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SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MICROCIRCULATION (SFM) Le patient vasculaire et sa microcirculation rétinienne CIRCULATION RÉTINIENNE ET CHOROÏDIENNE NOR- MALE A. GAUDRIC Hôpital Lariboisière, Paris. La circulation oculaire dérive de l’artère ophtalmique, branche de division de l’artère carotide interne. Elle se divise schématiquement en circulation choroïdienne (artères ciliaires) et circulation réti- nienne (artère centrale de la rétine). Ces deux réseaux participent conjointement à l’apport en nutriment à la rétine. L’angioarchitec- ture capillaire des réseaux rétiniens et choroïdiens commence à être mieux connue, et permet de mieux comprendre la répartition du flux dans les tissus oculaires et ses variations au cours des phénomènes pathologiques. Le débit sanguin choroïdien est proportionnellement le plus élevé de l’organisme, au contraire du flux sanguin rétinien qui est un des plus faibles. Le flux sanguin de la rétine interne est le siège d’une autorégulation tendant à le maintenir constant quelles que soient les conditions hémodynamiques, au contraire de la choroïde et donc des photorécepteurs, qui connaît paradoxalement de larges variations au cours du nycthémère ne serait-ce que par les change- ments de position. QUE SAIT-ON DE NOUVEAU SUR LA CIRCULATION OCULAIRE ? R. TADAYONI Paris. La rétine est un des rares tissus de l’organisme dont il soit possible de visualiser les capillaires avec une haute définition. Cependant, l’angiographie à la fluorescéine classique étant limitée à une analyse semi-quantitative, il faut recourir à des techniques différentes pour obtenir une mesure réellement quantitative. L’analyse non invasive du flux sanguin rétinien et choroïdien a bénéficié de progrès consi- dérables, liés essentiellement aux développements du laser doppler et de l’échodoppler. Il est possible actuellement de mesurer la vélocité du flux des vaisseaux centraux de la rétine, le débit sanguin des vaisseaux rétiniens, les variations du flux capillaire rétinien et choroïdien. Cependant, chaque technique d’analyse possède ses limitations propres qu’il importe de connaître, et les protocoles de mesures doivent être adaptés à la pathologie concernée. Ces techni- ques ont permis de mettre en évidence la leucostase rétinienne chez le diabétique, le ralentissement circulatoire des occlusions veineu- ses, de quantifier le flux capillaire au cours du glaucome. Parallèle- ment aux développements technologiques, le développement de protocoles standardisés d’analyse du fond d’œil permet de quantifier le degré d’artériolosclérose rétinienne, qui semble être un facteur de risque indépendant d’accident vasculaire cérébral. RÉTINOPATHIE DIABÉTIQUE P. MASSIN Ophtalmologie, Hôpital Lariboisière, Paris. La rétinopathie diabétique représente la cause la plus importante de cécité dans la population des moins de 50 ans dans les pays indus- trialisés. Sa pathogénie associe une neuropathie glycémique précoce à une vasculopathie plus tardive, cette dernière étant responsable in fine de la baisse visuelle. S’y associent des anomalies de l’autorégu- lation du flux sanguin, expliquant sans doute l’effet aggravant de l’HTA sur l’évolution de la rétinopathie diabétique. La baisse d’acuité visuelle survient le plus souvent par rupture chronique de la barrière hématorétinienne, moins souvent par prolifération néovas- culaire. En 2003, le diagnostic de rétinopathie diabétique est effec- tué cliniquement, par l’examen du fond d’œil. La classification de la rétinopathie a été récemment simplifiée et fait se distinguer la rétinopathie, c’est-à-dire le degré de perfusion de la périphérie rétinienne, et la maculopathie, c’est-à-dire le degré d’œdème macu- laire. Tout diabétique doit avoir un examen du fond d’œil au moins annuel, voire plus en fonction du stade des lésions. Des procédures de dépistage par photographie du fond d’œil sont en cours de développement en France. Le traitement de la rétinopathie se limite à l’équilibration de la glycémie et de la tension artérielle, dans certains cas associée au laser. La mise au point d’un traitement médical spécifique de la rétinopathie fait l’objet de recherches inten- ses, et plusieurs essais cliniques sont en cours. RÉTINOPATHIE HYPERTENSIVE V. KRIVOSIC La rétinopathie hypertensive peut se traduire de manière aiguë ou chronique. La rétinopathie hypertensive aiguë est liée au retentisse- ment direct d’une HTA (typiquement plus de 20/10) sur la circula- tion rétinienne, choroïdienne et du nerf optique. Elle représente une urgence diagnostique et thérapeutique, devenue relativement rare de nos jours. En revanche, la rétinopathie hypertensive chronique devient de plus en plus fréquente avec le viellissement de la popula- tion. Sa gravité semble représenter un facteur de risque d’accident vasculaire cérébral, et ce indépendamment des autres facteurs de risque. Le diagnostic de rétinopathie hypertensive chronique (ou d’artériolosclérose), basé sur un simple examen de photographies du fond d’œil, se heurte cependant à la difficulté de la standardisation et de l’automatisation de l’analyse. Il se pourrait néanmoins qu’à l’avenir, les stratégies de prévention des AVC prennent en compte le degré d’artériolosclérose rétinienne. Journal des Maladies Vasculaires 1S15

Que sait-on de nouveau sur la circulation oculaire ?

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Page 1: Que sait-on de nouveau sur la circulation oculaire ?

SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MICROCIRCULATION (SFM)

Le patient vasculaire et sa microcirculation rétinienne

CIRCULATION RÉTINIENNE ET CHOROÏDIENNE NOR-MALE

A. GAUDRIC

Hôpital Lariboisière, Paris.

La circulation oculaire dérive de l’artère ophtalmique, branche dedivision de l’artère carotide interne. Elle se divise schématiquementen circulation choroïdienne (artères ciliaires) et circulation réti-nienne (artère centrale de la rétine). Ces deux réseaux participentconjointement à l’apport en nutriment à la rétine. L’angioarchitec-ture capillaire des réseaux rétiniens et choroïdiens commence à êtremieux connue, et permet de mieux comprendre la répartition du fluxdans les tissus oculaires et ses variations au cours des phénomènespathologiques. Le débit sanguin choroïdien est proportionnellementle plus élevé de l’organisme, au contraire du flux sanguin rétinien quiest un des plus faibles. Le flux sanguin de la rétine interne est le sièged’une autorégulation tendant à le maintenir constant quelles quesoient les conditions hémodynamiques, au contraire de la choroïdeet donc des photorécepteurs, qui connaît paradoxalement de largesvariations au cours du nycthémère ne serait-ce que par les change-ments de position.

QUE SAIT-ON DE NOUVEAU SUR LA CIRCULATIONOCULAIRE ?

R. TADAYONI

Paris.

La rétine est un des rares tissus de l’organisme dont il soit possible devisualiser les capillaires avec une haute définition. Cependant,l’angiographie à la fluorescéine classique étant limitée à une analysesemi-quantitative, il faut recourir à des techniques différentes pourobtenir une mesure réellement quantitative. L’analyse non invasivedu flux sanguin rétinien et choroïdien a bénéficié de progrès consi-dérables, liés essentiellement aux développements du laser doppleret de l’échodoppler. Il est possible actuellement de mesurer lavélocité du flux des vaisseaux centraux de la rétine, le débit sanguindes vaisseaux rétiniens, les variations du flux capillaire rétinien etchoroïdien. Cependant, chaque technique d’analyse possède seslimitations propres qu’il importe de connaître, et les protocoles demesures doivent être adaptés à la pathologie concernée. Ces techni-ques ont permis de mettre en évidence la leucostase rétinienne chezle diabétique, le ralentissement circulatoire des occlusions veineu-ses, de quantifier le flux capillaire au cours du glaucome. Parallèle-ment aux développements technologiques, le développement deprotocoles standardisés d’analyse du fond d’œil permet de quantifierle degré d’artériolosclérose rétinienne, qui semble être un facteur derisque indépendant d’accident vasculaire cérébral.

RÉTINOPATHIE DIABÉTIQUE

P. MASSIN

Ophtalmologie, Hôpital Lariboisière, Paris.

La rétinopathie diabétique représente la cause la plus importante decécité dans la population des moins de 50 ans dans les pays indus-trialisés. Sa pathogénie associe une neuropathie glycémique précoceà une vasculopathie plus tardive, cette dernière étant responsable infine de la baisse visuelle. S’y associent des anomalies de l’autorégu-lation du flux sanguin, expliquant sans doute l’effet aggravant del’HTA sur l’évolution de la rétinopathie diabétique. La baissed’acuité visuelle survient le plus souvent par rupture chronique de labarrière hématorétinienne, moins souvent par prolifération néovas-culaire. En 2003, le diagnostic de rétinopathie diabétique est effec-tué cliniquement, par l’examen du fond d’œil. La classification de larétinopathie a été récemment simplifiée et fait se distinguer larétinopathie, c’est-à-dire le degré de perfusion de la périphérierétinienne, et la maculopathie, c’est-à-dire le degré d’œdème macu-laire. Tout diabétique doit avoir un examen du fond d’œil au moinsannuel, voire plus en fonction du stade des lésions. Des procéduresde dépistage par photographie du fond d’œil sont en cours dedéveloppement en France. Le traitement de la rétinopathie se limiteà l’équilibration de la glycémie et de la tension artérielle, danscertains cas associée au laser. La mise au point d’un traitementmédical spécifique de la rétinopathie fait l’objet de recherches inten-ses, et plusieurs essais cliniques sont en cours.

RÉTINOPATHIE HYPERTENSIVE

V. KRIVOSIC

La rétinopathie hypertensive peut se traduire de manière aiguë ouchronique. La rétinopathie hypertensive aiguë est liée au retentisse-ment direct d’une HTA (typiquement plus de 20/10) sur la circula-tion rétinienne, choroïdienne et du nerf optique. Elle représente uneurgence diagnostique et thérapeutique, devenue relativement rare denos jours. En revanche, la rétinopathie hypertensive chroniquedevient de plus en plus fréquente avec le viellissement de la popula-tion. Sa gravité semble représenter un facteur de risque d’accidentvasculaire cérébral, et ce indépendamment des autres facteurs derisque. Le diagnostic de rétinopathie hypertensive chronique (oud’artériolosclérose), basé sur un simple examen de photographies dufond d’œil, se heurte cependant à la difficulté de la standardisation etde l’automatisation de l’analyse. Il se pourrait néanmoins qu’àl’avenir, les stratégies de prévention des AVC prennent en compte ledegré d’artériolosclérose rétinienne.

Journal des Maladies Vasculaires 1S15