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MESURES 736 - JUIN 2001 71 AUTOMATISMES EMPÊCHEZ VOS VARIATEURS DE VITESSE DE POLLUER LE RÉSEAU Après s’être imposés dans les asservissements de fréquence, les variateurs de fréquence élargissent leurs applications aux asservissements de couple, voire de position. De plus en plus, ils investissent le domaine du pompage et de la climatisation, où les économies d’énergie qu’ils procurent sont de plus en plus reconnues. Mais ces équipements créent des harmoniques de courant, polluant ainsi le courant d’ali- mentation du réseau électrique. De nombreuses solutions peuvent être mises en œuvre pour limiter les courants harmoniques (dont les fréquences sont des multiples du 50 Hz). Danfoss nous les présente ici. L es électroniques de puissance à découpage déforment le courant électrique livré par les fournisseurs d’énergie électrique et polluent le réseau électrique. Les équipements “cou- pables” ne manquent pas : les systèmes d’éclairage à lampes à décharge ou tubes fluorescents, les redresseurs pour les instal- lations d’électrolyse, les convertisseurs sta- tiques pour les alimentations secourues, et bien sûr les variateurs de vitesse pour moteurs électriques. Surtout ces derniers, devrait-on dire, car les moteurs électriques représentent 75 % de l’électricité consom- mée dans l’industrie… Tous les moteurs industriels ne sont pas pilotés par des varia- teurs, mais la variation de vitesse devient de plus en plus incontournable, tant elle appor- te des avantages en termes de précision de positionnement ou d’économies d’énergie. Et du coup, on se préoccupe de plus en plus des perturbations dont peuvent être respon- sables les variateurs de vitesse. Le courant dans les phases d’alimentation du variateur est périodique, en phase avec la ten- sion d’alimentation mais son allure est très différente de celle d’un courant sinusoïdal pur à 50 Hz. Le mathématicien et physicien fran- çais Joseph Fourier a montré que tout signal périodique distordu pouvait être représenté par une somme de signaux sinusoïdaux dont la fréquence est un multiple entier de la fré- quence fondamentale (dans le cas présent, 50 Hz) : ces signaux sont appelés des har- moniques. Dans les variateurs de fréquence, il existe en fait deux sources d’harmoniques, liés à olutions S Les variateurs de fréquen- ce, de plus en plus nom- breux sur les sites indus- triels, déforment le cou- rant électrique qu’ils absorbent, créant ainsi une pollution harmo- nique. Plusieurs solutions existent pour en limiter les effets, notamment l’ajout d’une self sur le circuit intermédiaire interne (entre le redresseur d’entrée et l’onduleur de sortie du variateur). AUTOMATISMES Danfoss

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AUTOMATISMES

EMPÊCHEZ VOS VARIATEURS DE VITESSEDE POLLUER LE RÉSEAU■ Après s’être imposés dans les asservissements de fréquence, les variateurs de fréquence élargissentleurs applications aux asservissements de couple, voire de position. De plus en plus, ils investissent ledomaine du pompage et de la climatisation, où les économies d’énergie qu’ils procurent sont de plus enplus reconnues. Mais ces équipements créent des harmoniques de courant, polluant ainsi le courant d’ali-mentation du réseau électrique. De nombreuses solutions peuvent être mises en œuvre pour limiter lescourants harmoniques (dont les fréquences sont des multiples du 50 Hz). Danfoss nous les présente ici.

Les électroniques de puissance àdécoupage déforment le courantélectrique livré par les fournisseursd’énergie électrique et polluent le

réseau électrique. Les équipements “cou-pables” ne manquent pas : les systèmesd’éclairage à lampes à décharge ou tubesfluorescents, les redresseurs pour les instal-lations d’électrolyse, les convertisseurs sta-tiques pour les alimentations secourues, etbien sûr les variateurs de vitesse pourmoteurs électriques. Surtout ces derniers,devrait-on dire, car les moteurs électriquesreprésentent 75 % de l’électricité consom-mée dans l’industrie… Tous les moteursindustriels ne sont pas pilotés par des varia-teurs, mais la variation de vitesse devient deplus en plus incontournable, tant elle appor-te des avantages en termes de précision depositionnement ou d’économies d’énergie.Et du coup, on se préoccupe de plus en plusdes perturbations dont peuvent être respon-sables les variateurs de vitesse.Le courant dans les phases d’alimentation duvariateur est périodique, en phase avec la ten-

sion d’alimentation mais son allure est trèsdifférente de celle d’un courant sinusoïdal purà 50 Hz. Le mathématicien et physicien fran-çais Joseph Fourier a montré que tout signalpériodique distordu pouvait être représentépar une somme de signaux sinusoïdaux dont

la fréquence est un multiple entier de la fré-quence fondamentale (dans le cas présent,50 Hz) : ces signaux sont appelés des har-moniques.Dans les variateurs de fréquence, il existeen fait deux sources d’harmoniques, liés à

olutionsS

Les variateurs de fréquen-ce, de plus en plus nom-breux sur les sites indus-triels, déforment le cou-rant électrique qu’ilsabsorbent, créant ainsiune pollution harmo-nique. Plusieurs solutionsexistent pour en limiter leseffets, notamment l’ajoutd’une self sur le circuitintermédiaire interne(entre le redresseurd’entrée et l’onduleur desortie du variateur).

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Danf

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la structure interne du variateur. Tout varia-teur comprend en effet un pont redresseurà l’entrée, qui convertit le courant triphaséd’entrée en un courant continu. Ce courantsert ensuite, via le circuit intermédiaire, àalimenter un onduleur qui génère un cou-rant alternatif haute fréquence (de plusieursdizaines de kHz) qui alimente les troisphases du moteur. La fréquence de ce cou-rant, son intensité, son déphasage par rap-port à la tension sont calculés en perma-nence en fonction de la vitesse ou du coupleà obtenir.Le pont redresseur à l’entrée et l’onduleur à lasortie incorporent tous deux des électroniquesà découpage responsables de la productiond’harmoniques. Mais les harmoniques créés

ne sont pas du tout de même nature. Les“harmoniques réseau” sont créés par leredresseur à pont de diodes à l’entrée du varia-teur. En effet, ces diodes ne sont pas des élé-ments de conduction linéaires : la conductiondes courants ne se fait que pendant un brefinstant à chaque crête de sinusoïde pourrecharger le banc de condensateurs du circuitintermédiaire. Le pont à diodes travaille surle courant 50 Hz et il génère des harmoniquesbasses fréquences.Au niveau de l’onduleur, les choses sont toutà fait différentes. Le pont de puissance à tran-sistors IGBT génère une succession d’impul-sions modulées en largeur que les bobinagesdu moteur filtrent de sorte que le couranteffectivement appliqué au moteur présente

une allure sinusoïdale : la fréquence de cecourant est relativement élevée, et les harmo-niques ont par voie de conséquence une fré-quence élevée : les fréquences harmoniquesde l’onduleur sont du ressort de la CEM (com-patibilité électromagnétique).

Quelques définitionsIntéressons-nous aux harmoniques “réseau”,c’est-à-dire ceux qui sont générés par le pontredresseur d’entrée du variateur et qui sontresponsables de la pollution du réseau élec-trique. Le courant dans une phase d’alimen-tation du variateur est périodique, en phaseavec la tension d’alimentation mais il a denombreuses composantes harmoniques quiexpliquent sa forme distordue.Pour une tension sinusoïdale 50 Hz avec uncourant distordu, seule la composante fonda-mentale du courant contribue au transfert depuissance. Mais les pertes du système sontproportionnelles au carré du courant efficaceIeff :

où In est le courant correspondant à fréquen-ce nF (F étant la fréquence 50 Hz). Les cou-rants harmoniques (I2 à In) augmentent lespertes et ne transfèrent pas de puissance acti-ve à la charge.Pour quantifier le niveau de distorsion har-monique d’un courant, on introduit le fac-teur THD (taux de distorsion harmonique)définissant le rapport entre la valeur des cou-rants harmoniques et celle du courant fonda-mental :

I1 est le courant fondamental, I2 à In sont lescourants harmoniques. Le courant efficacepeut être exprimé en fonction du taux de dis-torsion harmonique :

Déplacement du facteur de puissance DPF.Exception faite du cas où on a affaire à descharges résistives pures, il y a un déphasageϕ entre la tension et le courant. Ce déphasa-ge a une grande incidence sur la puissanceactive, c’est-à-dire la puissance effectivementtransmise à la charge. Dans le cas de courantset tensions sinusoïdaux, on a les relations :Puissance active P = UeffIeffcos ϕPuissance réactive Q = UeffIeffsin ϕoù U désigne la tension, I désigne le courantet ϕ le déphasage entre la tension et le courant.

Ieff = I1 √1+THD2

Ieff =√∑ In max

n =1

n

2

THD = √∑In max

n =1

n

2

I1

.100 %1

Dans un asservissement pour variateur de fréquence, la pollution harmonique ou “harmo-niques réseau” est imputable au pont redresseur d’entrée du variateur. Les courants d’alimen-tation du moteur piloté présentent également des harmoniques, mais à des fréquences plusélevées, qui relèvent du domaine de la CEM (compatibilité électromagnétique).

Tout courant périodique déformé peut être décomposé en une addition de courants sinusoï-daux présentant des amplitudes, fréquences et phases différentes. La fréquence la plus basseest appelée “fondamental”. Toutes les autres sont un multiple du fondamental et sont appelées“harmoniques”.

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On définit également le facteur de puissancePF (Power Factor) tel que :

où S désigne la puissance apparente, donnéepar :S = UIPour les tensions et courants sinusoïdaux, lefacteur de puissance est égal à cosϕ.Ainsi qu’on l’a vu, les courants industriels nesont pas sinusoïdaux et ils présentent des har-moniques. Cependant, il est toujours intéres-sant de connaître le déphasage entre les com-posantes “fondamentales” (c’est-à-dire lescomposantes 50 Hz) de la tension et du cou-rant, pour par exemple calculer les conden-sateurs de compensation de l’énergie réactive.

On définit alors le paramètre DPF, ou dépla-cement du facteur de puissance :DPF = cos ϕDPF ne correspond au facteur de puissanceque lorsque l’on a affaire à des formes d’ondesinusoïdales.Sinon, on a :

Lorsque l’on est en présence d’harmoniques,le facteur de puissance est donc plus faibleque dans le cas où l’on a affaire à des courantssinusoïdaux. Pour une même puissance acti-ve, un facteur de puissance faible signifie descourants efficaces plus élevés et davantage depertes dans les câbles et le transformateur.Distorsion harmonique en tension. Lesvariateurs de fréquence produisent des cou-rants harmoniques, et donc une distorsion ducourant d’alimentation. Par contre la distor-sion en tension n’est pas de leur fait : celle-cidépend de l’installation électrique placée enamont, notamment le transformateur de puis-sance et son impédance de court-circuit. Iln’est pas possible de prévoir la distorsion entension en ne connaissant que les perfor-mances des variateurs.

L’importance du type de pont d’entréeUn pont redresseur triphasé classique placédans le circuit d’entrée d’un variateur de vites-se génère un niveau important d’harmoniquesen courant (de l’ordre de 105 %). Il en décou-le une augmentation du courant efficace duvariateur et un déclassement du transforma-teur d’alimentation. Pour fixer les idées, untransformateur de 1 MVA ne pourra alimen-

Quelques conseils pratiques■ Le filtrage des harmoniques de courantgénérés par les variateurs n’est pas une ques-tion simple et les solutions sont coûteuses.La première chose est d’essayer d’éviter àmettre en œuvre des solutions de filtrage, cequi suppose de bien choisir son variateur.Dans ce contexte, nous conseillons systémati-quement d’utiliser des variateurs avec selfs delissage intégrées sur le circuit intermédiairepour limiter la chute de tension induite parces selfs. Ces variateurs seront associés à untransformateur d’alimentation surdimension-né pour tenir compte de l’effet des harmo-niques réseau. Cette configuration est celledu meilleur rapport efficacité/prix.Si un système de filtrage complémentaire estnécessaire, il faut privilégier un filtre actif plu-

tôt qu’un filtre passif. L’expérience montreque compte tenu des frais d’étude et de calculd’un filtre passif, le surcoût d’un filtre actif est limi-té. De plus, son utilisation est plus souple et plusuniverselle.Si l’utilisateur, pour des raisons budgétaires, préfè-re un filtre passif, nous lui conseillons très vivementde ne pas acheter le filtre en même temps que lesvariateurs, mais plutôt d’installer les variateurs, deles mettre en service et alors seulement de déter-miner et calculer le filtre passif qui convient, sur labase de la modélisation mathématique mais ausside campagnes de mesure de l’installation en fonc-tionnement. Cette démarche permettra d’éviter demauvaises surprises vis-à-vis des conditions exis-tantes de l’installation qui n’auraient pas fait l’objetde la modélisation. FP

PF =S

P

PF =cosϕI1.cosϕ

Ieff

=

√1+THD2

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ter que 18 variateurs de 25 kW (ce qui cor-respond à une puissance de 450 kW) avec untaux de distorsion harmonique en tension de16 %. Un tel taux est généralement considé-ré comme trop élevé. Pour garder un taux dedistorsion de 5 % (limite habituelleconseillée), le transformateur de 1 MVA nepourra alimenter que 5 variateurs de 25 kW!Ajout d’une self sur le circuit intermédiai-re. Afin de limiter le contenu des courantsharmoniques générés sur le réseau, une pre-mière solution consiste à insérer une self delissage sur le circuit intermédiaire du varia-teur, entre le pont de diodes et le banc decondensateurs.Avec une valeur de self définie pour 3 % dechute de tension pour le courant nominal duvariateur, le taux de distorsion harmonique

THD descend à 42,5 %. Si l’on revient àl’exemple précédent, l’ajout de la self permetd’augmenter à 29 le nombre de variateurs de25 kW connectés au transformateur, avec untaux de distorsion harmonique en tension nedépassant pas 11 %Ajout de selfs coté réseau. Au lieu d’insérerune self sur le circuit intermédiaire, on peutégalement insérer trois selfs sur chacune desphases d’alimentation du réseau. Pour com-parer l’efficacité de cette solution par rapportà la précédente, considérons que ces selfs sontdimensionnées pour la même chute de ten-sion (3 %) à leurs bornes pour la circulationdu courant nominal du variateur.Avec cette solution, le taux de distorsion har-monique est très légèrement meilleur que pré-cédemment, permettant de raccorder

30 variateurs de 25 kW au transformateur.Les selfs coté réseau ont également une actionbénéfique pour le lissage de surtensions éven-tuelles à l’entrée du variateur.Pour autant, cela ne veut pas dire que des selfscoté réseau soient la solution optimale pourun variateur de fréquence. En effet, pour fai-re une comparaison objective, il y a deuxautres paramètres importants à prendre encompte : il s’agit de la perte d’énergie dansles selfs et de la chute de tension totale auniveau du circuit intermédiaire, pour unemême efficacité de filtrage.En effet, une des raisons du recours aux varia-teurs de fréquence est de faire des économiesd’énergie. Et pour faire des économies d’éner-gie, une self sur le circuit intermédiaire semontre plus efficace.L’autre point est la chute de tension totaleinduite sur le circuit intermédiaire par la pré-sence des selfs. En modulation de largeurd’impulsion classique (PWM, Pulse WaveModulation), un variateur de fréquence estincapable de restituer en sortie une onde sinu-soïdale avec la même tension d’entrée réseau.C’est pourquoi les constructeurs ont recoursà des techniques de modulation particulièrespour restituer le maximum de fondamental(par exemple, chez Danfoss, Modulation 60 VVCet VVC +). Le couple d’un moteur asynchro-ne est proportionnel au produit du courantmagnétisant par le courant actif ; le courantmagnétisant est égal au produit du couranttotal par sin ϕ et le courant actif est égal auproduit du courant total par cos ϕ.Le courant magnétisant d’un moteur est direc-tement lié à sa tension d’alimentation et tou-te baisse de cette tension pour un courant totalmoteur donné entraîne une baisse propor-tionnelle de son couple de sortie, donc de sapuissance. Il est donc important de choisirl’architecture de filtrage par selfs limitant autantque possible la chute de tension du fonda-mental pour éviter de déclasser d’autant lemoteur pour ses périodes de fonctionnementà la fréquence nominale (point de fonction-nement où le variateur doit fournir la pleinetension d’alimentation du moteur en sortie).Il se révèle que pour une action de lissageidentique, une self montée sur le circuit inter-médiaire entraîne une moindre réduction dela tension et donc du couple disponible. C’estpourquoi l’ensemble des variateurs de la gam-me Danfoss sont équipés d’origine de selfsmontées sur le circuit intermédiaire.Les ponts redresseurs à douze branches. Uneautre technique disponible pour limiter laquantité de courant harmonique généré surle réseau est d’utiliser un pont d’entrée à dou-ze branches. Plus précisément, il s’agit d’ali-menter le circuit intermédiaire à l’aide de

De multiples effets indésirables■ Les effets des perturbations liées aux courantsharmoniques générés par des variateurs ou tou-te autre charge non linéaire sont multiples :- L’augmentation très significative des pertespar effet Joule et par hystérésis des transfor-mateurs, avec d’importants déclassements endécoulant (il faut les surdimensionner)- Le déclassement des câbles et des équipe-ments de commande et de protection pourpouvoir supporter la circulation de ces cou-rants harmoniques- Le sur-échauffement des condensateurs de

redressement du facteur de puissance du réseau- L’excitation de résonances entre les conden-sateurs de redressement du facteur de puis-sance et les inductances de ligne du réseau.Ces surtensions peuvent entraîner le claqua-ge par surtension de ces condensateurs ou ladestruction d’autres équipements.- La perturbation de fonctionnement d’équi-pements d’électroniques de puissance oud’automatismes et d’instrumentation ne sup-portant pas un taux trop élevé de pollutionharmonique de leur tension d’alimentation.

➤ Importance de l’emplacement des selfs

Les redresseurs d’entrée des variateurs injectent des harmoniques de courant sur le réseauélectrique, nécessitant un déclassement du transformateur d’entrée (ou, si l’on préfère, de sur-dimensionner le transformateur en question). On voit ici les deux emplacements possibles desselfs permettant de limiter la pollution harmonique. La première (self sur le circuit intermédiai-re) est celle qui présente le moins d’inconvénients.

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deux ponts de diodes standards triphasés,montés soit en parallèle soit en série. Chacundes ponts est alimenté par un transformateurà doubles bobinages, les uns couplés en étoi-le, les autres en triangle. Le montage en paral-lèle permet d’utiliser un transformateur plussimple mais il nécessite une self intermédiai-re d’équilibrage des courants, ce schéma étanttrès sensible aux déséquilibres de tension.Les redresseurs avec pont à douze branchessont très efficaces pour réduire les harmo-niques de courant regénérés sur le réseau. Letaux de distorsion n’est plus que de 10,5 %,avec la disparition des harmoniques de rang 5et 7. Cette structure permet de raccorder jus-qu’à 36 variateurs de 25 kW sur le transfor-mateur de 1 MVA en ne dépassant pas 6 % dedistorsion en tensionLa multiplication de phases. Les ponts à dou-ze branches nécessitent des variateurs et destransformateurs spéciaux. Une alternative àce schéma est la multiplication de phases parles transformateurs d’alimentation. Le prin-cipe est d’utiliser une cascade de transforma-teurs standards bobinés en étoile, en triangleou en zigzag, chacun alimentant des groupesde variateurs standards. Ce principe doit être

utilisé à la conception d’une nouvelle instal-lation et la répartition de charge des variateursen fonctionnement doit être homogène pargroupe. Au niveau de chaque groupe de varia-teurs, la distorsion obtenue en courant est cel-le d’un pont à six branches classique. C’est auniveau de l’alimentation primaire des trans-formateurs que l’effet 12 ou 24 branches estobtenu.Le pont d’entrée à modulation PWM. Lasolution idéale serait de disposer d’un varia-teur qui ne prélève que du courant purementsinusoïdal. Ce variateur existe presque : il estconstruit à l’aide d’un pont d’entrée à modu-lation de largeur d’impulsion (PWM), avecson pilotage basé sur la régulation de la ten-sion du circuit intermédiaire.En fait, le circuit d’alimentation du circuitintermédiaire de ce variateur comprend deuxponts à transistors montés tête-bêche. Dansce cas, le courant d’entrée est en phase avecla tension d’alimentation et la distorsion har-monique est faible. Le transformateur peutêtre chargé sans déclassement jusqu’à près de95 % de sa valeur nominale.Mais ce variateur en théorie idéal présente unprix beaucoup plus élevé et il nécessite unfiltre CEM beaucoup plus élaboré car la modu-lation PWM du pont d’entrée est directementprésente sur le réseau. Les pertes dans les selfsd’entrée, indispensables pour le fonctionne-ment du pont PWM, sont également signifi-cativement élevées.Les effets “positifs” des charges complémen-taires. Dans l’étude des harmoniques globalesd’un réseau, il n’y a pas que les variateurs devitesse. Le réseau comporte en général descharges monophasées non-linéaires, commel’éclairage ou les alimentations des équipementsélectroniques tels que les ordinateurs. Ces chargesgénèrent principalement des harmoniques derang 3, qui se neutralisent partiellement avec lesharmoniques de rang 5 et 7 générés par les varia-teurs. Enfin un effet bénéficiaire!

Les techniques de filtragedes courants harmoniquesToutes les installations ne peuvent être dimen-sionnées à l’avance, dès le stade de la concep-tion, pour éviter d’avoir à compenser les effetsdes courants harmoniques. Sur une installa-tion existante, pour conserver la distorsionharmonique en tension à un niveau accep-table, l’ajout de variateurs de fréquence peutamener à rajouter des systèmes de filtrage descourants harmoniques supplémentaires géné-rés par le variateur.Les filtres passifs. Ce sont les plus connus etles plus anciens. Leur principe consiste àmettre, en parallèle sur le réseau, des circuitsoscillants accordés sur les fréquences harmo-

L’utilisation d’un pont redresseur à12 branches à l’entrée du variateur est trèsefficace en terme de limitation des harmo-niques. Mais la solution est onéreuse…

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niques à filtrer de façon à dériver les courantsharmoniques indésirés dans le filtre. Ils sontdonc constitués d’un ensemble d’inductanceset de capacités généralement montées en série.

Si ces filtres présentent l’avantage de la sim-plicité et d’un investissement relativementfaible, ils possèdent également de nombreusescontraintes :

- Ils ne filtrent que la fréquence sur laquelle ilssont accordés. Le filtrage de plusieurs rangs néces-site la mise en place d’un ensemble de cellules,chacune accordée sur la fréquence à filtrer- Chaque filtre, pour sa fréquence de réso-nance, possède une fréquence d’anti-réso-nance toujours inférieure à la fréquence derésonance. Cette fréquence d’anti-résonan-ce peut en fait exciter des fréquences derésonance du réseau constituées par lesinductances des câbles et des capacités deredressement du facteur de puissance. Pources fréquences, le filtre peut donc avoir poureffet (négatif) d’augmenter le taux de dis-torsion harmonique du réseau que l’on veutfiltrer ou créer d’importantes surtensions.Il est donc primordial de bien calculer lefiltre et ses anti-résonances pour qu’elles netombent pas sur une fréquence caractéris-tique du réseau. Ceci n’est pas forcementsimple, un réseau pouvant être à configu-ration variable.- Quand les équipements sont à l’arrêt, lapuissance réactive de la batterie de filtrageest renvoyée au réseau, créant une aug-mentation des pertes fer et des pertes enligne et l’accélération du vieillissement desisolants.- Un filtre est calculé pour un réseau donné. Il seprête donc mal à toute évolution du réseau, enparticulier dans le cas de plusieurs configura-

La réglementation sur les courantsharmoniques■ Des mesures effectuées dans divers paysde la Communauté européenne ont montréque le niveau de distorsion harmonique entension a progressé ces dix dernières années.C’est pourquoi, la CEI (Commission Electro-technique Internationale) fait évoluer sesstandards.La norme EN 61000-3-2, effective au 1er jan-vier 2001, définit les niveaux de distorsionharmonique en courant imposés pour lesappareils raccordés au réseau public dont lecourant maximal par phase n’excède 16A. Cette norme s’applique également pour lesappareils industriels dont la puissance totaleconsommée sur le réseau n’est pas supérieureà 1 kW, que ce soit en mono ou en triphasé.Pour les puissances supérieures (au-dessus de16 A par phase), l’EN 61000-3-4 est actuelle-ment disponible, uniquement sous la formed’un rapport technique. Celui-ci sert de base

à l’élaboration de la future normeEN 61000-3-12 concernant les appareils rac-cordés au réseau public basse tension.De leur côté, les fournisseurs d’énergie élec-trique émettent des recommandationsconcernant les taux de distorsion harmo-nique en tension maximaux, à la fois pour lesréseaux BT (basse tension), MT (moyenne ten-sion) ou HT (haute tension) et proposent descontrats pour lesquels l’émission de courantsharmoniques par les utilisateurs doit êtrelimitée à des valeurs définies (par exemple, lecontrat Emeraude d’EDF).Le cadre normatif est donc en cours d’évolu-tion. Mais actuellement, en pratique, aucunenorme n’impose aux industriels de limiter lagénération de courants harmoniques surleurs réseaux s’ils acceptent d’en payer lesconséquences (celles-ci peuvent néanmoinsêtre importantes et pénalisantes).

➤ Comparatif des différentes solutionsBase de la comparaison : 14 variateurs totalisant une puissance de 780 kVA alimentés par un transformateur 1,5 MVA

Solution Variateur Variateur Variateur* Variateur* Variateur*de base de base avec pont avec multiplication avec pont

sans selfs avec selfs 12 branches de phases à transistors PWMFacteur de déclassementthermique du transformateur 0,45 0,70 0,90 0,70 0,95Taille du transformateur 2 MVA 1,5 MVA 1,2 MVA** 2 x 800 kVA 1 MVADistorsion en courant 105 % 42.5 % 10.5 % 42.5 % 5 %Distorsion en tension(au secondaire du transfo) 8,6 % 5,9 % 3,2 % 5,9 % 1,5 %Distorsion en tension(au primaire du transfo) 2,7 % 1,8 % 1,2 % 1,2 % 0,8 %Coût total de la solution en €

- Variateurs 72 000 €*** 75 000 €*** 90 000 €*** 75 000 €*** 130 000 €***- Transformateur plus

surcoût câbles 19 000 €*** 15 000 €*** 25 000 €*** 20 000 €*** 11 500 €***Total 91 000 €*** 90 000 €*** 115 000 €*** 95 000 €*** 141 500 €***

Index de coût 101 100 128 105157* variateur avec selfs réseau - ** transformateur avec deux bobinages - *** les prix sont donnés à titre indicatif

A l’évidence la solution de variateurs standards avec selfs est la plus économique, tout en entraînant un taux de distorsion harmonique en ten-sion encore acceptable pour une installation industrielle (5,9 %).La solution de variateurs économiques basiques sans self n’est pas optimale, les gains de coût d’achat des variateurs étant complètement occultés parles surcoûts au niveau du transformateur et des câbles d’alimentation. Cette solution entraîne également un taux de distorsion harmonique importantde 8,6 % qui peut nécessiter l’investissement supplémentaire de filtres anti-harmoniques pour le réduire. A noter également que le surcoût des selfsde lissage au niveau des variateurs est généralement amorti en moins d’un an vis-à-vis des économies d’énergie que ces selfs procurent.Les solutions à base de pont 12 branches ou PWM, malgré les bénéfices qu‘elles fournissent en terme de distorsion harmonique, restent néan-moins très onéreuses et doivent être réservées aux installations de forte puissance ou bien à celles où la régénération d’énergie sur le réseau estindispensable (pour les ponts PWM).

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qu’une très faible partie du temps. Mais unfiltre passif n’acceptant pas de fonctionner au-delà de sa capacité nominale, il devra enconséquence être dimensionné systémati-quement pour le pire des cas.Ces contraintes fortes de choix, de calcul et dedimensionnement représentent des coûts élevéset doivent être intégrées dans la comparaisonglobale des coûts d’une solution de filtrage.Les filtres actifs. Ces produits sont beaucoupplus récents et bénéficient amplement des pro-grès faits pour les variateurs de fréquence. Enfait, dans leur conception, ils sont très similairesà un variateur de fréquence car ils comprennentcomme eux un pont de puissance triphasé àtransistors IGBT et un banc de condensateurs.En termes d’avantages et d’inconvénients, lefiltre actif est à l’opposé du filtre passif. Eneffet, il est relativement cher à l’achat mais iloffre de nombreux avantages :- Il peut filtrer l’ensemble des fréquences har-moniques : ce n’est qu’une question de pro-grammation de choix et d’amplitude des fré-quences à filtrer- Il peut être installé et configuré pour filtrerun départ spécifique du réseau ou bien sonensemble, et n’interagit pas avec les capacités

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tions d’alimentation (cas de groupes élec-trogènes de secours) ou le rajout d’équipe-ments générateurs d’harmoniques sur unréseau existant. Une fois la capacité du filtredépassée, il faut le remplacer par un filtreplus puissant !- Un filtre est un équipement volumineuxqui a des pertes et qui consomme égalementde l’énergie sur le réseau sur lequel il estconnecté.Si le coût d’un filtre passif est faible, enrevanche son choix et son calcul sont com-pliqués. En effet, on doit tenir compte despoints précédemment soulevés qui sont trèssouvent contradictoires. Le calcul correct d’unfiltre nécessite donc une grande expérienceet requiert la possession d’outils de mesure etde calcul spécialisés. Bien souvent, la modéli-sation seule du réseau n’est pas suffisante, etdes campagnes de mesure de la distorsion har-monique existante doivent être préalablementeffectuées pour éviter toutes mauvaises sur-prises à la mise en service. A noter égalementque les équipements générateurs d’harmo-niques sur un réseau ne fonctionnent pas tousensembles en même temps, les périodes defonctionnement simultané ne représentant

de redressement du facteur de puissance- Il s’adapte aux changements de configurationdu réseau et il est donc particulièrement bienadapté aux installations secourues avec ungroupe électrogène- En cas d’atteinte de sa capacité d’absorptionmaximum, il s’autolimite mais il peut accep-ter de fonctionner en parallèle avec un futurfiltre. L’investissement initial n’est pas perdu encas d’extension de l’installation, contraire-ment à un filtre passif.- Sa détermination est très simple. Elle consis-te à faire la somme des courants harmoniquesde l’installation à filtrer (dépendante des pro-duits, non de l’installation) et de choisir lemodèle de taille correspondantePour toutes ces raisons, lorsqu’il est nécessai-re de filtrer les courants harmoniques généréspar les variateurs, nous conseillons l’utilisa-tion de filtres actifs plutôt que passifs.

Fabrice PouletDirecteur technique Danfoss Drives

Danfoss7, rue Roger Hennequin78190 TRAPPESTél. : 0130165200 - Fax. 0130625008