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1S19 Conférence de consensus Ann Dermatol Venereol 2005;132:1S19-33 Texte des recommandations L’organisation de cette conférence de consensus a été rendue possible grâce à l’aide apportée par les laboratoires : 3M Santé, Fujisawa, Galderma International, GlaxoSmithKline, LEO Pharma, Novartis Pharma, Pierre Fabre Dermatologie, Schering-Plough, UCB Pharma. Prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant Conférence de consensus Texte long COPROMOTEURS Association des Enseignants d’Immunologie des Universités de Langue Française Association Française de Pédiatrie Ambulatoire Association Nationale de Formation Continue en Allergologie Collège National des Enseignants de Dermatologie et Vénéréologie Collège National des Généralistes Enseignants Fédération Française de Formation Continue en Dermato- Vénéréologie Groupe d’Etude et de Recherche en Dermato-Allergologie Société Française d’Allergologie et d’Immunologie Clinique Société Française d’Immunologie Société Française de Dermatologie Pédiatrique Société Française de Pédiatrie COMITÉ DORGANISATION Jean-Philippe Lacour, Président. Dermatologue, Nice Béatrice Crickx. Dermatologue, Paris Christophe Dupont. Pédiatre, Paris Jean-François Fontaine. Allergologue, Reims Yvon Lebranchu. Immunologiste, Tours Ludovic Martin. Dermatologue, Orléans Michel Navel. Pédiatre, Ancenis Jean-Baptiste Sautron. Médecin généraliste, Bagnols-en-Forêt Jean-François Stalder. Dermatologue, Nantes AVEC LA PARTICIPATION DE Association Consensus en Dermatologie Conférence de consensus organisée selon la méthodologie de l’ANAES JURY Jean-François Stalder, Président. Dermatologue, Nantes Pierre Armingaud. Dermatologue, Orléans Sylvie Aulanier. Médecin généraliste, Le Havre Thierry Bourrier. Pédiatre, Allergologue, Nice Jérôme Castanet. Dermatologue, Monaco Philippe Célerier. Dermatologue, Le Mans Marie-Sylvie Doutre. Immunologiste, Dermatologue, Bordeaux. Marie-Françoise Fardeau. Allergologue, Les Milles Nicolas Kalach. Pédiatre, Lille Christine Labreze. Dermatologue, Bordeaux Pierre Le Mauff. Médecin généraliste, La Roche-sur-Yon Sylvie Monpoint. Dermatologue, Montpellier Françoise Rembert-Sagot. Pédiatre, Allergologue, Dunkerque Lyonel Rossant. Pédiatre, Nice EXPERTS Sébastien Barbarot. Dermatologue, Nantes Christine Bodemer. Dermatologue, Paris Delphine de Boissieu. Pédiatre, Paris Franck Boralevi. Dermatologue, Bordeaux Frédéric Cambazard. Dermatologue, Saint-Etienne Jean-Marc Chavigny. Dermatologue, Allergologue, Nantes Gisèle Kanny. Médecin interniste, Allergologue, Nancy Laurent Misery. Dermatologue, Brest Jean-François Nicolas. Immunologiste, Dermatologue, Lyon Patrice Plantin. Dermatologue, Quimper Yves de Prost. Dermatologue, Paris Fabienne Rancé. Pédiatre, Allergologue, Toulouse Pierre Scheinmann. Pédiatre, Allergologue, Paris Alain Taïeb. Dermatologue, Bordeaux GROUPE BIBLIOGRAPHIQUE Frédéric Bérard. Immunologiste, Lyon Claire Bernier. Dermatologue, Nantes Christine Chiaverini. Dermatologue, Nice Mathilde Kemula. Dermatologue, Paris Emmanuel Mahé. Dermatologue, Paris Brigitte Nicolie. Allergologue, Angers Nhan Pham Thi. Pédiatre, Paris PROMOTEUR

Prise en charge de la dermatite atopique de l'enfant

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Page 1: Prise en charge de la dermatite atopique de l'enfant

1S19

Prise en charge de la dermatite atopiquede l’enfant

Conférence de consensus

Texte court

Ann Dermatol Venereol2005;132:1S19-33

Texte des recommandations

L’organisation de cette conférence de consensus a été rendue possible grâce à l’aide apportée par les laboratoires : 3MSanté, Fujisawa, Galderma International, GlaxoSmithKline, LEO Pharma, Novartis Pharma, Pierre Fabre Dermatologie,Schering-Plough, UCB Pharma.

Prise en charge de la dermatite atopiquede l’enfant

Conférence de consensus

Texte long

COPROMOTEURS

Association des Enseignants d’Immunologie des Universités deLangue FrançaiseAssociation Française de Pédiatrie AmbulatoireAssociation Nationale de Formation Continue en AllergologieCollège National des Enseignants de Dermatologie et VénéréologieCollège National des Généralistes EnseignantsFédération Française de Formation Continue en Dermato-VénéréologieGroupe d’Etude et de Recherche en Dermato-AllergologieSociété Française d’Allergologie et d’Immunologie CliniqueSociété Française d’ImmunologieSociété Française de Dermatologie PédiatriqueSociété Française de Pédiatrie

COMITÉ D’ORGANISATION

Jean-Philippe Lacour, Président. Dermatologue, NiceBéatrice Crickx. Dermatologue, ParisChristophe Dupont. Pédiatre, ParisJean-François Fontaine. Allergologue, ReimsYvon Lebranchu. Immunologiste, ToursLudovic Martin. Dermatologue, OrléansMichel Navel. Pédiatre, AncenisJean-Baptiste Sautron. Médecin généraliste, Bagnols-en-ForêtJean-François Stalder. Dermatologue, Nantes

AVEC LA PARTICIPATION DE

Association Consensus en Dermatologie

Conférence de consensus organisée selon la méthodologie de l’ANAES

JURY

Jean-François Stalder, Président. Dermatologue, NantesPierre Armingaud. Dermatologue, OrléansSylvie Aulanier. Médecin généraliste, Le Havre

Thierry Bourrier. Pédiatre, Allergologue, NiceJérôme Castanet. Dermatologue, MonacoPhilippe Célerier. Dermatologue, Le MansMarie-Sylvie Doutre. Immunologiste, Dermatologue, Bordeaux.Marie-Françoise Fardeau. Allergologue, Les MillesNicolas Kalach. Pédiatre, LilleChristine Labreze. Dermatologue, BordeauxPierre Le Mauff. Médecin généraliste, La Roche-sur-YonSylvie Monpoint. Dermatologue, MontpellierFrançoise Rembert-Sagot. Pédiatre, Allergologue, DunkerqueLyonel Rossant. Pédiatre, Nice

EXPERTS

Sébastien Barbarot. Dermatologue, NantesChristine Bodemer. Dermatologue, ParisDelphine de Boissieu. Pédiatre, ParisFranck Boralevi. Dermatologue, BordeauxFrédéric Cambazard. Dermatologue, Saint-EtienneJean-Marc Chavigny. Dermatologue, Allergologue, NantesGisèle Kanny. Médecin interniste, Allergologue, NancyLaurent Misery. Dermatologue, BrestJean-François Nicolas. Immunologiste, Dermatologue, LyonPatrice Plantin. Dermatologue, QuimperYves de Prost. Dermatologue, ParisFabienne Rancé. Pédiatre, Allergologue, ToulousePierre Scheinmann. Pédiatre, Allergologue, ParisAlain Taïeb. Dermatologue, Bordeaux

GROUPE BIBLIOGRAPHIQUE

Frédéric Bérard. Immunologiste, LyonClaire Bernier. Dermatologue, NantesChristine Chiaverini. Dermatologue, NiceMathilde Kemula. Dermatologue, ParisEmmanuel Mahé. Dermatologue, ParisBrigitte Nicolie. Allergologue, AngersNhan Pham Thi. Pédiatre, Paris

PROMOTEUR

Page 2: Prise en charge de la dermatite atopique de l'enfant

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LLa dermatite atopique (DA) oueczéma atopique est une maladiecutanée inflammatoire chro-

nique qui débute chez le nourrisson etatteint surtout les enfants. La DA a faitl’objet d’un grand nombre de travauxscientifiques, mais elle reste sujette àcontroverses. En effet, les différencesd’attitude de prise en charge médicalesont importantes et participent à lafréquence des échecs thérapeutiques.

Une conférence de consensus a étéréalisée sous les auspices de la SociétéFrançaise de Dermatologie selon laméthodologie de l’Agence Nationaled’Accréditation et d’Évaluation enSanté (ANAES) [1] avec la participationde toutes les spécialités médicalesconcernées (pédiatres, allergologues,dermatologues, médecins généralistes,immunologistes). La méthodologie etles objectifs de cette conférence deconsensus ont été détaillés dans untexte publié [2].Les objectifs de cette conférence ontété d’améliorer la prise en charge de lamaladie, de simplifier et d’harmoniserles pratiques pour l’ensemble des soi-gnants concernés.Deux textes de recommandation, courtet long, ont été rédigés par le jury dela conférence. Les recommandationsproposées par le jury ont été classéesen grades A, B ou C en fonction duniveau de preuve scientifique fournipar la littérature. Celles pour les-quelles le grade n’est pas mentionnéexplicitement dans le texte doivent

être considérées comme des recom-

mandations de grade C. Quand le

niveau de preuve scientifique fourni

par l’analyse de la littérature était trop

faible, le jury a tenu compte des pra-

tiques professionnelles en tentant de

faire des propositions de bon sens.

Le texte ci-dessous est le texte long des

recommandations professionnelles. Il

comporte une liste de références éta-

blissant un lien explicite entre les

recommandations et les preuves scien-

tifiques sur lesquelles elles reposent.

Question 1 : Quelle est l’histoirenaturelle de la dermatiteatopique, quelle est sonépidémiologie, quelles sont sesbases physiopathologiques ?

DÉFINITION

La DA ou eczéma atopique est une

maladie cutanée inflammatoire pruri-

gineuse d’évolution chronique qui

touche préférentiellement le nourris-

son. Le terme d’atopie regroupe la DA,

l’asthme et la rhino-conjonctivite aller-

gique.

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

Le diagnostic de la DA est clinique.

Des critères diagnostiques ont été pro-

posés en 1979 par Hanifin et Rajka [3].

Ces critères ont été revus, simplifiés et

validés en 1994, au plan international

et transethnique au cours de la UnitedKingdom Working Party [4, 5]. Ils com-portent : – un critère obligatoire : dermatoseprurigineuse (ou rapportée commetelle par les parents qui signalent quel’enfant se gratte ou se frotte) ;– des critères associés (trois ou plus) :1. antécédents personnels de dermatitedes plis de flexion comme les plis descoudes, les creux poplités, la face anté-rieure des chevilles, le cou (les joueschez les enfants de moins de 10 ans) ;2. antécédents personnels d’asthmeou de rhinite allergique (ou antécé-dents de maladie atopique chez unparent au premier degré chez l’enfantde moins de 4 ans) ;3. antécédents de peau sèche générali-sée au cours de la dernière année ;4. eczéma visible des grands plis (oueczéma des joues, du front et desconvexités des membres chez l’enfantau-dessous de 4 ans) ;5. Début des signes cutanés avant l’âgede 2 ans (critère utilisable chez lesplus de 4 ans uniquement).

L’ASPECT CLINIQUE DE LA DA VARIE

SELON L’ÂGE

Chez le nourrisson jusqu’à 2 ans

La DA commence communément dansles premiers mois de la vie générale-ment vers trois mois, parfois dès lespremières semaines de vie sous formed’une atteinte symétrique prédominantsur les convexités du visage et des

Conférence de consensus. Texte long Ann Dermatol Venereol2005;132:1S19-33

LES QUESTIONS POSÉES AU JURY

QUESTION 1 : Quelle est l’histoire naturelle de la der-matite atopique, quelle est son épidémiologie, quellessont ses bases physiopathologiques ?QUESTION 2 : Quelle est l’utilité des examens complé-mentaires pour le diagnostic et la prise en charge de ladermatite atopique de l’enfant ?QUESTION 3 : Quel est le traitement des poussées dedermatite atopique de l’enfant ?QUESTION 4 : Quels sont les mesures adjuvantes et lesmoyens de prévention des poussées de la dermatite ato-pique de l’enfant ?QUESTION 5 : Quelle prise en charge pour les derma-tites atopiques sévères de l’enfant ?

AVANT-PROPOS

Cette conférence a été organisée et s’est déroulée confor-mément aux règles méthodologiques préconisées parl’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation enSanté (ANAES).

Les conclusions et recommandations présentées dans cedocument ont été rédigées par le jury de la conférence, entoute indépendance. Leur teneur n’engage en aucunemanière la responsabilité de l’ANAES.

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membres. L’atteinte des plis est parfoisprésente dès cet âge. Les lésions épar-gnent le siège. Une sécheresse cutanée(xérose) est souvent associée.L’aspect des lésions est variable selon lagravité de la DA et le moment de l’exa-men (poussées ou rémission). Leslésions aiguës sont érythémateuses,suintantes puis croûteuses. Dans lesformes mineures, les lésions sont peuinflammatoires et palpables sous formede rugosité cutanée des convexités. Leslésions plus chroniques peuventprendre un aspect bien limité en piècesde monnaie (nummulaire) sur le tronc.Le prurit est présent, mais difficile àreconnaître dans les premiers mois. Ilest responsable de troubles du sommeil.

Chez l’enfant après 2 ans

Les lésions sont plus localisées : aux plis(cou, coudes, genoux), aux mains et poi-gnets, chevilles, mamelon, plis sous-auriculaires, où elles persistent de façonchronique et parfois isolée (on parle de« zones bastion »). Parfois les lésionssont plus étendues et prennent unaspect de prurigo (papules prurigi-neuses) sur les membres. Une atteinteinversée (faces d’extension desmembres) est possible. La lichénification(épaississement de la peau) prédominesur l’érythème et l’œdème. Après deuxans, la pigmentation infraorbitaire, lesplis sous-palpébraux (signe de Dennie-Morgan) et la xérose sont plus nets quechez le nourrisson.Certaines dermatoses localisées (der-mite périorale, dermite plantaire juvé-nile, dyshidrose, chéilite, vulvite) peu-vent être des signes associés à la DA.

Chez l’adolescent

Les DA apparues dans l’enfance dispa-raissent souvent avant l’adolescence.Quand elles persistent, la lichénifica-tion et la xérose sont particulièrementfréquentes.Un aspect particulier est l’atteinte éry-thémateuse prédominant au visage etau cou (head and neck dermatitis).Une sensibilisation à Malassezia sp. aété incriminée dans cette forme, sansarguments convaincants.

HISTOIRE NATURELLE DE LA DA

L’évolution naturelle de la DA aboutità la guérison dans près d’un cas sur

deux vers l’âge de deux ans. La persis-tance de lésions intermittentes aprèscette date concerne un tiers desenfants. Ces chiffres proviennentd’études de cohorte de niveau 2. Le forttaux de rémission à 2 ans observé danscertaines études tient compte de l’inclu-sion de formes peu sévères [6, 7].

D’AUTRES MANIFESTATIONS ATOPIQUES

PEUVENT SURVENIR

La présence d’une DA dans l’enfance aug-mente le risque de développer un asthme.L’évaluation précise du risque de surve-nue varie selon les études pour des rai-sons de difficultés méthodologiques (âgedes enfants suivis, définition variable del’asthme, origine hospitalière descohortes) (niveau 3). Il existe cependantune corrélation nette entre la fréquencede la DA et la fréquence de l’asthme et onestime le risque de survenue d’un asthmechez un enfant porteur d’une DA entre30 et 40 p. 100 [8, 9]. La sévérité ou lamultiplicité des manifestations atopiquesprécoces (DA et/ou bronchite asthmati-forme et/ou antécédents atopiques fami-liaux) semble accroître ce risque.Le risque de survenue d’une allergiealimentaire, le plus souvent avant 3 ans, ou d’une rhinite allergique,d’apparition plus tardive, varie selonles études.

DES COMPLICATIONS PEUVENT APPARAÎTRE

Complications infectieuses

– Le staphylocoque doré colonise la peaulésée et saine dans la DA. La surinfec-tion est difficile à apprécier, en particu-lier dans les formes aiguës exsudatives.La présence de lésions vésiculo-bul-leuses, pustuleuses ou croûteuses inha-bituelles doit faire évoquer cette compli-cation.– L’herpès (HSV1 essentiellement) peutêtre responsable de surinfection gravepar diffusion du virus sur les zones d’eczéma. Une modification rapide del’aspect des lésions et/ou la présence devésiculo-pustules ombiliquées, disposéesen bouquet, sont des signes d’alarme enfaveur de cette infection. L’associationavec de la fièvre, une altération de l’étatgénéral évoque un tableau de pustulosedisséminée de Kaposi-Juliusberg quinécessite un traitement d’urgence.– Eczéma de contact : la prévalence de

l’eczéma de contact est élevée chez lesenfants ayant une DA. Il faut l’évoquerdevant une localisation inhabituelleet/ou une persistance, voire une aggrava-tion malgré un traitement bien conduit[10].– Un retard de croissance peut être asso-cié à une DA sévère. Il impose une sur-veillance de routine des paramètres sta-turo-pondéraux. Ces retards decroissance se corrigent quand la DA esttraitée efficacement.– Les complications ophtalmologiques,kératoconjonctivite, kératocône, cataracte et décollement rétinien sontexceptionnelles.

COMMENT ÉVALUER LA GRAVITÉ

D’UNE DA ?

Les scores de gravité

Plusieurs scores évaluant la gravité dela DA ont été proposés.Le SCORAD (Scoring of AtopicDermatitis), mis au point en 1990 parl’« European Task Force on AtopicDermatitis », est l’outil le plus utilisé etle mieux validé [11, 12].Il prend en compte trois paramètres : – l’intensité des signes cliniques,– l’extension de la dermatose– la sévérité de signes fonctionnels :prurit et perte du sommeil.Le SCORAD peut être utilisé en pratiqueclinique à chaque consultation (endehors des essais cliniques) dans laprise en charge des DA sévères. Il per-met un partage d’information avec lepatient, chiffre l’état cutané à unmoment donné, permet de définir unobjectif de traitement précis et offre unecomparaison possible d’une consulta-tion à l’autre, en restant reproductibled’un médecin à l’autre (accord profes-sionnel).Toutefois, le SCORAD, comme lesautres scores, est une évaluation d’unétat clinique à un moment donné et neprend pas en compte la sévérité globalede la maladie.

Les échelles de qualité de vie

La qualité de vie (QDV) dépend del’adaptation du patient à sa maladie.Son appréciation témoigne de l’intérêtd’intégrer dans l’évaluation de la mala-die une vision qualitative provenant dupatient. Elle n’est pas systématique-ment corrélée à la sévérité clinique.

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Comparée à d’autres maladies chro-niques la DA n’est pas perçue par lepublic comme une affection pouvantaltérer la QDV. Cependant, elle peutaltérer gravement la QDV de l’enfantet de son entourage par la chronicitédu prurit, l’inconfort qu’il entraîne etle caractère affichant de la maladie.Des études ont montré que l’altérationde la QDV au cours de la DA sévèrepouvait être égale ou supérieure à celled’affections plus graves en termes demorbidité (asthme, diabète) [13, 14].La mesure de la QDV peut faire appelà des échelles de type différent selonla maladie. Il existe des échelles deQDV spécifiques de la DA : pour lenourrisson et l’enfant : Infant’sDermatitis Quality of Life index, maisaussi pour son entourage : DermatitisFamily Impact Score [15].

ÉPIDÉMIOLOGIE DE LA DA

Peu de travaux permettent d’évaluer laprévalence exacte de la DA en France.La seule étude est l’étude InternationalStudy of Asthma and Allergies inChildhood (ISAAC), menée en 1999par questionnaire [16]. Cette étudedont la principale limite est l’absencede prise en compte des nourrissons, a montré que la prévalence de la DAen France était de 8,8 p. 100 chez lesenfants de 6-7ans et 10,0 p. 100 chezles enfants de 13-14 ans.En Europe de l’Ouest et du Nord plu-sieurs études ont tenté d’évaluer la pré-valence de la DA de l’enfant. Dans lesétudes avec questionnaire la prévalencevarie de 7 p. 100 à 28 p. 100 ; dans lesétudes avec examen médical elle variede 6 p. 100 à 16 p. 100 [17, 18].

PHYSIOPATHOLOGIE

La DA correspond au développementd’une réponse immunitaire inflamma-toire survenant sur un terrain géné-tique prédisposant qui s’accompagned’anomalies de la barrière cutanée.Les mécanismes physiopathologiquesà l’origine de la DA ne sont pas tousélucidés. Ils comportent trois aspects.

Les facteurs génétiques

50 à 70 p. 100 des patients atteints deDA ont un parent au premier degréatteint d’une DA, d’un asthme ou

d’une rhinite allergique. 72 p. 100 desjumeaux monozygotes sont concor-dants pour le phénotype atopiquecontre 23 p. 100 pour les jumeauxdizygotes. Le mode de transmissionde l’atopie est inconnu. Elle est proba-blement polygénique.

Les facteurs immunologiques

La meilleure connaissance de la phy-siopathologie de l’eczéma atopique estliée à plusieurs découvertes récentes :– la fixation de molécules d’IgE à lasurface des cellules présentatricesd’antigènes (cellules de Langerhans enparticulier) ;– la caractérisation de lymphocytes Tspécifiques d’allergènes dans la peaude patients porteurs de DA ;– l’observation d’eczéma au site decontact des tests épicutanés aux aller-gènes de l’environnement.Ainsi, l’eczéma au cours de la DA repré-sente une forme de réaction d’hyper-sensibilité retardée qui met en jeu unou des antigènes, des lymphocytes etdes cellules présentatrices d’antigène.Le développement d’une réponseimmunitaire inflammatoire TH2 spéci-fique d’antigènes protéiques est à l’ori-gine des lésions d’eczéma dans la DA.Cependant, une hétérogénéité immu-nologique existe parmi les patientsporteurs de DA. On individualiseaujourd’hui 2 profils principaux quipeuvent se succéder chez un mêmepatient.Le premier groupe comporte unehyper-IgE sanguine et des IgE spéci-fiques. Ces DA sont volontiers asso-ciées à d’autres manifestations ato-piques (asthme, rhinite etconjonctivite) : on parle de DA extrin-sèque ou allergique.Un second groupe n’a pas d’hyper-IgEet a un risque moindre d’asthme. Onparle de DA intrinsèque ou non aller-gique.

Les anomalies constitutives ou induitesde la barrière épidermique

L’augmentation des pertes insensiblesen eau, les anomalies des lipides cuta-nés de surface sur la peau des patientsporteurs de DA représentent untrouble constant de la barrière cuta-née. Ces anomalies pourraient être àl’origine du passage des allergènes etd’autres molécules.

Hypothèse pathogénique

L’augmentation de la prévalence de laDA dans les populations à niveau devie élevé a été reliée à la diminutionde l’exposition aux agents infectieuxdans ces populations. La théorie hygié-niste suppose que la diminution desinfections est responsable de modifi-cations de la régulation du systèmeimmunitaire inné.

Question 2 : Quelle est l’utilité des examens complémentairespour le diagnostic et la prise encharge de la dermatite atopiquede l’enfant ?

Le diagnostic de la DA est clinique. Iln’est pas nécessaire de faire des exa-mens complémentaires pour prendreen charge un patient porteur d’une DA(accord professionnel). Seule la suspi-cion d’un eczéma associé à un déficitimmunitaire fait réaliser un bilan com-plémentaire hautement spécialisé.En revanche, le rôle possible d’aller-gènes comme facteurs pérennisantsde certaines DA de l’enfant peutconduire dans certains cas à des explo-rations allergologiques (accord profes-sionnel).

QUELS TESTS ALLERGOLOGIQUES ?

Un test d’allergie positif (cutané ousanguin) indique seulement que l’en-fant est sensibilisé à un allergène,sans preuve que l’exposition allergé-nique déclenche ou entretient lessymptômes. Quels que soient lesrésultats des investigations allergolo-giques, ils doivent toujours êtreconfrontés à l’histoire clinique (accordprofessionnel).Les tests utilisés comportent :1 - Les prick-tests cutanésIls sont effectués selon une techniquestandardisée à l’aide d’extraits com-merciaux et éventuellement d’alimentsnatifs pour la recherche d’allergie ali-mentaire. Il n’y a pas de limite infé-rieure d’âge pour les réaliser. La réac-tivité cutanée doit toujours êtrevérifiée à l’aide de témoins positifs.Un témoin négatif permet d’exclureun dermographisme. Il n’y a pas deseuil de positivité clairement défini.Les allergènes testés sont adaptés à

Conférence de consensus. Texte long Ann Dermatol Venereol2005;132:1S19-33

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l’âge, à l’histoire clinique et à l’envi-ronnement de l’enfant.2 - Le dosage des IgE sériques spéci-fiques, les tests de dépistage sansidentification de l’allergène typeTrophatop® pour les allergènes ali-mentaires et Phadiatop® pour les aller-gènes respiratoires, le dosage des IgEsériques totales ne permettent pasd’assurer avec certitude la présenced’une allergie.En cas de suspicion d’allergie alimen-taire, la démarche diagnostique aller-gologique doit suivre une progressionavec d’abord la réalisation des pricktests cutanés qui sont souvent suffi-sants pour évoquer la responsabilitéd’un allergène alimentaire suspecté en fonction de l’âge de l’enfant et del’interrogatoire.Cependant, un dosage sanguin peutpar les valeurs chiffrées des IgEsériques spécifiques éviter la réalisa-tion d’un test de provocation orale [19,20]. Des recommandations techniquespour les tests d’allergie chez l’enfantont été publiées en 2003 par la sectionPédiatrique de l’AcadémieEuropéenne d’Allergologie etd’Immunologie Clinique [21].3 - Les test épicutanés (patch-tests)Ils consistent à appliquer sur la peaudes allergènes standardisés diluésdans un véhicule neutre. Le test estlaissé en contact 48 heures et lu entrela 48e et 72e heure. Le but est de repro-duire un eczéma expérimental sur leszones d’application du test. Ils ne doi-vent pas être réalisés sur les zonesd’eczéma, d’application de dermocorti-coïdes ou d’inhibiteurs de la calcineu-rine.– La batterie standard européenneregroupe les principaux allergènesconnus comme responsables d’eczé-ma de contact. En fonction de la cli-nique, on peut y associer les produitspersonnels utilisés et d’autres aller-gènes potentiels (couches, chaussures,etc.).– Les atopy patch-tests ont été initiale-ment développés pour les pneumaller-gènes et plus récemment pour mettreen évidence une réaction d’allergie ali-mentaire chez l’enfant atteint de DA.Ils ne sont pas standardisés et encoreen cours d’évaluation [22, 23]. L’intérêtdes atopy patch-tests prêts à l’emploireste à évaluer.

4 - Le régime d’éviction alimentaire àvisée diagnostiqueIl ne doit pas être initié sans la réalisa-tion d’un bilan allergologique préa-lable, particulièrement pour les pro-téines du lait de vache chez lenourrisson. Ce régime d’éviction doitêtre strict. En l’absence d’améliorationde la DA dans un délai d’un mois, lerégime ne doit pas être poursuivi.5 - Le test de provocation orale (TPO)Le TPO a pour objectif de prouver laresponsabilité d’un allergène alimen-taire en évitant des régimes d’évictionabusifs. Le TPO en double aveuglecontre placebo est la méthode de réfé-rence. Cependant, il est extrêmementlourd et n’est réalisable que par peu decentres en France. Pour ces raisons, ilest souvent remplacé par un TPO enouvert. Ce test doit impérativementêtre effectué dans une structure apte àprendre en charge une réaction ana-phylactique. Les conditions pratiquesde la réalisation du test de provocationpar voie orale aux aliments ont étépubliées par l’EAACI en 2004 [24].

QUELS ENFANTS TESTER ?

• Trois situations sont validées (accord professionnel)

– Les enfants ayant une DA grave défi-nie comme un échec au traitementadapté bien conduit, même chez lesnourrissons sous allaitement maternelexclusif (en effet, bien que l’effetbénéfique en prévention primaire del’allaitement exclusif, particulièrementchez les enfants à risque atopique, soitprouvé, le lait maternel contient laplupart des protéines alimentairesingérées par la mère et peut être unvecteur de sensibilisation par procura-tion).– Les enfants atteints de DA ayant unestagnation ou une cassure de la courbestaturo-pondérale.– Les enfants ayant une DA avecmanifestations associées :- signes évocateurs d’une allergie ali-mentaire : manifestations cutanées(urticaire, angiœdème), respiratoires(asthme, rhinite) ou digestives (vomis-sements, diarrhée), voire choc anaphy-lactique, après ingestion ou contactavec un aliment ;- signes évocateurs d’une allergie respira-toire : asthme, rhinite et conjonctivite ;

- signes évocateurs d’une allergie decontact : eczéma localisé dans deszones inhabituelles (siège, paumes etplantes), DA qui ne répond pas autraitement habituel ou s’aggrave.• Des situations restent discutées du

fait du faible niveau de preuve desétudes rapportées et de leur biais derecrutement. Elles ne permettentpas de consensus. Il s’agit de :

– la présence de manifestations diges-tives banales (reflux gastro-œsopha-gien et vomissements persistants,pleurs et coliques résistant au traite-ment habituel) qui sont des symp-tômes trop prévalents pour avoir unevaleur d’orientation à elles seules chezle nourrisson ;– la notion d’antécédents familiauxd’atopie ;– la précocité des symptômes cutanésavant l’âge de 3 mois (le jury émet desréserves sur la possibilité d’affirmerune DA avant 3 mois).En l’absence de preuves suffisantes, etdu fait de la divergence d’avis, le juryrecommande la réalisation d’étudesprospectives visant à étayer ces indica-tions.

POURQUOI TESTER ?

L’objectif principal des explorationscomplémentaires dans la DA est d’obtenir à court terme un impactbénéfique direct sur la dermatose. Un objectif secondaire pourrait être ladétermination de facteurs pronos-tiques motivant la mise en place demesures de prévention éventuelles.

Peut-on améliorer la DA ?

Au cours de l’allergie de contact : la prévalence de l’eczéma de contactest élevée chez les enfants ayant uneDA [10]. Il est admis que l’éviction de l’allergène responsable améliore un eczéma de contact (accord profes-sionnel).En cas d’allergie alimentaire : l’impactde l’éviction des allergènes alimen-taires sur l’évolution de la DA est dis-cuté. Des études de niveau 2 et 3 ontmontré une amélioration de la DAdans des populations sélectionnéesaprès la mise sous régime d’éviction[25-27]. Le jury recommande la réalisa-tion d’autres études éthiquement etméthodologiquement acceptables.

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Lors d’une sensibilisation aux pneu-mallergènes : des études contradic-toires de niveau 2 ne permettent pasde conclure à l’intérêt de mesuresd’éviction dans l’environnement, enparticulier l’utilisation de houssesanti-acariens [28].

Peut-on déterminer des marqueurs pronostiques d’évolution ?

Des études de valeur inégale ont mon-tré une relation entre la sensibilisationà l’œuf ou aux pneumallergènes et lapersistance de la DA chez l’enfant deplus d’un an [29-31]. Le risque d’évolu-tion vers l’asthme de sous groupes depatients sensibilisés aux aéro-aller-gènes a été rapporté dans des étudesde niveau 2 et 3.L’impact des mesures de préventionrestant discuté, la réalisation de testsallergologiques pour établir un pro-nostic individuel au cours de la DAn’est pas pertinente (grade C).De même, le dosage des IgE totales n’apas d’intérêt pour la détection précocedes nourrissons à risque de développerune DA persistante ou sévère [32].

Question 3 : Quel est le traitement des poussées dedermatite atopique de l’enfant ?

Le traitement de la DA est symptoma-tique. Les objectifs sont de traiter lespoussées et de prévenir les récur-rences par une prise en charge aulong cours. Il faut rendre cette derma-tose chronique compatible avec la qua-lité de vie souhaitée par le patient et safamille.L’enquête nationale de pratiquemontre la grande diversité des modali-tés de prise en charge selon les prati-ciens, en particulier pour le traitementlocal.

LES DERMOCORTICOÏDES

Les dermocorticoïdes sont la pierreangulaire du traitement de la DAdepuis plus de 40 ans. Ils ont long-temps représenté le seul traitementefficace dans cette indication. Ils res-tent la valeur de référence pour tousles nouveaux produits testés.Ils ont une triple action anti-inflam-matoire, immunosuppressive et anti-

mitotique. Ils agissent non seulementsur les cellules immunitaires (lympho-cytes, mastocytes, macrophages), maisaussi sur les fibroblastes et les cellulesendothéliales. Leurs mécanismes d’ac-tion ne sont pas parfaitement connus.

Quelles sont les molécules disponibles ?

Plusieurs molécules stéroïdes topiquessont commercialisées sous diversesformes (crème, pommades, lotions etgel) et répertoriées en classe d’activitéselon leur puissance d’action mesuréepar le degré de vasoconstriction induite(tableau I).À l’inverse de la classification interna-tionale, la classification française suitun ordre d’activité anti-inflammatoiredécroissante. Dans un souci de cohé-rence, le jury recommande l’adoptionde la classification internationale desdermocorticoïdes : activité très forte(classe ou niveau IV), forte (classe ouniveau III), modérée (classe ou niveauII), et faible (classe ou niveau I). Elleest adoptée dans le texte suivant.

Quel dermocorticoïde choisir ?

Le choix est fait en fonction de l’âge,

de la sévérité, du site et de l’étendue à

traiter.

Ainsi, les dermocorticoïdes d’activité

très forte (classe IV) sont contre indi-

qués chez le nourrisson et le jeune

enfant, sur le visage, les plis et le

siège. Les dermocorticoïdes forts

(classe III) sont à réserver en cures

courtes aux formes très inflamma-

toires ou très lichénifiées des extré-

mités. Les dermocorticoïdes modérés

(classe II) sont utilisés sur le visage,

les plis et les zones génitales et chez

le nourrisson. Les dermocorticoïdes

faibles (classe I) ont peu de place en

thérapeutique. Le caractère fluoré ou

non-fluoré ne doit pas être pris en

compte pour le choix de la molécule,

en l’absence d’argument scienti-

fique.

Ces critères de choix reposent sur des

habitudes professionnelles et ne sont

pas étayées par des études de niveau 1.

Conférence de consensus. Texte long Ann Dermatol Venereol2005;132:1S19-33

Tableau I.

Classification DCI Concentration Nom commercialinternationale (formes galéniques)

Classe IV très forte Clobétasol propionate 0,05 p. 100 Dermoval (C, G)Bétaméthasone 0,05 p. 100 Diprolène (C, P)dipropionate (propylène glycol)

Classe III, forte Bétaméthasone 0,05 p. 100 Diprosone (C, P, L)dipropionateBétaméthasone 0,1 p. 100 Betneval (C,P, L)valérate Celestoderm (C)Désonide 0,1 p. 100 Locatop (C)Diflucortolone 0,1 p. 100 Nerisone (C, P)valérate Nerisone C (C)

Nerisone gras (P)Difluprednate 0,05 p. 100 Epitopic (C, G)Fluticasone C 0,05 p. 100 Flixovate (C,P)propionate P 0,005 p. 100Hydrocortisone 0,1 p. 100 Locoid (C, E, L, P)butyrateHydrocortisone 0,127 p. 100 Efficort (C)acéponate

Classe II, modérée Fluocortolone 0,05 p. 100 Ultralan (CP)Difluprednate 0,02 p. 100 Epitopic (C, G)

0,05 p. 100Désonide 0,1 p. 100 Locapred (C)Désonide 0,05 p. 100 Tridesonit (C)Bêtaméhasone 0,05 p. 100 Celestoderm, relais (C)valérateFluocinolone 0,01 p. 100 Synalar (S)acétonide

Classe I, faible Hydrocortisone 1 p. 100 HydrocortisoneKerapharm (C)Hydracort (C)

Page 7: Prise en charge de la dermatite atopique de l'enfant

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Les dermocorticoïdes sont-ils efficaces ?

• En phase aiguë

Les essais sont limités (petits effectifs,imperfections méthologiques) et mon-trent que les dermocorticoïdes (désonide, clobétasol propionate, fluti-casone propionate et hydocortisonebutyrate) sont plus efficaces que le pla-cebo dans le traitement de la DA del’enfant de moins de 15 ans. Les com-paraisons entre dermocorticoïdes fontapparaître que ceux de forte puissancesont plus rapidement efficaces, maisque ceux de classe inférieure sont aussiefficaces en quelques semaines [33].

• En prévention des rechutes

L’utilisation en phase aiguë de dermo-corticoïdes de forte puissance par rap-port à des dermocorticoïdes d’activitéplus faible ne prévient pas le risque derécurrences à l’arrêt du traitement.Une seule étude de niveau 1 démontrel’intérêt d’un traitement d’entretienpour la prévention des récurrences. Ledélai de survenue de récidive est allon-gé par 2 applications par semaine defluticasone par rapport à l’excipient(plus de 20 semaines contre 4 à 5)[34]. Cette étude ne justifie pas pourl’instant de modifier les habitudesd’utilisation des dermocorticoïdes.

Les DC exposent-ils à des effets secondaires ?

Les effets secondaires sont directementliés à la puissance de la molécule, à ladurée du traitement, à l’occlusion, à lasurface traitée, à l’intégrité cutanée età l’âge de l’enfant.

• Les effets secondaires locaux sontrares

Peu d’études évaluent de manièreobjective et détaillée les effets secon-daires locaux des dermocorticoïdeschez l’enfant. Les effets indésirables,souvent cités, sont en pratique rare-ment observés (télangiectasies, atro-phie cutanée, vergetures, hirsutisme,couperose, dermatite périorale, acnéen période pubertaire et allergies decontact aux dermocorticoïdes).La crainte théorique de ces effetssecondaires ne doit pas limiter la pres-cription des dermocorticoïdes (accordprofessionnel).Sur les paupières, leur utilisation doitêtre prudente (au maximum dermo-

corticoïde de classe II et traitementcourt) en raison du risque d’atrophieet du risque potentiel, quoi que peudocumenté, de glaucome, de cataracteou d’amaurose (accord professionnel).

• Effets secondaires systémiques

Les enfants sont plus sensibles que lesadultes aux effets indésirables systé-miques des topiques du fait d’un rap-port surface/poids plus élevé. Leseffets systémiques potentiels sont unefreination de l’axe hypothalamo-hypo-physo-surrénalien et un ralentisse-ment de croissance.– La freination de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien se traduit parune baisse du cortisol plasmatique lematin à 8 h, une baisse du cortisol uri-naire et un test au Synacthène® per-turbé. Ces anomalies biologiques sontdépendantes de la quantité absolue dedermocorticoïdes appliquée, mais leurnormalisation est constante une àdeux semaines après l’arrêt du traite-ment. En l’absence de traduction cli-nique de cette freination biologique, laréalisation systématique d’explorationsendocriniennes n’est pas justifiée(accord professionnel).– Effets secondaires sur la croissance :peu d’études évaluent la croissancedes enfants ayant une DA.Parallèlement, la DA sévère peutentraîner par elle même un retard decroissance, qui se corrige sous traite-ment efficace de l’eczéma. Commepour toute affection chronique de l’en-fant, la surveillance de la croissanceest indispensable.

Comment utiliser les DC ?

• Quelle forme galénique privilégier ?

Les crèmes sont préférées sur leslésions suintantes et les plis, les pom-mades sur les lésions sèches et liché-nifiées, les lotions sur le cuir cheveluet les zones pileuses.Les préparations magistrales visant àdiluer les dermocorticoïdes ne doiventpas être utilisées.

• Faut-il appliquer les dermocorticoïdesune ou deux fois par jour ?

Plusieurs études montrent une effica-cité équivalente entre une et deuxapplications quotidiennes, quelle quesoit la puissance du dermocorticoïde(niveau 2). Une seule application par

jour a le mérite d’en faciliter l’emploi,d’assurer une meilleure compliance, etde réduire le risque d’effets secon-daires et le coût (accord professionnel).Il n’y a pas d’argument formel pourun horaire particulier d’application.Celle-ci se fait préférentiellementaprès la toilette sur une peau propre.Sur les zones très lichénifiées, 2 appli-cations par jour sont possibles.

• Quelle est la quantité maximale dedermocorticoïdes à utiliser ?

Aucune donnée de la littérature nepermet de donner la quantité de der-mocorticoïdes à ne pas dépasser selonle poids de l’enfant. L’appréciation del’efficacité clinique est plus importanteque la définition d’une dose théorique.

• Quel schéma thérapeutique préconiser ?

Aucune étude clinique n’a évalué lesconditions optimales d’utilisation desdermocorticoïdes.Il existe une grande diversité d’habi-tudes professionnelles tant pour ini-tier le traitement que pour l’arrêter.Pour la mise en route du traitement :– utilisation de dermocorticoïdes puis-sants sur de courtes durées suivie parune période d’interruption avec usaged’émollients jusqu’à la récurrence sui-vante ;– ou dermocorticoïdes d’emblée defaible puissance renouvelés à lademande.Pour l’arrêt du traitement : – diminution progressive des applica-tions programmée par le prescripteur (1 application un jour sur 2 ou sur 3...) ;– poursuite d’applications quoti-diennes seulement sur les lésions per-sistantes ; la réduction de la surfaceatteinte conduit au sevrage ;– décroissance en utilisant un dermo-corticoïde de classe plus faible.Cette variabilité des protocoles utilisésentretient l’inquiétude des patients,favorise une certaine méfiance, voireune corticophobie, et participe aunomadisme médical.Actuellement, la plupart des expertsutilisent préférentiellement la méthodesuivante : utilisation de dermocorti-coïdes puissants sur de courtes duréessuivie par une période d’interruptionavec usage d’émollients jusqu’à larécurrence suivante ; poursuite

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d’applications quotidiennes seulementsur les lésions persistantes.En absence d’étude clinique évaluantles conditions optimales d’utilisationdes dermocorticoïdes, il apparaît néces-saire d’harmoniser les pratiques, sur labase d’essais comparatifs à réaliser.

• Quel suivi réaliser ?

Dans les formes légères à modéréesde DA, l’efficacité d’un traitement der-mocorticoïde bien conduit est specta-culaire avec disparition du prurit enquelques jours et amélioration deslésions en une semaine. Une consulta-tion systématique de suivi est néces-saire pour s’assurer de cette évolutionfavorable, de l’adhésion du patient autraitement en évaluant la quantité dedermocorticoïdes utilisée, et pourréadapter au besoin le traitement.

• Y a-t-il un intérêt à l’usage des traitements occlusifs (hydrocolloïdes) et pansements humides ?

Les occlusions par hydrocolloïdes peu-vent être utiles sur des lésions résis-tantes, localisées et lichénifiées.Quelques études montrent une effica-cité des pansements humides tubulés(« wet wrapping »), mais leur intérêtest limité par les difficultés techniquesde réalisation.

LES INHIBITEURS DE LA CALCINEURINE

Le développement récent des inhibi-teurs de la calcineurine topiques dansle traitement de la DA de l’enfant estune innovation importante pour saprise en charge. Ce sont des molé-cules de la famille des macrolides quiont une action immunosuppressivepar inhibition de la calcineurine,molécule nécessaire à l’activation delymphocytes TH2, ce qui les classedans les immunomodulateurs locaux.Les inhibiteurs de la calcineurine blo-quent ainsi la production de cytokinesproinflammatoires.Deux molécules ont été étudiéesdepuis plusieurs années : le tacroli-mus et le pimecrolimus non encoredisponible en France.Le tacrolimus est présenté sous formede pommade à 0,1 p. 100 et 0,03 p.100. Seule la concentration à 0,03 p.100 dispose de l’AMM chez l’enfant àpartir de deux ans.

Quelle est l’efficacité des inhibiteurs de la calcineurine ?

• Pour le traitement des poussées

L’efficacité clinique du tacrolimus aété évaluée par de nombreuses étudesaux États-Unis et en Europe quiregroupent plus de 13 000 patientsdont 3 000 enfants. Cette efficacité aété démontrée à court terme dans desétudes avec comparaison contre place-bo ou contre dermocorticoïdes deniveau faible à modéré [35]. Ces étudesmontrent que le tacrolimus topiqueréduit efficacement et rapidement, dèsla première semaine de traitement, lessignes et symptômes de la DA modé-rée à sévère chez l’enfant (niveau 1).Le pimecrolimus est également rapi-dement actif dans la DA : deux largesétudes de niveau 1 montrent que,appliqué 2 fois par jour pendant 3 semaines dans la DA légère à modé-rée, il améliore tous les paramètres cli-niques de manière significativementsupérieure à l’excipient. Dans uneétude de niveau 1, il est d’efficacitéinférieure au valérate de bétamétha-sone (activité forte) [36].

• Pour la prévention des récidives

L’efficacité du tacrolimus se maintientpendant l’année du traitement si letraitement est poursuivi [37]. Desétudes à plus long terme ne sont pasdisponibles actuellement.En ce qui concerne le pimecrolimus,une étude de niveau 1 a montré qu’ap-pliqué deux fois par jour dès l’appari-tion des premières lésions, il était plusefficace que l’excipient sur le nombrede poussées et la consommation totalede dermocorticoïdes [38].

Les inhibiteurs de la calcineurine exposent-ils à des effets secondaires ?

• Effets secondaires locaux

Les effets secondaires locaux les plusfréquents sont une sensation de brûlu-re et de prurit au site d’application, leplus souvent modérée et transitoire(quelques jours).Il n’induisent pas d’atrophie cutanée.Les infections bactériennes ne sontpas augmentées.Il en est de même des infectionsvirales, hormis l’herpès pour lequeldes précautions (information desrisques de transmission, surveillance

clinique et suspension du traitementen cas d’infection herpétique) sontnécessaires.

• Effets secondaires systémiques

À court terme– Dans la plupart des études à courtterme, aucune anomalie biologiquen’a été constatée.– Les taux plasmatiques de tacrolimus,un mois après le début du traitement,sont inférieurs aux taux d’immuno-suppression thérapeutique.

À long termeIl s’agit de produits aux propriétésimmunosuppressives qui pourraientdonc être à l’origine d’une éventuellecarcinogénèse. La carcinogenicité a étéétudiée in vitro. Elle est négative dansla majorité des tests sauf un, chez lasouris albinos. Le risque de carcinoge-nèse cutanée chez l’homme restehypothétique, mais ne pourra pas êtrelevé tant qu’il n’y aura pas un reculsuffisant d’utilisation de ces produits.

Comment utiliser les IC chez l’enfant ?

• Selon l’AMM actuelle

Le tacrolimus à 0,03 p. 100 est indiquédans la DA modérée à sévère de l’adulteet de l’enfant de plus de 2 ans qui n’apas répondu de façon adéquate au trai-tement conventionnel. Chez l’enfant,seule la forme à 0,03 p. 100 est autori-sée. Il doit être utilisé à raison de 2applications par jour en couche mincesur toute la surface à traiter jusqu’à dis-parition des lésions. Il peut être appli-qué sur toutes les parties du corps àl’exception des muqueuses. Il ne doitpas être utilisé sous pansement occlusif.Si aucune amélioration n’est obtenueaprès 2 semaines, un autre traitementdoit être envisagé.Il peut être utilisé en cure courte ouen traitement au long cours intermit-tent.La prescription se fait sur ordonnancepour médicaments d’exception et estréservée aux dermatologues et auxpédiatres.

• Au-delà de l’AMM

Les avantages de cette nouvelle classethérapeutique sont : – leur bonne efficacité à court terme ; – leur utilisation possible sur leszones fragiles sans toxicité notable àcourt terme ;

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– la bonne tolérance du pimecrolimus,à court terme, avant l’âge de 12 mois.L’AMM actuelle n’est pas satisfaisantecompte tenu que son libellé n’est pasen accord avec les études réalisées,qu’elle limite l’emploi du produit parson statut de médicament d’exceptionet sa prescription restreinte à certainsgroupes de praticiens. Dans le cadred’une révision, il faudrait de plus inté-grer les données des travaux en coursconcernant les études d’efficacité àlong terme et ceux évaluant la préven-tion des poussées. La mise à disposi-tion du pimecrolimus est égalementsouhaitable.Des réponses pourraient être apportéeségalement sur l’utilisation d’emblée enphase aigue et l’utilisation éventuelleen association aux dermocorticoïdes decette classe de médicament.

Quelles précautions pour un bon usagedes IC ?

– En cas d’infection cutanée, un traite-ment antibiotique est nécessaire avantl’instauration du traitement.– Du fait du potentiel de risque photo-carcinogène, l’association à une photo-thérapie ou à des expositions solairesest déconseillée.– La présence d’une infection herpé-tique évolutive est une contre-indica-tion transitoire aux inhibiteurs de lacalcineurine.– Des précautions doivent être prisesen cas d’antécédents personnels d’her-pès récurrent. La famille doit êtreinformée des précautions à prendreen cas d’herpès dans l’entourage.– Les vaccins ne sont pas contre-indi-qués lors de traitements par IC.

ÉMOLLIENTS

Ce sujet est développé dans la ques-tion 4.Les émollients peuvent être utilisés àla phase aiguë et sont destinés auxzones de xérose.En peau lésée, des réactions d’intolé-rance locale sont possibles.

ANTIHISTAMINIQUES ANTI-H1

L’enquête de pratique nationalemontre que des médecins prescriventdes anti histaminiques anti-H1 (AH1)dans la DA, à la phase aiguë, pour lut-

ter contre le prurit et l’insomnie, maiségalement en dehors des poussées.

Les AH1 améliorent-ils le prurit ?

Peu d’études ont été réalisées chezl’enfant sur l’efficacité clinique desAH1. Seules deux études (niveau 1)montrent une efficacité modérée, rapide, mais transitoire, limitée à 2 semaines.

Faut-il des AH1 sédatifs ou non ?

Les résultats cliniques obtenus avecles AH1 non sédatifs sont comparablesaux sédatifs.

Quels sont les effets secondaires chez l’enfant ?

La sécurité au long cours dans la DAn’a été évaluée chez l’enfant que pourla cetirizine. La tolérance est bonne.Les antihistaminiques locaux n’ontpas de place dans le traitement de laDA.La prescription des antihistaminiquesoraux à la phase aiguë ne doit pas êtresystématique ; elle peut s’envisager encas de prurit important et sur desdurées courtes (grade A.)

KÉTOTIFÈNE

Une seule étude chez l’enfant (niveau3) ne montre pas d’efficacité.

CORTICOÏDES GÉNÉRAUX

Les corticoïdes par voie orale ou injec-table n’ont pas de place dans le traite-ment de la poussée de DA.

ANTI-INFECTIEUX

Les patients avec DA sont porteurs deStaphylococcus aureus sur les lésionscutanées et en peau saine. Il faut diffé-rencier ce portage habituel d’une réel-le surinfection (croûtes, bulles, pus-tules, majoration du suintement,extension des lésions, signes générauxet majoration du prurit...).Dans l’enquête nationale de pratique,les antiseptiques et antibiotiqueslocaux ou généraux sont largementprescrits lors des poussées de DA.Les études montrent que les dermo-corticoïdes réduisent la densité du S. aureus avec une amélioration cli-nique concomitante. Par contre, lesantibiotiques topiques ou oraux et les

antiseptiques réduisent le portage deS. aureus, mais ne modifient pas lesparamètres cliniques.En dehors d’une surinfection bacté-rienne patente, il n’y a pas lieu d’utili-ser les antibiotiques locaux ou géné-raux ni les antiseptiques (accordprofessionnel).

PHOTOTHÉRAPIE

Elle a peu d’indication à la phaseaiguë où sa tolérance est médiocre.Ses indications et modalités sont pré-cisées dans la question 5.

Question 4 : Quelles sont lesmesures adjuvantes et lesmoyens de prévention despoussées de la dermatiteatopique de l’enfant ?

La DA est une affection chronique oùinterviennent plusieurs facteurs. Sonapproche nécessite donc une prise encharge pluridimensionnelle médicale,psychologique et environnementale.

ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE

L’éducation thérapeutique est uneapproche nouvelle dans la DA.Associée au traitement curatif et auxmesures adjuvantes, elle repositionnele patient comme acteur de la prise encharge de sa maladie. Son objectifprincipal est d’améliorer l’alliance thé-rapeutique entre le soignant, le soignéet son entourage pour permettre uneprise en charge optimale.Plusieurs études (niveau 3) ont mon-tré que l’éducation thérapeutique aug-mente l’efficacité du traitement sur leprurit et le sommeil [39, 41].L’évaluation de l’éducation thérapeu-tique dans la DA est très difficile car,selon les études :– les modalités sont différentes :consultation unique avec un profes-sionnel, sessions de groupe pluridisci-plinaire sur plusieurs jours, approcheindividuelle sur plusieurs consulta-tions ;– les moyens d’évaluation ne sont passtandardisés : score de gravité de laDA, échelle de qualité de vie, échelled’évaluation d’acquisition de compé-tences.

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L’éducation thérapeutique dans la DAde l’enfant améliore la prise en chargedu patient et de sa famille, mais ilreste à :– définir un modèle (programme,modalités, soignants...),– standardiser les outils d’évaluation,– réaliser des études contrôlées, ran-domisées et en intention de traiter.L’éducation thérapeutique s’adressed’abord aux formes modérées àsévères de DA. Elle ne doit pas êtreréservée à des centres spécialisés,mais s’intégrer à nos pratiques profes-sionnelles.

MESURES ADJUVANTES

La DA est aggravée par de nombreuxfacteurs favorisants (facteurs alimen-taires, environnementaux, facteurscontact ou stress psychologique...).Des mesures adjuvantes et préventivespour lutter contre ces facteurs ontdonc été développées. Elles sont clas-sées ici en deux catégories, celles vali-dées (études scientifiques ou accordprofessionnel) et les autres.

Pratiques validées

• Les émollients

La xérose cutanée, ou sécheresse de lapeau, persiste en dehors des pousséesde DA et altère la fonction barrière del’épiderme. Les émollients sont utili-sés dans le but de restaurer cette pro-priété de la peau.L’efficacité des émollients sur la xérosea été démontrée (niveau 2) ; un effet aété observé sur les signes fonctionnelset le SCORAD (niveau 5) [42, 43].Leur tolérance est habituellementbonne. Parfois, des sensations de brû-lures, prurit, rougeurs lors de l’appli-cation sont rapportées, surtout sur leszones en poussée. Ces effets justifientle changement d’émollient.Une sensibilisation aux composants(lanoline, fragrance, avoine...) doit êtreévoquée quand une exacerbation del’inflammation est observée après lesapplications.Les données de la littérature ne per-mettent pas de privilégier une formu-lation émolliente particulière, unedurée d’utilisation courte ou prolon-gée, ni une application unique ou plu-riquotidienne.

Les modalités d’utilisation sont :– choix d’émulsions « eau dans huile »(ou pommades) sur les zones épaisseset lichénifiées, et « huile dans eau »(ou crèmes) sur les zones moinssèches et plus fragiles (accord profes-sionnel) ;– utilisation contemporaine ou enrelais des dermocorticoïdes (accordprofessionnel) ;– nécessité d’apprendre aux parentsou à l’enfant à faire la différence entreles zones sèches ou chroniques oùs’applique l’émollient et les zonesinflammatoires où s’appliquent lesdermocorticoïdes.Une seule étude (niveau 2) a montrél’intérêt de la pratique des massages àl’occasion de ces applications pourfaciliter des soins quotidiens.Connaissant les difficultés rencontréespar les parents pour l’application dessoins locaux chez l’enfant, ces résul-tats sont à confirmer.Le jury souhaite que plusieurs pro-duits commerciaux remboursables ouà faible coût soient mis à la disposi-tion des patients et de leurs familles.

• Les mesures d’hygiène

Basés sur des habitudes, les conseilsd’hygiène ne reposent sur aucunedonnée validée.Il est préférable de donner un baincourt quotidien ou une douche, avecune température tiède, et d’utiliser despains sans savon (accord professionnel).Une seule étude anglaise a soulevé leproblème de la dureté de l’eau(concentration en calcium). Son carac-tère unique et les biais méthodolo-giques ne justifient pas de précautionsparticulières (adoucisseurs parexemple).Les additifs à l’eau du bain (huiles...)doivent faire l’objet d’évaluation. Il n’ya pas de raison actuelle de les recom-mander.

• Les mesures vestimentaires

Il est préférable de porter du coton.D’autres tissus sont également bientolérés : soie ou polyesters à fibresfines (niveau 2) [44]. La laine, irritante,doit être évitée.Plusieurs études ont montré l’absenced’impact des lessives ou assouplis-sants sur la DA chez des adultes ato-piques. Aucune précaution n’est rete-

nue pour leur usage (accord profes-sionnel).

• Prise en charge psychologique

Le système nerveux intervient dans laphysiopathologie des dermatosesinflammatoires, dont la DA. Le psy-chisme est un des facteurs qui modu-lent son évolution. Les interactionsentre DA, émotions et psychisme exis-tent.Une DA grave altère la qualité de vieet peut modifier la personnalité ouinduire des troubles psychologiques.Le stress est incriminé comme élé-ment déclenchant de poussées de DA,mais de manière imprécise : il s’agitprobablement d’un facteur très impor-tant chez certains et négligeable chezd’autres.L’approche éducative est la premièreréponse à apporter avant d’envisagerles autres possibilités thérapeutiques :psychothérapies, approche comporte-mentaliste peu pratiquée en France,mais donnant de bons résultats dansd’autres pays européens, relaxation,technique de management du stress...Les psychotropes ont des indicationstrès limitées.Dans tous les cas, il convient de repé-rer les familles en souffrance pourleur proposer une prise en charge spé-cifique.

Pratiques non validées

• Antihistaminiques

Il n’existe pas d’étude de niveau 1 ou 2montrant l’efficacité préventive desanti-H1 au long cours sur les pousséesde DA [45, 46].

• Cures thermales

Les cures thermales sont populairesdans de nombreuses pathologies, dontla DA. En France, de nombreuxcentres de cures existent. Les eauxthermales qu’ils proposent sont trèsdifférentes tant dans leurs propriétéschimiques (composition qualitative etquantitative) que physiques (tempéra-ture, pH, propriétés osmotiques...).En l’absence d’étude démonstrative, iln’y a pas d’argument scientifique pourles recommander (accord professionnel).

• Médecines d’exercice particulier

De nombreux parents ont recours àdes médecines d’exercice particulier

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parce qu’ils considèrent que les traite-ments conventionnels sont insuffi-samment efficaces, ou qu’ils redoutentleurs effets secondaires.Il s’agit avant tout de l’homéopathie, dela phytothérapie et de l’acupuncture.– L’homéopathie : les rares études d’efficacité de l’homéopathie dans laDA sont contradictoires. Aucune preu-ve scientifique ne permet de recom-mander cette pratique.– La phytothérapie : de nombreux trai-tements topiques à base de plantes(millepertuis, réglisse, camomille,hamamélis, argousier...) ont été propo-sés dans le traitement de la DAnotamment chez l’adulte. Aucunepreuve scientifique ne permet de vali-der cette pratique.Les herbes chinoises englobent plu-sieurs dizaines de produits différents,souvent utilisés en association, géné-ralement par voie orale, plus rarementen topique ou en injectable. L’utilisation de ces produits est com-mune dans divers pays d’Orient, rareen France, et plus fréquente enGrande-Bretagne.Les effets secondaires rapportés dansles études vont des simples nauséesaux complications les plus graves(hépatites aiguës néphropathie sévère,syndrome de Stevens-Johnson, cardio-myopathie dilatée...). Ces donnéesincitent à déconseiller l’utilisation deces produits.– L’acupuncture : le jury déconseillecette pratique chez l’enfant comptetenu de son caractère douloureux et deses complications potentielles (accordprofessionnel).

• Les probiotiques

Les probiotiques sont définis actuelle-ment « comme des micro-organismesvivants d’origine humaine capables decoloniser le tube digestif dont l’inges-tion entraîne un effet bénéfique sur lasanté ».Leur utilisation dans la prévention etle traitement de la DA de l’enfant estbasée sur la « théorie hygiéniste »qui se fonde sur une relation inverseentre l’intensité de l’expositionmicrobienne et le risque de déve-loppement de pathologie allergiqueet sur certaines modifications de la

flore intestinale des enfants atteintsde DA.

L’administration de probiotiques permet-elle de prévenir l’apparition de DA chez des enfants à risque ?Une seule étude monocentrique(niveau 1) suggère qu’il y a un intérêtà donner du Lactobacillus rhamnosusun mois avant l’accouchement chez lamère et 3 ou 6 mois après la naissancechez la mère ou les enfants à risqued’atopie pour prévenir la survenue deDA [47, 48].En l’absence de confirmation pard’autres études, il est prématuré derecommander l’administration de pro-biotiques à titre préventif chez lafemme enceinte ou chez le nourrissonà risque atopique.

L’administration de probiotiques permet-elle de traiter les poussées de DA de l’enfant ?Deux études, méthodologiquementdiscutables, ont évalué l’intérêt desprobiotiques dans le traitement curatifde la DA [49]. Elles ne plaident paspour l’utilisation des probiotiquesdans le traitement curatif de la DA.

• Vitamines

Deux études contrôlées et randomi-sées n’ont pas montré d’efficacitéd’une supplémentation en vitaminesE, B6 ou en sélénium dans le traite-ment de la DA.

• Les acides gras essentiels (AGE)

Les AGE sont des acides gras polyinsa-turés à chaîne longue (acide linoléiqueou omega 6 et acide eicosapentae-noïque ou omega 3).Différentes huiles riches en AGEomega 6 (huile de bourrache,d’onagre du Missouri ou de cassis) ouAGE omega 3 (huile de poisson) ontété utilisées per os dans la DA.L’étude de la littérature permet deconclure à l’inefficacité dans la DA del’enfant d’un traitement par acide grasessentiel quelle que soit son origine(et la dose) (grade A) [50].

Pratiques discutées : les mesures d’éviction

• Vaccinations de l’enfant atopique

La notion de poussée de DA est uneobservation clinique régulièrementrapportée chez le nourrisson. Il n’y apas de preuve scientifique dans la lit-térature confirmant le rôle des vaccinsdans le déclenchement ou l’exacerba-tion d’une DA.

En cas d’allergie à l’œuf associée,seules les vaccinations contre la grippeet la fièvre jaune, réalisées sur desmilieux de culture sur œufs embryon-nés, nécessitent un avis spécialisé.Le calendrier vaccinal doit être lemême chez les enfants ayant une DAque chez les enfants non atopiques. Il est prudent de retarder transitoire-ment les vaccinations au cours defortes poussées de DA (accord profes-sionnel).

DA ET ALLERGIE ALIMENTAIRE : PEUT-ON AMÉLIORER UNE DA AVEC UN RÉGIME D’ÉVICTION ALIMENTAIRE

OU UN CHANGEMENT DE LAIT ?

La responsabilité de l’allergie alimen-taire dans la DA reste controversée.Elle est trop souvent évoquée parexcès. La prescription de régime ali-mentaire d’éviction systématique peutdevenir dans certains cas une sourcede carence nutritionnelle.La sensibilisation à un allergène ali-mentaire n’est pas synonyme de causede DA.Cette sensibilisation est cependantplus fréquente au cours des DAsévères ; elle constitue donc un élé-ment prédictif de gravité de la DA.La prévention de la DA peut s’envisa-ger à plusieurs niveaux :– prévention primaire : éviction dufacteur de risque avant l’apparition dela maladie ;– prévention secondaire : éviction dufacteur de risque en cas de maladieavérée ;– prévention tertiaire : éviction du fac-teur de risque pour éviter les rechuteset complication.

Prévention primaire chez la femmeenceinteLes régimes d’éviction alimentairechez la femme enceinte dans le but deprévenir la DA chez l’enfant sont diffi-ciles à suivre et leurs résultats ne sontpas prouvés.Il n’y a pas d’indication à un régimeparticulier chez la femme enceintepour prévenir la survenue d’une DAchez l’enfant.

Prévention primaire chez le nouveau-né à risque de DALa définition de « nouveau-né àrisque » n’est pas univoque et la

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notion d’antécédents familiaux directsne représente pas un argument suffi-sant.En cas d’allaitement maternel exclusifpendant au moins 3 mois, le risqued’apparition d’une DA chez lesenfants à risque d’atopie est diminué(niveau 1). L’allaitement maternel sansrégime particulier pour la mère estrecommandé (grade A).Dans les autres situations, comptetenu du faible niveau de preuve desdonnées de la littérature, aucunerecommandation ne peut être avancée.

Prévention secondaire chez le nourrisson ayant une DAIl n’y a actuellement pas d’étude deniveau de preuve suffisant ou de revueCochrane disponible concernant leseffets du changement de lait chez lesenfants atteints de DA. Aussi en rai-son de la variabilité des usages iln’existe pas d’accord professionnel.Cependant lors d’une DA sévère etaprès explorations allergologiquespositives pour les protéines du lait de vache les recommandations sui-vantes peuvent être retenues en tenantcompte des surcoûts induits :– en cas d’allaitement maternel exclu-sif : proposition de sevrage et d’unealimentation avec un hydrolysat pous-sé de protéines de lait de vache ;– en cas d’allaitement mixte : rempla-cement du lait de complément par unhydrolysat poussé ;– en cas d’utilisation de lait classique(préparations 1er âge pour nourrisson),remplacement du lait par un hydroly-sat poussé.

Prévention secondaire et tertiaireaprès l’allaitementLes aliments les plus impliqués dansles allergies alimentaires du nourrissonsont le lait et l’œuf, puis l’arachide, lesoja, le poisson, les légumineuses et leblé. Des études de niveau 3 indiquentqu’un syndrome d’allergie multiple(responsabilité d’au moins 2 aller-gènes) est corrélé à un risque de DAsévère.L’éviction d’un allergène n’est justifiéeque si son rôle dans une réaction aller-gique est prouvé.

DA et allergènes environnementaux

Il est difficile de définir avec certitudele rôle des allergènes inhalés dans la

genèse de la DA ou dans le déclenche-ment de ses poussées.

• Acariens

Une sensibilisation aux acariens estsouvent retrouvée au cours de la DA,mais les mesures d’éviction ne mon-trent pas d’effet clinique probant.Il n’y a pas d’études démontrant l’inté-rêt des acaricides ou d’autres mesuresde ménage (aspirateurs avec filtres...).Cinq études (niveau 2) sur l’utilité deshousses anti-acariens ont des résultatscontradictoires, ce qui ne permet pasde conseiller leur utilisation [52-55].L’immunothérapie spécifique (désen-sibilisation aux acariens) par voiesous-cutanée ou sublinguale est sanseffet sur la DA.

• Poils d’animaux

Le faible niveau de preuves et lesrésultats discordants des études dispo-nibles ne permettent pas de concluresur la responsabilité de la présenced’un animal à domicile dans la surve-nue de la DA chez l’enfant.En cas de DA, le jury suggère d’éviterl’acquisition d’animaux domestiques(chat en particulier).Les travaux publiés ne permettent pasd’affirmer que la prévention primairede la DA est possible. L’influence del’éviction des pneumallergènes sur lespoussées de DA n’est pas claire, ren-dant les mesures de prévention secon-daire et tertiaire superflues.

Question 5 : Quelle prise encharge pour les dermatitesatopiques sévères de l’enfant ?

Les réponses apportées à cette ques-tion sont davantage basées sur unconsensus professionnel que sur desétudes de niveau de preuve élevé, cecidu fait du petit nombre de maladesconcernés. Cependant, la gravité de lamaladie chez ces patients rend néces-saire, dans le cadre de cette conférencede consensus, d’apporter des élémentsde réponse pour leur prise en charge.

DÉFINITION D’UNE DA SÉVÈRE

Il n’existe pas de définition univoquede la sévérité de la DA, car elle dépendd’un ensemble de paramètres :

– objectifs : nombre et gravité despoussées, retentissement organique(cassure de la courbe staturo-pondérale, insomnie...),– subjectifs : retentissement psycholo-gique, retentissement sur la qualité devie de l’enfant et de sa famille.Il n’existe pas de score validé prenanten compte tous ces éléments et per-mettant de donner une valeur seuilpour le diagnostic de DA sévère.Avant de considérer qu’il s’agit effecti-vement d’une DA sévère, il est trèsimportant de s’assurer que la prise encharge de la maladie est optimale :quels sont les traitements prescrits etont-ils été correctement appliqués ? ;l’enquête allergologique a-t-elle étéfaite et les mesures d’éviction éven-tuelles ont elles été prises ?Si la prise en charge ne paraît pasadaptée, un apprentissage des soins,réalisé par le médecin lui-même ouune infirmière, une éducation théra-peutique ou un soutien psychologiquedoivent être proposés. Une hospitalisa-tion dans une structure hospitalièreadaptée à la dermato-pédiatrie peutêtre utile. Elle permet de s’assurerqu’il s’agit d’une DA sévère et que lestraitements locaux bien faits sont réel-lement inefficaces.Si la prise en charge est correcte, soitd’emblée, soit après échec de toutesces mesures, il s’agit alors réellementd’une DA sévère. Il faut, dans tous lescas, un avis spécialisé pour décider demesures thérapeutiques difficiles, sou-vent hors AMM, mais justifiées par lagravité de ces cas rares d’échec dessoins locaux.

LES DIFFÉRENTES THÉRAPEUTIQUES

À ENVISAGER DEVANT UNE DA SÉVÈRE

Photothérapies

Les photothérapies sont un traitementefficace de la DA de l’adulte. Chez l’en-fant les photothérapies recommandéessont les UVA-UVB, les UVB spectreétroit (souvent appelés UVB TL01) etles UVA1. La photothérapie UVBspectre étroit est préconisée en Francechez l’enfant, car elle est efficace, bientolérée à court terme, et serait peumutagène et peu cancérigène du faitde l’absence de prise de psoralène.Néanmoins, ses risques au long coursne sont pas encore connus.

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Il est possible de débuter une photothé-rapie à partir de l’âge de 8-10 ans [56].Les études concernant l’utilisation dela photothérapie dans la DA de l’en-fant sont peu nombreuses et de faibleniveau de preuve scientifique :– une série de 21 enfants a été traitéepar photothérapie UVAB avec environ2/3 de bons ou très bons résultats etdes effets secondaires minimes(niveau 4) ;– une série de 40 enfants a été traitéepar photothérapie UVB spectre étroitavec de bons ou très bons résultats etdes effets secondaires modérés(niveau 4).Les photothérapies UVA-UVB et UVBspectre étroit peuvent être utilisées dansle traitement de la DA sévère de l’enfant(grade C et accord professionnel).En pratique, les principales limites dece traitement sont liées à la nécessitéde 2 ou 3 séances par semaine auquels’ajoute la faible densité de cabineéquipées en lampes UVB ou UVBspectre étroit, leur répartition inégalesur le territoire , et leur éloignementdu domicile.La durée des rémissions obtenuesn’est pas évaluée. Il n’existe aucunedonnée sur une photothérapie d’entre-tien chez l’enfant.

Ciclosporine

La ciclosporine est l’immunosuppres-seur le plus étudié et le plus utilisédans la DA de l’adulte. Elle a l’AMMdans cette indication. Sa prescriptioninitiale est réservée au milieu hospita-lier par un médecin habitué à l’utilisa-tion de cette molécule.La ciclosporine n’a pas l’AMM dans laDA de l’enfant. Il y a peu d’étudesdans cette tranche d’âge [57-60] :– 3 études ouvertes (niveau 5) mon-trent de bons résultats avec un tempsde traitement court (6 à 12 semaines),des rechutes précoces fréquentes etquelques cas de rémission prolongée à6 mois ;– une étude randomisée ouverte (niveau3) compare 2 modalités de traitementpar ciclosporine : un traitement continupendant un an ou des cures de 12semaines renouvelées à chaque rechutependant un an. Il existe une bonne effi-cacité dans les 2 bras et il semble exis-ter une petite supériorité du traitementcontinu sur la qualité de vie.

Les effets secondaires rapportés dansces études ne sont pas rares, maismodérés et n’entraînent pas dans laplupart des cas l’arrêt du traitement.La ciclosporine per os, à la posologieinitiale de 5 mg/kg/j, a une place dansle traitement de la DA sévère de l’en-fant en respectant strictement les règlesde prescription et de surveillance. Ilest important de préciser à l’enfant etaux parents : que ce traitement n’en-traîne pas de guérison, mais permetde passer un cap difficile ; que sadurée est le plus souvent de 6 mois,au maximum 1 an du fait en parti-culier des risques rénaux et d’hyper-tension artérielle (Grade C).Le jury propose qu’une réunion d’experts décide de l’intérêt du dosagesystématique de la ciclosporinémie enraison d’avis différents des prescrip-teurs dans cette indication.

Corticothérapie générale

Une reprise de l’évolutivité de la mala-die après l’arrêt d’une corticothérapiegénérale est quasi constante risquantde conduire à un traitement au longcours et à des effets secondaires. La corticothérapie générale, par voieorale ou injectable, doit être évitée(accord professionnel).

Autres immunosuppresseurs

– L’aziathioprine a été peu utiliséedans la DA de l’adulte du fait d’unrisque de myélosuppression. Uneseule étude rétrospective évalue l’inté-rêt de l’azathioprine chez 48 enfantsayant une DA sévère [61]. Quarante etun enfants ont eu une réponse excel-lente ou bonne au traitement ; 7 enfants n’ont pas répondu. Il n’y apas eu de neutropénie ; un cas de pos-sible réaction d’hypersensibilité a étéobservé. Ces données sont insuffi-santes pour préconiser son utilisationchez l’enfant en l’absence d’étudescomplémentaires (grade C).- Le mycophénolate mofétil a été effi-cace dans quelques cas de DA del’adulte.- Le méthotrexate et le cyclophospha-mide n’ont pas fait l’objet d’étudespubliées dans la DA chez l’enfant.

Antileucotriènes

Une seule étude (niveau 2) chez l’en-fant a montré une diminution signifi-

cative de la sévérité de la maladie,mais sans modification de la surfaceatteinte ni amélioration de la qualitéde vie.Les antileucotriènes ne sont pas untraitement des DA sévères. Leur placeéventuelle comme traitement d’appointdes DA modérées reste à préciser.

Immunoglobulines polyvalentes

Malgré quelques résultats encoura-geants chez des enfants, le coût, lesrisques, la nécessité d’hospitalisationsrépétées ne permettent pas de préco-niser ce traitement (grade C).

Interféron gamma

Deux études de niveau 1 et 2 et deuxde niveau 4 ont été menées, essentiel-lement chez des adultes, montrantune efficacité modérée, mais au prixd’effets secondaires fréquents [62]. Cetraitement ne peut pas être préconiséchez l’enfant.Selon les données actuelles, les photo-thérapies UVA-UVB ou UVB spectreétroit et la ciclosporine sont les 2 trai-tements qui peuvent être utilisés pources rares cas de DA sévères. L’enfantet ses parents doivent être informésoralement et par écrit des risques deces traitements.En l’absence d’études comparativesentre ces 2 traitements chez l’enfant,tant du point de vue efficacité qu’effets secondaires à long terme,leur place respective est difficile à défi-nir. Le choix est fonction de la faisabi-lité (âge, pathologies associées, proxi-mité d’une cabine équipée en UVB...)et du résultat de la discussion avecl’enfant et les parents.Les autres thérapeutiques ne peuventpas être recommandées.

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