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SYLVINE SCHMIDT and NADINE BEDNARZ RAISONNEMENTS ARITHM ´ ETIQUES ET ALG ´ EBRIQUES DANS UN CONTEXTE DE R ´ ESOLUTION DE PROBL ` EMES: DIFFICULT ´ ES RENCONTR ´ EES PAR LES FUTURS ENSEIGNANTS R ´ ESUM ´ E. Le probl` eme de l’articulation entre les raisonnements arithm´ etiques et raison- nements alg´ ebriques nous renvoie entre autres au rapport que l’enseignant – ou le futur enseignant – entretient lui-mˆ eme a priori avec ces modes de traitement, une telle relation ayant une incidence sur les choix didactiques qui seront ´ eventuellement pos´ es par cet inter- venant en regard d’une introduction ` a l’alg` ebre dans un contexte de r´ esolution de probl` emes. Une exp´ erimentation, visant ` a mettre en ´ evidence si les futurs enseignants peuvent ´ etablir ou non une dialectique entre ces deux modes de raisonnements dans le contexte particulier de la r´ esolution de probl` emes, a ´ et´ e conduite aupr` es de trois groupes de futurs enseignants (164 sujets); des entrevues individuelles et dyadiques r´ ealis´ ees aupr` es de quelques sujets pointent leurs difficult´ es dans le passage d’un mode de traitement ` a l’autre. Dans le pr´ esent article, sont relat´ ees les r´ esistances rencontr´ ees sp´ ecifiquement dans le passage ` a l’alg` ebre. ABSTRACT. The problem of articulation between arithmetic teaching and algebra teaching concerns among other things the relationship the teacher or pre-service teacher has with the knowledge to be taught (relation au savoir), which produces an impact on the choices that he makes concerning the approaches they are to favour in an introductory algebra context. Three groups of future teachers (164 students) were questioned with a view to analyzing to what extent these students were able to shift back and forth between these two methods within the particular context of problem solving. Interviews on either an individual basis or in a dyad format were conducted with a number of subjects, and have served to bring out their difficulties in articulation between these two fields. Only the difficulties observed in the transition from arithmetic to algebra are presented in this article. 1. INTRODUCTION La transition par les ´ el` eves au cours secondaire est marqu´ ee, entre autres, par de nouveaux apprentissages fondamentaux parmi lesquels le d´ eveloppe- ment du raisonnement alg´ ebrique occupe une place importante. Dans le cadre de ce nouvel apprentissage, bon nombre de connaissances d´ evelop- ees ant´ erieurement vont n´ ecessiter un r´ eajustement important. C’est le cas notamment lorsque l’´ el` eve aborde la r´ esolution de probl` emes. Il a alors ` a son actif un grand nombre d’exp´ eriences en arithm´ etique: il a en effet ´ et´ e confront´ e` a diff´ erents probl` emes, s’y est construit un certain nombre de connaissances, de convictions, de proc´ edures ` a propos de ces probl` emes. Educational Studies in Mathematics 32: 127–155, 1997. c 1997 Kluwer Academic Publishers. Printed in the Netherlands.

Raisonnements arithmétiques et algébriques dans un contexte de résolution de problèmes: difficultés rencontrées par les futurs enseignants

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SYLVINE SCHMIDT and NADINE BEDNARZ

RAISONNEMENTS ARITHMETIQUES ET ALGEBRIQUES DANSUN CONTEXTE DE RESOLUTION DE PROBLEMES: DIFFICULTES

RENCONTREES PAR LES FUTURS ENSEIGNANTS

RESUME. Le probleme de l’articulation entre les raisonnements arithmetiques et raison-nements algebriques nous renvoie entre autres au rapport que l’enseignant – ou le futurenseignant – entretient lui-meme a priori avec ces modes de traitement, une telle relationayant une incidence sur les choix didactiques qui seront eventuellement poses par cet inter-venant en regard d’une introduction a l’algebre dans un contexte de resolution de problemes.Une experimentation, visant a mettre en evidence si les futurs enseignants peuvent etablirou non une dialectique entre ces deux modes de raisonnements dans le contexte particulierde la resolution de problemes, a ete conduite aupres de trois groupes de futurs enseignants(164 sujets); des entrevues individuelles et dyadiques realisees aupres de quelques sujetspointent leurs difficultes dans le passage d’un mode de traitement a l’autre. Dans le presentarticle, sont relatees les resistances rencontrees specifiquement dans le passage a l’algebre.

ABSTRACT. The problem of articulation between arithmetic teaching and algebra teachingconcerns among other things the relationship the teacher or pre-service teacher has with theknowledge to be taught (relation au savoir), which produces an impact on the choices thathe makes concerning the approaches they are to favour in an introductory algebra context.Three groups of future teachers (164 students) were questioned with a view to analyzingto what extent these students were able to shift back and forth between these two methodswithin the particular context of problem solving. Interviews on either an individual basisor in a dyad format were conducted with a number of subjects, and have served to bringout their difficulties in articulation between these two fields. Only the difficulties observedin the transition from arithmetic to algebra are presented in this article.

1. INTRODUCTION

La transition par les eleves au cours secondaire est marquee, entre autres,par de nouveaux apprentissages fondamentaux parmi lesquels le developpe-ment du raisonnement algebrique occupe une place importante. Dans lecadre de ce nouvel apprentissage, bon nombre de connaissances develop-pees anterieurement vont necessiter un reajustement important. C’est lecas notamment lorsque l’eleve aborde la resolution de problemes. Il a alorsa son actif un grand nombre d’experiences en arithmetique: il a en effet eteconfronte a differents problemes, s’y est construit un certain nombre deconnaissances, de convictions, de procedures a propos de ces problemes.

Educational Studies in Mathematics 32: 127–155, 1997.c 1997 Kluwer Academic Publishers. Printed in the Netherlands.

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L’introduction a l’algebre va le confronter a des manieres differentes d’ap-procher la resolution de problemes, mettant en oeuvre des changementsconceptuels importants (Bednarz et al., 1992; Bednarz et Janvier, souspresse).

Ces difficultes qui suscite pour l’eleve ce passage dans la resolution deproblemes de l’arithmetique a l’algebre nous conduisent, d’un point de vuedidactique, a certaines questions. Celles-ci concernent bien evidemmentl’eleve et les situations didactiques1 qui lui sont (ou seront) proposees. Cesdifficultes nous renvoient par ailleurs a l’enseignant ou futur enseignantpuisque, par le role qui lui est devolu sur la scene didactique, c’est a luiqui revient – ou reviendra – la gestion des situations didactiques. Notreimplication dans la formation des futurs enseignants nous amene a nousinteresser de preference a ceux qui seront enseignants demain. Le futurenseignant au niveau primaire devra etre en mesure de gerer a l’interieurde son enseignement des situations didactiques propices a susciter chezles eleves le developpement de certains prealables necessaires a l’appren-tissage de l’algebre. Le futur enseignant au niveau secondaire, quant alui, devra pouvoir etre a l’affut des raisonnements et difficultes des elevessurvenant en resolution de problemes, qui, a ce moment crucial de leurapprentissage qu’est l’introduction a l’algebre, vont s’appuyer sur les con-naissances developpees anterieurement. Il sera de plus aux prises avecdes choix didactiques a poser en regard d’une introduction a l’algebreapte a faire reconnaıtre la pertinence et la validite de ce nouvel objetmathematique des les tout premiers moments de son apprentissage, et amaintenir une saine et fructueuse articulation entre arithmetique et algebre(Chevallard, 1989–90).

Les futurs enseignants sont-ils prepares a effectuer ces diverses fonc-tions? Les taches anticipees de ces futurs enseignants (appeles a interveniraux ordres primaire ou secondaire) se situant a la jonction de l’enseigne-ment de l’arithmetique et de l’algebre justifient que l’on s’interroge sur lerapport que ces derniers ont developpe anerieurement autour de ces deuxmodes de traitement et a l’articulation qu’ils sont a meme ou non d’ex-cercer entre ces deux approches, puisque les interventions pedagogiquesqu’ils pourront envisager dans l’avenir en seront tributaires. C’est la voiequ’emprunte la presence recherche, en cherchant a reperer les difficultesque les futurs enseignants eux-memes eprouvent dans l’articulation entreces deux modes de traitement. Enfin, l’ampleur des champs d’action de cesdeux methodes nous contraignant a restreindre notre domaine de recherche,nous avons choisi de concentrer notre etude sur la resolution de problemes,en arithmetique et en algebre elementaires. L’importance accordee a laresolution de problemes dans les programmes d’enseignement tant au pri-

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maire qu’au secondaire et l’experience acquise dans ce contexte particulierpar les futurs maıtres motivent cette decision.

1.1. But de la recherche

Cette recherche vise a mettre en evidence, a travers les modes de resolutionque les futurs enseignants mettent en place, lorsque confrontes a diversproblemes traditionnellement presentes en arithmetique et algebre,2 lesresistances ou les conflits susceptibles d’expliquer la difficulte d’un pas-sage aux raisonnements algebriques, et inversement le retour aux raison-nements arithmetiques lorsque l’algebre est bien installee. Les questionssuivantes plus precises guident cette etude: les etudiants (futurs enseignantsdu primaire ou du secondaire) peuvent-ils aisement passer d’un mode deraisonnement a l’autre en regard de differents problemes qui en justifientl’utilisation? Observe-t-on des resistances dans ce passage arithmetique/algebre? Dans l’affirmative, comment peut-on les expliquer?

Un regard du cote de l’evolution historique de l’algebre nous permetde cerner a travers les moyens mis en place pour resoudre les problemes,quelques indices des changements qui ont marque la transition d’un modede pensee arithmetique a un mode de pensee algebrique. Sous cet eclairagehistorique, nous reviendrons sur quelques-unes des etudes dont les interetssont lies a notre problematique et qui permettent d’eclairer notre proprerecherche.

2. CHANGEMENTS CLES DANS LE PASSAGE DES RAISONNEMENTSARITHMETIQUES AUX RAISONNEMENTS ALGEBRIQUES DANS UN

CONTEXTE DE RESOLUTION DE PROBLEMES

2.1. Demarche de resolution: analytique versus synthetique

L’analyse historique nous montre que le developpement de l’algebre dansun contexte de resolution de problemes s’appuie sur l’analyse, une forme deraisonnement fort different de celui utilise jusqu’alors, la synthese. Analyseet synthese sont en nette opposition comme le met bien en evidence cettecitation de Charbonneau et Lefebvre (1992):

Partant d’un enonce a prouver, l’analyste suppose vraie ou realisee la propriete cherchee et,de la, etudie l’environnement de cette propriete pour bien identifier les elements connus etinconnus et mettre en evidence d’autres proprietes qui, espere-t-on, sont vraies ou peuventetre rendue telles et a partir desquelles par une demarche inverse, dite synthese, on puissedemontrer la propriete cherchee. Il en va de meme dans le cas d’un probleme, si ce n’estqu’il s’agisse alors de construction plutot que de proprietes. (Charbonneau et Lefebvre,1992, p. 14)

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Alors que la synthese brille dans la resolution des problemes depuis sonorigine et apparaıt chez les Grecs classiques comme la voie la plus sureet la plus prometteuse pour resoudre des problemes, l’histoire nou montreque l’acces a cet autre mode de resolution qu’est l’analyse a pris du temps as’implanter (Charbonneau et Lefebvre, 1992). Cette prise de connaissancedes changements importants qu’a necessites historiquement la transition al’algebre nous amene a nous questionner sur les difficultes que susciteraeventuellement chez les etudiants ce passage arithmetique/algebre dansla maniere de gerer les donnees d’un probleme – un mode analytique ousynthetique.

Bednarz et Janvier (1993) nous fournissent partiellement une reponseen ce sens. Ces deux chercheurs ont cherche a caracteriser raisonnementsarithmetiques et algebriques, a partir des procedures de resolution utiliseesspontanement par des eleves, avant toute introduction l’algebre et aprescelle-ci, lorsqu’ils sont confrontes a differents problemes “algebriques”.Dans la resolution arithmetique, l’eleve mobilise les grandeurs connues etorganise pas a pas une sequence d’operations qui, en fin de parcours, meneau resultat recherche. Il procede ainsi du connu vers l’inconnu, chaquenouvelle etape permettant de generer une autre grandeur sur laquelle s’ap-puyer, ce chemin etant parseme de points de repere empruntes au contexte.La resolution algebrique, quant a elle, accepte des le depart de mobiliserla valuer inconnue par l’intermediaire (ou non) d’un substitut symboliqueet reconstruit globalement, en general sous la forme statique de l’equation,les relations stipulees dans le probleme. Les operations algebriques pren-nent une distance vis-a-vis les grandeurs et le contexte, et s’exercent surles valeurs inconnues en faisant comme si celles-ci etaient connues.

En regard de la problematique soulevee par notre recherche, la questionde l’articulation entre arithmetique et algebre nous renvoie a l’interroga-tion suivante: les futurs enseignants peuvent-ils utiliser des demarches deresolution autant de type analytique que synthetique? S’ils rencontrent desdifficultes dans le passage arithmetique/algebre, le mode de gestion parti-culier des donnees implique dans l’une et l’autre de ces deux approchespourrait-il en etre la cause?

2.2. Operer sur l’inconnu comme sur le connu: un autre changement cle

Cette demarche de resolution de type analytique sur laquelle s’appuiele raisonnement mis en place progressivement en algebre repose sur unchangement conceptuel important. Amorcee par Diophante, cette approches’articule sur un nouveau langage qui permet de parler d’une certaine quan-tite indeterminee d’unites (une arithme) et d’operer sur cette grandeur

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inconnue ainsi designee selon les memes proprietes que celles definiespour les nombres invariants (Radford, 1992).

Ce changement conceptuel majeur franchi a travers l’histoire passe parle depassement d’un certain paradoxe: comment peut-on agir sur quelquechose dont la nature tangible est inconnue? Loin d’aller de soi (chez lesAbaquistes plus particulierement, voir Charbonneau et Lefebvre, 1992),qu’en est-il actuellement chez les eleves? Les etudes de Filloy et Rojano(1989) et Herscovics et Linchevski (1991) effectuees aupres d’eleves de12–13 ans a propos de la resolution d’equations nous montrent que lesdifficultes rencontrees par les eleves surviennent justement au moment ouceux-ci doivent operer sur l’inconnue pour resoudre des equations. Dansle contexte particulier de la resolution de problemes, l’etude de Bednarz etJanvier (1993) pointe une difficulte semblable: certains eleves de 12–13 ansn’ayant encore recu aucun enseignement de l’algebre, lorsque confrontes aun mode de resolution algebrique des problemes, expriment un refus quanta la possibilite d’avoir a operer sur les grandeurs inconnues.

Une telle difficulte ne peut a priori, pense-t-on, apparaıtre chez lesfuturs enseignants. Ces derniers ont en effet deja benificie d’un enseigne-ment de l’algebre, essentiellement sous la forme symbolique que luipretent les programmes d’etudes de mathematiques contemporains. Lapossibilite d’operer sur les grandeurs inconnues par l’intermediaire d’unsubstitut symbolique leur a ainsi ete presentee. Une question reste pen-dante neanmoins: quelle interpretation accordent-ils a ces manipulationssymboliques de l’inconnue? Est-ce que les idees qu’ils se font des lettreset des manipulations symboliques peuvent expliquer certaines difficultesqu’ils eprouvent dans ce passage arithmetique/algebre?

2.3. Raisonnements algebriques donnant acces a une solution generale

La formulation des problemes enonce par Diophante temoigne d’un certainsouci de generalisation de la resolution proposee. L’enonce du probleme estpresente en des termes generaux de maniere a en faire ressortir la structuresous-jacente valable pour toute une classe de problemes. Au moment dela resolution, Diophante retourne cependant, faute d’outils adaptes a unetelle resolution generale, a des cas numeriques precis. Beaucoup plus tard,denigrant la resolution ponctuelle a des cas numeriques precis, Viete tenterade developper une methode globale, universelle, qui permet de resoudretout probleme mathematique. Cette generalisation ultime des modes deresolution desiree par Viete aura neanmoins un autre obstacle a franchir,nous le verrons, relie a la desemantisation du langage utilise.

En somme, la recherche d’une generalisation des solutions valables pourune classe de problemes se retrouve a travers les ages, et cette preoccupation

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s’est manifestee dans les methodes utilisees, les regles mises au point, dansles objets memes... Cette evolution laisse poindre egalement certaineslimites et obstacles rencontres dans ce processus de generalisation. Acet egard, la question ce pose ici: les futurs enseignants voient-ils dansl’algebre un outil de generalisation qui permet de resoudre, au dela deproblemes particuliers, toute une classe de problemes? Ceci a-t-il uneincidence sur la pertinence a leurs yeux d’effectuer ou non ce passageentre arithmetique et algebre?

2.4. Nature du controle exerce en arithmetique et en algebre

L’approche algebrique en resolution de problemes conduira ulterieurementles mathematiciens a des prises de decision montrant bien la difficulte quepose la desemantisation du langage employe, necessaire a la generalisationdes modes de resolution. Dans cette idee l’etude de Pycior (1984), sur ledebat ayant eu lieu entre mathematiciens au XIXe siecle a propos des nom-bres negatifs ou complexes, fait transparaıtre dans le refus ou l’admissionde ces nombres un fondement philosophique, parfois tacite, justifiant lesdifferentes prises de position, dans lequel toute la nature du controle exerceen mathematique est en jeu et rejoint notre propos.

Les mathematiciens pronant l’exclusion des nombres negatifs et com-plexes argumentent que la connaissance provient de l’experience sensibleet que toute idee generale derive de cas particuliers. Or, l’esprit humain nepeut se former une idee precise d’un nombre negatif ou complexe puisqueces nombres n’ont aucun referent dans le reel et ne peuvent etre inter-pretes comme une mesure de quantite. Par consequent, un raisonnementengageant de tels nombres ne peut conduire qu’a des conclusions fauss-es. En somme, ces mathematiciens font intervenir dans leur jugement unetheorie de la connaissance qui s’apparente a l’empirisme de Locke, incom-patible avec une algebre mettant en jeu des symboles sans signification.Le noeud du probleme peut ainsi etre attribue a cette difficulte ou ce refussystematique de deployer un raisonnement a partir d’items que l’esprit nepeut physiquement se representer.

Pour d’autres mathematiciens, dont les fondements philosophiquessous-jacents s’apparentent au nominalisme, les idees generales ne sontque des mots, des noms, et le raisonnement ne porte alors que sur dessignes, abstraction faite de toute signification. Ainsi, le sens ne con-tribue plus alors a assurer la justesse du raisonnement (comme c’est lecas en arithmetique); cette certitude du raisonnement juste prend appuisur un systeme de deduction logique construit a partir de regles formelles.L’algebre apparaıt par consequent: “(...) as a language of signs whose ratio-

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nal legitimacy depended on the rules governing manipulation of the signsrather on ideas behind the signs” (Pycior, 1984, p. 434).

Cette polemique autour des nombres negatifs et complexes fait ressor-tir certaines dispositions epistemologiques, auxquelles seraient inextri-cablement relies les raisonnements mathematiques. Bien que le passagearithmetique-algebre se situe en amont de cette periode, cette transitions’inscrit dans un processus global de construction du domaine algebriquequi, des le depart, s’insere dans un mouvement de distanciation progressivede l’experience sensible, occasionnant par la un changement au niveau ducontrole devant certifier la justesse des raisonnements.

Qu’est-ce qui rassure les futurs enseignants, dans le cas de la resolutionde problemes, quant a la justesse des raisonnements utilises? Peuvent-ilsavoir recours autant aux significations contextuelles qu’a un systeme deregles formelles afin de controler la demarche entreprise?

L’analyse (epistemologique et didactique) que nous venons de realiserprecedemment constitue un cadre de reference orientant notre propredemarche de recherche et l’analyse des resultats. Dans l’intention derepondre a l’ensemble des questions soulevees precedemment, une inves-tigation a ete conduite aupres de futurs enseignants du primaire et dusecondaire.

3. METHODOLOGIE

Notre recherche a ete menee aupres de trois groupes d’etudiants en for-mation des maıtres, ayant recu au cours de leurs etudes anterieures unenseignement de type traditionnel dans les deux matieres3: un grouped’etudiants en formation a l’enseignement au primaire (identifie desormaissous le sigle PRIM), un groupe d’etudiants en formation appeles a inter-venir aux ordres primaire et secondaire aupres d’eleves en difficultes d’ap-prentissage (sigle ADAP), et un groupe d’etudiants en formation se desti-nant a l’enseignement des mathematiques au secondaire (sigle SEC).

Une premiere etape visait a reperer parmi les etudiants inscrits a cestrois programmes distincts de formation (etudiants se situant tous en debutde formation, avant toute intervention didactique), des sujets presentantdes profils de resolution differents en regard de problemes judicieusementchoisis sur la base de notre questionnement4: des sujets ayant tendance autiliser essentiellement un raisonnement arithmetique pour la resolution deces problemes, d’autres ayant recours principalement a un raisonnementalgebrique pour cette activite, et enfin, des etudiants qui utilisaient desraisonnements tantot arithmetiques, tantot algebriques, pour solutionner lesproblemes presentes. Dans cette intention, nous avons presente a l’ensem-

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ble des sujets (66 pour le groups PRIM, 65 pour le groupe ADAPT, 33 pourle groups SEC) un test ecrit comprenant huit problemes mathematique:quatre problemes dits “connectes” susceptibles d’induire davantage uneresolution arithmetique et quatre problemes dits “deconnectes” suscitantplus frequemment une resolution algebrique (voir les resultats de Bednarzet Janvier, sous presse), ainsi identifies a partir de la grille d’analyse desproblemes elaboree par Bednarz et Janiver (1994), que nous presenteronsde maniere plus detaillee au point suivant.

L’analyse des procedures utilisees pour resoudre ces problemes nous apermis d’identifier des sujets presentant des profils differents de resolutionsur l’ensemble des problemes. Ont alors ete retenus huit etudiants danschacune de ces classes pour fins d’entrevue individuelle. Des entrevuesdyadiques, confrontant un sujet ayant utilise principalement des raison-nements arithmetiques et un sujet ayant eu recours essentiellement al’algebre sur ces problemes, ont de plus ete conduites de maniere com-plementaire dans l’intention de faire ressortir davantage a travers les incom-prehensions qui surgissent de part et d’autre, les ruptures entre les deuxmodes de raisonnement et les ecarts qui marquent le passage d’un modede traitement a l’autre. Notre etude se penche plus specifiquement dans lecadre de cet article sur les raisons qui amenent certains futurs maıtres a secloisonner fermement dans les raisonnements arithmetiques5. Voyons toutd’abord de maniere plus detaillee, pour une meilleure comprehension desresistances observees dans le passage aux raisonnements algebriques, lesoutils ayant servi a sons investigation.

3.1. Epreuve ecrite collective/selection des sujets

3.1.1. Cadre de reference sous-jacent a l’epreuve ecriteLa grille d’analyse des problemes developpee par Bednarz et Janvier(1993), qui permet notamment de distinguer ce qui caracterise les problemestraditionnellement presentes en arithmetique et en algebre, a servi de cadrede reference au choix dex problemes retenus pour la passation collective.En arithmetique, les problemes generalement presentes a l’eleve sont des problemes quenous qualifions de “connectes”: une relation peut facilement etre etablie entre deux donneesconnues, induisant alors un raisonnement possible de type arithmetique (s’articulant sur lesdonnees connues du probleme pour aboutir en fin de processus a la donnee inconnue)...Au contraire, en algebre les problemes generalement presentes a l’eleve sont des problemesque nous qualifions de “deconnectes”: aucun pont ne peut etre etabli a priori directemententre les donnees connues,... (Bednarz et Janvier, 1993, p. 9)

Cette grille permet par ailleurs de mettre en evidence la complexite rel-ative des problemes proposes a l’eleve, relativement aux calculs rela-tionnels sous-jacents (Bednarz et Janvier, 1994). Ce cadre d’analyse apermis d’identifier en algebre trois grandes classes de problemes, en

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TABLE I

Structure de l’epreuve ecrite: Type de problemes presentes

Problemes Problemes “connectes” Problemes “deconnectes”

Partage inequitable Pb “Le cours de biologie” Pb “Le congres”

Transformation Pb “L’age” Pb “Luc et Michel”

Taux Pb “Chandails et blousons” Pb “Les raquettes”

Pb “Le bassin” Pb “Les deux trains”

fonction de la nature des relations mises en jeu dans le probleme: desproblemes de “partage inegal” impliquant des relations de comparai-son entre grandeurs (pour un tel probleme voir le probleme “Le con-gres, Schmidt, 1994), des problemes impliquant une transformation desgrandeurs dans le temps (pour un exemple, voir le probleme “Luc etMichel”6), et enfin des problemes comportant des relations entre grandeursnon homogenes faisant intervenir un taux (voir le probleme “Les deux train-s”). Des problemes “connectes” et “deconnectes” appartenant a chacunede ces trois classes ont ete selectionnes pour les fins de l’epreuve ecrite(Schmidt, 1994). Le Tableau 1 ci-haut presente en resume les types deproblemes retenus par categorie.

3.1.2. Selection des sujetsL’analyse des procedures utilisees a cette epreuve ecrite nous a per-mis de reperer des sujets ayant employe majoritairement une procedurearithmetique pour resoudre ces problemes, et en particulier, pour les quatreproblemes “deconnectes”. Une procedure est qualifiee d’“arithmetique”lorsque la demarche de resolution utilisee prend constamment appui surdes nombres connus pour realiser les operations requises (une demarchede type synthetique, qui evolue du connu vers l’inconnu) en regard dessignifications inherentes au contexte.

De plus, cette analyse nous a permis de distinguer a cette etape chezles etudiants, deux types de procedures majoritaires. Celles-ci renvoient ades facons differentes d’avoir affaire au numerique, susceptibles d’avoirune incidence sur les difficultes que ces etudiants peuvent rencontrer dansle passage de l’arithmetique a l’algebre. Voici ces deux types de procedures:

Type 1: procedure de type “essais numeriques” Une valeur approxi-mative est attribuee a l’une des grandeurs inconnues du probleme. Lesautres grandeurs inconnues sont alors reconstruites a partir des relationsproposees dans le probleme, en s’appuyant sur les grandeurs intermediairessuccessivement generees. L’ecart entre le resultat fourni dans le probleme

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et celui obtenu a partir de cette grandeur suscite un reajustement de celle-ci.Cette procedure prendra par exemple la forme suivante dans le probleme“Luc et Michel”:

DisonsLuc a 1,00$ � 2 = 2,00$ L 3,00 � 2 = 6,00

Michel a 4,50 + 1,10 = 5,60$ M 6,50 + 1,10$ = 7,60

L 3,50� 2 = 7,00

M 7,00 + 1,10 = 8,10

L 3,75� 2 = 7,50

M 7,25 + 1,10 = 8,25

L 4,00� 2 = 8,00M 7,50 + 1,10 = 8,60

�60 6C

L 4,25� 2 = 8,50M 7,75 + 1,10 = 8,85

�35 6C

L 4,20� 2 = 8,40M 7,70 + 1,10 = 8,80

�0; 40$

Type 2: procedures de type “structure” Le sujet s’appuie dans ce cas surles relations et/ou transformations stipulees dans le probleme. L’etudiantopere a partir de ces relations et transformations connues et empruntealors un chemin qui necessite une restructuration du probleme. Prenonsl’exemple ci-dessous tire du probleme “Les deux trains”:

576 passag.2 trains!� 12 pl

!� 16 pl. (8 wag de +)

161 5762 163

� 8 �128 +12

128 448 28

448 � 28 = 164 1 train de 16 wag �a 12 pl1 train de 24 wag �a 16 pl

Le sujet calcule en premier lieu le nombre de passagers en surplusdans le train a 16 places (voir 1), et elimine cette quantite du nombre total

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de passagers (2). Cet ecart elimine, il reste deux trains ayant exactementle meme nombre de wagons. L’addition des deux taux (3) lui permet demodifier la structure du probleme en considerant plutot un seul train a 28places. Le probleme est aisement resolu alors par une simple division (4).

A partir de ces resultats, nous avons choisi huit futurs enseignants quiavaient eu recours majoritairement a l’arithmetique pour resoudre sept ouhuit problemes de l’epreuve ecrite, quatre sujets ayant utilise une procedurede type 1 et quatre sujets ayant employe une procedure de type 2.

3.2. Entrevues individuelles et dyadiques

Le protocole d’entrevue individuelle elabore pour interviewer ces sujetscomprend deux phases distinctes. Dans un premier temps, nous leur presen-tons, un a un, une serie de cinq problemes plus ou moins complexes aresoudre, sollicitant de par leur complexite a un moment donne, un passagea un raisonnement algebrique (voir annexe 2). Une seconde phase de ce pro-tocole consiste a presenter a ces etudiants trois solutions fictives (une solu-tion algebrique et deux solutions arithmetiques) a deux problemes figuranta l’epreuve ecrite: un probleme “connecte” et un probleme “deconnecte”.Les explications qu’ils peuvent fournir de ces procedures nous permet-tent de cerner quelles interpretations ces etudiants sont en mesure de leurattribuer, et en particulier, a la solution algebrique. Cette situation permetegalement de faire ressortir le rapport qu’ils entretiennent avec l’algebreet l’arithmetique.

Notre comprehension des difficultes que rencontrent les etudiants dansle passage d’un domaine a l’autre sera enrichie par quelques observa-tions nous parvenant des entrevues dyadiques. Au cours de ces seances,deux etudiants, l’un ayant employe a l’epreuve ecrite essentiellement desprocedures arithmetiques, l’autre ayant eu recours uniquement a l’algebre,sont invites a s’entendre sur une solution commune pour certains problemes“connectes” et “deconnectes”. Les incomprehensions qui surviennent chezchacun des partenaires nous devoilent sous un jour nouveau ce qui dis-tingue les raisonnements arithmetiques et algebriques et contribue a rendrece passage si difficile pour eux.

4. ANALYSE DES RESULTATS

L’analyse des resultats nous parvenant de ces entretiens est abordee a lasuite d’un retour sur l’epreuve ecrite.

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laire specifique ou a la clientele estudiantine auxquels se destinent cesfuturs enseignants (Schubauer-Leoni, 1986); soit a des effets de contratexperimental lies aux differents contextes situationnels utilises (“contextconnected solution”, Lave, 1988). L’analyse des entrevues individuellesrealisees aupres d’etudiants selectionnes dans les groupes ADAP et PRIMmet en lumiere neanmoins certaines difficultes que rencontrent ces futursenseignants dans le passage aux raisonnements algebriques et permet decerner diverses causes a l’origine du phenomene de cloisonnement observe.

4.2. Resistance dans le passage aux raisonnements algebriques: analysedes difficultes

L’analyse des entrevues permet d’expliquer certaines resistances observeeschez des futurs enseignants dans le passage des raisonnements arithmetiquesaux raisonnements algebriques. Celles-ci nous renvoient: 1) au statutaccorde au symbolisme, 2) a la nature meme des raisonnements arithme-tiques et algebriques et a l’ecart qui existe entre ces deux types de raison-nements, et enfin 3) au rapport que ces etudiants entretiennent avec ces deuxdomaines de connaissances dans un contexte de resolution de problemes.

4.2.1. Statut accorde au symbolismeCertains futurs enseignants utilisent un certain symbolisme dont la fonctiona l’interieur de la resolution des problemes s’avere tout autre que celle miseen place dans la resolution algebrique.

A. Un symbolisme servant avant tout a des fins designatoires: un premierexemple, un outil de retranscription de l’enonce du probleme

L’analyse des notations symboliques posees spontaanement au debut dela resolution et des paroles qui les accompagnent montre que les lettresutilisees par certains etudiants servent uniquement pour eux a des finsd’aide-memoire. Le cas de Danielle (groupe ADAP) est dans ce sens tresinstructif. Voici comment, par exemple, elle traduit dans une phase initialecet enonce du probleme #3 (cf. annexe 2):

M + 15 000 = Chantal

S + 5 000 = Chantal

Au fur et a mesure qu’elle produit ces notations, Danielle s’exprimeainsi:

(pour la premiere egalite) ... M pour Marie plus 15 000 parce qu’elle a 15 000 de plus queChantal. Ca veut dire Marie plus 15 000, ca va donner Chantal, ce que Chantal va avoir.(pour la deuxieme egalite) ... 5 000 de plus a Sophie qu’a Chantal. Ca veut dire que Sophieca va etre plus 5 000, ca va donner ... qu’a Chantal.

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Comme on peut le saisir a travers son discours, les lettres et les motsdans cette symbolisation intermediaire font reference essentiellement auxelements impliques dans la situation plutot qu’aux quantites mises en jeu:“M pour Marie...”. La lettre ici est une “etiquette” (Kuchemann, 1981) asso-ciee aux elements auxquels on se refere, et la forme “M + 15 000= Chan-tal” constitue un simple raccourci de l’enonce. Le symbolisme sert alors agarder une trace des relations proposees, et n’exprime nullement une rela-tion entre des quantites, ce qui conduit alors a un type d’erreur rapporte amaintes reprises dans les ecrits en didactique de l’algebre (Clement, 1982).Radford (1993) a deja fait des observations similaires aupres d’eleves, etil discute dans ce sens du role referentiel que ces derniers accordent a cesymbolisme intermediaire. La resolution algebrique provoquee par l’inter-vieweur au probleme #4 confirme ce statut referentiel accorde au symbol-isme, et nous fait voir quel type de difficultes suscite cette symbolisationintermediaire chez cette etudiante:

Marie x 1

Sophie y

Chantal z

y � 16 000 = x 2

3x = 1z 3

y = x + 16 000 4

3x = 1z 5

x = 1z 6

3

x = 69 333,30 7

En ecrivant ceci, Danielle s’exprime a voix haute:

16 000 de moins a Sophie qu’a Marie... y moins 16 000 egale Marie qui est x (ecrit 2).

... 3 fois plus d’argent a Marie qu’a Chantal... 3x egalent 1z (ecrit 3).

... (une minute) Je pense que ca me revient un petit peu... y egale x plus 16 000 (ecrit 4).

... Je vais essayer ca (ecrit 5 et 6).

... (une minute) Bien, c’est la que je sais plus. Je fais-tu un tiers du montant? C’est ca queje le sais plus. Je l’essaie ou eh... Essayons voir... 208... 208 sur 1... On va dire un tiers dumontant... C’est comme si je multipliais un tiers... C’est ca 208 000 divise par 3... (ecrit 7).

Pour Danielle, l’enonce “16 000 de moins a Sophie qu’a Marie” se traduitlitteralement par: y � 16 000 = x, y renvoyant a Sophie et x a Marie; et

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la relation “3 fois plus d’argent a Marie qu’a Chantal” par: 3x = 1z. Nousretrouvons ici la conception “etiquette” rattachee a la variable et le memetype d’erreur signale auparavant au niveau de l’interpretation des relations.Apres avoir ecrit“x = 1z”, cette etudiante avoue etre en difficulte. A cemoment, elle est guidee en quelque sorte par une resolution arithmetique:elle cherche a resoudre en figurant le tiers du montant total, 208 000 divisepar 3. Elle perd de vue la signification attribuee a “z” au moment del’etablissement de la legende, et dans sa solution cette lettre disparaıt toutsimplement.

Les lettres pour cette etudiante, comme le met en evidence la resolutionalgebrique forcee du probleme, servent uniquement a etablir qualitative-ment les relations stipulees dans le probleme. En aucune maniere, le sym-bolisme elabore ne fait reference a une relation entre grandeurs inconnues.Operer sur les symboles n’a, par consequent, aucune signification pourelle.

B. Un symbolisme servant a la designation des grandeurs inconnues (etatssuccessifs), en relation les unes avec les autres

Le cas de Nathalie (groupe PRIM) met en lumiere tres clairement cetautre mode d’utilisation du symbolisme, retrouve chez plusieurs autresetudiants. Des le depart, Nathalie s’engage spontanement dans le problemeen mobilisant une ou plusieurs lettres. Voici a titre d’exemple les notationsqu’elle pose prealablement a la resolution du probleme #4 (voir annexe 2):

Marie Chantal Sophie

y x y � 16 000

3x

Dans sa maniere de proceder, cette etudiante cherche tout d’abord unelement qui va lui permettre de generer successivement les autres gran-deurs. Nathalie en temoigne en reponse a cette question de l’intervieweursur l’utilite pour elle de commencer comme ca par l’algebre:

Bien, c’est de me donner mon idee qu’il ne faut pas que j’oublie que lui il en a 3 fois plusque... mon x c’est comme mon point de repere, le but que je recherche, le montant que jerecherche.

Le symbolisme qu’elle met au point lui sert a identifier clairement les gran-deurs inconnues et a exprimer l’une a partir de l’autre. Dans cette demarche,Nathalie reste centree sur les etats successivement generes, et elle met del’ordre de maniere sequentielle dans les relations impliquees. A la suitede cette symbolisation, Nathalie s’oriente vers des essais numeriques, unprocede tres coherent avec sa maniere d’exprimer les differentes grandeurs.Elle remplace x, en qui elle a percu le generateur, par un certain montant

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correspondant hypothetiquement a l’avoir de Chantal, et elle genere demaniere sequentielle celui de Marie et de Sophie en reprenant les relationsenoncees.

L’analyse de sa solution au probleme #5, que voici, illustre bien les diffi-cultes que va poser ce mode de symbolisation pour la resolution algebrique:

Marie Chantal Sophie

x 1

2x x + 36 000 2

y 3

y + 43 000 4

2 � x$ x$ x + 36 000$ 5

+y + 43 000$ 6

y 7

#

2 � x$ 8

+x + 79 000

Nathalie s’exprime a voix haute au fur et a mesure qu’elle avance danscette solution:

NM: Marie, elle va recevoir 2 fois ce que Chantal va recevoir en argent(ligne 5).Pis en plus elle va recevoir 43 000 de plus que... (ligne 6).Comme ca ici, ca va donner des y (ecrit 7). Marie, elle va recevoiren plus 43 000 de plus que le montant que Sophie va avoir eu. Je nesais pas si c’est clair, moi je me comprends mais...OK, Chantal, elle recoit x montant d’argent (points x$).Sophie, c’est x plus 36 000. Donc, c’est comme si Marie recevait2 fois le x de Chantal plus x plus 79 000 (pointe 8), parce qu’elleva recevoir en plus le 36 000 de Sophie dans son addition plus un43 000 additionnel. Donc, a Marie ca va lui faire... (pointe 8).

Intervieweur: Marie va avoir tout ca, ici (pointe 8)?

NM: Oui.

Dans cette solution, Nathalie percoit au depart dans le montant de Chantalle nombre “generateur”, et elle reprend de maniere successive les relationsenoncees en les organisant autour des etats en les prenant deux a deux(points 1 a 4). Cette etudiante aborde la resolution de ce probleme, par lasuite, avec des essais numeriques en reprenant le meme parcours. Or, saprocedure par essais numeriques est mise en echec ici, car il n’y a aucun etat

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connu dans ce probleme pouvant lui permettre de s’ajuster. Elle tente alorsde pousser davantage l’analyse des relations dans l’intention de s’orientervers une voie algebrique (a partir du point 5). Elle eprouve une grandedifficulte a ce moment avec la prise en compte des diverses relations lieesau montant de Marie et juxtapose en quelque sorte les relations enoncees.Finalement, “2 � x$ + y + 79 000” represente pour elle le montant deMarie. Jamais au cours de l’entrevue, cette etudiante n’a pu en venir al’equation. Centree sur les etats successifs, son raisonnement ne lui permetpas d’exprimer globalement les relations en presence.

Pour cette etudiante, les lettres permettent de designer des etats; lesymbolisme est un outil qui sert a mettre de l’ordre dans les donneesen identifiant les etats inconnus et en exprimant comment ceux-ci sontgeneres successivement. Jamais dans cette symbolisation les relations nesont prises en compte globalement, ce qui explique l’un des blocages dansle passage a une resolution algebrique du probleme.C. Le symbolisme, un outil de modelisation du probleme

Afin d’illustrer ce mode d’utilisation dy symbolisme, nous nous servonsici de l’exemple de Mirielle (groupe PRIM). Voice les notations qu’ellepose au depart aux problemes #1 et #4 de l’entrevue individuelle, et laresolution de ces problemes qu’elle aborde ensuite.

Probl�eme #1:x Chantal

x + 19 000$ de plus Marie

133 000

133 = 114 000� 2 = 57 000

Probl�eme #4:Marie 3x

Chantal x

Sophie 16 000� (3x)

208 000$+ 16 000

224 000� 7 = 32 000

Cette symbolisation intermediaire l’aide a maıtriser l’ensemble des rela-tions proposees de maniere a voir plus clair dans le probleme: la let-tre x lui permet de designer l’une des grandeurs recherchees et d’indi-quer comment les autres inconnues du probleme sont reliees a celle-ci.Cette representation sert alors de support aux raisonnements arithmetiquesqu’elle utilise: dans son cas, des procedures de type “structure”.

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Nous avons observe ce type d’utilisation dy symbolisme egalementchez d’autres sujets a tendance “arithmetique”. Par exemple, cette etudiante(Danielle, groupe ADAP) traduit l’ensemble des relations sous une formesymbolique comme ceci, pour le probleme “Luc et Michel” (pour ceprobleme cf. annexe 1):

Luc = 3,50 de moins que Michel

M = L + 3,50 ou L = M � 3,50

2L = M + 1,10 � 0,40

2L = M + 0,70

L = M � 3,50

Cette symbolisation lui permet d’analyser les relations enoncees entrechacun des montants aux temps initial et final, ainsi que l’effet des trans-formations leur etant appliquees simultanement. Apres avoir produit ceci,cette etudiants s’oriente vers des essais numeriques. Elle nous dit qu’ellese sert de la premiere formule, c’est le terme qu’elle utilise, “en mettant deschiffres la-dedans” puis remplace ces memes “chiffres” dans la deuxiemeformule, et ainsi de suite jusqu’a ce qu’elle rencontre les conditions ainsiposees. On voit donc ici le statut qu’elle accorde a ce qu’elle ecrit: pourelle, ceci est une formule a l’interieur de laquelle elle peut substituer desvaleurs numeriques connues, ici des valeurs qu’elle se donne. Le sym-bolisme lui sert d’outil de modelisation du probleme, lui permettant alorsd’operer et de resoudre par l’arithmetique.

En conclusion, a travers ces trois formes differentes d’utilisation dusymbolisme emerge un statut particulier accorde au symbolisme, dontla fonction s’avere tout autre que celle mise en place dans la resolutionalgebrique: un statut “designatoire”, et non “operatoire”. Les symboles,pour ces futurs enseignants, permettent d’identifier les elements et relationsqui les unissent, a des niveaux tres differents toutefois selon les troismodes decrits precedemment (le troisieme type etant beaucoup plus presde l’algebre, mais ce en tant qu’outil de modelisation de problemes, etnon comme outil de resolution. La possibilite d’utiliser les symboles afinde conduire sur eux des operations n’est pas reconnue, ce qui expliquecertaines resistances observees dans le passage a l’algebre.

4.2.2. Ecart entre raisonnements arithmetiques et algebriquesL’ecart qui existe entre les raisonnements utilises en arithmetique et enalgebre rend compre egalement de certaines resistances rencontrees par lesetudiants en formation dans le passage arithmetique/algebre. Nos observa-tions nous renvoient entre autres: A) a la nature des donnees sur lesquelles

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s’appuient les raisonnements arithmetiques (de type “structure” versus“essais numeriques”) et algebriques, et B) a la nature du controle enarithmetique et en algebre devant certifier la justesse des raisonnementsentrepris.

A. Nature des donnees (etats ou relations) sur lesquelles s’appuient lesraisonnements arithmetiques (de type “structure”/“essais numeriques”)et les raisonnements algebriques

Une etude de Bednarz et al. (1992a) a deja souleve une distinction fonda-mentale entre les raisonnements arithmetiques de type “structure” et lesraisonnements algebriques utilises en resolution de problemes. Le raison-nement algebrique prend appui resolument sur les etats impliques dansle probleme, alors que le raisonnement de type “structure” peut evoluerdans la resolution en jouant uniquement sur les relations presentees, sansconsideration aucune pour les etats. Notre recherche montre commentl’ecart qui se creuse entre ces deux types de raisonnements, principale-ment pour des problemes ne comprenant aucun etat (comme le probleme“Luc et Michel” utilise en entrevue dyadique), contribue a rendre difficilel’acces a la comprehension d’un autre type de raisonnements pour ce futurenseignant.

Pour solutionner ce probleme, Mirielle par exemple, un sujet arithme-tique de type “structure”, s’est appuyee essentiellement sur les differencesetablies entre les montants de Luc et Michel, au debut et a la fin de cettesituation, comme elle le fait bien voir dans l’explication qu’elle donne desa solution:

L M

? 3,50 ?

,40

3,10

1,10

4,20

Extrait d’entrevue dyadique:�Eric (EC), sujet alg�ebrique, Mirielle (MV), sujet arithm�etique

MV: Ok. “Luc a 3,50$ de moins que Michel” (ecrit L, M et 3,50 ci-dessus).La, je suppose qu’au depart que...

EC: Michel a au moins 3,50$.

MV: Disons, on pourrait dire ca. Ok. “Luc double son argent”... Ben enfait, je fonctionne plus moi sur la difference entre les deux. Je sais

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que lui, ici, il y a 3,50 entre les deux. Euh, “Luc double son montantd’argent, tandis que Michel augmente le sien de 1,10$. Fait que jesais, ici, qu’il y a eu une augmentation de 1,10$. Mais je connaispas ca ici. Ici, j’connais pas les montants qu’ils avaient (ecrit lesdeux?).

EC: Ok.

MV: Ce que je sais, c’est qu’il y avait une difference, pis qu’apres ca,je me retrouve avec Luc a maintenant 40 sous de moins que Michel(ecrit ,40). J’sais que ca, c’est passe a 40 sous. Fait que je sais, queentre ces deux-la (dessine une fleche entre 3,50 et ,40) il y a 3,10.

EC: Y a 3,10.

MV: de difference, et je connais deja le, le 1,10$, ici ya eu une augmen-tation de 1,10. Fait que ca, ca donnerait normalement le montant...

EC: De Michel.

MV: Ici, de Luc.

Alors que Mirielle raisonne en termes d’ecart entre les montants de Lucet Michel, on voit a cette phrase du sujet algebrique (Eric): “Michel aau moins 3,50$”, que celui-ci tend au contraire a fixer les etats, ici lemontant de Michel. Face a cette reflexion du sujet algebrique, la repliquede Mirielle montre bien la distinction qu’elle est a meme de faire tresexplicitement entre ce que celui-ci interprete et son mode de raisonnement:elle fonctionne sur les differences, et lui pense en termes d’etats. Le raison-nement de type “structure” adopte ici semble tout a fait hors de portee dusujet algebrique, qui ne peut comprendre la logique sous-jacente a cetteprocedure: “J’ai vu, mais je comprends pas pourquoi elle a fait ca, pispourquoi ca marche. La, je veux dire d’ou est-ce que ca peut venir? qu’ellea fait 3,50$ moins ,40$ la? Je vois pas” (Schmidt, 1994, p. 377).

Un autre entrevue dyadique illustre bien a nouveau l’ecart qui existeentre ces deux types de raisonnement, lors de l’explication par le sujetalgebrique de la strategie de l’autre:

Extrait d’entrevue dyadique:Nadine (NL), sujet arithmetique, Jacinthe (JL), sujet algebrique

JL: Elle (sous-entendu Nadine) pose comme hypothese que Luc est egala 0. Donc c’est comme Michel a 0 plus 3 et 50. OK. Puis la ellerajoute le une et 10. Luc a 0, donc...

NL: Mais c’est pas dans le fond, j’te dis pas Luc est egal a 0 la, mais jete dis Michel a de plus au depart 3 et 50, puis la il rajoute une etdix, ca lui donne 4 et 60. Si Luc avait suivi le meme chemin que lui, il

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devrait avoir dans le fond 3 et 50 de moins, mais la il est rendu justea 40 sous de moins...

JL: Hum, hum, ca lui donne 4 et 20 au depart...

NL: Au depart... est-ce que tu trouves ca logique?

JL: Oui, p.c.q. regarde. Tu dis que Michel finit avec 4 et 60, OK. Tusais qu’y a 40 sous de plus que Luc donc... mon doux j’ai perdu monfil. Tu sais qu’y a 4 et 60 a la fin, puis qu’il a 40 sous de plus queLuc, donc ce que tu te dis c’est que Luc a 4 et 20 a la fin.

NL: Au debut......

JL: Ben, j’comprends que ca marche mais... c’est comme tu trouves lemontant que Luc a a la fin OK, comme tu dis qu’a la fin Michel a 4et 60, a la fin Michel a 4 et 20.

NL: J’dis pas qu’a la fin Michel a 4 et 60. Il a 40 sous de moins, euhde plus que Luc. C’est p.c.q. y avait 3 et 50 de plus que Luc,...

Le raisonnement sur la relation exerce par Nadine ne peut etre concu enpremier lieu sans etat de depart par le sujet algebrique, qui ramene celui-cia un etat initial fictif, 0$. La replique du sujet arithmetique: “j’te dis pasLuc est egal a 0 la, mais je te dis Michel a de plus au depart 3 et50...”, montre que son raisonnement n’est pas au meme niveau: elle neraisonne pas sur des etats, mais en termes de difference. Cette situation serepete lorsque cette fois le sujet algebrique voit dans le “4,60$” un montantcorrespondant a celui de Michel, et “4,20$” le montant de Luc a la fin.Cette formulation de Jacinthe qui ramene les relations a des etats force anouveau une explication de son raisonnement par le sujet arithmetique etune argumentation, cette derniere ne se reconnaissant pas dans ce que ditle sujet algebrique. Elle essaie encore d’objecter, mais elle finit par s’yperdre et abandonne.

Ces deux exemples illustrent bien comment les sujets “algebriques”tendent spontanement a fixer les etats, et a faire reposer leur demarchesur ceux-ci. En somme, le raisonnement algebrique se distingue du raison-nement arithmetique de type “structure” par son insistance a vouloir orga-niser les relations impliquees autour d’etats duments marques. Ce raison-nement se rapproche en ce sens du raisonnement arithmetique de type“essais numeriques”. Il s’en eloigne cependant par les moyens qu’il sedonne pour integrer globalement sous une forme symbolique l’ensembledes conditions intervenant dans le probleme et dont il faut tenir comptesimultanement. Les difficultes observeees dans le passage a l’algebre chezdes futurs enseignants presentant des profils arithmetiques distincts sem-blent en l’occurrence de nature differente.

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B. Controle exerce dans la resolution de problemes lorsque celle-ci estabordee par un raisonnement arithmetique ou un raisonnement alge-brique

Nos resultats nous ramenent ici a notre reflexion issue du texte de Pycior:une conception empiriste chez certains futurs enseignants (necessite defaire reposer les raisonnements sur des items que l’esprit peut physique-ment se representer) les amene a prendre appui lors de la resolution desproblemes sur les grandeurs connues et le sens inherent a la situation.Selon les dires de futurs enseignants, en arithmetique: “Dans sa tete, c’estcomme si elle le voit... Ca colle plus au probleme... Tout le long, il me sem-ble que ca fait reference a la question”, tandis qu’en algebre: “C’est moinsapparent parce que tu pourrais enlever le probleme et tu pourrais posern’importe quel autre probleme... Apres qu’on ait pose ca (l’equation), ondirait qu’on oublie le probleme. Tu sais, qu’on ne le voit plus, qu’on faitjuste de la mathematique”. Ainsi, chez le sujet qui resout arithmetiquement,les significations contextuelles sont toujours presentes et le guident danssa demarche, alors qu’en algebre il y a une perte de sens, une distance estprise vis-a-vis le contexte.

Cette distance qui s’installe vis-a-vis le contexte inhibe le controle detype semantique qu’ils exercaient jusqu’alors implicitement en arithme-tique, afin de s’assurer de la justesse de la demarche entreprise. N’ayantpu developper ou interioriser, malgre l’enseignement recu en algebre, descriteres autres pour juger de la validite des raisonnements mis en branle,ces sujets peuvent difficilement exercer un controle sur une resolutionalgebrique, d’ou leur reaction semblable a celle que l’on peut voir dans cetextrait d’entrevue:

C’est peut etre plus facile de prendre l’algebre, mais on comprend pas toujours ce qu’onfait... Celle-la (solution arithmetique) je la comprends mieux, c’est comme plus logiquepour moi.

Pour cette raison, plusieurs futurs enseignants temoignent, comme cetteetudiante, preferer s’en tenir a l’arithmetique. Des commentaires emisalors, il est possible de degager le rapport qu’ils entretiennent avec l’arith-metique et l’algebre.

4.2.3. Rapport entretenu avec l’arithmetique et l’algebreLe temoignage qui suit est typique de la reaction de la tres grande majoritedes sujets a tendance “arithmetique”, lorsqu’ils ont a expliquer des solu-tions algebriques fictives d’etudiants (deuxieme partie du protocole d’entre-vue individuelle):

Bien ca c’est des regles que j’ai appris a l’ecole. Si tu l’envoies de l’autre cote du egal, tufais juste changer, si c’est un moins, tu fais un plus... Qu’est-ce qui me permet de faire ca?

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C’est parce que je l’ai appris comme ca... Je n’ai pas de reponse, je ne le sais pas. Quandj’allais a l’ecole, on m’a appris que si tu veux isoler... envoyer tous tes chiffres ensemble,bien quand tu le changes du cote du egal il fallait que tu changes le signe qu’il y a devant.

Dans les explications qu’ils peuvent fournir de ces regles lorsqu’ils ont unesolution algebrique a leur disposition, transparaıt le type d’apprentissagequ’ils ont vecu vis-a-vis ce domaine mathematique: un apprentissage axesur des regles apprises par coeur sans comprehension, ce qui est tresexigeant sur le plan mnemonique. Les manipulations algebriques ont trespeu de sens et la resolution algebrique semble guidee chez eux par larecherche d’un certain pattern de resolution: placer les “x” d’un cote dusigne egal et les nombres de l’autre cote de ce signe, de facon a pouvoirisoler “x”. Toute cette demarche s’appuie sur des regles, dont ils avouenthumblement ne pas trop comprendre pourquoi cela fonctionne: “C’estbizarre comment qu’on apprend des affaires et qu’on ne sait pas pourquoi...Je sais que quand il traverse le signe egal, il (+16) change de signe”, cetaveu nous revelant de nouveau le caractere qu’ils attribuent a ces regles.

Le probleme #5 devoile, par ailleurs, un autre type de conceptiondeveloppe au cours de leur apprentissage anterieur de l’algebre. Certainsd’entre eux sont guides par la recherche d’un modele implicite d’equation.En effet, face a ce probleme qui ne contient pas de montant total, ces sujetstentent de reproduire un type d’equation bien connu, consistant a poser lestermes algebriques du cote gauche du signe egal et un montant total del’autre cote, tel cet exemple: 2x + x + (x + 36 000) = .

De tout ceci se degage l’idee d’une algebre reposant sur tout unrepertoire de regles a caractere totalement arbitraire, et du peu de controleexerce par ces etudiants sur les transformations algebriques. Paradoxale-ment, tous ces sujets, meme ceux ayant evite l’algebre de maniere radicale,attribuent une nette superiorite a l’outil algebrique pour la resolution desproblemes: “Avec l’algebre, tu peux pas te tromper”, “Avec l’algebre, tuvois vraiment toutes les etapes, c’est plus clair”, “C’est moins long si tuisoles tout de suite ton x”, “C’est moins complique, ben tu te casses moins latete” et enfin, “Bien, si j’etais plus a l’aise avec l’algebre, je prendrais cettesolution-la”. Ainsi, ces etudiants valorisent l’algebre pour son efficacite,sa clarte, sa rapidite, le moindre effort de penser qu’elle suscite, cependantcomme ils ne maıtrisent point cet outil de resolution, ils preferent s’en tenira l’arithmetique. L’arithmetique, dans leur cas, constitue ainsi un choix pardefaut.

Les sujets “structures” se distinguent des autres sujets a tendance“arithmetique” en ce sens qu’eux seuls ont pu fournir une explicationadequate des regles de manipulation algebrique. Les entrevues auxquellesont participe ces etudiants montrent que leur engagement dans l’arithme-

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tique constitue au contraire un choix reflechi. Ils n’admettent pas, quanta eux, cette superiorite de l’outil algebrique. Les problemes conduisant ala reconnaissance de la pertinence de l’algebre doivent etre extremementcomplexes, car leur raisonnement arithmetique leur permet d’aller tres loindans la resolution des problemes. Ils privilegient avant tout la resolutionarithmetique parce qu’elle leur permet de garder un controle constant surla demarche de resolution a travers les significations contextuelles.

Enfin, les modes de resolution que les sujets a tendance “arithmetique”abordent spontanement tiennent, nous l’avons vu, au contexte particulierqui est traite dans chaque probleme, ce qui souleve un autre point decomparaison entre eux et les sujets a tendance “algebrique” en ce qui atrait au rapport qu’ils ont developpe relativement a ces deux domainesmathematiques. Plusieurs de ces derniers soutiennent en effet que, juste-ment parce qu’il y a une distance qui est prise vis-a-vis le contexte enalgebre, cet outil permet de generaliser le mode de resolution a tout unensemble de problemes du meme type, comme en temoigne cette etudiante:

Mais lui (solution algebrique) tu peux l’utiliser que ce soit des personnes, de l’argent, quece soit n’importe quelle proportion... tu peux l’utiliser que ce soit n’importe quel chiffre,meme si c’est pas des entiers, des decimals ou eh... meme avec des negatifs on aurait pul’utiliser.

Cette puissance du raisonnement algebrique permettant de generaliser lemode de resolution a toute une classe de problemes n’a jamais ete souleveechez les sujets arithmetiques. Ils semblent peu preoccupes par cet aspect dessolutions qu’ils abordent en resolution de problemes; alors qu’au contraire,chez les sujets algebriques, cette preoccupation les amene, pour certainsd’entre eux, a ne point preconiser l’arithmetique pour la resolution desproblemes (d’ou l’une des raisons de leur cloisonnement dans l’algebre).

En somme, les observations qui precedent mettent a jour de quellemaniere le rapport que les futurs enseignants ont developpe relativement al’arithmetique et a l’algebre est responsable de certaines autres resistancesrencontrees dans le passage d’un domaine a l’autre.

5. CONCLUSION

Notre recherche pointe plusieurs sources de resistance dans le passagedes raisonnements arithmetiques aux raisonnements algebriques chez desfuturs enseignants ayant recu au cours de leurs etudes anterieures enmathematiques un enseignement de type traditionnel dans la resolutionde problemes en arithmetique et en algebre. Une premiere source dedifficulte est a chercher dans le statut accorde au symbolisme par cesetudiants. Nous avons pu en effet observer differents statuts accordes par

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ces futurs enseignants au symbolisme, d’un statut purement designatoire acelui d’outil de modelisation du probleme, dont la caracteristique communeconsiste a n’attribuer a celui-ci qu’un role referentiel (Radford, 1993).

Nos resultats indiquent par ailleurs que l’ecart se creuse entre le raison-nement algebrique et le raisonnement arithmetique de type “structure”,principalement pour des problemes ou il n’y a aucun etat connu. Le raison-nement algebrique s’appuie sur les etats des le depart, par le biais d’unsubstitut symbolique. Celui-ci lui permet de fonctionner avec ces etatscomme s’ils etaient connus, alors que le raisonnement de type “struc-ture” se donne la possibilite d’evoluer dans la resolution de problemes enexercant un travail sur les relations et transformations connues sans con-sideration des etats. Le raisonnement algebrique est dans ce sens beaucoupplus pres du raisonnement “arithmetique” de type “essais numeriques”. Cedernier s’en eloigne cependant en raison du travail essentiellement localqu’il est en mesure de conduire, en generant les etats successivement demaniere sequentielle.

Une autre source de resistances est a rechercher du cote de la naturedu controle exerce dans les deux domaines. Notre recherche permet icide dresser un certain parallele entre nos observations effectuees aupresde futurs enseignants et le debat ayant eu lieu entre mathematiciensau 19e siecle. En effet, l’etudiant maıtre qui resout par l’arithmetiqueavance dans la solution du probleme en prenant appui constamment surles grandeurs connues et les significations contextuelles. Il exerce un con-trole semantique. Les sujets “arithmetiques” pretendent preferer resterdans l’arithmetique parce qu’ainsi ils comprennent mieux a tout instant cequi se passe lorsqu’ils resolvent, pouvant ici faire reference a la situation.Leur mode de resolution reste cependant tributaire du contexte particuliera l’etude et ils ne se sentent point concernes par la generalisation de leurmode de resolution.

Enfin, ces futurs enseignants ont developpe un rapport personnel avecces deux domaines de connaissances qui fait naıtre egalement d’autresresistances. Les sujets “arithmetiques” de type “structure” voient dansl’arithmetique un outil de resolution tres efficace et seuls des problemestres complexes leur font reconnaıtre la pertinence de l’algebre. Les sujetspresentant des profils “arithmetiques” autres accordent une nette superioritea l’outil algebrique, bien que pour eux ce domaine repose sur un ensemblede stereotypes et de regles a caractere arbitraire.

En conclusion, le passage a l’algebre necessite, on le voit par cesresultats, des changements majeurs en regard notamment du rapport al’ecriture symbolique, de la nature meme des raisonnements et du controlea exercer sur ces raisonnements. Ces resultats de recherche questionnent

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les habiletes eventuelles de ces futurs enseignants a effectuer des tachesd’enseignement devant faciliter pour l’eleve la transition a l’algebre. Quevont pouvoir faire les futurs maıtres qui ne saisissent, dans le symbolisme,que la fonction “designatoire”? Ou encore, quelles seront les interventionsposees par ceux qui ne ressentent nullement la pertinence de passer al’algebre, et pour qui ce mode de resolution repose sur des automatismesregis par des regles de transformation arbitraires? Seront-ils en mesurede choisir les situations didactiques aptes a faire pressentir la pertinencede ce nouvel objet d’etude, reconnaissance a la base d’un apprentissagesignifiant. Nos observations temoignent qu’un travail doit necessairementetre accompli aupres d’eux a l’interieur de leur formation d’enseignant.

Ces resultats, soulignons-le, s’inscrivent dans une recherche de typeexploratoire et sont a considerer en regard des parametres specifiquesretenus (etudes mathematiques anterieures de type traditionnel, les pro-blemes utilises). Il existe des approches alternatives dans l’enseignementde l’algebre: par exemple, les perspectives developpeesdans les curriculummis en place dans differents pays, certaines preconisant un travail prealabledestine a donner un sens a l’algebre, d’autres cherchant a mettre l’accent surl’algebre en tant qu’outil de generalisation. Toutefois, les recherches dansce domaine (Janvier, sous presse) nous montrent la aussi des difficultesdans la transition de l’arithmetique a l’algebre, notamment dans le passaged’un concept de nombre generalise (tel que developpe par Davidov, voirFreudenthal, 1974) a celui d’inconnue mis en oeuvre dans la resolution deproblemes, dont il faudra alors tout de meme tenir compte ulterieurementdans la formation des futurs enseignants.

ANNEXE 1

Problemes de l’epreuve ecrite repris pour les entrevues dyadiques

Probleme “deconnecte”: “Luc et Michel”: Luc a 3,50$ de moins que Michel. Luc doubleson montant d’argent tandis que Michel augmente le sien de 1,10$. Maintenant, Luc a 0.40$de moins que Michel. Combien avaient-ils chacun au depart?Probleme “deconnecte”: “Les deux trains”: Il y a 576 passagers a transporter entre deuxvilles. On dispose de deux trains pour le faire. Un des trains a uniquement des wagons a 12places et l’autre, uniquement des wagons a 16 places. En supposant que le train forme dewagons a 16 places ait 8 wagons de plus que l’autre, combien doit-on accrocher de wagonsapres chacune des deux locomotives?

ANNEXE 2

Problemes utilisee dans le protocole d’entrevue pour sujets a tendance “arithmetique”

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Probleme #1: Arsene Ponton legue sa fortune a ses deux nieces, Marie et Chantal. Il donne19 000$ de plus a Marie qu’a Chantal. Si sa fortune s’eleve a 133 000$, combien recevrontMarie et Chantal?Probleme #3: Arsene Ponton legue sa fortune a ses trois nieces, Marie, Chantal et Sophie.Il donne 15 000$ de plus a Marie qu’a Chantal, et il donne 5 000$ de plus a Sophie qu’aChantal. Si sa fortune s’eleve a 158 000$, combien d’argent recevront Marie, Chantal etSophie?Probleme #4: Arsene Ponton legue sa fortune a ses trois nieces, Marie, Chantal et Sophie.Il donne 3 fois plus d’argent a Marie qu’a Chantal, et il donne 16 000$ de moins a Sophiequ’a Marie. Si sa fortune s’eleve a 208 000$, combien d’argent recevront Marie, Chantalet Sophie?Probleme #5: Arsene Ponton legue sa fortune a ses trois nieces, Marie, Chantal et Sophie.Il donne 2 fois plus d’argent a Marie qu’a Chantal, 36 000$ de plus a Sophie qu’a Chantalet finalement 43 000$ de plus a Marie qu’a Sophie. Combien d’argent recevront Marie,Chantal et Sophie?

NOTES

(1) Ces situations didactiques nous renvoient au curriculum traditionnel et au corpus deproblemes que l’on retrouve classiquement dans une introduction a l’algebre, maisaussi a des facons tres differentes d’approcher la resolution de problemes en algebre(par exemple, les experiences de Davidov relatees par Freudenthal (1974), plus presde nous celles de Bell et al. (1988), de Filloy et Rubio (1991), de Sutherland et Rojano(1993)) ayant des influences particulieres sur le rapport a l’algebre et a l’arithmetiquedeveloppe par l’apprenant.

(2) Un probleme en soi ne peut etre qualifie d’arithmetique ou d’algebrique, seul le modede resolution peut l’etre. Dans cette idee, nous avons procede a l’analyse de certainsproblemes traditionnellement presentes en arithmetique et en algebre a partir de lagrille d’analyse des problemes de Bednarz et Janvier (1993). En faisant ressortir lastructure des problemes (par exemple, le type de lien etabli entre les donnees connueset inconnues), cette grille permet d’identifier les situations qui sont susceptibles desusciter davantage une resolution arithmetique ou algebrique (une relation donneeentre deux grandeurs connues permettant d’evoluer du connu vers l’inconnu favorisera,par exemple, une demarche de type arithmetique, ou synthetique comme nous leverrons a la section suivante).

(3) Les resultats de notre etude doivent etre consideres en fonction de cette variable, unenseignement de l’algebre de type tres different ayant pu conduire a d’autres resultats.

(4) Les problemes utilises sont aussi un autre element a tenir compte dans l’interpretationdes resultats, les procedures retrouvees etant liees aux contextes empruntes (“contex-connected solution” de Lave, 1988).

(5) Cette etude fait partie d’une recherche plus globale dans laquelle d’autres aspects ontete etudies, notamment le retour a l’arithmetique lorsque l’algebre est bien installee.Nous ne reprenons pas ici ces resultats.

(6) Le probleme “Luc et Michel” a ete presente a notre groupe de recherche par FrancoisConne.

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