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+ Models MYCMED-472; No. of Pages 6 Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001 ARTICLE ORIGINAL/ORIGINAL ARTICLE Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire) Onychomycosis mycological profile in Abidjan (Cote d’Ivoire) A. Konate a, * ,b , W. Yavo a , K.F. Kassi a,c , V. Djohan a , K.E. Angora a , H. Bosson-Vanga a , P. Barro-Kiki a , E.I.H. Menan a,c a Laboratoire de parasitologie-mycologie, centre hospitalier universitaire de Yopougon, 21, BP 632 Abidjan 21, Abidjan, Co ˆte d’Ivoire b Laboratoire de parasitologie-mycologie, CHU de Yopougon, 21 BP 632 , Abidjan, Co ˆte d’Ivoire c Laboratoire de parasitologie-mycologie, Centre de diagnostic et de recherche sur le sida et les maladies opportunistes, 01 BPV 13, Abidjan, Co ˆte d’Ivoire Rec¸u le 8 fe´vrier 2013 ; rec¸u sous la forme re´vise´e le 18 February 2014; accepte´ le 4 mars 2014 MOTS CLÉS Onychomycoses ; Étiologies ; Candida ; Dermatophytes ; Côte d’Ivoire Résumé But de l’e´tude. Le profil épidémiologique des onychomycoses est mal déterminé en Côte d’Ivoire. Cette étude visait à déterminer les étiologies mycologiques de ces onychomycoses à Abidjan. Patients et me´thodes. Il s’agit d’une étude transversale qui s’est déroulée de février à août 2011 au service de dermatologie du CHU de Treichville. Ont été interrogés, tous les patients venus consulter pour une onycholyse. Les échantillons prélevés au niveau des lésions ont tous fait l’objet d’un examen direct et d’une culture sur milieux Sabouraud-chloramphénicol-actidione et Sabouraud-chloramphénicol. L’identification a été fonction du type de champignon observé. Re´sultats. Au total, 53 patients ont été inclus. La prévalence des onychomycoses était de 66 %. Les lésions unilatérales étaient statistiquement différentes des lésions bilatérales ( p = 0,010). Les femmes étaient plus atteintes au niveau des mains que des pieds contrairement aux hommes ( p = 0,010). Cinq espèces de levures et deux espèces de dermatophytes ont été identifiées. Parmi les levures, prédominaient Candida tropicalis (36,4 %) et Candida albicans (30,3 %). Trichophyton rubrum et Trichophyton soudanense ont été les seuls dermatophytes isolés. Aucun des facteurs favorisants recherchés ne s’est avéré statistiquement lié à la survenue des onychomycoses dans notre série. Journal de Mycologie Médicale (2014) xxx, xxxxxx * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Konate). Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001 1156-5233/# 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire)

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ARTICLE ORIGINAL/ORIGINAL ARTICLE

Profil mycologique des onychomycosesà Abidjan (Côte d’Ivoire)Onychomycosis mycological profile in Abidjan (Cote d’Ivoire)

A. Konate a,*,b, W. Yavo a, K.F. Kassi a,c, V. Djohan a,K.E. Angora a, H. Bosson-Vanga a, P. Barro-Kiki a, E.I.H. Menan a,c

a Laboratoire de parasitologie-mycologie, centre hospitalier universitaire de Yopougon, 21, BP 632 Abidjan21, Abidjan, Cote d’Ivoireb Laboratoire de parasitologie-mycologie, CHU de Yopougon, 21 BP 632 , Abidjan, Cote d’Ivoirec Laboratoire de parasitologie-mycologie, Centre de diagnostic et de recherche sur le sida et les maladiesopportunistes, 01 BPV 13, Abidjan, Cote d’Ivoire

Recu le 8 fevrier 2013 ; recu sous la forme revisee le 18 February 2014; accepte le 4 mars 2014

MOTS CLÉSOnychomycoses ;Étiologies ;Candida ;Dermatophytes ;Côte d’Ivoire

RésuméBut de l’etude. — Le profil épidémiologique des onychomycoses est mal déterminé en Côted’Ivoire. Cette étude visait à déterminer les étiologies mycologiques de ces onychomycoses àAbidjan.Patients et methodes. — Il s’agit d’une étude transversale qui s’est déroulée de février à août2011 au service de dermatologie du CHU de Treichville. Ont été interrogés, tous les patientsvenus consulter pour une onycholyse. Les échantillons prélevés au niveau des lésions ont tous faitl’objet d’un examen direct et d’une culture sur milieux Sabouraud-chloramphénicol-actidione etSabouraud-chloramphénicol. L’identification a été fonction du type de champignon observé.Resultats. — Au total, 53 patients ont été inclus. La prévalence des onychomycoses était de66 %. Les lésions unilatérales étaient statistiquement différentes des lésions bilatérales( p = 0,010). Les femmes étaient plus atteintes au niveau des mains que des pieds contrairementaux hommes ( p = 0,010). Cinq espèces de levures et deux espèces de dermatophytes ont étéidentifiées. Parmi les levures, prédominaient Candida tropicalis (36,4 %) et Candida albicans(30,3 %). Trichophyton rubrum et Trichophyton soudanense ont été les seuls dermatophytesisolés. Aucun des facteurs favorisants recherchés ne s’est avéré statistiquement lié à la survenuedes onychomycoses dans notre série.

Journal de Mycologie Médicale (2014) xxx, xxx—xxx

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Konate).

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.0011156-5233/# 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001

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Conclusion. — Les onychomycoses observées en Côte d’Ivoire sont essentiellementcausées par les levures. Même si dans notre série les facteurs favorisants n’ont pas puêtre identifiés, l’hygiène corporelle et celle des ongles devraient permettre une bonneprévention.# 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

KEYWORDSOnychomycosis;Aetiologie;Candida;Dermatophytes;Cote d’Ivoire

Summary

Aim of the study. — The epidemiological profile of onychomycosis is poorly determined in Coted’Ivoire. This study aimed to determine the fungal aetiologies of these onychomycosis inAbidjan.Patients and methods. — This cross-sectional study was conducted from February to August2011 at the Department of Dermatology of the University Hospital of Treichville. All patientswho consulted for onycholysis were interviewed. All samples were analyzed by direct exami-nation and Sabouraud-chloramphenicol and Sabouraud-chloramphenicol-actidione culture wasperformed. Species identification was based on microscopic characteristics of the fungusobserved.Results. — A total of 53 patients were included. The prevalence of onychomycosis wasestimated at 66 %. The unilateral lesions were statistically different from bilateral lesions(P = 0.010). Women were more affected at the hands than men (P = 0.010). Five species ofyeasts and two dermatophytes species were identified. Yeasts species were essentiallyCandida tropicalis (36.4 %) and Candida albicans (30.3 %). Trichophyton rubrum and Tricho-phyton soudanense were the only dermatophytes isolated. No contributing factors werestatistically related to the occurrence of onychomycosis in our series.Conclusion. — The observed onychomycosis in Côte d’Ivoire are mainly caused by yeasts.Although in our series the risk factors have not been identified, hygiene of the nails shouldprovide effective prevention.# 2014 Published by Elsevier Masson SAS.

2 A. Konate et al.

Introduction

Une onychomycose se définit comme une infection fongiquede l’appareil unguéal provoquée par des dermatophytes,des levures ou des moisissures [27]. Il s’agit le plus fréquem-ment de dermatophytes (prédominant aux pieds), ensuitede levures du genre Candida (prédominant aux mains) et demoisissures [27,30]. La réalité de l’infection pour ces der-nières est parfois difficile à affirmer. Cette pathologie peutavoir un retentissement sur la qualité de vie : gêne, pro-blèmes fonctionnels au travail, réduction des activitéssociales, crainte de la contamination des proches,fréquence significative de la douleur [27]. Les onychomy-coses sont classées dans le groupe des onychopathies dontelles représentent 18 à 50 % selon les séries ; les autrescauses étant le fait de traumatismes, d’autres affectionsdermatologiques ou générales comme le psoriasis[5,11,13,27]. La prévalence des onychomycoses varie de2 à 26,9 % dans la population générale selon des étudesréalisées [9,10,23,24]. De nombreux facteurs immunitaires,génétiques et environnementaux (pratique sportive, pro-fession, mode de vie) peuvent favoriser la survenue desonychomycoses [27]. Leur implication ainsi que les agentsmycologiques responsables sont cependant mal évalués enCôte d’Ivoire.

Dans cette étude, il s’agissait de déterminer les étiologiesmycologiques des onychomycoses observées chez despatients vus au service de dermatologie du CHU de Treich-ville (Abidjan, Côte d’Ivoire).

Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onycho(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001

Patients et méthodes

Patients

Cette étude était transversale et s’est déroulée de février àaoût 2011. Elle a eu lieu au service de dermatologie du centrehospitalier universitaire (CHU) de Treichville (Abidjan, Côted’Ivoire).

Située sur le cordon littoral, Abidjan possède un climattropical humide de type attiéen avec deux saisons de pluies(avril à juillet et octobre à novembre) et deux saisons sèches(décembre à mars et août à septembre). La températuremoyenne varie entre 25 et 30 8C et l’humidité relative entre80 et 90 %. Cette enquête s’est donc déroulée aussi bien ensaison sèche qu’en saison pluvieuse. Les examens mycolo-giques ont été réalisés au Centre de diagnostic et de recher-che sur le sida et les affections opportunistes (CeDReS) situéau sein même du CHU de Treichville.

La population d’étude était constituée de patients venusconsulter pour une onycholyse et chez lesquels le diagnosticd’une onychomycose avait été posé par le dermatologue.Ainsi, des patients d’âge et de sexe confondus n’ayant reçuaucun traitement spécifique au moins deux semaines avant laconsultation médicale et ayant donné leur consentement ontété retenus pour l’étude.

Méthodes

Un questionnaire a été donné à chaque patient avant leprélèvement. Les fiches d’enquête ont permis de recueillir

mycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale

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Tableau 1 Distribution des périonyxis en fonction del’espèce.Paronychia distribution according to the species.

Espèces fongiques Fréquence(n)

Pourcentage(%)

LevuresCandida tropicalis 10 83,3Candida albicans 9 90,0Candida parapsilosis 4 57,1Candida guilliermondii 1 100Saccharomyces cerevisiae 1 100

DermatophytesTrichophyton rubrum 0 0Trichophyton soudanense 0 0

33 100

Tableau 2 Caractéristiques des lésions.Lesions characteristics.

Atteinte des mains Atteinte des pieds

Effectif (%) Effectif (%) p

SexeMasculin 9 (20,9) 8 (57,1) 0,010Féminin 34 (79,1) 6 (42,9)

Type de lesionsUnilatérales 29 (67,4) 4 (28,6) 0,010Bilatérales 14 (32,6) 10 (71,4)

Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire) 3

des données socio-démographiques (âge, sexe, profession,type d’habitat), relatives aux habitudes et pratiques (réali-sation de tâches domestiques, pratiques de sport, partaged’effets intimes. . .) et cliniques.

Prélèvement mycologiqueAprès le dégraissage et la stérilisation des ongles par del’éther, la périphérie des ongles atteints a été raclée à l’aided’une lame de bistouri stérile. Ensuite des fragmentsd’ongles ont été récoltés à l’aide d’une paire de ciseauxstériles. Les squames et fragments ainsi obtenus ont étérecueillis dans des boîtes de Pétri stériles rendues étanchesavec du scotch puis acheminés au laboratoire pour analysesmycologiques. En cas de périonyxis, le pus a également étéprélevé par écouvillonnage à l’aide d’un écouvillon de cotonstérile.

Examen mycologiqueIl a comporté deux étapes : un examen direct de quelquesspécimens prélevés déposés sur une lame porte-objet,éclaircis par la potasse à 30 %, puis recouverts d’une lamelle.La lecture s’est faite après 30 minutes d’action de lapotasse. Ensuite un ensemencement sur milieux gélosés deSabouraud-chloramphénicol (SC) et de Sabouraud-actidione-chloramphénicol (SAC) a suivi. Les prélèvements ont étédéposés dans les conditions d’asepsie sur gélose inclinéeen tube. Les tubes ont ensuite été mis à incuber à l’étuveentre 25 et 27 8C pendant une semaine à un mois. Lescultures ont été observées chaque jour, afin d’apprécierle temps de pousse des champignons et de suivre l’évolutionmacroscopique des colonies en culture.

IdentificationLes colonies lévuriformes ont été identifiées après la mise enœuvre du test de filamentation en sérum ou test de blastèse. Ila été réalisé en ajoutant une goutte de suspension de levuresdans 1 mL de sérum humain frais. La préparation a été incubéeà 37 8C pendant trois heures. L’auxanogramme a ensuite étéréalisé sur les galeries API120 C AUX (Biomérieux, France)pour les levures présentant un test de blastèse négatif.

L’identification des espèces de dermatophytes s’esteffectuée après 15 jours d’incubation en moyenne sur larapidité de la pousse, l’aspect macroscopique recto et versodes colonies, l’élaboration et la diffusion éventuelle depigment ainsi que sur leur aspect microscopique.

Analyses statistiques

Le logiciel Epi-info 6.04 (CDC Atlanta) nous a permis de fairel’analyse statistique des données. Les tests utilisés étaient letest Khi2 (x2) et le test exact de Fisher au risque a égal à 5 %.La valeur p < 0,05 a été considérée comme significative.

Résultats

Caractéristiques de la population

Cinquante-trois patients ont été finalement retenus pourl’étude avec un sex-ratio de 0,4. L’âge moyen des patientsétait de 35,2 (�14,2 ans) avec des extrêmes de 1 et 62 ans.La majorité des sujets était âgée de 20 à 40 ans, soit 51 %.

Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onycho(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001

Caractéristiques des lésions

Parmi les patients retenus pour l’étude, 39 ont présenté uneonycholyse au niveau des mains (73,6 %) contre 10 au niveaudes pieds (18,9 %) avec 4 cas d’atteintes simultanées desmains et des pieds. Il y avait une prédominance des lésionsunilatérales au niveau des mains contrairement au niveaudes pieds où les lésions étaient plus bilatérales. Cette dif-férence était statistiquement significative ( p = 0,010). Lapérionyxis n’a été observée qu’au niveau des mains et étaitassociée à 74,2 % à une onychomycose. Saccharomycescerevisiae et Candida guilliermondii étaient associés à100 % à une périonyxis (Tableau 1). Les femmes étaientles plus atteintes au niveau des mains contrairement auxhommes ( p = 0,010) (Tableau 2).

Aspects mycologiques

La prévalence des onychomycoses dans notre population estde 66 % (Tableau 3). L’examen direct avait une sensibilité de90,9 % et une spécificité de 90 %. Ces valeurs de sensibilité etde spécificité ont été déterminées sur l’observation deschampignons en général. Les valeurs prédictives positives(VPP) et valeurs prédictives négatives (VPN) étaient respec-tivement de 93,8 et de 85,7 % d’où un taux de faux positifs de10 % contre un taux de faux négatifs équivalent à 9,1 %. CesVPN et VPP ont été calculées à partir des données figurant

mycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale

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Tableau 3 Distribution des cas d’onychomycose selon lesrésultats de l’examen direct et de la culture.Distribution of cases of onychomycosis according to theresults of the direct examination and culture.

Culture

Positive Négative Total

Examen directPositif 30 2 32Négatif 3 18 21

Total 33 20 53

Tableau 5 Espèces fongiques isolées.Isolated fungi species.

Espèces fongiques Effectif Pourcentage (%)

LevuresCandida tropicalis 12 36,4Candida albicans 10 30,3Candida parapsilosis 7 21,2Candida guilliermondii 1 3,3Saccharomyces cerevisiae 1 3,3

Total 31 93,9

DermatophytesTrichophyton rubrum 1 3,3Trichophyton soudanense 1 3,3

Total 2 6,1

Total 33 100

Tableau 6 Données démographiques et habitudes despatients atteints d’onychomycoses.Demographics and habits of patients with onychomycosis.

Patients atteints Patients

Effectif, n (%) Effectif, n (%) p

SexeMasculin 9 (25,7) 16 (30,2) 0,322Féminin 26 (74,3) 37 (69,8)

Age (ans)0—20 3 (9,1) 6 (11,3) 0,19521—40 20 (60,6) 27 (51,0)> 40 10 (30,3) 20 (37,7)

Lessive hebdomadaire0 8 (22,9) 11 (20,8) 0,5511 7 (20,0) 13 (24,5)� 2 20 (57,1) 29 (54,7)

Menage domiciliaire hebdomadaire0 18 (51,4) 24 (45,3) 0,2911 7 (20,0) 14 (26,4)� 2 10 (28,6) 15 (28,3)

Port de gants pendant le menageOui 17 (48,6) 8 (47,1) 0,918Non 18 (51,4) 9 (52,9)

StatutFumeur 3 (8,6) 6 (11,3) 0,378Non-fumeur 32 (91,4) 47 (88,7)

4 A. Konate et al.

dans le Tableau 3 ; la culture ayant été prise comme tech-nique de référence.

Les levures ont été isolées dans 80,5 % au niveau desmains et les dermatophytes dans 50 % au niveau des pieds(Tableau 4).

Après identification des levures, les espèces prédominan-tes étaient Candida tropicalis, Candida albicans et Candidaparapsilosis avec respectivement 36,4, 30,3 et 21,2 % ; pourles dermatophytes, Trichophyton rubrum et Trichophytonsoudanense ont été les deux espèces identifiées (Tableau 5).

Facteurs socio-épidémiologiques associés auxonychomycoses

Aucun de ces facteurs n’était associé significativement à lasurvenue des onychomycoses (Tableau 6).

Discussion

Les onychopathies sont des affections fréquentes. Elles sontcausées par des mycoses dans 18 à 50 % des cas selon lesséries [27]. Dans notre étude, la prévalence des onychomy-coses supérieure à 50 % (66 %) pourrait être due au fait quedans notre série nous n’avons inclus que des patients présen-tant une onycholyse. L’onycholyse constitue un symptômedes onychopathies et se définit comme le décollement de latablette à partir des attaches distolatérales. L’onycholysefacilite la colonisation de l’ongle par les pathogènes strictscomme les dermatophytes et crée des conditions favorablesau développement des levures [17]. L’onycholyse est donc unfacteur de risque important de la survenue des onychomy-coses.

La prédominance féminine dans notre étude (69,8 %) aaussi été rapportée dans plusieurs études conduites enAfrique et ailleurs notamment au Gabon, en Tunisie et en

Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onychomycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001

Tableau 4 Prévalence des types de champignons selon lalocalisation.Prevalence of types of fungi according to the localization.

Levures, n (%) Dermatophytes, n (%) Total

Mains 29 (80,5) 1 (50,0 %) 30Pieds 7 (19,5) 1 (50,0 %) 8

Total 36 2 38

Presence d’animauxOui 11 (31,4) 16 (30,2) 0,640Non 24 (68,6) 37 (69,8)

Nombre de personnes/piece1—2 7 (20,0) 11 (20,8) 0,8933—5 16 (45,7) 23 (43,4)� 6 12 (34,3) 19 (35,8)

Atteinte entourage familialOui 15 (42,9) 20 (37,7) 0,283Non 20 (57,1) 33 (62,3)

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France avec des taux respectifs de 62,5 [21], 63,5 [2] et62,2 % [7]. Cette prédominance féminine est probablementdue à une plus grande gêne fonctionnelle exprimée par lesfemmes, comme l’a montrée une étude française [7], alorsque la gêne esthétique ne diffère pas significativement d’unsexe à un autre [13]. En outre, la prévalence élevée dessujets de moins de 40 ans dans notre série a également étérelevée par l’étude de Nzenze et al. [21] au Gabon avec unâge moyen similaire de 36,9 � 14 ans. Anane et al. [2] enTunisie ont également fait ressortir une valeur similaire(39,1 � 14,6 ans). Aussi, bien que la différence ne soit passtatistiquement significative, les patients âgés de plus de20 ans et présentant une onychomycose étaient en pour-centage plus élevé (90,9 %) que ceux du même âge et sains(85 %). Ce qui corrobore le fait que les onychomycoses soientprésentées comme des affections de l’adulte et qui sontrares chez l’enfant ; leur prévalence étant de 30 % après70 ans [27].

Contrairement à de nombreuses études effectuées ail-leurs, les lésions présentes dans notre série résidaient pour laplupart au niveau des mains [2,5,8,14,21,28]. Ces lésionsétaient plus fréquentes chez les sujets de sexe féminin( p = 0,010).

La prédominance de lésions bilatérales siégeant pour laplupart au niveau des pieds a également été rapportée parles travaux de Nzenze et al. [21] et d’Anane et al. [2] dansleurs séries avec des taux de prévalence respectifs de 66,7 et73,1 %.

La présence de cinq espèces de levures et de deux der-matophytes démontre la grande diversité des agents mis encause dans les onychomycoses.

En règle générale, les onychomycoses à levures sontmoins fréquentes que celles à dermatophytes et sont plusrencontrées en climat chaud [16]. Les levures représententenviron 5 à 17 % des champignons des onychomycoses et sontretrouvées le plus souvent au niveau des mains [27,30] ; ceque notre travail a pu mettre en évidence avec une prédo-minance au niveau des mains (80,5 %). À l’instar d’autresauteurs, nous avons identifié de nombreuses espèces delevures responsables de mycoses des doigts [12,18,21,27].C. tropicalis a été la plus isolée (36,4 %) suivie de C. albicans(30,3 %). L’identification correcte de cette dernière pose unproblème constant en routine. En effet, le diagnostic dif-férentiel de C. albicans se pose actuellement avec Candidadubliniensis et Candida africana avec lesquelles elle partagedes similitudes phénotypiques et souvent génétiques [6]. Ence qui concerne C. dubliniensis, sa recherche par Menanet al. [19] en Côte d’Ivoire a été négative chez des personnesvivant avec le VIH, considérées comme sujets à risque. Cetteespèce n’a pas également été mise en évidence au Sénégalpar Dieng et al. [6] dans leur série. Quant à C. africana, elleest responsable essentiellement de vaginite [26] bien qu’elleait été une fois isolée en dehors du vagin [22]. Sur toutes cesbases, toutes les espèces identifiées comme C. albicans ontété considérées comme telles bien que d’autres facteurs telsque les mouvements migratoires pourraient favoriser l’intro-duction de C. dubliniensis dans notre contexte. Toutefois,C. albicans est fréquemment l’espèce la plus isolée dansl’infection fongique des doigts à cause de son caractèrepathogène [2,18,21]. La forme clinique la plus communeest la périonyxis des ongles des doigts avec C. albicanscomme agent de prédilection [15].

Pour citer cet article : Konate A, et al. Profil mycologique des onycho(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.03.001

En ce qui concerne les dermatophytes, ils représententselon les statistiques environ 80—90 % des champignons res-ponsables d’onychomycoses (dont les 4/5 sont isolés auxpieds) avec comme espèces prédominantes T. rubrum, Tri-chophyton mentagrophytes (var. interdigitale) et Epidermo-phyton floccosum [30]. La prédominance des dermatophyteset plus particulièrement celle de T. rubrum dans les onycho-mycoses est habituellement rapportée [12,18,24,27,29,30].Dans notre série également, nous avons pu mettre en évidenceT. soudanense. Cette espèce anthropophile, reconnue commeétant une espèce africaine, est le plus souvent responsabled’atteintes des ongles des mains contrairement à T. rubrumqui affecte plus les pieds [4]. En Côte d’Ivoire, de nombreusesétudes menées sur les étiologies fongiques des teignes du cuirchevelu chez les enfants ont démontré la prédominance decette espèce [1,3,20].

Au cours de nos travaux, aucun cas d’onychomycose àmoisissures n’a été découvert. Ce type d’onychomycoses estrarement rapporté dans les études à cause du caractèresaprophyte des moisissures rendant ainsi leur diagnosticmycologique d’interprétation difficile [16,18]. La part desmoisissures dans les champignons responsables d’onychomy-coses est estimée à 3—5 % [30].

Dans notre série, aucun des facteurs favorisants étudiésn’avait une répercussion statistiquement significative sur lasurvenue des onychomycoses. Généralement, il convient dedistinguer les facteurs individuels locaux (troubles trophi-ques et circulatoires, malposition des doigts. . .) et généraux(déficit immunitaire, diabète, psoriasis. . .), des facteurscomportementaux ou culturels (profession, mode de vie,pratique sportive. . .) qui favorisent la rencontre avec lechampignon responsable [5]. La transmission interhumainedes dermatophytes est généralement favorisée par la pro-miscuité. Au niveau des pieds, les principaux facteurs desdermatophytoses sont environnementaux comme la pratiquesportive (en particulier piscine, sports de combat, maratho-niens, etc.), la profession (militaires, mineurs, maîtres-nageurs) et le mode de vie [27]. Au niveau local individuel,l’hallux valgus est un facteur favorisant habituel des ony-chomycoses [25]. En ce qui concerne les levures, les candi-doses des mains sont liées à la profession [27].

Conclusion

Les onychomycoses sont relativement fréquentes à Abidjan.Les étiologies sont dominées par les levures. Il serait oppor-tun de reconduire une telle étude sur un échantillon pluslarge afin d’approfondir l’étude des facteurs favorisants.Cependant, une hygiène corporelle et plus particulièrementcelle des ongles devrait permettre une bonne prévention.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

Remerciements

Nous tenons à remercier les responsables du service dedermatologie du CHU de Treichville et le personnel duCeDReS, en particulier celui du laboratoire de parasitolo-

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6 A. Konate et al.

gie-mycologie pour leur disponibilité et leur aide à la bonneréalisation de ces travaux.

Références

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mycoses à Abidjan (Côte d’Ivoire). Journal De Mycologie Médicale