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Les avatars contemporains de la moraleAuthor(s): Jacques ArdoinoSource: International Review of Education / Internationale Zeitschrift fürErziehungswissenschaft / Revue Internationale de l'Education, Vol. 26, No. 2, Problems ofTeaching Moral Values in Changing Society / Probleme der Moralerziehung in Einer SichWandelnden Gesellschaft / Problemes Relatifs a L'Enseignement des Valeurs Morales dans UneSociete en Transformation (1980), pp. 121-133Published by: SpringerStable URL: http://www.jstor.org/stable/3443949 .
Accessed: 11/06/2014 14:16
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LES AVATARS CONTEMPORAINS DE LA MORALE
JACQUES ARDOINO
Plutot que de penser les incertitudes actuelles quant a la reflexion morale en termes
de "crise" ou de "developpement" il semble plus fecond de s'interroger sur les
"avatars", c'est-a-dire les metamorphoses, contemporains de la penseee critique avec les retentissements que cela entraine sur le plan de VEthique. La representation des organisateurs, et des technocrates, qui s'appuie generalement sur un scientisme
etrique tend toujours vers une simplification des donnees, a partir de modeles que Von voudrait universels. L'experience de la vie quotidienne, entre autres dans les
pratiques educatives, conduit au contraire a une re connaissance de la complexite des faits humains. La morale cherche ainsi ses assises profondes dans le vecu
historique d'une dialectique des contradictions et des rapports de force. Sa spedfi? cite traditionnelle est donc remise en question. Le politique, Veconomique et
I'ethique deviennent plus explicitement interdependants. Les roles d'un imaginaire social createur de valeurs et de l'histoire, relativisant le rapport a la loi, sont
beaucoup plus determinants que dans les conceptions plus traditionnelles. Le
probleme d'une rehabilitation morale ne depend donc pas principalement des
educateurs, ou d'un quelconque enseignement de ce qui est "Bien" ou "Mal", mais
de la qualite d'une conscientisation politique et des consensus populaires qui en
decoulent, autrement dit d'une vision du monde ("Weltanschauung").
Rather than thinking of the current uncertainties concerning morality in terms of
"morality in terms of "crisis" and "development", it seems more fruitful to inquire into the contemporary "avatars", that is metamorphoses, of critical thought and
their repercussions on ethics. The approach of organisers and technocrats, who
generally base their argumentation on a narrow scientism, always tends to simplify facts by forcing them into supposedly universal models. By contrast, experience of
day-to-day life, including educational practices, leads to a recognition of the
complexity of human facts. The profound roots of morality are sought in the historic
al evolution of a dialectic of contradictions and power relations, so that its
traditional specificity is open to question. Politics, economics and ethics become
more explicitly interdependent. The role of an imaginary social force rather than
laws creating values and history seems to predominate much more than in the more
traditional conceptions. Thus the problem of moral rehabilitation depends not so
much on educators or on some sort of teaching about what is "good" or "bad", but
first and foremost on the quality of a political "conscientisation" and the popular
International Review of Education ? Internationale Zeitschrift fiir Erziehungswissenschaft - Revue Internationale de Pedagogie XXVI (1980), 121-133. All rights reserved. Copyright ? 1980 by Unesco Institute for Education, Hamburg and Martinus Nijhoff, The Hague.
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consensus resulting from it, in other words on a philosophy of life ("Welt?
anschauung").
Statt die heutigen Ungewissheiten im Moraldenken als "Krisen" oder "Ent?
wicklung" anzusehen, scheint es fruchtbarer, nach den zeitgenossischen Metamorp- hosen des kritischen Denkens und ihrer Auswirkungen auf die Ethik zu forschen. Der
Ansatz der Organisatoren und Technokraten, die sich gewohnlich auf eine eng gefasste Wissenschaftlichkeit stutzen, neigt immer dazu, Fakten zu vereinfachen, um sie in universal-sein-sollende Modelle zu zwdngen. Dagegen fuhren Erfahrungen im
taglichen Leben, unter anderem in der Erziehungspraxis, zur Erkenntnis der kom-
plexen Natur menschlicher Gegebenheiten. Dieser Ansatz sucht die Wurzeln der
Moral in der historischen Entwicklung einer Dialektik der Widerspruche und Macht-
verhaltnisse, wodurch ihre traditionelle Eigenstandigkeit in Frage gestellt wird. Zwischen Politik, Okonomie und Ethik bestehen viel engere Zusammenhange, und die Rolle einer imagindren sozialen Kraft, die Werte und Geschichte erzeugt und die
Beziehung zum Gesetz relativiert, erhdlt viel entscheidendere Bedeutung als in den
traditionelleren Konzeptionen. Das Problem moralischer Erneuerung hdngt daher nicht in erster Linie von Erziehern ab oder von irgendwelchen Lehren iiber "gut" und
"schlecht", sondern von der Qualitat der politischen Bewusstseinsbildung und dem daraus resultierenden Konsensus, in anderen Worten von der Welt?
anschauung.
Comme Charles de Gaulle le disait deja de l'autorite,1 les temps sont durs
pour la morale, les mceurs la battent en breche. A des titres divers, le
"Comment peut-on etre Persan?" des temps de Montesquieu semblerait
assez bien convenir, au prix du meme humour, a tous ceux que cette
question preoccupe encore. Pourquoi un tel discours, c'est-a-dire la re? flexion critique, fondamentale ou pragmatique, sur la valeur ethique des
options, des comportements, des attitudes ou des opinions, est-il devenu a
ce point vide de sens? Le moraliste semble aujourd'hui un voyageur egare, dans le temps comme dans l'espace, psalmodiant quelques vieilles rengaines heritees de son enfance, sans grand rapport avec la vie quotidienne, et dont il conserve seulement une lointaine nostalgie. Nos facultes critiques deja engourdies et domestiquees par les agencements sophistiques propres a une societe technocratique avancee, caracterisee par un "hedonisme de
consommation", sont, de surcroit, suffisamment encombrees par des preoc? cupations economiques et politiques pour que les considerations ethiques passent loin en arriere-plan, sinon deviennent carrement desuetes.
Le spectacle du monde, administre par un bombardement quotidien d'informations, dont le sensationnel constitue la regle d'or, contribue certainement a emousser notre sensibilite critique sous cet angle. La montee
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reguliere de la delinquance, le developpement des toxicomanies, desormais
institues en faits de la societe, comme le chomage et l'inflation, le terrorisme
et la guerilla urbaine, eriges en strategies de lutte politique, la frequence et la
banalite quotidienne des "bavures policieres", quand il ne s'agit pas, ca ou
la, de convertir la torture ou la violence d'etat en methodologie du maintien
de l'ordre, les "interventions" militaires ou para-militaires, ou le jeu des
grandes centrales de renseignements, venant interferer avec la vie privee des
citoyens ou les activites des groupes sociaux, les "denis de justice" etales
sans pudeur a la face de 1'opinion, les reniements des pouvoirs etablis,
prompts a transgresser leurs propres lois, les casuistiques, a la longue plus
grossieces que subtiles, dans les procedures de flagrant delit, d'extradition,
ou, plus generalement, dans les instances judiciaires a coloration politique, les genocides, l'elimination manifeste ou discrete des minorites, la margina- lisation systematique des indesirables, baptises handicapes sociaux ou "gens a problemes", suffiraient a rendre derisoire ou a frapper de suspicion
legitime toute demarche moralisante, d'ou qu'elle vienne, qu'elle se refere a
quelque norme que ce soit: normativite, nature morale de I'homme ou
conscience universelle.
Curieusement, la morale, une certaine morale, est morte quand on s'est
justement efforce, avec Kant, d'en etablir le caractere universel. Des lors, la
vanite d'une telle ambition eclate quotidiennement avec 1'amoncellement de
dementis flagrants dans la vie quotidienne. Ce qui, finalement, emerge de
l'actualite, de la facon la plus constante, c'est la quete de l'efficacite. Toute
la reflexion dont notre univers reste encore capable, semble etre devolue a la
determination des objectifs et aux strategies qui doivent permettre de les
conquerir. Ainsi, dans la pensee moderne, Leibnitz installe l'univers logique des possibles, de la combinatoire, dont la technocratie tirera ses axiomati-
ques presentes, sur le declin du regne des imperatifs categoriques. En ce
sens, le pragmatisme, qui camoufle seulement sa moralite clandestine sous
son souci "realiste" d'efficacite, est l'aubaine des apprentis sorciers. Voici
donc, un peu part out, venir le temps des gourous et des mages, des sectes, mais aussi des ideologies, qui tout en paraissant s'accorder, pour des raisons
finalement aussi diflferentes que contradictoires, sur la faillite des religions et
des morales traditionnelles, vehiculent neanmoins de fagon rigide et totali-
taire, des valeurs dont ils se sentent confusement depositaires. Ainsi, des
sous-religions s'inventent sur les ruines des courants spirituels, justement battus en breche par le materialisme contemporain. Car, paradoxalement, l'indifference apparente a la chose morale n'exclut nullement un niveau de
culpabilite diffuse, rarement atteint dans l'histoire de Thumanite. Dans
l'univers des societes liberales avancees, comme dans celui des dictatures
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militaires, ou de certaines revolutions "chirurgicales", chacun se sent (et est
juridiquement repute) coupable de tout ce qui ne fonctionne pas selon le
dessin des plans ideaux des organisateurs2. Plus les appareils dirigeants deviennent embarrasses par l'echec de leurs planifications et previsions,
plus le ton des hommes d'Etat et des responsables devient moralisateur,
accentuant encore le caractere de tutelle et de dependance dans lequel se
trouvent immemorialement confines les citoyens ordinaires. Dans nombre
de pays, incluant des regimes liberaux avances aussi bien que totalitaires, le
silence devient une arme d'Etat et le controle technique de l'information, de
la presse, de la radiotelevision et des autres media, un moyen de gouverne- ment. Tout se passe ainsi, comme si des discours, des exhortations, des
recommandations (notamment au niveau des organisations internationales)
continuaient a circuler sans grand rapport avec la realite vecue par le plus
grand nombre.
Pour eviter de trancher le probleme au fond, il est seduisant de decrire
une teile situation en termes de crise. Crise d'autorite, crise des valeurs,
crise de societe, il y a des dysfonctionnement auxquels il s'agit de porter remede. Effectivement, la notion meme de societe en evolution, sinon en
crise de croissance, ou en mutation, explique et justifie par avance les
peripeties axiologiques qui vont necessairement la caracteriser. D'une part, il ne peut y avoir de changements materiels importants sans qu'ils n'entrai-
nent, s'ils sent durables, des repercussions psychologiques, morales et
spirituelles, chez ceux qui les subissent. D'autre part, la prise de conscience
collective des transformations en cours provoque generalement une serie de
reactions contradictoires. Pour les uns, la croyance en un ordre immuable
(naturel, divin, rationnel), fondement habituel des obligations morales, se
trouve sapee; pour les autres, ces bouleversements sont autant de devia-
tions, sinon de perversions, escomptees ephemeres, par rapport a quelques modeles transcendants, auxquels il s'agirait salutairement de revenir (c'est bien le sens etymologique du mot reforme).
Ainsi, frequemment, meme lorsqu'il se combine avec le mot developpe?
ment3, le terme "crise" parce qu'emprunte au champ linguistique de la
biologie, de la physiologie et de la medecine, implique les notions corres-
pondantes de sante, de maladie et de therapeutique. Dans une teile perspec?
tive, il devient comprehensible et raisonnable de parler de pathologie
sociale, de fievre, d'abces, comme il est devenu usuel de parler, en
economie, de recession, ou de "surchauffe". Des lors, la criminalite, la
drogue, la violence deviennent des phenomenes de conjonctures dont on fait
la part et contre lesquels on entreprend de lutter techniquement sans plus chercher a s'interroger sur leurs significations plus profondes. Le paradoxe
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est qu'ainsi on integre, en le marginalisant, et en le banalisant, ce contre quoi on est cense se defendre. Digerer pour reduire semble etre la forme moderne
d'un "cannibalisme" social par assimilation. Ce qui precede ne veut
nullement signifier que le concept de crise n'ait plus nulle part aucune utilite.
II y a effectivement des crises entre Etats, dans les rapports sociaux, dans la
vie physiologique, dans les phenomenes economiques. Mais l'emploi d'une
telle notion nous semble tout a fait inapproprie, sinon tendancieux, quand il
s'agit de vouloir rendre compte du changement des principes fondamentaux
qui structurent et regissent les conduites et les comportements des individus
et des peuples. Tout a l'oppose, les problemes qui nous interessent, ici, relevent plutot, selon nous, d'une comprehension dialectique-historique ou
les phenomenes sociaux, et l'invention au sein des pratiques collectives, se
donnent a lire en tant que contradictoires, plus encore caracterisee par les
ruptures, les conflits et les rapports de force qu'exprimee en termes de
regression ou de progression. Pour toutes ces raisons, plutot que nous attarder a decrire l'eclipse
supposee provisoire de la reflexion morale, en fonction d'une conjoncture de
crise, de mutation, ou des aleas du developpement culturel, ou encore
d'annoncer plus radicalement la disparition d'une telle forme de reflexion
critique devenue impossible, il nous semble preferable de nous interroger,
maintenant, sur ce qui est en cours de changement dans la fagon dont nous
nous situons collectivement et individuellement par rapport aux questions d'ordre ethique. Mais la prise en consideration de tels changements obligera a se referer a un contexte plus large que celui traditionnellement devolu a
l'univers moral. Par exemple, l'element sans doute le plus important de
notre vecu, aussi necessaire a prendre en consideration dans la pratique
quotidienne, personnelle, familiale, professionnelle, civique, que dans les
enonces theoriques qui pretendent en permettre l'intelligibilite, nous semble
resider dans la prise de conscience de la complexite. Or, nous vivons pour 1'essentiel selon la vision du monde des organisateurs qui attendent de la
Methode la simplification des donnees du reel. II y a opposition dechirante
entre la croyance entretenue de fagon simpliste que celui qui possede le
Code, la Methode, et qui les applique de fagon appropriee est assure d'un
comportement juste et d'une pensee correcte (la liaison entre le logique et le
moral est deja ici tres sensible), et la richesse plus incoherente, plus opaque,
plus equivoque, de notre experience profonde et immediate de l'existence.
Celle-ci montre a l'evidence une tres grande variete de fagons d'apprehender le reel, d'expliquer, de prevoir. Les codes, les methodes, les referentiels
sont legions. Aucun d'entre-eux ne semble suffisant pour epuiser cette
richesse du reel et pour en rendre veritablement compte. II faut, le plus
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souvent, dans l'etat actuel de nos connaissances, savoir user successive-
ment ou simultanement de differents systemes de references. C'est ce que nous designerons, ici, par multireferentialite. Dans cette tout autre perspec?
tive, les modeles traditionnels se diluent et se transforment sous l'influence
d'une multitude de facteurs qui n'etaient pas jusque-la pris en consideration,
beaucoup plus qu'ils ne s'effondrent ou disparaissent. Plusieurs caracteristi?
ques peuvent ainsi etre degagees.
1. Un changement de polarite de Vindividuel vers le social. La morale
cherche desormais davantage ses assises dans l'expression de consensus
populaires et d'une "conscience collective" que dans les consciences
individuelles qui deviennent alors les echos plus ou moins fideles de celle-ci.
Au fur et a mesure que le caractere subjectif de la moralite, generalement lie a des conceptions metaphysiques, s'estompe, la notion de devoir perd de
son importance au profit de celles de droit et dyobligation. Ainsi le rapport a
la loi semble transcender son fond fantasmatique, tel que nous le revele
l'approche psychanalytique, pour prendre des formes plus objectives. Mais
la dialectique des rapports entre droits et devoirs, au sein de l'univers moral
ainsi socialise, ne progresse pas pour autant. On semble revendiquer
aujourd'hui des droits pour mieux repudier des devoirs dont l'idee meme
devient insupportable parce qu'associee a des superstitions archaiques. Mais il n'en reste pas moins curieux d'avoir a enoncer des droits (droit d' exist er, droit au travail, droits sociaux, droit d'expression), pour traduire
ce qui est l'evidence meme: biologiquement et socialement, au moins
statistiquement, l'existence tend a s'affirmer et a se maintenir. L'enonce
d'un droit qui voudrait exprimer une reconnaissance de ce qui aboutit en
fait, a une formulation toujours restrictive. Dans la reglementation qui
precise un droit en en posant les limites, il y a toute la nostalgie de ce qui n'a
pas su s'affirmer ou s'imposer autrement. II est remarquable que les
massacres d'adolescents de Bangui et du Zaire aient lieu l'annee meme
choisie par l'Unesco pour consacrer les droits de l'enfant4. Que penser par
ailleurs, de ce Ministre framjais de la Sante, en mal d'innovation, qui, il y a
quelques annees, avait imagine de rediger une "charte du malade". En fait,
cette proclamation des droits (Droits de l'Homme, Droits de la Femme,
Droits du Citoyen, Liberte de la Presse) conduit beaucoup plus encore a un
juridisme qu'a la pratique d'une moralite, orientant et eclairant les rapports des hommes entre eux. Dire, comme nous nous en flattons si souvent, que nous sommes citoyens de "societes de droit", c'est renforcer du meme
coup, les pouvoirs exorbitants et tutelaires de l'Etat comme seul garant des
libertes. C'est contribuer, par consequent, a la deresponsabilisation du plus
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grand nombre. Chacun sait que des deontologies fleurissent surtout sur les
terrains professionnels ou les malversations et les abus proliferent. Les
medecins, les avocats, les architectes, les notaires, se sont donnes des
"Ordres", les compagnons et les artisans se sont contentes de traditions. Ce
decalage entre le Droit et la Justice, ou l'equite est encore accentuee quand une "raison" (ou une morale) d'Etat vient jouer ostensiblement en marge des principes et des lois devolus aux citoyens ordinaires (scandales etouffes, crimes impunis, privileges notoires). La morale dont se reclame l'Etat pour
l'imposer au plus grand nombre, tout en la bafouant quand des interets
superieurs-sont en jeu, devient alors une arme ou un outil supplementaires dans la panoplie des instruments de coercition dont disposent ses dirigeants.
Ainsi, dans des proces evidemment politiques, des "fautes morales" sont
explicitement invoquees pour se debarrasser d'adversaires genants, ou pour reduire une opposition dangereuse.
Enfin, l'edification d'une morale sociologique ou d'une science des
mceurs, si elle permet bien par ailleurs de relever quelques correlations
interessantes entre la moralite et "le Moral" (niveau d'aspirations et de
confiance collectif) des groupes concernes, ramenera souvent, d'une fagon detournee, a la quete de l'absolu, caracterisant jadis toutes les morales
traditionnelles. Dans sa nouvelle exigence d'universalite, la legalite positive
remplace parfaitement la normativite d'antan. L'absolu, comme idee qu'il y a, quelque part, un sens a decouvrir, qui serait le sens de tous les autres
sens, se retrouve ainsi intact seulement camoufle par le masque de la
relativite. Tout en prenant des formes plus fonctionnelles, (regulation,
reglements), ou plus conventionnelles (contrats), X®le subsiste, toujours aussi intolerante aux critiques qui la visent, a peine voilee par le maquis des
procedures. On peut donc se demander tres serieusement, si dans ce
contexte d'"objectivite" et de "positivisme" les risques de retour au vecu
fantasmatique et sauvage de la loi archaique ne demeurent pas tres grands. Entre le souci "technique" de la mise hors d'etat de nuire, pour
l'efficacite dans la recherche de la securite collective et le maintien de
l'ordre public, et l'ideal, toujours populaire, de la vengeance et du chati-
ment, la barbarie des temps modernes reste bien l'impuissance a assumer la
complexite.
2. Avec ce changement de polarite de la subjectivite individuelle vers
Vobjectivite sociale, la morale perd en quelque sorte sa specificite premiere. Conserve-t-elle seulement une "episteme"? On ne peut plus, en effet, la classer comme jadis, (science normative), en fonction des regions tradition?
nelles du savoir. Les questions qui se posent a nous, aujourd'hui, en termes
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moraux, meme si elles nous conduisent toujours a des interrogations
philosophiques sur le sens de la vie et de la mort, ne peuvent plus etre
dissociees des problemes sociaux, economiques, et politiques, desquels elles surgissent. La psychologie, elle-meme, surtout quand elle interesse nos
motivations profondes, interfere constamment avec la problematique des
responsabilites individuelles et collectives. C'est, paradoxalement, sur le
terrain des sciences humaines que se retrouvent aujourd'hui les seuls germes encore vivaces de l'ethique. II faut "l'emerveillement" et l'"humoresque" de V. Jankelevitch5, pour le meconnaitre et pour penser que le moraliste
doit encore se tenir a distance de Marx et de Freud, pour menager je ne sais
quelle independance souveraine. Si le racisme constitue bien le probleme moral contemporain par excellence6, en confrontant la question des iden-
tites individuelles et collectives aux problemes de Yalteration et, par
consequent, du changement, du devenir autre, de l'influence de l'autre et de
la maturation, il s'agit beaucoup plus d'une perversion ideologique et d'un
avatar des pulsions libidinales, d'une "fausse conscience"7 que d'une
mauvaise conscience. Vu sous cet angle, le racisme est la reduction abusive
et injuste d'un etre, ou d'un ensemble pratique (groupe) a l'une de ses
particularites, reelle, objective, mais que Von transforme indument en
essence ou en nature universelle par un proces de reification. On l'a bien
compris, le racisme aujourd'hui ne se limite plus aux differences ethniques8. Les segregations modernes s'etablissent aujourd'hui a partir des sexes, des
ages, des classes sociales, des statuts, des affinites ou des aversions
ideologiques. Dans tous les cas, c'est la difference reelle dont on part qui est
le fondement objectif apparent de Voperation de reduction qui transforme la
particularite de la difference en universalite de Vinegalite. D'un fait positif, on tire un droit negatif. La reification suppose donc une decheance de la
temporalite, de l'historicite des personnes et des groupes ainsi figes dans
leur definition.il faut encore ajouter a cette conversion ideologique, qui, tout
en obeissant a des interets economiques et politiques evidents, met en jeu des pulsions libidinales, un phenomene de "projection", bien decrit par Freud comme mecanisme paranoi'de de resolution des tensions et des
conflits au sein de l'appareil psychique. Est ainsi volontiers projete sur
l'autre ce qui est refuse de soi comme inacceptable, insupportable a
assumer, a reconnaitre comme sien. D'autres exemples pourraient venir
s'ajouter a celui du racisme9. L'important est de comprendre que le domaine
du moraliste ne saurait plus se definir par des categories d'actes ou de faits
relevant plus specifiquement de sa competence. Reciproquement, un seul
type d'analyse ne permet plus de determiner ou d'evaluer la qualite morale
d'une intuition ou d'une action.
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LES AVATARS C0NTEMP0RAINS DE LA MORALE 129
3. La dialectique de la reproduction et de la creation. Le debat moral quand il est explicitement formule comme tel ne trouve plus aussi aisement
qu'autrefois sa conclusion dans la stricte application de regles preetablies. Meme si dans de nombreux cas la moralite est encore vecue comme
conformite, 1'interpretation dans les temps modernes fait une part plus belle
a la glose qu'a l'exegese. Dans le "conflit des interpretations"10 dont notre
epoque est le reflet, une toute autre vision du monde tend a s'affirmer. Face
a l'essentialisme traditionnel, les categories axiologiques: le vrai, le bien, le
beau, sont, comme tout ce qui est humain, placees sous le signe de
Tinachevement. II y a creation au sein meme des pratiques. La morale
s'elabore, et par consequent, s'altere et se renouvelle au fil de l'histoire.
C'est donc la surprise, la temporalite, l'evolution, qu'il s'agit de privilegier,
aujourd'hui, et non les archetypes ou les modeles universels. Nous re-
trouvons, ici, l'opposition fondamentale entre deux conceptions de l'exis?
tence, de la connaissance et de l'action. Pour nous, contrairement aux vues
de E. Kant et de V. Jankelevitch11, la morale est science de \&particularite
plus que de l'universalite. L'intuition qu'il faut s'en donner aujourd'hui est
dialectique, au lieu de la representation manicheenne et normative a laquelle on s'attache traditionnellement. C'est pourquoi le "jeu du monde" (K.
Axelos) et la scene politique internationale, avec les surprises qu'ils nous
apportent, les exces, les perversions, les regressions, mais aussi les con-
quetes, les progres, les bonds qualitatifs, peuvent etre consideres comme les
laboratoires naturels, a ciel ouvert, ou l'humanite et la societe se cherchent
et s'inventent. H. Bergson opposait deja en ce sens, une "morale close"12.
B. Pas cal pensait, de son cote, que la vraie morale se moque toujours de la
morale quand elle s'entend comme conformite a la regle ordinairement
admise, c'est-a-dire comme reproduction de l'identique. Mais l'un comme
l'autre consideraient cette axio-genese comme le fait exceptionnel d'indi-
vidualites constituant une elite. On tend aujourd'hui a se faire une idee plus
democratique et plus populaire d'une telle elaboration des valeurs. Celle-ci
suppose, just ement, a travers le jeu d'un "imaginaire createur", exprime par le "faire social historique"13, une capacite revolutionnaire de transgression de l'ordre etabli, quand ce dernier tend manifestement au deperissement de
la repetition et au vide des rituels. Prealablement a toute interrogation
ontologique sur la nature du Bien et du Mal, c'est l'analyse institutionnelle
de la morale et de ses avatars, en tant qu'institution sociale, qui s'impose14. Comment l'educateur (en premier lieu, le praticien de l'Education, mais
aussi, plus generalement, tout agent des systemes educatifs)15, peut-il se
situer face a tels changements, dans une telle conjoncture? Meme s'il
prefere souvent l'ignorer en se technicisant, comme tant d'autres profes-
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sionnels, l'educateur ne peut eluder completement, ou esquiver longtemps, la problematique morale. La pratique educative, en effet, ne peut faire
l'economie d'une reflexion philosophique, morale et politique, axiologique
parce que finalisee. Quelle education pour quelle idee de l'homme, pour
quelle societe, pour quel destin? Dans les temps modernes, le recul des
speculations metaphysiques et la depreciation d'une philosophie tournant
trop facilement le dos a 1'existence, indifferentes aux donnees de la vie
quotidienne, conduisent trop facilement a vouloir se servir de boussoles
personnelles dont il n'est plus sur qu'elles aient jamais ete aimantees. La
permissivite, la non-directivite, quand il ne s'agissait pas de demagogie ou
de laxisme, ont egalement montre leurs limites. Mais d'un autre cote, devant
l'ampleur du probleme, que penser faire, en se situant a Vinterieur des
systemes educatifs, qui ne risque de retomber dans l'illusion des vieux
mythes sur la nature de l'homme et les conditions transcendantales de sa
perfectibilite ? Le premier piege dans lequel risquent evidemment de tomber
les specialistes de l'education, est de lier l'eveil (ou le reveil) de la pratique morale a un apprentissage scolaire. Le sens du Bien se perd parce qu'on ne
l'apprend plus. II faut donc l'enseigner. On ajouterait, ainsi, au decoupage traditionnel des disciplines, une autre specialite, (jadis classique), qu'on s'efforcerait de rehabiliter ou de revivifier. En fait, dans les pays ou les
gouvernements demandent aux educateurs des suggestions, quand ce ne
soient des panacees, pour developper les forces morales, le patriotisme, les
conditions de la paix dans le monde, on veut tout simplement masquer Vechec des instances et des appareils politiques en "refilant le bebe" a des
techniciens subalternes16. Dans les temps modernes, le veritable apprentis?
sage de la morale est, que cela plaise ou non aux tenants des systemes
educatifs, dans la rue, dans la pratique quotidienne, dans les comportements des dirigeants politiques et des administrations a l'egard des citoyens, dans
la technicite qui quadrille constamment notre confort domestique ou notre
organisation professionnelle.
Trop souvent, la logique de l'organisation et de l'efficacite tient desor-
mais lieu d'art de vivre. Le conditionnement ordinaire des citoyens con-
tribue a l'erosion de leur esprit critique et, avec l'acceptation fonciere d'une
dependance et d'une assistance quotidiennement entretenues, a l'atrophie du sens des responsabilites et de la solidarite. Les moyens educatifs sont le
plus souvent a la mesure des societes de consommation qu'ils ont mission
d'initier. C'est pourquoi dans presque tous les pays en voie de recession
economique, les budgets educatifs sont reduits, alors qu'ils devraient etre
augmentes. Le caractere utilitaire de leilr orientation est encore renforce. La
fonction potentiellement politique de l'education n'est pratiquement jamais
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LES AVATARS CONTEMPORAINS DE LA MORALE 131
developpee. On se contente de faire appel a une fonction domestique plus traditionnelle. Dans ces conditions, Pinfluence morale personnelle des
educateurs, et celle plus bureaucratique des systemes educatifs, ne peuvent, a de rares exceptions pres, s'exercer que dans le sens de la reproduction et
de l'adaptation a l'ordre etabli. II est donc assez vain d'attendre de ce cote
des solutions miracles. Le probleme est d'ordre avant tout politique. C'est
dans la mesure ou un projet de societe, rencontrant un consensus social
suffisant, privilegie resolument un certain nombre de valeurs qu'un projet
pedagogique peut en etre deduit pour animer, avec quelques chances
d'efficacite, un systeme educatif. Dans les conditions de misere politique ou
se trouvent maintenues la plupart des Etats par la crainte des changements
plus radicaux qui les menacent, seule une fonction d'ecoute de ce qui se
passe, de ce qui se dessine sourdement, sous le jeu apparent des normes
institutionnelles, reste possible. II faut, en effet, se souvenir que c'est dans
les nations ou le sous-developpement critique est le plus notable, quelles
qu'en soient les raisons, que s'installent le plus facilement et le plus
durablement, les formes diversifiees du totalitarisme contemporain. Ce
maintien de la vigilance critique suppose, nous l'avons dit, un certain deuil, au moins provisoire, du culte de l'absolu. La realite a laquelle on se trouve
quotidiennement confronte doit etre apprehendee sous des angles con-
tradictoires, avec des systemes de reference differents. L'ambition de
totalisation: faire le tour de la realite, avec autant de systemes de reference
et d'interpretation qu'il serait necessaire de cumuler, serait une autre
naivete, conduisant a de nouvelles impasses. Dans l'etat actuel de nos
connaissances, les Sciences Humaines ne sauraient pretendre a une theorie
exhaustive. D'un autre cote, les capacites d'elucidation apportees par une
analyse multireferentielle, n'importent pas seulement au niveau de la
comprehension theorique des situations et des problemes, mais a celui de la
critique pratique. La est justement le role de l'educateur: initier theorique- ment et pratiquement a cette complexite et permettre, a partir d'un tel
reperage, un remembrement, une rearticulation, des discours que tous les
hachages disciplinaires contribuent a dissocier.
En ce sens, l'action educative n'a pas pour finalite de former a une
morale, mais, en travaillant au developpement personnel, a l'emergence du
sujet, dans le cadre de la dynamique des rapports de force sociaux, a la
conquete d'une plus grande autonomie ou d'une moindre alienation, de
permettre l'elaboration des fondements necessaires a toute vie morale.
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132 J. ARDOINO
NOTES
1. C. de Gaulle, Lefil de Vepee. Paris: Berger Levrault, 1932.
2. Dans les Etats qui se definissent comme les plus liberaux, fumer, par exemple,
risque de devenir un acte anti-social, non seulement parce que polluant, mais encore
parce que grevant le budget de la securite sociale; le port de la ceinture de securite et
l'usage systematique des "codes" pour l'eclairage des vehicules, deviennent obliga- toires pour des raisons analogues.
3. Tenter de comprendre l'evolution des mceurs en fonction du developpement
economique et social des Etats ou des populations pris en consideration conduit au
meme type d'impasse. Meme s'il s'accommode d'une representation selon une
courbe en dents de scie, le developpement est, le plus souvent, concu a partir d'un
modele lineaire. 11 y a ainsi un mythe de la progression culturelle, comme un autre de
Taccroissement des richesses censes operer de meme quand ils ne sont pas supposes entaves par des obstacles, paralyses par des dysfonctionnements ou hypotheques par des carences.
4. Pour prendre un autre exemple, l'Unesco mene une campagne pour la defense de
la propriete intellectuelle et des droits d'auteurs, mais n'en respecte nullement les
principes a l'egard de ses propres collaborateurs.
5. "Les emerveillements de V. Jankelevitch", Le Monde Dimanche, 4.11.79.
6. La question n'est nullement academique quand on observe les consequences
tragiques engendrees par un tel phenomene, un peu part out dans le monde, coincidant toujours avec des prises de positions morales.
7. Au sens de Lukacs, Minkowski, et Gabel. Cf. J. Gabel, La fausse conscience.
Paris: Ed. de Minuit, 1963.
8. Jamais dans l'histoire de l'humanite, la virulence du racisme n'avait atteint de tels
sommets. Les distinctions de l'Antiquite entre civilises et barbares, ou entre homme
libre et esclave, n'avaient ni le meme sens ni la meme portee. Le racisme moderne
est affirmation d'une difference pour aboutir a la negation si ce n'est a l'aneantisse-
ment d'un etre. Lorsque de surcroit la science biologique et genetique, relue avec les
lunettes de la "nouvelle droite" est invoquee pour justifier le passage de la difference
a l'inegalite, on peut s'interroger avec effroi sur les capacites critiques qui restent
disponibles dans nos civilisations.
9. L'interpellation d'un gangster aboutissant a son execution sommaire preorgani- see, au lieu de son arrestation theoriquement recherchee, ou le suicide d'un ministre
orchestre par des intrigues de palais, les superbenefices de societes industrielles
multi-nationales defiant la justice sociale, l'ingerence ou la non-ingerence dans les
affaires des Etats souverains, les inegalites entre pays developpes et tiers-monde, la
libre circulation des personnes et des idees, le fonctionnement de l'information et le
pouvoir critique, interessent beaucoup plus la morale dans les temps modernes que
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LES AVATARS CONTEMPORAINS DE LA MORALE 133
l'observance plus ou moins stricte des "dix commandements" ou les discours du
temps passe sur les vertus et les vices.
10. Cf. P. Ricoeur. Paris: Seuil 1967.
11. Les travaux du canadien francais, L. Morin, enseignant la Philosophie de
l'Education, au Quebec, illustrent parfaitement une telle vision de la morale. Cf. Les
charlatans de la nouvelle pedagogie. Paris: P.U.F., 1963, ctL'esquive, (en collabo?
ration avec A. Naud), Quebec: Service General des Communications du Ministere
de l'Education, 1979.
12. Cf. egalement L. Lavelle.
13. Cf. C. Castoriadis. L'institution imaginaire de la socete. Paris: Seuil, L'expe? rience du mouvement ouvrier, pp. 10/18.
14. Cf. les recherches d'analyse institutionnelle. G. Lapassade. R. Lourau.
15. Bien que nous n'ayons pas la place d'un developpement de cette question dans le
cadre de cet article, la distinction est d'importance.
16. La remarque vaut egalement pour les organisations internationales.
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