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PORT AUTONOME DU HAVRE SVNTHESE DES CONNAISSANCES SUR L•ESTUAIRE DE LA SEINE Partie 2 - SEDIMENTOLOGIE Jacques AVOINE

Port autonome Du Havre - Synthèse des connaissances sur l

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PORT AUTONOME DU HAVRE

SVNTHESE DES CONNAISSANCES

SUR L•ESTUAIRE DE LA SEINE

Partie 2 - SEDIMENTOLOGIE

Jacques AVOINE

UNIVERSITE DE CAEN

CENTRE REGIONAL D'ETUDES COTIERES

STATION MARINE DE LUC-SUR-MER

0000000

SYNTHESE DES CONNAISSANCES

SUR L'ESTUAIRE DE LA SEINE

0000000

SEDIMENTOLOGIE

0000000

Jacques AVOINE

1

Introduction

A la demande du Port Autonome du Havre, l'IFREMER a été chargé de réaliser une

synthèse des connaissances existantes sur l'estuaire de la Seine. IFREMER a confié à l'Université

de Caen (Centre Régional d'Etudes Côtières- Laboratoire de Géologie marine) la rédaction d'une

synthèse sédimentologique comportant les points suivants :

- évolution historique de l'estuaire, en particulier durant les 20 dernières années,

- état actuel des connaissances sur la couverture sédimentaire et ses fluctuations

saisonnières,

- synthèse des connaissances hydrosédimentaires précisant les acquis et les lacunes,

- migration du bouchon vaseux - mécanismes et sites d'accumulation des vases, dans

l'estuaire de la Seine et la partie orientale de la Baie de Seine,

- exploitation des couvertures photographiques aériennes de la zone, réalisée par le

Port Autonome du Havre et mises et disposition par celui-ci,

- exploitation des études sédimentologiques en possession du Port Autonome du

Havre.

Le domaine concerné est représenté Figure 1. Il comprend d'une part l'estuaire de la

Seine au sens strict, entre le Havre et Tancarville, étendu jusqu'à Poses, limite amont de la

marée dynamique, et d'autre part la partie orientale de la Baie de Seine replacée dans le

contexte plus général de la baie.

Les principales données utilisées pour réaliser cette synthèse ont été:

-les travaux du Schéma d'Aptitude et d'Utilisation de la Mer (SAUM) pour l'estuaire

de la Seine (1977-1981), dont les résultats datent d'une quinzaine d'années, mais qui restent

les plus complets à ce jour,

- les données recueillies dans le cadre du Groupement de Recherches Manche (GDR

Manche, CNRS), principalement de 1981 à 1986,

les données recueillies au cours des années 80 et 90 par le Laboratoire de Géologie

marine de l'Université de Caen,

-les études sédimentologiques et divers documents en possession du Port Autonome du

Havre, mis à disposition de l'Université de Caen.

La synthèse débouche sur un état des connaissances acquises, sur la mise en évidence

d'aspects insuffisamment connus, et sur des recommandations d'études complémentaires pour

améliorer les connaissances.

N

Flg.1

LIMITES GEOGRAPHIQUES DE LA SYNTHESE :

BAIE DE SEINE ORIENTALE ET ESTUAIRE DE LA SEINE

Calvados

PARTIE ORIENTALE DE LA

0 1

4940 0 1

49 40

Cap de la Hève ESTUAIRE DE LA SEINE

~~AVRE ,---- ROUEN

ECHELLE ---KM 0 S 10 15

Introduction Sommaire

3

SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE- EVOLUTION HISTORIQUE DE L'ESTUAIRE

1 - 1 Histoire quaternaire

1 - 2 Morphologie actuelle de l'estuaire

1 - 3 Evolution de l'estuaire depuis le XVIIème siècle

1 - 4 Evolution de l'estuaire au cours des vingt dernières années

141- Comparaison des relevés bathymétriques

142- Déplacement des chenaux

143 - Evolution des isobathes

1 - 5 Evolution des paramètres géométriques estuariens

Le comblement de l'estuaire

151 -Décroissance des sections

152 - Réduction du volume de l'estuaire

153 - Diminution de la surface des zones intertidales

154- Evolution des herbus de la vasière Nord de 1978 à 1994

1 - 6 Conclusion sur l'évolution historique de l'estuaire

DEUXIEME PARTIE- LA COUVERTURE SEDIMENTAIRE

ET SES FLUCTUA TI ONS SAISONNIERES

2 - 1 Le cadre sédimentaire régional

2 - 2 La sédimentation en Baie de Seine orientale

2 - 3 Les fluctuations de la couverture sédimentaire en Baie de Seine

· 231 - A l'échelle pluriannuelle

232 - A l'échelle saisonnière

2 - 4 La sédimentation dans l'estuaire de la Seine

241 -Répartition des sédiments superficiels en 1978

242 - Répartition de la fraction pélitique

243 - Evolution verticale de la sédimentation

244 - Evolution pluriannuelle : la sédimentation estuarienne en 1994 2 - 5 Conclusion sur la couverture sédimentaire

TROISIEME PARTIE- CARACJ'ERES HYDROLOGIQUES

3 - 1 Caractères hydrologiques de l'estuaire de la Seine

311 - Les apports fluviatiles

1

3

5

6

10

13

16

16

22

27

27

27

32

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42

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50 53

53

58

67

67

69

72

72 79

80

81

81

4

3111 - Le débit liquide 81

3112 - Le débit solide 81 312- Les salinités dans l'estuaire: mélange eau douce-eau salée 84

3121 -Généralités 84

3212 - Les données disponibles 86

3213 - Synthèse des données sur le mélange eau douce-eau salée 89

313- Les températures dans l'estuaire 97

3 - 2 Influence des apports fluviatiles en Baie de Seine 99

3- 3 Conclusion sur les caractères hydrologiques 103

QUATRIEME PARTIE- DYNAMIQUE SEDIMENTAIRE 104

4 - 1 Dynamique sédimentaire dans l'estuaire de la Seine 105

411 - Le bouchon vaseux 105

4111 -Evolution du bouchon vaseux au cours d'un cycle de marée 105 4112- Mécanismes contrôlant la remise en suspension et le piégeage

des sédiments fins dans l'estuaire 113

4113- Relation entre la vitesse des courants et la granulométrie

des sédiments en suspension

412 - Variations de la charge en MES dans l'embouchure 117

413- Flux résiduel de sédiments en suspension 120

414- Evolution du bouchon vaseux depuis 40 ans 120

4 - 2 Dispersion des apports solides de la Seine en Baie de Seine 129

421- Rôle du bouchon vaseux 129

422 - Extension en mer du panache d'eau turbide et impact sédimentologique 129

423- Flux résiduel de sédiments en suspension en Baie de Seine orientale 133

424 - Influence d'une forte crue sur la Baie de Seine 133

4- 3 Dynamique sédimentaire en Baie de Seine 137

431 - Transport des sédiments fins en suspension 137

432- Transport des sables sur le fond 137

433- Synthèse des mouvements sédimentaires en Baie de Seine orientale 142

434- Bilan sédimentaire dans l'estuaire et la Baie de Seine 144

4- 4 Conclusion sur la dynamique sédimentaire 147

Conclusion générale: Synthèse des connaissances- Recommandations d'études 150

Annexe : Evaluation du bilan sédimentaire dans l'estuaire de la Seine 153

Références bibliographiques: 156

PREMIERE PARTIE

0000000

EVOLUTION HISTORIQUE DE L'ESTUAIRE

6

I - EVOLUTION HISTORIQUE DE L'ESTUAIRE

1- 1 HISTOIRE QUATERNAIRE

En Baie de Seine et dans l'estuaire, les périodes d'émersion du Quaternaire ont obligé la Seine à creuser son lit d'une manière considérable. L'ancien réseau fluviatile a pu être reconstitué par l'interprétation de profils sismiques réflexion (Auffret et Larsonneur, 1977; Alduc, 1979). La paléovallée qui s'orientait vers le NW en traversant la Baie de Seine a une profondeur allant de -3 0 rn au niveau de Honfleur à - 70 rn au NE de Barfleur, l'amplitude du creusement par rapport à la plaine étant de 10 à 20 rn (Fig. 2). En Baie de Seine, la paléovallée comporte deux niveaux d'érosion séparés par un talus d'une dizaine de mètres. Cette disposition se retrouve à l'embouchure et dans l'estuaire. Dans la région du Havre, le niveau d'érosion supérieur est un plan incliné entre + 1 rn/CM et- 16 rn/CM, alors que le niveau d'érosion inférieur oscille autour de- 30 rn/CM.

Des dépôts alluviaux épais masquent à l'heure actuelle ces thalwegs. Depuis le début de la dernière transgression marine, des sédiments holocènes se sont déposés en Baie de Seine orientale, où ils constituent une couverture continue. Ce prisme sédimentaire représente un ensemble de formations incluant des sédiments sous-marins ou littoraux de la phase actuelle de fin de transgression qui constituent l'unité superficielle, ainsi que des dépôts littoraux et estuariens développés en période de bas niveau marin, submergés ensuite par la transgression. La carte en isopaques des dépôts holocènes, établie en compilant l'ensemble des mesures de sismique réflexion disponibles (Auffret et d'Ozouville, 1986a), montre clairement la convergence vers le Sud Est des transits sédimentaires holocènes (Fig. 3). Les sédiments holocènes en accumulation mesurable (épaisseur supérieure à 2 rn), sont confinés dans l'entonnoir que dessine la côte entre la Seine et l'Orne. Leur épaisseur reste modeste, ne dépassant les 10 rn que sur 115 de la surface.

Deux unités sédimentaires peuvent être individualisées, séparées par la paléovallée de la Seine. Au Nord, les alluvions pléistocènes, accumulées préférentiellement en rive droite de la paléovallée, portent le banc de Seine (Auffret et Larsonneur, 1977). Au Sud, la surface anté­holocène, constituée d'affleurements du Jurassique entaillés par un réseau de chenaux provenant des

· rivières du Calvados, montre des formations fluvio-marines formant des deltas de marée externes au débouché de ces rivières.

Au niveau de l'estuaire de la Seine, l'ensemble des formations sédimentaires quaternaires a été traversé par les nombreux forages effectuées dans la zone portuaire du Havre, où ils atteignent 30 rn d'épaisseur (Fig. 4). Le remblaiement comporte une nappe de cailloutis de fond (de 1 à 20 rn d'épaisseur), recouverte par des dépôts holocènes : silts tourbeux postglaciaires (5 à 10 rn), puis sédiments flandriens sablo-vaseux (10 à 15 rn).

La nappe de fond est constituée d'un matériel hétérométrique peu altéré de blocs, galets et graviers de nature diverse, principalement des silex., enrobés dans un sable quartzeux. Cette couverture grossière est issue de lambeaux · de terrasses anciennes et surtout d'épandages de cailloutis fluviatiles.

Les silts tourbeux postglaciaires sont des colluvions d'âge boréal répandus sur les cailloutis de fond. Ce sont soit des dépôts continentaux antérieurs à la transgression flandrienne, soit un mélange d'apports marins et fluviatiles.

Fig. 2 • LES PALEOVALLEES DE LA BAIE DE SEINE A LA MANCHE CENTRALE

(d'après Auffret et Larsonneur, 1977)

Fig. 3 ·ISOPAQUES DES DEPOTS HOLOCENES EN BAIE DE SEINE

(Auffret et d'Ozouville, 1986)

1

rn

10 0

10

(cotes NGF)

iii silts flandriens

D

[:/;:<:~·~~ sables flandriens

argiles continentales (colluvions )

Fig. 4 - LE PRISME ALLUVIAL DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE

(d'après Lefebvre, 1977)

cailloutis inférieurs antéflandriens

10 Les sédiments flandriens sablo-vaseux ravinent les formations sous-jacentes. Trois types de

dépôts sont reconnus (Lefèbvre, 1977) : des silts, des sables fins, et des lentilles de cailloutis. Les silts correspondent à une sédimentation dans les zones calmes de l'estuaire. Il s'y intercale des niveaux tourbeux saumâtres dûs à de brefs arrêts de la transgression flandrienne. Ces silts passent sans transition à des sables plus grossiers franchement marins.

L'étude de ces formations a permis de décrire l'évolution de l'estuaire au cours de !Holocène (Lefèbvre, 1977). Avant - 7000 ans avant JC, en régime fluviatile, les cailloutis de fond se sont accumulés après l'importante phase de creusement de la dernière période glaciaire, résultat de l'abaissement du niveau marin de l'ordre de 100 M. Vers 7000 ans avant JC, la mer envahit l'estuaire. Des galets marins déposés par la transgression se superposent localement aux cailloutis de base et des sables fins se déposent. Entre 7000 et 6500 ans avant JC, la mer régresse et des colluvions argileux recouvrent les cailloutis en remaniant les dépôts marins fins. A partir de 6500 ans avant JC, la mer envahit de nouveau l'estuaire, les chenaux divagants se ramifient et les sédiments flandriens s'accumulent (silts, sables et cailloutis).

1 - 2 MORPHOLOGIE ACTUELLE DE L'ESTUAIRE

L'estuaire de la Seine présente une forme d'entonnoir largement ouvert sur la mer (Fig. 5 et 6). Cette géométrie est due essentiellement aux endiguements successifs qui ont régularisé le cours du fleuve en lui donnant une direction forcée, et aux dépôts sédimentaires qui comblent progressivement l'estuaire. Cet autocolmatage s'effectue de façon régulière de part et d'autre des digues de l'embouchure (digue basse nord et digue du Ratier). De Poses à Tancarville, dans le domaine fluvial soumis à la marée dynamique, les sections mouillées n'augmentent que très lentement vers l'aval du fait du calibrage du fleuve. dans l'estuaire proprement dit, en aval de Tancarville et surtout de Honfleur, les sections mouillées croissent rapidement vers l'embouchure.

L'estuaire de la Seine peut être divisé en plusieurs sections morphologiquement distinctes: la Seine fluvio-marine de Poses à Tancarville, l'estuaire amont de Tancarville à Honfleur, l'estuaire aval de Honfleur au méridien du Havre, l'embouchure et la partie orientale de la Baie de Seine (Fig. 6)

La Seine fluvio-marine présente les caractéristiques d'une rivière à méandres. L'influence marine se fait surtout sentir par les fluctuations du niveau de l'eau au cours de la marée, jusqu'au barrage de Poses à la limite amont de la marée dynamique.

L'estuaire amont est délimité longitudinalement par deux digues insubmersibles Nord et Sud. Il possède des caractères morphologiques à dominante fluviatile: un chenal unique, endigué, bordé sur la rive droite par un vaste marais maritime en voie de comblement rapide. Le chenal s'élargit de Tancarville (500 rn) à Honfleur (1 km}, sa profondeur varie entre- 4 et- 8 m.

L'estuaire aval, de Honfleur au Havre, a une morphologie plus complexe. L'embouchure actuelle, façonnée en grande partie par les endigages, est entretenue par les influences marines. On distingue trois chenaux, le chenal principal de navigation, le chenal Nord et le chenal Sud, séparés par des barres sableuses appuyées sur les digues submersibles.

Le chenal de navigation est bordé au Sud par la digue basse du Ratier jusqu'au méridien + 3 et par la digue basse Nord également jusqu'au méridien + 3 . Sa profondeur varie d'un maximum de - 8 rn en aval de Honfleur, à un maximum de - 5 rn à l'extrémité aval des digues, ces profondeurs étant entretenues artificiellement par dragages (Fig. 5). Vers le large, le chenal traverse la barre d'embouchure, avec des profondeurs de - 4 à - 5 rn entretenues par dragage, puis s'approfondit en direction de la rade de la Caresse.

Fig. 5 ESTUAIRE DE LA SEINE

BATHYMETRIE 1992

(d'après le plan no 46234 du PAH)

[ 0 500 1000 1500 ~~ 1

1 hachures: zones intertitales (cotes supérieures à 0 rn)

1 1 1 i i 1

1 1 1 1

1 1 1 1 1 .

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ESTUAIRE AVAL ESTUAIRE AMONT

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ECHELLE

KM 0 2 3

+5 + 10 +15 +20 + 25

Fig. 6 • MORPHOLOGIE DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN 1978

13

Le chenal Nord est une relique de l'ancien chenal de navigation de la fm des années 50 ; depuis environ 1986, il n'est plus en voie de comblement notable. ll débouche dans le chenal de navigation à la faveur d'une brèche artificielle de la digue basse Nord créée en 1980, 2 kilomètres en amont de Honfleur. La partie Nord est plus profonde(- 4 rn) du fait du creusement survenu lors de la construction de la digue SE en crochet dans les années 70. Ailleurs, les fonds ne dépassent guère -1 à 0 m. Le chenal Sud est également une relique d'un ancien chenal de navigation soumis à un comblement rapide. Sa profondeur diminue rapidement vers l'amont, de - 3 rn au méridien 0 à + 2 rn au niveau du méridien+ 10.

Les bancs de l'estuaire aval s'appuient en grande partie sur les digues longitudinales de l'embouchure. Le banc du Ratier, qui s'appuie sur l'ancien poulier du même nom, est retenu au Nord par la digue du Ratier et s'étend sur plus de 10 km. n montre dans sa partie amont des champs de mégarides caractérisant la circulation alternée des courants de marée. La hauteur de ce banc varie de 0 à+ 5 rn de l'aval vers l'amont. Dans la partie Nord de l'estuaire, le banc d'Amfard ne dépasse pas + 1,50 m. Un banc intermédiaire, également de faible hauteur (+ 1,50 rn), se situe dans le prolongement de la digue basse Nord, obstruant partiellement l'entrée Sud du chenal Nord en voie de comblement.

Enfm, au Sud de l'entrée du port du Havre, existent des fonds inafouillables: banc de l'Eclat, Hauts de Quarante, le Grand Placard, les Hauts de la Rade. Le chenal d'accès au port du Havre est entouré par ces bancs.

Dans la partie orientale de la Baie de Seine, au large de l'embouchure de l'estuaire, la morphologie est assez simple (Fig. 7). La plateforme littorale se présente comme une vaste surface en pente douce au Sud, un peu plus accentuée au Nord. Dans la dépression du Parfond, les fonds dépassent 30 m. Cette dépression est bordée au Nord par le banc de Seine, vaste corps sableux qui recouvre une partie de l'ancien cours de la Seine. Vers le Nord, le long du Pays de Caux, les profondeurs augmentent rapidement, l'isobathe- 20 rn passant très près du cap d'Antifer, ce qui a favorisé la construction du terminal pétrolier.

1-3 EVOLUTION DE L'ESTUAIRE DEPUIS LE XVIrsiècle

Jusqu'au xrxe siècle, l'évolution morphologique de l'estuaire au cours du temps est liée à un comblement naturel progressif par des apports sédimentaires d'origine continentale et marine, redistribués par les courants de marée. Depuis le milieu du siècle dernier, les vastes travaux d'aménagement, entrepris pour améliorer la navigation maritime et pour créer de nouvelles surfaces industrialo-portuaires, ont fortement influencé la sédimentation, et au-delà, la morphologie générale de l'estuaire et de son embouchure (Fig. 8).

On peut distinguer deux phases dans l'évolution de l'estuaire, selon la terminologie employée par Vigarié (1964, 1965):

- l'estuaire sauvage, antérieur aux premiers travaux d'endigage commencés au milieu du xrxe siècle,

- l'estuaire construit, dans lequel les variations morphologiques induites par les travaux sont considérables.

L'estuaire sauvage Avant l'intervention de l'homme, l'estuaire était parcouru de chenaux de flot et de jusant peu

profonds, divagant entre les falaises de l'auge quaternaire et les bancs. Les fonds étaient perpétuellement remaniés et la masse de sédiments en mouvement considérable. La morphologie estuarienne était centrée autour de quelques points fiXes, chenaux profonds et pointes rocheuses conditionnant la direction des courants.

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Fig. 7 • CARTE BA THYM ETRIQUE DE LA BAIE DE SEINE

(Auffret et d'Ozouville, 1986)

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Di gues ---~s::=::=­........-j

,5km, f:::.-::=_1 ZONES INTERTIDALES

D ZONES SUBTIDALES

1834

1867

1

Fig. 8- EVOLUTION DE LA MORPHOLOGIE DE L'ESTUAIRE ENTRE 1834 ET 1980

16

L'estuaire construit Depuis le milieu du XIXe siècle, une série d'importants travaux de stabilisation et

d'approfondissement du chenal de la Seine ont été entrepris entre Rouen et la mer. Un couloir calibré a été construit entre deux digues insubmersibles jusqu'en aval de Tancarville. Dans l'estuaire proprement dit, entre Tancarville et Le Havre, les marais et les zones découvrantes ont été partiellement remblayés à l'abri des digues, surtout dans la partie Nord, pour permettre l'extension du complexe industrialo-portuaire du Havre. Le chenal de navigation de la Seine, rectiligne dans ce secteur, a été creusé en position centrale à travers les anciens méandres de l'estuaire naturel. La configuration générale actuelle est atteinte depuis la fin des années 70.

La morphologie actuelle de l'estuaire est largement héritée des derniers grands travaux d'aménagement entrepris dans les années 50 à 70 essentiellement à l'aval du méridien +25 (Fig. 9). La digue du Ratier a été construite entre 1955 et 1959 entre les méridiens +3 et +11, sa cote d'arase allant de + 3m à l'aval à + 5m à l'amont. Parallèlement, 30 millions de m3 de matériaux ont été dragués pour ouvrir le chenal de navigation définitif en Octobre 1959 et ont été mis à terre en amont de Honfleur.

La digue basse Nord a été édifiée de 1967 à 1969 du méridien +15 au méridien +25, tandis que la digue Haute Nord insubmersible (digue Sud du Havre) est définitivement fermée en 1969. Dans le même temps, les fonds de l'entrée du chenal ont été dragués à -6 rn, cote qui n'est plus atteinte aujourd'hui (-4 à -5 rn).

En 1973-7 4, le PAH barre définitivement l'ancien chenal Nord par une digue SE en crochet construite entre les méridiens +6 et +7. La digue basse Nord est prolongée jusqu'au méridien+ 3 en 1979-1980. Sa cote d'arase est de + Sm à l'amont, + 6m vers Honfleur et + 3m à l'aval entre les méridiens +3 et +7. Parallèlement, une brèche a été aménagée dans la digue basse Nord en amont de Honfleur entre les méridiens +13,5 et +14,5 (1000 rn de large, ramenée depuis à 600 rn), cette brèche ayant pour objectif de réduire le taux de sédimentation dans le chenal Nord en favorisant la circulation des eaux. Une autre brèche a été aménagée dans la digue du Ratier en aval de Honfleur (200 rn de large).

Entre 1978 et 1979, un endiguement réalisé entre les méridiens +7,5 et +14,5 relie la digue Haute-Nord à la digue en crochet pour former le terre-plein de la CIM.

Les seuls travaux significatifs réalisés depuis la fm des années 70 concernent l'édification du Pont de Normandie, qui s'est traduit principalement par la construction d'un remblai supportant la voie d'accès au pont, dont la longueur atteint environ les deux-tiers de la vasière Nord (cf. Fig. 30).

1 · 4 EVOLUTION AU COURS DES VINGT DERNIERES ANNEES

Les modifications morphologiques apportées dans l'estuaire par les aménagements ont été considérables des années 50 à 70, la stabilisation des fonds, consécutive aux travaux, prenant un certain temps (Fig. 1 0). La construction de la digue SE en crochet et le prolongement de la digue basse Nord, dernières modifications significatives apportées à l'estuaire, ont également été suivis de réajustements morphosédimentaires notables.

141- Comparaison des relevés bathymétriques La comparaison des relevés bathymétriques dressés par le Port Autonome de Rouen en 1978

et 1986 a permis de cartographier précisément les zones d'érosion et de sédimentation dans l'estuaire (Fig. 11 à 13). Ce travail a servi de base pour quantifier les volumes sédimentaires érodés ou déposés au cours de la période 1978-1986, en planimétrant les surfaces comprises entre les isopaques depuis le méridien - 1 jusqu'au méridien + 16 (Fig. 11), hormis les secteurs où les données étaient insuffisantes ou absentes (Larsonneur et Avoine, 1987) [la carte bathymétrique de 1986 du P.A.R. comportant des données incomplètes dans cette partie de l'estuaire].

Fig. 9- EVOLUTION MORPHOLOGIQUE DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1953 A 1972

LE HAVRE

HAVRE

10

PERIODE 1959- 1962 195f: OUYIITUII DU NOUYI!AU CHINAL Cf NAVIGATION -------

PE'RIODE 1962 - 1972 - ,IOLONGEMENT DE LA DIGUE NOID

INSUaMEISiaU JUSOU AU HAVIE

PERIODE 1972- 1975

1 20

km 0 1 2 3

Echelle

km 0 1 2 3

• CONSTRUCTION DUNE DIGUE IN CIOCHET

km 0 1 2 3

5

10

10

~ Zone de sédimentation

(::::::;:;::::::{{::::0] Zone d ·érosion

L----.Jl Zone stable

Fig. 10- EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1959 A 1975 REPARTITION DES ZONES D'EROSION ET DE SEDIMENTATION

\ ., ~ 1

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LE HAVRE

Limite amont

de la zone étudiée

~~§?~~~..:.. 1 / .. ----- .. '~1~>r -;:F':::-:-----~ i ·~-/~ ~--~-----~~~~·~·----------------------1

Fig. 11 • EVOLUTION DES FONDS DE l'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1978 A 1986

(courbes isopaques en mètres}

Echelle: 1 km

( ':

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-­..

LE HAVRE

[!}TI]: Zonea en aédlmenruton

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Limite amont

................ ........................... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • • • • 1 •••••••••••••••••• . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Flg.12 ·EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1978 A 1986

ZONES EN SEDIMENTATION

Echelle: t km

LE HAVRE .•

~: Zones en érosion

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

pont

Flg.13- EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1978 A 1986

ZONES EN EROSION

Echelle: f Am

22

La période 1978- 1980 est caractérisée par le prolongement de la digue basse Nord jusqu'au méridien + 3. D'un point de vue morphosédimentaire, la période significativement influencée va jusqu'à environ 1986 et est marquée par une évolution très rapide des fonds de l'estuaire, en érosion ou en sédimentation très active. Dans la partie Nord de l'embouchure, l'exhaussement des fonds peut atteindre jusqu'à 5 rn, directement en relation avec les rejets de dragage du Port Autonome de Rouen effectués à proximité. Parallèlement, le chenal Nord s'est très rapidement comblé, la sédin1entation dépassant par endroits 4 rn d'épaisseur dans la partie amont du chenal. D'autres secteurs sont au contraire en forte érosion. TI s'agit d'une part du chenal de navigation de Rouen, conséquence attendue des travaux d'endiguement (les dragages étant entrepris pour faciliter et accélérer l'érosion naturelle due aux travaux), et d'autre part de la bordure nord du chenal Nord, l'érosion atteignant 4 rn à proximité de la brèche édifiée dans la digue basse Nord en amont de Honfleur.

Dans la partie de l'estuaire où l'on dispose de données comparatives, c'est-à-dire hors vasière Nord et hors partie Sud de l'estuaire en sédimentation, on enregistre durant la période 1978-1986 un bilan sédimentaire positif d'environ 20 millions de m3 sur 8 ans, équivalent à un dépôt annuel de 2,5 millions de m3

, chiffre bien entendu minimal.

Sur un laps de temps un peu plus long (1978-1992), un travail similaire a été effectué dans le cadre de cette synthèse, sur l'ensemble du secteur compris entre les méridiens -3 à +15 (Fig.14 à 16). La comparaison des deux fonds bathymétriques espacés de 14 ans est particulièrement intéressante. Les tendances décrites sur la période 1978-1986 sont amplifiées : sédimentation au Nord de l'embouchure Gusqu'à 9 rn de dépôt!) et dans le chenal Nord, érosion dans le chenal de navigation (travaux de dragages) et au Nord du chenal Nord dans sa partie amont. De plus, on observe une extension importante vers l'aval du banc du Ratier, du Nord Ouest au Sud Ouest, ainsi qu'une sédimentation intense dans le chenal Sud, tandis qu'un nouveau chenal se creuse au Nord du précédent.

En conclusion, on assiste à une migration très marquée vers le Nord des deux chenaux Nord et Sud de l'estuaire, les anciens chenaux étant progressivement comblés, tandis qu'il y a une sédimentation très intense dans l'embouchure, surtout dans la partie Nord, consécutive

· notamment aux rejets de sédiments occasionnés par le dragage intensif du chenal de navigation. Cette évolution se traduit par un bilan sédimentaire largement positif, essentiellement au niveau de la barre d'embouchure qui constitue un obstacle à la remontée des navires vers Rouen, palié par d'importants travaux de dragages. La progression de cette barre d'embouchure est aussi constatée dans la zone sud.

142 - Déplacement des chenaux

Parallèlement à cette approche globale, l'analyse des relevés bathymétriques permet de visualiser clairement l'évolution dans le temps de la position des chenaux Nord et Sud. En particulier, une étude de la SOGREAH (1994) compare la position de ces chenaux en 1962 et 1988 (Fig. 17). Sur cette période de plus de 25 ans, la tendance évolutive décrite auparavant se conîmne, se traduisant par une migration très importante de l'axe central des deux chenaux, suivant toutefois des tendances opposées forcées par les aménagements de l'estuaire. Ainsi, on observe dans la partie aval du chenal Nord une migration progressive vers le Nord parallèlement au colmatage des fonds de l'ancien chenal, tandis que la partie amont du chenal se décale vers le Sud, consécutivement à l'ouverture de la brèche. Au niveau du chenal Sud, c'est la partie aval du chenal qui s'est décalée vers le Sud, tandis que la partie amont se déplace vers le Nord en direction de la digue du Ratier. Cette tendance à long terme est largement consécutive aux réajustements morphosédimentaires induits par les travaux d'endiguements successifs réalisés durant cette période.

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LE HAVRE

Limite amont

fkm

/ Echelle : .._____.

Fig.14 ·EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1978 A 1992

(courbes lsopaques en mètres)

LE HAVRE

l:tt~jJt~\~1 Zones en sédimentation

Limite amont

de Il zone l!udlée

1km

/ Echelle : ...__ __

Flg.15 ·EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE DE 1978 A 1992

ZONES EN SEDIMENTATION

LE HAVRE

~~~~=~ Zones en érosion

Umlteamont

de la zone "udlée

1km Echelle: ....___.

Flg.16 ·EVOLUTION DES FONDS DE L'ESTUAIRE DE L.A SEINE DE 1978 A 1992

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LE HAVRE

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Fig. 17 ·DEPLACEMENT DES CHENAUX DANS LES ZONES NORD ET SUD ENTRE 1962 ET 1988

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1200

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27

143 - Evolution des isobathes

L'évolution de la position des isobathes apporte des précisions complémentaires sur les modifications morphosédimentaires imposées à l'estuaire par les travaux d'aménagement et par le comblement progressif de l'estuaire (Fig. 18 à 20).

L'évolution de l'embouchure est caractérisée par une forte avancée des isobathes vers le large (Fig. 18). La comparaison des cartes bathymétriques entre 1970 et 1988 (SOGREAH, 1994) montre pour l'isobathe- 5 rn une avancée vers l'Ouest-Nord Ouest de 200 rn au Sud de l'estuaire à plus de 1500 rn au Nord, et pour l'isobathe- 2 rn une avancée de 500 à plus de 2000 m. Dans la partie Nord de l'estuaire, cette évolution traduit l'influence très importante des dépôts de dragage du Kannick, tandis que l'ensemble de l'embouchure est globalement affecté par le colmatage général lié aux apports sédimentaires dans l'estuaire.

Cette tendance est confirmée par la comparaison des cartes bathymétriques de l'ensemble de l'estuaire entre 1972 et 1992 (Fig. 19 et 20). L'évolution de la position de l'isobathe - 3 rn traduit l'exhaussement des fonds de l'embouchure, l'avancée vers l'Ouest des isobathes sur cette période allant de 500 à plus de 2000 rn, tandis qu'on observe parallèlement le creusement progressif des chenaux Nord et Sud dans leur nouvelle position respective.

L'évolution de l'isobathe 0 rn apporte des précisions supplémentaires quant à la réorganisation morphosédimentaire de l'estuaire consécutive aux travaux d'aménagement. Dans la partie sud de l'estuaire, le banc du Ratier se développe progressivement vers l'Ouest mais aussi vers le Sud, tandis que la partie amont de l'ancien chenal Sud se comble consécutivement au creusement d'un nouvel axe plus au Nord. Dans la partie Nord de l'estuaire, on assiste à la migration vers le Nord du banc sableux appuyé sur la digue basse Nord et à la migration vers le Sud du Banc d'Amfard, ce mouvement convergeant entrainant la disparition de l'ancien chenal Nord au profit d'un nouvel axe au Nord du précédent.

1- 5 EVOLUTION DES PARAMETRES GEOMETRIQUES ESTUARIENS­LE COMBLEMENT DE L'ESTUAIRE

Des informations complémentaires peuvent être apportées en quantifiant l'évolution dans le temps de quelques paramètres géométriques caractéristiques (Avoine, 1981, 1985; Avoine et al .. , 1981).

151- Décroissance des s·ections Une première conséquence des endigages de l'estuaire est la décroissance considérable des

sections de l'estuaire depuis le début des travaux.

L'évolution des sections entre 1834 et 1978 montre bien la réduction drastique des largeurs et des profondeurs dans la plus grande partie de l'estuaire, consécutivement aux travaux d'aménagement et au comblement naturel progressif (Fig. 21). Toutefois, en ce qui concerne les sections sous-étiage (au-dessous de la cote 0 rn), les travaux d'aménagement se traduisent par une amélioration très sensible depuis 1834, consécutivement à l'endigage progressif du lit du fleuve qui procure une profondeur régulière et constante au chenal de navigation (Avoine, 1981). Par contre, pour ce qui est des sections moyennes et à pleine mer, elles étaient très supérieures dans l'estuaire sauvage à ce qu'elles sont aujourd'hui dans l'estuaire construit.

Pour les 30 dernières années, l'exploitation des cartes bathymétriques successives dressées par le Port Autonome de Rouen permet d'avoir une idée très précise de l'évolution des sections dans l'estuaire.

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EVOLUTION DES ISOBAtHES -2m ET -!Sm

A L'EMBOUCHURE

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Fig. 18 ·EVOLUTION DES ISOBATHES· 2 met· 5 mA L'EMBOUCHURE DE 1970 A 1988

·2 DUOJ -2 1198111

Dlvue du ra Ilot

RAllA Sl.O

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Mttldlens

(d'après SOGREAH, 1994)

Isobathe· 3 men 1992

Isobathe· 3 men 1972

_.. déplacement des Isobathes

0 ~00 1000 1 ~00 ZOOOn.

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Fig. 19 • EVOLUTION DE L'ISOBATHE· 3 m ENTRE 1972 ET 1992

(d'après fond topographique du PAH)

- Isobathe o m en 1992

---- Isobathe 0 men 1972

...,.. déplacement des Isobathes

+ + creusement 0 500 1000 1500 2000n.

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Fig. 20 • EVOLUTION DE L'ISOBATHE 0 m ENTRE 1972 ET 1992

(d'après fond topographique du PAH)

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1834

------- 1978

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15

EROSION et CREUSEMENT

SEDIMENTATION et REMBLAYAGE

20

DES SECTIONS

Fig. 21 - EVOLUTION DES SECTIONS DE L•ESTUAIRE ENTRE 1834 ET 1978

32

La SOGREAH a ainsi réalisé une étude sur l'évolution de la zone Nord de l'estuaire, entre les méridiens +3 et +21 (SOGREAH, 1994). Pour le chenal Nord, on dispose ainsi d'un certain nombre de profils transversaux pour les années 1963, 1975 et 1986. La position de ces profils est donnée sur la figure 22. A titre d'exemple, la figure 23 représente la section transversale du chenal Nord au niveau du méridien +5. Ce profil montre une très forte sédimentation dans l'ancien chenal de 1963, qui atteint jusqu'à + 4 rn entre 1963 et 1975, soit de l'ordre de+ 35 cm par an, tandis que le nouveau chenal en formation plus au Nord s'est creusé de 1, 50 rn entre 1975 et 1986, soit de l'ordre de- 15 cm par an.

L'étude de la SOGREAH apporte des éléments d'information intéressants quant aux mécanismes et à l'intensité des processus de colmatage dans cette partie de l'estuaire. ll ressort en particulier que les travaux d'aménagement ont joué un rôle essentiel :

-en conduisant à l'isolement relatif de l'ancien chenal de navigation Nord entre la digue basse Nord et la digue haute Nord,

- en fermant l'extrémité amont du chenal qui est passé d'une situation "canal" à une situation "réservoir",

- en contribuant à la réduction de la largeur du chenal, -en favorisant la sédimentation vaseuse du fait de la diminution des vitesses de courant.

L'ouverture de la brèche et la réalisation du terre-plein de la CIM ont conduit à la rotation du chenal vers le Nord avec une érosion des fonds concernés par le nouveau tracé du chenal et une sédimentation dans la zone de l'ancien chenal. Des observations comparables ont été faites par Desprez (1986) à l'occasion d'une étude sur l'impact biosédimentologique des brèches.

Le Port Autonome du Havre a de son côté étudié l'évolution des sections de l'estuaire entre 1972 et 1992, depuis la digue haute Nord jusqu'au trait de côte en rive gauche (PAH, 1994). Les figures 24 à 26 montrent trois exemples d'évolution de profils transversaux réalisés aux méridiens +3, +5 et +9. Ces trois profils conïmnent les tendances évolutives globales déjà mises en évidence dans la comparaison des cartes bathymétriques, à savoir :

-le comblement de l'ancien chenal Nord et sa rotation progressive, - l'érosion très marquée du chenal de navigation, liée à la construction des endiguements et

aux travaux de dragage complémentaires effectués par le port Autonome de Rouen, - le comblement de l'ancien chenal Sud et sa rotation progressive.

152- Réduction du volume de l'estuaire

La décroissance progressive des sections traduit la réduction du volume de l'estuaire. Cette réduction a été calculée en planimétrant les cartes bathymétriques disponibles entre 1677 et 1978, pour une zone allant du Havre (méridien 0) à Tancarville (méridien + 28). Les volumes obtenus sont donnés par rapport au niveau des pleines mers du Havre (cote + 8 rn). En 1677, le volume de l'estuaire peut être estimé à 2 milliards de m3

, en 1834 à 1600 millions de m3 et en 1978 à 840 millions de m3

, ce qui représente une décroissance moyenne de 2,6 millions de m3 par an entre 1677 et 1834, et de 5,3 millions de m3 par an entre 1834 et 1978 (Avoine, 1981).

La réduction volumétrique occasionnée par l'accumulation dans l'estuaire de quantités importantes de sédiments a fait l'objet de plusieurs études du Port Autonome de Rouen, complétées jusqu'en 1978 (Avoine, 1981) et 1992. Un graphique établi pour la période allant de 1834 à 1992 montre le volume des atterrissements durant cette période entre les méridiens -1 et +28 (Fig. 27). L'engraissement total est évalué à 840 millions de m3

, soit une moyenne annuelle de 5,3 millions de m 3

• L'intensité de ce remblaiement est variable au cours du temps, il est particulièrement favorisé par les travaux d'aménagement. Ainsi, de 2,6 millions de m3 par an dans l'estuaire sauvage,

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Fig. 22 • POSITION DES SECTIONS TRANSVERSALES DU CHENAL NORD

(SOGREAH, 1994)

Coh ( m)

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3

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1963

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Fig. 23. SECTION TRANSVERSALE DU CHENAL NORD AU MERIDIEN +5 • COMPARAISON 1963 ·1975 ·1986

(SOGREAH, 1994)

•6-•5- 1 +4- ;...__ __ ....,...._

+3-+2-+1-

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~:f:E==~3 EROSION

!\feridien ~·o 3 A.:e Ihg"UA Bo.sstt du Ra.turr"

Aze D1.gue Bo.su du Nord

Fig. 24 - EVOLUTION DES SECTIONS DE L'ESTUAIRE AU MERIDIEN +3, DE 1972 A 1992 - 1972----

- 1978 ~~~~ - 1982 - 1-988 - 1992

Meridien No ;:::> ·.

A.:e . A.:e Cr1.cque boeuf Di.gVA Bo.sn du Ra.twr !>1.gue Bo.sse du Nord

Fig. 25- EVOLUTION DES SECTIONS DE L'ESTUAIRE AU MERIDIEN +5, DE 1972 A 1992 - 1972~§~~ - 1978 - 1982 - 1988 - 1992----

iWERIDIEN No 9

Aze Aze D1.gutt Ba.sse du Ra.t1.er D-t.gutt Ba.sse du Nord

- 1972---- 1978---- 1982 ==== - 1988 - 1992---

Fig. 26 • EVOLUnON DES SECnONS DE L'ESTUAIRE AU MERiDIEN +9, DE 1972 A 1992

Nouvel End.tgu..,.,.ent D-t.gutt r; 7

(données PAH, 1994)

\\. > .. ,·

Volume en million r------------------------------de rrfl

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1992

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~~~ 760.106

J' , 710. 106

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Fig. 27- VOLUME DES ATTERRISSEMENTS DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

DE 1834 A 1992

37

la sédimentation annuelle a atteint près de 11 millions de m3 entre 1863 et 1880, 3,5 millions de m3

entre 1913 et 1956, près de 10 millions de m3 entre 1959 et 1962, environ 5 millions de m3 entre 1959 et 1975, et de 4 à 4,5 millions de m3 entre 1978 et 1994. Ces chiffres soulignent l'importance fondamentale des aménagements de l'estuaire sur la sédimentation.

Cas particulier de la zone Nord de l'estuaire

L'étude effectuée par la SOGREAH (1994) a permis de quantifier précisément l'évolution de la sédimentation dans la partie Nord de l'estuaire au cours des 30 dernières années.

3Dans la partie

amont (du méridien +15 à la digue du Hode), il s'est déposé environ 37 millions de rn de sédiments, soit en moyenne 1, 6 millions de m3 par an. En fait, le volume sédimenté a été de l'ordre de 4 à 6 millions de m3 entre 1963 et 1975. Puis, le colmatage étant quasi total, il n'a plus été en moyenne que de 0,2 à 0,3 millions de m3 par an de 1975 à 1986. De 1963 à 1986, le taux de sédimentation a atteint en moyenne 0,6 rn par an, la majeure partie des fonds est maintenant au-dessus de la cote + 8, permettant au schorre de se développer rapidement (cf paragraphe suivant).

Dans la partie aval (entre les méridiens +3 et + 15), la sédimentation a été globalement de 35 millions de m3 entre 1963 et 1986, soit environ 1,5 million de m3 par an, avec une moyenne de 2,2 millions de m3 entre 1963 et 1970 et de 0,5 million de m3 en 1975-1986.

Le banc d'Amfard s'est constitué entre le chenal principal et le chenal Nord entre 1960 et 1970. De 1970 à 1980, il s'est lentement érodé en relation avec le déplacement du chenal vers le Nord. Le prolongement de la digue basse Nord à la fin des années 70 a induit une extension vers l'Ouest du banc (14 millions de m3 de 1980 à 1987, soit 1,7 million de m3 par an).

L'essentiel des matériaux dragués par le Port Autonome de Rouen sont déposés dans la zone du Kannick, ce qui représente 43 millions de m3 de 1975 à 1988. Une grande partie de ces dépôts reste dans la zone de clapage comme le montre la comparaison de.s cartes bathymétriques (Fig. 14).

· Au total, dans la zone Nord de l'estuaire, il s'est déposé 72 millions de m3 de sédiments entre 1963 et 1986, soit de l'ordre de 3 millions de m3 par an (87 millions de m3 de 1962 à 1988, soit une moyenne annuelle de 3,3 millions de m3), avec un maximum de 5 à 6 millions de m3 par an après la fin des travaux principaux. A l'amont du Pont de Normandie, le colmatage peut être considéré comme terminé. A l'aval du pont, le colmatage se poursuit rapidement, entraînant une extension rapide du schorre (cf. Fig. 29 à 31). Entre le chenal et la digue basse Nord, le taux de sédimentation moyen, initialement de 0,5 à 0,6 rn par an, est aujourd'hui de l'ordre de 0,10 à 0,15 rn par an.

153 - Diminution de la surface des zones intertidales

L'évolution de la superficie des zones intertidales est principalement le fait des travaux d'endigage favorisant la sédimentation dans l'estuaire, ainsi que du remblaiement (dont l'origine des matériaux est décrite plus loin). La figure 28 montre que de 1677 à 1834, la sédimentation naturelle n'a réduit que très lentement l'aire de ces zones qui est passée de 140 km2 à 130 km2

• Par contre, depuis le début des travaux d'aménagement, surtout depuis 1880, la réduction s'est considérablement accélérée. En 1978, il ne restait plus que 31 km2

, cette tendance se poursuivant à l'heure actuelle avec une superficie de 29 km2 en 1992. Dans un avenir proche, il n'y aura pratiquement plus de zones intertidales en amont de Honfleur. Du fait que les hauts niveaux sont progressivement transformés en marais maritimes, cela peut à terme, poser le problème de la pérennité du rôle épurateur de l'estuaire joué par les vasières naturelles.

Km 2

150

140 km2

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57 km 2 1952 • ' • \ - . 50

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1965. \ ' -\ \

\ 1171 •• 1992

31 30 ~9 . 1 1 • . 25

1700 1800 1900 2000 Années

Fig. 28- EVOLUTION DE LA SUPERFICIE DES ZONES INTERTIDALES DE 1677 A 1992

LE HAVRE LIMITE DES HERBUS

en 1978 mm 8 0 1 9 8 5 llllllllllll1

nheau de baaee mer en

mar6e de vive-eau moyenne

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~ONFLEUA digue du Ratier

Fig. 29 ·EXTENSION DES HERBUS DURANT LA PERIODE 1978-1985

(Larsonneur et Avoine, 1987)

1 km

LE HAVRE ~ . ~ zone d'extension des herbus

.... _ ... _ --Che~,- .... ----No,.... --""' -.....

.... __ .... .................... -- ,, ,, ,,

digue basse nord h . - - - ''-- - - - - - -

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digue du Ratier

HONFLEUR

,, pont de Normandie

/

······· niveau de baSSe mer en marée de vives eaux moyenne

Fig. 30 ·SURFACE OCCUPEE PAR LES HERBUS EN JUILLET 1994

(d'après photo PAH)

1km

LE HAVRE

............... ............. ................ -·- ............ Chenala• ·-·-·-·-. ,,0,.., ......... _

'" ......

digue basse nord

--·--· .......... ·-. -· --------- ------- - ----- -- --- _,,-------brèche U

digue du Ratier pont de Normandie

HONFLEUR

zone d'extension des herbus entre 1985 et 1994

zone de disparition d'herbus entre 1985 et 1994

chena\ de nav\gat\on

1 km

Fig. 31· EXTENSION DES HERBUS DURANT LA PERIODE 1985-1994

42

Compte-tenu du comblement progressif observé dans l'estuaire, on peut penser que de nouvelles zones intertidales pourront se développer dans la partie aval de l'estuaire, mais l'instabilité des fonds liés à l'hydrodynamique, c'est-à-dire l'action des courants et des houles en domaine ouvert, ne devrait pas permettre l'installation de vasières suffisamment durables pour qu'une activité biologique intense se développe comme sur la vasière Nord actuelle.

154- Evolution des herbus de la vasière Nord sur la période 1978-1994

La comparaison des photographies aériennes de l'estuaire réalisées par l'IGN lors des années 1978, 1985 et 1994 permet de cartographier précisément l'extension des herbus de la vasière Nord durant cette période (Fig. 29 à 31 ).

Entre 1978 et 1985 (Fig.29), compte-tenu de l'exhaussement rapide de la vasière Nord, la limite du schorre a progressé très rapidement, de l'ordre de 50 rn à plus de 150 rn annuellement.

En 7 ans, la surface couverte par le schorre s'est accrue de 4,07 km2, ce qui représente une

extension annuelle moyenne de 58 hectares!

En Juillet 1994, après la construction du remblai d'accès au Pont de Normandie, qui constitue une coupure physique au niveau de la vasière, on peut constater que l'extension des herbus est considérable, la vasière nue ayant pratiquement disparu dans cette partie de l'estuaire (Fig. 30). En amont du pont, on peut considérer que le colmatage est terminé, le schorre étant très largement prédominant en dehors de quelques chenaux envasés en voie de comblement rapide. En aval du pont, la vasière est bloquée dans son extension par le chenal Nord et ne peut plus guère avancer vers l'aval de l'estuaire. TI se produit un raidissement de la pente moyenne de la slikke liée à l'avancée de la limite du schorre. Cette slikke va être progressivement colonisée par la végétation dans les années à verur.

Durant la période 1985-1994 (Fig.31 ), la limite du schorre a progressé d'environ 500 rn vers le Sud, soit à une vitesse annuelle molenne de 55 m. Ainsi, en 9 ans, la surface couverte par le schorre s'est encore accrue de 1,88 km, soit une extension annuelle moyenne d'environ 21 hectares, très supérieure à la réduction des herbus occasionnée par le creusement artificiel de vasières nues réalisé en mesure compensatoire de la construction du Pont de Normandie.

Les photographies aériennes constituent un outil précieux qui confirme sans appel le caractère inéluctable de la sédimentation dans l'estuaire de la Seine, sédimentation qui, à moyen terme, condamne l'estuaire à une continentalisation progressive. Ainsi, de 1978 à 1994, ce sont près de 80 hectares de vasières nues qui ont été colonisées par le schorre, lui-même en cours de continentalisation dans sa partie la plus amont.

43

1- 6 CONCLUSION SUR L'EVOLUTION HISTORIQUE DE L'ESTUAŒE

La morphologie estuarienne est entièrement artificielle et résulte des travaux d'aménagement très importants entrepris depuis le milieu du XIXC siècle. Dans l'estuaire construit comme dans l'estuaire sauvage, l'évolution des fonds est très rapide. Elle se traduit au total par un comblement progressif, de l'ordre de 4 millions de m3 par an à l'heure actuelle, essentiellement dans la partie Nord et dans l'embouchure. Ce phénomène, d'ordre naturel, a été largement amplifié par la chenalisation progressive du fleuve qui a provoqué une réduction importante des zones intertidales.

Un complément d'étude a été entrepris (mai 1995) afin de préciser ce comblement à partir de surfaces comparables et incluant notamment l'ensemble de l'embouchure jusqu'au méridien -3 ( + 20 en amont) et une estimation pour la vasière nord (voir annexe ). L'évolution de la sédimentation sur la période 1986-1994 est en moyenne de 3,1 millions de m3 par an. A ce chiffre il faut ajouter le volume sédimenté en aval du méridien -3 estimé à 0,4 million de m3 annuel et le volume de 0,5 million de m3 annuel concernant la vasière nord.

Au total, la sédimentation dans l'estuaire est de l'ordre de 4 millions de m 3 annuels.

Au cours des 25 dernières années, consécutivement au comblement naturel de l'estuaire et aux derniers travaux d'aménagement entrepris durant les années 60-70, on assiste à des modifications morphosédimentaires très notables. Les faits marquants concernent :

- la rotation des chenaux Nord et Sud, qui se traduit par un creusement de nouveaux axes parallèlement au comblement progressif des anciens chenaux,

- la sédimentation très intense dans l'embouchure, liée en particulier aux rejets de dragages du Port Autonome de Rouen, qui induisent un exhaussement général des fonds et une avancée des isobathes vers le large,

- la réduction progressive du volume de l'estuaire, de l'ordre de 5 millions de m3 par an, estimation qui doit être précisée en tenant compte d'une surface estuarienne plus large prenant en compte l'ensemble de l'embouchure au large du méridien -1,

- la diminution de la surface des zones intertidales, dont l'extension vers l'aval est compromise par l'hydrodynamisme croissant,

- l'évolution très rapide des herbus qui précède une continentalisation de l'estuaire déjà très avancée en amont du Pont de Normandie.

En conclusion, l'analyse morphologique montre que la sédimentation dans l'estuaire de la Seine revêt un caractère inéluctable. S'il est vrai que les aménagements ont favorisé le dépôt des apports continentaux et marins dans l'estuaire, il n'en reste pas moins que l'exhaussement des fonds est irréversible et ne peut pas être entravé. Le comblement progressif pose à moyen terme le problème de la pérennité de l'estuaire qui sera peu à peu réduit au seul chenal de navigation endigué entretenu par dragages, les zones Nord et Sud devant se combler au fur et à mesure des apports sédimentaires et de leur redistribution.

DEUXIEME PARTIE

0000000

LA COUVERTURE SEDIMENTAIRE ET SES FLUCTUATIONS SAISONNIERES

45

II- LA COUVERTURE SEDIM:ENTAmE

ET SES FLUCTUATIONS SAISONNIERES

2- 1 LE CADRE SEDIMENTAIRE REGIONAL

La répartition des sédiments dans l'estuaire de la Seine et le proche horizon marin s'inscrit dans le cadre plus général de la Manche orientale et de la Baie de Seine. A l'échelle de la Manche, la couverture sédimentaire consiste, pour l'essentiel, en matériel terrigène d'origine antéflandrienne, mêlé à une fraction bioclastique plus ou moins abondante d'âge flandrien. Le matériel terrigène correspond à d'anciens apports fluviatiles consécutifs à la dernière période glaciaire, alors que le niveau de la mer était environ 100 mètres plus bas que le niveau actuel. Ces apports ont été ensuite repris, pendant et après la remontée du niveau de la mer jusqu'à sa cote actuelle, par les courants de marée qui ont redistribué la fraction mobilisable à dominante sableuse (Larsonneur, 1971; Auffret et al., 1984; Larsonneur et al., 1978). Ainsi, en Manche orientale, les caractéristiques granu­lométriques des sédiments font apparaître une large zone de dépôts grossiers (cailloutis et graviers) au Nord du Cotentin. De là partent des gradients d'affinement vers les côtes françaises et britanniques, notamment en direction de la Baie de Seine. Les sablons et les sédiments vaseux n'apparaissent que dans les estuaires et les baies abritées (Fig. 32).

Ce gradient d'affinement granulométrique se retrouve à plus petite échelle en Baie de Seine, depuis le centre de la baie vers le littoral. La figure 33 montre la répartition détaillée des sédiments en Baie de Seine telle qu'elle a été décrite il y a une quinzaine d'années (Larsonneur et al., 1978), selon la nomenclature établie pour la cartographie globale des sédiments de la Manche (Tableau 1).

Cette nomenclature définit des types de sédiments selon les critères suivants :

-en fonction de la granulométrie, on distingue 4 grandes catégories de dépôts : cailloutis, graviers, sables, sédiments vaseux.

Les cailloutis renferment plus de 50 % de galets (symbole C) Les graviers renferment plus de 50 % de graviers et de galets (symbole G) Les sables renferment plus de 50 % de matériel inférieur à 2 mm et moins de

5% de pélites (symbole S). Ils sont qualifiés de graveleux lorsqu'ils renferment plus de 15 % de graviers, grossiers si la fraction 0,5 - 2 mm est dominante, fins si la fraction 0,2 - 0,5 mm est dominante, sablons si la fraction 0,05- 0,2 mm est dominante.

Les sédiments vaseux renferment plus de 5 % de pélites (symbole V). On distingue : les sables vaseux (5 à 25 % de pélites), les vases sableuses (25 à 75 % de pélites), les vases (plus de 75% de pélites).

- en fonction de la teneur en calcaire, on distingue 4 classes : sédiments lithoclastiques (0 à 30 % de calcaire), sédiments litho-bioclastiques (30 à 50 % de calcaire), sédiments bio­lithoclastiques (50 à 70% de calcaire), sédiments bioclastiques (plus de 70% de calcaire).

La figure 34 montre une répartition simplifiée des sédiments de la Baie de Seine. La zonation sédimentaire bien marquée laisse apparaître de larges surfaces couvertes par des dépôts de graviers. Des zones à sédimentation sableuse se développent sur la frange côtière et surtout aux extrémités Est et Ouest de la baie. Les dépôts vaseux sont peu répandus à l'échelle de la baie, ils se localisent principalement dans les parties internes et dans les estuaires, ainsi que le long du littoral par des fonds de -5 à -7 m.

DORSET SUSSEX

cailloutis transports tractés Indiqués par

~ graviers les structures sédimentaires

~ sables graveleux longitudinales

sables transversales

sablons & vases 50 km

Fig. 32 • MANCHE ORIENTALE : CARTE DES SEDIMENTS ET DES TRANSITS SABLEUX TRACTES EXPRIMES PAR LES STRUCTURES SEDIMENTAIRES LONGITUDINALES ET TRANSVERSALES

(Auffret, Walker, d'Ozouville, 1984)

r--.SUBDIVISIONS

PRINCIPALES ...........

SEDHIENTS

L Il HOCI.AST 1 QUES

tALCA 1RE< 30

SEDIIlNTS

LITHO-BIOCI.ASTIOUE~

30ÇCALCAIRE <50

SEDUIENTS

CAILLOUTIS ou GRAVIERS

COOUINITES L <51 - GALICOQ )SOS

L<5 1- GALICOQ<SOS

Hd) 2""'

CAILLOUTIS GRAVIERS LITHOCI.ASTIOUES LI TIIOCI.ASTI OUES

GAC.IC0Q)70 GALICOQ<70 GAC.fCOQ ~JS GALICOQ<lS

CL! A Cllb GUa Gllb

C. Litho. C.Litho-grav Gr.lltho- Gr.lltho. leuK(sablo· caillouteux graveleux). (coquillier)

CAILLOUTIS LITIIO-BIOCI.ASTIOUES

GAL1l"CQ)10 CAL•COQ< 10

CL2• CL2b C.Litho.blo. C.li tho.bio. coquillier graveleux

(Sab.grav.)

COQU !tillES LITHOCLASTlQUES

GRAVIERS LITHO-BIOCI.ASTIQUES

CAL•COQ 'i>lS CAL•COQ < 1S

GL2• Gl2b • Gr.Litho.bio Gr .li tho. .oquf 11 ier ou bio. .a 111 outeux

GRAVIERS BIO-LITHOCLASTIOUES

S A B L E S L< 5 1 • 6 f L >50 1 - Hd < Z ""'

SABLES LITIIOCI.ASTIQUES JS~Sup. d 2 llfll<50 Sup. d 2 llfll<lS

SEDIMENTS VASEUX L ~ 5 1

SEDIMENTS VASEUX L<ZS 25'-L<1S L<7S

GAC.ICOQ ~GR GR> GALICOQ FRACTION DOMINANTE Vlla 511[! d 0, 5 ""' r• 0, 1 d 0, S ""' le 0, OS dO • 2m•

VLlb VLlc

SU• Sllb 1 ~.litho.call. S.lltho. (coquillier) graveleux

Sllc • Slld SUe Sêd.(sable) S litho l:s llth Sablon litho. Litho-vaseux . . · o. (Silto-argf-gross fer fln leux) ,

Vase (sllto-arg. Vase (sllto­Sableuse (grav.ou caill.) argileuse)

'- -SABLES LITHO-BIOCI.ASTIQUES SEDIMENTS VASEUX CALCAREUX

J5 ~Sup. d 2 ""' < 50 Sup. d z""' < 15 L < 25 25c;L<75 L<7S GALICOQ~GR GR >GA LICQ() FRACTION DOMINANTE VL2a Vl2b Slip. dO,SIIfll ~e0,2d0,5mr le O,OSd0,2m• VL2c

SL2• Sl2b SL2c 1 SL2d SL2e sêd.(sable) Marne sableuse' Marne, • S.ll tho. bio. S.lltho.blo. S.Litho.Bio. S.ll tho bio. Sablon litho. Hho-blo. vaseu grav .ou ca ill.) ce i 11 outeux sllto-arglleux

ou coquU 11er ~ravel eux gross fer fln bio. ou coq. ,

SABLES BIO-LITHOCLASTitlUES SEDIMlNTS CARBONATES VASEUX JSCSup. d 2 llfii<SO Sup. d 2""' < lS L < ZS 25 < L<1S L<?S

810-LITIIOCLASTIQUE~ m,'tfGAi.~70 CONAL < 10 COQIGAL>lS COQfCAL<15 COQfGAf. 'i> GR GR > COQIGAL FRACTION DOMINANTE

SOçcALCAIRE < 70

SEDWENTS

BlOCLASTJQUES

CALCA 1RE ;> 70

eBla CBlb GBl a GBlb • Coq.lltho Coq.litho. Gr.blo.lltho Gr. bio.

grav. coquillier Litho. (Sab.grav.) (caillouteux)

COOUINITES GRAVIERS BIOCLASTIOUES

Cv.M;AL ~/tl Lt.il;<i.Ai.. <lü L!.iyfc;,i., ~J5 C:Ct{-lilii.< i5

CB2a CB~ GB2ll GB2b l

Coqulnlte Coq.gravel. Gr.bioc. Gr.blo (sablo.grav. coquillier

SBl• • S.bl o. L f tho· coq. cal llouteux)

Sup. d O,S""' rle 0,2 d 0,5 ""' la O,OS d O,Z,

SBld SBle Sablon bio. S.blo.Litho. litho.

fln

SBlb • SBlc • S.blo. S.blci. LI tho. grave Litho. leux grossier

SABLES BIOCLASTIQUES

VBla VBlb VBlc

Sêd. ( sab h) 1 Marne 1 Marne lo-lltho. Calcaire Calcaire

· ( llt • sableuse aseux 1s o.~ (grav.ou cal li. argl eux) ou coq.)

SEDIMENTS CALCAIRES VASEUX JH Sup. d 2 "'"< SO 1 Sup. d 2""' < 15 L <25 25c;L<75 ·L<7S

COQ~GR

SB2• 1 S.blochstl que coqull· 11er

GR> COQ

SB2b • S.blo. graveleux

FRACTION DOHIIIANTE ~' o,os d O,Zmr VB2a Sup. d C,! 11r:1 le: C,t d O,Srmi

SB2c SB2d SB2e ~êd.(sable) l Boue calcaire • Sablon bio. plo.vaseux sableuse l

S.blo. S.blo.fln s11to-arglleux) (grav.ou coq.) grossier 1

VB2b vB2c Boue calcaire

GAL • Galets, COQ. 'i> 20 mm • Coquilles, GR • Graviers, S • Sables, L • lutltes, , Sêdlments sllto-arglleux, argllo·sllteux ou argileux.

t Sêdiments pouvant en outre être quallflês de zoogênes (z) ou de phycogênes (p)

Tableau 1· CLASSIFICATION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS SELON LARSONNEUR (19n)

(·~· Cllu ••• l...l.l.

~ Cllb

Glla

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• .... ·. . . • ' ':' ': 1

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Fig. 33 • CARTE DES SEDIMENTS SUPERFICIELS DE LA BAIE DE SEINE

(Larsonneur, Vaslet, Auffret, 1978)

D Slle

SL2e

~Vlla ~

1§1 Vl2a

(Légende Tableau 1)

n±l±\galets GA

~graviers GR

~ sables r···:.:.:.:.~l bi ~et graviers :;::::::::::::: sa es

SG S

r;;mm sables ~et vases

SV

Fig. 34 ·REPARTITION SIMPLIFIEE DES SEDIMENTS EN BAIE DE SEINE Les flèches indiquent le sens dominant des transports sédimentaires

IIJ roche

50 La plus grande partie du matériel sableu~ qui domine largement dans le secteur oriental de la

Baie de Seine, correspond aux sables déposés au fond de la Manche durant la dernière période glaciaire. Les courants de marée ont redistribué la fraction mobilisable à dominante sableuse.

Aussi, le gradient d'affinement granulométrique que l'on observe d'Ouest en Est dans la baie se superpose-t-il au gradient des vitesses de courants qui diminuent progressivement du large vers la côte (Larsonneur, 1971). Dans son ensemble, la répartition des sédiments est donc contrôlée par les courants de marée.

Depuis la remontée du niveau de la mer, une fraction d'origine bioclastique formée par des débris coquilliers s'incorpore progressivement aux sables détritiques continentau~ constituant l'essentiel des apports sableux actuels. L'ensemble forme la plus grande part de la masse sédimentaire, à laquelle s'ajoute localement une fraction vaseuse apportée par les rivières, ou issue de dépôts anciens de nature vaseuse, actuellement en érosion sur le fond de la baie, aspect qui sera évoqué plus loin.

D'une manière générale, la nature des sédiments superficiels est conditionnée (1) par l'intensité des agents hydrodynamiques régissant le transport des matériaux, à savoir les courants de marée et les houles, (2) par les apports actuels d'origine marine et fluviale, et enfm (3) par la morphologie locale. Dans la partie orientale de la Baie de Seine qui intéresse l'estuaire de la Seine, une grande variété de dépôts peut être observée, correspondant d'une part à l'origine diversifiée des apports, et d'autre part à la dualité entre l'action des courants de marée qui est dominante dans les fonds au-delà de -7 rn et celles des houles qui devient prépondérante au-dessus de -7 m.

Les observations effectuées à l'aide d'un sonar à balayage latéral permettent à la fois de cartographier les sédiments et de mettre en évidence des structures sédimentaires de surface liées à leur déplacement sur le fond (Auffret et d'Ozouville, 1986). Les surfaces occupées par des sédiments sablo-graveleux montrent la présence de telles structures, témoignant de transits sableux en traction. Elles indiquent une direction générale de transport vers le Sud Est, avec quelques inversions locales liées à la morphologie sous-marine ou littorale (Fig. 35). A l'Est de la baie, les sables fins présentent peu de structures de transit, mais par contre on observe des signes d'envasement. La dynamique des

· vases est caractérisée par un cycle annuel où alternent des phases de dépôt en masse lors des crues, à proximité immédiate des embouchures, et des phases de reprise de ces vases sous l'action des houles. Des structures attribuables au transport tracté s'observent par ailleurs sur le banc de Seine, au niveau du banc du Ratier et près du port d'Antifer. Globalement, à l'exception des zones estuariennes orientales et occidentales sablo-vaseuses, la Baie de Seine présente une couverture de sédiments meubles constituée de graviers d'épaisseur réduite sur laquelle s'effectuent des transits sableux vers le Sud Est, en direction de l'estuaire de la Seine.

2-2 LA SEDIMENTATION EN BAIE DE SEINE ORIENTALE

Dans cette partie de la baie, les sédiments à dominante sablo-vaseuse s'ordonnent schématiquement selon un gradient d'affinement d'Ouest en Est aux larges des côtes du Calvados, et du Nord vers le Sud le long du Pays de Caux, abstraction faite de l'envasement lié aux dépôts de dragages du Port Autonome du Havre situés devant Octeville. La figure 36 montre la répartition des sédiments durant l'été 1978, classés selon la terminologie définie sur le Tableau 1 et décrite page 45. Cette cartographie sédimentaire représente l'état des fonds en 1978 (Avoine, 1981}.

Les sédiments grossiers (cailloutis et graviers) sont représentés aux abords du Havre, de part et d'autre du chenal d'accès du port, où ils constituent des hauts fonds inafouillables, localement envasés. Des dépôts de sables graveleux et de graviers, en grande partie bioclastiques, s'observent également à l'Ouest de l'embouchure de l'Orne.

STRUCTURES SEDIMENTAIRES

TRANSVERSES

~ AlDIN ASYMETRIQUE

~ SENS DE L'ASY~ETRIE rn RIDIN SYHETAIQUE

l3l MEGARIDES ASYIIURIQUES

~

~ HEGARIDES SYHURIQUES

LONGITUDINALES

~ COH~TE ET

l..:!!::=:::l WRECl· IIARK

fAI:lES SEDIMENTAIRES

~ SEDIPIENT GRAVELEUX

~

~RUBAN SABLO-GRAVELEUX [}/{'':~COUVERTURE SABLEUSE ~ ".' '.t·~· OISCONTINUE A MEG~RIDES

k~~~P~] AUBAN SABLEUX

~ TRAINEE SABLEUSE

~ SOIIHET DE BANC ~ s•BLEUX LINEAIRE

~COUVERTURE

~SABLEUSE DISCONTINUE

~COUVERTURE SABLEUSE

!tElE CONT 1 NUE

~FIGURES D'EROSION SUR ~ SEDIHEiiTS FINS

/jf ROCHE

Fig. 35 ·FACIES ET STRUCTURES SEDIMENTAIRES EN BAIE DE SEINE PAR IMAGERIE SONAR A BALAYAGE LATERAL

(Auffret et d'Ozouville, 1986)

CAILLOUTIS SA ILES SfOIMtNU VASEUX

Vlt• Y\t~ "''~ [.ii3.:') . ·,.] 1 1 ~~~~~~~~~~~~~~ ~ llllll

Cl te

SL2c Sl.2o Yl2o Y\2111 V\,C'

li!: '1 -ve1e

GIAVIUS 1;.·=:.1 f ......... l ..........

Ê-----~ . ----•/o ... peht••

5- 25 25.75 •75

Fig. 36- REPARTITION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS DANS LA PARTIE ORIENTALE DE LA BAIE DE SEINE EN 1978

•/o .,. colc01r•

< 30

30 -51

51 - 70

) 71

(Avoine, 1981)

53

Les sables sont très largement répartis: sables moyens à grossiers riches en débris coquilliers à l'Ouest de l'embouchure de l'Orne, sables fins sur tout le littoral du Calvados, localement sablons entre 0 et -5 rn le long du Calvados, jusqu'à -12 rn devant le Pays de Caux.

Les sédiments vaseux couvrent également de large surfaces. Les sables vaseux sont bien représentés entre les embouchures de l'Orne et de la Seine au Sud du banc de Seine. La dépression du Parfond est partiellement envasée. L'influence des dépôts de dragages d'Octeville se fait sentir par une large zone de sables vaseux pauvre en calcaire. Des vases sableuses s'observent dans la zone d'énergie minimum comprise entre -5 et -7 rn au large des côtes du Calvados et dans les embouchures de l'Orne et de la Seine. Les faciès franchement vaseux ne se rencontrent que dans les avant-ports du Havre et de Ouistreham.

La figure 3 7 donne une image simplifiée de cette répartition. Trois faciès sédimentaires principaux peuvent être dégagés: (1) un faciès grossier représenté surtout à l'Ouest de l'embouchure de l'Orne; (2) un faciès moyen, principalement des sables fins très homogènes au large du Calvados et du pays de Caux ainsi que sur le banc de Seine; (3) un faciès fin comportant des sablons et des vases très facilement remobilisables par les agents hydrodynamiques. Les dépôts vaseux sont bien représentés dans les embouchures des rivières, le long des côtes du Calvados par des profondeurs de -5 à -10 rn en moyenne, et au Nord du dépôt de dragages d'Octeville." Il faut noter que les dépôts meubles de l'ensemble de la partie orientale de la Baie de Seine, de l'Orne à la Seine, montrent des variations saisonnières et pluriannuelles importantes, problème qui sera évoqué plus loin.

La figure 3 8 montre la répartition des sédiments superficiels de la Baie de Seine orientale en 1983, défmie d'après l'étude de plus de 800 échantillons (Avoine, 1987). A ce jour, c'est la cartographie la plus complète disponible pour ce secteur. Par rapport à la carte établie en 1978 (Fig. 36 et 37), on n'observe pas de différence fondamentale, le domaine concerné restant marqué par la prédominance des sables fins et des sédiments sablo-vaseux. Dans le détail, on remarque toutefois une évolution des limites des zones plus ou moins envasées, ce qui traduit pour cette fraction sédimentaire des fluctuations importantes dans le temps. En particulier, dans l'embouchure de la Seine, la comparaison des deux cartographies montre clairement que l'envasement est beaucoup plus

· important en 1983 qu'en 1978.

2-3 LES FLUCTUATIONS DE LA COUVERTURE SEDIMENTAIRE EN BAIE DE SEINE

231- A L'échelle pluriannuelle

La répartition des faciès sédimentaires présentée figures 36 à 38 n'est qu'une image instantanée d'une situation correspondant à des conditions hydrodynamiques données, cette répartition étant sujette à des fluctuations notables à différentes échelles de temps. La comparaison des cartographies réalisées à cinq années d'intervalle en 1978 et 1983 montre déjà une évolution de la limite des zones envasées. Sur un plus long laps de temps, les dépôts vaseux pélitiques présentent une variabilité très marquée. Les figures 39 et 40 donnent la répartition des vases en 1978 et en 1993. Cette comparaison montre un accroissement global de la sédimentation pélitique en Baie de Seine orientale d'environ 25 % entre ces deux dates, qui se traduit principalement par une augmentation des teneurs en fines le long du Pays de Caux, au large du port d'Antifer et dans l'embouchure de la Seine (Morice, 1994). Une évolution pluriannuelle avait déjà été observée entre 1967 et 1978 (Avoine, 1981}, période durant laquelle les surfaces envasées étaient passées de 100 à 300 km2 à l'intérieur d'une ligne Antifer/Luc-sur-mer.

sablons et sédiments vaseux

sables fins

rochers

- sables~ grossiers @25

graviers et cailloutis &....:...~._.....

Cap d'Antifer

Octeville 0

LE HAVRE

N

).,

SKM

Fig. 37- REPARTITION SIMPLIFIEE DES SEDIMENTS EN BAIE DE SEINE ORIENTALE

EN 1978 (situation estivale)

GRAVIERS

SABLES GROSSIERS AGRAVB..EUX

SABLES FINS

SABLES VASEUX (5-25% de p6111N)

VASES (~%de ..... )

0 DEPOlS DE DRAGAGE

Ffg. 38- REPARTITION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS DE LA BAIE DE SEINE ORIENTALE EN 1983 (situation estivale)

(Avoine, 1987)

0 • 49 40

N

Cauville

Octeville

Le Havre

0 • 49 20

Skm

0°20·w

0/o de pélites

-r ..,... · ..,.. .. , < 2 !:::========:::! 1 o-2 5

, ..... ] 2 5 ~::::: - IMMfWI 25-75

{-:·:·:·:·:·:1 5 - 10 ······ )75

Le Parfond

0

Echelle

5 km

•ocTEVILLE

LE HAVRE

10

Fig. 39- REPARTITION DES PELITES (VASES) EN BAIE DE SEINE ORIENTALE EN 1978, EXPRIMEE EN °k (Avoine, 1981)

~+·~-+ ++++++ ++++++ .... +++++ ++++++ ++++++ ++++++

o•

% de pélites

> 75 l!llllllllllllllllllllll LO- 25

25-75 11111111111111 5- 10

• Oc:tevi.lle

HAVRE

• Dépàt de draqage

t+++~l 2-5 1 1 1 1

<2

Fig. 40- REPARTITION DES PELITES EN BAIE DE SEINE ORIENTALE EN 1993

(Morice, 1994)

58

Ainsi, de 1967 à 1993, sur plus de 25 ans, on constate un envasement très significatif de la Baie de Seine orientale, tout particulièrement dans l'embouchure de la Seine et plus au Nord le long de la côte du Pays de Caux (Fig. 41 ). A l'échelle de l'ensemble de la baie, une comparaison de la répartition de la fraction pélitique des sédiments en 1967 et 1983 montre une tendance à l'envasement comparable à celle observée localement dans la partie orientale (Fig. 42).

232- A l'échelle saisonnière Les dépôts meubles de la partie orientale de la Baie de Seine montrent des variations

importantes tout au long de l'année, qui traduisent d'une part la grande mobilité de la fraction sabla­vaseuse sous l'action des courants de marée et des houles, d'autre part la variabilité des apports de matériel en suspension d'origine fluviatile à certaines périodes de l'année (Avoine, 1981, Avoine et al., 1986). Ces fluctuations saisonnières sont particulièrement sensibles dans la fraction pélitique qui évolue à une échelle de temps très courte. Une image instantanée de la couverture meuble, telle celle donnée sur les figures 39 et 40, correspond à la superposition de plusieurs événements sédimentologiques simultanés ou successifs. Ces événements restent difficiles à différencier sans un suivi précis de l'évolution des dépôts. Un tel suivi existe dans le secteur oriental de la Baie de Seine où l'on dispose d'une douzaine d'images instantanées de la répartition des sédiments superficiels dans différentes conditions hydrologiques et hydrodynamiques.

A titre d'exemple, la comparaison des cartes données sur la figure 43 permet d'apprécier l'étendue des envasements entre les estuaires de l'Orne et de la Seine, et leurs variations à l'échelle de quelques mois. Cette évolution très rapide témoigne de la grande instabilité des pélites aisément remobilisables par les courants de marée et les houles. Une expérience à l'aide de traceurs radioactifs utilisant des vases de différentes concentrations à d'ailleurs montré que ces sédiments sont très facilement remis en suspension et peuvent ainsi être transportés loin de leur lieu d'origine (Avoine et al., 1986), alors que les sables du même secteur se déplacent plus difficilement avec une résultante de transport très faible.

La figure 44 montre l'étendue des envasements lors de deux situations extrêmes : une situation estivale caractérisée par une faible agitation des eaux et des apports fluviatiles négligeables,

· une situation hivernale avec une forte turbulence liée aux houles de tempête et des apports terrigènes importants issus principalement de la Seine. L'examen de ces deux cartes fait ressortir des divergences quant à l'évolution des zones envasées de l'embouchure de la Seine par rapport au domaine des sables vaseux situés au large des côtes du Calvados. En effet, alors que dans l'embouchure les dépôts pélitiques ont une extension maximale durant l'hiver, au large l'envasement des fonds est plus important au cours de la saison estivale. Les études hydrosédimentaires entreprises dans ce secteur de la baie et l'examen des cartes de répartition des sédiments lors de situations intermédiaires, telles celles décrites figure 43, permettent d'expliquer cette dualité par deux mécanismes indépendants : les apports fluviatiles en suspension lors des crues et l'action des houles de tempête.

Les apports fluviatiles sont étroitement tributaires du débit fluvial. Durant la saison hivernale, en période de crue, une quantité importante de matières en suspension est expulsée en mer. L'essentiel des apports solides de la Seine est réalisé en quelques jours, conduisant à l'envasement des fonds dans l'embouchure de part et d'autre du chenal de navigation, dans les zones de moindre courant. Ces dépôts temporaires peuvent être aisément remobilisés par les houles. Ils régressent à la fin des périodes de crue lorsque leur alimentation, assurée par les apports de matériel en suspension, n'est plus suffisante pour équilibrer leur érosion par les houles. Les vases remises en mouvement sont dispersées par les courants de marée et se redéposent dans des zones plus calmes, notamment les installations portuaires du Port Autonome du Havre, ou les dépressions situées plus au large (Parfond).

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1967

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1978

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1982

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Fig. 41 - COMPARAISON DE LA FRACTION PELITIQUE DES SEDIMENTS DE LA BAIE DE SEINE ORIENTALE EN 1967,1978,1982 et 1993

(Hervieu, 1994)

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SEPTEMBRE 1983

Fig. 42- REPARTITION DE LA FRACTION PELITIQUE DANS LES SEDIMENTS DE LA BAIE DE SEINE- COMPARAISON 1967-1983

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MAl· JUIN 1982

,

FEVRIER 1982 SEPTEMBRE 1982

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Fig. 43 ·EVOLUTION SAISONNIERE DE LA COUVERTURE DE DEPOTS FINS DANS LA PARTIE ORIENTALE DE LA BAIE DE SEINE

BANC DE SEINE

% de PEL/TES

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BANC DE SEINE

Fig. 44- REPARTITION DES ZONES D'ENVASEMENT DANS LA PARTIE SUD EST

DE LA BAIE DE SEINE, EN ETIAGE (Automne 1981) EN CRUE (Printemps 1982)

63

Ainsi, en période d'étiage, l'envasement est réduit dans l'embouchure, d'autant plus qu'à ce moment une quantité importante de sables transite du large vers l'estuaire, contribuant ainsi à son comblement.

Les observations à l'aide d'un sonar à balayage latéral confirment la grande variabilité des dépôts fins (Auffret et d'Ozouville, 1986). Des structures d'érosion attribuables à l'action de la houle sur les fonds vaseux ont été mises en évidence (Fig.3 5), ainsi que des remises en suspension de particules fines formant à l'interface eau-sédiment une couche d'eau turbide étirée en rubans parallèles par les courants de marée.

Une autre cause de la grande variabilité observée dans la sédimentation fine de la Baie de Seine orientale peut être invoquée par l'étude des carottages effectués dans le secteur situé entre les estuaires de l'Orne et de la Seine, du littoral jusqu'aux fonds de -15 m. Ces carottages montrent que l'épaisseur des sédiments meubles actuels est très faible, parfois quelques dizaines de cm, voire nulle localement (Fig. 45). Ces sédiments de nature sableuse reposent en fait sur des dépôts de granulométrie très fine, correspondant à des vases fossiles renfermant de nombreux débris végétaux, déposés en milieu continental il y a environ 8000 ans (Fig. 46). Ces vases sont en érosion active à l'heure actuelle et peuvent ainsi contribuer à l'envasement de la baie. L'érosion de ces sédiments fins et leur recouvrement périodique par les sédiments sableux qui transitent à leur surface peuvent expliquer en grande partie la variabilité observée tout au long de l'année.

Comme il a été dit précédemment (paragraphe 231 ), on a constaté à l'échelle des 25 dernières années un accroissement très notable des secteurs envasés dans l'ensemble de la Baie de Seine orientale. Une des causes possibles de cet envasement est à rattacher à la réalisation des aménagements récents dans l'estuaire de la Seine. Ceux-ci ont fait disparaître une grande partie des aires de sédimentation fine dans l'estuaire, et sont à l'origine de l'expulsion d'apports fluviatiles au large et de leur sédimentation dans le domaine marin (voir partie IV). L'influence réelle de ces apports sur l'envasement des fonds au large de l'estuaire de la Seine peut être appréciée en utilisant les métaux-traces d'origine fluviatile comme marqueurs du devenir des suspensions expulsées en mer (Boust, 1981; Avoine et al., 1986). Pour ce faire, 4 métaux représentatifs des apports de la Seine,

· d'origine essentiellement anthropique, ont été utilisés (Zn, Hg, Cu et Ni).

La figure 47 montre l'extension minimale de l'influence estuarienne, une désorption partielle des métaux n'étant pas à exclure lors du transit des suspensions en mer. L'impact des apports fluviatiles est clairement mis en évidence dans les secteurs envasés de l'embouchure de la Seine et vers le Nord Ouest, où cette influence directe est relayée par l'existence du dépôt de dragages d'Octeville dont le matériel est issu de l'estuaire après sédimentation dans l'avant-port du Port Autonome du Havre.

Vers le large, l'influence estuarienne s'atténue rapidement, les dépôts vaseux situés le long des côtes du Calvados ne sont que peu influencés par les apports de la Seine. Cette observation confirme l'hypothèse qui est de considérer que l'érosion actuelle des fonds vaseux fossiles de la Baie de Seine contribue aux envasements observés dans ce secteur et à leur accroissement rapide au cours de ces dernières années. Toutefois, l'importance relative de ces deux sources, apports fluviatiles et érosion locale, reste difficile à évaluer.

En conclusion, dans la partie orientale de la Baie de Seine, on constate que la sédimentation vaseuse montre d'importantes fluctuations saisonnières et pluriannuelles, correspondant d'une part à la grande mobilité des sédiments fins sous l'action des agents hydrodynamiques, et d'autre part à la diversité des sources de matériel.

r;:> /--...... · ~ donnus PAR

/l---~ 'f SEDIMENTS IIOLOCENES

BANC de SEINE

LE HAVRE

EH CM

(Donn~es 1977 à 1982)

. Fig. 45 • EPAISSEUR DES SEDIMENTS MEUBLES ACTUELS

D'APRES LES DONNEES DE CAROTIAGE ET LES BENNAGES EFFECTUES DE 1977 A 1982

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Fig. 46 ·VARIATION VERTICALE DE LA SEDIMENTATION EN BAIE DE SEINE SUD ORIENTALE,

SELON DEUX CA ROTT AGES EFFECTUES AU LARGE DE LA DIVES

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Cap d'Antifer

Fig. 47- PART DES APPORTS D'ORIGINE ESTUARIENNE DANS LES

SEDIMENTS FINS DE LA BAIE DE SEINE ORIENT ALE (EXPRIMEE EN °A,)

(Avoine et al, 1986)

67

2- 4 LA SEDil.\IENTATION DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

241 - Répartition des sédiments superficiels en 1978

La cartographie sédimentaire réalisée en 1978 reste la plus détaillée à ce jour, compte tenu du grand nombre d'échantillons prélevés pour sa réalisation, à la fois dans le domaine intertidal et subtidal {Avoine, 1981). Toutefois, compte tenu de l'évolution très importante observée au cours de ces dernières années, cette cartographie ne correspond plus précisément à la répartition actuelle des sédiments dans l'estuaire (cf. paragraphe 244). Il est cependant utile d'en rappeler les grandes lignes à titre de comparaison avec les cartographies plus récentes.

Dans l'estuaire, la sédimentation est étroitement conditionnée par la morphologie et les caractéristiques hydrodynamiques du milieu. Dans l'embouchure, la répartition des sédiments est contrôlée par l'action conjointe des courants de marée et des houles. Vers l'intérieur de l'estuaire, les houles s'amortissent, les courants de marée deviennent prépondérants mais leur énergie décroît vers l'amont. De l'amont vers l'aval, en 1978, les sédiments se répartissaient de la manière suivante (Fig. 48):

- dans la Seine fluviale Dans le chenal de navigation, les faciès sédimentaires évoluent d'amont en aval. A Caudebec,

les fonds sont constitués de sables moyens à grossiers, et s'affinent vers l'aval avec l'introduction d'une fraction vaseuse. Des cailloutis tapissent le fond du chenal entre Courval et Quillebeuf. Entre Quillebeuf et Tancarville apparaît un mélange de sables grossiers et de galets.

Dans cette partie du fleuve, endiguée et étroite, les zones intertidales sont inexistantes. Elles ne se développent que dans les méandres sous la forme de slikkes vaseuses, et surtout sur le banc de Tancarville-Quillebeuf où les sédiments sont principalement des sablons lithoclastiques. Ils constituent un important champ de mégarides, légèrement envasé dans sa partie aval à la hauteur du pont de Tancarville.

-l'estuaire amont Dans le chenal de navigation, les faciès s'affinent entre Tancarville et Honfleur. A Tancarville,

les fonds sont graveleux à caillouteux, ils passent vers l'aval à des sables grossiers lithoclastiques puis à des sables fins lithoclastiques à la hauteur de Honfleur. A cette sédimentation principalement sableuse se superposent localement des placages de vase, notamment en amont de Honfleur. Les vases sableuses et les vases abondent dans le port de Honfleur, qui constitue un bassin de décantation pour les eaux chargées en matières en suspension. Les sables moyens et grossiers de ce secteur sont des dépôts fossiles mis en place dans l'estuaire sauvage avant les aménagements, et remis à nu à la faveur des dragages.

La grande vasière du Nord de l'estuaire, encore peu colonisée par la végétation en 1978, est une unité morphologique où la sédimentation est hétérogène dans sa partie aval, et au contraire très homogène dans sa partie amont, en liaison avec un gradient d'affinement aval-amont. De part et d'autre de l'ancien bac du Hode, les faciès sont vaseux à vaso-sableux, lithoclastiques, homogènes.

Vers l'aval, la teneur en pélites décroît progressivement jusqu'à hauteur de Honfleur. L'ensemble de ce domaine est caractérisé par l'abondance de figures sédimentaires et de phénomènes de sédimentation caractéristiques des zones intertidales : rides de courants, rides d'oscillation, structures litées, galets de boue, bioturbations ...

D'une manière générale, la slikke sablo-vaseuse est largement développée dans la partie aval, elle passe vers le haut à une zone encore plus vaseuse, en partie colonisée par la végétation. La sédimentation rapide empêche la formation de microfalaises entre le schorre et la slikke vaseuse.

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LE HAVRE ESTUAIRE DE LA SEINE

REPARTITION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS

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SEDIMENTS VASEUX

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Fig. 48 • REPARTITION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN 1978 (Avoine, 1981)

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69

La vasière est parcourue par un réseau de chenaux Nord-Sud dont la profondeur peut atteindre 2 à 3 rn, progressivement en voie de comblement. lls sont bordés de banquettes sabla­vaseuses contribuant à la formation de galets de boue.

-l'estuaire aval La sédimentation est à dominante sableuse, il existe cependant quelques récurrences

d'anciens pouliers caillouteux à graveleux au Sud du Port du Havre et au niveau du banc du Ratier. Dans le chenal de navigation, les faciès sont sableux à l'embouchure, sablonneux vers l'amont jusqu'à Honfleur. Des structures sédimentaires de type mégarides s'observent communément dans cette partie de l'estuaire entre Honfleur et la partie aval des digues (Fig. 49), dont l'asymétrie témoigne d'un transit sédimentaire tracté très important d'aval en amont(*). Dans le chenal Sud et sur la partie amont du banc du Ratier, les fonds sont sableux, lithoclastiques. Sur le littoral entre Villerville et Honfleur, ils deviennent plus carbonatés. Dans le chenal et sur le littoral, des placages de vase identiques à ceux observés sur la vasière Nord apparaissent périodiquement, en relation avec la dynamique des sédiments en suspension.

Entre la digue du Ratier et le banc de galets voisin, un grand ensemble vaseux se développe, à l'abri des houles dominantes d'Ouest à Nord Ouest et des courants de marée importants cantonnés dans le chenal Sud. Cette vasière devient ensuite progressivement plus sableuse vers le large.

Dans le chenal Nord et sur le banc d'Amfard, la sédimentation est essentiellement sableuse. n existe cependant quelques plaquages de vase.

Au Sud Est de l'entrée du Port Autonome du Havre, un ensemble vaseux se développe le long de la digue de l'avant-port. Cette vasière a une extension qui obéit à des fluctuations saisonnières encore mal connues. Le chenal du Port du Havre est soumis à une sédimentation sablo-vaseuse, qui devient franchement vaseuse dans l'avant-port où les sédiments renferment 50 à 70 % de pélites.

242 - Répartition de la fraction pélitique

Selon la situation décrite en 1978, les pélites se répartissent principalement dans trois zones (Fig. 50) :

-la vasière Nord avec des teneurs excédant 75 % dans la partie aval, et plus de 90 % en amont,

- la partie aval du banc du Ratier où il existe également un affmement vers l'intérieur de l'estuaire : de 5 à plus de 75 %,

-la zone comprise entre l'entrée du Port du Havre et le Nord du banc d'Amfard où les teneurs en pélites dépassent également 75 %.

En dehors de ces zones principales, la sédimentation vaseuse dans le port de Honfleur est un phénomène bien connu et étudié depuis longtemps. Dans ce bassin de décantation, la teneur en pélites est de l'ordre de 80 à 90 %. Plus en amont, il existe quelques placages de vase très localisés sur les berges du chenal de navigation et dans les zones de calme hydraulique situées en amont de Tancarville.

La figure 51 montre la répartition des pélites dans le système estuaire-Baie de Seine. Sur cette vision d'ensemble, il apparaît clairement qu'il n'y a pas continuité entre les différents secteurs envasés, entre l'estuaire et le proche horizon marin. En dehors des quelques secteurs vaseux précédemment décrits, la sédimentation dans l'embouchure est principalement sableuse.

(*)Relevés bathymétriques du P.A.R de 1978-1979 (données morphosédimentaires).

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Fig. 49 PROFIL BATHYMETRIQUE DANS LE CHENAL DE NAVIGATION EN 1980

E N.

LE HAVRE 1

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E3 (2 Cl 2-5

E::3 5-10 f:·:·:·l J0-25 fp.:;:i::j 25-75

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Fig. 50 -REPARTITION DES PELITES DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN 1978

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LE HAVRE

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Fig. 51· REPARTITION DES PELITES EN ESTUAIRE ET BAIE DE SEINE ORIENTALE EN 1978

1 )\/(()10 - 25

25-75

> 75

72

La zone envasée au large du Pays de Caux correspond à la dispersion des rejets de dragages du Port Autonome du Havre, le secteur envasé le long des côtes du Calvados est surtout lié à l'érosion des fonds de la baie. En ce qui concerne l'envasement observé dans l'estuaire, deux origines peuvent être invoquées: les apports fluviatiles d'une part, des apports marins d'autre part, sans qu'il soit possible de quantifier la part respective de ces deux sources dans l'état actuel des connaissances.

243 - Evolution verticale de la sédimentation

L'étude d'une soixantaine de petits carottages effectués en plongée dans la partie subtidale de l'estuaire (Fig. 52), et d'une douzaine de vibro-carottages réalisés par le Port Autonome du Havre sur la vasière Nord (Fig. 53), permet d'avoir une bonne connaissance de l'évolution verticale de la sédimentation dans l'estuaire en 1978.

Dans le chenal de navigation (Fig. 52), les dragages périodiques effectués par le Port Autonome de Rouen perturbent l'évolution naturelle de la sédimentation. De l'embouchure à la Risle, les faciès sont homogènes et consistent principalement en sables fins et sablons peu vaseux. Localement, cette sédimentation est perturbée par des dépôts vaseux, surtout dans la région de Honfleur. En amont de la Risle, les faciès sont plus grossiers, graveleux à caillouteux, témoins relictes de l'histoire quaternaire de l'estuaire.

Dans les chenaux Nord et Sud, les coupes montrent une sédimentation très variable. Plutôt sableuse dans l'axe des chenaux, elle devient alternativement sableuse et vaseuse partout ailleurs. Cette alternance se traduit par une structure litée fine, plus localement par de brusques variations de la sédimentation correspondant à des placages de vase sur des sables coquilliers et plus rarement à des ensablements sur des dépôts vaseux.

Sur la vasière Nord (Fig. 53), les variations de la sédimentation de surface se retrouvent également dans les profils (position des profils figure 52). Relativement homogènes dans la partie

· aval avec des sables fins renfermant quelques passées de vase, les faciès deviennent franchement lités en amont, et des envasements importants s'observent, ces envasements se généralisant dans la partie amont de la vasière Nord.

Dans l'ensemble de l'estuaire, la grande variabilité de la sédimentation se traduit par des alternances de faciès sableux et vaseux dans les profils verticaux. Un grand nombre de faciès et de structures sédimentaires variés s'observent (Fig. 54). Les sédiments sableux de l'embouchure et du chenal de navigation montrent des figures de transport caractéristiques: rides de courants, mégarides. Les sédiments sablo-vaseux sont généralement lités, en liaison avec les cycles de marée et l'évolution saisonnière des apports continentaux selon les variations du débit fluvial.

244 - Evolution pluriannuelle : la sédimentation estuarienne en 1994

Depuis la cartographie détaillée réalisée en 1978 (Fig. 48), on dispose de deux cartographies de l'ensemble de l'estuaire, l'une établie au début des années 90, l'autre en 1994. Ces cartes montrent que la sédimentation estuarienne a subi une évolution très importante allant dans le sens d'un envasement progressif.

g: galets

phg~: phosphogypse

0 1

0 20 E LEGENDE FIGURE 53

ECHELLE

cm~ o 10

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0 1

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Fig. 52. PROFILS SEDIMENTAIRES VERTICAUX DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE· EN 1978 (DOMAINE SUBTIDAL)

AVAL

( cole1 par rapport ou 0 CM du Havre )

G.fode 0-Qde

PELITES CoC03

o5!2)qZo5!2liiV5l

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AMONT

Fig. 53· PROFILS SEDIMENTAIRES VERTICAUX DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

(DIGUE EN CROCHET· TERRE PLEIN DE LA CIM)

LEGENDE

-Vase

~~~~ Vase sableuse

~ Sable vaseux

~ Sable vaseux coquillier

MJ~~j Sable

Skm 1

SEDIMENTS SABLEUX N ~ SABLE FIN AVEC RIDES ~ DE COURANTS

1:+-~:i~f::) SABLE FIN AVEC MEGARIDES

SEDIMENTS SABLO-VASEUX LITES

Jn00:1 FLASER BEDDING, WAVY BEDDING ET ~ · COARSELY INTERLAYERED BEDDING

~ LENTICULAR BEDDING ET THINLY ~ INTERLAYEREDBEDDING

~ GALETS DE BOUE

Fig. 54· FACIES ET STRUCTURES SEDIMENTAIRES DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN 1978

76

Une troisième cartographie détaillée concernant l'embouchure de la Seine et une partie de la Baie de Seine orientale a été publiée en 1991 par le SHOM. Elle est cependant basée sur des données recueillies dans les années 70-80 et ne sera pas considérée ici.

La figure 55 donne la répartition générale des sédiments dans l'estuaire au début des années 90, telle qu'elle a été établie par la SOGREAH (rapport 1994). Cette cartographie distingue 4 catégories de sédiments : les sables et graviers fossiles, les sables f'ms, les sables vaseux et les vases. Bien que les critères ayant prévalu à la classification granulométrique de ces différentes catégories ne soient pas déf'mis précisément dans le rapport cité, on peut néanmoins analyser cette carte à titre de comparaison avec la cartographie établie en 1978. A cette époque, on constate que les sables fins sont prépondérants dans le chenal Sud, dans l'embouchure et dans le chenal de navigation, tandis que des sédiments sablo-vaseux occupent une grande partie du chenal Nord et la partie aval du chenal de navigation. Dans le détail (SOGREAH, 1994), on observe:

. dans le chenal de navigation : -aux abords de la Risle (méridien+ 20), et à l'amont, les fonds sont constitués de sables et

graviers fossiles, -entre les méridiens+ 19 et+ 6, on a des sables fins très mobiles, - à l'aval du méridien + 6, les sédiments sont sablo-vaseux .

. dans la zone Sud : - les sédiments sont essentiellement sableux ; les sédiments fins se situant au niveau du banc

du Ratier .

. dans la zone Nord : -à l'amont d'une ligne brèche/terre-plein CIM,la vasière Nord prédomine, -à l'aval de cette même ligne, dans le chenal Nord, les sédiments sont à dominante

sablo-vaseuse à l'amont, sableuse plus à l'aval au niveau de l'embouchure (zone de dépôts de dragages du PAR).

Par rapport à la cartographie de 1978, il est important de constater qu'il y a un net envasement de la partie Nord de l'estuaire.

La figure 56 montre la répartition superficielle des sédiments de l'estuaire telle qu'elle vient d'être établie à partir de l'étude de 150 échantillons prélevés en 1993 et 1994. Cette cartographie montre un envasement très important de l'estuaire par rapport aux situations antérieures, en 1990 et surtout par rapport à 1978. La sédimentation sableuse (médiane 160 à 200 pm) est essentiellement cantonnée dans la partie Sud de l'estuaire et dans le chenal de navigation en amont de Honfleur. La partie aval du chenal de navigation (sous forme de placages superficiels), l'ensemble de la zone Nord (à l'exception de quelques bancs sableux), ainsi qu'une grande partie de l'embouchure jusqu'au banc du Ratier sont à dominante vaseuse. Réalisée quelques années après la carte SOGREAH, cette cartographie conf'mne la tendance à l'envasement constatée sur la carte établie par la SOGREAH.

En conclusion, entre 1978 et 1994, la tendance est à un envasement progressif de l'estuaire, surtout dans l'embouchure et dans la partie Nord. Les causes de cet envasement seront évoquées dans le chapitre suivant.

1 SCHEMA DE LA REPARTITION DES SEDIMENTS 1

lE t!AVRE

4~0 000

Fig. 55 • REPARTITION DES SEDIMENTS DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

(SOGREAH, 1994)

SABLES GRAVIfRS

LE HAVRE

fiB vases (> 25% de pél~es)

[jfJlJ sables vaseux (5-25 % de pél~es)

Eillffi) sables fins

[o ~'.,:., ~~ graviers et galets

Fig. 56· REPARTITION DES SEDIMENTS SUPERFICIELS DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN 1994

2km

2- 5 CONCLUSION SUR LA COUVERTURE SEDIMENTAIRE

Dans l'estuaire et la Baie de Seine, la sédimentation s'effectue dans un cadre relicte quaternaire caractérisé par des dépôts fossiles constitués d'une part de sables grossiers, de graviers et de galets, d'autre part de silts argileux en érosion sur le fond de la baie.

En Baie de Seine, les caractéristiques granulométriques moyennes des sédiments permettent de distinguer trois grands ensembles sédimentologiques: (1) un faciès grossier de sables moyens à graveleux, riche en débris coquilliers, (2) un faciès de sables fins très homogènes, largement répandu en Baie de Seine orientale et dans les embouchures des rivières, en équilibre précaire avec les agents hydrodynamiques locaux, (3) un faciès fin comportant des sablons et des pélites facilement remobilisables.

Les sédiments sableux et sablo-graveleux de la partie orientale de la Baie de Seine présentent des caractéristiques indiquant une direction générale de transport du Nord Ouest vers le Sud Est, en direction de l'estuaire de la Seine, contribuant ainsi à son comblement.

Les dépôts vaseux offrent un intérêt particulier. Ils occupent de vastes surfaces, notamment au large des côtes du Calvados et au Nord du dépôt de dragages d'Octeville. Ces dépôts sont l'objet de fluctuations saisonnières importantes, du fait de leur grande mobilité sous l'action des agents hydrodynamiques, et de la diversité des sources de matériel fin. De plus, la comparaison des cartographies sédimentaires réalisées depuis plus de 25 ans montre une tendance très nette à l'envasement.

Dans l'estuaire de la Seine, deux ensembles sédimentaires prédominent : {1) un faciès de sables fins principalement développé dans la partie Sud de l'estuaire et dans le chenal de navigation en amont de Honfleur, (2) un faciès sablo-vaseux et vaseux qui constitue une grande partie des sédiments déposés au niveau de la vasière Nord, du chenal Nord et de l'embouchure. Depuis une quinzaine d'années, la tendance est également à l'envasement, tout particulièrement dans la partie Nord de l'estuaire. Cet envasement très marqué est le fait d'apports à la fois marins et continentaux.

La grande variabilité de la sédimentation fine se retrouve dans les profils verticaux qui montrent un litage soit régulier, soit sujet à de brusques variations correspondant généralement à des envasements rapides occasionnés par les apports de crue.

En conclusion, en ce qui concerne la sédimentation dans l'ensemble Baie de Seine orientale­estuaire de la Seine, le trait marquant est l'envasement progressif observé depuis plus de 20 ans. Les causes de cet envasement sont difficiles à cerner dans l'état actuel des connaissances. Toutefois, les carottages effectués au large des côtes du Calvados ont mis en évidence l'existence de sédiments fins relictes actuellement en érosion. Cette érosion contribue certainement à l'envasement de la Baie de Seine orientale, et pour une part à l'envasement de l'estuaire, parallèlement aux apports de la Seine.

TROISIEME PARTIE

*******

CARACTERESHYDROLOGIQUES

81

III- CARACTERES HYDROLOGIQUES

3- 1 CARACTERES HYDROLOGIQUES DE L'ESTUAŒE DE LA SEINE

311 Les apports fluviatiles Le bassin versant de la Seine couvre une superficie de 74 250 km2 à l'amont de Rouen, de 78

650 km2 jusqu'à Tancarville. La pente de l'eau reste très faible, de 0,10 à 0,17 o/oo.

3111 - Le débit liquide Le débit liquide de la Seine est mesuré au niveau de l'écluse de Poses, 160 km en amont de

l'embouchure. Selon les ingénieurs du Port Autonome de Rouen, il doit être majoré d'environ 10% pour obtenir le débit effectif arrivant à l'embouchure. Les petites rivières comme la Risle qui se jettent directement dans l'estuaire jouent un rôle négligeable dans les bilans.

Plusieurs auteurs ont donné des valeurs du débit liquide moyen de la Seine, variable selon le nombre d'années et la période prise en considération :

BELLEVILLE (1889) : 485 m3/s Rouen LE FLOCH (1961): 436 m3/s à Poses VIGARIE (1964): 485 m3/s à Poses AVOINE (1981) : 400 m3/s à Poses

L'examen des débits liquides moyens annuels de 1960 à 1993 montre qu'ils sont très variables d'une année sur l'autre (Fig. 57), les extrêmes ayant été atteints en 1990 (235,2 m 3/s} et 1966 (613,6 m3/s}. Durant la période considérée, le débit moyen annuel de la Seine à Poses a été de 418 m 3/s, soit environ 460m3/sen débit majoré.

Les débits instantanés extrêmes ont été évalués par plusieurs auteurs. Le débit maximal connu serait de 2800 m3/s selon Vigarié (1964). Le Floch (1961) signale des crues de plus de 2000 m3/s en 1910, 1920 et 1950. Lors des très forts étiages, le débit s'abaisse considérablement, jusqu'à 40m3/sen Août 1992 (Service de la Navigation de la Seine).

3112- Le débit solide S'il est assez facile de calculer le débit liquide d'un fleuve, il est beaucoup plus difficile

d'évaluer la quantité de sédiments en suspension qu'il transporte. Plusieurs estimations des apports de la Seine ont été proposées (Avoine, 1981)., Pour Vigarié (1965), la charge maximale transportée annuellement en aval de Rouen est de 1,1 nûllion de tonnes. Avoine (1981) a évalué la charge solide de la Seine à partir de 120 mesures effectuées périodiquement de 1960 à 1978 dans le déversoir de Poses. Une corrélation assez bonne existe entre le débit fluvial et la charge en matières en suspension, qui a permis de calculer le débit solide journalier à Poses. Les apports journaliers de matières en suspension par la Seine peuvent atteindre 10000 à 20000 tonnes en crue, alors qu'ils ne dépassent pas quelques centaines de tonnes en étiage. Les apports annuels varient dans de larges proportions. Pour la période allant de 1972 à 1978, le débit solide moyen annuel à Poses peut être estimé à 0,5 million de tonnes, avec une fourchette allant de 0,2 million de tonnes en 1976 à 1 million de tonnes en 1978.

Un suivi quotidien des variations des débits liquide et solide à Poses a permis de préciser la relation existant entre les deux paramètres (Avoine, 1986). Au cours de ce suivi, les concentrations en matières en suspension ont varié de 3,3 mg/1 à 267 mg/1. L'ensemble des résultats, au total 750 mesures, et les débits liquides correspondant sont reportés sur la figure 59. Malgré une certaine dispersion des valeurs, une relation évidente existe entre les deux paramètres.

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Fig. 59- RELATION ENTRE LA CHARGE SOLIDE ET LE DEBIT FLUVIAL A POSES Mesures de décembre 1982 à décembre 1984

84

Une observation approfondie montre que la charge solide atteint un maximum durant la phase ascendante des crues, comparativement à celle anormalement faible mesurée durant les maxima de débit et lors des phases descendantes des crues.

En faisant abstraction de ces dernières valeurs, la relation entre la charge solide Cs et le débit fluvial Q est une droite dont l'expression dans une échelle logarithmique est :

Cs (à Poses) = 0, 001 . Q1,66

Le Service de Navigation de la Seine (Cellule anti-pollution) donne une formule voisine utilisable parallèlement à la précédente :

Cs (à Poses)= 0,0344 Q + 7,797

Afin de préciser la relation entre la concentration en MES et le débit liquide durant les crues, la figure 60 donne à titre d'exemple les courbes individuelles correspondant aux crues successives de l'hiver 1982-83. Ces courbes forment dans les trois cas une boucle d'hystérésis, la charge solide maximale précédant le maximum de débit liquide. Par ailleurs, les plus fortes concentrations se rencontrent lors de la première crue, après une longue période de faible débit. Lors des crues suivantes, les teneurs en MES sont beaucoup plus faibles, d'autant plus que l'intervalle séparant deux crues successives est court. Le phénomène d'hystérésis caractérise un apport de particules correspondant à un épuisement total du stock sédimentaire disponible en quelques jours au début des crues. La reconstitution de ce stock demande du temps et, s'il y a plusieurs crues successives, le matériel épuisé ne se réaccumule pas. Ainsi la charge solide reste-t-elle faible, même si le débit liquide est important.

Compte tenu de l'existence d'hystérésis entre la charge solide et le débit liquide lors des crues, le calcul du débit solide à partir des relations ci-dessus est source d'imprécisions. Les brusques variations ne peuvent être mises en évidence que par un suivi très serré dans le temps. Pour la période 1983-84 qui a fait l'objet de mesures quotidiennes, les valeurs extrêmes ont été de 33900 t/j en crue et de 63 t/j en étiage pour des concentrations en MES de 267 mg/1 et 3,3 mg/1 respectivement. Il apparaît également que 75 % des apports de la Seine se produisent en période de crue. Les apports solides durant la phase ascendante des crues représentent à eux seuls 50 % des apports annuels en 20 jours. Le total annuel mesuré et calculé à Poses est de 1,01 million de tonnes de l'hiver 1982 au début de l'hiver 1983, et de 0,53 million de tonnes l'année suivante. Ces résultats comparés à ceux donnés précédemment (0,5 million de tonnes par an; Avoine, 1981) ne montrent pas de divergence importante.

En appliquant les formules de calcul à la période 1960-1993, on constate que les débits solides annuels sont très variables d'une année sur l'autre (Fig. 58), allant d'un minimum de 0,13 million de tonnes en 1976 à un maximum de 1,73 million de tonnes en 1966. Le débit solide annuel moyen calculé durant la même période est de 0, 645 million de tonnes.

312 Les salinités dans l'estuaire : mélange eau douce-eau salée

3121- Généralités Les modalités de dilution des eaux de mer par les eaux douces conditionnent étroitement les

phénomènes hydrologiques dans un estuaire. Le mélange eau douce-eau salée entraîne l'établissement de gradients de salinité longitudinaux, verticaux et latéraux. L'ampleur de ces gradients et de leurs variations en fonction des marées et du débit fluvial induisent des circulations estuariennes variables dans le temps et l'espace.

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5/4

DEBIT

Fig. 60 ·RELATION ENTRE LA CHARGE SOLIDE ET LE DEBIT FLUVIAL A POSES, DURANT LES TROIS CRUES DE L'HIVER 1982-83

86

Deux paramètres de base sont prépondérants, le volume d'eau n introduit par la marée, le débit fluvial Qfl. Plus le rapport .0/Qfl est petit, plus le mélange eau douce-eau salée est faible et par conséquent plus les gradients de salinité sont élevés. Ceux-ci sont donc maxima en période de crue et de mortes eaux. En plaçant l'estuaire de la Seine dans un diagramme d'évolution de la valeur du rapport volume de la marée/débit fluvial en fonction des variations du débit fluvial (Fig. 61), on constate que l'estuaire peut être tour à tour très stratifié, avec un coin salé près du fond, ou à l'inverse très homogène sans gradient vertical de salinité. Ces variations importantes dans le mélange des eaux auront des conséquences notables sur la circulation estuarienne et ses implications sédimentologiques. Comparé à deux autres estuaires de la côte Atlantique comme la Gironde et l'Aulne, l'estuaire de la Seine apparaît comme le plus stratifié des trois en débit moyen.

Dans un estuaire, il est important de connaître avec précision la répartition et les caractéristiques de l'intrusion saline et de la stratification des eaux. En un point donné de l'estuaire, la salinité varie classiquement selon trois échelles de temps : au cours d'un cycle de marée (12h30 en moyenne), durant les cycles bimensuels vives eaux-mortes eaux, et selon les variations saisonnières du débit fluvial.

3122- Les données disponibles Les principales données hydrologiques disponibles sur l'estuaire de la Seine ont été acquises

dans le cadre des travaux du Schéma d'Aptitude et d'Utilisation de la Mer de l'estuaire de la Seine de 1977 à 1979 (Avoine, 1981), complétées dans les années 80 par quelques informations à caractère ponctuel. On dispose ainsi de données correspondant à deux approches complémentaires, pour différentes conditions de marée et de débit fluvial:

- mesures au niveau de stations en point fixe pendant un cycle complet de marée semi­diurne, réparties dans tout l'estuaire,

-mesures acquises le long de profils instantanés réalisés aux étales de pleine mer et de basse mer (coupes synoptiques).

Les mesures en point fixe permettent de mettre en évidence les variations locales de la salinité au cours de la marée, indépendamment des variations à plus longue échelle dues aux cycles vives eaux-mortes eaux et à l'évolution saisonnière du débit fluvial.

A titre d'exemple, la figure 62 montre l'évolution de la salinité au cours d'une marée, dans les eaux de surface et de fond, parallèlement à l'évolution des vitesses de courants aux mêmes profondeurs, en deux points situés respeCtivement en aval (bouée 20 du chenal de Rouen) et en amont de Honfleur (bouée 26). A la bouée 20, dans des conditions de mortes eaux et de faible débit fluvial, les variations de salinités au cours de la marée sont très importantes. Il faut également noter la très faible stratification des eaux, la différence entre surface et fond ne dépassant pas 1 o/oo. A la bouée 26, seulement distante de 6 km du point précédent, les caractères hydrologiques sont très différents. La stratification des eaux y est très importante, la différence de salinité surface-fond atteignant jusqu'à 13 à 14 o/oo. Les mesures de courants faites parallèlement indiquent que l'eau salée forme sur le fond une lentille d'eau peu mobile où la salinité reste très stable au cours de la marée avec des vitesses de courants assez faibles ne dépassant pas 40 cm/s. Au-dessus s'écoule une eau presque douce avec des vitesses pouvant dépasser 1,40 rn/s. Cet exemple montre bien que localement la salinité est extrêmement variable à une échelle de temps très courte.

Les profils instantanés, permettent de caractériser la stratification saline des eaux et surtout la pénétration maximale et minimale de l'intrusion saline en regard des variations de la marée et du débit fluvial.

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Fig. 61- VARIATION DU RAPPORTn/Qfl EN FONCTION DU DEBIT FLUVIAL

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Fig. 62 • EVOLUTION DE LA SALINITE ET DES COURANTS AU COURS D'UNE MAREE

89

La figure 63 montre des exemples-types dans différentes conditions de marée et de débit fluvial. En marée de vives eaux, l'estuaire de la Seine est généralement peu à pas stratifié par faible débit fluvial. En période de crue par contre, la stratification saline est plus importante, surtout dans la partie aval de l'estuaire. Le déplacement du front de salinité, limite extrême de l'influence des eaux marines définie par la valeur de salinité 0,5 o/oo est de l'ordre de 20 km au cours de la marée quel que soit le débit fluvial. A ce déplacement semi-diume se superpose un déplacement saisonnier lié au débit fluvial de l'ordre de 15 km. En marée de mortes eaux, les eaux sont beaucoup plus stratifiées qu'en vives eaux, particulièrement au moment de la basse mer et surtout en crue où les courbes d'isosalinité (isohalines) sont presque à l'horizontale. Il existe dans ces conditions un coin salé très net, les eaux douces de surface coulant sur des eaux de fond franchement salées Gusqu'à 32 %o de différence de salinité entre surface et fond). Le déplacement de l'intrusion saline au cours de la marée est de l'ordre de 10 km quel que soit le débit fluvial. A ce déplacement semi-diume se superpose comme en vives eaux un déplacement saisonnier de 13 à 14km.

En ce qui concerne le mélange eau douce-eau salée dans l'estuaire, l'ensemble des données actuellement disponibles permet de dégager les principales caractéristiques suivantes :

- les salinités varient considérablement d'aval en amont au cours de la marée. Les variations de salinité au cours de la marée suivent généralement les variations courantologiques, avec un maximum à l'étale de pleine mer et un minimum à basse mer. Les phénomènes observés sont décalés vers l'amont en période d'étiage en raison de la remontée de l'intrusion saline.

- dans tout l'estuaire, la stratification est relativement bien marquée en vives eaux, surtout en période de crue. En mortes eaux, les eaux sont très stratifiées en crue, alors qu'en période d'étiage les variations de salinité sont très faibles de la surface au fond, hormis le cas particulier décrit ci-dessus à la bouée 26.

- la pénétration de l'intrusion saline au cours du flot se fait sous la forme d'un coin salé. en crue, et en masse sur toute la tranche d'eau en étiage. Il existe un décalage entre la marée dynamique et la marée saline, de plus en plus important vers l'amont, qui peut atteindre une heure.

3123 - Synthèse des données sur le mélange eau douce-eau salée

A- Gradient longitudinal de salinité dans l'estuaire Le gradient longitudinal de salinité matérialise l'étendue de l'intrusion saline. D'une manière

générale, il varie au cours de la marée, les isohalines se resserrant fortement durant le jusant et se dilatant au cours du flot (Avoine, 1981). La figure 64 montre l'évolution de la salinité moyenne dans le chenal de navigation. Il apparaît que le gradient longitudinal moyen de salinité est plus important en vives eaux qu'en mortes eaux. L'écartement entre les isohalines 0,5 et 10 o/oo en particulier est de 17 à 21 km en vives eaux, et seulement de 10 à 11 km en mortes eaux. La limite du front de salinité moyen est fonction du débit fluvial. C'est particulièrement net en vives eaux où la remontée du front de salinité est de l'ordre de 14 km entre une période de forte crue et une période d'étiage.

B- Salinités maximales et minimales dans l'estuaire L'ensemble des mesures obtenues dans les études SAUM de 1977 à 1979 a permis d'établir

un graphique des salinités extrêmes observées (Fig. 65). Il ressort que dans tout l'estuaire, la salinité varie dans des proportions considérables, sachant que dans certains cas, l'estuaire endigué se trouve entièrement en eau douce, que les eaux sont toujours douces en surface en amont du PK 330, et au fond en amont de Vieux Port.

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Fig. 63 ·PROFILS DE SALINITE INSTANTANES DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

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Fig. 64- EVOLUTION DE LA SALINITE MOYENNE DANS LE CHENAL DE NAVIGATION

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x Voleurs extrêmes.

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\ \ \ \

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\ \ \ \ \ \ \

PK Vieux-Port

Fig. 65 ·SALINITES MAXIMALES ET MINIMALES OBSERVEES EN SURFACE ET AU FOND DANS LE CHENAL DE NAVIGATION

(Années 1977-1980)

93

Les données acquises ultérieurement aux travaux du SAUM confirment ces tendances générales, l'estuaire étant à l'heure actuelle sensiblement moins salé qu'il ne l'était il y a 15 ans, compte tenu de la réduction du volume de l'estuaire qui induit une influence marine moindre.

En un point donné de l'estuaire, comme le montre la figure 65, les salinités maximales sont plus élevées en vives eaux qu'en mortes eaux. L'augmentation du marnage provoque une augmentation parallèle de la salinité en introduisant un volume d'eau marine plus important pendant le flot. Les forts débits fluviaux contrebalancent cet effet en repoussant les eaux salées vers l'aval. Les salinités minimales montrent un schéma inverse, elles sont en général plus élevées en mortes eaux qu'en vives eaux.

C- Positions limites du front de salinité Les mesures du SAUM permettent de situer les positions extrêmes du front de salinité

(limite à 0,5 o/oo) en fonction du débit fluvial et du coefficient de marée (Fig. 66). Il apparaît que le déplacement longitudinal entre la basse mer et la pleine mer est surtout fonction du coefficient de marée. En vives eaux il est de 23 km en étiage et de 26 à 30 km en crue, alors qu'en mortes eaux il n'est que de 12 à 14 km en étiage et de 12 km en crue. Le mouvement de va-et-vient des eaux saumâtres reste donc important en vives eaux quel que soit le débit fluvial, ce qui est une caractéristique de l'estuaire de la Seine qu'on ne retrouve pas dans d'autres estuaires français comme la Loire.

D- Répartition latérale des salinités dans l'estuaire aval On dispose de très peu de données sur la répartition des salinités dans l'ensemble de

l'estuaire, en dehors des études du SAUM en 1977-79, pour lequel existent uniquement des mesures réalisées en période d'étiage lorsque l'influence fluviatile reste modérée.

La figure 67 montre la répartition des salinités dans les trois chenaux de l'estuaire aval, dans des conditions de basse mer de vives eaux, en période d'étiage. Le chenal de navigation apparaît nettement moins salé que les chenaux adjacents, conséquence de la canalisation des apports d'eau douce dans le chenal endigué. A l'opposé, l'influence des eaux marines se fait nettement sentir dans les chenaux Nord et Sud, même à basse mer. Le chenal Sud présente un caractère marin très marqué, les eaux y restant très salées durant toute la marée, tout au moins dans des conditions de débit fluvial faible. A pleine mer, on ne dispose pas de données aussi précises, mais il ressort que les salinités sont plus élevées et plus homogènes dans l'ensemble de l'estuaire, compte tenu de l'influence marine importante en période d'étiage.

E -Evolution de la position du front de salinité depuis 40 ans Une somme importante d'informations a été recueillie depuis 1955 par le Service de

Navigation de la Seine, lors des remontées en Seine effectuées bimestriellement à basse mer en marée de coefficient moyen. Ces données ont permis d'établir un graphique de l'évolution des positions moyennes et extrêmes du front de salinité au cours des 40 dernières années (Lejeune, 1993 et figure 68).

Les positions moyennes La position moyenne de la limite de l'intrusion saline a migré progressivement vers l'aval de

1955 à 1978 (Fig. 68). Jusqu'à l'ouverture du nouveau chenal de navigation de la Seine en 1959, cette limite se situait à basse mer en amont de Caudebec, entre les PK 280 et 300. En 1962-63, elle se trouvait vers le PK 338. Entre 1965 et 1978, l'évolution a été plus lente, sa limite se situant en 1978 vers le PK 351. Durant l'étiage exceptionnel de l'année 1976, l'intrusion saline est cependant remontée très loin en amont (PK 339), plus de 11 km par rapport à sa position antérieure. Depuis 1979, cette tendance globale se trouve freinée, voire renversée.

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Fig. 66 ·LIMITES AMONT-AVAL DE L'INTRUSION SALINE (FRONT DE SALINITE A 0,5°/oo EN FONCTION DE DEBIT FLUVIAL

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Fig. 67 • REPARTITION DES SALINITES DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

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Fig. 68- MIG-RA nON AMONT-AVAL DU FRONT DE SALINITE DE 1955 A 1993

Marée moyenne- position à basse mer

97

La position moyenne du front de salinité a migré progressivement vers l'amont, pour se situer en 1993 au PK 344, soit 7 km en amont de la position de 1979. Durant les années sèches 1990 et 1991, l'intrusion saline a même migré vers l'amont dans une position plus interne qu'en 1976 (PK 337). Il est également remarquable de constater que depuis 1989, la limite amont du front de salinité est située dans une position plus amont que celle des années 1963-64.

La migration progressive vers l'aval de 1955 à 1978 est liée à la modification de la dynamique estuarienne consécutive à l'endiguement du chenal de navigation de la Seine et au comblement progressif de l'estuaire, qui ont entraîné la canalisation du débit fluvial dans une section réduite par des digues et la diminution du volume oscillant. Ces modifications ont induit au cours du temps un accroissement très important de l'effet de chasse. Cet indice, égal au débit fluvial divisé par la section de l'écoulement, est caractéristique de la capacité du fleuve à empêcher la pénétration des eaux marines dans l'estuaire (Avoine et al., 1981). Cet accroissement sufrrrait à expliquer la migration vers l'aval de l'intrusion saline. Le renversement de tendance observé depuis le début des années 80 est à mettre en relation avec l'accroissement relatif de la section de l'écoulement dans le chenal de navigation, consécutivement à son approfondissement, jusqu'à 2 à 3 mètres entre 1978 et 1992 (cf. figure 16), et depuis 1989 avec la diminution des débits moyens annuels au-dessous de la moyenne trentennale .

Les positions extrêmes Les positions extrêmes sont également représentatives de la tendance générale. Les positions

les plus en amont dans l'estuaire suivent l'évolution des positions moyennes (Fig. 68), avec des minima accentués lors des années 1976 (pk 323), 1984 (pk 329), 1990 (pk 322) et 1991 (pk 329). Ces minima sont directement en relation avec les débits d'étiage importants observées au cours de ces années sèches, qui induisent une forte remontée des eaux marines en amont de l'estuaire. Les positions les plus en aval concordent également avec les tendances générales de l'évolution. Les années à fort débit fluvial coïncident avec une faible remontée de l'intrusion saline dans l'estuaire, ce qui est tout à fait normal dans la mesure où les débits de crue repoussent les eaux salées en mer. Le calcul de la position aval extrême est même impossible pour certaines années, la salinité

· mesurée restant inférieure dans tout l'estuaire Gusqu'à Honfleur en aval) à la limite retenue, en corrélation étroite avec des apports d'eau douce importants qui refoulent les eaux salées à l'aval de Honfleur. Depuis 1989, la position extrême aval est située beaucoup plus en amont que les années antérieures, consécutivement à la diminution des débits moyens annuels.

313 Les températures dans l'estuaire

Les études SAUM, entreprises durant la période allant de décembre 1977 à juin 1979, permettent de se faire une idée générale de l'évolution des températures dans l'estuaire au cours de l'année. Ce paramètre n'a pas subi d'évolution significative depuis lors. Les températures des eaux de l'estuaire de la Seine varient annuellement entre 3,8 oc et 21,5 °C.

Il existe une opposition très marquée des régimes été-hiver (Fig. 69). Les eaux de l'estuaire sont plus froides que celle de la mer en hiver (4 °C contre 6 °C). Les températures s'équilibrent en février-mars aux alentours de 6,5 °C. En été, les eaux fluviales sont plus chaudes que celles de la mer (18 à 21,5 oc contre 17 °C). La différence est de 6 oc en juin et encore de 4 oc en août. Un nouvel équilibre s'instaure en novembre (12,5 °C), puis les eaux de la Seine se refroidissent plus vite que les eaux marines. En ce qui concerne la stratification thermique verticale, elle reflète étroitement la stratification saline des eaux. Les eaux salées étant situées préférentiellement au fond et les eaux douces fluviales en surface, les eaux du fond sont plus chaudes que les eaux de surface en hiver Gusqu'à 1,5 oc de différence surface-fond), et inversement en été Gusqu'à 3,2 oc de différence).

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Fig. 69 • PROFILS DE TEMPERATURE A PM DANS LE CHENAL DE NAVIGATION

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99

Les variations du débit fluvial et les cycles de marée conditionnent la stratification saline et par conséquent la stratification des températures. D'une manière générale, les eaux sont bien stratifiées en crue quel que soit le coefficient, alors qu'en étiage les eaux sont stratifiées uniquement en mortes eaux (Fig. 70 A). Au cours de la marée, les gradients de température sont maxima durant l'étale de basse mer, et minima à pleine mer (Fig. 70 B).

3- 2 INFLUENCE DES APPORTS FLUVIATILES EN BAIE DE SEINE

L'impact des eaux douces dans le secteur oriental de la Baie de Seine est particulièrement net en période de crue (Fig. 71). Il se produit alors des écoulements d'eau dessalée selon deux directions distinctes, vers l'Ouest d'une part, vers le Nord d'autre part où l'influence de la Seine se fait sentir jusqu'aux limites de la baie en Manche orientale. Les mesures réalisées dans le cadre du Réseau National d'Observation (Guillaud, 1978) et dans une étude de la partie nord-orientale de la baie (Crevel, 1983) ont montré que la stratification des eaux est importante en toutes saisons au débouché de la Seine et plus au large. Les gradients de salinité sont cependant plus intenses en période de crue. Une étude par modèle numérique a montré que les gradients de densité, liés à la stratification saline, induisent une circulation résiduelle inversée en surface et en profondeur, dirigée vers l'estuaire au fond, vers le large en surface (Le Hir, 1980 ; Le Hir et al., 1986). Cette configuration qui se rapproche d'une situation estuarienne a été conïmnée par des mesures de courants (Le Hir et L'Yavanc, 1986).

A l'échelle de l'ensemble de la Baie de Seine, les données hydrologiques disponibles dans différentes conditions de marée et de débit fluvial mettent en évidence deux domaines bien différenciés par la répartition des salinités (Fig. 72). La partie occidentale de la baie présente un caractère franchement marin, marqué par la pénétration importante des eaux de la Manche, et où la circulation des eaux est dominée par l'existence d'un tourbillon résiduel de marée créé par la presqu'île du Cotentin (Le Hir et L'Yavanc, 1986; Le Hir et al.., 1986). La partie orientale, où sont localisées les principales rivières dominées par la Seine, est soumise à l'influence directe des

·apports fluviatiles, à l'origine d'une stratification saline des eaux engendrant une circulation résiduelle de densité.

En prenant en compte différents paramètres caractéristiques du mélange des eaux marines et fluviales, tels la salinité et la teneur en nitrates d'origine continentale, on peut proposer une zonation hydrologique de la Baie de Seine en quatre secteurs bien individualisés (Fig. 73), dont les limites fluctuent dans le temps en fonction de la variabilité du forçage hydrodynamique. On peut distinguer ainsi :

-une zone à caractère franchement marin au Nord Ouest (eaux de la Manche), -une zone de transition Sud-Ouest, - une zone de transition centrale, - une zone d'extension estuarienne dans la partie orientale de la baie, sous l'influence directe

des apports de la Seine.

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Fig. 70- EVOLUTION LONGITUDINALE DE LA TEMPERATURE DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

(comparaison VE-ME et PM-BM)

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l MARS 1982

Fig. 71 ·IMPACTS DES APPORTS D'EAU DOUCE SUR LA SALINITE DES EAUX DE SURFACE DANS LA PARTIE ORIENTALE DE LA BAIE DE SEINE

MAREE DE VIVES-EAUX, BASSE MER, PERIODE DE CRUE ET D'ETIAGE

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SEPTEMBRE 1981

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Fig. 72 ·REPARTITION DES SALINITES A BASSE MER EN PERIODE DE CRUE ET MAREE DE VIVES EAUX

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Fig. 73 ·ZONATION HYDROLOGIQUE DE LA BAIE DE SEINE

103

3- 3 CONCLUSION SUR LES CARACTERES HYDROLOGIQUES

Les apports liquides moyens à l'estuaire ont été évalués à 460 m 3/s pour les 35 dernières années, les apports solides moyens annuels à Poses à 0, 645 million de tonnes. Le débit fluvial et les marées jouent un rôle essentiel dans les processus de mélange eau douce-eau salée et sur la dynamique estuarienne qui en résulte. Dans l'estuaire, la salinité varie selon trois échelles de temps: la marée semi-diume, le cycle de marée vives eaux-mortes eaux, le cycle saisonnier du débit fluvial. L'intrusion saline est définie par trois gradients perpendiculaires :

- un gradient longitudinal qui caractérise l'étendue de l'intrusion saline dans l'estuaire. La limite du front de salinité oscille au cours de la marée, de l'ordre de 20 à 30 km en vives eaux, de 10 km en mortes eaux, quel que soit le débit fluvial. Les variations du débit liquide font remonter la position moyenne du front salé d'une quinzaine de kilomètres entre la crue et l'étiage.

-un gradient vertical qui reflète le mélange des eaux douces et marines. L'estuaire aval et l'embouchure apparaissent comme très stratifiés d'une manière générale, surtout en crue et en mortes eaux. Cette stratification s'atténue rapidement dans l'estuaire amont.

- un gradient transversal encore mal connu. Les seules données existantes concernent l'embouchure où les trois chenaux présentent des régimes de salinité distincts, le chenal Sud conservant des caractères marins très marqués.

Depuis une quarantaine d'années au moins, selon les données disponibles, la limite amont de l'intrusion saline a migré progressivement vers l'aval de 1955 à 1978, en liaison avec la modification de la dynamique estuarienne consécutive à l'endiguement du chenal de navigation de la Seine et au comblement progressif de l'estuaire. Depuis 1979, cette tendance globale se trouve freinée, voire renversée, sans doute en relation avec l'accroissement relatif de la section de l'écoulement dans le chenal de navigation consécutif à son approfondissement, et depuis 1989 avec la diminution des débits moyens annuels au-dessous de la moyenne trentennale .

Les eaux douces apportées par la Seine ont une influence très notable sur la salinité des eaux de la Baie de Seine orientale. Celles-ci montrent des dessalures importantes durant les périodes de crue se traduisant par une exportation d'eau estuarienne en Manche orientale.

QUATRIEME PARTIE

*******

DYNAMIQUE SEDIMENTAIRE

105

IV- DYNAMIQUE DANS L'ESTUAffiE ET EN BAIE DE SEINE

L'étude de la nature sédimentologique des fonds sous-marins et des caractéristiques hydrologiques du milieu sert de base à la description des corrélations entre les agents hydrodynamiques et les mouvements sédimentaires. Une approche théorique de ces mouvements sédimentaires peut être proposée en prenant uniquement en compte les caractéristiques granulométriques des sédiments déposés. La couverture sédimentaire obtenue en 1978 (Fig. 48) a été utilisée pour rendre compte des modes de transport possibles des sédiments de l'estuaire et de la Baie de Seine orientale, en utilisant le diagramme de Passega (Avoine, 1981). La cartographie des modes de transport (Fig. 74) montre que dans la partie orientale de la Baie de Seine, à dominante sableuse, l'essentiel des mouvements sédimentaires s'effectue par charriage, à l'exception des zones envasées. Dans l'embouchure de la Seine, les sédiments se déplacent principalement sous forme de suspensions graduées (saltation), tandis que dans la plus grande partie de l'estuaire, l'essentiel des transports s'effectue en suspension, s'agissant de matériel très fin, sablo-vaseux, facilement remanié par les courants de marée. La même méthode employée pour la cartographie sédimentaire réalisée en 1994 conrmnerait la prépondérance des transports en suspension dans l'ensemble de l'estuaire, du fait de l'envasement généralisé constaté entre 1978 et 1994.

4- 1 DYNAMIQUE SEDIMENT AIRE DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

411 - Le phénomène du bouchon vaseux Les nombreuses études entreprises dans les milieux estuariens ont montré l'existence quasi­

générale d'une zone de concentration de matériaux fins en suspension, formant un bouchon vaseux. Cette zone de turbidité maximale se localise le plus souvent dans la partie amont de l'intrusion saline, aux alentours du front de salinité. Sa charge en matières en suspension peut atteindre jusqu'à 1000 fois les charges observées en amont ou en aval de l'estuaire. Un bouchon vaseux bien développé existe dans l'estuaire de la Seine, dont les principales caractéristiques ont été décrites à l'issue des études importantes réalisées dans le cadre du SAUM (Avoine, 1981),

. complétées par un certain nombre d'études ultérieures à caractère moins systématique. Compte tenu de l'évolution de l'estuaire depuis le début des années 80, certaines de ces caractéristiques ont été modifiées, toutefois les données disponibles ne permettent pas de décrire avec précision l'ensemble des modifications observées.

4111 Evolution du bouchon vaseux au cours d'un cycle de marée Dans l'estuaire de la Seine, le bouchon vaseux n'est pas une masse homogène constante dans

le temps. Il se produit des phénomènes de gonflement et de dégonflement directement liés aux courants de marée qui remettent les sédiments du fond en suspension quand leur vitesse est suffisante. L'examen des courbes de variation de la charge en matières en suspension, enregistrées en six points de mesures simultanés dans l'estuaire, permet de décrire la variabilité du phénomène dans le chenal de navigation de la Seine, en parallèle avec l'oscillation des isohalines. Les figures 75 et 76 montrent deux exemples caractéristiques de l'évolution du bouchon vaseux au cours de la marée, en vives eaux et en mortes eaux.

La figure 75 représente l'évolution du bouchon vaseux heure par heure au cours d'une marée de vives eaux, en période d'étiage. Les heures de référence sont celles de la marée au Havre.

A BM et BM + 1, le bouchon vaseux est développé sur toute la tranche d'eau depuis l'extrémité aval des digues jusqu'au confluent de la Risle, avec des concentrations en matières en suspensions (MES) supérieures à 1g/l. Cette masse turbide ne sort pas de l'estuaire dans ces conditions de débit étant donné l'existence de courants de flot bien établis à l'aval de l'extrémité des digues.

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Fig. 76 - EVOLUTION DU BOUCHON VASEUX DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE AU COURS D'UNE MAREE DE MORTES EAUX, EN ETIAGE

..

109

A BM + 2, le coup de flot dans l'estuaire aval introduit une grande quantité d'eau de mer et le bouchon vaseux est en partie dilué. Il progresse peu vers l'amont, bloqué par le jusant finissant dans l'estuaire amont.

A BM + 3, le flot est généralisé et les remises en suspension sont très importantes. Le bouchon vaseux migre partiellement vers l'amont, parallèlement les sédiments de fond sont remis en suspension à la hauteur de Quillebeuf quand les courants dépassent 1 rn/s.

A BM + 4, il n'y a plus qu'un seul bouchon vaseux de Honfleur à Quillebeuf, soit sur plus de 25 km. La partie aval du bouchon vaseux continue de migrer vers l'amont, les turbidités sont élevées, supérieures à 1 g/1.

A PM, les vitesses de courant diminuent fortement et le bouchon vaseux commence à se décanter.

De PM à PM+ 2, le flot finissant repousse le noyau turbide très en amont, entre Quillebeuf et Vieux-Port.

A PM + 3, le jusant est généralisé dans l'estuaire mais les vitesses restent inférieures à 60 crn/s, le bouchon vaseux continue de se décanter, la charge en MES ne dépasse pas 0,2 g/1.

A PM + 4, les vitesses de courant élevées remettent les sédiments du fond en suspension, donnant deux bouchons vaseux très turbides, l'un dans l'estuaire aval, l'autre dans l'estuaire amont.

A PM 5, le bouchon vaseux, unique, s'étend sur plus de 30 km et occupe toute la tranche d'eau.

A PM+ 6 (BM-1), il existe de nouveau deux bouchons vaseux séparés, l'un dans l'estuaire aval, l'autre à la hauteur de Tancarville-Quillebeuf. Le bouchon vaseux aval est déjà bloqué à

·rintérieur de l'estuaire par le flot naissant à l'extérieur de l'estuaire.

A BM, la masse turbide amont a migré vers l'aval pour ne plus former qu'un seul bouchon vaseux dans l'estuaire aval, seul subsiste un petit noyau très turbide à la hauteur de Quillebeuf, en eau douce.

Il apparaît donc que le bouchon vaseux n'est pas une masse homogène qui oscille au gré des marées. Il se produit des phénomènes de gonflement et de dégonflement directement liés aux courants de marée qui remettent les sédiments du fond en suspension lorsque leur vitesse est suffisante. Ainsi, des masses turbides se développent là où les fonds sont sablo-vaseux, même en eau douce. Cette évolution cyclique calquée sur celle des courants est accompagnée d'un mouvement de va-et-vient au cours de la marée.

Des précisions peuvent être apportées en quantifiant la masse totale de sédiments en suspension, heure par heure (Avoine, 1981). Cette masse varie de manière considérable au cours de la marée, d'un facteur 15: ·

Heure de la marée au Havre

PM 213 200 PM+ 1 PM+2 PM+3 PM+4 335 300 PM+5 250 400 PM+6 BM 173 300 BM+1 BM+2 BM+3 BM+4

110

Masse de sédiments en suspension (t)

104 200 63 600 29 800

223 400

261400 212 300 430 400 298 500

Durant l'étale de pleine mer (PM+ 3 par rapport à la pleine mer du Havre), l'estuaire est très faiblement turbide. Si l'étale se poursuivait, il y aurait disparition quasi-complète des MES par sédimentation. La décantation reste faible durant la courte étale de basse mer. La remise en suspension maximale est provoquée par le brusque coup de flot (à BM + 3), les charges transportées sont plus importantes qu'au jusant.

Les processus sédimentologiques sont principalement contrôlés par le cycle vives eaux­mortes eaux. Le bouchon vaseux est en effet particulièrement bien développé en marée de vives eaux comme le montre la figure 75. En marée de mortes eaux par contre (Figures 76 et 77), les vitesses de courants de marée dépassent rarement 0,50 rn/s, les remises en suspension sont réduites, les charges en MES restent faibles, inférieures à 0,5 g/1. La masse totale moyenne en suspension ne dépasse alors pas 20 000 tonnes, contre 100 à 200 000 tonnes en vives eaux.

Les variations du débit fluvial jouent également un rôle important dans la dynamique des sédiments fins, en particulier dans l'extension du bouchon vaseux. La masse totale de sédiments en suspension décroît lorsque le débit fluvial augmente, malgré l'accroissement parallèle des apports fluviatiles (Fig. 77). Cela provient du fait qu'en crue, une partie du bouchon vaseux est expulsée de l'estuaire à basse mer, comme il sera décrit plus loin.

En conclusion, il apparaît bien que la remise en suspension des sédiments de l'estuaire par les courants de marée est à l'origine du bouchon vaseux, dont la charge en MES est d'autant plus importante que les vitesses de courants, et donc les coefficients de marée, sont élevés. La figure 78 représente l'évolution schématique de ce bouchon vaseux au cours de cycles de marée en vives eaux et en mortes eaux, tels ceux décrits figures 75 et 76. De fortes remises en suspension ont lieu en marée de vives eaux au cours du flot et du jusant, parfois très en amont de l'intrusion saline. Une grande partie des suspensions se décante durant l'étale de pleine mer de telle sorte que le bouchon vaseux disparaît presque totalement, phénomène qui montre bien qu'il est étroitement lié aux remises en suspension. Au cours du cycle de marée semi-diume,la masse totale de MES varie dans un rapport de 1 à 10 environ entre la pleine mer et le maximum de turbidité au cours du flot. Cette évolution cyclique s'accompagne d'un mouvement amont-aval d'une vingtaine de kilomètres.

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TENEURS EN MATIERES EN SUSPENSION EN G/ L , ..... , ...... ••••• 0 ...... . . . . . .

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Fig. n- LE BOUCHON VASEUX DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

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Fig. 78- EVOLUTION SCHEMATIQUE DU BOUCHON VASEUX AU COURS DE LA MAREE

EN VIVES EAUX ET MORTES EAUX

HAUTEURS D'EAU

VITESSE DES COURANTS

CHARGES EN M.E.S.

ESTUAIRE AV AL ESTUAIRE MOYEN ESTUAIRE AMONT RIVIERE AVAL

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J 111 TRANSPORT SOLIDE

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Fig. 79- EVOLUTION SCHEMATIQUE DES PRINCIPAUX PARAMETRES PHYSIQUES

DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE

113

4112 Mécanismes contrôlant la remise en suspension et le piégeage des sédiments fins dans l'estuaire

L'onde sinusoïdale de marée qui se propage en Baie de Seine se déforme sur les petits fonds par frottement, de telle sorte que la courbe devient asymétrique. La durée du montant devient alors plus courte que celle du perdant. En outre, en marée de vives eaux, une stabilisation du niveau marin se produit pendant 2h à 2h30 autour de la pleine mer. Au cours de la propagation de l'onde de marée dans l'estuaire, la déformation acquise dans la baie s'accentue fortement vers l'amont (Fig. 79). L'élévation rapide du niveau de l'eau dans les chenaux a été longtemps responsable d'un mascaret aujourd'hui fortement atténué par le calibrage du chenal de navigation. Parallèlement, le rétrécissement des sections vers l'amont, la réflexion de l'onde sur les berges et le frottement sur le fond modifient conjointement l'amplitude de marée. Celle-ci augmente légèrement dans la partie aval de l'estuaire avant de décroître progressivement vers l'intérieur (Fig. 79 A). Selon la terminologie de Le Floch (1961), l'estuaire de la Seine est donc un estuaire hypersynchrone.

L'asymétrie de la courbe de marée s'accompagne d'une asymétrie des courbes de vitesses de courants (Fig. 79 B). La réduction importante de la durée du montant induit une augmentation rapide des courants de flot après la basse mer. Par contre, le jusant s'établit progressivement après la longue étale de pleine mer. D'aval en amont, on relève d'abord une amplification des courants de flot, puis leur diminution graduelle (Fig. 79 B). Par ailleurs, la figure 79 montre que les courants de flot atteignent leur maximum pour des hauteurs d'eau plus élevées que celles correspondant aux maxima des courants de jusant. Ces derniers se manifestent donc essentiellement dans le chenal de navigation, alors qu'au flot de rapides courants s'exercent dans les chenaux Nord et Sud, sur leurs berges et les bancs adjacents.

Les cycles lunaires vives eaux-mortes eaux et les variations du débit fluvial altèrent le schéma général de fonctionnement qui vient d'être décrit, applicable essentiellement en situation d'étiage et de vives eaux. Lorsque l'amplitude de marée décroît, l'asymétrie de l'onde de marée s'estompe et les vitesses de courants de flot et de jusant deviennent comparables pour des valeurs plus faibles. Par ailleurs, l'augmentation du courant fluvial lors des crues accroît fortement l'effet du jusant et réduit celui du flot.

Une étroite corrélation peut être mise en évidence entre les variations de vitesse des courants de marée et la charge en MES près du fond (Figures 79 C et 80). Schématiquement, le maximum de MES se rencontre lors des pointes de courant de flot et de jusant, lorsque les vitesses mesurées à 1 rn du fond (U100) dépassent la vitesse critique d'érosion des sédiments U*. La turbidité des eaux augmente progressivement tant que U100 est supérieur à U*, et décroît lorsque U100 est inférieur à U*. U* varie avec la nature granulométrique des fonds. Dans le cas de l'estuaire de la Seine qui a fait l'objet d'études détaillées ((Avoine, 1981 ; Lafite, 1990), la fraction silto-argileuse est remise en suspension lorsque U100 dépasse 60 cm/s. L'érosion maximale se produit lorsque U100 atteint 100 cm/s, ce qui correspond à la remise en suspension des sables très fins largement représentés dans l'estuaire (Fig. 80).

Dans le détail, le rapport entre la charge en MES et la vitesse des courants n'est pas linéaire d'amont en aval de l'estuaire (Fig. 79 C). A l'aval, la dominance des courants de flot s'accompagne de charges turbides plus importantes au montant qu'au perdant ; la relation est alors respectée. Dans la partie moyenne, l'augmentation des vitesses de flot due au raidissement de l'onde de marée prov.oque de fortes remises en suspension mais les charges relevées au jusant sont supérieures malgré des courants de moindre vitesse. Dans cette portion de l'estuaire, l'addition d'une seconde source de MES provenant de remaniements amont perturbe la relation turbidité-vitesse de courants. Enfin, dans la partie amont de l'estuaire, la courte durée du flot, malgré des vitesses encore amplifiées, entraîne des turbidités moindres.

114

En étiage, lorsque l'influence des marées est maximum, l'évaluation des charges solides transportées au cours du flot et du jusant montre une nette prédominance du flot dans la partie aval et moyenne de l'estuaire, ce qui entraîne une remontée des sédiments fins vers l'amont, au-delà de la limite de l'intrusion saline (Fig. 79 D). Ce résultat est une conséquence de l'asymétrie de l'onde de marée et du niveau élevé du plan d'eau lorsque les courants maxima de flot s'établissent. D'une manière générale, dans les estuaires macrotidaux comme celui de la Seine, la tendance est au transport en suspension résultant vers l'amont. Allen et al. (1980) voient dans cette caractéristique une explication possible du piégeage des sédiments fins et du maintien du bouchon vaseux dans le domaine estuarien, tout au moins en période de faible débit fluvial.

4113 Relation entre la vitesse des courants et la granulométrie des sédiments en suspension

En un point donné de l'estuaire, la charge de MES varie en fonction de l'érosion due aux courants, de la décantation aux étales et du passage du bouchon vaseux se déplaçant avec la marée. Cette charge peut être très élevée et dépasser 1g/l en marée de vives eaux, le bouchon vaseux pouvant être déjà bien individualisé avec des charges de 0,1 g/1, notamment en mortes eaux.

Les mesures réalisées à poste fixe dans l'estuaire permettent de visualiser la relation entre les vitesses de courants près du fond et la charge en MES dans les eaux sus-jacentes. La figure 80 montre un exemple représentatif de cette relation, correspondant à des mesures faites au niveau de Honfleur pendant la crue 1979. Dans cet exemple, on constate une remise en suspension importante des sédiments fins du fond du chenal de navigation lorsque les courants dépassent 60 crn/s à 1 rn au-dessus du fond. D'une manière générale, plus les vitesses de courants sont élevées, plus la charge en MES est importante, avec un décalage dans le temps atteignant 1/2 heure à 1 heure entre la vitesse maximum et la charge maximum. Toutefois, la durée d'écoulement doit être également prise en considération, car malgré des vitesses de flot supérieures aux vitesses de jusant, la charge est moindre durant le flot, compte tenu de la faible durée du pic de vitesses. On observe d'autre part une décantation importante des suspensions au cours des étales de courants, presque totale à pleine mer, partielle à basse mer. Ces constatations rejoignent les observations faites au niveau de la variabilité de l'extension du bouchon vaseux au cours de la marée.

Il existe de plus une liaison étroite entre la granulométrie des sédiments en suspension et la vitesse des courants. Après l'étale de pleine mer, les remises en suspension concernent d'abord l'ensemble de la fraction silto-argileuse et une petite partie de la fraction sableuse quand les vitesses dépassent 60 cm/s. Lorsque les courants atteignent des vitesses élevées (1,25 m/s), les sables sont à leur tour largement remis en suspension. Le bouchon vaseux situé en amont passe à ce moment au niveau du point de mesures à PM + 5 et la charge en MES est alors maximum près du fond. A la fin de son passage, les sédiments en suspension sont essentiellement des particules de la taille des sables fins, les silts et les argiles facilement remobilisables ayant déjà été transportés vers l'aval. Durant la brève étale de basse mer, la charge en sable chute fortement en surface, parallèlement à une légère augmentation près du fond, puis la décroissance est générale. Le brusque coup de flot ramène le bouchon vaseux reformé en aval vers l'amont. La décantation est importante à l'étale de pleine mer.

En complément, la figure 81 montre l'évolution de la granulométrie et de la nature des matières en suspension dans l'embouchure, au cours d'un cycle de marée de vives eaux, en étiage (à gauche) et en crue (à droite). Deux cortèges de particules en suspension sont bien différenciés, d'une part un matériel minéral silteux de taille dominante 5-40 pm, largement sous forme d'agrégats, d'autre part une fraction plus grossière, supérieure à 40 pm, constituée d'une fraction biologique à base de cellules planctoniques et de grains minéraux isolés (Abarnou et al .. , 1987).

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tn/S 1,5

FLOT

0,5

GRANULOMETRIE des

SUSPENSIONS prélevées

en SURFACE

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GRANULOMETRIE des

SUSPENSIONS prélevées

à lm du FOND

BOUEE 20 Marée de vive eau Crue 1979

PM et BM du Havre

VITESSE DES COURANTS

à 1m du fond

Fig. 80- RELATION ENTRE LES VITESSES DE COURANT PRES DU FOND, LA CHARGE ET LA GRANULOMETRIE DES SEDIMENTS EN SUSPENSION

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.... MINERAL SILTY MATERIAL

Fig. 81 -EVOLUTION DE LA GRANULOMETRIE ET DE LA NATURE DES MATIERES EN SUSPENSION AU COURS D'UN CYCLE DE MAREE

(Lafite et Dupont)

117

Il en résulte que les sédiments en suspension de l'estuaire de la Seine sont constitués d'un mélange de particules de taille et de nature très diverses, facilement mobilisables par les agents hydrodynamiques locaux.

Plus en amont dans l'estuaire, une expérience par traceurs radioactifs réalisée devant Honfleur en période d'étiage a permis de montrer qu'une partie du matériel sableux qui constitue les fonds de l'estuaire contribue à la dynamique du bouchon vaseux et à son développement (Avoine et al., 1986). Les limites de début d'entraînement, de transport avec début de remise en suspension et de transport en suspension généralisé de particules identiques aux sédiments en place ont pu être précisées (Fig. 82). Il ressort que la vitesse critique d'érosion U * doit être trois fois supérieure à celle du début d'entraînement pour obtenir une remise en suspension de 30 à 40 %, soit 3,5 crn/s pour des particules d'un diamètre moyen de 0,175 mm, et 4,8 crn/s pour celles de 0,260 mm. Ces valeurs de U* correspondent respectivement à des vitesses instantanées à 1 rn au-dessus du fond de 0,70 rn/s et de 0,95 rn/s. Le transport est généralisé (90 % de remise en suspension) lorsque U* dépasse 4,8 crn/s pour les particules de 0,175 mm et 6 crn/s pour celles de 0,260 mm, ce qui équivaut à des vitesses de 0,9 rn/s et de 1,1 rn/s. Ces résultats contl.I1Tlent bien que la plus grande partie du matériel sédimentaire de l'estuaire peut être remis en suspension lorsque les courants de marée de vives eaux le permettent.

412- Variations de la charge en MES dans l'embouchure

Dans l'estuaire aval, la présence des trois chenaux presque parallèles complique le schéma d'évolution des charges en MES qui vient d'être décrit. La figure 83 montre l'évolution transversale de la concentration en MES dans les chenaux Nord, de navigation et Sud, en marée de vives eaux et en débit d'étiage. D'autres exemples sont donnés dans Avoine (1981).

Les principales conclusions qui se dégagent de l'ensemble des mesures disponibles à la fin des années 70 sont les suivantes :

-le fonctionnement du chenal Nord semble assez voisin de celui du chenal de navigation, le bouchon vaseux s'y développe largement, il se déplace d'amont en aval avec la marée et se décante aux alentours de la pleine mer.

-le chenal Sud n'est concerné par le phénomène du bouchon vaseux qu'en marée de vives eaux où se produisent des remises en suspension importantes. En mortes eaux, les eaux restent très claires du fait que les courants ne dépassent pas la vitesse critique d'érosion des sédiments de fond.

-en marée de vives eaux, l'évacuation des eaux estuariennes tend à se faire d'abord par le chenal Sud puis par les deux autres chenaux. L'admission des eaux marines venant de la Baie de Seine s'effectue par le chenal Sud et le chenal Nord, puis par le chenal de navigation. En mortes eaux, la partie Sud de l'embouchure n'est presque pas influencée par le régime estuarien qui affecte essentiellement le chenal de navigation et le chenal Nord.

Ces caractéristiques valables à la fin des années 70 peuvent avoir évolué depuis, mais on ne dispose pas de données actualisées pour apprécier l'importance des modifications éventuelles apportées notamment par la réduction volumétrique du chenal Nord et la migration de l'axe central des chenaux Nord et Sud.

MORTE EAU VIVE EAU

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80-90

Fig. 82 ·POURCENTAGE DE REMISE EN SUSPENSION DES SABLES FINS EN FONCTION DES VITESSES COURANTS

EXPERIENCE A L'AIDE DE TRACEURS RADIOACTIFS (CEAIPAR, 1980)

N

0

0

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Chenal Sud

Jl7

Meridien +6

BM +4 Fso f27

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1: . · .1 < o.o5 ll=mwrl o.5-1

(-:-:-:.jo.o5-0.1 1111 )1

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1 km

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PM+I Fil

0

PM+2 JJS J27

PM+3 J6a

PM+4 Jao J57

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PM+5 Jn7 133

0

PM+6 Jt2e J37

Fig. 83- EVOLUTION TRANSVERSALE DE LA CONCENTRATION EN MES DANS L'EMBOUCHURE

AU COURS D'UN CYCLE DE MAREE DE VIVES EAUX

120

413 - Flux résiduel de sédiments en suspension

Dans le chenal de navigation, les mesures des vitesses de courants et des charges de MES effectuées sur toute la tranche d'eau au cours de la marée permettent de chiffrer le débit solide théorique au cours du flot et du jusant, et d'en déduire le flux résiduel pour la marée considérée (Avoine, 1981). Il est difficile d'extrapoler ces valeurs à l'ensemble de la section du chenal, car la charge en MES varie transversalement. Faute de données complémentaires, une extension des résultats ponctuels à l'ensemble de la section permet d'avoir une idée sur l'ordre de grandeur des mouvements sédimentaires en suspension.

La figure 84 donne les valeurs du flux résiduel calculées par unité de section aux différentes profondeurs, pour diverses conditions de marée et de débit fluvial. D'une manière générale, pendant les marées de vives eaux, le flux résiduel est orienté vers l'aval dans tout l'estuaire endigué, quel que soit le débit fluvial. En période d'étiage, le flux est nettement dirigé vers l'amont dans l'embouchure, et les sédiments en suspension ne sortent pas de l'estuaire.

En marée de mortes eaux, en période de crue, le flux résiduel est dirigé vers l'amont près du fond dans l'estuaire aval. Par contre, ce flux est orienté vers l'aval dans la tranche d'eau supérieure et dans tout l'estuaire amont. Il en est de même en période d'étiage sauf au niveau de la bouée 26 à proximité de la brèche Nord où le flux est dirigé vers l'amont.

Extrapolé à l'ensemble des sections du chenal de navigation, le flux résiduel vers l'aval atteint des valeurs considérables qui varient avec l'amplitude de la marée. D'une manière générale, il atteint 100 à 300 000 tonnes en vives eaux alors qu'il ne dépasse jamais 10 000 tonnes en mortes eaux. Ces valeurs élevées proviennent du fait que le bouchon vaseux n'est pas un phénomène stable. n migre continuellement en fonction du va-et-vient des marées et des variations du débit fluvial. Le calcul intègre donc des mouvements advectifs horizontaux et des mouvements verticaux liés à la remise en suspension incessante des sédiments du fond de l'estuaire.

Ces mesures de flux résiduel ne sont donc pas valables sur le plan quantitatif. Elles indiquent tout au plus l'importance des remaniements sédimentaires durant la marée, occasionnés par les courants de marée qui remettent les fonds en suspension, et elles conÏrrment la prédominance du chenal de navigation en tant que chenal de jusant où est concentré le débit fluvial, les chenaux Nord et Sud étant plutôt des chenaux où le flot est dominant, comme le comrrme les mesures de flux de MES dans les trois chenaux de l'embouchure (Avoine, 1981). Cette dualité entre le chenal de navigation et les chenaux Nord et Sud est la conséquence directe de l'endiguement de l'estuaire, qui a eu notamment pour but de stabiliser le chenal de navigation, tout en favorisant l'effet de chasse permettant un certain auto-entretien des fonds.

414 - Evolution du bouchon vaseux depuis 40 ans

Tout l'estuaire est susceptible, à un moment ou à un autre, de se trouver sous l'influence du bouchon vaseux. L'ensemble des données recueillies dans le cadre du SAUM permet de synthétiser la position du noyau turbide à pleine mer et à basse mer en fonction du débit fluvial (Fig. 85). Il ressort que le mouvement de va-et-vient au cours de la marée est de 17-18 km en vives eaux quel que soit le débit fluvial, et seulement d'une dizaine de kilomètres en mortes eaux et en crue, presque nul en mortes eaux et en étiage. A partir d'un débit de 550 m3 /s à Poses, la partie aval du bouchon vaseux sort de l'estuaire à basse mer. Le déplacement saisonnier moyen est de l'ordre d'une dizaine de kilomètres.

Ratier Honfleur Tancarville Vieux- Port

t t t t BRN 110 12'2 IRa. llVP

126 281110 5760 5230 15110 2880

30750 11910 2200 2730 720

Fig. 84-

FLUX RESIDUEL DE SEDIMENTS EN SUSPENSION DANS LE CHENAL DE NAVIGATION

DONNEES 1978-79

Qfl (m3/s)

1500~-------------------------------------------------------------------

1000

500

- ..._ ____ _ .... c ., ~ BM

----·-- ----------------

0 365 360 355 3 0

t t lE HAVRE HONFLEUR

BAIE ESTUAIRE - ... de SEINE

345

PM

340 335

t TANCARVIllE

ESTUAIRE DE LA SEINE

POSITION DU BOUCHON VASEUX EN FONCTION DU DEBIT FLUVIAL

330

t QUIUEBEUF

Marée de vive eau

limites à 0,5 g1l

-- à pleine mer

------à basse mer

e TURBIDITE MAXIMALE

325 320

t VIEUX· PORT

SEINE FLUVIALE

Fig. 85 • POSITION DU BOUCHON VASEUX EN FONCTION DU DEBIT FLUVIAL

(DONNEES 1977·1980)

P. K.

123

Evolution de la position du bouchon vaseux depuis 40 ans

Les données recueillies depuis 1955 par le Service de Navigation de la Seine, lors des remontées en Seine effectuées bimestriellement à basse mer en marée de coefficient moyen, ont permis d'établir un graphique de l'évolution des positions moyennes et extrêmes du bouchon vaseux (limite à 0,5 g/1} au cours des 40 dernières années (Lejeune, 1993 et figure 86).

Les positions moyennes Depuis une vingtaine d'années, la position moyenne du bouchon vaseux est majoritairement

située entre les PK 340 et 350. Antérieurement, cette position moyenne a migré progressivement vers l'aval de 1955 à 1981 (Fig. 86). Jusqu'à l'ouverture du nouveau chenal de navigation de la Seine en 1959, sa limite se situait à basse mer aux alentours de Caudebec, vers le PK 310. En 1962-63, elle se trouvait aux environs de Vieux-Port vers le PK 323. Entre 1965 et 1981, l'évolution a été plus lente, sa limite se situant en 1981 vers le PK 351. Durant l'étiage exceptionnel de l'année 1976, la position moyenne du bouchon vaseux est remontée de manière significative en amont (PK 342), 6 km par rapport à sa position antérieure. Au total, de 1955 à 1981, le bouchon vaseux a donc migré progressivement vers l'aval de près de 50 km en 25 ans (Avoine, 1984 et Figure 87).

Depuis 1981, cette tendance globale est renversée. A partir de 1982, La position moyenne du bouchon vaseux a migré progressivement vers l'amont, pour se situer en 1993 au PK 344, soit 7 km en amont de la position de 1981. Durant les années sèches 1990 et 1991, le bouchon vaseux a même migré vers l'amont dans une position plus interne qu'en 1976 (PK 341).

Il est également remarquable de constater que depuis 1989, la limite amont du bouchon vaseux est située dans une position identique à celle de la fin des années 60.

Les causes de cette évolution sont identiques à celles invoquées pour expliquer la migration de l'intrusion saline durant la même période. Le déplacement progressif vers l'aval de 1955 à 1981 est sans aucun doute lié à la modification de la dynamique estuarienne consécutive à l'endiguement

· du chenal de navigation de la Seine et au comblement progressif de l'estuaire, qui ont entraîné la canalisation du débit fluvial dans une section réduite par des digues et la diminution du volume oscillant, et de ce fait un accroissement très important de l'effet de chasse. A l'occasion de la synthèse du SAUM (Avoine, 1981), cette migration progressive avait été invoquée pour expliquer l'accroissement des envasements observés en Baie de Seine durant les années 60-70, consécutivement à la réduction du temps de résidence des MES dans l'estuaire et des dépôts engendrés par les apports fluviatiles. Le renversement de tendance observé depuis le début des années 80 est à mettre en relation avec l'accroissement relatif de la section de l'écoulement dans le chenal de navigation suite à son approfondissement, et depuis 1989 avec la diminution des débits moyens annuels au-dessous de la moyenne trentennale. Le bouchon vaseux pourrait être à l'heure actuelle davantage confiné dans l'estuaire qu'il ne l'était il y a une quinzaine d'années, l'accroissement des envasements observés en Baie de Seine pouvant être lié en grande partie à l'érosion de fonds sablo-vaseux relictes de la baie comme il a été vu au chapitre 2-3. Cependant, les données disponibles sont insuffisantes pour apprécier la part respective des différentes sources de sédiments fins dans la baie.

Les positions extrêmes Les positions extrêmes sont globalement représentatives de la tendance générale. Les

positions les plus en amont dans l'estuaire suivent l'évolution des positions moyennes (Fig. 86), avec un minimum très accentué en 1991, où le bouchon vaseux est remonté jusqu'au PK 315, position identique à celle de 1963, et située plus en amont dans l'estuaire que lors de l'année sèche 1976.

km Amont

300

VIEUX-PORT

330

TANCARVILLE

HONFLEUR

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500

400

300

200

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Aval

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1960

1960

1

1 1 1 1 1 1 1 t 1 1 1 1

1970

1970

1

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1960

1980

10km

1 1 1 1 1 •t 1 1 1 1

1990

1990

Fig. 86- EVOLUTION DES POSITIONS DE LA LIMITE AMONT DU BOUCHON VASEUX

DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE ENTRE 1955 A 1993

POSITION A BASSE MER· MAREE MOYENNE· LIMITE A 0,5 g/1

bouchon vaseux

.... ( _ _.1 < 0 ,5gtl HONFLEUR

Q,5-1g/l

0 20 DISTANCE

40 60 A L'EMBOUCHURE (KM)

1960

1980

80

Fig. 87- DIAGRAMME SCHEMATIQUE MONTRANT LA MIGRATION VERS L'AVAL DE

L'INTRUSION SALINE ET DU BOUCHON VASEUX ENTRE 1955 ET 1980

126

Depuis 1989, il ressort clairement que les minima sont directement en relation avec les débits d'étiage importants observés au cours de ces années sèches, qui induisent une forte remontée des eaux marines en amont de l'estuaire. L'évolution des positions les plus en aval est plus difficile à cerner, compte tenu du fait qu'entre 1982 et 1991( sauf 1990), la localisation de la partie aval du bouchon vaseux ne peut pas être définie. En effet, le plus souvent, la charge en MES n'atteint pas la valeur de 0,5 g/1 utilisée comme limite du bouchon vaseux, soit que le bouchon vaseux est situé plus en aval de Honfleur, soit que la concentration en MES n'excède pas 0,5 g/1. Toutefois, on constate que les tendances générales de l'évolution sont respectées, les années à faible débit fluvial coïncidant avec une remontée de la limite aval du bouchon vaseux en amont de l'estuaire (notamment en 1990, 1992 et 1993).

Comparaison de l'évolution dans le temps de la position de l'intrusion saline et du bouchon vaseux

La comparaison des positions moyennes des limites amont de l'intrusion saline et du bouchon vaseux de 1955 à 1993 permet de constater la relation étroite qui existe entre ces deux limites (Fig. 88). Dans le détail, on observe que de 1955 à 1975, et depuis 1990, le front de salinité se trouve situé en aval de la limite du bouchon vaseux, tandis que de 1976 à 1989, on observe la tendance inverse, sans qu'il puisse être invoqué de cause particulière à cette inversion épisodique. Plus généralement, on constate que les deux limites ont évolué parallèlement dans le même sens, avec une migration vers l'aval jusqu'à la fin des années 70, puis une remontée vers l'amont depuis le début des années 80. Les raisons invoquées pour expliquer cette évolution sont similaires. La migration vers l'aval peut être reliée à la canalisation du débit fluvial dans le chenal de navigation et à l'augmentation de l'effet de chasse, le retour en position plus amont étant probablement lié à l'approfondissement du chenal de navigation qui amplifie l'influence marine, et plus récemment à la réduction des débits fluviaux.

Evolution de la concentration moyenne de MES dans l'estuaire au cours des trente dernières années

Toujours à partir des données recueillies par le Service de Navigation de la Seine, il est possible de constater qu'il y a une baisse très nette des charges moyennes en MES dans tout l'estuaire depuis 1955 (Fig. 89). Ce graphique représente la moyenne annuelle des valeurs mesurées en 6 points de l'estuaire (Caudebec, Vatteville, Courval, Tancarville, Berville et Honfleur). On constate une très forte décroissance de la charge en MES entre 1963 et 1981, suivie d'une augmentation sensible depuis 1982. Globalement, avant 1974, les concentrations moyennes en MES dans l'estuaire, dans des conditions de basse mer de marée moyenne, étaient supérieures à 0,5 g/1, avec un maximum à 1,2 g/1 en 1963. Depuis 1974, les teneurs en MES sont inférieures ou égales à 0,4 g/1, avec un minimum de 0,13 g/1 en 1981 (Fig. 89).

Cest à partir de 1973, année au cours de laquelle la concentration en MES commence à décroître fortement, que l'on a constaté l'impossibilité de définir la position la plus aval du bouchon vaseux, faute de charge en MES suffisante (Fig. 86). On peut certainement relier ces deux paramètres, la formation du bouchon vaseux étant par définition liée à la concentration en MES. Le graphique montre qu'une baisse de la charge en MES est reliée à une migration de bouchon vaseux vers l'aval, tandis qu'une concentration forte semble correspondre avec des positions moyennes du bouchon vaseux plus en amont dans l'estuaire.

L'état actuel des connaissances ne permet pas d'expliquer clairement cette relation. Il faut faire intervenir la diminution des rejets urbains en amont de l'estuaire et de certaines substances physico-chimiques qui ne sont plus directement rejetées dans l'estuaire.

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Fig. 88- COMPARAISON DES VARIATIONS DE POSITION MOYENNE DE L'INTRUSION SALINE

ET DU BOUCHON VASEUX DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE ENTRE 1955 ET 1991

(Le jeune, 1993)

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Fig. 89 -

EVOLUTION DE LA CONCENTRATION MOYENNE DES MATIERES EN SUSPENSION

DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE ENTRE CAUDEBEC ET HONFLEUR

Période 1963-1991

129

4 - 2 DISPERSION DES APPORTS SOLIDES DE LA SEINE EN BAIE DE SEINE

421 - Rôle du bouchon vaseux

Le bouchon vaseux constitue dans l'estuaire un lieu de stockage temporaire pour les matières en suspension apportées par la Seine ou issues du domaine marin. Les variations du débit fluvial jouent un rôle essentiel sur la position du bouchon vaseux et la masse totale de sédiments en suspension (Avoine, 1981). La figure 90 montre son extension moyenne en fonction du débit. li reste cantonné dans l'estuaire en période d'étiage durant laquelle la masse de MES stockée dans l'estuaire est maximale, avec un temps de résidence important, qui peut atteindre plusieurs mois. En période de crue, le bouchon vaseux est bien moins développé qu'en étiage malgré des apports solides importants issus de l'amont, car une partie des MES est expulsée en mer après un temps de résidence très bref, de l'ordre de quelques jours.

L'influence des eaux turbides sortant de l'estuaire à basse mer peut se faire sentir jusqu'à la dépression du Parfond, où les teneurs en MES atteignent plusieurs dizaines de mg/1 (Fig. 91). La réalisation de profils verticaux depuis l'estuaire vers le large montre que l'expulsion de sédiments en suspension issus de l'estuaire n'est pas cantonnée aux eaux de surface mais intéresse toute la colonne d'eau (Fig. 91 et Lafite, 1990).

422- Extension en mer du panache d'eau turbide et impact sédimentologique

On dispose d'un grand nombre de données sur la Baie de Seine, dans différentes conditions de marée et de débit fluvial, qui permettent de déterminer l'extension du panache turbide formé par la sortie en mer des eaux de l'estuaire de la Seine : mesures hydrologiques, imagerie satellitaire, mesures de flux de MES (Avoine, 1987).

La figure 92 montre l'ampleur du panache formé par les eaux turbides de surface à l'embouchure de la Seine. Le développement de ce panache est étroitement corrélé avec la dessalure des eaux observée parallèlement (Fig. 71), ce qui montre bien l'influence fluviatile dans ce secteur de la baie. L'impact des apports en suspension dans le secteur oriental de la Baie de Seine est particulièrement net en période de crue, et se traduit par un écoulement d'eau saumâtre très turbide vers l'Ouest et vers le Nord.

Les études microgranulométriques des suspensions dans le panache d'eau turbide ont permis de constater que le matériel situé au large présente des similitudes avec celui du bassin versant de la Seine (Dupont et al., 1986 ; Lafite, 1990). Il s'agit de particules très fines, dont la répartition suit assez bien celle des courbes isohalines. L'exportation de sédiments en suspension d'origine fluviatile au domaine marin ne concerne donc que les éléments les plus fins, la fraction plus grossière, silto-sableuse, restant cantonnée dans l'estuaire.

L'essentiel des apports solides de la Seine se réalise en quelques jours lors de la phase ascendante des crues, ce qui conduit à l'envasement des fonds dans l'embouchure, de part et d'autre du chenal principal, dans les zones de moindre courant. L'impact des apports de la Seine joue un rôle important sur les fluctuations de la couverture sédimentaire en Baie de Seine orientale, comme il a été vu au paragraphe 2-3. Ces dépôts temporaires peuvent être aisément remobilisés par les houles de tempête. lis régressent à la fin des périodes de crue lorsque leur alimentation, assurée par les apports de matériel en suspension, n'est plus suffisante pour équilibrer leur érosion par les houles. Les vases remises en suspension sont dispersées par les courants de marée et se redéposent dans les zones plus calmes, notamment les installations du Port Autonome du Havre ou les dépressions situées plus au large.

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SEPTEMBRE 1978,

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0 KM 5 1 d

TENEUR EN M.E.S.

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Fig. 90- EXTENSION MOYENNE DU BOUCHON VASEUX EN PERIODE D'ETIAGE ET DE CRUE

BOUCHON VASEUX

BOUCHON VASEUX

10 km

ESTUAIRE

Matières en suspension (mg/ 1}

> 1000

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1· 100- 500

ORIGINE DES MESURES:

-DANS L" ESTUAIRE : SAUM ( Avoire, 1981 )

-DANS LA BAIE: RNO

Mesures effectuées à basse mer en 1978

0

10

20

0

m

10

20

30

m

Fig. 91- EXTENSION VERS LE LARGE DU BOUCHON VASEUX DE l:A SEINE A BASSE MER,

EN CRUE ET EN ETIAGE

CRUE aoom 3ts Mars 1982 ·. ·. ·. ··r· .. ......... . . . . . . . .... . . . . . . . . . . . . . . . . ..... . . . . . . . . . .

ET 1 AGE 200 m3/s Septembre 1981

0 km 10

Fig. 92 • REPARTITION DES MATI ER ES EN SUSPENSION DANS LES EAUX DE SURFACE DE LA BAIE DE SEINE ORIENTALE,

EN MAREE DE VIVES EAUX, EN BASSE MER, EN CRUE ET EN ETIAGE

133

A l'échelle de l'ensemble de la Baie de Seine, la variabilité des teneurs en MES est très grande, dépendant d'une part des apports fluviatiles, d'autre part de la remise en suspension des fonds sablo-vaseux par les courants de marée et surtout par les houles à proximité des côtes. La figure 93 donne à titre d'exemple la répartition des MES dans les eaux de surface de la baie, en marée de vives eaux, à basse mer, en période de débit fluvial moyen. L'influence des apports de la Seine se fait sentir uniquement dans la partie orientale, où les charges dépassent 50 mg/1 dans l'embouchure. Dans le reste de la baie, les teneurs en MES ne dépassent guère 5 mg/lau niveau de la frange côtière influencée par le remaniement des sédiments fins par petits fonds.

423 - Flux résiduel de sédiments en suspension en Baie de Seine orientale

Les mesures en point fixe des vitesses de courants et des charges en MES au cours de cycles de marée semi-diurnes permettent de calculer semi-quantitativement le débit solide de flot et de jusant, et d'en déduire le transit sédimentaire résultant (Avoine et Crevel, 1986; Avoine, 1987). Les flux de MES peuvent ainsi être appréhendés avec une bonne précision, tout au moins en ce qui concerne les directions de transport. La figure 94 transcrit de manière qualitative les principales directions de transport définies selon ce principe, en marées de vives eaux, en périodes de crue et d'étiage, dans la partie orientale de la Baie de Seine. Ces données, les plus complètes actuellement disponibles, permettent d'établir dans les grandes lignes les principales caractéristiques des transits sédimentaires en suspension.

En période de crue, l'expulsion de matériel en suspension depuis l'estuaire vers le domaine marin est générale, à l'exception du chenal Sud de la Seine sous l'influence directe des eaux marines. La dispersion des MES vers le large est importante sur toute la colonne d'eau, engendrant des dépôts vaseux temporaires. Par des fonds de- 15 à- 20 rn, la tendance s'inverse près du fond, le transit des suspensions se fait en direction de l'estuaire, alors qu'il reste vers le large en surface. Ce schéma est tout à fait conforme à la circulation résiduelle étagée observée par Le Hir et L'Yavanc (1986), particulièrement développée en période de crue lorsque la stratification saline est maximale en Baie de Seine orientale.

En période d'étiage, en dehors d'une très faible sortie de MES vers le large dans les eaux de surface, à l'aval du chenal de navigation et vers le Nord Est, les transports sédimentaires s'inversent comparativement à la période de crue. Les transits sédimentaires en suspension s'effectuent alors de la baie vers l'intérieur de l'estuaire, principalement dans les eaux de fond.

424- Influence d'une forte crue sur la Baie de Seine

L'impact des apports de la Seine se fait principalement sentir en période de crue. La figure 95 montre la répartition de la salinité et de la teneur en MES dans les eaux de surface de la Baie de Seine orientale durant une importante crue de la Seine. Dans ces conditions de débit où les apports fluviatiles sont très importants, l'extension en mer du panache d'eau saumâtre turbide est considérable. L'estuaire est entièrement en eau douce, la dessalure des eaux se fait sentir jusqu'à la limite Nord de la baie. Le bouchon vaseux est situé à l'extrémité aval des digues du chenal de navigation, une partie des matières en suspension est expulsée en mer et se disperse principalement vers le SW en direction de la côte du Calvados, et vers le N le long de la côte du Pays de Caux, parallèlement à l'écoulement des eaux saumâtres.

Cet exemple montre que les apports de la Seine peuvent périodiquement avoir une influence très importante sur les caractéristiques hydrologiques des eaux de la Baie de Seine orientale. Par contre, comme il a été dit précédemment au chapitre 2-3, la contribution de ces apports à la sédimentation vaseuse de la baie semble rester modeste.

D 0

mg/1

Fig. 93 • REPARTITION DES MATIERES EN SUSPENSION DANS LES EAUX DE SURFACE DE LA BAIE DE SEINE

(Campagne Thalla Mars 1979)

DIRECTION DES TRANSPORTS SEDIMENTAIRES EN SUSPENSION

........ EN SURFACE r> PRES DU FOND

.. Cr-'> courant résiduel pres du fond

0/ '

Cop d'Antifer

(ETIAGE! 5 km

Fig. 94. DIRECTION DES TRANSPORTS SEDIMENTAIRES EN SUSPENSION DANS LA PARTIE ORIENTALE DE LA BAIE DE SEINE,

EN MAREE DE VIVES EAUX, EN CRUE ET EN ETIAGE

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Fig. 95 - REPARTITION DE LA SALINITE ET DE LA TENEUR EN M.E.S. DANS LES

EAUX DE SURFACE AU LARGE DE L'ESTUAIRE DE LA SEINE EN PERIODE DE CRUE

(Marée de vives-eaux, basse mer, débit fluvial= 760 m3/s)

137

4-3 DYNAMIQUE SEDIMENTAIRE EN BAIE DE SEINE

431 - Transport des sédiments fins en suspension

On connaît peu de choses sur les remises en suspension et le transport des sédiments fins dans la baie. Des mesures hydrologiques effectuées dans différentes conditions météorologiques montrent que les concentrations en MES sont beaucoup plus fortes en période agitée qu'en période calme. Ainsi, la mobilisation de la fraction fine des dépôts par les houles de tempête est suffisamment importante pour entraîner dans la colonne d'eau des turbidités supérieures à celles résultant des crues de la Seine (Fig. 96). Au cours de l'été et de l'automne, l'agitation des eaux est faible, permettant le dépôt des sédiments fins sur une large étendue de la baie (cf. Fig. 44). Durant l'hiver, la turbulence importante provoque une remise en suspension intense de ces sédiments et les zones envasées régressent, parallèlement à une augmentation notable de la turbidité des eaux de la baie. D'autre part, une expérience réalisée à l'aide de vases radioactives a montré que les dépôts vaseux fraîchement déposés et non consolidés sont très aisément remis en suspension par les courants de marée (Avoine et al., 1986). La conséquence est que, dans la baie, la dynamique des sédiments fins est contrôlée par l'action combinée des courants de marée et des houles, et que le transport maximum s'effectue durant les tempêtes. Le transport des MES est généralement dirigé vers l'estuaire de la Seine dans les eaux de fond quel que soit le débit fluvial.

Ce schéma est compliqué localement par plusieurs mécanismes, tels que l'érosion des sédiments relictes affleurant sur les fonds de la Baie de Seine orientale, l'extension en mer du panache d'eau turbide issu de la Seine, ou l'existence de rejets de dragages de matériaux fins tel celui d'Octeville devant le Pays de Caux.

432 - Transport des sables sur le fond

Les sédiments de la Baie de Seine orientale s'ordonnent schématiquement selon un gradient d'affinement d'Ouest en Est au large des côtes du Calvados, et du Nord vers le Sud le long du Pays de Caux, répartition qui reflète la décroissante des vitesses de courants de marée depuis le large vers les côtes (Fig. 36 à 38). Ces sédiments résultent en grande partie du remaniement, par les courants de marée et les houles, consécutivement à la remontée du niveau de la mer, de dépôts continentaux quaternaires apportés en période de bas niveau marin par les fleuves, dont la Seine, sur les fonds de la Manche alors exhondée.

Les mouvements des sables en Baie de Seine sont assez bien connus, grâce à la mise en oeuvre de différentes techniques analytiques complémentaires : analyses sédimentologiques, traçages radioactifs, mesures de courants, imagerie sonar latéral. Toutes les données disponibles montrent que le transport des sables se fait préférentiellement d'Ouest en Est en direction de l'estuaire de la Seine.

Les courants de marée sont à l'origine du développement de structures sédimentaires qui renseignent précisément sur la direction des transports (Fig. 35). L'imagerie sonar latéral a permis de mettre en évidence, dans la partie centrale de la Baie de Seine, de nombreuses structures longitudinales sous la forme de rubans de sables sub-parallèles séparés par des fonds sablo­graveleux (Auffret et d'Ozouville, 1986). Leur direction Nord Ouest - Sud Est est conforme à la direction des courants de marée dominants dans ce secteur. Ces rubans de sables supportent des mégarides asymétriques indiquant un ~nsport dominant vers la partie sud-orientale de la baie.

SUD NORD

REMISE EN SUSPENSION LONG OU LITTORAL SABLO ·VASEUX

10

15

20~--------~~SS~E~M=E~R-·~M~A~R~~~~~~L-----------------

D <1o

PANACHE TURBIDE DE LA SEINE

BASSE MER : MAREE OE VIVËS EAUX

(::f;J 10- 20 r::::::::::1 20-30 \:::::::::::1 30-40 n:~:~:~:/q 40- 60 Ill ) 60 mg,,

Fig. 96 ·EVOLUTION DE LA CONCENTRATION EN M.E.S. LE LONG D'UN PROFIL N·S,

A L'EMBOUCHURE DE LA SEINE, EN PERIODE DE CRUE, SELON L'AGITATION

139

A proximité de l'estuaire de la Seine, dans un secteur dominé par une sédimentation assez hétérogène sablo-vaseuse et des courants de marée plus faibles qu'au large, on n'observe pas de structures sédimentaires de grande dimension de type mégaride. Des observations à l'aide d'une télévision sous-marine montrent toutefois la présence de champs de rides discontinus, témoins d'un transport sédimentaire tracté.

Quatre expériences mettant en oeuvre des traceurs radioactifs ont été entreprises en Baie de Seine orientale entre 1979 et 1984 (Avoine et al., 1986). Plusieurs sites expérimentaux ont été choisis, de Ouistreham à Honfleur, auxquelles s'ajoutent plusieurs expériences réalisées antérieurement pour le compte du Port Autonome du Havre le long de la côte du Pays de Caux. Ces études ont permis de quantifier les transits sédimentaires et de fixer la limite d'action des courants de marée et des houles en fonction de la nature des dépôts et de leur profondeur. Les techniques utilisées consistent à introduire dans le milieu des matériaux aisément détectables ayant le même comportement hydrodynamique que le sédiment naturel en place. Le mouvement général des sables marqués est mis en évidence par le réseau de courbes isochocs correspondant à l'étalement du traceur sur les fonds de part et d'autre des points d'immersion.

La figure 97 montre la forme des courbes isochocs quatre mois après l'immersion des traceurs en différents points. Les courbes isochocs sont globalement allongées selon les directions dominantes des courants alternatifs de flot et de jusant, auxquelles se superpose l'action des houles qui ont tendance à transporter les sables dans le profil en direction de la côte. D'une manière générale, il y a une prédominance du flot sur le jusant, ce qui provoque un mouvement des sables parallèlement à la côte d'Ouest en Est le long des côtes du Calvados.

La figure 98 montre les principaux résultats quantitatifs correspondant aux huit expériences dont les résultats sont disponibles pour l'ensemble de la Baie de Seine orientale (Avoine et al., 1986). Les transports solides ont été calculés selon la méthode classique du bilan des taux de comptage. La valeur calculée la plus élevée en chaque point d'immersion a été reportée sur la figure 98, le maximum obtenu étant de 1,5 10-2m3 par mètre linéaire et par jour.

Dans le détail, les expériences menées à l'aide de traceurs radioactifs permettent de tirer un certain nombre d'enseignements intéressants :

Dans la partie sud-orientale de la baie :

Devant Ouistreham, par des fonds de -3,5 rn et de -5 rn, l'action des houles dominantes de secteur Ouest à Nord Ouest se traduit par un mouvement du traceur en direction de la côte. Une action comparable est visible à l'Ouest de Deauville par des fonds de -5 rn et devant Houlgate à :.. 8 m. Le transit observé dans ce secteur, principalement lié à la prédominance des courants de flot, entraîne par charriage de faibles quantités de sables en direction de l'estuaire de la Seine.

Une expérience réalisée devant Houlgate à l'aide de vases marquées a montré que les courants de marée, même les plus faibles, sont capables de remettre en suspension 85% des sédiments cohésifs plus ou moins concentrés, mais non consolidés. Comme il a déjà été dit au paragraphe 2-3, cette grande mobilité des dépôts vaseux meubles permet de rendre compte des fluctuations saisonnières observées dans la couverture de dépôts f"ms de la baie.

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0 m 500

KM 0 5

MOUVEMENTS SEDIMENTAIRES SABLEUX EN BAIE DE SEINE ORIENTALE EXPERIENCES A L'AIDE DE TRACEURS RADIOACTIFS.

COURBES ISOCHOCS 4 MOIS APRES L'IMMERSION DES TRACEURS Fig. 97 •

(Avoine et al, 1986)

1

2

3

4 5

6

7

8

Ouistreham

Houlgate

Deauville Ouest

Estuaire de la Seine- Honfleur

Octeville

Cauville

Antifer

riddens d'Antifer

o-- dispersion des rejets de produits de dragage

• • transport sédimentaire sur le fond

1 t. . 3

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1 à 3. 10-

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30 j'\.:)

par mètre linéaire et par jour

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5 km

Fig. 98- PRINCIPAUX RESULTATS OBTENUS EN BAIE DE SEINE ORIENTALE ACQUIS

LORS D'EXPERIENCES PAR TRACEURS RADIOACTIFS

(Avoine et at, 1986)

142

Dans la partie nord-orientale de la baie :

Pour mieux connaître les mouvements des produits de dragage du Port Autonome du Havre, rejetés au large d'Octeville par des fonds de -14 rn, plusieurs expériences par traceurs radioactifs ont été réalisées le long du littoral du Pays de Caux (LCHF, 1973, Tola, 1986). La première étude consistait à immerger près de la surface, à la hauteur du dépôt de dragages, 70 tonnes de sédiments sablo-vaseux marqués, pendant le flot d'une marée de vives eaux. Cette expérience a montré que les vases ont parcouru 7 km vers le NNE en 4 heures, en formant un nuage turbide qui se sédimente progressivement. Les sables rejetés parallèlement se sont répartis plus rapidement sur les fonds sur une distance de 1500 m. Une deuxième étude a été entreprise pour suivre l'évolution dans le temps des produits déposés sur le fond. Il apparaît que les matériaux rejetés sont très mobiles comparativement aux sédiments naturels en place.

Entre Le Havre et Antifer, les expériences par traceurs radioactifs ont montré un mouvement général des sédiments vers le Nord Est par des fonds inférieurs à -15 rn, ce qui occasionne l'envasement progressif du terminal pétrolier d'Antifer (Crevel, 1983). D'autres expériences, réalisées au Nord du terminal pétrolier et sur les ridins situés au Nord Est de la Baie de Seine, contmnent l'existence d'un transit sédimentaire depuis la partie nord-orientale de la baie vers la Manche orientale.

En conclusion, les différentes expériences par traceurs radioactifs entreprises dans la baie montrent que la résultante des transits sédimentaires par charriage est le plus souvent dirigée vers l'estuaire de la Seine. Ce transit est dû à l'action des courants de flot dominants. Près des côtes, au­dessus de l'isobathe -6 rn, les houles de secteur Ouest à Nord Ouest provoquent en outre un déplacement des sables vers la côte, d'autant plus important que la tranche d'eau diminue.

433 - Synthèse des mouvements sédimentaires en Baie de Seine orientale

La figure 99 résume l'ensemble des données disponibles sur les mouvements sédimentaires en Baie de Seine orientale et dans l'embouchure de la Seine. En Baie de Seine, il y a un mouvement général des sables en direction de l'estuaire. La barre d'embouchure de la Seine, de plus de 20 rn d'épaisseur, résulte de l'accumulation progressive de sables durant la remontée du niveau de la mer au cours de l'Holocène. A l'heure actuelle, l'estuaire est presque entièrement rempli de sédiments sablo-vaseux d'origine marine et continentale. Les sables issus des fonds de la Baie de Seine sont redistribués dans l'estuaire par les courants de marée dans différentes cellules de circulation. Dans l'estuaire naturel, le transport bidirectionnel des sédiments parallèlement aux directions des courants avait formé des bancs sableux plus ou moins linéaires séparés par des chenaux de flot et de jusant. Cette configuration a été figée par la construction des digues longitudinales. Les houles jouent un rôle non négligeable dans l'embouchure en renforçant l'action des courants et en provoquant un transport sédimentaire vers l'amont.

Les sédiments fluviatiles en suspension qui arrivent dans l'embouchure à basse mer depuis le chenal de navigation sont partiellement réintroduits dans les chenaux Nord et Sud par les courants de flot, si bien que l'expulsion en mer de ces sédiments reste modérée en dehors des périodes de forte crue. A l'exception de l'avant-port du Havre et de l'embouchure, la quantité de sédiments d'origine fluviatile qui arrive en mer n'est pas suffisante pour induire d'importants dépôts vaseux en Baie de Seine. Par contre, d'autres sources de matériel fin semblent jouer un rôle significatif dans l'augmentation des envasements constatés au cours des 30 dernières années : érosion de sédiments relictes à l'affleurement sur le fond de la baie, érosion des falaises, et introduction de particules fines depuis la Manche occidentale comme le montre l'utilisation des radionucléides utilisés comme marqueurs de l'influence marine dans la baie et dans l'estuaire.

DIRECTION DES TRANSITS SEDIMENT AIRES

matériel sjlto-ar2ileux (suspension)

SUSPENSIONS FLUVJA TIL ES

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APPORTS DU LARGE

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matériel sableux (charriage)

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Le· Havre

5 km

Fig. 99 - SCHEMA SYNTHETIQUE DES MOUVEMENTS SEDIMENTAIRES DANS L'EMBOUCHURE ET LA BAIE DE SEINE ORIENTALE

N

Techniques utilisées : granulométrie, traçages radioactifs, sonar latéral, mesures de courants et de flux,

analyses géochimiques

0 • 9 20

144

Ces radionucléides se retrouvent en période d'étiage jusqu'à 30 km en amont de l'embouchure. Le matériel marqué peut correspondre à la fois à des sources marines diverses et à des apports fluviatiles expulsés en mer en crue et réintroduits en étiage avec une signature marine acquise lors de leur séjour dans la baie. Les données géochimiques disponibles sur les métaux­traces et les terres rares conïmnent cette hypothèse (Guéguéniat et al., 1986).

Les dépôts de produits de dragage constituent une source importante de matériel fin en Baie de Seine, le dépôt de dragages d'Octeville jouant un rôle significatif dans l'envasement de la partie nord-orientale de la baie. On peut constater qu'une grande partie des apports de la Seine ne se dépose pas directement dans la baie, mais qu'après s'être décantés en premier lieu dans l'avant-port du Havre, ils sont dragués et rejetés avant de se disperser au large.

434- Bilan sédimentaire dans l'estuaire et la Baie de Seine

Bien que de nombreuses inconnues subsistent dans la connaissance des mécanismes et des flux, il est possible de proposer un bilan sédimentaire estimatif des entrées, des sorties et des dépôts de sables et de vases dans l'estuaire et la partie orientale de la Baie de Seine (Avoine, 1987). L'estuaire de la Seine se comble actuellement à une vitesse de l'ordre de 4 millions de m3 par an. Les vases représentaient en 1985 environ un tiers des dépôts (1,5 million de m 3

), auxquels il faut ajouter les 1,5 million de m3 de dépôts annuels dans l'avant-port du Havre. Le volume total de sédiments qui se dépose au niveau du littoral de la Baie de Seine orientale représente environ 2,5 millions de m3 de sables et 3 millions de m3 de vases. Comme les apports fluviatiles ne sont au maximum que de 1,3 million de m 3

, la plus grande partie du matériel sablo-vaseux est d'origine marine, soit environ la moitié des dépôts vaseux et la totalité des dépôts sableux.

L'origine des sables est liée à l'érosion des fonds de la Baie de Seine par les agents hydrodynamiques. La comparaison des cartes bathymétriques de la baie a montré un accroissement moyen des profondeurs de 0,68 rn entre 1874 et 1913, soit en moyenne 1,7 cm par an, et de 1,5 cm par an au cours des cinquante dernières années. Etendue à l'ensemble du secteur allant du Havre à Ouistreham, l'érosion des fonds de la baie peut être évaluée à 2,5 millions de m 3 par an, à laquelle s'ajoute la dérive littorale (50 000 m3 annuels en provenance du secteur intertidal de la côte du Calvados) et l'apport éventuel de sables au niveau des rubans de sable observés par imagerie sonar.

Dans l'estuaire de la Seine proprement dit, la SOGREAH a donné en 1994 un schéma de synthèse des apports dans les zones draguées, indiquant les sources d'apports, les résultantes de transport amont et aval, ainsi que les zones de dépôts (Fig. 1 00). Cette étude conclut aux estimations suivantes :

- les sables proviennent principalement de la Baie de Seine (2,5 millions de m3 par an), - dans la zone Sud, les sables progressent vers la digue du Ratier, 0,5 million de m3 pouvant

franchir celle-ci annuellement, -dans la zone Nord, 0,1 million de m3 serait apporté par an dans le chenal de navigation par

la brèche située en amont de Honfleur, - dans le chenal central, la résultante des transports serait dirigée vers l'aval entre les

méridiens 0 et+ 8, et vers l'amont de+ 8 à+ 15 (de l'ordre de 0,3 million de m 3 par an).

L'influence des dragages d'entretien du chenal de navigation, d'un volume annuel moyen de 4 à 5 millions de m3

, n'est sans doute pas négligeable sur la sédimentation et les bilans sédimentaires dans l'estuaire. Toutefois, on ne dispose pas à l'heure actuelle de données précises sur l'impact des rejets, en dehors de l'exhaussement des fonds qu'ils induisent dans l'embouchure, comme il a été vu dans la première partie de cette synthèse.

- 0

1200

-10

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1/0 450 115

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SCHEMA DE SYNTBESE

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FIG. 100 • SCH~MA DES APPORTS DANS LES ZONES DRAGUEES (d'après SOGREAH, 1994)

1200.

-10

1190-

-/J

146

L'origine des vases est beaucoup plus difficile à cerner. Sur les 1,3 million de m 3 maximum apportés annuellement par la Seine, une partie est probablement dispersée en Manche orientale lors des fortes crues. Les sources marines doivent donc contribuer pour plus de la moitié aux dépôts fins. L'érosion des sédiments vaseux relictes affleurant sur le fond de la Baie de Seine orientale constitue probablement la source la plus importante, mais cette contribution reste impossible à chiffrer, aussi bien que celle des autres sources. La difficulté de quantifier les apports de matériel fin n'est pas propre à l'estuaire et à la Baie de Seine, elle se retrouve dans la plupart des autres environnements fluvio-marins qui ont été étudiés à travers le monde.

147

4-4 CONCLUSION SUR LA DYNAMIQUE SEDIMENT AmE

Dans l'estuaire de la Seine, les sédiments se déplacent essentiellement en suspension. La dynamique des matières en suspension est plus particulièrement bien connue dans le chenal de navigation. Les sédiments fins en suspension forment un bouchon vaseux très turbide, dont l'existence et le développement sont liés à la marée et aux courants qu'elle engendre, le débit fluvial jouant plutôt un rôle secondaire. La masse de MES est en rapport étroit avec les vitesses de courant près du fond qui conditionnent les forces tractrices responsables de l'érosion des sédiments occupant le fond du chenal. Au cours de la marée, cette masse varie de manière considérable ; elle est importante lorsque les courants sont forts, très faible au cours des étales pendant lesquelles la décantation est très rapide, surtout à pleine mer. Le cycle vives eaux-mortes eaux joue de ce fait un rôle essentiel. En marée de vives eaux, les courants de marée sont élevés et le bouchon vaseux est bien développé, alors qu'en marée de mortes eaux il est très réduit. Les fluctuations saisonnières du débit fluvial entraînent une migration amont-aval du bouchon vaseux, de la période d'étiage à la période de crue, qui atteint une quinzaine de kilomètres. En forte crue, le bouchon vaseux sort entièrement à l'extérieur de l'estuaire et se disperse en partie dans les eaux de la Baie de Seine. Hormis ce dernier cas, le bouchon vaseux reste cantonné dans l'estuaire du fait de l'asymétrie de l'onde de marée. Dans l'embouchure, selon les quelques données disponibles uniquement en étiage, le chenal Nord a un comportement voisin du chenal de navigation, tandis que le chenal Sud, moins turbide, est moins influencé par les apports fluviatiles, sauf en période de crue.

Au cours des 40 dernières années, la position moyenne du bouchon vaseux a fluctué de manière considérable. De 1955 à 1981, le bouchon vaseux a migré progressivement vers l'aval, de près de 50 km en 25 ans. Depuis 1981, cette tendance globale s'est renversée, le bouchon vaseux remontant lentement dans l'estuaire vers une position plus amont. La première phase de migration vers l'aval est liée aux modifications de la dynamique estuarienne occasionnées par l'endiguement du chenal de navigation et au comblement progressif de l'estuaire, tandis que la deuxième phase de remontée vers l'amont est associée à l'accroissement des sections du chenal et à une baisse relative des débits de la Seine au cours des dernières années.

Le bouchon vaseux jouant un rôle essentiel dans les processus de sédimentation vaseuse, il est nécessaire de connaître aussi bien que possible sa dynamique et ses fluctuations. ll faut noter que la plupart des données disponibles ayant été acquises à la fin des années 70, la dynamique actuelle du bouchon vaseux n'est pas connue avec précision, compte tenu des nombreuses modifications morphologiques et sédimentologiques survenues dans l'estuaire depuis une quinzaine d'années.

L'impact des apports de la Seine en mer se fait essentiellement sentir en période de crue. Le panache d'eau turbide formé par la sortie des eaux de l'estuaire a alors une grande extension, une partie des eaux chargées en MES pouvant s'écouler vers la Manche orientale. Toutefois, si ces apports ont périodiquement une influence notable sur les caractéristiques hydrologiques de la baie de Seine, leur contribution à la sédimentation vaseuse de la baie semble être modérée.

En Baie de Seine orientale, la dynamique des sédiments fins est contrôlée par l'action combinée des courants de marée et des houles. Le transport des MES est généralement dirigé vers l'estuaire de la Seine dans les eaux de fond quel que soit le débit fluvial, contribuant ainsi à son envasement. Du fait de l'asymétrie de l'onde de marée, il y a également un mouvement général des sables en direction de l'estuaire sous l'action dominante des courants de flot, qui contribuent également au comblement de l'estuaire. A l'heure actuelle, l'estuaire de la Seine est presque

148

entièrement rempli de sédiments sablo-vaseux d'origines à la fois marine et continentale, sans qu'il soit possible dans l'état actuel des connaissances d'établir un bilan précis de la contribution des différentes sources de sédiments. Il apparaît toutefois qu'en ce qui concerne les sables, l'influence marine est prépondérante, tandis que pour les vases, le domaine marin doit contribuer pour la moitié environ des apports.

CONCLUSION GENERALE

*******

SYNTHESE DES DONNEES EXISTANTES

RECOMMANDATIONS D'ETUDES

150

CONCLUSION GENERALE

ETAT DES CONNAISSANCES

Evolution historique de l'estuaire

La morphologie de l'estuaire de la Seine résulte essentiellement des travaux d'aménagement. Les apports sédimentaires naturels contribuent à son comblement. L'exhaussement des fonds qui en résulte est un phénomène irréversible. Au cours des 25 dernières années, les modifications morphosédimentaires concernent notamment le déplacement des axes des chenaux Nord et Sud, l'exhaussement général des fonds, la diminution de la surface des zones intertidales, l'évolution très rapide des herbus.

La couverture sédimentaire et ses fluctuations

Les sédiments de la Baie de Seine comportent des sables moyens à graveleux peu ou pas mobiles, des sables !ms très homogènes qui se déplacent du Nord Ouest vers le Sud Est en direction de l'estuaire de la Seine et qui contribuent à son comblement, des sablons et des pélites facilement remobilisables. Les dépôts vaseux montrent des fluctuations saisonnières importantes, et une extension très notable au cours des 25 dernières années attribuée en grande partie à l'érosion de silts argileux fossiles. Les sédiments de l'estuaire de la Seine sont des sables fins surtout représentés dans la partie Sud et dans le chenal de navigation en amont de Honfleur, et des sédiments sabla­vaseux et vaseux qui forment une grande partie de la vasière Nord, du chenal Nord et de l'embouchure. Depuis une quinzaine d'années, la tendance est à l'envasement progressif de l'estuaire, tout particulièrement dans sa partie Nord.

Caractères hydrologiques

L'influence des eaux marines dans l'estuaire se traduit par un gradient longitudinal, la limite du front de salinité oscillant d'amont en aval au gré des variations des marées et du débit fluvial, un gradient vertical qui reflète la stratification souvent importante des eaux, un gradient transversal encore mal connu, les seules données existantes montrant toutefois que les trois chenaux présentent des régimes hydrologiques relativement bien distincts. La limite amont de l'intrusion saline a considérablement évolué au cours des 40 dernières années, migrant d'abord vers l'aval en relation avec l'endiguement du chenal de navigation de la Seine et avec le comblement progressif de l'estuaire, puis vers l'amont suite à l'accroissement relatif de la section de l'écoulement dans le chenal de navigation consécutif à son approfondissement, et à la diminution des débits. Les eaux douces apportées par la Seine ont une influence notable sur l'hydrologie des eaux de la Baie de Seine orientale, occasionnant des dessalures importantes durant les périodes de crue.

Dynamique sédimentaire

Dans l'estuaire de la Seine, les sédiments fins en suspension forment un bouchon vaseux très turbide qui fluctue avec la marée. Les variations saisonnières du débit fluvial entraînent une migration amont-aval du bouchon vaseux qui peut atteindre une quinzaine de kilomètres. En forte crue, le bouchon vaseux sort entièrement de l'estuaire et se disperse en partie dans les eaux de la Baie de Seine. Dans l'embouchure, selon les quelques donnés disponibles en étiage, le chenal Nord a un comportement voisin du chenal de navigation, tandis que le chenal Sud, moins turbide, n'est influencé par les apports fluviatiles qu'en période de crue. Au cours des 40 dernières années, la position moyenne du bouchon vaseux a évolué de manière considérable parallèlement au front de salinité, migrant d'abord progressivement vers l'aval, puis vers l'amont.

151

A l'heure actuelle, l'estuaire de la Seine est presque entièrement comblé par des sédiments sablo-vaseux d'origine à la fois marine et continentale, sans qu'il soit possible dans l'état actuel des connaissances d'établir un bilan précis de la contribution des différentes sources de sédiments. Il apparaît toutefois qu'en ce qui concerne les sables, l'influence marine est prépondérante, tandis que pour les vases, le domaine marin contribue pour la moitié environ des apports.

ASPECTS INSUFFISAMMENT CONNUS

La réduction volumétrique de l'estuaire est un phénomène bien connu, estimé à 3 à 5 millions de m3 par an (fourchette due notamment à l'emprise du secteur considéré par les différents auteurs pour ce bilan). Toutefois, on ne connaît pas les mécanismes de redistribution des sédiments après leur introduction dans l'estuaire, notamment le rôle joué par les rejets de dragages dans l'exhaussement des fonds de l'embouchure et du chenal Nord, ni la part des phénomènes naturels.

On ne dispose pas de données précises sur l'évolution verticale des dépôts dans l'embouchure, tout particulièrement sur une éventuelle augmentation de l'envasement dans le temps, comme peut le faire penser le passage en une quinzaine d'années de sédiments à dominante sableuse à une couverture sablo-vaseuse à vaseuse. Par ailleurs, les fluctuations saisonnières dans l'embouchure sont mal documentées, ainsi que l'origine des sédiments dont on ne peut pas chiffrer précisément, dans l'état actuel des connaissances, la part marine et continentale.

Le bouchon vaseux jouant un rôle essentiel dans les processus de sédimentation vaseuse, il est nécessaire de connaître sa dynamique et ses fluctuations. Les données recensées concernent essentiellement le chenal de navigation. Encore ces données sont-elles pour la plupart antérieures aux modifications morphologiques et sédimentologiques survenues dans l'estuaire depuis une quinzaine d'années, dont on sait qu'elles ont eu des conséquences sur les caractéristiques hydrosédimentaires de l'estuaire et sur la dynamique des sédiments fins. Pour ce qui est des chenaux Nord et Sud, les informations sont inexistantes, tant sur leur fonctionnement propre que sur les relations qu'ils peuvent avoir avec le chenal de navigation. Quant aux relations estuaire-baie, elles sont encore très faiblement documentées.

RECOMMANDATIONS D'ETUDES

Pour améliorer les connaissances acquises et préciser certains aspects insuffisamment connus sur le fonctionnement hydrosédimentaire de l'estuaire de la Seine, trois approches doivent être menées parallèlement :

1- l'exploitation plus poussée des données disponibles, notamment: - l'étude précise de l'évolution bathymétrique des fonds de l'estuaire, en particulier dans sa

partie Nord, en relation avec l'historique des rejets de dragages, - l'estimation des volumes sédimentés au niveau de la vasière Nord, indispensable pour

préciser les bilans sédimentaires, - l'intégration des études existantes qui n'ont pas été accessibles pour réaliser la présente

synthèse.

2- la réalisation d'études en nature, portant sur : -l'évolution verticale de la sédimentation, principalement dans le chenal Nord, - les fluctuations saisonnières de la couverture sédimentaire, les effets des tempêtes,

152

- la réactualisation des connaissances sur la dynamique du bouchon vaseux et son rôle dans la sédimentation fine, incluant des études hydrosédimentaires dans les différents chenaux, tout particulièrement les chenaux Nord et Sud qui sont très mal connus, les caractéristiques rhéologiques des vases, des traçages de particules, des mesures de flux ...

3 - la construction d'un modèle numérique 3D des mouvements sédimentaires dans l'estuaire, calibré par les mesures en nature. Ce modèle, qui doit être capable de reproduire l'évolution historique de l'estuaire, est indispensable pour prévoir le devenir de l'estuaire à moyen terme, prenant en compte aussi bien les apports sédimentaires naturels que les modifications morphologiques éventuelles imposées par l'homme.

ANNEXE

EVALUATION DU BILAN SEDIMENT AIRE

DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE.

COMPARAISONS 1978-1994

1986-1994

EVALUATION DU BILAN SEDIMENTAIRE DANS L'ESTUAIRE DE LA SEINE· COMPARAISON 1978·1994

1978 _3 à _2 _2 à 0 Oà2 2à4 4à6 6à8 8 à 10 10 à 12 12 à 14 14 à 16 16 à 18 18 à 20

chenal Nord 88,2 141,61 109,694 69,388 50,134 30,892 22,714 12,748 11,84 4,502 0,21

partie centrale 28,16 35,89 26,33 23,092 23,53 23,79 20,522 22,098 20,076 22,704 20,978 20,16 chenal Sud 65,894 95,824 74,182 67,974 46,164 28,062 11,908 1,436 total

TOTAL 182,254 273,324 210,206 160,454 119,828 82,744 55,144 36,282 31,916 27,206 21 '188 20,16 1220,706

1986 _3 à _2 _2 à 0 Oà2 2à4 4à6 6à8 8 à 10 10 à 12 12 à 14 14 à 16 16 à 18 18 à 20

chenal Nord 85,12 135,402 104,15 71,858 50,59 32,398 22 16,976 11,96 5,104

partie centrale 27,204 33,912 25,324 27,09 22,696 24,24 23,176 22,68 21,494 23,788 18,84 18,782

chenal Sud 67,294 92,602 72,828 64,908 43,62 27,534 10,346 1,87

TOTAL. 179,618 261,916 202,302 163,858 116,906 84,172 55,522 41,526 33,454 28,892 18,84 18,782 1205,788

1994 _3 à _2 _2 à 0 Oà2 2à4 4à6 6à8 8 à 10 10 à 12 12 à 14 14 à 16 16 à 18 18 à 20

chenal Nord 86,081 125,876 103,152 71,252 51,192 31,184 22,014 16,04 10,91 3,376

partie centrale 22,857 29,55 27,774 26,992 24,631 24,164 22,846 23,872 22,418 21,938 18,348 18,061

chenal Sud 65,033 92,954 70,892 64,63 43,476 27,026 10,266 2,142

TOTAL 173,971 248,38 201,818 162,874 119,299 82,374 55,126 42,054 33,328 25,314 18,348 18,061 1180,947

1978·1986 ·2,636 ·11 ,408 ·7,904 3,404 ·2,922 1,428 0,378 5,244 1,538 1,686 ·2,348 ·1,378 ·14,918

1986·1994 ·5,647 ·13,536 ·0,484 ·0,984 2,393 ·1 ,798 ·0,396 0,528 ·0, 126 ·3,578 ·0,492 ·0,721 ·24,841

1978·1994 ·8,283 ·24,944 ·8,388 2,42 ·0,529 ·0,37 ·0,018 5,772 1,412 ·1 ,892 ·2,84 ·2,099 -39,759

Différence 1986 /1994

chenal Nord 0,961 ·9,526 -0,998 ·0,606 0,602 -1,214 0,014 -0,936 -1,05 -1,728

partie centrale -4,347 -4,362 2,45 -0,098 1,935 ·0,076 -0,33 1,192 0,924 ·1,85 -0,492 -0,721

chenal Sud -2,261 0,352 ·1,936 -0,278 -0,144 ·0,508 ·0,08 0,272

Total ·5,647 ·13,536 ·0,484 .-0,984 2,393 ·1,798 -0,396 0,528 -0,126 ·3,578 -0,492 -0,721

EVALUATION DU BILAN SEDIMENTAIRE DANS L•ESTUAIRE DE LA SEINE- COMPARAISON 1986-1994

1986 -3à -2 _2 à 0 Oà2 2à4 4à6 6à8 8 à 10 10 à 12 12 à 14 14 à 16 16 à 18 18 à 20

chenal Nord 85,12 135,402 104,15 71,858 50,59 32,398 22 16,976 11,96 5,104

partie centrale 27,204 33,912 25,324 27,09 22,696 24,24 23,176 22,68 21,494 23,788 18,84 18,782

chenal Sud 67,294 92,602 72,828 64,908 43,62 27,534 10,346 1,87

TOTAL 179,618 261,916 202,302 163,858 116,906 84,172 55,522 41,526 33,454 28,892 18,84 18,782

1994 _3 à _2 _2 à 0 Oà2 2à4 4à6 6à8 8 à 10 10 à 12 12 à 14 14 à 16 16 à 18 18 à 20

chenal Nord 86,081 125,876 103,152 71,252 51' 192 31 '184 22,014 16,04 10,91 3,376

partie centrale 22,857 29,55 27,774 26,992 24,631 24,164 22,846 23,872 22,418 21,938 18,348 18,061

chenal Sud 65,033 92,954 70,892 64,63 43,476 27,026 10,266 2,142

TOTAL 173,971 248,38 201,818 162,874 119,299 82,374 55,126 42,054 33,328 25,314 18,348 18,061

Différence

chenal Nord 0,961 ·9,526 ·0,998 ·0,606 0,602 ·1,214 0,014 ·0,936 ·1,05 -1 '728

partie centrale -4,347 -4,362 2,45 ·0,098 1,935 -0,076 ·0,33 1 '192 0,924 ·1 ,85 ·0,492 ·0,721

chenal Sud -2,261 0,352 ·1,936 ·0,278 -0,144 ·0,508 -0,08 0,272

Total -5,647 -13,536 -0,484 -0,984 2,393 -1,798 -0,396 0,528 -0,126 -3,578 ·0,492 -0,721

' LEGENDE

BILANPOSmF 24 841 millions de m3 sur 8 ans (-) Sédimentation

[en M m3] bilan annuel : 3,1 05 sur vasière nord (+)Erosion 04 en aval dL méridien 3

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