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QUELS ACCOMPAGNEMENTS AUTOUR DE JEUNES SOURDS
AVEC UNE PATHOLOGIE VISUELLE ASSOCIEE ? INTRODUCTION : Nous allons présenter ce travail d’accompagnement par notre équipe SEHA
DA/DV de l’IJS de Bourg La Reine. Notre SEHA a une spécificité : elle consiste
en un groupe de travail et de réflexion et non en une classe regroupant tous les
jeunes sourds ayant une pathologie visuelle associée. Chacun suit une scolarité
dans une classe correspondant à son âge et ses capacités comme tous les autres
enfants scolarisés à Bourg La Reine.
Le travail de la SEHA a démarré par une collaboration étroite avec le CRESAM
puis « médico-psychologique » qui s’est étoffée au fil des années par un
accompagnement qui s’est étendu à d’autres champs professionnels.
PLURI-HANDICAP-PLURI TRAUMATISME : - Le traumatisme de l’annonce de 3 troubles qui se superposent dans le
temps Le temps de l’annonce ne se limite pas à celui du diagnostic dans le cadre
hospitalier : il s’agit de proposer des rencontres étalées sur le temps, pour
reprendre les explications des bilans et les résultats ophtalmologiques avec eux.
L’annonce du diagnostic représente un véritable choc traumatique pour le jeune
et sa famille, c’est pourquoi ces moments d’échanges, décalé dans le temps par
rapport au bilan lui-même, sont nécessaires.
Ce lieu leur permet, dans l’après coup du diagnostic proprement dit, d’exprimer
leurs angoisses. Celles-ci s’expriment notamment :
- à travers des reproches vis-à-vis du corps médical que l’on peut
comprendre comme des mouvements projectifs de leurs angoisses, de
leurs sentiments d’injustice, et de leur propre sentiment de culpabilité.
- par des questions qui émergent dans un après coup, d’autres ne pourront
être abordées car trop anxiogènes…
Nous respectons ce temps nécessaire aux familles suite à l’annonce du
diagnostic.
- L’origine génétique notion de culpabilité - La question de l’évolutivité - Chaque baisse visuelle réactive le traumatisme de l’annonce
Annonce pouvant être pré-symptomatique ou faire suite à l’apparition des
troubles visuels.
L’ACCOMPAGNEMENT DANS LE CADRE D’UNE SCOLARITE VERS L’EMPLOI PROTEGE Nous prendrons comme exemple une jeune se prénommant Goundoba que nous
avons accompagnée de son arrivée au collège jusqu’à son entrée dans la vie
professionnelle. Dès le collège, Goundoba faisait part de ses difficultés à suivre
le rythme scolaire (par des difficultés d’accès à l’écrit et une gêne visuelle déjà
présente).
Nous déclinerons notre accompagnement sous 3 items indissociables les uns des
autres : le jeune, sa famille et les professionnels.
1. ACCOMPAGNEMENT DU JEUNE : - Accompagnement psychologique:
Lors de ces entretiens cliniques de soutien, nous écoutons le jeune dans sa
singularité et dans sa globalité.
Pendant plusieurs années, cette jeune est apparue très inhibée dans la relation; il
lui a fallu du temps pour mettre des mots (signes) sur son vécu, son parcours, ses
angoisses. Il reste compliqué de démêler les raisons de son fonctionnement ;
s’est posé la question d’un trouble cognitif associé et/ou la conséquence du
traumatisme de l’annonce chez elle et sa famille...
- Accompagnement rééducatif : o où en est le jeune ? (vidéo entretien mémoire Elodie) :
A cette phase de la prise en charge globale de la jeune, le but est de faire
émerger l’ensemble de son potentiel, de l’aider à faire avec ce qu’elle a. Il va
s’agir pour elle d’être qui elle est, avec le syndrome de Usher. Cette vidéo
correspond à l’émergence de la prise de conscience de certaines de ses
difficultés mais également de ses capacités en termes de ressources.
o trouble vestibulaire : non évolutif et permanent au même titre
que la surdité et peu évoqué voire mal identifié par le sujet. Il est également peu
ré évoqué à l‘annonce de la pathologie visuelle alors que lorsque la gêne visuelle
devient très importante. L’aréflexie vestibulaire ne peut alors plus être
compensée par la vision ce qui explique l’apparition de nouvelles difficultés
d’équilibre constatées par le sujet ou par son entourage proche.
Des séances de psychomotricité ont été nécessaires pour Goundoba :
- dans un 1er temps pour consolider l’image de soi et la conscience du
corps. Elle a bénéficié de cette pec au sein d’un groupe « Rythme et
Mouvement » durant 1 année scolaire. Elle s’exprimait peu en début d’année et
gardait un visage inexpressif. Elle n’avait pas accès à la notion de rythme. Elle
semblait ne pas être en contact avec son corps. L’approche du schéma corporel à
travers la gymnastique douce, les automassages, les contacts corporels avec
balles et ballons, semble lui avoir apporté beaucoup car peu à peu Goundoba est
devenue attentive à ce travail et a progressé au niveau de l’intégration du
rythme. Cette utilisation du rythme permettait de travailler tout ce qui est
séquentiel (que l’on retrouve dans la LSF, la lecture…) et qui est altéré par
l’aréflexie vestibulaire.
- quelques années plus tard, lorsque la gêne visuelle s’amplifie, Goundoba
sera beaucoup plus impliquée dans cette pec d’autant qu’elle fait suite à une de
ses plaintes qui est la perte d’équilibre lorsqu’elle marche dans la rue. Elle est
alors prête à se saisir des aides proposées. Il s’agit de prendre conscience de la
nécessité d’utiliser d’autres moyens de compensation (proprioceptifs,
kinesthésiques) en développant sa proprioception (capteurs proprioceptifs sous
les pieds, les genoux), la conscience du dos et de l’axe vertical, les sensations au
niveau de l’appui (varier les sensations plantaires, transfert de poids).
o locomotion : Il a été d’abord angoissant pour Goundoba
d’effectuer ces séances de locomotion au début de sa gêne visuelle au point de
ne pas pouvoir sortir dans la rue mais sans pouvoir l’exprimer par des mots
(signes). Ces séances étaient préparées en amont par des entretiens en binôme
psychologue/instructeur en locomotion mais Goundoba n’était pas prête et ces
séances ont dû être interrompues.
Quelques années plus tard, alors que Goundoba devait effectuer des stages dans
le cadre de son CAP APR, les séances de locomotion ont pu reprendre afin de
préparer ses trajets et prendre ses repères pour se rendre sur son lieu de
stage. Il lui sera cependant impossible de poursuivre les séances lorsque les
trajets de nuit seront abordés par des angoisses encore très présentes qu’elle
sera en capacité cette fois de formuler.
o trouble visuel : la pec orthoptique sera d’autant mieux acceptée
qu’il s’agira d’une prescription du médecin ophtalmologiste et que cette
prescription lui sera explicitée au même titre que tous les examens effectués
par le médecin y compris le CHAMP VISUEL.
Cette pec aura pour but d’optimiser la saisie visuelle de l’information tout en
connaissant ses limites (couleurs, contrastes, distances), de tester des aides
visuelles (loupes, loupe électronique), de structurer le balayage visuel.
L’orthoptiste a également pour rôle d’être présente à chaque consultation
ophtalmo permettant ainsi de reprendre les explications données par l’ophtalmo
auprès du jeune, de la famille et de transmettre les informations utiles à
l’équipe.
o Ergothérapie : cette prise en charge aura pour but de travailler
l’autonomie dans les gestes de la vie quotidienne, l’apprentissage d’un guide à
fenêtre pour rédiger une lettre par exemple ainsi que l’apprentissage de la
dactylographie. Ce dernier permet de compenser autant les troubles visuels que
les troubles vestibulaires ; en connaissant son clavier, cela évite à Goundoba de
faire des A/R entre son écran et son clavier et donc d’avoir à stabiliser son
regard et explorer à chaque A/R.
En parallèle à son projet de vie de jeune majeure, une orientation sur la clinique
de réadaptation fonctionnelle pour DV, l’ARAMAV à Nîmes, a été travaillée
auprès de Goundoba et de sa famille. Ils s’y sont rendus et diverses évaluations
ont été effectuées. Goundoba a alors mesuré qu’il lui était encore difficile de se
projeter dans le monde adulte mais elle a compris qu’il existait un lieu où elle
pourra demander de l’aide plus tard lorsqu’elle se sentira prête.
- Accompagnement pédagogique
o référent surdicécité : les rencontres avec le référent en
surdicécité, professeur qui avait la jeune en cours en parallèle, ont permis à
celle-ci d’exprimer des difficultés de perception ou gênes visuelles sur les temps
de classe. A raison d’une rencontre minimum par trimestre, proposée par le
référent, ces temps d’échanges ont permis de tester l’impact / le bénéfice des
adaptations proposées.
o mise en place d’outils : - auprès des professionnels : transmission de fiches accessibilité qui
correspondent à des préconisations plutôt qu’à des adaptations impératives
- auprès du jeune en classe et/ou à la maison : sous-main noir, plan
incliné, lampe d’appoint, loupe… qui ne sont vraiment investis par Goundoba que
lorsque sa gêne visuelle est devenue importante et qu’elle aura « dépassé » le
regard des autres élèves de sa classe devenus très empathiques et aidants à son
égard.
o ateliers sensoriels : destinés à sensibiliser à la fois les jeunes
sourds porteurs d’une déficience visuelle associée, en leur faisant prendre
conscience de l’existence et percevoir l’utilité des techniques compensatoires
par le biais d’expérimentations ludiques. Mais aussi les jeunes sourds non
atteints de troubles visuels associés afin qu’ils connaissent les techniques
possibles d’accompagnement de personnes sourdaveugles.
Ces ateliers permettent aux jeunes sourds, ce sans pointer du
doigt les troubles visuels éventuels, de participer à une activité de groupe hors
temps rééducatifs ou de classe en leur donnant la possibilité de montrer alors
leurs compétences de compensation dans le cadre d’une activité ludique.
Dans un premier temps, les jeunes ont pu découvrir et exercer
isolément le toucher, l’odorat, la vue et le goût. Pour se rendre compte ensuite de
la prédominance de certains sens sur les autres.
Force est de constater que les jeunes porteurs d’une gêne
visuelle font souvent partie des élèves les plus performants dans les activités de
reconnaissance et de mémorisation visuelle, tactile et olfactive. Mais surtout que
ce sont eux qui se saisissent le plus vite des techniques compensatoires. o référent CRESAM : la rencontre avec Mr Aguirre nous a montré
combien Goundoba connaissait sa problématique visuelle et savait l’expliquer à un
tiers. Cette rencontre était rassurante pour Goundoba qui a compris qu’il y aurait
toujours la possibilité pour elle d’être en lien avec une personne connaissant sa
problématique, son parcours, son évolution …
Cette jeune a bénéficié d’une année supplémentaire après avoir passé son CAP
APR avec succès pour préparer son entrée dans la vie active dans un ESAT
accueillant notamment des personnes atteintes du syndrome de Usher. Cet EDT
avait pour but de lui donner les apports pédagogiques nécessaires à l’entrée dans
la vie adulte (LSF, français écrit, Vie Socio-Professionnelle et Atelier
Découverte Culturelle et Environnementale) tout en y intégrant les prise en
charge rééducatives.
- Accompagnement social L’assistante sociale a proposé à Goundoba un accompagnement personnalisé pour
lui permettre de gagner en autonomie. Le travail s’est fait principalement autour
de l’insertion sociale et professionnelle. Elle a accompagné Goundoba dans ses
différentes démarches auprès de structure comme la CPAM, la MDPH, dans ses
rencontres avec l’ESAT et le foyer de vie.
Son travail s’est centré principalement sur l’accompagnement de la jeune mais
elle s’est rendue disponible pour la famille quand cette dernière avait besoin
d’informations autour du devenir de leur fille.
2. ACCOMPAGNEMENT DE LA FAMILLE : On propose :
- Un lien aux parents mais nous souhaiterions aussi travailler autour de la
Fraterie
- Un lieu d’écoute où les parents peuvent se poser, s’effondrer. Chaque
parent peut avoir une représentation différente et un cheminement propre ce
qui est le cas pour les parents de Goundoba. Le papa n’avait pas envie de
questionner à propos de l’étiologie alors que la maman avait besoin de savoir. La
maman s’effondrait quand c’était difficile au niveau scolaire pour Goundoba puis
elle a exprimé ses angoisses sur l’évolution de la maladie.
Le partenariat avec le Cresam a apporté une autre perception du syndrome de
Usher pour cette famille car le Cresam connait des adultes ayant ce même
syndrome et ayant une activité professionnelle adaptée à leurs difficultés. Ces
adultes se rencontrent via le Cresam afin de pouvoir se retrouver entre pairs.
3. Accompagnement DES PROFESSIONNELS : Il s’agit de travailler à propos des représentations que les professionnels ont de
la pathologie visuelle. Le double handicap est difficile à reconnaitre et à
travailler pour les professionnels qui peuvent se vivre comme des « spécialistes »
de la surdité mais non des troubles visuels.
Ils peuvent avoir besoin d’être dans la maîtrise disant qu’ils ne savent pas ce
qu’elle voit.
Nous accompagnons donc les divers champs professionnels de l’institution par :
o actions de sensibilisation régulières en interne, avec le soutien du Cresam : mises en situation sous bandeau ou lunette de simulation,
comment communiquer avec une personne adulte atteinte de ce syndrome
(CRESAM) venue animer un atelier …
o référent surdicécité : suite aux rencontres avec la jeune, l’un
des rôles du référent est d’informer les professeurs intervenants auprès d’elle
afin qu’ils réajustent leurs outils pédagogiques pour le groupe classe (utilisation
du TBI, sur les documents préférer l’arial le verdana ou le comic au times…)
Les conseils prodigués à l’oral sont tous inscrits dans la fiche d’accessibilité,
diffusée à tous les professeurs en début d’année. Le moindre changement leur
étant aussi spécifié en cours d’année.
o retours systématiques sur l’évolution ou la non évolution visuelle du jeune après chaque RV ophtalmo avec l’accord de la famille: ces
retours portent essentiellement sur les conséquences fonctionnelles et les
adaptations pédagogiques qu’il sera nécessaire de faire évoluer
CONCLUSION Vidéo pot de départ de Goundoba