisions, qui orientent d’une façon décisive la vie professionnelle, sociale ou affective. La faculté de prendre des décisions est-elle innée? Peut-on, dans un cadre institutionnel, créer les conditions d’apprentis-sage favorisant la prise de décision individuelle et collective? Les enfants en situation de handicap mental ont-ils des moyens intellectuels suffisants pour prendre des décisions conscien-tes et anticiper sur leurs résultats? Le problème pour nous est moins de savoir si les enfants en situation de handicap qui nous sont confiés sont capables de prendre des décisions, que de définir une stratégie permettant de les aider à agir sur leur environnement d’une manière consciente. Il nous a paru né-cessaire, au premier abord, de définir le plus précisément pos-sible ce qu’est une prise de décision, et quels en sont les mé-canismes. Notre travail passe donc par une longue incursion dans les domaines de l’économie et de la politique, là où la décision a fait l’objet des études les plus avancées, pour des raisons évidentes d’efficacité, pour ses répercussions directes sur le développement de l’entreprise industrielle ou politique.

Nous avons également cherché à savoir si les théories de la décision établies par ces milieux ont marqué de leur influence la pédagogie actuelle. Il nous a fallu également trouver un champ d’action qui nous permette de mettre en pratique les théories apprises. En général, le cadre institutionnel dans lequel s’inscrit toute action pédagogique est une salle de classe. Les situations pédagogiques sont le plus souvent des simulations de la réalité. Les enfants en situation de handicap mental, à personnalité sou-vent fragile, ont plus que d’autres des difficultés de positionne-ment par rapport au réel. Un travail constant doit donc être fait par rapport à la différence entre la réalité et la représentation. Le cadre de travail idéal devrait donc être un lieu d’apprentissage qui se confonde le mieux possible avec la pratique d’une situa-tion réelle, dans un milieu extra-scolaire, permettant de prendre des décisions, de les concrétiser et d’en évaluer les effets. Une première étape importante dans cette direction a été franchie par l’achat d’une ferme à rénover sise à proximité du village de Saulcy (…) Un des objectifs essentiels de la démarche, à moyen et long terme, vise à définir des stratégies de prise de décision transposa-bles à d’autres situations de la vie courante. Malgré les limites de nos élèves, exprimées en termes de situation de handicap mental ou de stade de développement affectif et socio-comportemental, notre démarche part de l’hypothèse suivante: tous les élèves peu-vent améliorer leur aptitude à prendre des décisions.

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Il ne s’agit pas pour Georges Rais uniquement d’accueillir les personnes dans des groupes où se prennent des décisions, comme il le pensait au dé-but de sa carrière, mais de leur donner les moyens de faire valoir leur point de vue et d’influencer la conduite du groupe. Pour ce faire, il met en avant le concept de facilitation qui se différen-cie de celui de médiation. Georges Rais définit le facilitateur comme une courroie de transmission qui se met au service de la personne en situation de handicap pour qu’elle puisse exprimer sa pro-pre opinion, même si c’est un point de vue qui est contraire à celui qui prévaut dans le milieu. Lorsque Georges Rais co-écrivit son livre sur la prise de décision, il ne connaissait pas encore ces différentes notions auxquelles il adhère fortement actuellement. Aujourd’hui encore, il s’investit auprès de différents partenaires tels que le groupe-conseil de la formation continue de Pro Infirmis Jura. Il contribue à y promouvoir les concepts de participation et de facilitation qui pour lui repré-sentent la base de l’intégration des personnes en situation de handicap.«C’est en me trempant régulièrement dans des actions de formation continue auprès de person-nes en situation de handicap mental que je me découvre des convergences, je dirais même des complicités qui me confortent dans la conviction qu’il faut dépasser le discours sur l’égalité pour œuvrer concrètement à l’autodétermination, à la conquête d’un espace d’expression et de liberté pour chacun.»

Regardevoir...Festival de Montreux, musique-pas-sion, suspension du temps et de l’espace pour vibrer intensément quand monte l’hymne à la beauté. Sur scène, c’est le pianiste de génie Michel Petrucciani ac-clamé par des gens bouleversés, enthou-siastes, debout pour honorer cet homme qu’en d’autres temps la classification des handicaps aurait typé dans le nanisme difforme. Et subitement, en miroir, mu-sicalement en contrepoint si vous vou-lez, surgit en ma mémoire mon image de l’enfant différent, celle qui naquit et s’épanouit en moi sur la longue route des vingt-trois ans qu’avec ma famille, j’ai passés dans leur maison. D’un côté du miroir, ce que la très sérieuse science inexacte de la psychopédagogie s’efforce de donner à voir dans les tests, les typo-logies, les sémiologies, les échelles de ... (ajouter les noms des éminents inven-teurs de toutes ces mesures qui forcément ont un bas et un haut). En d’autres ter-mes, autant de considérants qui portent sur l’écart à la norme, sur le manque, enfin sur le handicap.De l’autre côté du miroir sans tain, ce qui n’a pas de nom, le non-dit. Ce sont des paillettes dans le regard, des vulné-rabilités extrêmes à cœur découvert, les mille facettes d’une larme, la résonance d’un soupir. Tant de choses qui pénètrent plus profond, dans la sphère émotionnel-le, là où joie et tristesse se livrent duel, depuis que l’homo même non sapiens existe. Mais ne vous y trompez pas, c’est de cela que joue Michel Petrucciani; les notes qui s’échappent de son piano per-cent les carapaces, vont droit au cœur, atteignent au paroxysme du partage d’un même amour de la vie.Retour chez les scientifiques. Surfant en dilettante sur le web, je tombe l’autre jour dans un site (on dit comme cela en langue www) qui pourrait bien conci-lier un peu la méfiance que j’ai acquise à voir mesurer les différences et mon es-poir que ce soit les valeurs affectives qui rapprochent ou du moins différencient les humains. On y décrit les déconvenues des capitaines d’industries et d’autres grandes nefs constatant que certains de leurs cadres et collaborateurs, tous très qualifiés sur les plans technologique et scientifique, échouent lamentablement dans l’entreprise. Au nombre des cau-ses de l’échec, l’incapacité de travailler en équipe, le manque de confiance dans l’autre, l’absence d’estime de la

personne, la sécheresse de cœur qui blo-que le partage d’une émotion. Deux clics (ça c’est la souris qui le fait) plus loin se trouve un élément de réponse qui, ma foi, m’interpelle: on a mis au point un test qui rend compte de la qualité des affects; le quotient émotionnel nouveau est arrivé.Je souhaite longue vie au quotient émo-tionnel parce que, un peu grâce à lui bien sûr, mais surtout grâce à un vaste mouvement auquel participent tous les Michel Petrucciani, nous pourrons bientôt comprendre ce que veut dire depuis des dizaines d’années le grand scientifique Albert JACQUARD:«La leçon première de la génétique est que les individus, tous différents, ne peuvent être classés, évalués, ordonnés; la définition de races, utile pour certai-nes recherches, ne peut être qu’arbitraire et imprécise; l’interrogation sur le moins bon et le meilleur est sans réponse.»Il suffit d’y croire pour imaginer et met-tre en pratique ce qui découle de ce nou-veau regard sur la personne différente. Par exemple, le concept de valorisation du rôle social consiste à rechercher les stratégies permettant de positiver l’ima-ge de soi en utilisant, dans la commu-nauté, des moyens culturellement appré-ciés. C’est exactement ce que fait le Foyer LES CASTORS à travers ses ateliers, son livre, son exposition et ses rencontres sur le thème du regard.Ainsi la société doit apprendre à ac-cueillir toutes les personnes, à égalité de considération, mettant en œuvre les moyens de différenciation permettant à chacune et chacun de se reconnaître uti-le à la communauté et de s’y épanouir. Il s’agit donc d’un changement d’attitude inscrivant en éloge de la différence (c’est sous ce titre qu’Albert Jacquard a écrit ce qui précède) ce qui apparaissait naguère comme handicap dans une échelle des valeurs.

1 Albert Jacquard: Eloge de la différence, p. 207. 1978. Ed. du Seuil

Georges Rais, Regarde voir, publica-tion sous l’égide du Foyer Les Cas-tors, Porrentruy, Editions Le Pays, Porrentruy, 1999

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Accompagner les personnes en situation de handicapFormation des encadrants en Suisse et en EuropeNorbert Genoud, responsable du projet ACERISH, FOVAHM, Saxon

La société actuelle se caractérise par l’exclusion de nombreuses personnes. Cette exclusion est encore plus aiguë pour les personnes adultes en situation de handicap qui représentent selon l’OMS 10% de la population en général soit environ 45 mil-lions de personnes dans l’Union européenne et en Suisse. Si dans chaque pays européen une prise en charge éducative pour les enfants en situation de handicap mental existe, en devenant adultes, ils ont moins accès aux structures éducatives. Dans différents établissements, que ce soit des Centres d’aide par le travail, des logements indépendants ou des institutions spécialisées, leur autonomie par l’éducation et la formation est la préoccu-pation principale du personnel encadrant. Voilà pour le contexte du projet.

ACERISH2, le projet européen

Les partenaires réunis dans ce projet ont acquis des expériences pertinentes dans les contextes de la «vie quotidienne» et de la «vie professionnelle» en permettant aux personnes en situation de han-dicap de pouvoir réutiliser les savoirs acquis; par exemple la compréhension et l’expression à l’aide de supports écrits et oraux, le développement des capacités en calcul, l’acquisition des savoir-faire en relation avec des situations de la vie quoti-dienne et professionnelle.Pour que l’autonomie puisse exister concrète-ment, il faut renforcer ces savoirs de base et don-ner aux personnes en situation de handicap men-tal la possibilité de développer les compétences nécessaires à leur réalisation personnelle et à leur vie citoyenne. En tenant compte du degré de handicap, l’auto-nomie peut être d’organiser sa journée, de faire ses courses, de s’occuper d’animaux, de répondre à des questions, de donner des informations, de se déplacer dans un quartier ou dans une ville,

de prendre le bus... bref, de maintenir ou de dé-velopper les acquis. En effet, les personnes han-dicapées sont des citoyens comme tous les autres et ont les mêmes droits et obligations. Or les bar-rières qui sont mises à leur formation empêchent souvent l’exercice de leurs droits.

Les objectifs

Le projet ACERISH2 vise à améliorer les compé-tences des encadrants qui interviennent dans le renforcement de la capacité d’intégration sociale des personnes handicapées. Ils sont peu préparés à ce rôle car ils sont en général de formation tech-nique ou médico-sociale et peu centrés sur les sa-voirs fondamentaux ou la pédagogie adaptée aux personnes handicapées. Pour cela le projet a construit des outils et des méthodes permettant aux personnels spécialisés d’améliorer leurs pratiques professionnelles, d’en découvrir de nouvelles et d’accroître les connais-sances théoriques nécessaires à l’exercice de leurs métiers. Ainsi le projet a intégré des personnes ressources émanant de milieux universitaires afin d’aider les professionnels à formaliser leurs pra-tiques.

Les résultats

Les produits qui ont été élaborés au cours du pro-jet seront exposés lors du séminaire, ils se décli-nent ainsi:- «Typologies du handicap dans les pays partici-pants»;- «Etude comparative sur la validation des acquis professionnels des encadrants»;- «Pratiques d’autonomisation sociale et/ou pro-fessionnelle»;- «Proposition de validation des compétences des encadrants».

Le Consortium européen est composé de:AGORA (FR) – Marie Curie Association (BG) – Instituto Valenciano de Atencion a los Dis-capcitados (ES) – Cat Apajhe De Larmor-PlageAT (FR) – Baranya-Megyei Ônkormanyzat Fogyatekos Személyek otoia (HU) – Kaposvàri Egyetem CSVM PFK (HU) – Høgskolen I Agder (NO) – University of Lôdz The Department of Special Education (PL) – Volunteer Centre North Lanarkshire (UK) – FOVAHM (CH)

Depuis deux ans, la Fondation valaisanne en faveur des personnes handicapées mentales (FOVAHM) participe activement à un projet pédagogique européen Leonardo da Vinci inti-tulé ACERISH�: Améliorer les Compétences des Encadrants, Renforcer l’Intégration Sociale des personnes Handicapées.

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Les dix compétences-clés à acquérir en situation professionnelle

Selon l’étude ACERISH2, voici les 10 compétences-clés les plus souvent citées par les encadrants de personne en situation de handicap. Cependant leur pondération varie selon si l’encadrant travaille dans un domaine social, sanitaire ou éducatif.

Connaissances de base du métierLeur maîtrise est nécessaire pour dominer les bases de l’activité de chaque personne, comme représentant les connaissances indispensables ou essentielles qui comp-tent pour construire la dynamique propre de cette activité. Ceci est à comparer au ciment d’un édifice avec lequel chaque architecte peut développer des structures différentes. Ces connaissances permettent aux personnes de communiquer dans le même langage et avec une compréhension et une interprétation semblables. Il s’agit en pratique d’un standard commun, qui sou-tient la créativité individuelle et l’initiative personnelle de chacun.

Aptitude à la communication interper-sonnelleCeci se réfère à un ensemble de compéten-ces qui permettent la communication avec d’autres personnes et d’autres groupes. Elles requièrent de l’intelligence émotionnelle et de l’imagination, conduisant à la création de relations positives avec toute personne possédant ces aptitudes. Ces aptitudes représentent la capacité de se mettre à la place des autres et de prendre en compte leur point de vue, tout en en proposant un soi-même. Ces aptitudes autorisent les per-sonnes à pratiquer la critique constructive sans risque d’endommager la bonne com-préhension et l’entente entre les parties, et de défendre ses idées propres tout en étant flexible et respectueux des idées d’autrui. Cette aptitude conduit, en conséquence, à créer des liens de qualité entre personnes, liens favorables aux synergies. Elles accélè-rent le transfert d’objectifs au sein des grou-pes et organisations, et favorisent le travail de groupe.

Gestion des conflitsOn rencontre souvent des situations pénibles ou faites d’incertitude, dont il est difficile de sortir, conduisant à une série de circonstances ou de faits qui rendent nos objectifs difficiles à réaliser. L’aptitude à résoudre des problèmes peut donc s’avérer essentielle dans de telles situations. Sur la base d’une série de propositions ou d’infor-

mations, les personnes doivent déterminer comment obtenir tel résultat. Cela faisant, il est important de développer différentes alternatives dans le but de poser chaque problème et de le clarifier. Cela implique la capacité de choisir entre diverses possi-bilités, que nous devons être capables de formuler, en évaluant dans quelle mesure chaque solution envisagée est réaliste et applicable; il faut donc savoir poser le bon choix et expliquer les conséquences de nos actions. Finalement, il faut pouvoir véri-fier si le problème initial a bien été résolu ou non. Tout cela nécessite de remettre en question nos propres ressources et d’ad-hérer nous-mêmes à l’une des solutions proposées.

Communication orale et écrite dans sa propre langueIl s’agit de l’aptitude à transmettre l’information par le moyen d’un code oral ou écrit, d’une manière aisément compré-hensible par l’interlocuteur. Les ressources allouées en ce sens sont normalement utili-sées à mettre des personnes ou des organi-sations en contact les unes avec les autres, en s’assurant que la transmission ou la réception d’un rapport ou d’un document entre elles soient adéquates. Cette aptitude, bien que paraissant par certains côtés évi-dente, est la clé pour réunir des forces et établir des synergies entre les membres d’un groupe ou d’une organisation. Cette apti-tude est d’une importance vitale, au niveau individuel comme au niveau corporatif. Des capacités optimales de communication impliquent différents facteurs techniques et comportementaux, qui peuvent être améliorés par la pratique.

Prise de décisionLes différentes structures impliquées dans notre développement professionnel nous obligent souvent à prendre une décision ferme ou à poser, sans hésitation, un choix dans nos actions.Cette capacité prévient l’immobilisme en permettant de définir des procédures qui puissent aboutir à une solution satis-faisante. L’indécision est un obstacle aux nouvelles opportunités et est également un frein au règlement des questions courantes. D’autre part, une prise de décision aisée renforce la clarté des situations et renforce le travail de groupe comme le perfectionne-ment personnel. Les gens tombent ordinai-rement dans le piège classique de demander ou trop ou trop peu d’informations avant de prendre une décision spécifique. Il est donc important de bien peser les paramè-

tres avant de prendre une décision, mais jamais superficiellement ni inutilement trop en profondeur. Capacité d’adaptation à des situations nouvellesC’est la capacité à se confronter à des situations nouvelles, d’une manière flexi-ble et ouverte, dans le but d’accepter les changements et situations nouvelles avec une approche positive et constructive. Les individus qui ont cette capacité acceptent et s’adaptent facilement aux changements, les considérant d’une manière flexible, tout en promouvant l’innovation. Cela requiert une perception adéquate des éléments nou-veaux qui apparaissent constamment, ainsi que l’acceptation de leurs différences. Cela suppose un effort de restructuration des approches initiales, ainsi qu’une volonté active de s’adapter aux nouveaux besoins et nécessités. C’est évidemment indispen-sable dans l’environnement et la société d’aujourd’hui en perpétuel changement.

Intérêt pour la qualitéCela suppose un engagement de la per-sonne à faire les choses comme il faut avec un désir constant de s’améliorer. Ce qui caractérise les personnes qui possèdent cet-te aptitude est qu’elles réalisent leur travail un peu mieux jour après jour, même si cela suppose de travailler d’avantage. Elles ne sont pas satisfaites des situations acquises et essaient en permanence de les amélio-rer. Ces personnes ne vont pas accepter la médiocrité et souhaitent en permanence atteindre à la perfection.

Travail de groupeCela inclut les fonctions exécutées en liaison et coordination avec différentes personnes ou structures. L’école requiert et active la capacité d’organisation et de communica-tion afin qu’une telle communication puisse s’établir. C’est une nécessité quasiment om-niprésente dans la société d’aujourd’hui où l’individualisme et la capacité personnelle individuelle ont créé la voie des synergies de groupe, voie en plein développement. Cela réclame, comme faisant partie de l’activité elle-même, une attitude réceptive et ouverte à la discussion, ainsi que d’être prêt à écouter. Cela suppose de constants enrichissements et ajustements de ses pro-pres décisions afin d’être intégré au groupe, pris dans son entier. On pourrait penser, en principe, que cela retarde la réalisation des objectifs; en réalité, une vision à plus long terme montre que la contribution de cha-que membre du groupe est ainsi augmentée.

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C’est donc bien là une capacité de travailler avec d’autres à la réalisation d’objectifs communs. Les personnes qui possèdent cette capacité se signa-lent par leur aptitude à identifier très clairement les objectifs du groupe et à organiser leur travail dans ce but. Elles sont prêtes à collaborer avec d’autres et placent clairement l’intérêt du groupe avant leur intérêt personnel.

Aptitude à passer de la théorie à la pratiqueIl est important d’être capable d’utiliser la connaissance des principes généraux pour les appliquer à des cas particuliers, c’est-à-dire de relier les disciplines ou les concepts théoriques que nous avons appris avec des situations ou des données spécifiques. Notre éducation géné-rale serait improductive si nous ne pouvions pas l’appliquer à des usages plus particuliers. Il est insuffisant de connaître seulement les bases d’un sujet; nous devons utiliser à bon escient tout le savoir que nous avons accumulé. Cette aptitude à adapter et transformer la réalité est ce qui fait la valeur du temps que nous passons à étudier et à nous entraîner.

Aptitude à s’intégrer dans un team multidis-ciplinaireLes relations avec les autres et la combinaison des efforts au sein d’une organisation formée de pro-fessionnels issus de disciplines diverses demandent un effort de compréhension et d’adaptation de la part de toutes les personnes impliquées. Cette flexibilité ou capacité d’adaptation est fondée sur

une personnalité ouverte et sur la faculté à user de compromis malgré l’existence d’opinions très différentes. En plus de l’attitude personnelle des divers membres d’un groupe, une coordination des efforts est nécessaire afin d’ajuster les diffé-rentes opinions pour converger vers une position commune. La complexité des structures sociales réclame cette capacité pour pouvoir négocier en-tre des opinions très différentes et aboutir ainsi à une solution valable selon tous les points de vue. Cette aptitude s’appuie sur des capacités déjà mentionnées auparavant, comme par exem-ple, la communication et les relations entre les personnes.

Informations pratiques:Le projet « ACERISH2 » a été financé pour la Suisse par le Secrétariat d’Etat à l’éducation et à la recherche.Informations sur le projet: www.acerish.org

Séminaire internationalLundi 15 octobre 2007 de 8 h 30 à 18 h 30à la HES-SO Valais/Wallis à Sierre

En collaboration avec la HES-SO Valais/Wallis, la FOVAHM et ses partenaires européens vous invitent au séminaire international qui se déroulera selon le programme du dépliant annexé à ce numéro. Inscription jusqu’au 28 septembre à [email protected] séminaire comprend trois volets:

1. HES-SO Valais/Wallis Santé & SocialLes intervenants aborderont trois sujets: «Interrogation sur les statuts et les rôles des personnes en situation de handicap en Suisse», «La formation par les compétences pratiquées par la HES-SO Travail social» et «Comment penser la question de la complexification d’une profession dans la perspective d’une pratique dite insaisissable».

2. FOVAHMLe Centre de Formation pour Jeunes Adultes CFJA fête ses vingt ans. Le film «Premier envol» d’Antoine Cretton présentera la diversité d’accompagnement que le CFJA offre aux jeunes en situation de handicap mental pour faciliter leur intégration sociale et professionnelle.

3. ACERISH2Accompagner des personnes en situation de handicap nécessite de questionner les compétences des encadrants, quel que soit leur secteur d’activité (éducatif, sanitaire, social).A partir d’échanges de pratiques, les partenaires du projet européen ACERISH2 ont dégagédes lignes directrices sous la forme de 10 compétences-clés à acquérir en situation professionnelle. Ils se sont également penchés sur la validation des compétences et ce travail transnational a permis de générer un modèle européen de validation.

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Handimanagement Handimanagement est un projet français dont l’ambition est de construire progressi-vement un large programme de sensibilisation des futurs managers à l’insertion de salariés handicapés. En 2007, déjà une trentaine de grandes écoles et universités ont joué le jeu en engageant une équipe d’étudiants dans ce projet pédagogique, projet financé par une douzaine de grandes entreprises, qui par ailleurs accompagnent cette action en y apportant leur expérience d’acteur. www.companieros.com

L’AGIS redéfinit son sigleLors de son assemblée générale le 4 juin dernier, l’association genevoise d’insertion sociale (AGIS), qui par ailleurs fête ses 20 ans en 2007, a décidé de changer la dénomination de son sigle. En lieu et place du terme d’insertion, les membres engagés dans l’association ont préféré celui d’intégra-tion, qui leur paraît refléter un processus plus ouvert et réciproque entre la société et la personne handicapée, celle-ci ne devant pas, dans cette dynamique, renoncer à ses différences. AGIS signifie donc désormais Association Genevoise d’Intégration Sociale.

Des rêves et des étoiles Etoile filante est une fondation qui a pour mission d’exaucer les rêves d’enfants et d’adoles-cents qui voient leur qualité de vie fortement altérée parce qu’ils sont gravement malades ou handicapés. Elle organise

pour eux l’événement parti-culier qui leur ferait le plus plaisir. Etoile filante finance également des projets représen-tant des actions de longue du-rée pour des jeunes qui doivent faire de fréquents séjours dans des hôpitaux ou des institu-tions spécialisées. Un exemple de ce type d’intervention: l’aménagement d’un terrain de jeux dans une institution pour autistes. Pour en savoir plus, visitez le site internet de la fondation, qui vient d’être remanié. Vous y découvrirez toutes les nouveautés au sujet des rêves exaucés, des projets, campagnes Pro Etoile filante et bien d’autres choses intéressan-tes encore… www.etoilefilante.ch

Maltraitance, genre et handicapLes femmes et les filles handi-capées sont particulièrement exposées à la maltraitance. Une modeste étude menée dans l’Orissa (Inde) en 2004 montre que presque toutes les femmes et filles handicapées étaient battues à domicile, 25 pour cent de femmes ayant un handicap mental avaient été violées et 6 pour cent des femmes handicapées avaient été stérilisées de force. www.un.org/esa/socdev/enable

Une nouvelle formation: la «direction d’équipe»Les associations de branche du domaine social (Agogis, Curaviva, ONSOS, Vivica et le Berufsverband Fachfrau Betreuung Schweiz) ont éla-boré, dans le cadre d’un projet s’étendant sur plusieurs années,

une formation «direction d’équipe» débouchant sur un brevet reconnu au niveau fé-déral. La désignation officielle est la suivante: «chef d’équipe dans les institutions sociales et médico-sociales». Ce titre protégé est réservé aux person-nes qui ont réussi les examens professionnels. Insos-infos, no 21, juillet 2007 – www.agogis.ch

Contre la discrimina-tion: l’action positive Il ne suffit pas, pour obtenir une réelle égalité, d’éliminer les obstacles qui barrent actuel-lement la route des personnes handicapées. Les mesures dites positives sont aussi nécessaires pour stimuler l’instauration de l’égalité. La Conférence annuelle sur la non-discri-mination de la Commission européenne a examiné le sens, les buts et les modalités de ces mesures. Le rapport relatif à cette question est téléchargea-ble sur le site www.agile.ch

Agenda politiqueL’agenda politique du Conseil et du centre Egalité Handicap renseigne sur l’état d’avance-ment des révisions de lois et sur les interventions politiques concernant des questions ayant trait à l’égalité des personnes

handicapées. L’agenda est régulièrement mis à jour sur le site www.egalite-handicap.ch

Du changement au comité de rédaction Entré au comité de rédaction de Pages romandes en avril 1997, Jean-Daniel Vautravers vient de nous faire part de sa décision de mettre un terme à ce mandat. «Le premier numéro auquel je participe, nous écrit-il, traite du dossier intitulé Habitat, architecture. Dix ans plus tard, je collabore à l’élaboration du thème Archi-tecture; angles et perspectives. En ce qui me concerne, ce sera le dernier. Une manière de boucler la boucle». Formidable jongleur d’idées, Jean-Daniel aura tenu avec passion, durant toutes ces années, le rôle de stimulateur au sein du comité de rédaction. Avec lui, pas de thème tabou; les hypothèses les plus audacieuses, les plus improbables prenaient sens dans un processus de question-nement incessant qu’il cultivait avec la verve qu’on lui connaît. Au nom du comité, merci Jean-Daniel, d’avoir été pour notre groupe, ce joyeux em-pêcheur de réfléchir en rond. Merci pour ce cheminement partagé. La rédaction

En bref

Prochain dossier: Spécial Jura

Chaque année, en décembre, Pages romandes donne la parole à l’un des six cantons romands. L’an dernier, Genève faisait le point sur ses processus de prise en charge des personnes handicapées. Cette année, ce sera le tour du Jura. Sous la responsabilité d’Eliane Jubin, ce canton proposera un regard sur la situation jurassienne en la matière, à partir de la fête qui a eu lieu le 9 juin dernier et intitulée «Handi-Cap sur la fête».

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Sélection

Quelles trajectoires d’insertion pour les personnes handicapées ?Coordination X. Coyer, A. Ramaré, Rennes Ecole nationale de la santé publique, 2007Collection Echanges Santé Social

Les difficultés rencontrées par les person-nes handicapées pour accomplir les «actes d’insertion» élémentaires d’une vie ordi-naire, qu’il s’agisse de l’accès à l’école ou à l’Université, du déplacement dans la ville,

du droit à l’emploi, à la santé… sont considérables.A moins de prêter à chaque personne handicapée l’étoffe d’un héros, doté d’une volonté et d’un courage exceptionnels, c’est à la société qu’il revient de réduire les obstacles, de déplacer, d’«externaliser» les difficultés, et de créer les conditions d’une vie ordinaire, celles que tout un chacun considère à juste titre comme allant de soi. Ce volume présente quelques aspects des réformes à entreprendre, ou déjà mises en œuvre, pour aller dans ce sens. Loin de s’en tenir au caractère matériel des aménagements nécessaires, il souligne la diffi-culté de transformer le regard que nous portons sur l’autre et qui nous amène trop souvent à rester en deçà de l’élémentaire ou du simple bon sens.

Autisme: une fatalité génétique? L’enquête d’une mère: des vérités qui dérangent

Dépréaux, Marie-ChristineEmbourg: Testez éditions/Marco Pietteur, 2007

Mère de trois enfants dont l’aîné est autiste, l’auteure passe le plus clair de son temps de-puis huit ans à chercher, traduire et analyser tout ce qui concerne les approches biomédica-

les de l’autisme. Sa démarche est menée à un niveau rigoureusement scientifique, appuyée par de solides références médicales, et surtout animée par la volonté d’aller au fond des choses.Si, du côté anglophone, les écrits sur cet aspect de l’autisme abondent de témoignages, si des débats ont lieu au niveau gouvernemental ou dans les médias, rien de similaire n’existe pour les francophones.Voici donc le livre que cette mère aurait aimé découvrir il y a vingt ans, suscitant intérêt et débats sur le sujet. Elle s’insurge contre le discours immuable et simpliste présentant l’autisme comme une fatalité géné-tique. Elle nous révèle l’existence d’un microcosme médical à l’origine des nouvelles approches biomédicales de l’autisme.Un livre destiné à réveiller la communauté scientifique endormie, afin de vaincre l’autisme des personnes déjà atteintes et d’en déterminer l’origine pour éviter de nouvelles victimes…

Handicap mental: prévention et accueil

Sous la direction de:P. Jonckheere, R. Salbreux et Gh. MagerotteBruxelles: De Boeck, 2007. – 298 p.(Collection Questions de personne)

Comment rencontrer la personne présen-tant un handicap mental? Comment décou-vrir sa richesse et partager ses peines? Avec quelle clé déceler son désir et ses craintes, son angoisse profonde? Comment faire face

à sa révolte? Quelles sont les nouvelles voies de prévention?Toutes ces questions sont abordées dans cet ouvrage issu de l’expé-rience – déjà longue – d’un groupe interdisciplinaire de spécialistes du handicap mental: les auteurs – des médecins, psychologues, péda-gogues et spécialistes du handicap mental, de l’autisme et de la surdité – apportent des réponses originales, des propositions thérapeutiques, ainsi que de nouvelles approches pédagogiques.Cet ouvrage est destiné aux psychologues et pédagogues, médecins, enseignants, éducateurs, spécialistes du développement, assistants so-ciaux, orthophonistes et kinésithérapeutes. Il intéressera également les familles d’enfants présentant un handicap mental.(Tiré de la 4e de couverture)

Surdité et langage: prothèses, LPC et implants cochléairesSous la direction de Jaime López KrahePresses universitaires de Vincennes, 2007. – 198 p.

Cet ouvrage aborde le thème de la commu-nication chez les personnes sourdes, dont l’intégration linguistique est une question polémique et toujours d’actualité. Pour des raisons historiques (congrès de Milan de 1880, lois Ferry sur l’utilisation du fran-çais), les positions se sont souvent radicali-

sées pour devenir parfois antagonistes suite à la répression qu’a subie la LSF (Langue des Signes Française).Ecrit par des universitaires internationalement reconnus, ce livre pro-pose les découvertes les plus récentes concernant les aspects neuro-physiologiques, technologiques et psycholinguistiques liés à la surdité. Il rend également compte des apports du Langage Parlé Complété (LPC), des solutions technologiques, depuis les prothèses jusqu’aux implants cochléaires, et de leur influence dans le développement de l’individu. Il met ainsi à la portée des lecteurs francophones une littéra-ture scientifique d’habitude essentiellement anglo-saxonne et s’adresse à toute personne concernée par la question de la surdité, ainsi qu’aux enseignants, chercheurs et étudiants qui s’intéressent à ce sujet.

Loïc Diacon, responsable infothèque, Haute Ecole de Travail Social (IES), Genève

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Séminaires, colloques et formation

Handicap : connaître et accompagnerCertificat de spécialisation dans le domaine du handicapSéance d’information : 19 septembre 07Haute Ecole fribourgeoise de travail social (HEF-TS), rue Jean-Prouvé 10, 1762 Givisiez

Polyhandicap: un handicap pas vraiment comme les autresGeorges Saulus, psychiatre, médecin-conseiller techniqueClaire Landre, orthophonisteCoordinateur: Jean-Louis Korpès8 et 9 novembre; 3 et 4 décembre 2007 Formation continue de la HEF-TSDélai d’inscription: 8 octobre 2007

Intervention multimodale en retard mental ou autismeUne première en Suisse romandeYves Lardon, consultant en troubles du comportementCoordinateur: Jean-Louis Korpès19 et 20 novembre 2007Cette formation est proposée pour l’ensemble ou une partie du personnel d’une institution. Une salle devra être réservée pour l’institution elle-même.Délai d’inscription: 18 octobre 2007

Evolution des droits des personnes handicapées; dispositions onusiennes, européen-nes et suissesCaroline Hess-Klein, juristeCoordinateur: Jean-Louis KorpèsMercredi 28 novembre 2007Délai d’inscription: 26 octobre 2007

Double diagnostic: déficience intellectuelle et maladie psychiqueDescription et prises en chargeGaby Pierre Chami, psychothérapeute et psychopédagogueCoordinateur: Maurice Jecker-Parvex12 et 19 décembre 2007Délai d’inscription: 12 novembre 2007

Autodétermination: du concept à la pratiqueManon Masse, chargée d’enseignement HESJean-Louis Korpès, professeur HES17 et 18 janvier 2008Délai d’inscription: 14 décembre 2007

Pour toutes les formations ci-dessus, les renseigne-ments peuvent être obtenus à l’adresse suivante: HEF-TS, rue Jean-Prouvé 10, 1762 GivisiezTél. +41 26 429 62 00 [email protected] www.hef-ts.ch

Du cœur au corpsAffectivité, sexualité et handicapsNiveau 2 Catherine Agthe Diserens, sexo-pédagogue3 et 4 décembre 2007Salle Bellerive, rez-de-chaussée de l’institut La CombeDélai d’inscription: 15 octobre 2007Renseignements et inscriptions:

EPSE, route d’Hermance 63, Collonges-Bellerive

Tél. +41 22 855 93 18 – [email protected]

Unihockey, ski alpin, ski de fond ou patinage pour personnes mentalement handicapéesEn collaboration avec Special Olympics Suisse (SOCH)Didier Bonvin8 et 9 décembre 2007LenzeirheideDélai d’inscription: 30 septembre 2007Renseignements :

SOCH, Montena 85, 1728 Rossens

Tél. +41 26 402 00 45 – [email protected]

Pour une éducation bientraitanteRoger CeveyCours Améthyste no 27830 et 31 octobre 2007Renseignements et inscriptions:

Christiane Besson, impasse de la Dîme,

1523, Granges-près-Marnand

Tél. +41 26 668 02 78 – [email protected]

Mieux connaître et comprendre les psychopa-thologies en évolutionJocelyne Huguet ManoukianCours Améthyste no 28127 et 28 novembre, 11 et 12 décembre 2007Renseignements et inscriptions:

Christiane Besson, impasse de la Dîme,

1523, Granges-près-Marnand

Tél. +41 26 668 02 78 – [email protected]

Cycle de formation au «Colporteur’Couleurs»

Automne-hiver 2007-2008: 1, 2, 29 et 30 octobre; 26 et 27 novembre 2007Ateliers de communication non verbale:8 et 9 novembre 2007; 7 et 8 février 2008Ateliers Sylvagnins, SavagnierRenseignements: Ateliers Sylvagnins, rue du Four 5, 2065 Savagnier, tél. +41 32 853 43 66 - +41 32 724 06 [email protected] – www.colporteur-couleurs.ch (Lire notre article pp. 4, 5 et 6)

LA FONDATION COUP D’POUCE

Camps et activités de loisirs pour personnes vivant avec un handicap mental

recherche encore quelques moniteurs et monitrices pour ses camps d’automne, du 6 au 13 octobre 2007

Le cahier des charges peut être consulté sur le site http://www.coupdepouce.ch/moniteurs.html

Pour tous autres renseignements, contacter la Fondation Coupd’Pouce, rue J.-L. Galiard 2, 1004 Lausanne Tél. 021 323 41 39 - e-mail: [email protected] - [email protected]

Ecole de pédagogie curative BienneHeilpädagogische Tagesschule Biel

Pour l’été 2008, nous cherchons une nouvelle

Direction

sommes une institution cantonale, située dans un lieu magnifique surplombant la ville de Bienne;accueillons environ 100 enfants et adolescent(e)s avec un handicap mental. Pédagogues spécialisé(e)s, thérapeutes et maître(sse)s d’ateliers les accompagnent tout au long de leur scolarité;sommes une école bilingue (français/allemand).

concept se base sur une vision globale de l’être humain;équipe motivée et bien rodée est composée d’enseignant(e)s spécialisé(e)s, de thérapeutes, de personnel de l’administration, de la cuisine et de la conciergerie.

qui avec plaisir et créativité souhaite relever le défi en prenant la direction de notre école;de langue française ou allemande avec d’excellentes connaissances de l’autre langue;avec une formation en pédagogie curative, une formation continue de direction et possédant de bonnes capacités dans la gestion du personnel;disposée à collaborer avec les différentes instances, de représenter l’école envers les parents et face à l’extérieur tout en gardant une vue d’ensemble;avec des compétences en matière de finances;intéressée au projet cantonal de transférer les écoles spécialisées de la Direction des oeuvres sociales à la Direction de l’instruction publique.

un poste de gestion varié avec de grandes responsabilités;la collaboration d’un personnel engagé;un salaire et des prestations sociales dans le cadre des données cantonales.

Veuillez nous faire parvenir les postulations d’ici début octobre 2007; le job-sharing n’est pas exclu.Coordonnées: Ecole de pédagogie curative Bienne, Falbringen 20, 2502 Bienne.Pour plus de renseignements, vous pouvez contacter la direction actuelle: Madame Catherine Pellaton et Monsieur Richard Weber, tél. 032 344 80 30

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Nous

Notre

Nous cherchonsune personne

Nous offrons

Postulation

Articuler différentes filières de formation

en travail social

Pour quels besoins?

Journée romande d’information et d’échange

Une manifestation organisée par la FORs (ORTRA romande pour la formation professionnelle dans le

domaine social et médico-social, à l’initiative de la Tripartite

(réunion des employeurs, employés et HES-SO du travail social)

Jeudi 22 novembre 2007de 9h00 à 16h30

Hôtel du Parc, Martigny

Inscriptions et programme définitif sur le site www.fors-ortra.chContact: [email protected]

ALTERune nouvelle revue scientifique Européenne

L’association internationale pour l’Histoire des infir-mités, déficiences, inadaptations, handicaps (ALTER) a signé le 18 juin 2007 avec les éditions Elsévier-Mas-son la création d’une nouvelle revue dite «ALTER».Cette revue, soutenue par l’Institut Fédératif de Recherche sur le Handicap (IFRH), est animée par un Comité de Rédaction international et Henri-Jacques Stiker en est le rédacteur en chef.ALTER a l’ambition de faire mieux connaître les nom-breux travaux existants, en anglais et en français, qui concernent les rapports de la société et du handicap en l’élargissant à toutes les formes d’altérité.Le tout premier numéro est prévu en novembre 2007. Ultérieurement, le rythme sera de 4 parutions par an.

Pour tout contact :[email protected]étaire Éditoriale de la revue

Le calendrier Arthemo 2007 - 2009 est disponible !

Valable dès maintenant et jusqu’au 30 juin 2009, il s’agit d’un modèle de table, format boîte CD.Chacun des 24 mois est illustré par un dessin du concours «Affiche Arthemo 2007», sélectionné par les internautes. En vente au prix de CHF 10.00 (env. 6 Euros) + frais de port et d’emballage auprès de: Verena BatscheletASA-HANDICAP MENTAL, rue des Casernes 36, case postale 4016, CH-1950 Sion 4 Tél. +41 27 322 67 55 - Fax +41 27 322 67 65 - Natel 076 587 36 [email protected] - www.asa-handicap-mental.ch

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