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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - FÉVRIER 2008 - N°399 // 17 Anti-protéases : nouvelle classe thérapeutique prometteuse pour l’hépatite C L’hépatite C chronique est une des rares infections virales chro- niques susceptible de guérir après un traitement antiviral. En dépit des progrès importants des traitements de cette affection, une proportion encore élevée de patients ne répond pas à la bithérapie de référence associant interféron alpha pégylé (peg-IFN) et ribavirine (RBV), ou rechute à l’arrêt de ce traitement. C’est dire avec quel intérêt l’on suit l’arrivée d’une nouvelle classe thérapeutique développée contre ce virus : les anti-protéases. Le télaprévir (ou VX-950), inhibiteur de la protéase virale NS3/4A, est le chef de file de cette nouvelle génération d’anti- VHC ayant démontré dans des études préliminaires une activité rapide et importante sur la répli- cation virale. L’étude rapportée dans le dernier opus de la revue Hepatology évalue la tolérance et la cinétique de décroissance de la charge virale VHC lors d’un traitement par télaprévir seul ou associé au peg-IFN pendant 2 semaines. Vingt sujets naïfs de tout traitement anti-VHC et infectés par le génotype viral 1, le plus défavorable, ont été rando- misés pour recevoir : du peg-IFN associé à un placebo (n = 4) ou au télaprévir (n = 8) ou du téla- prévir seul (n = 8). Le télaprévir était administré per os à la dose de 750 mg toutes les 8 h, tandis que la posologie de peg-IFN était la dose standard de 180 μg par semaine en sous-cutané. La diminution médiane de la charge virale était à J 15 de - 1,09 log10 (intervalle, - 2,08 à - 0,46) dans le groupe peg- IFN-placebo ; de - 3,99 log10 (intervalle, - 5,28 à - 1,26) dans le groupe télaprévir ; de - 5,49 log10 (intervalle, - 6,54 à - 4,30) dans le groupe ayant reçu l’association télaprévir-peg-IFN. L’ARN viral était indétectable à 15 jours chez 4 des 8 sujets traités par la bithérapie et chez un des 8 patients traités par le télaprévir seul. Aucun effet secondaire grave (ni arrêt de traitement) n’est rapporté chez les sujets ayant reçu l’anti-pro- téase, la majorité des effets indésirables étant d’intensité mineure, à type de céphalées ou de myalgies. Les 20 patients de l’étude ont été, à l’issue de celle-ci, traités par l’association de référence peg-IFN et RBV. Après 12 semai- nes de ce traitement standard, l’ARN viral était indétectable chez les 8 patients ayant été inclus au départ dans le groupe telapré- vir–peg-IFN, chez 5 des 8 sujets ayant reçu initialement du téla- prévir seul et chez un sujet sur 4 du groupe peg-IFN-placebo. Ce travail confirme l’efficacité rapide du télaprévir et montre surtout son activité synergique avec le peg-IFN. Des essais de phase 2b ou 3 sont en cours pour préciser son activité soutenue (évaluée sur le maintien de la réponse virologique 6 mois après l’arrêt du traitement), ainsi que son profil de tolérance à long terme. Une prudence est éga- lement de mise quant à l’appa- rition potentielle de mutations de résistance, mais l’association de l’anti-protéase au peg-IFN ou à un autre antiviral semble être de ce point de vue la meilleure stra- tégie pour éviter cet écueil. Forestier N., Reesink H.W., Weegink C.J., McNair L., Kieffer T.L., Chu H.M., Purdy S., Jansen P.L., Zeuzem S., Hepatology 46(3 (2007) 640-648 Polyomaviridae : une nouvelle recrue, le WU Près de 30 % des infections respiratoi- res d’origine virale sont causées par des virus non encore identifiés. Cependant, le développement d’approches moléculaires a permis de s’affranchir d’une contrainte de la virologie traditionnelle, l’isolement de virus en culture. Ces nouvelles techniques ont permis d’identifier les génomes de nouveaux virus directement sur prélève- ments chez les malades, sans nécessité de les cultiver en laboratoire. Six virus respiratoires importants ont été identifiés depuis 2001 : les métapneumo- virus humains, le coronavirus du SRAS, le coronavirus NL63, le coronavirus HKU1, les bocavirus humains et, début 2007, un nouveau membre de la famille des Polyomaviridae, le virus KI. Cette famille comprend aujourd’hui 4 virus capables d’infecter l’homme : BK et JC, probable- ment présents à l’état latent chez 75 et près de 100 % des adultes respective- ment, KI, dont on sait encore peu de cho- ses, et SV40, un virus de singe dont la transmission à l’homme fait actuellement débat. L’équipe de David Wang vient de caractéri- ser un nouveau polyomavirus : le virus WU, à partir d’une aspiration naso-pharyngée chez un enfant de 3 ans présentant des signes de pneumonie. Le génome viral, cloné fragment par fragment à partir de l’échantillon, a été entièrement reconstitué et séquencé. D’après les études phylogé- nétiques, le virus WU s’apparenterait aux polyomavirus des primates (BK, JC, SV40 et KI), mais formerait un groupe génétique indépendant avec le virus KI. Les auteurs ont mené deux études épidémiologiques afin d’en établir la prévalence. Une première étude en Australie sur 1 245 échantillons issus des voies respiratoires a montré un taux de positivité d’environ 3 %. L’essentiel des échantillons positifs provient d’enfants de moins de 3 ans. Une seconde étude aux Etats-Unis montre un taux de détection proche de 0,7 %, ce qui témoigne de l’implication assez faible de ce virus dans les pathologies respiratoi- res, mais indique que le virus WU a une répartition mondiale. Les virus BK et JC sont supposés établir une infection latente dans les cellules rénales, les phases de réactivation se traduisant par l’excrétion du virus dans les urines. Contrairement à ce qu’ils attendaient, les auteurs ne sont pas parvenus à trouver le virus WU dans les urines, ce qui suggère, à l’instar du virus KI, qu’il pourrait avoir un cycle biologique différent des virus BK et JC. Gaynor A.M. et al., Plos pathogen (3)5 (2007) e64 Le virus WU a une répartition mondiale

Polyomaviridae : une nouvelle recrue, le WU

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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - FÉVRIER 2008 - N°399 // 17

Anti-protéases :

nouvelle classe thérapeutique prometteuse pour l’hépatite C

L’hépatite C chronique est une des rares infections virales chro-niques susceptible de guérir après un traitement antiviral. En dépit des progrès importants des traitements de cette affection, une proportion encore élevée de patients ne répond pas à la bithérapie de référence associant interféron alpha pégylé (peg-IFN) et ribavirine (RBV), ou rechute à l’arrêt de ce traitement. C’est dire avec quel intérêt l’on suit l’arrivée d’une nouvelle classe thérapeutique développée contre ce virus : les anti-protéases.

Le télaprévir (ou VX-950), inhibiteur de la protéase virale NS3/4A, est le chef de file de cette nouvelle génération d’anti-VHC ayant démontré dans des études préliminaires une activité rapide et importante sur la répli-cation virale. L’étude rapportée dans le dernier opus de la revue

Hepatology évalue la tolérance et la cinétique de décroissance de la charge virale VHC lors d’un traitement par télaprévir seul ou associé au peg-IFN pendant 2 semaines. Vingt sujets naïfs de tout traitement anti-VHC et infectés par le génotype viral 1, le plus défavorable, ont été rando-misés pour recevoir : du peg-IFN associé à un placebo (n = 4) ou au télaprévir (n = 8) ou du téla-prévir seul (n = 8). Le télaprévir était administré per os à la dose de 750 mg toutes les 8 h, tandis que la posologie de peg-IFN était la dose standard de 180 μg par semaine en sous-cutané.

La diminution médiane de la charge virale était à J 15 de - 1,09 log10 (intervalle, - 2,08 à - 0,46) dans le groupe peg-IFN-placebo ; de - 3,99 log10 (intervalle, - 5,28 à - 1,26) dans le groupe télaprévir ; de

- 5,49 log10 (intervalle, - 6,54 à - 4,30) dans le groupe ayant reçu l’association télaprévir-peg-IFN. L’ARN viral était indétectable à 15 jours chez 4 des 8 sujets traités par la bithérapie et chez un des 8 patients traités par le télaprévir seul. Aucun effet secondaire grave (ni arrêt de traitement) n’est rapporté chez les sujets ayant reçu l’anti-pro-téase, la majorité des effets indésirables étant d’intensité mineure, à type de céphalées ou de myalgies.

Les 20 patients de l’étude ont été, à l’issue de celle-ci, traités par l’association de référence peg-IFN et RBV. Après 12 semai-nes de ce traitement standard, l’ARN viral était indétectable chez les 8 patients ayant été inclus au départ dans le groupe telapré-vir–peg-IFN, chez 5 des 8 sujets ayant reçu initialement du téla-

prévir seul et chez un sujet sur 4 du groupe peg-IFN-placebo.

Ce travail confirme l’efficacité rapide du télaprévir et montre surtout son activité synergique avec le peg-IFN. Des essais de phase 2b ou 3 sont en cours pour préciser son activité soutenue (évaluée sur le maintien de la réponse virologique 6 mois après l’arrêt du traitement), ainsi que son profil de tolérance à long terme. Une prudence est éga-lement de mise quant à l’appa-rition potentielle de mutations de résistance, mais l’association de l’anti-protéase au peg-IFN ou à un autre antiviral semble être de ce point de vue la meilleure stra-tégie pour éviter cet écueil. ■■

Forestier N., Reesink H.W., Weegink C.J., McNair L., Kieffer T.L., Chu H.M., Purdy S., Jansen P.L., Zeuzem S., Hepatology 46(3 (2007) 640-648

Polyomaviridae : une nouvelle recrue, le WU

Près de 30 % des infections respiratoi-res d’origine virale sont causées par des virus non encore identifiés. Cependant, le développement d’approches moléculaires a permis de s’affranchir d’une contrainte de la virologie traditionnelle, l’isolement de virus en culture. Ces nouvelles techniques ont permis d’identifier les génomes de nouveaux virus directement sur prélève-ments chez les malades, sans nécessité de les cultiver en laboratoire.Six virus respiratoires importants ont été identifiés depuis 2001 : les métapneumo-virus humains, le coronavirus du SRAS, le coronavirus NL63, le coronavirus HKU1, les bocavirus humains et, début 2007, un nouveau membre de la famille des Polyomaviridae, le virus KI. Cette famille comprend aujourd’hui 4 virus capables d’infecter l’homme : BK et JC, probable-ment présents à l’état latent chez 75 et près de 100 % des adultes respective-ment, KI, dont on sait encore peu de cho-

ses, et SV40, un virus de singe dont la transmission à l’homme fait actuellement débat.

L’équipe de David Wang vient de caractéri-ser un nouveau polyomavirus : le virus WU, à partir d’une aspiration naso-pharyngée chez un enfant de 3 ans présentant des signes de pneumonie. Le génome viral, cloné fragment par fragment à partir de l’échantillon, a été entièrement reconstitué et séquencé. D’après les études phylogé-nétiques, le virus WU s’apparenterait aux polyomavirus des primates (BK, JC, SV40 et KI), mais formerait un groupe génétique indépendant avec le virus KI. Les auteurs ont mené deux études épidémiologiques afin d’en établir la prévalence.

Une première étude en Australie sur 1 245 échantillons issus des voies respiratoires a montré un taux de positivité d’environ 3 %. L’essentiel des échantillons positifs provient d’enfants de moins de 3 ans. Une seconde étude aux Etats-Unis montre un taux de détection proche de 0,7 %, ce qui témoigne de l’implication assez faible de ce virus dans les pathologies respiratoi-res, mais indique que le virus WU a une répartition mondiale. Les virus BK et JC sont supposés établir une infection latente dans les cellules rénales, les phases de réactivation se traduisant par l’excrétion du virus dans les urines. Contrairement à ce qu’ils attendaient, les auteurs ne sont pas parvenus à trouver le virus WU dans les urines, ce qui suggère, à l’instar du virus KI, qu’il pourrait avoir un cycle biologique différent des virus BK et JC. ■■

Gaynor A.M. et al., Plos pathogen (3)5 (2007) e64

Le virus WU a une

répartition mondiale