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PRONOSTIC DU DIABETE SUCRE Par Dr. JEAN GOFFIN, Bruxelles. Cette question a intCressC, depuis longtemps, mCdecins et actu- aires. Lors du ahme Congres des mCdecins de compagnies d’assurances B Amsterdam en 1901, le Dr SIREDEY dCposa un remar- quable rapport sur a 1’admissibilitC des glycosuriques et fka les normes de la sdection de ces risques. En ce qui concerne les ktudes actuaddles, je citerai les intkressantes recherches de Mr MAINGIE @‘Assurance des risques taxCs au VIIIe Congrks des Actuaires 3L Londres en 1927): cet auteur Ctablit la mortalit6 rCelle des glyco- suriques refuds la Compagnie Belge d’Assurances GCnCrales de 1893 1921. J’insiste bien qu’il ne s’agit que des glycosuriques refusCs ; car depuis 1902 en tous cas, un pourcentage important de ces glycosuriques Ctait accept6 B des conditions spkciales, suivant les donnCes de SIREDEY. E n plus, il faut signaler que des glyckmies n’Ctant pas pratiquks a cette Cpoque, le groupe des refusCs compor- tait un certain nombre de candidats a l’assurance atteints de diabhte rCnal. La mortalit6 rCelle de ce groupe a 6th sensiblement le double de la mortalit6 attendue. a D&s lors, conclut l’auteur, rien ne s‘oppose envisager l’assurance des glycosuriques a une prime spCciale, tenant compte de la surmortalitC observk. Seraient cepen- dant CcartCs ceux qui prksentent, outre la glycosurie, une tare skrieuse d’un autre organe. )Y L’Ctude que les rapporteurs ont faite de cette question l’a kclairCe et leur apport, particuli6rement au point de vue social, est essentiJ; il consacre, en quelque sorte officiellement, la possibilitC de l’admis- sion a l’assurance d’un nombre important de diabPtiques qui, aupara- \rant, en Ctait exclu. Quant a moi, je voudrais simplement faire part de l’experience d’un praticien de I’Assurance sur la Vie et des conclusions qui peuvent en 6tre tirCes pour la Glection des risques. 182

PRONOSTIC DU DIABETE SUCRE

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PRONOSTIC DU DIABETE SUCRE

Par Dr. JEAN GOFFIN, Bruxelles.

Cette question a intCressC, depuis longtemps, mCdecins et actu- aires. Lors du ahme Congres des mCdecins de compagnies d’assurances B Amsterdam en 1901, le D r SIREDEY dCposa un remar- quable rapport sur a 1’admissibilitC des glycosuriques et fka les normes de la sdection de ces risques. En ce qui concerne les ktudes actuaddles, j e citerai les intkressantes recherches de Mr MAINGIE @‘Assurance des risques taxCs au VIIIe Congrks des Actuaires 3L Londres en 1927): cet auteur Ctablit la mortalit6 rCelle des glyco- suriques refuds la Compagnie Belge d’Assurances GCnCrales de 1893 1921. J’insiste bien qu’il ne s’agit que des glycosuriques refusCs ; car depuis 1902 en tous cas, un pourcentage important de ces glycosuriques Ctait accept6 B des conditions spkciales, suivant les donnCes de SIREDEY. E n plus, il faut signaler que des glyckmies n’Ctant pas pratiquks a cette Cpoque, le groupe des refusCs compor- tait un certain nombre de candidats a l’assurance atteints de diabhte rCnal. La mortalit6 rCelle de ce groupe a 6th sensiblement le double de la mortalit6 attendue. a D&s lors, conclut l’auteur, rien ne s‘oppose envisager l’assurance des glycosuriques a une prime spCciale, tenant compte de la surmortalitC observk. Seraient cepen- dant CcartCs ceux qui prksentent, outre la glycosurie, une tare skrieuse d’un autre organe. )Y

L’Ctude que les rapporteurs ont faite de cette question l’a kclairCe et leur apport, particuli6rement au point de vue social, est essentiJ; il consacre, en quelque sorte officiellement, la possibilitC de l’admis- sion a l’assurance d’un nombre important de diabPtiques qui, aupara- \rant, en Ctait exclu. Quant a moi, je voudrais simplement faire part de l’experience d’un praticien de I’Assurance sur la Vie e t des conclusions qui peuvent en 6tre tirCes pour la Glection des risques.

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Comme en mCdecine pratique, l’acte premier, essentiel, de base en mCdecine d’assurance sur la vie est I’ktablissement d’un bon diagnostic. De sa prbcision seule, peut dCcouler un bon pronostic.

Le 6 De quoi s’agit-il B du MarCchal Foch devrait &tre inscrit cn exergue de tout livre traitant de la mCdecine d’assurance.

Comme h la guerre, il faut connaitre 1’6tat des forces, mais aussi dCtecter les embfiches. L’Ctude du diabkk met fort bien en Cvidence cw principes et en condquence e t en pratique, la nCcessitC - comme en toute mCdecine d’assurance valable - d’une Ctroite liaison, d’une intime collaboration du mCdecin examinateur e t du mCdecin classi- f icateur.

Mais la question du diagnostic exact du diabhte sucrC n’est pas expresskment It envisager, je me bornerai b insister sup l’absdue nCcessit6 pour pouvoir affirmer ee diagnostic de la prksence de glucose dans l’urine (parfois la recherche des glucosazones sera indispensable) e t d’une courbe caractkristique b 1’Cpreuve d‘hyper- glyckmie provoquCe.

La recherche des corps cCtoniques dans l’urine d‘un glycosurique ainsi qu’kvidemment la recherche de l’albumine sont indispensables; eelle des ClCments biliaires, utile.

Je ne saurais assez insister sur la nCcessitC de mettre en gmde lc m6decin examinateur et lui demander de rechercher les traces certaines que laissent les piqiires d’insuline qui, faites au moment opportun, peuvent, chez un diabktique, dkterminer la disparition du glucose dans l’urine Cmise au coups de l’examen pour l’assurance. Une suffisantle attention du mCdecin permettra de dCcouvrir la supercherie.

On a dit que les diabCtiques, depuis 1’8re de I’insuline, ne inouraient plus de leur diabkte. I1 est bien certain que l’aspect de la pathologie diabktique s’est fort modifike. L‘hyperglycCmie et ses conskquences est bien plus rarement, directement en tous cas, la cause de la mort des diabCtiques. Leur mortaliti! est due plus sou- vent qu’anciennement a des lesions des parois artCriselles (artkrite des membres infCrieurs, coronarite, nhphrite, etc., . ). Le diabCtique a d’ailleurs une assea bonne tolCrance de ces lCsions, probablement en bonne part parce qu’elles s’htablissent lentement ; les anciens notaient dCjB le bon pronostic de I’dbuminerie diabktique. Le mCde- cin examinateur devra donc rechercher avec minutie quel est 1’Ctat

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cardiaque, 1’Ctat circulatoire des artbres, particulibrement de celles des membres infkrieurs, du candidat atteint de diabhte. U peut ttxe utile de faire pratiquer un examen du fond de l’ceil ou bien un Clectrocardiogramme. Le genre de vie, le climat ont une grande influence sur l’ktat

diabCCique. Une vie exempte de tracas, une existence a la campagne, diminue la gravitd de cet Btat. J’ai suivi maints diabdtiques qui, passant d’une altitude de 50 m. a une altitude de 500 m., devaient diminuer de moitik la dose d’insuline injectbe, ou pouvaient m&me se passer de ces injections.

On connait bien l’influence frBquente de certaines infections (abchs, furonculoses) sur le mCtabolisme des glucides, s’accompagnant d’hyperglyckmie, parfois de glycosurie. 11 est rare qu’il s’agisse de diabbte vrai. Tous les praticiens savent cependant que le diabete vrai peut s’accompagner d’infections surtout cutankes. Lorsque l’intehgatoire d’un candidat rCvitle des infections cutanks, rCp6tCes, m&me en l’absence de glycosurie, un dosage du glucose sanguin sera trits utile. U. arrive. que la guCrison de l’infection attknue le syndrome diabCtique mtme, mais trbs rarement amitm sa guCrison. J’en ai cependant observk un cas ; il s’agissait d’un homme prdsentant un abcbe grave et Ctendu ischio-rectal avec tous les signes sanguins d’un d i a k t e vrai. Celui-ci s’attknua aprbs guCrison de l’infection et disparut tout a fait deux ans aprbs.

I1 est indispensable que le mkdecin d’assurance recherche et situe tous ces facteurs pour pouvoir Ctablir une classification judicieuse et pnkise du risque. I1 utilisera encore avec de minimes retouches les normes Ctablies par SIREDEY (diak te gras- diabhte maigre), en s‘aidant en plus des rksultats de 1’Cpreuve d’hyperglyckmie provoquCe et Cvidemment, ainsi qu’il vient d’ttre esquissC, de toutes les donn6ea recueillies par l’interrogatoire et l’examen du candida t .

Qnel doit t t re l’attitude du mCdecin pratiquant la mCdwine d’assurance lorsqu’il se trouve en pdsence d’un cas de glycosurie d6celCe par l’examen d‘un candidat trait6 a l’insuline?

l’insuline ne peut emgcher l’dtablissement d‘un bilan de 1’Ctat de ce candidat. I1 faut d’abord bien fixer s’il s’agit d’un diabitte et quelle est l’importance du trouble du mktabolisme par les recherches de laboratoire. I1 arrive, en effet, que des mBdecins praticiens, pour des raisons varikes, soignent par des piqClres

Le traitement

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d’insuline des glycosuriques qui ne sont pas des diabktiques vrais, ou bien des diabktiques vrais lkgers. Aussi le principe d’objectivd de l’expertise midicale sera respect6 intkgralement.

Lorsque le diagnostic de diabhte est pose par le mkdecin examina- teur, que cette maladie est ignorke du candidat e t que sa gravitd impose le traitement insulinique, il est nkcessaire d’kprouver le comportement de ce diabbte it l’insuline, pour pouvoir ktablir s’il $%it d‘une forme dont l’hyperglyckmie est sensible ou r6sistante it ces injections, ou bien aussi d’un malade prksentant ou ne prdsen- tant pas de reactions iL cdles-ci et en tirer les conclusions pro- nostiques.

Certains diabktiques sont t r b troublks par une grande instabilitk glyckmique it l’insuline; le traitement de ces mdades est particulibre- ment ardu et leur avenir trks incertain.

I1 peut arriver que la sensibilisation 21 l’insuline so produise tar- divement. Elle pose au mkdecin traitant des problhmes difficiles, parfois insolubles. Elle peut avoir une action sur le traitement insu- linique, diminuer son efficacitk et ainsi aggraves le pronostic du diabbte. Le mddecin examinateur devra rechercher les signes de cette sensibilisation (rkactions locales, urticaire, troubles circula- toires, etc.. .). I1 peut se produire au niveau des injections d‘insu- line, parfois m&me ailleurs, une atrophie musculaire qui peut &tre importante, m&me grave,

Tous ces troubles du traitement insulinique devront &tre recherchks avec minutie par l’interrogatoire du candidat e t son examen. Leur prksence conduira souvent au refus du candidat.

Ici se place la question primordiale : un diahktique trait6 it l’insu- line est-il acceptable it une assurance sur la vie. I1 semble bien que pour certains de ces malades, il faille rkpondre par l’affirmative, &ant bien entendu que cette acceptation scrit proposke a des con- ditions spkciales (surprime, etc.. .).

I1 est kvident qu’il faut d’abord mettre it part les glycosuriques iton diabktiques ou les diabktiques lkgers traitds it l’insuline, non it cause de leur dtat, mais pour l’une ou l’autre raison mineure. Leur classification sera ktablie d’aprbs les rksultats de leurs examens exprimant leur bilan exact.

Parmi les diahktiques rkellement justiciables de l’insuline, les malades gravemerit atteints, prksentant des complications surtout

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circulatoires bien caracteriskes, seront refusks. L’acceptation des cliabktiques moyens, kquilibrks par des doses niinimes ou moyenlues d’insuline ct ne prksentant pas de complications, pourra &tre envi- sagke.

Cependant, la 1ongCvitC du diabktique trait6 a l’insuline est ameliorciic seulement A condition gU’il continue ~t se sournettre au rkgime et au traitement prescrits.

Un interrogatoire portant sur la comprkhension du malade de l’importance du traitement, une opinion sur son intelligence et sa sagesse, permettront au mkdecin d’avoir une idke sur le comporte- inent probable du candidat vis-a-vis de sa maladie.

Mais pour l’admettre a l’assurance, il faudra exiger certaincs garanties suffisantes de clociliti thkrapeutique. Nous avons l’habitude de demander au diabktique trait6 a I’insuline iL ce qu’il nous four- nisse chaque annke une attestation d’un diabttologue compktent 4tablissant son bilan et le traitement suivi.

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