PAR MANIÈRE DE PRÉFACE

PAR MANIÈRE DE PRÉFACEAuthor(s): Lucien FebvreSource: Cahiers d'histoire de la guerre, No. 3 (FÉVRIER 1950), pp. 1-3Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/25759781 .

Accessed: 13/06/2014 06:41

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PAR MANIERE DE PREFACE.

Qu'il soit trop tot pour ecrire quelque chose de vraiment valable sur la Resistance a l'oppression des pays europeens envahis par FAllemagne, on

ne manquera pas de nous le dire, tantot gentiment, tantot avec une pointe d'acidite. Nous remercions d'avance nos informateurs; mais ils ne nous

apprendraient rien. Comme nous n'avons pas la candeur de croire au

? definitif ? en Histoire, comme nous savons que cette Histoire, science des

changements, est elle-meme en perpetuel changement, done qu'elle ne peut

proceder que par une suite d'approximations successives, les premieres tres

grosses, les suivantes de plus en plus precises; comme nous avons d'autre

part, le fort sentiment que, sous peine de suicide, les historiens honnetes

ne peuvent, ne doivent laisser dans l'ignorance de ce qu'on peut deja savoir, un vaste public qui demande a ce qu'on n'attende pas sa mort pour lui

apporter... quoi? du provisoire, a peine moins provisoire que ce que nous

pouvons lui donner aujourd'hui, nous avons decide de passer outre aux

scrupules de F ? attentisme ? et de consacrer des maintenant ce cahier a un

survol rapide de la Resistance telle qu'elle se manifesta spontanement un

peu partout en Europe dans les pays occupes par les Allemands, et des 1941.

Nous remercions les personnes tres qualifiees qui, de Belgique, de Hol

lands, de Tchecoslovaquie, d'ltalie, nous ont envoye les communications

qu'on va lire. Assurons-les que leur effort ne sera pas perdu. Beaucoup d'honnetes gens, en France et sans doute ailleurs, pour avoir vecu au jour le jour les annees terribles, n'en sont pas moins prives d'une vue d'en

semble des evenements qu'ils ont a peine connus par bribes, au hasard de

ce que laissaient filtrer des radios circonspectes et d'ailleurs difficiles a

capter. Depuis... ils ont du refaire leurs foyers, repris leurs activites, retrousse

leurs manches pour la lutte quotidienne. Ils n'ont pas eu le privilege ni le loisir de pouvoir, comme les erudits, lire les publications qui paraissent dans le monde sur ces memes annees qu'ils ont connues, eux, en France.

Ils seront bien heureux de trouver dans le troisieme cahier de notre publi cation une mise au point des faits de Resistance a travers FEurope

? toute

provisoire, e'est su, e'est connu, e'est archi-su et archi-connu ? mais enfin

utile. Et pour ceux qui veulent comprendre certaines positions politiquea d'aujourd'hui. Et pour ceux qui ont a faire comprendre ces positions :

je pense a nos professeurs des lycees et des colleges. Et enfin, pour les jeunes J. C. 000331. i



L. FEBVRE.

que tenterait l'histoire difficile de ces annees, et qui trouveront dans ce cahier les elements d'une documentation fort malaisee a reunir et que des collaborateurs informes de premiere main ont pris la peine de leur defri cher. Faut-il aj outer que, du point de vue de l'historien, il ne saurait etre indifferent de noter des maintenant la communaute d'allure de ces mouve

ments qui se sont organises petit a petit, en reaction contre les memes

contraintes, dans des pays sans lien commun a cette epoque de bouleverse

ment. Si bien que M. Henri Michel a pu se risquer a esquisser les grandes lignes d'une evolution dont personne, jusqu'a present, ne s'etait decide a retracer les traits communs. Difficile travail, qu'il fallait du courage pour entreprendre. Je pense, quant a moi, qu'il faut toujours avoir de tels cou

rages. Et ce n'est pas Particle d'Henri Michel, si prudent a la fois et si

intelligent, qui m'entraine a reviser mes positions.

Bien sur! On peut souhaiter d'autres publications. Le Comite d'Histoire

de la Guerre s'efforce, pour sa part, de rechercher les sources documentaires

possibles d'une histoire singulierement compliquee. Et il annonce ici le

resultat de ses efforts. Mais quand il est parvenu, au prix de beaucoup de

peine, souvent, a apprendre que tels documents sont conserves en tel lieu,

le bon lecteur n'en est pas plus avance. Ou meme l'honnete historien qui, l'eau a la bouche, pretendait se jeter sur ces documents et satisfaire sa

curiosite d'historien. Car il lui faudrait, a cet honnete historien, l'autorisa

tion de depouiller ces documents. ? Horreur! des documents aussi contem

porains, vous n'y pensez pas! Non, non, repassez dans trente ans, ou dans

cinquante, on verra... ?. Notez que ces documents pour la plupart ont ete

vus, lus, photographies, utilises a des fins personnelles par nombre de per sonnes... sans mandat. Et pour des fins interessees. Ils ont beaucoup couru,

ces documents, quand ils ne courent pas encore. Qu'importe. Vous, les clercs,

dans trente ans, vous dis-je. D'ici la : le secret dans la poussiere... Sauf

pour les temporels qui voient dans le document une arme offensive ou

defensive. Mais ils n'ont pas demande d'autorisations, ceux-la.

Je. parlais plus haut du suicide. Les historiens, fort communement, gemis

sent : ? On n'a pas pour nous la consideration qu'on d.evrait avoir. On nous

traite par le mepris, en quantites negligeables. Ou bien, on nous detrousse

sans vergogne. On se fait de l'argent a peu de frais avec notre desinteresse

ment... ?. Eh, chers amis, n'est-ce pas de votre faute? Ne vous contentez-vous

pas trop aisement, de vous instruire pour vous-memes. pour votre petite

satisfaction personnelle et solitaire, et ne vous faites-vous pas un peu trop

prier pou ouvrir une main pleine... ne disons pas de ?verites ? : ce n'est

point la le langage d'un historien. mais de textes et de documents diffi

ciles a interpreter et toujours susceptibles d'interpretations contradictoires?

Faits pour servir les travailleurs, dans toute la mesure du possible, les Cahiers

d'Histoire de la Guerre n'entendent pas laisser le champ libre aux informa

teurs interesses. aux adaptateurs partisans de l'histoire. Forts de leur desin

teressement, n'essayant jamais de faire croire au lecteur que. ce qu'on peut

dire honnetement, le plus honnetement du monde, en 1950, des evenements

d'entre 1940 et 1945, soit parole d'Evangile: ayant et propageant le sens du



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relatif, mais aussi celui de Putilite commune, les Cahiers sont prets a publier toutes les bonnes etudes qu'on leur enverra sur l'histoire de la seconde

guerre. Us esperent qu'on voudra bien les aider dans la quete difficile du bon article. Et par avance ils disent merci a leurs futurs collaborateurs, comme ils le disent, de tout coeur, a ceux d'hier et d'aujourd'hui.

Lucien Febvre.



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