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Pour mémoire La Grande Guerre sur les écrans de cinéma Dossier rédigé par Mathilde Marguerit, Professeur d’histoire géographie, académie d’Amiens

Pour mémoire La Grande Guerre sur les écrans de … · Abel Gance a repris le titre d’un article célèbre d’Émile Zola pour la défense de Dreyfus. À noter qu’Abel Gance

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Pour mémoire

La Grande Guerre sur les écrans de cinéma

Dossier rédigé par Mathilde Marguerit, Professeur d’histoire géographie, académie d’Amiens

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Sommaire

Présentation ............................................................................................................................................. 3 

Le vocabulaire à connaître pour l’analyse d’extraits de films et d’images (photographies, affiches) ........ 5 

J’accuse d’Abel Gance ............................................................................................................................. 9 

The Big Parade de King Vigor ................................................................................................................ 13 

À l’Ouest, rien de nouveau de Lewis Milestone ...................................................................................... 19 

Les Croix de bois de Raymond Bernard ................................................................................................. 26 

La Vie et rien d’autre de Bertrand Tavernier ........................................................................................... 30 

Annexes ................................................................................................................................................. 37 

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Présentation

Niveau concerné Classe de 3e

Nombre d’heures prévues 2 heures en classe / travail individuel à la maison

Place dans la programmation

Prérequis et/ou acquis antérieurs

Chapitre : la Première Guerre mondiale Les élèves ont étudié une grande partie de la question (les phases de la guerre – une guerre totale). Ils maîtrisent donc un vocabulaire conséquent sur le sujet. Ce travail est présenté à la fin de la séquence portant sur le bilan de la guerre et permet de faire le lien avec le chapitre suivant : « Les démocraties en crise dans les années trente » ; il peut servir d’appui pour l’épreuve d’histoire des arts (méthode).

Problématique De quelles manières présente-t-on la Grande Guerre au cinéma ?

Objectifs de la séquence

Compétences /

Connaissances /

Capacités et mises en œuvre

Compétences

• Analyser des extraits vidéo en prenant en compte l’ensemble de l’œuvre et en mobilisant un vocabulaire cinématographique de base.

• Savoir se placer dans le contexte historique.

• Repérer des techniques cinématographiques propres à un réalisateur.

Connaissances

• Savoir restituer des notions historiques vues en classe.

Capacités

• Travailler en autonomie.

• Prendre des notes à partir d’un extrait vidéo.

• Synthétiser des informations.

• Critiquer une œuvre, argumenter.

Films choisis • J’accuse d’Abel Gance (1919 – muet, 1938 – parlant)

• The Bid Parade de King Vigor (1925)

• À l’Ouest rien de nouveau de Lewis Milestone (1930)

• Les Croix de bois de Raymond Bernard (1931)

• La Vie et rien d’autre de Bertrand Tavernier (1989)

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Déroulement de la séquence (bref descriptif)

• Dans la salle accueillant la classe mobile (ordinateurs portables) ou dans la salle informatique : au préalable, les extraits qui seront analysés en classe ont été placés dans le dossier thématique « La Grande Guerre au cinéma ».

• Distribution du dossier et explications générales de l’enseignant (objectifs, déroulement de la séquence, activités).

• Le professeur visionne les extraits des films à l’ensemble de la classe depuis son ordinateur (diffusion sur vidéoprojecteur des extraits).

• Il divise ensuite la classe en plusieurs groupes (15 groupes de 2).

• Chaque groupe s’installe devant son ordinateur et visionne une nouvelle fois l’extrait de film qui lui a été attribué.

• Analyse des extraits.

• Au cours suivant (1 heure), le professeur ramasse les réponses et correction collective des questions.

Prolongements possibles

À la maison, les élèves peuvent composer un texte argumenté dans lequel ils expliquent l’intérêt de l’œuvre par rapport à l’étude de la Grande Guerre et témoignent de leurs impressions personnelles.

Pistes d’évaluation

Ce travail doit être présenté comme un apprentissage pour de futures études cinématographiques. Les élèves doivent s’approprier une méthode afin de pouvoir la réutiliser avec d’autres extraits.

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Le vocabulaire à connaître pour l’analyse d’extraits de films et d’images (photographies, affiches)

Un plan au cinéma : c’est une prise de vue. On filme une scène pendant quelques secondes en général (rarement, plusieurs minutes). Ensuite, on place les plans les uns après les autres : c’est le montage. Les plans assemblés forment ainsi une séquence.

Les plans au cinéma : les mouvements de caméra

La caméra suit un plan horizontal : cela donne l’impression d’un panorama et permet de suivre des personnages qui se déplacent ou de filmer unpaysage entier.

La caméra suit un plan vertical : elle filme de haut en bas, ou de bas en haut.

Cela permet de filmer des bâtiments élevés et de recadrer ensuite, sur des personnages par exemple.

Un travelling (avant, arrière, de côté) : la caméra avance sur des rails et filme le personnage en train de se déplacer.

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Le zoom avant : on rapproche la caméra vers l’objet ou le personnage.

Le zoom arrière : on recule, on s’éloigne.

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Les transitions entre les plans : le passage d’un plan à un autre

• Le fondu : on passe d’une image à une autre image. Un écran noir le plus souvent, plus ou moins rapide, sépare les deux images. On peut ainsi changer d’époque ou de lieu.

• Le fondu enchaîné : on superpose une image sur une image (qui finit par disparaître). Cela donne l’impression du temps qui passe.

Exemple ici : Au départ, on voit un plan sur des hommes défilant en civils. L’image devient floue puis les hommes apparaissent en soldats (The Big Parade de King Vidor, 1925).

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Les différentes échelles des plans cinématographiques ou photographiques

Très gros plan Gros plan Plan rapproché, poitrine

Plan américain Plan moyen Plan de demi-ensemble

Plan d'ensemble Plongée Contre plongée

Source : Académie de Reims, lecture de l’image http://www.ac-reims.fr/datice/lettres/cinema/plans.htm

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J’accuse d’Abel Gance Un réquisitoire contre la guerre

Résumé L’histoire tourne autour de trois personnages centraux : Jean, François et son épouse Édith, mariée par contrainte. Jean et Édith tombent amoureux pendant la guerre. Mais elle est emmenée, avec les autres femmes du village, par les Allemands qui les violent. Elle rentre chez elle. François est mort à la guerre et Jean est devenu fou (il a des visions : il voit des soldats et des cadavres qui reviennent à la vie). Il finit par mourir.

Informations principales sur le film

Le réalisateur Abel Gance (1889-1981) est un réalisateur français et un producteur de cinéma.

Le film Noir et blanc.

Il existe deux versions du film, celle de 1919 (muette) et celle de 1938 (parlante), remaniée.

Scènes tournées en studio.

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Analyse d’un extrait du film

Extrait : La « résurrection » des morts

Les élèves peuvent donner eux-mêmes un titre après avoir vu la séquence.

• La marche funèbre des « fantômes »

• Le « réveil » des morts

• Le monologue du personnage Jean qui appelle les soldats morts

• Le mémorial surplombe le cimetière

• Le vent s'engouffre dans la porte d’entrée du cimetière

• Les statues veillent sur les morts du cimetière

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Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Dans quel lieu se déroule cet extrait ? Superficie ? On se trouve dans un cimetière militaire = immense = nécropole nationale.

• Quel type de monument domine la colline ? Un mémorial très important se trouve en haut de la colline (Douaumont ?)

• Décrivez les statues que l’on aperçoit dans l’extrait. Les statues représentent des soldats allongés (gisants) ou des femmes tenant des drapeaux. Elles rappellent les sculptures qui se trouvent sur les monuments aux morts (des femmes pleurant, tendant leurs bras vers les tombes).

• Les croix sont-elles toutes identiques ? Il y a des croix et des tombes blanches. Il y a aussi des croix noires (avec des noms allemands).

• Dans quel état physique se trouvent les soldats qui ressurgissent ? Ils sont dans des états différents (certains sont en état de décomposition proches du squelette, d’autres sont des « gueules cassées », il y a des invalides, des mutilés, certains sont à peine blessés). Certains portent leurs camarades ou les soutiennent.

• À la fin de l’extrait, Gance rend hommage à tous les combattants de la Grande Guerre : indiquez leur origine, leur unité militaire. On distingue des soldats français, des Allemands (leurs noms apparaissent) ; il y a des soldats à pied, des soldats dans leurs avions, d’autres sont des marins.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Replacez dans l’ordre chronologique de l’extrait du film les différentes captures d’écran (ci-dessus) en les numérotant. Écrivez les titres correspondants dans les cases.

• Pourquoi peut-on dire qu’Abel Gance a su créer une ambiance fantomatique qui rappelle celle des films d’horreur ?

- au niveau du son : les cris, le vent, l’orage qui tonne, les portes qui claquent, - au niveau des images (lieu, symboles, objets, etc.) : des cadavres qui surgissent des tombes et qui se déplacent ; des sculptures qui prennent vie, un monument religieux et militaire qui surplombe la colline et dont le sommet pointe vers un ciel menaçant.

• Comment l’acteur est-il filmé ? Dans quels buts ? Quel rôle joue sa voix ? L’acteur est cadré en plan serré, parfois de face parfois en contre-plongée ; son regard est triste, ou inquiétant ; il a l’air d’un « illuminé », d’un fou. Il a l’air crispé. Sa voix est tonitruante, dramatique.

• Quels types de plans ont été utilisés par Gance ? Gance alterne les plans, parfois de manière rapide, pour montrer le déchaînement de la nature, la force de l’orage et la panique. • Les plans serrés fixent les gens apeurés, les statues. • Les travellings de côté filment les cimetières pour montrer leur immensité. • Les plans de face cadrent les soldats qui sortent de leurs tombes et qui avancent. • Parfois les images se gondolent = visions, rêves du personnage.

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Connaissances apportées par le professeur Cet extrait est l’un des moments les plus frappants du film : la levée des morts sur le champ de bataille est impressionnante. Ils reviennent hanter les vivants et leur demander des comptes car ils se sont mal conduits et ont oublié le sacrifice de leurs soldats. Cela donne un aspect fantastique.

Cet extrait est aussi un hommage aux soldats = culte des morts. Le film dénonce la guerre qui a causé la mort de millions d’hommes. Abel Gance a repris le titre d’un article célèbre d’Émile Zola pour la défense de Dreyfus.

À noter qu’Abel Gance a fait appel à de vrais mutilés dans ce film. Il a utilisé une quadruple surimpression d’images (arrière-plan = vrai ciel nuageux ; les croix = celles du cimetière de Douaumont ; les morts qui portent des masques de squelettes = en studio, et enfin la marche des gueules cassées).

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The Big Parade de King Vigor Un film plaidoyer contre la guerre, ou « l’amour plus fort que la guerre »

Résumé Un jeune Américain (issu d’une famille riche) s’engage dans l’armée en 1917 dans une ambiance de joie et d’insouciance. Il part combattre en Europe. Il devient l’ami de deux autres soldats. Il rencontre en chemin une jeune paysanne dont il tombe amoureux. Mais la réalité de la guerre l’arrache à elle (combats, horreurs, etc.). Il finit par être blessé. Hospitalisé, il fuit de sa chambre pour rejoindre sa bien-aimée. Il ne la retrouve pas. Amputé d’une jambe, il rentre en Amérique où il est accueilli en héros. Mais l’homme revient marqué par les horreurs de la guerre. Il n’est plus l’enfant gâté du début du film. Il retournera en France rejoindre celle qui ne l’a pas oublié.

Informations principales sur le film

Le réalisateur King Vigor (1894-1982) est un réalisateur américain qui a réalisé une cinquantaine de films.

Le film Sortie en 1925.

Noir et blanc, 141 minutes. Film muet.

Effets sonores et musique de William Axt, interprétée par le London Philharmonic Orchestra conduit par Carl Davis.

Acteurs principaux : Renée Adorée (la paysanne Mélisande) et John Gilbert (James Apperson).

Analyses d’extraits du film

Extrait 1 : Le héros s’engage dans l’armée

Photo 1 Photo 2

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Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Décrivez les hommes filmés en plan large au tout début. (photo 1)

Ils portent des tenues différentes = casquettes, chapeaux, costumes trois pièces, blouses (aristocrates ? ouvriers ? petits employés ? = origines sociales différentes). Ils sont d’âges et de corpulences différents. Ils ont déjà leurs tenues militaires dans les bras ou sur les épaules. À gauche de l’écran, un officier semble donner des ordres ou des consignes.

• Quelle est leur attitude ?

Certains rient et s’amusent, se donnent des coudes. Un des homme a l’air plus soucieux que les autres.

• Ont-ils l’air prêts à combattre ?

Pas vraiment. Ils tiennent mal leurs fusils, ils se déplacent dans tous les sens et ne forment pas de rangs serrés (ce sont des volontaires et non des professionnels).

• Dans un autre plan, les civils sont des soldats : quelles différences majeures notez-vous ? (photo 2)

Ils sont armés et équipés. Ils avancent au pas militaire. Ils sont unis dans leur mouvement. Ils ont l’air déterminé.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • De quelle manière le réalisateur a-t-il montré la métamorphose des hommes devenus soldats ?

En utilisant un fondu enchaîné, il a donné l’idée du temps qui s’est écoulé entre leur engagement et leur départ véritable. Ce fondu permet de rendre compte des quelques semaines qui ont dû passer.

• Quel type de musique accompagne les images ? Une musique de fanfare qui surligne la motivation des hommes.

• Pourquoi King Vidor cadre-t-il de manière serrée chacun des visages ? Sur quoi veut-il insister ? Il marque ainsi la détermination des hommes, mais aussi leur fierté. Il montre aussi la solidarité entre ces hommes qui marchent d’un même pas.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait montre le départ à la guerre présenté ici comme enthousiaste, voire insouciant (certains se décident en regardant les autres). On se trouve donc dans un total burlesque, c’est-à-dire que le ton de la scène (le comique) tranche avec le sujet grave dont il est question (le départ à la guerre). Les hommes maladroits partent au combat encore vêtus de leurs habits de ville. Leur gaucherie contraste avec la musique qui rappelle les fanfares patriotiques.

Et puis, avec l’utilisation d’un fondu enchaîné, on passe à une autre atmosphère : les hommes sont devenus de vrais soldats, entraînés, motivés et prêts à en découdre.

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Extrait n° 2 : Le « baptême du feu » dans la forêt, les soldats plongés dans la « boucherie » du front

Plan 1 : Plan :

Plan : Plan :

Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Dans quel lieu se trouvent les soldats ? (plan 1)

Ils traversent une forêt. On n’est donc pas dans une bataille de tranchée.

• De quel type d’affrontement s’agit-il ?

C’est un combat d’infanterie (soldats à pied). Il n’y a d’explosions d’obus. Les armes employées sont la mitraillette, le fusil et la baïonnette (corps à corps). Les Allemands semblent moins nombreux et dispersés mais ils sont très bien armés. Les Américains tombent comme « des mouches ».

• Quels gestes témoignent de la violence des combats ?

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Les soldats tirent sur des hommes cachés dans les arbres et qui tombent de plusieurs mètres. Les ennemis sont exécutés à coups de baïonnette alors qu’ils lèvent les bras. Les soldats américains sont tués en grand nombre : les lignes « s’éclaircissent ».

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Indique ci-dessus à quel plan de cinéma correspond la capture d’image :

– plan rapproché « épaule »,

– plan « américain » (personnage cadré au niveau des cuisses),

– plan large de face (les soldats américains sont filmés de face – la caméra recule = travelling arrière),

– plan large de côté (travelling horizontal).

• Comment le réalisateur Vigor parvient-il à montrer le doute et l’inquiétude chez les soldats ?

Il cadre les visages avec des plans serrés ; les personnages regardent à droite et à gauche.

• Le rythme des images et de la musique change : que remarquez-vous ?

Les hommes redoublent le pas et semblent foncer vers les ennemis. La musique accélère également. On est au sommet de la tension.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait plonge le spectateur en plein réalisme. Fini le ton burlesque, on se retrouve au cœur des combats : on est captivé par cette musique presque angoissante. Chaque mort s’accompagne de notes de musiques graves. Vidor filme l’avancée des soldats en alternant des plans larges, serrés, de face = on a ainsi une vue presque panoramique du combat. Scène presque fantomatique = les hommes sont fauchés par la mort. Ils deviennent alors des obstacles que franchissent les survivants.

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Extrait n° 3 : La séparation

Plan 1

Plan 2

Plan 3

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Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Dans quel lieu se trouvent les personnages ? Décrivez l’ambiance.

Ils sont dans un village ou une petite ville. Il y a des enfants, des femmes, des vieillards, des soldats blessés, des militaires. On assiste à des scènes de liesse (la fin est-elle proche ? La venue des Américains en 1917 est un soulagement). C’est la cohue, les gens courent dans une même direction, d’autres attendent le long de la rue. Les camions, les chevaux, les soldats soulèvent de la poussière = impression de brouillard.

• Pourquoi l’agitation est-elle à son maximum ?

Les soldats américains quittent le village. Les gens se saluent, l’heure de la séparation est arrivée. Un flux interminable de véhicules, de chevaux et d’hommes avance.

• Que tentent de faire les deux héros ?

Ils tentent de se retrouver dans la foule.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Le réalisateur a filmé de la même manière la jeune femme et le soldat Apperson : comment ? (plans 1 et 2)

Les deux personnages sont au centre de l’image et plus éclairés que les autres acteurs. Les autres personnes continuent d’avancer. On dirait qu’ils sont pris au piège de la foule, elle tourne sans cesse sur elle-même ; ils se font bousculer.

• Quel effet apporte la musique ?

La musique renforce l’idée que les deux personnages sont perdus. La musique militaire rappelle au soldat son devoir (celui de poursuivre le combat) et la musique plus orchestrale évoque l’amour qui unit les deux jeunes gens.

• Dans quel genre cinématographique peut-on classer cet extrait ?

On n’est plus dans le burlesque ni dans le film de guerre, on se trouve dans le drame. (plan 3)

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait caractérise la deuxième partie du film, plus mélodramatique que la première, qui est axée sur la guerre et ses horreurs. Le héros est en plein doute. Son amour ne vaut-il pas plus que cette guerre si horrible ? La guerre les arrache l’un à l’autre. Ils sont perdus au milieu de ces gens en liesse qui les agrippent, qui les tirent. Ils marchent à contre-courant. Mais la séparation est inéluctable.

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À l’Ouest, rien de nouveau de Lewis Milestone Adapté du roman pacifiste allemand d’Erich Maria Remarque

Résumé Paul Bäumer est un jeune Allemand de 19 ans. Après avoir été soumis à un « bourrage de crâne » patriotique, tous ses camarades de classe et lui-même s’engagent volontairement dans l’armée allemande. Ils partent en guerre presque heureux et fiers de servir leur pays. Mais après dix semaines d’entraînement, les jeunes soldats découvrent la brutalité de la vie au front et les horreurs de la guerre. Les jeunes hommes perdent leur idéal patriotique et ne croient plus dans le nationalisme prôné par leur maître d’école.

Informations principales sur les œuvres

Le roman de Remarque (Im Westen nichts neues)

Le film de Milestone (All Quiet on the Western Front)

Erich Maria Remarque est né en 1898. Mobilisé en 1917, il combat sur le front de l’est où il est blessé. À son retour de la guerre, il sera instituteur, puis journaliste.

Lewis Milestone est un réalisateur, producteur, scénariste et acteur d’origine moldave, qui a vécu aux États-Unis.

Après À l’Ouest rien de nouveau (1930), il fera d’autres films anti-nazis.

Publication en 1929.

Langue : allemand (Im Westen nichts neues).

Des extraits paraissent d’abord dans un journal, puis le roman est publié en janvier (l’édition française la même année : Librairie Stock, Paris, 303 pages).

Accusé d’être juif, Remarque sera pourchassé par les nazis dès 1930. Il fuit en Suisse puis aux États-Unis. En 1933, son livre sera brûlé par les nazis. Dans le reste du monde, énorme succès.

Sortie en 1930.

Langue : anglais (All Quiet on the Western Front).

Long métrage américain (2 h 11 min). Genre : film de guerre. Drame historique.

Sortie du film aux États-Unis en août (en décembre en France). En Allemagne, des troubles éclatent dans les cinémas à sa sortie ; le film finira par y être interdit et censuré.

Cette même année, il est récompensé par des Oscars.

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Analyses d’extraits du film

Extrait 1 : Début du film (les jeunes hommes s’engagent dans l’armée)

Photo 1 Photo 2

Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Décrivez le départ à la guerre des soldats (foule, atmosphère, nombre, etc.). (photo 1)

Femmes-enfants-personnes âgées = civils très nombreux. Ambiance de fête et de fierté. Musiques populaire et militaire se fondent.

• À quel bâtiment appartient la fenêtre ouverte sur la rue ? C’est une école de garçons.

• Qui se tient derrière le bureau ? À qui s’adresse le professeur ? Que mots utilise-il pour convaincre son public ?

Le maître est debout derrière son bureau. Il exhorte ses élèves, parlant de courage, de bravoure, de patrie. Il tape du poing sur le bureau = il a l’air très convaincant.

• Quelle est l’attitude des élèves ? De quoi rêve le jeune homme ? Les élèves sont fascinés (ils boivent les paroles du maître). Le garçon anticipe son départ : il imagine la fierté de son père, même s’il redoute l’inquiétude de sa mère.

• Que font les jeunes hommes à la fin de l’extrait ? Ils se lèvent avec enthousiasme et se congratulent. (photo 2)

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Quel contraste remarque-t-on entre l’extérieur et l’intérieur de la classe ?

La rue est éclairée = soleil radieux = esprit de fête. Par contre la salle de classe semble plus sombre = solennité du moment.

• Quel mouvement fait la caméra sur le visage du professeur ? Pourquoi ?

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La caméra s’approche tout doucement vers le visage du maître = « zoom ». Cet effet renforce l’idée de persuasion. En filmant la bouche du professeur, Milestone met en scène le pouvoir de la parole.

• De quelle manière le réalisateur filme-t-il les visages ? Pourquoi ?

Lewis Milestone filme les visages en gros plans, et de manière saccadée = ils sont en train d’être convaincus par le maître. Puis il les filme ensemble = idée du groupe.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait montre le départ à la guerre, présenté ici comme enthousiaste (rappel de l’image du départ « fleur au fusil » en France) : union sacrée du peuple autour de ses soldats = patriotisme, mais aussi nationalisme. Le rôle de la jeunesse est primordial = la nation s’appuie sur ses enfants pour soutenir les soldats, mais elle les prépare au combat (mentalement et physiquement). Le maître a ici un rôle fondamental = il transmet les valeurs de la nation. La caméra permet de montrer la force de conviction et le poids de la parole = les élèves se décident à partir.

Extrait n° 2 : La préparation au combat

Photo 1 Photo 2

Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Quel ton utilise le chef pour motiver ses troupes ? (photo 1)

Il est ferme – cassant –, autoritaire. Il parle au groupe et n’individualise plus les personnes.

• Quelle est l’attitude des jeunes hommes ?

Ils sont obéissants et silencieux.

• De quelles manières les prépare-t-on ? (photo 2)

Ils apprennent les chants militaires, la marche en cadence, les techniques de combat.

• Décrivez le camp militaire (nombre de soldats, exercices, etc.).

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Les soldats sont nombreux, regroupés en sections, et défilent sur les ordres de leurs chefs ; il y a des cavaliers et des soldats d’infanterie.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Dans le dortoir, quelle impression donne la disposition des soldats et de leur chef ?

Les recrues forment une allée = position militaire = rang = rigueur, obéissance. Le réalisateur filme l’officier en train de remonter les rangs et élargit le plan pour montrer la cohésion du groupe.

• Pour quelle raison le réalisateur filme-t-il plusieurs fois la même séance d’entraînement ?

Il fait rejouer la même scène aux soldats = pugnacité, volonté d’atteindre le meilleur d’eux-mêmes, d’être prêts au combat. Cela donne du rythme au film = l’entraînement a été long mais on en voit les effets = les soldats sont prêts à se sacrifier.

• Le réalisateur utilise un fondu enchaîné : dans quel but ?

Le fondu enchaîné lui permet de donner du rythme à un temps plus long.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait permet de montrer le basculement physique et mental des jeunes hommes, qui passent du statut d’élèves à celui de jeunes soldats. Cette métamorphose est filmée : arrivée dans le dortoir des garçons, port de l’uniforme, transmission des ordres par un chef autoritaire, entraînement pénible sur le terrain, etc. À travers l’utilisation du fondu enchaîné, Milestone essaie peut-être de montrer que les jeunes hommes quittent progressivement leur individualité pour s’intégrer dans le groupe, pour ne faire qu’un avec leur compagnie. Le chef remplace ici le maître de l’extrait précédent : il transmet d’autres valeurs (le courage, la volonté, l’esprit de sacrifice).

Extrait n° 3 : La dure réalité des combats

Photo 1 Photo 2

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Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Décrivez le paysage du front… Ruines, arbres brisés et isolés, champs détruits, villages quasi disparus, cimetière détruit.

• … les bruits… Obus en train de tomber, cris des hommes, sifflements des balles, corps tombant.

• … et les déplacements des soldats.

Certains courent, d’autres s’écroulent, tandis que d’autres encore sautent au-dessus des obstacles, ou se jettent au sol et rampent.

• Où se cache le jeune Allemand ? Il se précipite au fond d’un trou d’obus.

• Que se passe-t-il au fond de la tranchée ?

Un corps à corps a lieu entre le héros et un soldat français (reconnaissable à sa tenue). Il le poignarde.

• Combien de temps le jeune soldat reste-t-il dans ce trou ? Il y reste une nuit et une grande partie du lendemain.

• Qu’est-ce qui devient insupportable pour le soldat ? Il ne supporte plus les râles du soldat, ses pleurs. Il panique.

• Que dit-il au soldat pourtant mort ? (photo 2) Il lui demande pardon, il l’appelle « frère », il lui en veut d’être mort à sa place.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Pourquoi le réalisateur a-t-il filmé les soldats passant au-dessus de l’Allemand (contre-plongée) ? (photo 1)

Cela renforce l’idée de promiscuité dans les tranchées ; il montre aussi les conditions difficiles des combats = se jeter là où l’on peut sauver sa peau. Le fait que le héros soit en dessous des soldats ennemis permet de le fragiliser encore plus, de donner l’impression qu’il est comme un rat, ou « enterré » vivant.

• Comment le réalisateur a-t-il su filmer le malaise du soldat ? Sa folie ? Il alterne les plans serrés pour montrer que le soldat est pris comme une bête dans une souricière ; il filme de très près le visage pour montrer qu’il est marqué par la douleur et le doute. Il filme le héros en train de secouer le mort = scène volontairement choquante = il tente de le ramener à la vie.

• Comment Milestone place-t-il sa caméra au moment du pardon ? Pourquoi ? Il est placé en plongée (au-dessus des personnages) = une référence quasi religieuse = le pardon est assimilé à un pardon de Dieu, une supplique. Le héros est en pénitence au milieu du champ de bataille.

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Connaissances apportées par le professeur Cet extrait met en scène les horreurs de la guerre et ses atrocités (bruits, mort, cris, cadavres, combats corps à corps, etc.). Le réalisateur se focalise sur le héros qui bascule dans la folie provisoire lorsqu’il se voit contraint de passer une nuit entière aux côtés d’un soldat agonisant durant de longues heures. Il passe du doute au rejet total de la guerre qu’il juge inutile = une des scènes pacifistes du film. Dans cet extrait, l’ennemi porte enfin un nom, possède une identité (ici un père de famille = photo du portefeuille). Le héros perd ses idéaux.

Extrait n° 4 : Le héros en permission et la scène de la salle de classe

Photo 1 Photo 2

Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Pourquoi le maître est-il ravi de revoir le jeune homme ? Il tombe à point = il pense qu’il va appuyer son discours et il apparaît comme un modèle possible pour ces jeunes.

• Que lui demande-t-il de faire ? Il le pousse à raconter pourquoi la guerre est nécessaire, pourquoi il faut s’engager.

• Quels sentiments exprime le héros dans son discours ? Que dénonce-t-il ? Le héros parle de la mort, du néant, de l’inutilité de la guerre. Il semble las et brisé par le combat. Il dénonce le discours propagandiste du maître.

• Quelle est la réaction des élèves ? (photo 2)

Ils s’agitent, se fâchent en majorité ; d’autres s’enfoncent dans leurs sièges. Ils sont nerveux et hurlent sur le soldat.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Le plan sur la fenêtre rappelle un plan identique : lequel ? (photo 1)

Ce plan rappelle celui du début = le départ à la guerre.

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• Décrivez la rue derrière le héros : en quoi l’image de la rue s’oppose-t-elle à celle du début du film ? Que veut alors montrer Milestone ?

Le contraste est saisissant = la rue est désormais vide, aucun passant, aucun bruit. Le discours en provenance de la salle de cours est le même mais il s’oppose au silence de la rue alors que dans la scène d’ouverture, le maître devait hurler pour couvrir le bruit. Le réalisateur veut montrer par là qu’ils sont désormais peu à croire en la victoire.

• Que fait le réalisateur avec sa caméra pour montrer le doute et la lassitude du héros ?

Il zoome sur le visage du héros, et sur ses yeux en particulier, pour montrer la tristesse.

• La scène où les élèves se lèvent en classe en rappelle une autre : laquelle ? En quoi les réactions des élèves dans les deux extraits sont pourtant très opposées ? Cette scène fait écho à celle du début durant laquelle les élèves s’étaient engagés de manière enthousiaste. Ici la colère a pris place = les élèves sont unis. Milestone a peut-être voulu montrer l’obstination collective de certains, l’erreur collective à croire encore à une guerre qui est en train d’être perdue.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait fait écho au début du film (scène de l’engagement des élèves dans l’armée allemande). Les plans sont presque tous identiques (la fenêtre, le maître derrière son bureau, les élèves assis à leurs tables, etc.). Dans l’extrait du début, seul le maître parlait et tenait un discours nationaliste, ici le héros – dans un long monologue – contre-argumente les propos du professeur. Il est las et désespéré. Les élèves, eux, sont encore trop imprégnés par le « bourrage de crâne » de leur professeur et réagissent mal aux propos du soldat qui se fait siffler. Cette scène marque bien le basculement final dans le pacifisme et le rejet de la guerre.

Il faut noter que cette scène fait sûrement référence au contexte historique (année 1917) : en effet, en Allemagne comme en France, le moral est au plus bas chez les soldats mais aussi chez les civils. Les conditions au front comme à l’arrière sont très difficiles. Le héros représente cette perte de confiance en la victoire.

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Les Croix de bois de Raymond Bernard Adapté du roman pacifiste français de Roland Dorgelès (1919)

Résumé Le roman Les Croix de bois rapporte le quotidien de soldats de l’armée française pendant la Première Guerre mondiale, que l’auteur, Roland Dorgelès, a vécu. Dans son roman, il relate – sous un pseudonyme – le déroulement des batailles et les conditions de vie dans les tranchées. Il évoque « l’arrière » également, et sa rencontre avec une jeune femme. La mort est omniprésente. Le soldat idéalise la guerre au départ, mais il perd vite son optimisme et finira par la dénoncer.

Informations principales sur le film

Sortie en 1932.

Noir et blanc, 110 minutes.

Particularité technique : premier film français utilisant le mixage sonore multipiste.

Distribution Adjudant Gilbert Demachy : Pierre Blanchar, caporal Breval : Charles Vanel, soldat Fouillard : Raymond Aimos, soldat Vieublé : Antonin Artaud, soldat Broucke : Paul Azais.

Le réalisateur Raymond Bernard est né en 1891. Il est le fils du dramaturge Tristan Bernard. Acteur à ses débuts, il devint réalisateur et scénariste. Autres œuvres reconnues : Le Miracle des loups (1924), Les Misérables (1934).

Analyses d’extraits du film

Extrait 1 : Début du film (2 premières minutes)

Photo 1 Photo 2

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Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Que voit-on sur le premier plan de l’extrait ? (photo 1)

Des soldats rangés sur plusieurs lignes, portant leurs armes à l’épaule, regardant droit devant eux.

• Quel effet produit l’image montrant les soldats remplacés par des croix blanches ? (photo 1)

La mort semble faucher les hommes ; cela évoque le souvenir de ces disparus rassemblés ensemble dans des cimetières.

• Décrivez les cimetières (croix, tailles).

Ils sont immenses ; il y a un cimetière de croix blanches (français ?) et un avec des croix noires (allemand ?). Au départ, les croix semblent bricolées, provisoires, et puis on a érigé des croix « en dur », et mieux rangées.

• Quelle inscription lit-on sur la croix ? (photo 2) « In memoriam » = « En souvenir de, dédicace à la mémoire d’un défunt ». Il n’y a pas de nom de soldat.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Comment s’appelle la technique qui permet de montrer deux images qui se croisent ? (photo 1)

Il s’agit de la superposition d’images = « surimpression » au cinéma. Ici, la croix remplace le soldat mort.

• Les images sont-elles accompagnées de musique ? Qu’apporte-t-elle ? Oui, une musique solennelle, lente, qui accompagne la disparition des soldats.

• Quelle technique cinématographique est utilisée pour faire disparaître les soldats de l’image ?

Le fondu enchaîné = les hommes disparaissent comme dans un brouillard.

• Comment le réalisateur s’attarde-t-il sur une croix en particulier ?

Il zoome sur la croix.

• Quelle impression donne l’ouverture du film ? On est emmené tout de suite dans une ambiance de mort et de souvenir.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait donne le ton du film marqué par la mort et les horreurs de la guerre. On est plongé dans la réalité du conflit : des milliers de soldats sont tombés au combat. Avec les monuments aux morts, les cimetières en sont les symboles les plus visibles. Les soldats ici sont anonymes = peut-être pour insister sur l’idée de masse. L’utilisation des techniques de cinéma (surimpression et fondu enchaîné) donne à l’extrait une impression de souvenir, de vision presque poétique, comme si le spectateur était plongé dans un rêve.

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Extrait n° 2 : La scène de la bataille

Photo 1 Photo 2

Photo 3 Photo 4

Questions concernant le déroulement du film (références historiques, actions, personnages) • Au début de l’extrait, quelle est la position des soldats ? Qu’attendent-ils ? (photo 1)

Ils sont allongés au fond de leurs tranchées, les uns à côté des autres. Ils attendent vraisemblablement le prochain assaut. Ils rentrent la tête dans leurs épaules afin d’éviter les éclats d’obus et les projections de terre.

• Décrivez le front. (photo 2)

On est au plus près du no man’s land = on voit les barbelés, les ruines, les trous d’obus, les ennemis au loin. Les cadavres accrochés sur les fils.

• Décrivez la bataille (bruits, actions).

L’artillerie pilonne, les explosions d’obus sont permanentes, le bruit assourdissant. Les soldats ennemis tirent à la mitraillette ou au canon. Les Français sont figés dans les tranchées et attendent.

• Quelle est l’attitude des soldats ? Certains ont peur (le héros, l’adjudant Demachy, demande à un autre s’il connaît son adresse = il envisage sa mort prochaine). D’autres sont concentrés, certains sont presque détachés, comme s’ils avaient l’habitude = décalage.

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• Comment l’officier motive-t-il ses troupes ? Il parle de la France « pour la France » ; il fait appel au sentiment patriotique des soldats. Il leur donne un objectif = atteindre l’église au loin.

Questions concernant la mise en scène cinématographique • Quel mouvement fait la caméra au début de l’extrait quand Bernard filme les soldats dans la tranchée ? Dans quel but ?

La caméra suit la ligne composée par les soldats. Elle va vers la droite ; elle remonte, afin de montrer le nombre des hommes qui attendent. Cela permet aussi de montrer la réalité de la vie dans la tranchée (les boyaux, les conditions).

• De quelle manière Bernard filme-t-il les armements ? Pourquoi ?

Les recrues forment une allée = position militaire = rang = rigueur, obéissance. Le réalisateur filme l’officier en train de remonter les rangs et élargit le plan pour montrer la cohésion du groupe.

• Quel est l’intérêt des dialogues entre les soldats ici, dans ce moment si grave ?

Bernard veut peut-être montrer qu’il y a de la vie malgré tout dans ces tranchées et que les hommes continuent à se moquer des autres, à critiquer les officiers.

• Comment Bernard filme-t-il l’assaut qui se prépare ? Où place-t-il sa caméra ? (photo 4)

Il s’est placé tantôt en contre-plongée, afin de montrer que les hommes se préparent à prendre de l’élan, à sauter, tantôt les filmant du dessus, pour montrer qu’ils sont minuscules face à l’immensité de la tâche à accomplir, comme des fourmis cachées dans ces trous.

• Pourquoi le réalisateur filme-t-il en gros plan la montre de l’officier ? (photo 3)

Cette image récurrente permet de rendre compte du temps qui passe = crée de la tension. La vie de ces hommes dépend de cette montre.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait rend compte de la réalité de la guerre (combats, conditions de vie, etc.). C’est une scène d’action = le spectateur est plongé dans la bataille, au milieu de l’artillerie qui pilonne. Tableau classique de la guerre. Mais Bernard a aussi su rendre compte des sentiments vécus par les hommes : les relations soldats/officiers parfois difficiles et tendues, les émotions (la peur de mourir, la lassitude, l’excitation avant l’assaut).

Cet extrait est très proche du roman. Bernard a transposé les impressions du narrateur (exemple cette phrase tirée du livre de Dorgelès : « Cette tranchée toute neuve était ourlée de terre fraîche, comme une fosse commune. C’était peut-être pour gagner du temps qu’on nous y avait mis vivants. »

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La Vie et rien d’autre de Bertrand Tavernier Compter les morts, panser les plaies, rendre hommage aux hommes

Résumé Après la guerre, le commandant Dellaphane (joué par Philippe Noiret) a pour mission de recenser les soldats disparus. Son travail est colossal et long car le nombre de soldats à identifier est énorme. Au fur et à mesure, le commandant désobéit à sa hiérarchie qui lui demande de trouver rapidement le corps d’un soldat inconnu afin de le déposer sous l’Arc de Triomphe et de cesser ainsi la recherche des soldats car son travail est jugé trop coûteux.

Informations principales sur le film

Sortie en 1989.

Durée : 1 h 32 min.

Analyses d’extraits du film

Extrait n° 1 : À l’hôpital militaire

Photo 1 Photo 2 Photo 3

Questions portant sur le contexte historique • Que voit-on – alignées – devant l’hôpital militaire ?

Des croix en bois.

• Le médecin donne des ordres : quel est son grade dans l’armée ? Quelle est sa mission ?

Il est commandant et il est médecin. Il doit identifier les morts, les personnes qui ne savent plus dire leurs noms et les disparus.

• Pourquoi place-t-on un malade contre le mur ?

On veut le photographier et lui donner un numéro.

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• Dans quel état physique est le patient ? Que chante-t-il ?

Le patient est dans son monde, il ne répond pas aux questions. Il a l’air en bonne santé physique mais il n’a plus toute sa tête. Il chante une chanson des tranchées.

• Que recherche la dame dans cet hôpital ? Visite-t-elle son premier hôpital militaire ?

Elle recherche son époux. Elle a parcouru de nombreux hôpitaux à sa recherche.

• Quelle est l’origine de l’homme noir derrière la vitre ? Pourquoi se trouve-t-il là ?

Il est africain. Il est originaire des colonies et a combattu en France.

• Que font les soldats assis dans une pièce ? De quoi discutent-ils ?

Ils parlent des chiffres de mortalité. Il les compare à ceux des guerres napoléoniennes.

• Quel est leur état physique ?

Il y a un homme en fauteuil roulant, un autre sans bras, celui qui est debout semble en meilleure santé.

• Quelle explication donne le soldat après la lecture d’un article de journal ?

Le taux de mortalité dans cette Grande Guerre a été très élevé par rapport aux nombres d’années de combat. Les Français ont perdu beaucoup de soldats (1 sur 3).

Idées historiques mises en valeur

• « Brutalisation » de la guerre : importance des morts, corps marqués, violentés, esprits traumatisés, etc.

• Société déséquilibrée (rapports hommes/femmes).

• Reconnaître et identifier les morts et les disparus : faire le bilan de la guerre//rendre hommage (monument aux morts).

Questions centrées sur le cinéma • Pourquoi Bertrand Tavernier fait-il bouger les hommes autour du soldat que l’on photographie ? (photo 1)

Cela donne l’impression que le soldat est une marionnette autour de laquelle s’activent les soldats qui le manipulent. Il ne contrôle plus rien.

• Quelle impression donnent les gestes méticuleux du médecin et de ses assistants ?

On voit bien qu’ils ont l’habitude de faire cela. C’est un métier. Il n’y a pas de sentiment particulier.

• Dans quel but Tavernier a-t-il fait chanter une chanson grivoise aux acteurs ?

Il veut montrer que la vie continue, que ces hommes qui ont vécu la guerre et ses horreurs partagent aussi des moments de détente.

• Pourquoi Tavernier fait-il suivre par sa caméra la dame dans les couloirs de l’hôpital ? Quelle impression voulait-il donner ? (photo 2)

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Il veut donner l’image d’une femme perdue dans les dédales de l’hôpital, personne ne la renseigne. On la suit. La caméra est derrière elle.

• Pourquoi le réalisateur a-t-il souhaité que le soldat seul dans sa chambre soit silencieux ?

(photo 3)

Cela renforce sa solitude. Il attend que le temps passe. Il est muet et cela accentue la gêne.

Idées cinématographiques mises en scène

• Le spectateur s’est glissé – à la place de la caméra – dans les couloirs et les pièces de l’hôpital ; il assiste à la déchéance physique et mentale de certains soldats. Il pénètre dans l’isolement et la solitude de ces hommes dont certains ne connaissent plus leur nom.

• Contraste entre l’agitation de ceux qui recherchent les disparus (la femme, le médecin, les religieuses) et les soldats eux-mêmes, qui se trouvent hors du temps, loin de la vie, car ils ont tout perdu. Opposition entre les bruits de couloirs (pas, voix) et le silence des chambres (soldat muet).

• Contraste entre les gestes presque mécaniques des personnes qui travaillent à l’hôpital (médecins, infirmières) et accomplissent leurs actes avec vitesse et habitude, voire lassitude, et les gestes lents et « subis » des soldats amnésiques.

Connaissances apportées par le professeur Cet extrait permet de rappeler le bilan terrible du conflit : le pays déplore officiellement 1 385 000 morts, ce qui représente 3 % de la population totale, 10 % de la population active, 16 % des mobilisés. Dans l’extrait, c’est un soldat qui exprime avec fierté ce bilan dramatique : « Ils nous prenaient pour des cons, ces Boches, total c’est nous le record ! »

Les disparus – vivants ou morts dont on ne connaît pas l’identité – sont plus de 300 000. Un bureau de recherche et d’identification des militaires tués ou disparus a été mis en place par l’armée. Il faut rappeler que, pour les veuves, l’identification de leur mari leur permettait de percevoir plus rapidement la pension de guerre.

L’état physique et mental des survivants est au cœur de cet extrait : les soldats sont marqués dans leur chair et dans leur tête par le conflit.

Dans l’extrait, l’arrêt rapide de la caméra sur un soldat d’origine africaine permet de mettre en valeur l’importance des soldats des colonies dans le conflit. Près de 600 000 soldats ont été appelés, ou conduits parfois de force, dans la guerre.

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Extrait n° 2 : L’identification des morts et de leurs objets

Photo 1 Photo 2 Photo 3

Questions portant sur le contexte historique • Décrivez le lieu (paysage, personnes, etc.). Distinguez-vous des traces matérielles du passé (village, routes, etc.) ?

On est en pleine campagne. Le paysage est nu. Il reste des champs mais qui ne sont pas cultivés. Il n’y a pas de traces de villages.

• Faut-il une autorisation pour pénétrer dans cet espace gardé ? (photo 1)

Oui, il faut un laisser-passer délivré par l’armée.

• Quels objets a-t-on récupéré dans le sol ? (photo 3) De quelle manière sont-ils trouvés ?

On a posé sur la table des pipes, des livres, des boîtes, des gamelles, des photos, etc. Ces objets sont déterrés dans les restes des tranchées.

Idées historiques mises en valeur

• Paysage détruit par la guerre (zone rouge) et marqué par le conflit (obus enterrés, cadavres à trouver, croix, objets abandonnés).

• Identification des corps.

• Civils aux lendemains de la guerre (parents, veuves, orphelins) // pensions de guerre.

• Vie quotidienne des soldats durant la guerre (objets personnels, photos, bijoux, etc.).

Questions centrées sur le cinéma • Comment Tavernier déplace-t-il sa caméra près du talus ?

Il se met en haut. On voit les gens arriver et la caméra fixe leurs visages (inquiétude, impatience). La caméra bouge pour montrer la difficulté de monter.

• Tavernier place sa caméra derrière la table : pour quelle raison ? (photo 2)

On se retrouve à la place d’un soldat. On voit arriver les gens et la caméra zoome sur la petite fille. On est spectateur et voyeur.

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• Quels bruits retentissent principalement ? Quelle impression cela donne-t-il ?

On entend les coups de pioche, comme ceux perçus dans un cimetière.

Idées cinématographiques mises en scène

• Contraste entre la beauté du paysage et la pénibilité du travail exécuté par les soldats (retrouver des corps, des objets) : la nature a repris sa place (verdure, calme) alors que l’horreur est récente

• Immensité de la tâche à accomplir pour les soldats : la caméra filme en plongée afin de montrer l’étendue du front et, donc, l’ampleur du travail (les hommes ont l’air de fourmis vus du ciel).

• Tavernier alterne les mouvements de caméra : gros plans sur les familles qui arrivent, qui cherchent, qui regardent, et plans plus larges pour montrer qu’ils sont perdus, parfois mal à l’aise au milieu du champ de bataille // caméra subjective pour mettre le spectateur à la place d’un soldat qui voit les familles arriver.

• Les ordres donnés par les soldats contrastent avec le calme apparent du champ. Les coups de pelle ponctuent le silence, elles rappellent les coups de pioche dans un cimetière.

Connaissances apportées par le professeur Il était primordial pour les familles de retrouver le corps des soldats ou d’identifier des objets lui ayant appartenu. En effet, si la mort du soldat est prouvée par le ministère de l’Armée, les veuves et les orphelins pouvaient obtenir des pensions de guerre (en mars 1919 = 680 000 veuves, 719 000 orphelins). Selon la procédure, deux témoins doivent identifier le corps afin de donner une identité. Puis attendre le jugement.

L’identification des corps est très difficile. Les restes des soldats étaient rassemblés dans des ossuaires (exemple à Verdun, près de 130 000 soldats reposent dans l’ossuaire de Douaumont).

Extrait n° 3 : La cérémonie en l’honneur du soldat inconnu

Photo 1 Photo 2

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Questions portant sur le contexte historique • Décrivez le lieu et le décor. (photo 1)

Dans une sorte de galerie militaire, il y a des drapeaux tricolores, des branchages, des croix, des bougies.

• Quel ministre préside la cérémonie ?

Le ministre de la Guerre Herriot.

• Quelle est l’attitude des militaires ?

Ils sont en position de garde-à-vous, le regard dirigé au loin. Ils tiennent leurs armes le long du corps.

• Qui est également présent ?

Il y a des femmes habillées en noir, des journalistes.

• Qui va procéder au choix du soldat inconnu ? Pour quelle raison est-ce lui qui a été désigné ? (photo 2)

C’est le soldat Auguste Thin qui a combattu sur presque tous les champs de bataille et dont le père a lui aussi participé à d’autres conflits.

• D’où vient le bouquet de fleurs ?

Du champ de bataille de Verdun.

• Combien y a-t-il de cercueils ?

Huit.

• Où sera conduit le cercueil choisi ?

Il sera placé sous l’Arc de Triomphe.

• Quels mots utilise le ministre pour souligner le courage des soldats lors du conflit ?

Le ministre parle de courage, de nation, d’union, d’horreurs de la guerre.

• Quelle musique ?

Une musique militaire.

Idées historiques mises en valeur

• Patriotisme, hommage aux soldats, union sacrée.

• 11 novembre (Armistice, symbole).

Questions centrées sur le cinéma • Comment Tavernier a-t-il filmé le caractère solennel et militaire de la cérémonie ?

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Tavernier filme presque chaque visage pour montrer la gravité de la situation. Il zoome sur les symboles de la nation. Les voix résonnent, effet qui renforce le côté quasi religieux de la scène.

• De quelles manières Tavernier utilise-t-il la caméra ? Dans quels buts ?

Il cadre les visages et il suit également le soldat Thin, ce qui augmente le caractère étroit de la pièce.

• Que pouvez-vous dire sur le rythme de cette scène ?

On dirait que le temps s’est arrêté. Ce sont les roulements de tambour qui rythment la scène. On est suspendu à la décision du soldat.

Idées cinématographiques mises en scène

• Caméra placée à hauteur d’homme, ce qui donne l’impression au spectateur qu’il se trouve lui aussi dans la pièce).

• Étroitesse de la pièce, plafond assez bas, nombre important de personnes présentes, aucune ouverture vers l’extérieur, renforcent l’idée de huis clos (enfermement).

• Tavernier a centré sa caméra sur les cercueils : le soldat inconnu est encore « anonyme » à ce moment-là mais il deviendra un personnage public quand il sera présenté à la nation. Il est encore parmi ses frères d’armes dans ce fort militaire, avant d’être « exposé » à la foule.

• Caractère solennel rendu à travers la musique militaire, les symboles, la solennité des discours. La caméra du réalisateur accompagne le soldat Thin dans son choix (il tourne autour des cercueils) = indécision ? peur ? Soldat mesurant le poids de son geste ?

• Le spectateur est conduit par le rythme : pas lents du soldat, musique militaire (Sonnerie aux morts) = le temps semble suspendu à la décision du soldat.

Connaissances apportées par le professeur En 1920, les débats sont vifs à la Chambre des députés pour savoir où enterrer le soldat inconnu. La gauche est favorable au Panthéon qui accueille les Grands Hommes de l’Histoire ; la droite veut que le soldat inconnu soit enterré aux Invalides, symbole militaire par excellence. Finalement, on tranchera en choisissant l’Arc de Triomphe, monument républicain qui est de plus, idéalement situé au centre d’un carrefour, donc très visible.

La cérémonie a lieu le 10 novembre 1920 dans une casemate de Verdun (pièce située dans un fort). C’est le caporal Auguste Thin, lui-même fils de disparu, qui a la mission de choisir entre huit corps venus de huit champs de bataille différents. Le ministre des Pensions Maginot (lui-même blessé dans la bataille de Verdun) préside la cérémonie (cf. images INA Actualités).

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Annexes Documents annexes :

Inhumation du Soldat Inconnu sous l’Arc de Triomphe à Paris, le 28 janvier 1920 (à gauche le maréchal Foch), © LAPI/Roger-Viollet

La mise au tombeau du soldat inconnu, sous l’Arc de Triomphe à Paris, le 28 janvier 1921. Le défunt avait été transporté dans une chapelle ardente installée dans une salle de l’Arc de Triomphe, à l’occasion du deuxième anniversaire de l’Armistice, le 11 novembre 1920. À gauche, levant le bras, le maréchal Foch.

Sitographie

• http://www.cinehig sur lequel plusieurs études concernant des films évoquant la Grande Guerre sont présentées ;

• http://www2.cndp.fr/TICE/teledoc/ qui propose une étude intéressante du film La Vie et rien d’autre ;

• sur le site de l’académie de Lille, un collègue, Nicolas Smaghue, présente un travail intéressant : La Première Guerre mondiale et ses conséquences : Proposition de séquence autour de la violence de guerre.

• http://www.ina.fr/ propose une vidéo produite en 1968 pour les 50 Ans de l’Armistice et qui rassemble des documents d’archives, dont l’interview du soldat Auguste Thin, qui explique comment il a procédé au choix du soldat inconnu : Il y a 50 ans prenait fin la Première Guerre mondiale, Les Actualités françaises, 6 novembre 1968, 5 min 43 s ;

• http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/ permet d’accéder à des informations sur les soldats tués lors du conflit (voir le certificat de décès d'un soldat mort au combat ci-contre) ;

Page 38: Pour mémoire La Grande Guerre sur les écrans de … · Abel Gance a repris le titre d’un article célèbre d’Émile Zola pour la défense de Dreyfus. À noter qu’Abel Gance

© SCÉRÉN CNDP-CRDP 2011 38

Certificat de décès du Capitaine Adjudant Major Bourbon, DMPA/Mémoire des hommes, http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/

• Sur lesite.tv, une vidéo détaille le monument aux morts de Ézy-sur-Eure, dans l’Eure (1998, 9 min 31 s). Une autre vidéo est également très intéressante : Verdun, paysages de guerre (2000, 13 min 01 s, collection vidéo : « Ciel ma géo ! »).

Bibliographie

• Jagielski Jean-François, Le Soldat inconnu, invention et postérité d’un symbole, Imago-SGA/DMPA, 2005. • Le Naour Jean-Yves, Le Soldat inconnu vivant, Hachette littératures, 2002.