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1 Ecole et sciences cognitives 2000-2001 ACTION CONCERTEE INCITATIVE COGNITIQUE Ministère de la recherche Un Etat des lieux de la recherche sur les apprentissages et les motricités de la danse chorégraphiée SOUS LA DIRECTION DE SYLVIA FAURE Co-auteurs (par ordre d’apparition dans le texte) : Sylvia FAURE, Michèle COLTICE, Christine ASSAÏANTE, Marielle CADOPI, Madeleine LORD, Pierre-Emmanuel SORIGNET Rapport de recherche pour la synthèse « Développement et apprentissage des activités et perceptions artistiques » sous la responsabilité du Laboratoire de Psychologie expérimentale de l’Université René Descartes/Institut de psychologie Décembre 2001 AcroPDF - A Quality PDF Writer and PDF Converter to create PDF files. To remove the line, buy a license.

rapport de recherche sur les apprentissages et le developpement des activités artisitiques

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Ecole et sciences cognitives 2000-2001

ACTION CONCERTEE INCITATIVE COGNITIQUE

Ministère de la recherche

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SOUS LA DIRECTION DE SYLVIA FAURE

Co-auteurs (par ordre d’apparition dans le texte) :

Sylvia FAURE, Michèle COLTICE,Christine ASSAÏANTE, Marielle CADOPI,

Madeleine LORD, Pierre-Emmanuel SORIGNET

Rapport de recherche pour la synthèse « Développement et apprentissage des activités etperceptions artistiques » sous la responsabilité du Laboratoire de Psychologie expérimentalede l’Université René Descartes/Institut de psychologie

Décembre 2001

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Membres de l’équipe de travail sur la synthèse« danse »

Christine ASSAÏANTE, est chargée de recherche au CNRS-LaboratoireDéveloppement et pathologie du Mouvement (Marseille).

Marielle CADOPI, est professeur d’Université, à la Faculté des Sciences dusport (Montpellier)

Michèle COLTICE, est professeur PRAG, IUFM de Lyon et chercheur auLaboratoire de didactique de l’UFR Staps de Lyon.Cris.

Madeleine LORD, est professeur régulier, département de danse, Université duQuébec (Montréal).

Pierre-Emmanuel SORIGNET, est docteur en sociologie, à L’Ecole des HautesEtudes en Sciences Sociales/E.N.S. (Paris).

Sylvia FAURE, est maître de conférences en sociologie et chercheur au Groupede Recherches sur la socialisation, Faculté d’anthropologie et de sociologie del’Université Lumière Lyon 2 (Lyon)

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Introduction

Ce travail est le produit d’une collaboration entre six chercheurs, venant de champsdisciplinaires différents. Il rend compte des résultats de recherches, françaises et anglo-saxonnes principalement, portant sur les apprentissages et les motricités de la danse, enformation initiale et dans les établissements scolaires (danse à l’école), ainsi que sur ledéveloppement des comportements moteurs.

Réunissant des perspectives aussi différentes que la sociologie, l’anthropologie,l’ethno-histoire, la psychologie cognitive, la psychologique des comportements moteurs, lapédagogie et la didactique, cette synthèse est structurée par une problématique générale àpartir de laquelle les collaborateurs ont eu à constituer leur propre synthèse en tenant compte,évidemment, des enjeux et des orientations épistémologiques liées à leur discipline respective.

Concernant l’objet d’étude principal (les apprentissages et les motricités de la danse),il est apparu que chaque champ disciplinaire était inégalement pourvu en connaissances sur laquestion. De fait, parmi les onze articles composant cette synthèse, certains peuvent,effectivement, dresser un bilan assez exhaustif quant aux théories, problèmesépistémologiques et études menées sur la question (c’est le cas de la psychologie cognitive,du comportement, de la motricité ; et de la didactique). D’autres textes sont, en revanche, dessynthèses plus propositionnelles que récapitulatives — c’est le cas pour les sciences socialesqui ne constituent pas la danse comme un champ d’étude à part entière, du moins en France,et travaillent à partir d’épistémologies différentes qui ne peuvent guère communiquer entreelles. Faire une synthèse « propositionnelle » signifie donc que l’auteur de l’article a nonseulement réuni et synthétisé les travaux existants sur l’ « objet » d’étude, mais s’est aussiobligé à faire émerger des propositions d’analyse plus larges, et plus transversales aux étudesmobilisées dans son texte.

I. Les limites de la pluridisciplinaritéPar conséquent, la difficulté essentielle du travail pluridisciplinaire a été de donner une

orientation commune à l’ensemble des champs invoqués dans le « programme Cognitique :Ecole et sciences cognitives », qui devait faire « sens » pour chacune des disciplines. Cela n’apas été de soi puisque les travaux concernant les apprentissages et les motricités de la dansene sont pas développés de la même façon dans les champs disciplinaires et n’interrogent pasnon plus ces questions d’une manière identique.

Sur un plan plus général, la pluradisciplinarité engage les chercheurs à travailler demanière constructive en se lisant mutuellement. Or, un premier bilan provisoire de cettesynthèse tend à montrer des clivages forts entre les disciplines dites de « sciences humaines »,et qu’il est rare, par exemple, de trouver une référence aux sciences sociales dans un travail depsychologie cognitive et réciproquement. Ainsi, des problèmes qui apparaissent commeessentiels pour des auteurs d’un champ, seraient certainement, sinon résolus, du moinsenrichis et mieux « construits », si l’on pouvait passer de la pluri- à l’inter- disciplinaire,comme nous le proposons dans la conclusion, en osant peut-être dépasser les frontièresinstitutionnelles des champs universitaires et de la recherche, et surtout en laissant de côté lespréjugés et stéréotypes que les chercheurs se portent parfois mutuellement, plus en raison deleur méconnaissance réciproque que d’une information objective. Un tel projet est possible,mais il implique des déplacements épistémologiques par rapport aux habitudes intellectuellesde chaque champ. D’ailleurs, il est parfois plus aisé de travailler en tissant des liens avecd’autres disciplines, qu’à l’intérieur d’un même champ éclaté en diverses orientations qui

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n’ont pas grand chose à voir les unes avec les autres et qui sont cependant pris dans les luttesde concurrence internes à la discipline. Autrement dit, comme le précise Bernard Lahire, cen’est pas la discipline en elle-même qui favorise un dialogue entre chercheurs — chaquediscipline est traversée par diverses orientations théoriques et méthodologiques — mais bienle fait que ces chercheurs partagent une même orientation épistémologique et que, à partir delà, ils parviennent à se comprendre mutuellement (Lahire, 1999).

II. La problématiqueLa problématique de la synthèse se rapporte essentiellement aux modes

d’apprentissage et aux principes d’une incorporation des gestes de danse. Il s’agit enparticulier de s’intéresser aux questions de la mémorisation de mouvements dansés ; dudéveloppement de la motricité ; d’étudier les interférences entre l’apprentissage et le langageutilisé pendant une séance de danse ; de traiter des interactions entre les images et consignesfournies aux danseurs et leurs modes d’incorporation/d’appropriation ; de rendre compte desanalyses traitant des motricités spécifiques engagées dans la danse ; de travailler le lien entremusique, rythme et danse ; de questionner la recherche sur les sensations et les perceptions aucours de la formation des gestes de danse et enfin d’interroger les processus de la créationchorégraphique.

La danse à l’école interroge plus singulièrement les orientations de l’enseignementscolaire. Elle amène à réfléchir aux conséquences pédagogiques de l’introduction d’unedémarche de création et d’un travail sur un corps en mouvement. Participant de l’éducationartistique, la danse à l’école permet plus largement une réflexion sur les nouvelles pédagogiesdont ce projet éducatif se réclame, ainsi que sur les objectifs et les compétences attendues detelles expériences scolaires.

Initiée à partir d’une épistémologie soucieuse de la contextualisation des résultats etdes « objets » d’analyse, la problématique a invité chaque partenaire de la synthèse àappréhender les travaux dont il rend compte, en étant sensible à la manière dont les auteursconstruisent leur « objet » de recherche et aux limites de leur théorie et/ou résultats derecherche. En outre, il a été important de souligner les différenciations selon les lieuxd’apprentissage, les niveaux d’expertise, les cycles d’enseignement, selon que la pratique sedéroule ou non dans un cadre scolaire, ou qu’elle est traitée hors contexte ordinaire (en« laboratoire »).

La contextualisation est également historique. De ce fait, la synthèse comprend uneanalyse socio-historique des modes d’apprentissage de la danse chorégraphiée depuis le XIXe

siècle, ainsi qu’une introduction historique de la danse à l’école. Par ailleurs, les didactiquesde la danse à l’école ont été traitées en prenant en compte leur situation politique etinstitutionnelle d’énonciation : un texte écrit dans une période où la danse n’était pas encorereconnue pleinement à l’école n’aura pas la même teneur et contenu qu’un texte qui s’énonceactuellement alors qu’au ministère de l’Education nationale s’affirme la volonté de donner lesmoyens nécessaires au déploiement des activités artistiques, et en particulier à la danse, dansle cadre scolaire.

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III. Une danse chorégraphiée ou « représentative »Dans le cadre épistémologique énoncé in supra il est logique de se demander de quelle

danse va-t-il être question dans cette synthèse ? La « danse » n’est pas en objet en soi ; elle estplurielle, prend des significations sociales-historiques et des orientations esthétiquestotalement différentes selon les lieux de la pratique et selon les pratiquants.

Objet variable par excellence, notre souci ici n’est pas de définir en quelque ligne cequ’est la danse, mais bien d’éviter « le sens commun » consistant à faire « comme si »observer les modes d’apprentissage de la « danse » pouvait être pensé toute chose égale parailleurs. La pratique de danse festive de « caractère » exercée lors d’une fête de village, lapratique d’une danse rituelle, la pratique du bal, la danse contemporaine dans unconservatoire, la danse à l’école, la pratique du hip hop en autodidacte ou au contraire dans uncours de MJC, l’atelier danse d’improvisation, le montage d’un spectacle de danse, etc., sontautant de pratiques différentes qui impliquent des conditions et des modalités d’apprentissagedissemblables.

De fait, les pratiques de danse dont il est question dans les travaux relatés dans cettesynthèse s’inscrivent dans l’histoire du champ chorégraphique. Il s’agit d’activités s’appuyantsur une forme de « danse chorégraphiée » ou « représentative », c’est-à-dire visant lareprésentation et l’expression du corps et comportant une fonction de symbolisation danslaquelle, comme le notre Thierry Tribalat, l’artiste est à la fois objet et sujet de l’activité(Tribalat, sd). La danse chorégraphiée est donc une pratique artistique visant à maîtriser unetechnique du corps en vue, logiquement, de l’inscrire dans une démarche de création et deproduction d’une œuvre ou d’un court « ouvrage » présenté à un public.

Cette pratique ne peut être séparée de l’histoire du champ chorégraphique occidentalqui trouve ses marques à la Renaissance grâce à la formation d’un corps de professionnels (lesmaîtres de danse) qui se sont mis pour certains à écrire sur leur art pour en définir le sensesthétique ou pour le transmettre, pour d’autres à tenter de transcrire le corps dansant et misen scène en inventant des systèmes de codification (Faure, 2001). De fait, les traités de dansequi s’énoncent à la Renaissance jusqu’aux XVIIème-XVIIIème siècles dessinent les premierséléments de structuration d’un « art de la danse » qui n’est pas une danse distractive et festive(ou pas uniquement), mais une danse de représentation sur une scène. Étymologiquement, lanotion de chorégraphie désigne l’art de noter la danse à l'aide de signes symboliques ou decroquis figuratifs. « Chorégraphie est donc synonyme de notation de la danse. »1 Cettedéfinition rejoint celle de l' « orchésographie » fournie au XVIIIe siècle, par le Dictionnaireuniversel d'Antoine Furetière, la chorégraphie apparaissant en tant qu' « art et description dela danse, dont les pas sont notés avec des notes de musique. »2

Historiquement, la danse chorégraphiée est issue d’un travail de décomposition,d’analyses scripturales du corps dansant et de sa mise en scène en vue de composer (etd’écrire au sens propre du terme) des œuvres artistiques. Ce travail de rationalisation estinséparable d’un effort de transmission, en vue d’organiser l’enseignement qui participera dupassage entre la condition amateure et la condition professionnelle des danseurs de balletsentre les XVIIIe et XIXe siècles et qui fournit en même temps des éléments d’autonomisationde l’art chorégraphique par rapport au pouvoir royal. Autrement dit, les traités de danse del’Ancien Régime étaient des ébauches de « pédagogie » de la danse, s’adressant aux jeunesnobles qui voulaient pratiquer la danse. Mais ce n’est qu’avec la création de l’Académieroyale de danse au XVIIIème siècle, que s’ébauche une séparation entre la danse de la cour duroi et la danse professionnelle qui s’introduit dans les théâtres. À partir de là, la danse de

1 Marie-Françoise Christout, « Chorégraphie », Encyclopaedia Universalis, corpus 5, p. 738.2 Dictionnaire universel d'Antoine Furetière, (XVIIIe siècle), Paris, éditions de 1978, cf. « Orchésographie ».

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théâtre va se constituer progressivement en un espace professionnel structuré par des prises depositions esthétiques et philosophiques de plus en plus variées.

La rupture la plus marquante pour notre objet d’étude, et si on adopte un point de vuetrès généraliste, est l’invention de la danse moderne au début du XXe siècle avec l’émergenced’un nouveau rapport au corps, à soi, au mouvement, à la scène, renversant les référencesesthétiques artistiques de l’art chorégraphique, et modifiant fortement les manières deconcevoir l’enseignement de la danse.

Au cours de la genèse du champ chorégraphique, le corps dansant se constitue en« savoirs » se modifiant en fonction des contextes socio-politiques, des normes sociales et desconnaissances scientifiques. Il ne cesse de faire l’objet de discussions, d’analyses,d’affrontements idéologiques (artistiques et pédagogiques). De plus en plus pris pour objet deconnaissance, il devient un « objet » aussi de recherches dans et hors le champchorégraphique.

La danse à l’école qui est aujourd’hui pensée par les didacticiens résultent de ce largeprocessus socio-historique. Elle repose sur des savoirs spécifiques du corps dansant, les« fondamentaux » de la motricité et de la composition scénique, auxquels s’ajoutent desconsidérations psychologiques, dans le sens où cette danse didactisée et scolaire met en jeudes sensations, l’imaginaire des pratiquants, des émotions, etc. Enfin, elle engage dessituations pédagogiques particulières qui interrogent les démarches pédagogiques ordinairesde l’école. Une limite toutefois est à souligner : si la danse à l’école fait l’objet de nombreuxécrits pédagogiques et évidemment didactiques, fort pertinents et de grand intérêt, enrevanche la danse chorégraphiée apprise dans les cours de danse ainsi que la danse à l’écoleest plus rarement impliquée dans des travaux de recherche scientifique, surtout en sciencessociales, un peu plus (en raison des problèmes posées notamment par la motricité) dans lesdomaines de la psychologie.

IV. Présentation du planLa synthèse s’organise autour de trois parties :

— Les modes d’apprentissage de la danse chorégraphiée (hors cadre scolaire).Perspective socio-historique.— La danse à l’école.

— Les perspectives scientifiques de la motricité et de l’incorporation desmouvements de danse.

La première partie se rapporte aux modalités d’apprentissage de la danse dans uneperspective historique et comparative (SYLVIA FAURE). Plus qu’une synthèse (puisquel’histoire des apprentissages en danse reste à faire), il s’agit de rendre compte des travauxsocio-historiques et ethno-historiques de la danse (à partir du XIXe siècle) en distinguant lesmodes dominants d’apprentissage de la danse chorégraphiée et des danses communautaires.Le texte, composé de trois chapitres, travaille donc la question des conditions de la mise enplace de la « pédagogie » en danse (la leçon de danse) d’une part, et des variationspédagogiques en fonction des formes de danse apprises et des modèles de corps qui leur sontassociés, d’autre part. La démarche s’achève sur une comparaison entre des travauxdidactiques et de leurs implications pédagogiques, cognitives et motrices.

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La seconde partie « danse à l’école » se concentre sur les études pédagogiques etdidactiques concernant les pratiques de danse dans les établissements scolaires.

- Un premier texte retrace l’introduction difficile de la danse à l’école et sesenjeux (à partir des années 1950), en étant particulièrement sensible aux contextesidéologiques et politiques. Il se termine par une mise en perspective des résistancesmais également des volontés des enseignants d’aujourd’hui à faire pratiquer la dansepar leurs élèves (SYLVIA FAURE).

- Un second texte à orientation historique est l’analyse, par une didacticiennede la danse, des modèles didactiques de la danse à l’école à partir des années 1970. Ilrend compte des interrelations entre les valeurs et les méthodologies éducatives del’école, les valeurs, objectifs et pratiques des enseignants et les « savoirs » qui setransmettent (ou non) dans la relation maître-élèves (MICHELE COLTICE).

- Un troisième et dernier texte résume les principes, valeurs et enjeuxpédagogiques des didactiques contemporaines de danse en France, en fonction descycles scolaires, et en rappelle les mots clés en adoptant une perspective sociologique(SYLVIA FAURE).

La troisième partie (la plus longue) porte sur les connaissances pluridisciplinairesconcernant les apprentissages et les motricités de la danse. Elle se structure autour de : 1°)deux textes de psychologie cognitive ou comportementale ; 2°) un texte rendant compte detravaux anglo-saxons dans différentes disciplines (psychologie, sciences sociales etdidactique) ; 3°) deux textes s’inscrivant dans une épistémologie sociologique.

- Le premier article propose une synthèse multidimensionnelle concernant lesétudes du développement moteur chez l’enfant (CHRISTINE ASSAÏANTE). L’auteurtraite de deux questions principales concernant le développement moteur : Qu’est cequi se développe ? et comment s’opèrent les changements ? La première questionconduit à identifier ce qui change au cours de l’ontogénèse. Une fois mis en évidenceles changements, apparaît la seconde question qui consiste à savoir sous l’effet dequels facteurs s’opèrent ces transformations.

- Le second texte se rapporte aux travaux de psychologie cognitive et dudéveloppement moteur pour les mouvements de danse (MARIELLE CADOPI). Il vise àpréciser la nature de la motricité « danse » et souligne les problèmes auxquels lesdanseurs sont confrontés. L’auteur rend compte d’une part des théories concernant lamotricité en danse, les modes de mémorisation des mouvements, l’apprentissagesocio-cognitif par observation, et d’autre part de travaux récents relatifs aux processuset aux conditions de réalisation des mouvements dansés, en conditions d’apprentissageet d’improvisation.

- Un troisième texte synthétise un ensemble d’études menées depuis 1985 dansle contexte anglophone, nord-américain, et s’appuyant sur l’apprentissage de la danse(motor control and motor learning), afin de faire ressortir les grands thèmes,méthodologies et retombées scientifiques. Ces études gravitent autour des thématiquessuivantes : l’imagerie mentale ; les stratégies d’apprentissage ; la connaissance desrésultats et le transfert des apprentissages (MADELEINE LORD).

- Un quatrième texte examine les concepts utiles en sociologie pour traiter laquestion des apprentissages en danse, ainsi que de recherches en sciences socialesrelatives à la question de la formation des danseurs. La difficulté est, que dans cesdisciplines, peu d’études existent. Le texte n’est donc pas véritablement une synthèseorganisée autour de textes portant tous sur des problèmes qui s’imposeraient depuisquelques années aux chercheurs, car un tel champ d’études n’existe pas encore. Ils’agit plutôt d’un bilan des savoirs et d’une proposition de construction d’objets de

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recherche peu ou pas explorés avec les outils de la sociologie et de l’anthropologie.(SYLVIA FAURE).

- Cette dernière partie se termine sur un cinquième texte traitant d’une étudesociologique sur l’incorporation des gestes de danse par des professionnels et enconditions de répétition, lors de la construction d’un projet chorégraphique (PIERRE-EMMANUEL SORIGNET). Il s’agit pour l’auteur de présenter une étude de la question dela création et de la créativité en danse.

Enfin, après une conclusion visant à faire déboucher la synthèse sur des perspectives derecherche passant de la pluri- à l’inter- disciplinarité, une bibliographie récapitulative refermele rapport.

* * **

Bibliographie de l’introductionCHRISTOUT, M.-F. « Chorégraphie », Encyclopaedia Universalis, corpus 5, p. 738.

COLTICE, M. (2000) La danse au collège : le modèle de "pratiquant culturé", thèse dedoctorat en sciences de l’éducation, Université Lyon 2.

Dictionnaire universel d'Antoine Furetière, (XVIIIe siècle), Paris, éditions de 1978,« Orchésographie ».

FAURE, S. (2001) Corps, savoir et pouvoir. Sociologie historique du champ chorégraphique,Lyon, PUL.

LAHIRE, B. (1999) Pour une didactique sociologique. Entretien avec Samuel Johsua,Éducation et sociétés. Revue internationale de sociologie de l’éducation, 4, 2 : 39-40.

TRIBALAT, T. (sd) La danse et la leçon – EPS et la mise en activité physique artistique,cours de préparation à l’agrégation EPS, CNED, texte fourni par l’auteur.

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Première partie :

Les modes d’apprentissage de la dansechorégraphiée (hors cadre scolaire).

Perspective socio-historique.

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I.

Sociologie historique et ethno-histoire des formesd’apprentissage de la danse. Une comparaison entre danse

chorégraphiée et danse communautaire

La synthèse des travaux de sociologie historique et d’ethno-histoire de la danseconduit à distinguer deux modes dominants d’apprentissage relatifs à deux formes de danse.Le premier — issu de la logique disciplinaire — relève de la « pédagogie » et concerne ladanse chorégraphiée qui, progressivement, va faire l’objet d’une didactisation et de modesd’apprentissage pédagogiques mais différentiels. Le second renvoie aux modes pratiques etdiffus d’apprentissage par lequel les danseurs n’apprennent pas à danser lors de leçonorganisée, mais s’initient par leur participation directe aux danses communautaires ;l’apprentissage n’est alors pas séparé de leur vie quotidienne et de la place qu’ils occupentdans leur société.

I. La discipline : émergence de la logique pédagogiqueLa sociologie historique de la danse chorégraphiée montre que le mode

d’apprentissage de la danse chorégraphiée s’est organisé au XIXe siècle en prenant modèle surcelui de la « discipline » qui s’est caractérisée par l’élaboration progressive d’unerationalisation des gestes censée remettre en ordre les corps et ainsi les raisons (Faure, 1998).La « discipline » s’est donc développée dans les espaces sociaux où le corps se devait d’êtresocialisé (écoliers), mis au pas (à l’armée) ou au travail, et toujours surveillé (Foucault, 1975).Ce corps discipliné est un corps-machine, un corps cartésien qui ne cesse de s’objectiver avecles progrès scientifiques en anatomie, médecine, physiologie, mais également dans lesnouvelles sciences du mouvement, qui visent à mieux connaître les mécanismes du corps pourle rendre plus efficace pour le sport moderne, et surtout pour les besoins de l’industriecapitaliste en plein essor. Les exercices rationnels qui accompagnent le travail disciplinairedes corps suscitent de cette manière une « manutention pédagogique » efficace des corps(Legendre, 1978). Aussi, au XIXe siècle, l'analyse méticuleuse du mouvement humain d’unepart, et la fixation des conventions gestuelles de la danse classique d’autre part, participent-elles à stabiliser la leçon de danse en soumettant les corps dansants au « vocabulaire »technique enseigné.

La logique de la « discipline » dans l’apprentissage de la danse s’impose lentement parla généralisation de la formation aux enfants. L’Académie royale de danse, au XVIIIe siècle,avait mis en place un système basé sur des leçons destinées aux jeunes adultes s’engageant(ou déjà engagés) dans une voie professionnelle. La création de l’école de l’opéra radicalisecette conception « pédagogique » et disciplinaire de l’apprentissage de la danse, en l’ancrantdans une organisation scolaire de la formation des futurs professionnels de la danseacadémique. Cependant, à la marge de ce modèle d’enseignement, le mode d’apprentissagedisciplinaire en danse a emprunté des chemins inattendus, et encore peu connus, qui sont ceuxde l’armée et des sociétés chorégraphiques, traçant par la même occasion les sillons d’une« pédagogisation » des pratiques de danse dans des lieux et auprès de populations trèséloignés des espaces sociaux où se développe la forme de danse classique (Faure, 1998).

En effet, dans la tradition des académies militaires de l'Ancien Régime, l'armée auXIXe siècle dispensait toujours un enseignement de la danse avec des maîtres qualifiés, pourdes hommes qui souhaitent suivre les cours (Guilcher et Guilcher, 1970). À partir de la

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Révolution française, la pratique de la danse dans l'armée vise à discipliner le corps du soldat(port de tête, agilité et force, marcher en cadence). Le corps est entraîné à partir de sériesd'exercices. Au XVIIIe siècle, la pratique de la danse proposée à l’armée participait d’unepropagande d’incitation à l’engagement militaire, s’accompagnant de la promesse d'unenseignement en mathématique, en écriture et en escrime.

Un siècle après, les ordonnances militaires étudiées par Hélène et Jean-MichelGuilcher prescrivent la danse pour des raisons de santé, en vue de fortifier le corps, etdévelopper l'adresse et l'agilité. Cet enseignement disparaît avec la première guerre mondiale.

D’après ces chercheurs, l'enseignement de la danse à l’armée était organisé en leçonscollectives dispensées par des maîtres possédant un brevet de danse. Pour obtenir son brevet,le candidat devait passer un examen à la caserne, devant un jury composé d'une dizaine demembres (pour la plupart des maîtres militaires). Il leur fallait s'assurer des talents d'inventionet d'exécution ainsi que de la bonne tenue du candidat. Les qualités principales requisesétaient ainsi la force, la souplesse, la grâce (Guilcher et Guilcher, 1970). Ce qui est peut-êtrele plus intéressant est que les maîtres et prévôts de l’armée consignaient leurs leçons dans descahiers. L’apprentissage disciplinaire va donc se distinguer d’une transmission « orale »traditionnelle par un recours à la logique scripturale et la mise en place de l’ébauche d’unedémarche « pédagogique ». Par ailleurs, de nombreux pas sont empruntés au ballet classiqueet réciproquement, la danse de théâtre s'approprie quelques pas militaires ainsi que, depuislongtemps, des pas de danses « traditionnelles ». Dans la danse militaire, les pas sontnombreux et d'exécution difficile, mais les formes générales des danses sont rudimentaires,selon les spécialistes, le parcours rectiligne se limitant aux directions cardinales. Le parcoursfournit un cadre général, volontairement simple, à la présentation de pas complexes. Le butest de valoriser le talent individuel.

Se jouant parfois en intermèdes de bals ou à des noces, les danses militaires serontreprises par les organisations paramilitaires du début du XXe siècle (les bataillons scolairespour les adolescents, les sociétés de tir, les sociétés de gymnastiques pour adultes).

Après leur service militaire, certains maîtres et prévôts ont dispensé leur moded’enseignement dans les pratiques des danses « traditionnelles » ou danses de caractères3.Les ethno-historiens de la danse tendent à montrer que ces maîtres de danse ne transmettaientpas les danses militaires directement, mais les adaptaient en fonction des traditions locales.Toutefois, leur mode d’enseignement reposait toujours sur la discipline, en suivant des leçonsconsignées dans des cahiers, intitulés cahiers de pas ou leçons (Lancelot, 1994). FrancineLancelot fait de telles observations à propos des sociétés de farandole, qui remontent à la findu XVIIIe siècle et existaient encore en nombre dans les premières années du XXe siècle.Leurs objectifs est, là encore, de développer la force physique, mais aussi d’animer la vie descontrées. Invitées dans les fêtes provençales, dans les fêtes de bienfaisance, et dans les foires,les sociétés de farandole faisaient l’objet de concours lors desquels les troupes de danseconcurrentes s'affrontaient.4 Remplaçant fréquemment les concours de lutte dans les foires,ces rencontres de danse témoignaient à leur façon du recul des jeux violents dans cette période(la pratique correspond à l’émergence du sport moderne qui s’inscrit dans le même processussocio-historique du recul de la violence) (Elias et Dunning, 1994). Les gagnants recevaientdes médailles accrochées à un drapeau et rapportées au village. Les critères des juryssemblaient aussi divers que le sans faute, la tenue, l'ensemble, la difficulté technique, laprécision des pas.

3 Yves Guillard estime que le terme « Danses de caractères » reste le plus approprié pou définir les danses desrégions dites « traditionnelles », et existe depuis le XVIIIe siècle. « Etat actuel de la recherche sur les "danses decaractères" dans le domaine français », Ethnologie française, XXVII, 1997, 2, p. 234-245.4 Ces concours concernaient d’autres types de sociétés chorégraphiques et permettaient, d’après Yves Guillard,de « dynamiser cette sociabilité régionale des danses de caractères qui s’éteindra en grande partie avant laguerre de 14-18 », « Etat actuel de la recherche… », art. cit., p. 238.

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D'après les règlements et les témoignages d'anciens danseurs recueillis par FrancineLancelot, il apparaît que les leçons avaient lieu deux à six fois par semaine, le soir (pendantdeux heures environ), seulement en hiver et au printemps. La régularité et la ponctualité desélèves étaient obligatoires (certains maîtres allant jusqu'à faire payer des amendes pour lesabsences). Il était interdit de discuter de politique, de religion et les pratiquants devaient réglerleurs cotisations pour ne pas se retrouver exclus de la société de farandole. Le lieu derépétition était souvent une grange ou une remise, parfois la salle d'un café. Les leçonsdifféraient selon les maîtres, cependant elles avaient certains points communs relevant d'uneorganisation pédagogique et d'une logique scripturale : l'ordre des leçons obéissait à uneprogression pédagogique ; la terminologie des pas était homogène d'une société de farandole àune autre ; les temps étaient indiqués (temps du mouvement comptés également pendantl'exécution). Certains maîtres, comme Thomas Rouquette (cultivateur, farandoleur à Sernhac,né en 1882 et décédé en 1953 ; ses cahiers datent de 1898-1900), indiquaient dans leurs notesdes principes à rappeler aux danseurs : se tenir droit et regarder en face, danser sur la cime despieds, tenir la pointe des pieds allongée, assembler à droite ou à gauche, bien marquer lesappels, bien cadencer. Les leçons notées dans les cahiers n'explicitaient cependant pas les« règles » de conduite mais étaient des sortes de pense-bêtes pratiques organisant la leçon.

Par conséquent, dans les sociétés de farandole ou même à l'armée, l'enseignement de ladanse emprunte plusieurs traits à la forme scolaire et rappelle l’organisation du sportmoderne : l'organisation pédagogique des leçons, les diplômes (pour devenir maître ouprévôt), les prix qui sanctionnent un « niveau d’expertise », la compétition, le programme quesuivent les maîtres (les cahiers de pas et de leçons), un lieu et un temps relativement séparésdes autres activités (même si la pratique de la danse emprunte les espaces du quotidien).Toutefois, ce mode d’enseignement « disciplinaire » diverge du mode scolaire desocialisation, dans le sens où la formation n’est pas continue et ne concernent pas lasocialisation des enfants.5

II. Les modes traditionnels/pratiques de transmission de la danseLes danses de caractères restent dominées par un mode de transmission « pratique »,

s’apprenant par imprégnation directe, en imitant les autres et en étant immergé dans lessituations où les savoir-faire ont leur utilité. Apprendre de manière pratique signifie se mettredans des conditions d’effectuation directe, un peu comme le dit le dicton populaire : c’est enforgeant que l’on devient forgeron. Les individus acquièrent, avant toute chose, desdispositions corporelles et mentales nécessaires pour travailler ou pour danser.L'apprentissage est diffus, imitatif, et les individus n’ont pas nécessairement le sentimentd’être en situation d'apprentissage. En effet, en dehors des sociétés chorégraphiques, il n’y apas de professeur pour apprendre à danser (Guillard, 1994). Il s'agit pour les danseurs des'initier à une technique, par familiarisation progressive avec les pas et l’organisation de ladanse (Delbos et Jorion, 1984). Alkis Raftis se réfère à ce type d'apprentissage quand il étudieles danses traditionnelles grecques. La danse ici n’est pas nécessairement chorégraphiée dansle sens où un chorégraphe organise l’ensemble, détermine les rôles de chacun en vue d’unspectacle sur une scène. Il n’en reste pas moins que la danse est structurée par unecodification non savante, pratique. Les manifestations ne sont pas situées en dehors de lacommunauté. Les danses sont fortement liées aux lieux géographiques et aux différentesoccasions de danser (mariage, fêtes religieuses, etc.). Chaque région possède sa (ou ses)

5 Jean-Manuel de Queiroz précise que la pédagogie s'invente avec l'enfance et devient une relation quis'autonomise progressivement, Jean-Manuel de Queiroz, L'Ecole et ses sociologies, Nathan, Paris, 1995. PourPhilippe Ariès, à partir de la fin du XVIIe siècle, l'école remplace l'apprentissage comme moyen d'éducation.« Cela veut dire que l'enfant a cessé d'être mélangé aux adultes et d'apprendre la vie directement à leur contact »,Philippe Ariès, L'Enfant et la vie familiale sous l'Ancien Régime, Seuil, Paris, 1973, p. 7.

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danse (s). Les individus n'apprennent pas à danser par des exercices préparatoires commedans l’organisation pédagogique de la danse académique. Au contraire, le temps de la pratiqueest confondu avec le temps de l'apprentissage et n’est pas séparée de la vie sociale etculturelle ordinaire (Raftis, 1986-87).

Espace de sociabilité6, la pratique régulière de la danse permet, avec les autrespratiques culturelles et symboliques du groupe social, de rappeler la place de chacun dans lacommunauté. Ainsi, la pratique diffère selon l’âge et le rang social de l’exécutant. Le noviceintègre, avec son rôle dans la ronde, une division sociale du pouvoir et donc une place dans lemonde social auquel il appartient. La situation d'apprentissage pratique engage donc unrapport au monde en transmettant à l’apprenant des valeurs liées à une division du travail, desrôles et pouvoirs (Chamoux, 1991). Est ainsi incorporé un ensemble de savoir-faireindissociables de rapports de domination et de positionnements sociaux. Dans ce sens, ladanse grecque traditionnelle observée par Alkis Raftis est une « mise en scène de la conditionsociale du village » réglée collectivement et fortement ritualisée (Raftis, 1986-87). Chacunsait ce qu'il a à faire. Il l’a appris en ayant toujours les mêmes personnes à côté de lui : autantque des pas, il a acquis sa place dans la ronde ouverte ; et s'il ne s’y soumet pas, il estréprimandé.

Contrairement à une forme de danse façonnée par la logique scolaire et scripturale(comme nous le verrons avec la forme de danse classique), les danses de caractères n’ontqu’une très relative stabilité. Jean-Michel Guilcher souligne que les danses revêtent desaspects nouveaux au cours de la vie du danseur (parce qu'il ne peut pas l'effectuer toujours dela même façon). Réappropriées par les générations successives, elles se transforment enprenant des significations différentes en étant pratiquées dans des contextes sociaux et lorsd’événements dont le sens s’est aussi modifié au fil du temps (Guilcher, 1971). Par ailleurs,les danses traditionnelles n'ont pas (ou très peu) d'autonomie par rapport à la musique.Fréquemment, le musicien est aussi danseur, portant en lui, la musique et l’agencement desmouvements comme deux aspects d'une même réalité. Jean-Michel Guilcher précise que lestyle prédomine par rapport à la forme quand celle-ci est simple. Le style caractérise lapersonnalité de l'exécutant, qui donne ainsi une « qualité » particulière aux mouvements de ladanse. Cet aspect expressif et individualisé de la danse diminue au fur et à mesure ques'accroissent l'importance et la complexité des déplacements collectifs (les figures collectives,les chaînes, les rondes...).

La plupart des danses de caractères se perpétuent grâce à une mise en pratique dans lavie quotidienne. Mettant en présence des individus, l’apprentissage pratique s’appuie sur despratiques langagières variées mais peu explicatives, comme des conseils, des marqueursd'action, le « jargon » propre à la danse, des jugements de valeur associés aux démonstrations.Par conséquent, concernant le vocabulaire des farandoles populaires, Francine Lancelotobserve qu'il n'existe pas de descriptions de pas organisés ; les verbes utilisés sont, pour laplupart, des verbes d'action « courir », « sauter », « se croiser », « tourner », parfois liés à desnoms de pas de la danse chorégraphiée des théâtres (comme « entrechats », « battus »)(Lancelot, 1973). Apprendre la danse revient donc à s'initier à son jargon spécifique. Latradition orale intègre toutefois des termes communs à différentes danses, notamment auxdanses traditionnelles et à la danse académique ; cependant, ils ne décrivent pas toujours lesmêmes schèmes moteurs parce que le contexte où ils sont effectués n’est pas identique d’unedanse à l’autre. Francine Lancelot a fait une description fine de ces liens entre termes etschèmes moteurs en suivant une démarche méthodologique complexe appelée la« choréologie ». Cette méthode consiste à analyser le matériau des danses (les pas, lesdéplacements...) en confrontant les systèmes de notation à l'observation de différentes danses.

6 Et non espace de socialisation séparé de la vie quotidienne comme c’est le cas avec l’école de danse.

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Les descriptions des ethno-historiens des danses de caractères et des danseschorégraphiées tendent à mettre en relief la sensibilité extéroceptive (le toucher, l'écoute, lavue) engagée dans l’apprendre d’une part, et des procédures langagières descriptives et peuanalytiques édictées par l’enseignant d’autre part. Dans ce contexte, le corps est censéapprendre par voir-faire, par l'écoute. Toutefois, dépendants des caractéristiques de lasituation où ils sont mis en œuvre, les savoirs du corps mettent également en jeu desmodalités cognitives plus ignorées par les ethno-historiens de la danse que les modalitéscorporelles et pratiques d’apprentissage plus fréquemment analysées en étant isolées de la« cognition ».

III. Le mode scolaire de transmission de la danse ou le modèle de la« pédagogie »

Contrairement aux modes « traditionnels » de transmission de la danse, la « formescolaire de socialisation » conduit à rassembler les écoliers par classes d'âge, en présence d'unmaître, dans des lieux spécifiques séparés des endroits où s'exercent les autres activités de lavie quotidienne. Ainsi, l’école tend à modeler les attitudes et les habitudes de l'élève endispensant une éducation morale, tout en suivant un programme assurant l'acquisition deconnaissances. L'organisation scolaire empêche l'élève « d'aller librement », s'appuyant sur unmode spécifique d'exercice du pouvoir qui instaure la soumission à des règles impersonnellesparce qu’elles ne sont pas inventées par le maître. Ces règles se fondent sur la bonne tenue, lesilence, le respect des horaires (Vincent, 1980).

La forme scolaire s’est constituée entre le XVIIe et le XIXe siècles. Issue de latransformation de l'exercice des pouvoirs civils et religieux et de l'instauration d'un nouvelordre social urbain, elle ne caractérise non seulement un mode de transmission des savoirs quise déroule dans un espace et un temps spécifique (la classe), mais par le projet de former lesêtres sociaux (socialisation). La forme scolaire — comme mode de socialisation relativementindépendante par rapport aux autres formes de relations sociales — est donc une forme inédited'apprentissage qui s'oppose à l'apprendre par « voir-faire et ouï-dire », et donc àl’apprentissage pratique. Avant le XIXe siècle, l'éducation pour la majorité des individus(laboureurs, artisans ou gentilshommes...) se déroulait en dehors de l'école, dansl'apprentissage d'un métier. Progressivement, l'école s'ouvre à des finalités professionnelles.Entre les XVIe et XVIIIe siècles, la ligne de partage entre école et éducation hors de l'école,favorable d'abord à la seconde, se renverse, marquant les « conquêtes de la forme scolaire auxdépends des modes anciens de l'apprentissage. »(Chartier, Compère, Julia, 1976 : 293). Elleva peu à peu conquérir les modes d’apprentissage de la danse chorégraphiée.

En 1713, l'Opéra ayant reçu le statut d'institution d'Etat et d'expression de la culturefrançaise, prévoit la création d'une troupe permanente de vingt danseurs (dix garçons et dixfilles) ainsi que d'une école de danse, une école de musique pour les chanteurs et une autrepour les instruments. La précédente Académie Royale de Danse avait réuni les conditionsnécessaires pour doter les danseurs d'un niveau professionnel (Guest, 1976). Mais ce n'estqu'au XVIIIe siècle que l'école de danse des Magasins est créée, prenant l'allure d'une écoleprofessionnelle. Elle a d’abord pour objectif de perfectionner les danseurs qui ont déjà unemploi. En s’ouvrant en 1779 aux enfants de moins de 12 ans7, l’école de danse instaure unnouveau rapport à l'apprentissage. Ce dernier s’organise en leçons collectives (qui n'exclut pasles cours particuliers) et suit un programme défini, tandis que les études sont sanctionnées pardes examens réguliers. Les élèves trouvent un débouché professionnel dans des théâtres ou,pour les meilleurs d’entre eux, au sein du Ballet de l'Opéra (Corday, 1953).

7 Archives nationales, Danseurs et ballet de l'Opéra de Paris depuis 1671, 1988, p. 73.

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La première partie du XIXe siècle constitue un bouleversement dans l'organisation del'Ecole et de l'Opéra. En 1805, l'école est placée sous l'autorité du Premier Maître des Ballets,qui en prend la responsabilité administrative et pédagogique. Avec le premier responsable,Pierre Gardel, la formation des danseurs passe désormais par un enseignement rationalisé etcollectif, tandis que la fin des études est sanctionnée par un certificat de capacité. Lesprofesseurs semblent malmener les enfants et ne former que très peu de danseurs brillants.Les documents de l'Opéra mentionnent que de longues répétitions sont imposées aux enfants ;il arrive qu'ils soient battus.8 D'abord ouverte aux enfants pauvres (à cause de la gratuité del'école), l'enseignement à l'Opéra de Paris se concentre rapidement sur la formation desenfants de la bourgeoisie pour laquelle la danse va devenir une pratique socialementdistinctive. Les élèves sont sélectionnés avant d'entrer dans l'école, puis chaque trimestre, lorsd’examens qui décident de leur maintien dans l'école ou de leur renvoi. Un document écrit parun ancien premier danseur, Deshayes, datant de 1822 témoigne du souci de sélection et decompétition qui s’établit dans un tel contexte « scolaire ».9 Il pense qu’un contratd’engagement devrait être passé avec les élèves afin que l’Etat qui subventionne l’Opérapuisse retirer un bénéfice symbolique de ses « sacrifices. »10 La formation envisager d'intégrerun enseignement général qui sera rendu obligatoire par la loi de 1882 de Jules Ferry, mais quel'Opéra ne respectera guère jusqu’en 1919.

Dans sa thèse, Maya Selim Said Shaddad montre que la pratique de la danse à l'Opéraau XIXe siècle repose essentiellement sur une méthode analytique qui fait de la danse un artdu placement, de l'équilibre et de la symétrie (Said Shaddad, 1989). Les exercices sont répétésafin que les mouvements soient effectués par l'alternance, symétriquement en dosant lescontraintes musculaires. À la fin du XIXe siècle deux styles de pédagogie se confrontent :d'une part, le style français, pour qui le perfectionnement ne doit pas engendrer unemécanisation des gestes mais privilégier l'expression (les préceptes du maître de danseGeorges Noverre sont ici respectés) ; d'autre part, le style italien, qui a le goût de la virtuositéconstruite à partir de séries d'exercices et liée à l'acquisition d'une technique spectaculaire.Cette dernière privilégie la danse masculine, qui est orientée sur les tours, les sauts variés etnombreux et sur un placement correct, la « propreté » du mouvement, le « moelleux » despliés. La technique féminine porte sur l'équilibre (l'aplomb), l'importance du « cou-de-pied »(à cause des pointes), et sur la pantomime (Jacq-Mioche, 1994). L'utilisation d’enginsfavorisant le redressement du corps semble répandue. Toutefois, elle n'est pas spécifique àl'école de l'Opéra. Plus généralement elle participe de la thérapie corporelle de l’époque(Vigarello 1978 ; Jacq-Mioche, 1994).

La formation du danseur professionnel au XIXe siècle ne se déroule pas uniquement àl'école du Ballet de l'Opéra. Des cours privés perfectionnent les danseurs venus de différentsthéâtres. A Paris, le cours le plus réputé est celui de Jean-François Coulon, qui travaille enétroite collaboration avec l'Opéra de Paris. Il a eu pour élève Philippe Taglioni et sa filleMarie, célèbre danseuse romantique. Un autre cours privé réputé est celui de Vestris, quidonne des leçons particulières dans les locaux de l'école du Ballet de l'Opéra. Il attire nombrede danseurs et de spectateurs extérieurs à l'institution, dont Auguste Bournonville (1805-1879) qui a laissé des traces écrites des leçons qu'il a reçues du maître. Auguste Bournonvillefait ses études à l'Opéra du Danemark, puis vient en France en 1824 pour se perfectionner à

8 Ecole du ballet de L'Opéra de Paris, Opéra de Paris, 1993, p. 6.9 Deshayes, Idées générales sur l'Académie Royale de Musique et plus Spécialement sur la danse, chez Mongie,Paris, 1822. Cf. p. 13-14.10 « Il serait bien nécessaire, pour que le Gouvernement eût un résultat avantageux des sacrifices qu'il fait pourles écoles, que chaque élève contractât un engagement de tant d'années pour qu'il ne pût disposer de son talentqu'au bénéfice de nos Théâtres, et payer, par cet acte de reconnaissance, sa dette à son pays », Deshayes, Idéesgénérales sur l'Académie Royale..., op. cit., p. 15.

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l'Opéra de Paris ; il y reste jusqu'en 1829, assistant aux leçons de Vestris.11 Son témoignageest l’un des rares conservés par écrit qui permettent de saisir quelques traits de l’organisationpédagogique de la danse balbutiante à l’Opéra de Paris, à cette époque.

Le pédagogue italien Blasis avait d’ailleurs tenté de fixer les principes pédagogiquesde la danse classique. Son système reposait sur la logique et sur la démonstration desprincipes qui doivent guider le danseur. Il a ainsi créé des séries d'exercices qui visent uneprogression régulière de l'élève. Soucieux du fonctionnement du corps qu’il perçoit comme unensemble de rouages, il compose des figures et des attitudes géométriques, qu'il dessine afinde fournir aux élèves des modèles pouvant être copiés.12 Le traité est également un plaidoyerpour l'autonomie de la danse par rapport au grand public. Si la danse est, selon lui, naturelle àl'homme, il n'en reste pas moins qu'elle est un art difficile, qui nécessite une formation danslaquelle le corps dansant est travaillé selon des principes cartésiens. Ainsi, l'ensemble desrègles de la danse qui composent les pas, les positions et les mouvements, peut être ramené àun abécédaire « composé de lignes droites pour toutes les positions de leurs membres,donnant à ces lignes et à leurs combinaisons respectives, les dénominations adoptées par lesgéomètres, savoir de perpendiculaires, d'horizontales, d'obliques, d'angles droits, aigus, obtus,etc. »13

Les savoir-faire de la danse sont désormais lus en tant que savoirs objectivés,obéissant à une logique scripturale et dont le mode de transmission est proche de la formescolaire. En effet, les savoir-faire s’acquièrent à partir d'exercices pratiques, mais aussi demanière plus abstraite, grâce à l'étude de figures dessinées par le maître. Ces figurescomposent ainsi un vocabulaire relativement stable qui sert de modèle aux élèves, parce qu’ilspeuvent les reproduire par écrit afin de mieux saisir ce que le maître tente de leur expliquer demanière pratique (Faure, 1998). La danse comme savoir objectivé par des signes (lescodifications de la danse), codifié, institué en grammaire corporelle, peut dorénavants'apprendre par la copie, au sens propre puisque Carlo Blasis conseille aux élèves de dessinerles figures, et au sens figuré comme imitation de modèles. Carlo Blasis recommande doncd'étudier l'art du dessin et de s'identifier aux sculptures et peintures. Le conseil pédagogiqueincite à s'approprier les savoir-faire à travers cette double modalité : en travaillant la positionou la figure instituée en modèle à reproduire avec le plus d'exactitude possible, et en lamémorisant de façon plus théorique, par une lecture des figures dessinées par le maître.

Le principe d’imitation exige que le maître soit un excellent danseur et qu’il sacheassurer la qualité et la précision des leçons. Avant d'être accepté dans l'école, l'élève passe unexamen morphologique. L'âge idéal pour débuter la danse est fixé à 8 ans, car l'élève est dèslors en mesure de comprendre les démonstrations, tandis que le maître peut évaluer avecjustesse ses capacités physiques. L’enseignement de Blasis est progressif et conduit auperfectionnement en suivant une logique scientifique de l'effort, du progrès et de l'évolutiondu corps de l'élève. La leçon se termine par les pirouettes, des temps à terre et des temps devigueur et par l'apprentissage de l'expression dans des exercices d'interprétation. Le maîtredemande aux élèves de suivre des leçons régulièrement, de ne pas rester vingt-quatre heuressans s'exercer, de travailler sans cesse pour acquérir du talent, car les « dons de la nature » nesuffisent pas à devenir danseur. Une fois formés, ils devront s’entraîner sans relâche. Il leurconseille enfin de s'exercer à l’improvisation, afin de développer leur imagination (inventerdes pas) et pour habituer l'oreille à saisir le rythme de la musique.

11 Auguste Bournonville, Lettres à la Maison de son enfance (1824-1829), publiées dans la revue DanseConservatoire du n° 40 au N° 61.12 Carlo Blasis, Traité élémentaire, théorique et pratique de l'art de la danse, chez Joseph Beati et AntoineTerenti, Milan, 1820.13 Carlo Blasis, Traité élémentaire..., op. cit., p. 16.

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Pour conclure ce chapitre, nous remarquons qu’en France, l'organisation pédagogiquede l'apprentissage de la danse chorégraphiée professionnelle au XIXe et au début du XXe

siècles s’appuie sur une forme de danse tramée par l’écriture et réunit un ensemble de savoirscorporels objectivés, codifiés. Elle se double d'une organisation rationalisée de l'enseignementbasé sur la décomposition des mouvements en positions, en figures qui, avant d'êtreenchaînées et donc véritablement dansées, font l'objet d'exercices répétitifs visant à modeler lecorps. Dans les espaces de formation les plus légitimes de la danse classique (l’école del’Opéra de Paris, les Opéras régionaux et nationaux d’autres pays), ce mode d’organisation del’apprentissage tend vers une relative homogénéisation de l'enseignement, parce qu’ellepermet de contrôler les maîtres ainsi que la progression des élèves. Ainsi, dans son traité,Saint-Léon (premier maître de ballet de l'Opéra de Paris et professeur de l'école deperfectionnement) a le souci d’établir les règles d'une « véritable école de danse »14, au seinde laquelle il préconise une jonction entre pratique et analyse (théorie) du mouvement et desmoyens d’apprentissage.

Cependant, ce mode d’apprentissage quasi-scolaire n’exclut pas les autres types deformation, plus « pratiques », moins « pédagogiques ». Ainsi, dans les cours privés (souventinstallés dans des studios souvent insalubres), les maîtres de danse dispensent unenseignement aux danseurs professionnels (ou en voie de professionnalisation) qui passentd'un cours à un autre, en privilégiant souvent un professeur (Christout, 1997). Il s'agitd'apprendre auprès d'eux les rôles du répertoire qu’ils vont interpréter. On vient donc chez unmaître particulier pour se perfectionner, moins pour apprendre les bases. Les professeurs sontfrançais, italiens ou russes (très nombreux à Paris après la révolution bolchevique). Au débutdu XXe siècle, la demande de formation est d’autant plus grande que des compagnies privéesde danse se créent grâce au marché émergeant soutenu par le mécénat.

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

Bibliographie du premier chapitre

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CHAMOUX, M.-N. (1991) Les savoir-faire techniques et leur appropriation : le cas desNahuas du Mexique, L'Homme, XXI (3) : 71-94.

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CORDEY, J. (1953) L'Académie Royale de Danse (1661-1778), Bulletin de la Société del'Histoire de l'Art français, p. 177-185.

DE QUEIROZ, J.-M. (1995) L'Ecole et ses sociologies, Paris, Nathan, col. 128.

14 Michel Saint-Léon, De l'état de la danse, typographie du Progresso, Lisbonne, avril 1856, 19 pages.

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DESHAYES, (1822) Idées générales sur l'Académie Royale de Musique et plus Spécialementsur la danse, Paris, chez Mongie.

DETIENNE, M., VERNANT, J.-P. (1974) Les Ruses de l'intelligence. La Métis des grecs,Paris, Flammarion.

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FAURE, S. (1998) Les Processus d’incorporation et d’appropriation du métier de danseur,thèse de doctorat en sociologie, Université Lumière Lyon 2.

FOUCAULT, M. (1975) Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard.

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GUILCHER, J.-M. Aspects et problèmes de la danse populaire traditionnelle, Ethnologiefrançaise, 2 : 7-48.

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II.

La rupture avec le modèle de transmissiondisciplinaire de la danse : la danse moderne au XXe siècle

Dans ce chapitre nous proposons d’explorer les conditions socio-historiques de ruptureavec l’académisme et la genèse d’une nouvelle danse, dite « moderne » qui donnera lieu à ladanse contemporaine. Les questionnements, les propositions pédagogiques ainsi que lesprincipes du corps en mouvement que les précurseurs de la danse contemporaine ont tenté dejustifier et de mettre en pratique ont très largement influencé la pensée et la pratique despédagogues contemporains de la danse ; les didactiques de la danse à l’école qui nousintéressent plus particulièrement dans cette synthèse en sont parfois de fidèles héritières. C’estla raison pour laquelle nous allons nous attacher, en premier lieu, à décrire le contexte (social,pédagogique, artistique) de ces précurseurs de la pédagogie moderne en danse. En secondlieu, nous nous intéresserons au développement de la danse contemporaine en France. Entroisième lieu, nous analyserons les principes de démarches didactiques ainsi que leursimplications pédagogiques, cognitives et motrices.

I. Les précurseursDans les premières décennies du XXe siècle, la forme de danse classique va se trouver

concurrencée par une forme de danse émergeante, reposant sur une autre culture du corps : ladanse moderne, dont est issue la danse contemporaine. Tandis que la danse académiques’organise en exercices formels, suivant une logique cartésienne du mouvement et sur labiomécanique, ceux de la danse moderne valorisent au contraire un travail du corps noncompétitif, non mécanique, et expressif. La danse moderne refuse les codes en privilégiantl’idée selon laquelle les gestes de danse se « construisent » à partir de la « singularité » dechacun. Un effort important d'analyse et de réflexion théorique trame son élaborationtechnique et pédagogique. Répondant à un principe de créativité, d'invention, d’expression desoi, sensibles aux connaissances nouvelles sur la psychologie et le mouvement, les initiateursde la danse moderne sont ainsi des pédagogues soucieux de transmettre leur nouvelleconception du mouvement en se référant aux connaissances du mouvement de leurs époques.Ces artistes pédagogues ont parfois consigné leurs idées dans des ouvrages ; d'autres les onttransmises à leurs élèves, qui à leur tour en ont témoignées. Quelques-uns ont élaboré leurpropre théorie de la danse (comme Rudolf von Laban, Doris Humphrey...).

- Un corps « naturel » en rupture avec le corps formel de la danse classiqueLes principes des danses « libres » de Mary Wigman et d’Isadora Duncan se

présentent en tant qu'antithèse des schèmes corporels constitués par l'académisme. IsadoraDuncan, dans ses mémoires, critique vivement la danse académique et la corporéité de ladanseuse classique. Retraçant sa rencontre avec Anna Pavlova à Saint-Pétersbourg, elle ditavoir observé que les mouvements du corps et ceux de l'âme de la danse académiquesemblaient séparés à cause de la discipline musculaire que lui imposait son maître ; le corpsde la danseuse lui paraissait d'acier, et les traits du visage tirés comme celui d'une martyre.Les petites élèves des cours classiques sont également comparées à de petites martyres(Duncan, 1932). Tout oppose l'académisme à l'art de la danse selon elle, et le ballet estconsidéré comme l'ennemi de la « nature ». Comme Duncan, Mary Wigman rejette dans ses

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écrits la danse académique, l'estimant conventionnelle, dépassée. Le ballet classique marquelà encore la fin de l'art de la virtuosité basé sur l'automatisme.

En revanche, si toutes deux réprouvent vivement les principes de la gymnastiquehygiéniste (trop basée sur la compétition et sur des exercices formels), leur rapport au corps(féminin) n'est pas sans lien avec le développement de la gymnastique rythmique, reposant surl'expression et le mouvement, exaltant la dynamique et la fluidité des mouvements et quis'était développée entre le XIXe et début du XXe siècles (Laty, 1996). Le modèle de corps dela nouvelle danse se veut en rupture avec l'académisme (esthétique, politique et de dominationmasculine) et expressif. Il n’est pas au service d’un répertoire de figures préétablies.

- Un corps expressifLa danse moderne expressionniste allemande a eu pour chef de file Rudolf von Laban

qui a fortement théorisé sa conception du corps en mouvement, ainsi que Mary Wigman quis'est beaucoup questionnée sur l'enseignement, mais n'a pas écrit de méthode, fournissantseulement quelques conseils pédagogiques. Ces derniers recommandent aux enseignants deconnaître la « nature humaine » et le « type de croissance du jeune être humain », ainsi quel'analyse du mouvement et son contrôle (connaissances lui venant de Laban). Il s'agitégalement de transmettre des valeurs, c’est-à-dire le goût de l'effort dans le travail, de laconcentration et de la persévérance (Wigman, éd. de 1986). Wigman a ouvert plusieursécoles, son enseignement étant ainsi diffusé aux Etats-Unis et en France par quelques-uns deses disciples. Parce que, pour elle, la forme provient de « la nécessité intérieure », MaryWigman concevait l'enseignement de la danse non comme une imitation du maître, maiscomme la transmission d'outils agissant sur la sensibilité et favorisant ainsi le développementde la personnalité de l'élève.

- Une éducation complèteVenue des Etats-Unis, Isadora Duncan a voulu réunir des enfants de toutes les

nationalités dans de grandes écoles, dont la première, créé en 1905, se situe en Allemagne, àla villa Grünewald. Les élèves devaient se lever à 6 heures et demie le matin, faire quelquesexercices d'assouplissement à l'air libre ou dans la salle de danse. Plus tard dans la matinée, ilssuivaient leurs cours d'enseignement général, des leçons de musique, des exercicesd'élocution, de chant, de peinture et de céramique. Les cours de danse proprement dits avaientlieu deux après-midi par semaine (Swanson, 1983).

Une de ses anciennes élèves estime qu’Isadora Duncan a écrit 500 exercices pour sesélèves, des mouvements les plus simples aux plus compliqués, cependant les carnets n'ont pasété retrouvés. Son enseignement s'inspirait de la gymnastique libre15, censée renforcer « lesforces vitales » et mener à « l'épanouissement intégral » de la personne. Les exercices degymnastique ne sont que des moyens, non la finalité de l'enseignement de la danse deDuncan. Ils servent à faire du corps un « instrument aussi parfait que possible pourl'expression de cette harmonie qui, évoluant et changeant à travers les choses, est prête àpénétrer à flots dans l'être qui y est préparé. » (Duncan, 1932). Pour Isadora Duncan,l'importance était portée sur l'expression par le mouvement, dans la nature. Par exemple, lesélèves étaient conviés à observer la « qualité » des mouvements de la nature (balancement desfeuilles, vols des oiseaux...), l'éprouver en « leur âme », et la reproduire avec leurs propresmouvements corporels.

15 De nombreux traités pédagogiques paraissent entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, portantnotamment sur la gymnastique pour femmes et enfants, comme ceux de Demeny en 1911, ou celui de GeorgesHébert dont la méthode date de 1920.

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Mais il revient à l’école américaine, notamment aux artistes issus de la Denishawnschool, d’avoir fourni les bases techniques et pédagogiques de la danse moderne.L’enseignement de la danse s’ouvre ici encore sur d’autres acquisitions : connaissances enanatomie, en musique, tout en dispensant un enseignement général aux élèves. D’ailleurs, laformation en danse aux Etats-Unis va dès les premières années du XXe siècle dépendre desuniversités. Enfin, la Denishawn school n’est pas centrée sur la danse moderne mais dispenseaux danseurs des enseignements en danses folkloriques et primitives. Les idées du théoriciende l’expression du mouvement, François Delsarte, sont réappropriées dans l’école parl’intermédiaire de son co-fondateur Ted Shawn (Porte, 1991). La danse moderne américaines’organise, globalement, autour de quatre paramètres fondamentaux : l’énergie, l’espace, lerythme et la forme (Midol, 1982). Chaque artiste construit ou fait son « expérience » en usantde ces paramètres et en fonction de sa vision du monde, du corps et de la danse. Ainsi, DorisHumphrey ancre sa danse dans une philosophie selon laquelle la danse, comme la vie, est unelutte entre deux morts (l’immobilité d’avant la naissance et celle de la mort) ; le mouvementlui-même n’est jamais en constant équilibre mais résulte d’une tension entre équilibre etdéséquilibre. Cela se traduit par des chutes qui alternent avec des mouvements verticaux. Lesdanseurs jouent avec ces différents états du corps : chutes, suspensions, rebonds, balancés,tours, élévations. La respiration est essentielle pour le dynamisme du mouvement. Ceséléments sont créateurs de formes structurées et cohérentes et répondent à la « fonctiond’expressivité » (Robinson, 1990), qui se font parfois en groupe où les corps se mêlent à partird’une énergie traversant les corps l’un après l’autre et donnant des effets de vagues,d’ondulation.

La contemporaine de Doris Humphrey, Martha Graham — figure emblématique de ladanse contemporaine pour beaucoup de critiques de danse —fonde son art sur des principesextrêmement formels. D’après Nancy Midol, elle reprend et développe un principe central del’école dont elle est aussi issue, la Denishawn School, qui est la « maîtrise de l’énergieintérieure » (enseignée par Ruth St-Denis inspirée des philosophies et danses orientales)(Midol, 1982) : il s’agit de contrôler les impulsions vitales (situées dans le ventre et le bassin)et de produire des flux d’énergie qui sont sources de mouvements ondulatoires ; la maîtrise dela respiration est indispensable dans ce travail car elle dirige l’énergie. Martha Grahamformalise ces principes sous la notion de tension-release (alternance entre contraction desmuscles et relâchement de l’énergie musculaire en s’aidant de l’inspire et de l’expire). Lachorégraphe reprend également des idées de Delsarte estimant que la force du geste provientde la force du sentiment ou de l’âme. Le mouvement expressif de Graham n’est donc pasharmonieux comme en danse classique ; il est fait de convulsions, de blocages brutaux,d’arrêts, de suspensions, etc., et est ancré dans le sol (Ginot et Michel, 1995).

La danse moderne américaine a engendré une multitude de démarcheschorégraphiques, dont certaines se constituent en « pédagogie » explicite de la danse, dans unchamp de la danse qui, dans la dernière moitié du XXe siècle, ne cesse de s’accroître. Il seraitlaborieux de les décrire. Nous terminerons ce paragraphe en notant que la danse moderne amodifié les modes d’appréhension de la danse en ouvrant le chemin à l’instauration d’unvéritable espace artistique, riche en perspectives pédagogiques innovantes portant sur letravail du corps en mouvement.

- Influence de l'éducation physique sur la pédagogie de la danse modernefrançaiseL'enseignement de la danse moderne s'est élaboré en lien avec les idéologies

concernant l'éducation physique. Les organismes chargés de dispenser cette éducationphysique avaient en commun la recherche de « l'authenticité », de « l'épanouissement », durespect de la « nature », d'autrui et la créativité (Robinson, 1990). Il s'agissait de retrouver une

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harmonie (individuelle et collective), de redécouvrir les valeurs de l'effort. Dans les contextespédagogiques, la danse était donc reconnue en tant qu'activité physique ou techniqued'expression, bien avant de l’être comme un art chorégraphique à part entière (Midol, 1982).

En France, Irène Popard (1894-1950), professeur d'éducation physique, a créé uneméthode destinée aux femmes, la « gymnastique harmonique » qui n’est pas sans incidencesur certaines pédagogies actuelles de la danse contemporaine. Ouvrant une école en 1916, ellea poursuivi l'objectif de développer « charme et santé », c'est-à-dire le charme corporel dansun esprit et un corps sains, en évitant toute forme de compétitivité et de brutalité. Elle resteainsi très fidèle aux stéréotypes sociaux et sexuels de son époque. Son programmepédagogique est cependant fortement empreint des idées de Jacques-Dalcroze (qui lui-même aété séduit par les idées d'Isadora Duncan). Elle a également été l'élève de Demeny quiconsidérait la gymnastique comme un art fondé sur la science du mouvement, sans effortsmusculaires brutaux, mais privilégiant davantage l'effort continu, en effectuant desmouvements complets allant dans toutes les directions et exécutés avec souplesse.Poursuivant cette idée, Irène Popard a recherché « l'harmonie » du mouvement, pas seulementindividuel, mais aussi en créant des mouvements de groupes comme cela était un peu la« mode » dans la période d’avant la deuxième guerre mondiale (von Laban et Wigman, enAllemagne, avaient fait de même). La méthode de Popard appelée aujourd’hui « gymnastiqueharmonique d'expression, de rythme et de danse » repose sur une gestuelle faite de spirales, decourbes ; il n'y a pas d'arrêt (le mouvement est continu). Tout le corps participe à l'action et larespiration est consciemment utilisée. Certains mouvements sont rapides, assurés, effectuésdans le relâchement musculaire (le geste se déroule alors sans effort grâce à l'élan pris ets'arrête de lui-même). La musique ne conduit pas systématiquement le mouvement, il s'agitplutôt d'apprendre aux élèves à faire de la musique en mouvement (inspiration dalcroziste).Cet apprentissage s'appuie sur un travail d'improvisation, comme moyen d'éducation pouratteindre le plein « épanouissement de soi. »16

Nous aurons l’occasion de revenir sur cette gymnastique rythmique dans un chapitreprochain en travaillant la question de l’histoire de l’introduction de la danse à l’école parl’intermédiaire des professeurs d’éducation physique et sportive.

- Principes des analyses et théories du mouvementComme nous l’avons vu, la pédagogique de la danse moderne s'est largement inspirée

d'analyse du mouvement humain et de théories sur l'expression et sur le rythme. Ainsi, laplupart des chorégraphes pédagogues de la danse moderne de la première partie du XXe siècleont été formés directement ou indirectement aux idées pédagogiques de Delsarte ou deJacques-Dalcroze.

François Delsarte (1811-1871) chanteur à l’origine, s’est mis à chercher une méthoded’expression à la suite de graves problèmes d’extinction de voix. Il remarqua alors qu’il nepouvait réussir à chanter qu’en agissant consciemment sur son corps et sur ses positions.Inventoriant les facteurs qui déterminent, selon lui, l’expression, il ouvrit des cours à Paris oùartistes et personnes parlant en public (avocats…) venaient apprendre sa méthode.

Au début du XXe siècle, Emile Jacques-Dalcroze a analysé le mouvement en fonctionde son sens rythmique et a ainsi créé une éducation corporelle reposant sur la répétition desrythmes. Sa méthode, faite initialement pour des musiciens, a intéressé de nombreuxpédagogues de la danse (Landen Odom, 1990). Mettant en jeu l’improvisation,l’enseignement privilégiait le mouvement libre en partant de l’idée que la musique peut êtrel’expression directe du corps. L’expression rythmique se fonde sur l’alternance entre tension

16 « Cette gymnastique qui est aussi de la danse, Irène Popard aujourd'hui », La Recherche en Danse, Chiron,1986.

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et détente corporelles, contraction et décontraction. Nous retrouvons ces principes dans ceuxde la danse moderne américaine déjà évoquée.

Mais le travail d'analyse du mouvement de Rudolf von Laban est encore plus centralpour comprendre comment se sont organisés les schèmes moteurs de la danse moderne desgénérations qui lui ont succédé. Ce dernier a développé ses théories sur le mouvementpendant quelques étés passés à Ascona, dans sa ferme naturaliste en Suisse. Après la premièreguerre mondiale, il dirigea des écoles de danse dans différentes villes d'Allemagne,développant ses idées sur les mouvements en groupe. Son travail se constitue dans uncontexte écologiste, quelque peu mystique (il a des contacts avec Rudolf Steiner) etpsychanalytique (influences de Freud et Jung), intégrant les connaissances biomécaniques deson époque (Brinson, 1993).

De fait, sa théorie repose sur des données mécaniques propres au mouvement humain :le corps est soumis à la pesanteur, la station verticale est sa position normale à partir delaquelle l'homme a une perception spontanée de sa symétrie. Le corps est perçu comme unvolume (centre de gravité et verticalité de la colonne vertébrale), d'où partent les directions :haut, bas, gauche, droit, avant, arrière et les plans dimensionnels : le plan sagittal, frontal ethorizontal.17 Les mouvements dépendent d'un processus dynamique (l'effort) dont les donnéessont le poids, le temps, l'espace et le flux, qui répartit l'énergie nerveuse, fournissant de lasorte les valeurs expressives aux gestes : léger et lourd (liées à la pesanteur), étroit et large(liées à l'espace), vite et lent (liées au temps ou à la durée). Venant d’un « élan intérieur »), lemouvement est infini, jamais achevé, car trouve en lui-même les ressources de création denouveaux mouvements au sien d’un espace corporel qui a des prolongations directionnellesdans l'espace réel.

Valérie Preston-Dunlop indique que Laban cherchait à améliorer ses observations surle mouvement à partir d'expérimentations chorégraphiques, reposant en partie surl'improvisation à partir d'une structure ou d'un thème qu'il donnait aux danseurs ; il essayaitégalement de voir comment l'expression d'une danse se modifiait en changeant les costumes ;les styles de ses danses variaient énormément afin que son public soit à chaque représentationétonné et stimulé. Différents lieux de représentation étaient explorés, pour ne pas développerune danse élitiste (danse de théâtre) et pour que les interprètes se confrontent à des espacesinhabituels pour eux. Enfin, il partait du principe que la musique ne domine pas la danse, maisqu'elle est mise au service du mouvement (Preston-Dunlop, 1995). Ses recherches l'amenèrentà créer une notation du mouvement (la labanotation) concernant non pas un style demouvements dansés, mais les mouvements du corps humain censés obéir à des loisuniverselles. Retranscrits à partir de signes abstraits, les mouvements étaient considérés dansleur déroulement dynamique et non comme une série de poses statiques (Challet-Haas, 1995).Cette écriture du mouvement dansé est enseignée aujourd’hui et constitue l’une des référencesmajeures en matière de notation de la danse chorégraphiée.

II. Le développement de la danse contemporaine en FranceAprès la seconde guerre mondiale, la danse classique et néoclassique dominaient le

champ de la diffusion des œuvres chorégraphiques en France. La politique de décentralisationamena à la création de nouveaux théâtres permanents comme à Marseille, mais continua àsoutenir la danse néoclassique. Cependant, au sein de l'Opéra, des artistes un peu délaissés parla Maison, ont eu intérêt à se distinguer de l'académisme strict, s'ils ne voulaient pas prendrele risque d'y jouer des rôles secondaires. S’intéressant à la création avant-gardiste, ils ont

17 Plan sagittal (roue) : haut / bas et arrière / avant. Plan frontal (porte) : gauche / droit et haut / bas. Le planhorizontal (table) arrière / avant et gauche / droite. Cf. Alfons Goris, « Des principes de Laban dans la formationdu danseur et de l'acteur », Nouvelles de danse, n° 25, 1995, p. 31-38.

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aspiré également à une plus forte indépendance vis-à-vis de la structure institutionnelle(Faure, 2000). Ils commencèrent à se produire dans des lieux de diffusion marginaux parrapport aux grands théâtres parisiens.

Aussi, la danse néoclassique, toujours privilégiée sur le plan de la diffusion et de lareconnaissance par les institutions, s’est ainsi rapidement trouvée concurrencée par une dansemoderne qui offrait une nouvelle alternative à l’académisme, et qui était représentée par des« transjuges » de l’académie, notamment par Janine Charrat, Roland Petit, Jean Babilée,Maurice Béjart, Françoise Adret, etc. (Faure, 2001).

D’autres artistes, fortement influencés par l’école moderne allemande, diffusaient unart moderne de la danse différent de la modernité issue de l’académisme. Ainsi, Françoise etDominique Dupuy ont fondé Les Ballets modernes de Paris en 1955, tandis que JacquelineRobinson créait son Atelier de la Danse, la même année — structure accueillant unecompagnie, une école et qui présente les travaux d’autres chorégraphes modernes. Enparallèle des théâtres programmant la danse néoclassique, des lieux de diffusion des créationsd’avant-garde commençaient à se faire connaître, c’est notamment le cas du Théâtre d’Essaide la Danse qui, de 1954 à 1968, propose des innovations, ou encore le Centre américain àParis qui organise des cours et des stages avec des danseurs étrangers (Mons-Spinner, 1997).Lieux d’émergence des nouveaux créateurs, les ateliers de danse contemporaine se sont créésen grand nombre, après 1968. Cette danse moderne s’est également implantée dans lesuniversités. Des enseignantes d’éducation physique vont s’intéresser et défendre cettenouvelle conception de la danse, notamment parce qu’elle se détachait des modèles de corpstraditionnels (notamment ceux du sport).

Mais plus largement, la danse moderne a profité de la revendication du corps et de savalorisation par les loisirs, mais aussi de l'intérêt que de nombreux intellectuels ont porté aucorps, en faisant de lui un objet de leur pensée. Selon Georges Vigarello, ces modèles secaractérisent par la recherche du bien-être, de l'aisance, de la détente physique et de laconscience approfondie des positions et des mouvements (Vigarello, 1978).

- La tension « formalisme » / « création-expression »Sans nécessairement s’opposer, deux conceptions de la danse contemporaine trament,

globalement, la formation du danseur : l'une privilégie le mouvement technique, et ainsi lafamiliarisation des élèves avec un style particulier de danse ; l'autre s'intéresse à l’actecréateur de l’élève. La première approche, assez formelle, se situe dans la continuité d'unedanse basée sur le mouvement qui se suffit à lui-même et qui ne sert de support ni auxsentiments éprouvés par le danseur, ni à une quelconque narration de soi. La techniquestructure l’interprétation. Même s'il s'agit d'être à l'écoute de ses sensations et d'avoir unemaîtrise consciente des mouvements (maîtrise non mécanique), l'élève apprend une techniquedu corps mise au point par un maître de tradition moderniste.

La seconde approche est une recherche sur les états du corps, et fait une partimportante au travail d’atelier de création et d’improvisation. La technique ne s’impose pas ;elle découle d’une recherche personnelle par laquelle le danseur apprend à générer desmouvements d’après une intention, une conscience qui se déplace sur les parties du corps.Cette conception de la danse refuse les aspects mécanistes de la technicité, et réfrène l’usagede l'imitation irréfléchie d'un modèle. On retrouve ici la tension traditionnelle entre copie(technique) et inventivité (création). Dans ce sens, Doris Humphrey reprochait aux élèvesd'être trop facilement des « agneaux dociles qui aiment à être dirigés » alors qu'elle voulait lesencourager à « être des individus, à bouger et penser sans souci de moi ou de qui que cesoit. » (Michel, Ginot, 1995 : 111).

Ce modèle de corps dansant n'est pas sans lien avec le discours psychopédagogiquepour qui la norme est l'expression de soi armée d'une prospection réflexive et que l'on

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retrouve dans des pédagogies scolaires dites « nouvelles ». Elles ont en commun une certaineconception de l'enseignement devant favoriser l'écoute des élèves, leur « autonomie », letravail en groupe, le plaisir d'apprendre.

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

Bibliographie du chapitre IIBRINSON, P. (1993) L'impact de Laban sur la danse et le théâtre contemporain, Les

Fondements du mouvement scénique, Saintes, Maison de Polichinelle, La Rochelle, Rumeurs desÂges, p. 43-60 (pour la version française du texte).

Cette gymnastique qui est aussi de la danse, Irène Popard aujourd'hui (1986) La Recherche enDanse, Paris, Chiron.

CHALLET-HAAS, J. (1980) Manuel pratique de la danse classique, Paris, Amphora.

CHALLET-HAAS, J. (1995) La cinétographie Laban : une écriture du mouvement, Nouvellesde danse, 25 : 48-53.

GIL, J. (1989) Le corps abstrait, La Danse, naissance d'un mouvement de pensée, Paris,Armand Colin, p. 98-107.

GORIS, A. (1995) Des principes de Laban dans la formation du danseur et de l'acteur,Nouvelles de danse, 25 : 31-38.

LANDEN ODOM, S. (1990) Mouvement du corps dans l’enseignement d’Emile Jacques-Dalcroze, in La Danse, art du XXe siècle ?, (éd. J.-Y. Pidoux), Lausanne, Payot, p. 124-137.

LATY, D. (1996) Histoire de la gymnastique en Europe, de l'Antiquité à nos jours, Paris,PUF.

MICHEL, M., GINOT, I. (1995) La Danse au XXe siècle, Paris, Bordas.

MIDOL, N. (1982) Théories et pratiques de la danse moderne, Paris, Amphora.

MONS-SPINNER, C. (1997) Modernités dans le renouveau de la danse artistique en France,1969-1992, thèse de doctorat, STAPS, Université de Strasbourg.

PORTE, A. (1993) François Delsarte (1811-1871) le théâtre et l’esprit de l’auteur, in LesFondements du mouvement scénique, actes du colloque international des 5, 6 et 7 avril 1991, Saintes,Maison de Polichinelle, et La Rochelle, les éditions Rumeurs des Âges, p. 13-28.

PRESTON-DUNLOP, V. (1995) Rudolf Laban, artiste / chercheur, Nouvelles de danse, 25 :12-25.

ROBINSON, J. (1990) L'Aventure de la danse moderne en France (1920-1970), Paris, Bougé.

ROBINSON, J. (1987) préface du livre de Doris Humphrey, Construire la danse, Paris,édition Bernard Coutaz.

SWANSON, A. (1983) Isadora Duncan : à propos de son enseignement et de sa filiation, LaRecherche en danse, 2 : 63-74.

TAYLOR, C. (1998) Les Sources du moi. La formation de l’identité moderne, Paris, Le Seuil.

VIGARELLO, G. (1978) Le Corps redressé. Histoire d’un pouvoir pédagogique, Paris,Delarge.

WIGMAN, M. (1986) Le Langage de la danse, Paris, éd. Papiers.

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III.

Une didactisation de la danse chorégraphiée :implications pédagogiques, cognitives et motrices

L’école de danse a construit ses fondements, au cours de l'histoire de la dansechorégraphiée, en prenant modèle sur la forme scolaire de socialisation. Le modèlepédagogique initial en a été la « discipline ». Cependant, avec l’invention de nouvelles formesde danse, des variantes pédagogiques se sont introduites.

Quoi qu'il en soit, le principe premier de la leçon respecte l’idée que devenir danseurpasse nécessairement par un travail de préparation du corps, à travers différents exercicesd'échauffement et de technique. Les cours se déroulent à horaires fixes, dont la durée varieentre une heure pour les cours débutants et deux heures pour les cours avancés, se prolongeantpar un travail des pointes (danse classique) ou par un atelier chorégraphique (dansecontemporaine). Ils occupent un lieu séparé des autres espaces sociaux (la salle de danse), oùs'exerce une action socialisatrice spécifique, plus ou moins intensive selon le degréd'implication de chaque élève dans sa formation de danseur. Autrement dit, les cadresgénéraux de l'organisation de l'enseignement de la danse restent proches de la logique de laforme scolaire, même s’il n’est pas encore question de « danse à l’école » et, par opposition,s’éloigne de l’apprentissage communautaire et pratique des danses non chorégraphiées,comme nous l’avons vu dans le premier chapitre.

La domination du modèle de la forme scolaire dans l’apprentissage de la danse (paropposition notamment à l’apprentissage pratique, ou autodidacte…) s’est parachevée avecl’imposition à tout enseignant de posséder le diplôme d’état de professeur de danse ou uneéquivalence (loi du 10 juillet 1989 appliquée depuis 1992). La loi vise la protection desenfants par le contrôle des enseignants et de leur enseignement.

Autrement dit, à l’encontre des autres modes d’apprentissage plus « diffus »,« autodidacte » (comme c’est le cas des danseurs hip hop de la « old generation » ), ou« traditionnels » et « communautaires » et dans lesquels la danse n’est pas séparée de la viequotidienne des individus, l’organisation pédagogique de la pratique de la dansechorégraphiée s’est imposée comme mode dominant d’apprentissage. Elle rend ainsi possiblesles travaux des didacticiens.

Dans un dialogue récent mené entre Bernard Lahire et Samuel Johsua (didacticien dessciences et des mathématiques) (Lahire et Johsua, 1999), la didactique y est définie commeune science s’intéressant pour un domaine particulier aux phénomènes d’enseignement, auxconditions de la transmission et d’acquisition de connaissances dans des institutionsparticulières. De ce fait, sont prises en compte les relations sociales spécifiques qui sont àl’œuvre dans la gestion des savoirs. Une didactique, dans une perspective sociologique dumoins, ne s’intéresse pas à un savoir décontexualisé ; elle se distingue également d’unesociologie générale. Elle prend pour objet la nature des savoirs et les conditions sociales deleur transmission et appropriation ainsi que le rapport différencié au savoir. Observantégalement aux « structures mentales » des enseignants et des enseignés et au « contexte socio-institutionnel d’enseignement », la sociologie didactique tient compte de la diversité desélèves et des enseignants — non en raisonnant à partir de l’Elève ou de l’Enseignant pris pourdes entités homogènes et globalisantes contrairement aux didactiques qui raisonnent à partird’un point de vue universaliste. Nous verrons en effet que les didacticiens de la danse àl’école s’orientent le plus souvent vers cette deuxième définition de la didactique. Pour le

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propos de ce chapitre, en revanche, nous ferons part de travaux s’inscrivant dans le cadre de lapremière définition (une didactique sociologique).

Selon Mireille Peix-Arguel, la situation didactique fournit des contraintes et les cadresinstitutionnelles, qui dispensent une « éducation » chargée de valeurs et d’idéologies auxélèves. Les idéologies sont entendues comme l’ensemble de représentations, d’estimations etde pratiques caractéristiques d’une société, d’un groupe ou d’un système social, à un momentdonné de son histoire et qui se révèlent à travers les comportements des individus, lesmanières d’être « en ce monde » (Peix-Arguel, 1980). L’acte d’enseigner n’est pas porteur, àlui seul, d’un « message » idéologique qui se transmet aux élèves. Les élèves (par leurhabitus) déploient un mode de réception qui tend à être sensible ou non sensible à toutel’information diffusée dans la pratique pédagogique. Les didactiques de la danse transmettentleur propre système de représentation qui varie selon le style de danse, tout en s’ancrantévidemment dans un système de représentations socialement construit et propre à une société.Après avoir étudié la didactique de la danse classique, l’auteur procède à l’analyse desdidactiques contemporaines dans les styles Limon, Graham et Nouvelles tendances. Sur leplan méthodologique, elle a observé des cours et fait des analyses linguistiques destémoignages des danseurs sur leur pratique. La recherche conduit à s’intéresser à« l’empreinte » laissée sur les élèves qui suivent ces cours de danse, et à réfléchir auximplications quant à l’image de leur corps, leur perception du temps et de l’espace — cequ’elle nomme la structure interne entendue comme la représentation du corps à travers descontraintes techniques ou situationnelles pédagogiques.

Les contraintes didactiques révèlent donc des rapports au corps différents. « En effeton peut penser que des termes tels que : normé, technicisé, mécanisé, ne recèlent pas le mêmetype d'appréhension des contraintes que : maîtrisé, discipliné, contrôlé qui renvoient plutôt àl'intégration volontaire, l'incorporation des contraintes externes. » (Peix-Arguel, 1980). Ellesgénèrent des conditions de transmission différentes qui, à la longue, modifient la perceptiondu corps incorporée depuis l’enfance par les individus.

L’analyse de Mireille Arguel rejoint par certains aspects celui de Claude Pujade-Renaud qui, à la même période, analyse deux types d’enseignement de la danse : celui de ladanse classique et celui de la danse contemporaine, sans décrire finement le style de dansecontemporaine qui est en jeu dans son étude. Son propos est davantage de comparer deuxsituations pédagogiques : la situation traditionnelle reposant sur le principe d’imitation et lasituation éducative en danse contemporaine qui vise à développer la volonté de création et derecherche, individuelles et collectives, dans les cours (Pujade-Renaud, 1976). Ce modèleromprait avec le système traditionnel dans lequel le professeur est un démonstrateur et lesélèves des imitateurs.

Un travail récent étudie la corrélation entre la nature des savoirs et des savoir-faireselon les formes de danse et les manières de les enseigner dans les cours de danse ; cetteinterdépendance définit des « formes de pratique » qui ont des implications motrices etcognitives différentes (Faure, 2000). À partir de cette problématique, la question de « qu’est-ce qui s’apprend en danse et comment » s’oriente vers l’observation, en premier lieu, de la« nature » des savoirs et des savoir-faire appris. Le « savoir » n’est pas nécessairement ungeste précis, un pas, un « avoir » possédé par le maître et redonné à l’élève. Ce qui s’apprend(ou ce qui est censé s’apprendre) est un rapport au mouvement, un rapport au corps, unrapport aux autres, une conception de l’usage de l’espace, du temps — autant de « manièresde » (faire, d’être aux autres, de penser...) qui se concrétisent par/dans des formes gestuellesplus ou moins formalisées. La constitution d’un savoir formel en danse dépend de conditionssocio-historiques et politiques singulières, où la rationalisation scripturale des pratiques adominé à certaines époques, codifiant des schèmes pratiques à l’œuvre dans les usages de ladanse de cour, puis dans ceux de la danse de théâtre. Ce processus a été propice à laconservation durable (et pratique) d’anciennes structures motrices. Il en a découlé une forme

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de danse assez codifiée, la danse « académique », qui n’est pas une « héritière » maisdavantage la messagère d’anciens ordres (sociaux et politiques) incorporés dans les traditionscorporelles et artistiques dont elle est issue, qu’elle réinterprète sans bouleverser radicalement.La formalisation des gestes de danse a également lieu dans des techniques contemporaines etrelève généralement d’une volonté de travailler « le mouvement pour le mouvement » en lesystématisant et en le rendant relativement autonome par rapport à la diversité desinterprétations possibles des danseurs. Dans ce cas, le souci de formalisation tend à s’inscriredans une tension qui structure le champ chorégraphique depuis le XVIIIe siècle, à savoir leformel (qui rejoint l’académisme à certaines périodes du champ) versus l’expressivitésingulière et créatrice (qui s’initie plus particulièrement avec l’invention d’une position derupture avec la danse académique au début du XXe siècle et initiée par la danse moderne)(Faure, 2001/1).

I. Didactiques de l'enseignement traditionnel en danse classiqueDans son étude comparative entre la danse classique et des styles contemporains,

Mireille Peix-Arguel souligne que l'effort et le travail sont les contraintes indispensables à lamaîtrise du corps classique. Ces contraintes s'accompagnent de l'idée de rigueur, de confianceen soi et d'exigence, en lien avec une conception du corps au service de la beauté et de laperformance, appréhendées « à travers des contraintes techniques : rigueur, discipline etsacrifice sont de règle. » (Peix-Arguel, 1980 : 63). Faisant référence à la danseuse étoileYvette Chauviré, l’auteur observe que le corps de la danse classique est un corps « docileinstrument, façonné et rompu à la discipline classique. » (ibidem : 64). Il s'agit d'un corpsredressé qui se façonne à travers une morale du travail, du sacrifice et dans la sueur, lié à desstéréotypes qui le réduisent à ses facteurs morphologiques : un corps enveloppe, technicisé,un corps désincarné, selon elle, parce que travaillé pour la perfection et la pureté des lignes(Faure, 2000).

Schématiquement, les cours de danse classique se divisent en deux principalesséquences : des exercices à la « barre », permettant un échauffement méticuleux du corps, etdes exercices « au milieu » pour l’acquisition des pas. Si le travail à la barre prépare le corpset le met en condition d’effectuer des enchaînements de mouvements, il conduit aussi à uneautodiscipline par l'assujettissement à un travail répétitif, en répétant séance après séance,année après année, des exercices structurés globalement toujours de la même façon, et en sesoumettant au regard critique de l'enseignant et des pairs. Pour ne pas toujours se présenter demanière frontale, la technique classique a intégré des positions de profil ou de semi-profil.Ainsi, les positions peuvent être croisées (une jambe est placée devant l'autre), effacées (lesdeux jambes sont visibles par le public, mais elles ne se croisent pas) ou écartées (pas enseconde position). Les déplacements sont construits selon trois dimensions spatiales (lahauteur, la largeur et la profondeur) déterminant des plans entre eux : le plan frontal (face aupublic), le plan sagittal (profil), le plan transversal (le danseur vu du dessus) (Cadopi etBonnery, 1990).

La didactique traditionnelle de la danse classique a des correspondances certaines avecle modèle de la « discipline » (Faure, 2000) qui vise à se dissocier d’un genre de danseparticulier puisque, aujourd’hui les pratiques ne peuvent plus totalement être affiliées à descatégories fort réductrices (mais qui conservent toutefois un sens) telles que danse« classique », « contemporaine », « jazz », etc.(Faure, 2001/1). Ce nom de « discipline » a étéchoisi en référence avec le contexte socio-historique (XVIIIe-XIXe siècles) d’émergence descours de danse académique. La « discipline » est ainsi une notion que nous empruntons àMichel Foucault pour signifier qu’un nouvel ordre sociopolitique de l’apprentissage de ladanse s’est mis en place avec la « leçon » de danse. Il s’est caractérisé par l’inventiond’exercices progressifs relevant des nouvelles connaissances portant sur le corps en

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mouvement, et de la décomposition analytique des gestes et des mouvements de danse enéléments simples, avant d’être enchaînés et complexifiés. Aussi, résumerons-nous le modèlede la « discipline » par l’aspect formel, extrêmement rationalisé, voire codifié des gestesappris ainsi que de la leçon de danse. De l’acquisition de savoir-faire performants naissent lescompétences d’interprétation du pratiquant. L’artiste est d’abord un « technicien » avant dedevenir un interprète, parfois un créateur. L’exemple de la forme de danse classique estparticulièrement démonstratif, cependant le modèle de la « discipline » est susceptible de serapporter à toute forme de danse et de pratiques contemporaines ayant des caractéristiquescommunes et dont la spécificité, rappelons-le, tient d’une forme assez développée derationalisation scripturale et pédagogique des savoir-faire transmis.

D’une domestication des corps dansants, l’entraînement académique s’est faitdiscipline entre le XVIIe et le XVIIIe siècles, générant un nouvel « art du corps » plus réfléchi,plus théorique qu’auparavant. En mettant en place des exercices censés respecter lestendances naturelles du corps, en élargissant l'apprentissage à des connaissances théoriques etmusicales, la nouvelle logique « pédagogique » de la pratique va imposer une organisationhiérarchique et rationalisée de l’incorporation des gestes de danse. Au XIXe siècle, l'analyseméticuleuse du mouvement humain et la fixation des conventions de la danse classiqueconduiront à la stabilisation de l’entraînement du danseur « classique » et favoriseront lasubordination des corps dansants à un « vocabulaire » technique relativement codifié.Cependant, la « discipline » n’est pas propre à la danse ; elle s’inscrit dans une configurationsociale au sein de laquelle elle se substitue — en tant que forme spécifique de relationssociales et de socialisation — à d’autres formes sociales d’apprentissage et/ou desocialisation. Elle donne lieu à la « forme scolaire » qui adopte des modes d’exercice dupouvoir (pédagogique) différents selon les époques et les contextes. De l’imposition de règles(académiques), à la sollicitation de la raison des élèves, la « discipline » n’est, enfin, pastoujours et partout de même nature (Vincent, 1980).18

II. Les didactiques de danse contemporaine : modèle de la « singularité »Dans la même perspective de recherche, un second modèle de pratique de danse a été

fondé, par opposition à celui de la « discipline », et en tenant compte de l’histoire des formesde danse tout en ayant la volonté de ne pas trop rapidement rabattre les genres de danse surune forme de pratique intégrant des types particuliers de savoirs, de savoir-faire ainsi que desmodalités pédagogiques de transmission. Le modèle de la « singularité » s’impose donc enrupture avec la « discipline » et concerne plutôt la danse contemporaine. Relatif aux contextessocio-historiques des « philosophies de la singularité » telles que les a travaillées CharlesTaylor (Taylor, 1998), il se rapporte à des pratiques qui valorisent l’individualité et quitiennent compte peu ou prou des dispositions sociales (mentales et corporelles) de chacun. Ledanseur est considéré comme un créateur autant qu’un technicien (peut-être plus). Commedans la logique de la « discipline », l'exercice est démontré et expliqué par l'enseignant,effectué puis corrigé. Cependant, le recours à des savoir-faire stabilisés n’est pas la conditionsine qua non de l’entraînement. L’organisation pédagogique inclut de la sorte desexpérimentations sans modèle (ateliers de création, improvisations…) mais en suivant desconsignes précises, énoncées mais non systématiquement démontrées par l’enseignant.L’idéologie à l’œuvre dans ce modèle restitue un rapport à « soi » socialement fondé, danslequel l’individu est conçu comme un « être » unifié, séparé des autres (Elias, 1987) et dontles compétences et potentialités existent de manière « interne » (Taylor, 1998).

Le modèle de la « singularité » a emprunté les voix de la rationalisation scientifique,fondée sur les sciences de l’anatomie et de la physiologie, mais intégrant des savoirs issus des

18 Nous renvoyons au premier chapitre de ce rapport.

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sciences de l’homme. La psychomotricité, la kinésiologie appliquée au danseur, les méthodesde Moshé Feldenkrais, de Matthias Alexander, etc., participent de ce mouvement derationalisation particulier. Les « pédagogues » ont donc logiquement instauré de nouveauxsavoirs du corps et, pour certains, préconisent des exercices aidant la prise de conscience ducorps. Ce modèle de pratique repose moins sur l’imposition de codes gestuels et d’unetechnique formalisée, que sur un travail de recherche de mouvements. La technique de danseapprise met en œuvre un rapport au corps différent de celui de la « discipline » : le corpsexprime cette fois-ci non plus un monde « extérieur » aux individus (l’harmonie céleste,l’ordre politique et social de l’Etat absolutiste, un « vocabulaire » technique codifié existanten dehors des corps c’est-à-dire dans des « grammaires » de danse), mais un « mondeintérieur », un « imaginaire », etc. (Faure, 2001/1).

III. Les didactiques et leurs implications cognitives et motricesMireille Arguel s’est intéressée aux implications cognitives, motrices et expressives de

la danse sur les élèves. Pour elle, la danse classique génèrerait la confiance en soi, ainsi quedes compétences de rigueur, de volonté, d’exigence envers soi-même. Dans le stylecontemporain Graham, l’apprentissage technique développerait le goût de l’effort et de lapersévérance, sans occulter l’expressivité propre du cops. Dans le style Limon, le corps estexpressif et créatif, le danseur est conscient de ses limites et de ses possibilités ; cettetechnique engendrerait d’une certaine façon l’esprit critique en faisant prendre conscience desinfluences et des contraintes du système économiques et culturelles auquel le danseurappartient. Enfin, la pratique de danse contemporaine « nouvelle tendance » constituerait uncorps expressif, créatif, disponible et déshabitué (Peix-Arguel, 1980).

Elle a ainsi dressé des tableaux comparatifs des styles de danse contemporaine étudiéeainsi que du style classique (voir in supra) en étudiant les facteurs dynamogéniques desdifférents styles (énergies, les imaginaires, les sensations), les facteurs morphologiques(corporéité engagée dans la danse), les aspects relationnels à soi-même (rapport que l’onentretient à son corps), les facteurs dynamiques relationnels (rapport à l’espace-temps), et lesfacteurs prospectifs (aptitude à la création, le pouvoir d’adaptation à une autre pratique ou àun autre groupe, l’esprit critique, les possibilités de réflexivité).19

19 Mireille Peix-Arguel, Idéologie et pouvoir…, op. cit. Mireille Arguel, « De système en système… ou l’espritde système », Marsyas, n° 11, septembre 1989, p. 39-47 ; « Le statut du corps en danse », Marsyas, n° 16,décembre 1990, p. 33-42 ; « Statut et représentation du corps en danse », Danse, le corps enjeu, Paris, PUF,pratiques corporelles, 1992, p. 179-195.

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Figure 1 : Mireille Arguel « Statut et représentation du corps en danse », Danse. Le corps enjeu,PUF, col. Pratiques corporelles, Paris, 1992, p. 182.

[…]

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Figure 2 : Mireille Arguel « Statut et représentation du corps en danse », Danse. Le corps enjeu,PUF, col. Pratiques corporelles, Paris, 1992, p. 187-188.

De leurs côtés, les pratiques relevant de la « discipline » (Faure, 2000 ; Faure, 2001/1)se constituent par l’assujettissement des pratiquants à des règles impersonnelles (objectivéespar un « vocabulaire » technique codifié à intégrer le plus fidèlement possible, le respectd’une tradition gestuelle et des « maîtres », une soumission au temps et aux espaces de lapratique extrêmement réglementés) et à la logique des rites de passage que sont les examensou les évaluations formelles ou informelles. Les pratiquants ont également à intégrer uneéthique de travail : la modestie quant aux progrès réalisés ; l’acceptation du travail toujours àrefaire, de la répétition des exercices, de l’entraînement parfois douloureux du corps, del’évaluation de chacun vis-à-vis des pairs et vis-à-vis d’un public ; la capacité à analyser leserreurs, à réfléchir aux tâches effectuées pour les améliorer. Ce mode d’organisation del’enseignement est d’autant plus efficace qu’il met en jeu des savoirs rationalisés et largementfondés sur des connaissances théoriques (anatomie, analyses biomécaniques dumouvement...). Les pratiques langagières engagées dans cette forme de pratique reproduisentles codes qui ont défini des gestes de danse ; elles relèvent essentiellement de descripteurs

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d’action se référant au « jargon » technique, de comptes, de jugements de valeur et dequelques métaphores facilitant les corrections des positions et du placement du corps (Faure,2000/2) qui aident pleinement à la mémorisation (et au rappel) des mouvements.

Dans les cours de danse liés au second modèle, celui de la « singularité », ce quis’apprend est moins un « code » technique, qu’une orientation de pensée et d’action à partirde laquelle se constituent les gestes de danse et le style du danseur, sollicitant de sa part desdispositions physiques et mentales particulières : se faire plaisir en dansant ; se situer dansune perspective de « recherche » de mouvements, seul ou avec des pairs ; être à l’ « écoute »des autres, etc. Les pratiques langagières ne peuvent, en conséquence, se référer à une« grammaire » unifiée de la technique de danse. Les longues descriptions savantes mais aussisouvent métaphoriques sont requises afin de faire comprendre aux élèves le sens d’unmouvement, sa qualité. Les pratiques langagières correspondent également à des comptes, àdes jugements de valeur et à quelques descripteurs d’action. La démarche globale consisteaussi à faire porter l'attention des élèves sur leurs perceptions sensori-motrices, privilégiantainsi ce que Georges Vigarello désigne par « l'intériorité travaillée. » (Vigarello, 1978). Cetteorientation pédagogique a été à l’œuvre essentiellement dans l’apprentissage des styles dedanse contemporaine qui font référence à l’expressivité et/ou à la créativité à la fin des annéessoixante et dans les années soixante-dix ; actuellement, elle prédomine dans des didactiquesde la danse en milieu scolaire qui relèvent des pédagogies « du sujet ».

Modèle de la « Discipline » Modèle de la « Singularité »- Savoirs relativement codifiés, « leçon » de dansepar ensemble d’exercices qui s’inculquent.

- Historiquement : émergence de la « discipline »au XVIIIe et XIXe siècles comme nouvelle formede socialisation. (Cf. M. Foucault)

- « Vocabulaire » technique existant en dehors descorps (grammaires de la danse)

- Incorporer le plus fidèlement possible ce« vocabulaire » par : répétition, exercices formels,réguliers ; travail individuel essentiellement.

- Pratiques langagières : « jargon » préciscorrespondant à la « grammaire » technique ;descripteurs d’action ; jugements de valeur ;comptes ; métaphores pour placement et positionsdu corps.

- Savoirs peu codifiés, « leçon » rompant avec lalogique scolaire de l’exercice : ateliers decréation, improvisations… Savoir-faire qui se« construisent ».

- Historiquement : idéologies de la singularité (cf.C. Taylor) : « intériorité » sous-jacente àl’appropriation/construction des savoir-faire.

- « savoirs » qui n’existent pas (peu) en dehorsdes corps ; savoirs singularisés.

- Appropriations différentielles ; travail decréation et travail technique concommitants ;travail de groupe plus régulier ; leçonschangeantes. Travail de « conscience » du corps.

- Pratiques langagières : descriptions longues,savantes et/ou métaphoriques pour faire saisir lesens d’un mouvement, sa « qualité » ; jugementsde valeur ; comptes et mélodie chantonnée ;quelques descripteurs d’action.

Figure 3 : Sylvia Faure, Tableau comparatif des modèles de pratique de danse, « La naturesociohistorique des pratiques et leurs modalités d’incorporation. A propos de techniques de danse », Actes ducolloque Les politiques des savoirs, Université Lumière Lyon2, ISPEF, 28-29 juin 2001.

Dans cette perspective de recherche, les modèles de pratique (discipline et singularité)dessinent des formes « d’intelligence du corps » ou d’ « intelligence pratique » différentes,c’est-à-dire des ensembles de compétences motrices et cognitives, qui ont des particularitéspropres et qui sont repérables essentiellement quand les danseurs ont une expérience sérieusemais non professionnelle de la danse (l’expérience professionnelle de plusieurs années semble

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construire une « intelligence pratique » moins dépendante de la nature des savoirs etdavantage liée à l’expérience) (Faure, 2000). Ces « intelligences pratiques » sont le produit dela « nature » des savoirs et savoir-faire appris et de leurs modalités d’incorporation et deréactualisation régulière (danser sur scène…).

Ainsi, les élèves ayant appris à danser selon le modèle de la « discipline » ont unemaîtrise pratique performante après avoir acquis un « capital » technique très codifié et trèsrigoureux. Des éléments de ce capital se transforment en quasi-automatismes, à force d’êtrerépétés et mis au service de compétences plus complexes (routines devenant sub-routines)(Bruner, 1983). En revanche, les situations qui s’éloignent des conditions de la répétitionmettent « en danger » ces savoir-faire, conduisant les danseurs à plus de contrôle conscient, àplus de réflexion « en action » et en interactions, sur la scène notamment. Ce contrôle est liéaussi à l’anxiété et aux exigences morales que s’imposent de très nombreux danseurs quicraignent que leur « technique » ne soit pas « parfaite », que leur corps soit « mal placé ».Nous montrons ailleurs, que les danseurs professionnels, ayant une forte expérience scénique,parviennent à se débarrasser de telles injonctions morales (qu’ils jugent alors « scolaires ») etparent aux problèmes d’exécution en conditions réelles de représentation grâce à desstratagèmes de divers ordres (comme la dissimulation, le « faire semblant », le rattrapage desmouvements sur la scène, etc.). Quand les mouvements sont extrêmement répétés, les élèvesde la « discipline » incorporent, à un certain niveau d’expertise, une « intelligence pratique »proche du modèle que Pierre Bourdieu a constitué en le nommant le sens pratique (Bourdieu,1980), dansant sans faire appel à des images et à de la réflexion, et vivant sur scène desmoments de plénitude, en ayant l’impression que les mouvements s’enchaînent d’eux-mêmessans avoir à les diriger ; dans de telles situations, ils peuvent totalement être dansl’interprétation (Faure, 1998, 2000).

De leurs côtés, les élèves non novices ayant été formés selon le modèle de la« singularité » acquièrent des savoir-faire techniques plus « souples » que leurs confrères dela « discipline » dans le sens où, moins spectaculaires aussi, ils se caractérisent par unepossibilité d’adaptation aux conditions variables de la pratique (comme danser sur scène) etaux possibilités motrices des interprètes. Par ailleurs, il est à observer une moindre anxiété desdanseurs par rapport à ceux qui sont issus de la « discipline ». Danser sur scène, ou fairevarier les conditions d’exécution est quelque chose que l’on apprend dans les cours(notamment dans les ateliers d’improvisation) et qui constituent une forme d’intelligencepratique que nous désignons par la mètis (Détienne et Vernant, 1974), qui engage desprocédures cognitives permettant de pallier les défaillances des habitudes motrices, sansengager nécessairement de la réflexion en action, mais plutôt des astuces de « rattrapage »scénique, des capacités à improviser sans perdre le contrôle de soi (un peu comme chez lesdanseurs professionnels déjà évoqués, sauf que ces stratégies s’apprennent en cours deformation). Pour saisir de manière plus détaillée ces propositions, nous renvoyons à la lecturedu chapitre X du rapport.

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

Bibliographie du chapitre IIIARGUEL, M (1989) De système en système… ou l’esprit de système, Marsyas, 11 : 39-47.

ARGUEL, M. (1990) Le statut du corps en danse, Marsyas, 16 : 33-42.

ARGUEL, M. (1992) Statut et représentation du corps en danse, Danse, le corps enjeu, Paris,PUF, col. Pratiques Corporelles, p. 179-195.

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BOURDIEU, P. (1980) Le Sens pratique, Paris, éditions de Minuit.

BRUNER, J. (1983) Le développement de l’enfant. Savoir faire, savoir dire, Paris, P.U.F.

CADOPI, M., BONNERY, A. (1990) Apprentissage de la danse, Joinville-le-Pont, Actio.

ELIAS, N. (1987) La Société des individus, Paris, Fayard.

FAURE, S. (2000) Apprendre par corps. Socio-anthropologie des techniques de danse, Paris,La Dispute.

FAURE, S. (2000/1) Dire et (d’) écrire les pratiques de danse. Opposition entre pratiquesdiscursives et non discursives, Cahiers internationaux de sociologie, vol. CVIII : 161-178.

FAURE, S. (2001) Corps, savoir et pouvoir. Sociologie historique du champ chorégraphique,Lyon, P.U.L.

FAURE, S. (2001/1) La "nature socio-historique" des pratiques et leurs modalitésd’incorporation. A propos des techniques de danse, Actes du colloque : Les politiques des savoirs,Université Lumière Lyon 2, ISPEF, 28-29 juin 2001, CD Rom.

FAURE, S. (1998) Les processus d’incorporation et d’appropriation du métier de danseur,thèse de doctorat de sociologie, Université Lumière Lyon 2, sous la direction de Guy Vincent.

LAHIRE, B. (1999/2) Pour une didactique sociologique. Entretien avec Samuel Johsua,Education et sociétés. Revue internationale de sociologie de l’éducation, 4 : 29-56.

PEIX-ARGUEL, M. (1980) Idéologie et pouvoir : les didactiques de danse, thèse de doctoratsociologie, Paris VII.

PUJADE-RENAUD, C. (1976) Danse et narcissisme en éducation, Paris, éd. E.S.F.

TAYLOR, C. (1998) Les Sources du moi. La formation de l’identité moderne, Paris, Le Seuil.

VIGARELLO, G. (1978) Le Corps redressé. Histoire d’un pouvoir pédagogique, Paris,Delarge.

VINCENT, G. (1980) L’Ecole primaire Française, Lyon, P.U.L.

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Seconde partie :

La danse à l’école

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IV.

Histoire et Politiques de l’introduction de la danse àl’école

Le Bulletin Officiel du 9 mars 1995 définissant les cadres généraux de l’introductionde la danse à l’école Maternelle et à l’école Élémentaire indique que, dans le premier cas, ladanse s’insère dans un programme pédagogique global permettant à l’enfant de « développersa sensibilité et sa créativité » et de « s’exprimer plus intensément par le mouvement. »20

Dans le second cas, il s’agit pour l’élève d’intégrer des connaissances et des méthodes detravail personnel ; le mot clé est « autonomie » : l’enseignement doit l’amener à acquérir leséléments d’une autonomie personnelle. La danse y contribue par sa méthodologie consistant àexplorer les différentes composantes du mouvement, à donner un sens esthétique aux gestes età participer à un projet collectif., L’enfant apprend enfin à prélever « dans les œuvres qui luisont présentées, des éléments susceptibles de l’aider dans son jugement. »21

Dans un autre bulletin officiel de la même année, portant sur la danse à l’école,Marcelle Bonjour (conseillère pédagogique en éducation physique et en danse dans ledépartement de L’Eure-et-Loire et consultante pour « danse à l’école » au ministère del’Éducation nationale) précise que la danse à l’école est un langage et un mode d’expressionet d’interprétation de la réalité qui met en jeu le corps et qui doit être pensé dans satransversalité avec les autres arts. La danse à l’école, pour elle, permet également d’orienter le« trop plein d’énergie » des élèves en la canalisant dans une démarche de création et dans unepolitique du projet. Enfin, si elle favorise l’autonomie de chacun et la constitution del’identité, la danse à l’école est également un mode de connaissance du patrimoine culturel etdes œuvres contemporaines, propice à « l’enracinement culturel. »22

La danse à l’école se présente, dans ce sens, à la fois comme une « éducationartistique » et une familiarisation avec la culture contemporaine.

Concernant les lycées, les programmes officiels de 1999 précisent que l’enseignementde la danse à l’école est au croisement entre le champ artistique et celui de l’éducationphysique et sportive. Il s’agit de connaître le langage chorégraphique en pratiquant et en allantvoir des spectacles. L’enseignement inscrit l’élève dans « un projet d’avenir » en apprenant àmener à bien un projet chorégraphique collectif.23

Ainsi, depuis 1995 la danse à l’école est ancrée, apparemment solidement, dans lesprogrammes officiels. Son introduction dans l’univers scolaire n’a pourtant pas été de soi et adû faire l’objet de combats militants de la part des enseignants d’éducation physique etsportive (généralement des enseignantes). Ce militantisme, moins nécessaire aujourd’hui, esttoutefois encore mobilisé dans de nombreux discours actuels.

Avant d’analyser, dans des chapitres ultérieurs, le contenu et la forme des discoursdidactiques, nous allons brièvement revenir sur la genèse de la danse à l’école en tentant de lasituer au mieux dans les contextes politiques et idéologiques de leur époque.

20 B.O. du 9 mars 1995. L’école maternelle, l’école élémentaire, n° 5, p. 18.21 Ibidem, p. 30.22 B.O. du 8 juin 1995, Education artistique. La danse à l’école, n° 23.23 B.O. du 5 août 1999, Arts : domaine danse. Enseignement de détermination et option facultative. Nouvelenseignement, n° hors série.

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I. Les années cinquante : l’initiationLa création en 1946 de l’École nationale supérieure d’éducation physique (l’ENSEP),

qui recrute des jeunes filles sur concours national pour les former en trois ans au certificatd’aptitude au professorat d’EPS, s’accompagne d’instruction incitant les enseignants à ne pass’enfermer dans une méthode d’éducation physique et de tenir compte des âges des élèves(Coltice, 2000). La danse n’existe pas, à cette période, dans l’EPS. Cependant, les analyses deMichèle Coltice montrent que ces textes incitent à faire des exercices « naturels » et« utilitaires » ainsi que des « jeux préparatoires aux sports collectifs » ; dans ce sens il estrecommander aux filles de pratiquer des « danses populaires » et des « exercices demaintien » au moins pour les 10-13 ans. La gymnastique rythmique est fortementrecommandée pour les plus âgées (des filles uniquement) ; les garçons doivent pratiquerl’haltérophilie. Ainsi toute une division sociale/sexuelle des pratiques physiques est instituéeofficiellement, après la seconde guerre mondiale, dans un contexte de redéploiement de lasociété qui a besoin d’hommes « solides » et d’individus en bonne santé (Coltice, 2000).

D’après Mireille Arguel, la rythmique, fortement influencée par les conceptionséducatives et physiques de Jacques-Dalcroze, Malkowki (adepte de Isadora Duncan) etd’Irène Popard, regroupait des exercices formels destinés à assouplir, coordonner, et maîtriserun « corps-machine » en assurant l’identité sexuelle des futures professeurs d’EPS. Ils’agissait de développer la féminité conçue à travers des mouvements gracieux, empreints dedouceur, arrondis et en harmonie avec la musique (Arguel, 1992). Encore à la fin des annéescinquante, les méthodes d’EPS s’inspirent de plus en plus de pédagogues (Ling, Démeny,Hebert) qui se préoccupent de la santé et qui visent à corriger le corps (à lutter contre sesdégénérescences) à travers des jeux collectifs où la motricité est privilégiée. La gymnastiquerythmique influencée par la danse d’Irène Popard participe donc pleinement de cetteorientation pédagogique en vue de développer « un esprit sain dans un corps sain » (Arguel,1992/1).

En 1958, les jeunes enseignantes de l’ENSEP rencontrent Karine Waehner aveclaquelle elles se familiarisent avec la danse moderne allemande de Mary Wigman. Unenouvelle conception du corps vient s’affronter au modèle du corps sportif ou du corps dansantacadémique, idéalisé, dont la forme s’impose de l’extérieur vers le dedans (Dufor, 1999). Lesprofesseurs rencontrent ainsi l’expressivité « libre », alors que leur formation est plutôtdominée par une conception du corps performant, mécanisé dans des exercices analytiques(Arguel, 1992/1). La recherche du bien-être dans les mouvements vient peu à peu s’opposeraux violences physiques et à l’esprit de compétition, au moins pour un certain nombre deprofesseurs d’EPS. Des articles de la revue EPS (en 1959) relayent cette nouvelle idéologietandis que les enseignantes commencent à connaître d’autres formes de danse « libre »(Solane, Malkowski) qui promeuvent, comme pour la danse moderne allemande de Wigman,une expérience du geste « juste » et « naturel. » (Coltice, 2000).

II. Les années 60-70 : le bouleversement des valeursEn 1960 les candidates au concours de professeur d’EPS peuvent présenter des

« performances » de danse (qui n’est pas appelée « danse » mais « rythmique » dans les textesofficiels). En 1966, la formation des enseignants d’EPS donne la possibilité de s’initier àdifférents genres de danse (classique, moderne, contemporain, jazz et folklorique). Ainsi,l’arrêté du 12 décembre 1966 introduit le terme « danse » dans les matières à option auxépreuves de classement du professorat d’EPS (Arguel, 1992). Parallèlement, la dansecontemporaine trouve une légitimité de plus en plus forte auprès des professeurs d’EPS quis’intéressent aux approches du corps inédites de la danse moderne, notamment à celles deMary Wigman et de Martha Graham. Le modèle de danse de Béjart est également fortement

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apprécié et donne un autre sens à la danse : une danse dépouillée, aux bases académiques maisen rupture avec la danse institutionnelle.

Les instructions de 1967 encouragent le sport, moins la gymnastique. Le jeune estconçu alors comme un individu à « développer » à « épanouir » physiquement,intellectuellement et moralement. Les textes officiels s’appuient sur des considérationspsychologiques et tentent un compromis entre deux orientations dominantes, à savoir uncourant inspiré de Piaget considérant les stades du développement et mettant en avantl’unicité psychomotrice de l’enfant ; et un courant plus « culturel » visant à penser le sportcomme une socialisation. D’après Michèle Coltice, la danse fait alors partie du même grouped’activité que la gymnastique, mais est introduite l’idée de « création personnelle » et d’uncorps inventif et « ressenti ». L’influence de l’expression corporelle est forte. Une tensionapparaît ainsi entre les sports de compétition mettant en jeu un rapport au corps compétitif,tout en force et en puissance, et une approche expressive du corps en mouvement censéevaloriser l’expression de soi et des émotions, l’aisance corporelle et une motricité qui seconstruit par elle-même et non par imitation de gestes codés (Coltice, 2000). Pour Gil Mons,l’expression du corps est un mythe qui a dominé la pensée des enseignants pendant toute cettepériode (Mons, 1998).

Jusque dans les années soixante-dix, l’opposition entre sport et expression (art) rejointglobalement une différenciation sexuelle. Le danseur est vu de manière négative alors que lesportif est le petit « soldat » qui combat au sein de son équipe des valeurs positives. Le milieusportif est dominé par ce second modèle (Midol, 1992).

III. Les années 1980 et le début des années 1990 : la période demilitantisme

À partir des années quatre-vingt le dialogue entre sport et art change de ton, aidé par lamédiatisation d’activités sportives moins compétitives, plus « fun » qui démultiplient lessensations. Cependant, quand on observe qui écrit et défend la danse à l’école, l’on constateque cela reste majoritairement une affaire de femmes, aujourd’hui encore. Deux enseignantesvont particulièrement être prolixes et œuvrer au développement de la danse à l’école, il s’agitde Marcelle Bonjour que nous avons déjà évoquée et qui provient initialement du monde del’enseignement de l’EPS, ainsi que de Françoise Dupuy qui, rappelons-le, a été l’une despionnières de la danse moderne française après la seconde guerre mondiale, avec DominiqueDupuy, Karin Waehner et Jacqueline Robinson.

Dans la période 1970-85, l’activité danse est associée aux activités physiquesd’expression. Marcelle Bonjour comme Françoise Dupuy mettent en garde contre l’aspectludique et distractif de la danse à l’école. Marcelle Bonjour souhaite que la danse soit associéeà une « culture artistique corporelle » et soit considérée comme un moyen d’accéder à laculture contemporaine et au patrimoine culturel. Dans un même temps, elle valorise la« pédagogie de l’acte créateur » consistant à libérer pour autoriser puis à restreindre (par desconsignes) pour réaliser (Bonjour, 1992). Sur le plan des acquisitions, Marcelle Bonjourinsiste sur la revalorisation des sensations dans l’apprentissage en associant forme etsensations éprouvées, proposition qui va donc à l’encontre des pédagogies formelles etacadémiques de la danse.

Il s’agit également de convaincre du bien-fondé de la pratique de danse sur le« développement » de l’enfant. La phase de persuasion des discours militants de l’époquetend alors à « naturaliser » la danse, quitte à engendrer une contradiction entre la dansecomme « besoin » naturel de l’humain et la danse comme pratique artistique et culturelletransmise à l’école.

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« L’enfant d’aujourd’hui, coupé de ses racines et de ses fonctions primordiales, a ledroit, pour ses besoins d’énergie vitale, que lui soit restitué, d’une façon ou d’une autre, ce quiva permettre un accomplissement de la beauté et j’irai plus loin en pensant qu’un enfant quin’aime pas danser, c’est un peu comme un enfant qui n’aime pas jouer… […] cette recherche del’extase — ce besoin d’osmose avec les rythmes du monde, est un besoin que nous éliminonstrop souvent de notre vie, mais qui reste là, présent, enfoui, à l’état latent. » (Dupuy, 1986 : 1).

En 1985 on assiste à l’institutionnalisation des APEX pour les collèges et lycées. Celacorrespond également à une période de didactisation de la danse et des activités physiquesd’expression basée sur l’émotion et la symbolisation du geste (Mons, 1992).

IV. La fin des années quatre-vingt-dix : les APALes années quatre-vingt-dix fait entrer la danse à l’école dans une période de

reconnaissance, encore fragile mais s’affirmant de plus en plus. À partir de 1996, participantdorénavant des APA (activités physiques et artistiques qui comprennent la dansecontemporaine, la danse théâtrale, la post modern dance, le Butoh ainsi que les danses ditessociales : danses de rue, danse jazz, et les danses traditionnelles, ainsi que les pratiques decirque, le mime, les activités théâtrales) la danse doit répondre aux finalités éducatives del’école et aux principes généraux de l’EPS et de « développement de la personne. » (Cadopi,1998). En effet, il s’agit de développer les « capacités nécessaires aux conduites motrices » et« l’accès aux connaissances relatives à l’organisation et à l’entretien de la vie physique » envue, d’après Michèle Coltice, de contribuer au développement de la santé, de l’autonomie etde la responsabilisation des élèves. Dans un contexte dominé par la médiatisation des« violences scolaires » et par un discours quasi unanime sur la citoyenneté, la danse dansl’EPS à l’école n’échappe pas au sens commun qui veut que l’éducation physique et sportivecontribue à former les citoyens en développant des notions de valorisation de soi, de maîtrisede soi et de la communication avec les autres, d’expression, auxquelles se rajoutent pour ladanse les notions de démarche artistique et créatrice, de prise de décision dans l’actionmotrice, et de développement des perceptions sensorielles, d’émotion.

V. Le contexte idéologique et politique actuelParce que la danse en tant que pratique artistique s’est en partie affiliée aux politiques

d’action culturelle à l’école (peut-être dans une volonté plus ou moins consciente dedémarquer la danse de l’éducation physique et sportive en la rapprochant du pôle artistique),les discours sur la danse à l’école dans les années quatre-vingt-dix se joignent fréquemment àceux émanant des acteurs de l’action culturelle. La culture (et l’art y participe) est interprétéeen tant que « clé » « pour comprendre le monde » « mieux y vivre et s’y épanouir. »Dispensée à l’école, la culture ou l’art aiderait à former des « adultes responsables », des« citoyens », en apprenant aux élèves à « maîtriser les moyens d’expression et decommunication » et à se « responsabiliser » (Montférier, 1999). Le sens idéologique dominantde ces actions relèvent de la « démocratisation culturelle » qui vise l’égalité des chances pourtous et l’intégration scolaire pour les élèves défavorisés.

« Qu’est-ce que l’intégration ? Ce n’est pas un fait, un constat, ce n’est pas unecaptation, une mise au pas, un garde à vous, un alignement culturel, l’intégration est unedémarche intentionnelle. L’on s’intègre, on n’est pas intégré, capté par une communauté quis’évalue hiérarchiquement, culturellement supérieure, mais au contraire c’est parce que j’ai unedémarche intentionnelle de proposition et d’échange de mes propres normes et de mes propresvaleurs, dans l’appropriation des codes culturels des autres et des symboles communs, que jepeux m’intégrer. Je reviens sur cette idée, car, pour moi, l’art est facteur d’interculturalité etd’intégration. » (Bonjour, 1995).

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« [La danse à l’école] est chemin d’éducation […] dont l’enjeu principal va être d’aiderl’enfant à situer, épanouir, affirmer sa singularité et tenter de construire son identité à traversl’expressivité corporelle. Ainsi, la danse peut-elle être facteur de réconciliation avec soi-mêmeet participer à ce titre à la réussite et à l’intégration de tous les élèves à l’école. » (Lascar, 2000).

Le discours idéologique sur la démocratie et l’intégration par la culture prend deuxvoies : la première a pour objectif de dispenser La « Culture » à tous les individus ; l’autreprône la pluralité culturelle. Ces deux pôles ne sont pas propres à quelques auteurs défendantla danse, la culture ou l’art à l’école ; nous les retrouvons dans des discours officiels desinstitutions culturelles, et dans ceux de l’Education nationale. La loi d’orientation surl’éducation (10 juillet 1989) se fonde ainsi sur l’objectif d’un enseignement de savoirsfondamentaux, de la participation à la réussite de tous, de l’encouragement de l’acquisition deméthodes (apprendre à apprendre), du développement de l’interdisciplinarité et de l’aide à laconstruction du projet de l’élève (autonomie) en vue de « préparer le citoyen dedemain. »(Perez et Thomas, 1994).

Dans le cadre des politiques culturelles, Virginie Milliot estime que le but est dereconnaître positivement une jeunesse fortement stigmatisée par la médiatisation des« violences urbaines. » Il s’agirait de « valoriser les formes culturelles issues de ces espacesde diversité, afin de construire des référents positifs et d’accroître le sentiment d’appartenancede ces populations. » (Milliot, 2000 : 9). Au niveau de l’école, Raymond Cittério précise quel’action culturelle s’est développée pour aider l’école à prendre en compte un public de plusen plus hétérogène, à réagir devant les difficultés sociales et celles liées à l’urbanisation (ilcite la perte des racines, les difficultés d’insertion professionnelles, les cultures importées).De fait, l’action culturelle a émergé dans l’école pour trois raisons : 1°) des raisons sociales(dévalorisation des modes de vie des populations diversifiées, de leurs valeurs souventméprisées, ignorance des cultures des jeunes et celles des familles d’origine immigrée) ; 2°)des raisons éducatives (pour aider l’école à varier ses pédagogies notamment en ne laissantplus de côté l’artistique et la technique) ; 3°) des raisons pédagogiques (pour privilégier lavoie expérimentale dans l’acquisition des savoirs et pour aider à l’autonomie des élèves dansune classe où chacun peut être valorisé) (Cittério, 1993).

Un des outils privilégiés de la « démocratie culturelle » est donc l’art contemporainentendu comme un « langage libérateur » ou permettant de « communiquer » tout enparticipant à la lutte contre les inégalités culturelles et sociales. Cette idéologie s’appuie surl’idée que les populations éloignées de la culture scolaire (les immigrés et leurs enfants) sont« enfermés » ; l’art devient donc un moyen de lutte contre « l’enfermement des populations »dans des « ghettos » sociaux et culturels ou dans des codes et des normes culturelles (commeceux de la danse hip hop) qui ne sont vues que du côté des ces « cultures plurielles » etpopulaires, jamais ou rarement du côté de la culture contemporaine légitime. Ces catégoriesde pensée et de jugements, politiques autant que pédagogiques, conduiront plus ou moinsconsciemment un grand nombre de didacticiens de la danse à l’école (au moins quand ladanse se fait éducation artistique) à rechercher les fondamentaux de la Danse définie comme« art du mouvement » enseignés à « l’Enfant » ou à « l’Adolescent » (perçu comme une entitéuniverselle qui se « développe » ou « s’épanouit ») pour qu’il s’ancre dans une démarche decréation et atteigne une autonomie dans son travail. Nous y reviendrons.

« Il faut conquérir par la danse contemporaine et l’art contemporain, la culture de basequi permet de choisir d’aller vers les danses du patrimoine, vers la danse classique, etc. Lesadolescents qui démarrent par le rap sont dans une culture contemporaine qu’il faut décoder etavec laquelle il faut composer ; c’est la culture de leur environnement […] Quand on propose àdes adolescents de les faire travailler en danse, on retombe dans des modèles les plus prégnants,les plus habituels aux ados, et il est extrêmement difficile de les faire passer dans un travail decréation. » (Bonjour, 1992 : 81 et 91).

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« L’éducation artistique fait partie de l’éducation globale de l’enfant. Elle est pour lejeune enfant et pour l’adolescent un aspect majeur du développement de sa personnalité et de saréussite dans la vie et dans sa vie […] En conséquence, l’acte éducatif vise à faciliter, àpromouvoir, à étoffer tout ce potentiel d’humanité dont l’enfant est porteur. » (Leguil, 1999 :23).

Contrebalançant les orientations homogénéisantes (et légitimistes) de la « Culture » oude la « Danse » à l’école, se fait aujourd’hui entendre un discours revendiquant le pluraliste etvalorisant l’altérité et les expériences « métissées » en prenant en compte la diversité descultures, celles des immigrés, celle (s) de la « jeunesse ». Ce discours n’exclut cependant pasles présupposés du premier ; de fait, la danse contribuerait à « l’éducation du citoyen endéveloppant la curiosité pour le patrimoine des différentes cultures. » (Romain, 2001 : 15). Lapluralité culturelle est généralement requise comme « moyen » pour atteindre les élèves(comme faire pratiquer la danse hip hop ou la capoeira aux élèves) et pour les faire accéder ladanse chorégraphiée contemporaine, celle qui en fin de compte est reconnue par les structuresculturelles.

« Si la danse est marquée par différents styles, il ne s’agit pas d’enseigner à l’école lestechniques propres à chaque style, comme on le fait dans les conservatoires, mais plutôt ce quiest commun à toutes les danses. » (Romain, 2001).

« L’approche culturelle s’appuie le plus souvent possible sur des pratiques et desœuvres contemporaines proches de la sensibilité des élèves […] ou sur certaines dansesethniques, anciennes et actuelles. Elle s’attache à mettre en évidence l’évolution des langageschorégraphiques avec ses filiations et ses ruptures […] Pour se faire, l’approche culturelleexploite les ressources des programmations locales, des diffusions de spectacles, desmanifestations proposées par les structures culturelles proches, des travaux d’artistes enrésidence et, bien évidemment, des festivals nationaux lorsqu’ils sont accessibles. »24

Autrement dit, la compréhension d’un nombre important de discours didactiques sur ladanse à l’école ne peut se dispenser d’une recontextualisation sociale et politique. Ce contexterepose sur une tension idéologique constituée d’une part d’un discours de démocratieculturelle tendant à valoriser une culture universelle et laïque conforme au modèle républicaind’intégration (faire connaître aux enfants la culture contemporaine et leur patrimoine culturelpour mieux les intégrer à la société) et oeuvrant contre la « ghettoïsation » « l’enfermement »culturel, et d’autre part un discours plus discret que le premier revendiquant la pluralitéculturelle pour elle-même pour une société « métissée » d’ « inclusion » (Milliot, 2000/1).Dans les deux cas, l’idée de citoyenneté est valorisée et jamais interrogée de manièreépistémologique afin d’en saisir toutes les implications idéologiques et politiques. Elle sefonde sur un implicite « démocratique » mettant en jeu le principe d’autonomie individuelle etqui, comme le montre Bernard Lahire, universalise le « droit pour chacun de disposer dupouvoir d’agir socialement. » (Lahire, 1999 : 96). Enfin, en rabattant l’éthique sur le culturelcomme l’écrit Bernard Lahire, l’école (et la culture légitime/scolaire) se pose en mode desocialisation capable de former des individus moralement corrects (les citoyens), jetant ainsile doute sur les autres modes de socialisation (notamment familiaux) et sur les pratiquesculturelles éloignées de la culture scolaire (Lahire, 1999 : 313).

VI. Des enseignants et des pratiques- Des résistances toujoursPlusieurs enquêtes portant sur les enseignants montrent encore des résistances et des

craintes vis-à-vis de la pratique de la danse à l’école. Dans une étude portant sur 127enseignants, hommes et femmes ayant le CAPEPS, âgés en moyenne de 43 ans et en poste en

24 B.O. du 5 août 1999, Arts : domaine danse…, op. cit., p. 8.

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collège ou lycée, Marielle Cadopi remarque que seuls 58 professeurs enseignent la danse àleurs élèves (Cadopi, 1998). Pour la plupart d’entre eux, les obstacles à l’enseignement de ladanse relèvent du cadre scolaire lui-même : le corps dansant échapperait aux normesscolaires. Par ailleurs, leur conception de ce corps dansant induit l’expression d’unesensibilité et d’émotions, difficile à transmettre selon eux, et recouvre fréquemment l’idéeselon laquelle la danse n’est pas une activité suffisamment virile pour les garçons. Neretrouvons-nous pas dans ces résistances la force des stéréotypes sociaux qui fondaient déjà ladifficile entrée de la danse à l’école avant les années quatre-vingt ?

La difficulté majeure pour les enseignants serait donc que le corps dansant est tropéloigné du corps sportif qu’ils connaissent et mettent en jeu habituellement. Méconnaissantégalement l’activité, souffrant d’un manque de didactisation scolaire de la danse, ils se« sentiraient » ainsi démunis pour élaborer des situations d’apprentissage (Cadopi, 1998).Pour remédier à ces écueils, Marielle Cadopi préconise la mise en œuvre des formationspersonnelles pour que chacun se familiarise avec cette culture du corps « sensible », ainsi quedes formations professionnelles en formation initiale et continue, et en travaillant avec desprofessionnels de la danse.

Geneviève Cogérino a également mené des entretiens auprès de 47 enseignants d’EPS.Son analyse rejoint globalement celle de Marielle Cadopi. Elle fait apparaître que plusieursfacteurs entre en jeu dans le refus des enseignants d’EPS à proposer de la danse à leursélèves : la difficulté à trouver des idées de mise en situation des élèves, des difficultés à faireévoluer le comportement de certains élèves réfractaires à la danse, un manque de formation endanse des enseignants, un manque de « pratiques de références » stables. L’auteur montre quela notion de risque est au cœur des résistances enseignantes. Le risque encouru serait « de nepas savoir où on va » pendant la séance, « de ne pas se sentir à l’aise » pour les professeurs etpour les élèves, et enfin de conduire l’élève sur un terrain non balisé scolairement (Cogérino,1999).

- Des maîtres et des discours sur les situations didactiques en danseDans sa thèse, Dominique Commeignes étudie les pratiques pédagogiques des

enseignants d’EPS dispensant des leçons de danse à l’école maternelle et à l’écoleélémentaire, plaçant au centre de son analyse la dimension imaginative — l’imaginairecomme véhicule d’idées, d’images, de représentations, de désirs de faire et révélateur desrapports que le maître entretien avec la réalité pédagogique (Commeignes, s.d.). L’auteur sepositionne dans une sociologie du « curriculum » qui, sans nier les inégalités sociales etculturelles des élèves d’origine populaire devant la culture scolaire, privilégie l’analyse desdécalages entre ce que le maître fait sans le savoir (curriculum caché) dans le cadre de ce quiait prescrit à partir des consignes et des discours pédagogiques (curriculum formel). L’auteurs’interroge également sur les valeurs transmises dans les pratiques de danse à l’école et auxconditions de transmission de ces dernières. Sa première hypothèse suppose que les pratiquespédagogiques sont hétérogènes et déploient des options idéologiques explicitement ouimplicitement formulées, qui dépendent aussi de facteurs extérieurs à la pratique (tout en laconditionnant réciproquement), à savoir : les origines et la position sociales, l’âge des maîtres,et le public de l’école. La seconde hypothèse s’attache aux facteurs subjectifs de l’activité, dusens donné à la pratique, de la manière dont les maîtres perçoivent la relation pédagogique.

D’un point de vue méthodologique, Dominique Commeignes a analysé des discours demaîtres, en passant des entretiens dans des écoles recevant des publics différents et en faisantvarier l’origine sociale, l’âge et le sexe des enseignants. Elle avoue avoir eu des difficultés àtrouver des hommes pratiquant la danse dans le cadre de l’EPS. De fait, 3 hommes sur 18enquêtés ont été interviewés. La pratique de danse étudiée concerne uniquement la dansecontemporaine.

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Son étude fait apparaître que l’enseignement de la danse contemporaine est un choixpour les enseignants, mais n’est pas aisé ; il s’enracine dans des orientations pédagogiquesparticuliers, qui ne se réduisent pas au cours de danse. En effet, pour les enseignantsinterrogés, la pratique de danse contemporaine à l’école peut être un levier de transformationdes pratiques pédagogiques en général. Ils sont persuadés qu’elle « apporte quelque chose »aux élèves et ils légitiment leur activité en mettant en exergue les points positifs pour lesélèves et pour leur classe : la pratique aurait changé l’ambiance de la classe, certains élèvesseraient valorisés par la pratique, pour d’autres elle canaliserait leur agressivité, elle favorisaitl’autonomie, unirait la classe, modifierait (en mieux) les rapports maîtres et élèves.

Pour certains, la pratique de danse porterait ses fruits dans d’autres disciplines plus« scolaires ». Ces discours tendent vers l’idée de transférabilité ou de transformation decertaines dispositions scolaires. Par la danse, des élèves seraient susceptibles d’acquérir oud’activer des dispositions à se concentrer, à mieux être avec les autres, etc., qu’ils mettraientaussi en œuvre dans d’autres situations scolaires. Bref, pour beaucoup de maîtres, la dansedévelopperait des qualités ou des états psychiques permettant une meilleure intégrationscolaire.

« Les maîtres parlent de ces qualités — dont il apparaît pertinent de rechercherl’émergence —, en terme d’attitudes plaçant le sujet au centre de relations, à lui-même, auxautres, au monde (il s’agit d’épanouissement, d’intégration à un groupe, de recherche de soi, deréaction vis-à-vis des apprentissages…) » (Commeignes, s.d. : 219).

Pour d’autres maîtres, plus rares, la danse à l’école serait totalement autonome. Enfin,quelques-uns estiment que la danse développe la sociabilité en apprenant aux élèves à « fairela rencontre de l’autre » et en développant le respect, la confiance, l’écoute des autres. Pour laplupart, la danse a remis en question leurs manières de faire et les a amenés à réfléchir defaçon critique au fonctionnement pédagogique dans son ensemble.

L’auteur distingue alors trois types d’approches pédagogiques :1°) une approche globale de la danse : il s’agit de la rendre accessible aux enfants et

donc tout est prétexte à produire un mouvement (une idée, un événement de la classe…) ; ilfaut que les élèves s’expriment par la danse. Dans cette approche, les maîtres amènent laclasse voir des spectacles, à rencontrer des artistes.

2°) une approche inductive de la danse : l’enseignant adapte des contenus de danse auxélèves en vue de produire un résultat à montrer aux autres. La pratique prend place dans unprojet de classe et n’est qu’un moyen parmi d’autres qui vise la production d’un spectacle.

3°) une approche qui alterne les deux précédentes : l’enseignant travaille la qualité dumouvement pour améliorer l’expression des élèves, tandis que le spectacle peut devenir unélément fort de structuration de la pratique.

L’analyse des discours des maîtres conduit l’auteur à construire trois idéaltypesd’enseignants de danse contemporaine à l’école :

- Les enseignants qui ont une approche philosophique considèrent ladanse comme l’occasion d’accéder à soi et de développer un regard sensible sur lemonde. Ceux-là sont plutôt critiques vis-à-vis de l’éducation scolaire. La danse estsouvent une sorte de combat militant qui leur permet de donner un sens à leur rôleéducatif.

- Le second groupe d’enseignants rassemble des maîtres pour qui ladanse est un moyen de développement de l’action éducative par une culture« ouverte » sur le monde et qui engendre la confiance en soi, l’écoute, l’autonomie…Il s’agit d’une position moins critique, plus nuancée que la première et qui ne remetpas en cause l’école.

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- Le troisième groupe correspond aux maîtres qui mettent la danse auservice de l’école ; elle a ici un rôle d’intégration des élèves à l’école et se développeen fonction de critères scolaires (Commeignes, s.d.).

Pour conclure ce chapitre, nous relevons que la danse à l’école à la fin des annéesquatre-vingt-dix et au début des années deux milles n’est pas encore une pratique pleinementaffirmée. Entre pratique artistique autonome et pratique scolaire, la danse à l’école se cherche,les enseignants hésitent. Les didacticiens oeuvrent pour leur apporter des outils. Dans cecontexte, les discours didactiques restent souvent emprunts de militantisme, qui visent àconvaincre de l’intérêt de la danse sur le « développement » de l’individu et/ou de son utilitépour acquérir des savoir-faire et des savoir-être favorables à une meilleure intégrationscolaire, en répondant aux valeurs et principes de l’éducation scolaire actuelle (former lecitoyen de demain, favoriser l’autonomie des élèves, développer le respect des autres, etc.).

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

Bibliographie du chapitre IV

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V.

LES DIDACTIQUES DE LA DANSE SCOLAIRE

I. Introduction. La danse mise au défi de la didactiqueSi la didactique « a pour objet d'étudier le processus de transmission et d'appropriation

des connaissances dans les aspects pratiques et théoriques de la connaissance qui sontspécifiques du contenu » (Vergnaud, 1989), les didacticiens de la danse sont tous despraticiens de la danse (donc en situation d'appropriation), et des enseignants (donc en situationde transmission). Dès lors qu'ils tentent d'écrire, ils rendent compte de cette double pratiquedont les cohérences et les continuités ne sont pas toujours réalisées. Ils sont au cœur de laproblématique de toute didactique qui est de proposer des modèles de transformation des"savoirs savants en savoirs à enseigner" sachant que les savoirs savants sont issus d'unparcours d'une pratique de danse avec des artistes. Ils sont donc validés par l'expériencecorporelle et acceptent difficilement la controverse. Les modèles didactiques sont sousl'influence des interrelations entre les didacticiens et leurs environnements culturels proches,une influence non seulement théorique mais bien inscrite dans les corps. Ils subissent aussi lapression de l'institution éducative vis à vis des valeurs et des méthodologies éducatives quiapparaissent plus contraignantes dans les formalisations d'écriture que dans les pratiquesréelles.

Les évolutions des modèles didactiques favorisent une approche compréhensive del'élaboration des savoirs scolaires. L'étude des relations entre les trois pôles du systèmedidactique que sont les savoirs - le maître - l'élève, incite à analyser les objets d'enseignement.Ceux-ci sont choisis à partir de pratiques culturelles et en relation avec les objectifs éducatifs,la transmission du maître et les effets attendus de la pratique, et enfin la nature des savoirsacquis. Nous verrons que dans la courte histoire de l'enseignement de la danse, ces modèles semodifient en fonction des contextes.

- Pourquoi parler de défi ?Plusieurs raisons peuvent être énoncées. S'il est du sens commun que danser s'apprend,

il est aussi évident qu'un ensemble de pas et de figures ne « mettent pas en danse »(Rochereau, 1998 : 52) et que se questionner sur les processus à mettre en oeuvre pourfaciliter "l'état de danse" engage davantage les personnes dans leur capacité à être en relationavec leur corps que dans la transmission des connaissances et des codes. Les questions sontdonc posées : peut-on déduire un savoir danser d'un savoir ou encore existe t-il un savoirdanser sans danser ?

Ensuite, les aspects affectifs et sensibles, en tous les cas d'ordre irrationnel, semblentsous-tendre les apprentissages et la relation maître-élèves. Ils sont pour Marielle Cadopi(1998) une des difficultés majeures que rencontrent les enseignants d'EPS : celle d'enseignerun corps sensible, émotionnel.

Le défi se situe aussi dans le système des valeurs véhiculé par les pratiques dansées.Entre libération corporelle festive, séduction, formatage et déréalisation corporelle et enfinobjet esthétique, la danse a t-elle une place à l'école ? L'histoire nous apprend que les textesofficiels de 1959 régissant l'éducation physique, interdisent l'enseignement de la danse « dontles messages et l'esthétique en rapport avec la musique sont d'une autre nature » qui échappe àl'éducation.

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Il importe alors de définir de quelle danse il s'agit. La diversité des pratiques socialespropose « une mosaïque, un puzzle d'apparences, de styles divers, un signifiantkaléidoscopique » (Peix-Arguel, 1980). Chaque style de danse institue un corps qu'il estnécessaire de révéler lorsqu'il est question d'enseignement et d'éducation. La question duchoix des pratiques sociales de référence est donc fondamentale pour le didacticien et reste unsujet de débats.

Défi enfin vis à vis d'une normalisation de toute pratique artistique. La didactique estune volonté de rationaliser l'acte d'apprendre et comporte un souci d'efficacité qui s'associemal avec les finalités de l'art. Ciro Bruni (1998) dit que la pédagogie instituée tue l'art. Ilrejoint en cela nombre d'artistes qui se sont exprimés violemment lors de la réglementation del'enseignement de la danse hors de l'école. L'art ne s'enseigne pas dit Françoise Dupuy, « il sefréquente ».

Didactiser la danse est donc toujours un acte douloureux de la part de ceux qui letentent, car l'acte même d'écriture réduit le champ d'expérience corporelle. Il est assezétonnant de remarquer que les modèles formalisés n'ont de sens qu'à travers une pratiquepréalable. Les praticiens que sont les enseignants d'EPS, témoignent largement de leurignorance de ces écrits. Ils ne les reconnaissent que par l'intermédiaire des pratiques de stagesou alors devant la nécessité de réussir un concours. Cette attitude conforte par la même queles savoirs d'action ou d'expérience que sont la danse ou l'acte d'enseignement nes'approprient qu'en situation expérimentale activant alors l'activité cognitive.

Les débats théoriques autour d'écrits didactiques ne concernent donc que ceux qui lesécrivent et les enseignants réorganisent leur modèle didactique par les expériences collectivesde danse en stage de formation qui tendent à homogénéiser les pratiques d'enseignement.

- La danse scolaire : une pratique dansée spécifique ?« La danse est une activité de production de formes, mais aussi de production de sens

qui vise une appropriation esthétique du réel par une mobilisation de l'imaginaire,s'investissant dans le pouvoir expressif du corps pour communiquer une émotion à desspectateurs »(Baffalio-Delacroix et Orssaud-Flamand,1991).

Cette définition de la danse des années 1990 à l'école est largement reprise parl'ensemble des didacticiens qui travaillent et écrivent sur la danse notamment dans la revueEPS, (revue de référence des enseignants EPS). L'orientation ainsi exprimée est un support deréflexion pour tous ceux qui tentent de rendre intelligible une didactique de la danse.

J. Gaillard (1995) dans cette revue fait l'analyse de cette conception de la danse enmettant au jour ce qu'il considère comme des dérives : l'une est de réduire la danse à unvocabulaire gestuel, l'autre d'associer, à la valeur expressive, la spontanéité et l'instantané.Enfin, attribuer à la danse des significations que le spectateur doit décoder, est le dernierégarement soulevé. L'auteur indique la difficulté pour les didacticiens, d'envisager la natureartistique de cette activité. Ce débat permet d'entrer directement dans ce qui constituel'histoire des idées et des didactiques de la danse à l'école. Oscillation entre ce qui est produit,du mouvement, des techniques corporelles plus ou moins sophistiquées ; Ce qui s'exprime,des émotions, des images, des significations ; Et enfin ce qui est communiqué est qui est del'ordre d'une culture artistique. Oscillation, car dans les débats et dans les pratiques ces troisaspects semblent difficilement pouvoir cohabiter et trouver des cohérences.

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- Une méthodologie pour l'analyseL'histoire des didactiques de la danse à l'école qui commence dans les années 1970

nous aide à comprendre comment s'enracinent des questionnements et se stratifient desconnaissances.

Nous avons fait l'étude des écrits didactiques publiés sous forme de livres faisantréférence dans la profession, d'articles dans la revue EPS et enfin, nous les avons mis enregard des textes des programmes. Notre grille de lecture envisage de révéler les orientationspédagogiques, les enjeux de la formation par la danse à l'école, les savoirs, savoir-faire etsavoir être qui sont mobilisés. Quels sont les publics scolaires premier et second degré, fillesou garçons, élèves en situation difficile désignés par ces écrits ? L'étude de ces didactiquesscolaires est menée à partir des années 1970 et suit les parutions des textes officiels quistructurent les différents contextes éducatifs.

Les années 1985/95 s'inscrivent dans le cadre de la reconnaissance de l'EPS commediscipline d'enseignement et les travaux de didactiques sont nombreux par demandeinstitutionnelle et par besoins de formation nouveaux. Enfin la dernière parution desprogrammes de 1996/2001 du second degré a provoqué en amont une production didactiquedans des académies dites pilotes qui représentent les différents courants et favorisent uneanalyse des consensus et des oppositions existant aujourd'hui dans les pratiquesd'enseignement.

Notre analyse de l'évolution historique tentera de mettre à jour les innovations enrupture ou en continuité avec des valeurs, des concepts, des progressivités dans lesapprentissages. Elle apportera des réponses possibles à la question de Bruner (1996 : 58) :« Qu'est ce qui vaut la peine d'être enseigné et qui permettra aux enfants de se construire unevision du monde dans lequel ils peuvent envisager une place pour eux-mêmes ? »

II. Les années 1970. Une place à l'école pour le corps expressif- Un contexte qui incite au militantisme pédagogiqueDe nouvelles instructions officielles, un élan pédagogique en faveur des activités

d'expression, la prise en compte de la danse comme activité éducative sont autant de facteursqui mobilisent les enseignantes à produire les premiers écrits didactiques. Ces enseignantessont issues de l'Ecole Normale Supérieure d'Education Physique, lieu de formation et derencontres avec des danseurs modernes. Elles sont toutes des praticiennes de la danse. Ellesparticipent à des compagnies professionnelles ou sont même auteurs de compagnie.

Le premier essai de didactique est celui écrit par deux enseignantes-artistes MoniqueBertrand et Mathilde Dumont (Pinok et Matho) en 1973 : L'expression corporelle à l'école,suivi en 1974, du livre Expression corporelle. Mouvement et pensée.

Le contexte dans lequel cette didactique apparaît, est tourmenté par des remises enquestion de trois ordres :

1°) contestation concernant l'éducation des jeunes par la pratique sportiveperçue comme une aliénation au technicisme et au rendement physique (Brohm,1972) ;

2°) contestation autour de la place du corps dans l'éducation par les travaux dela psychologie génétique (Piaget, 1974) et de la psychanalyse (Freud, 1971). Lespremiers montrent que de développement intellectuel de l'enfant s'élabore à partir del'action motrice, les seconds que le corps est le siège de l'inconscient, de tensions qu'ilconvient de prendre en compte pour une éducation visant l'épanouissement personne.Les thèses de Le Boulch (1971) révolutionnent aussi le monde de l'éducation

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physique. Il prône une éducation psychomotrice susceptible d'assurer « undéveloppement harmonieux qui se traduit à la fois par une motricité efficace etexpressive et par un bon équilibre émotionnel, conditions de l'enrichissement desfonctions mentales » ;

3°) contestation enfin des méthodes d'apprentissage qui amènent à considérerle développement des sujets comme un acte personnel de transformation lié à l'activitéadaptative avec la mobilisation des ressources affectives, motrices et cognitives(Wallon, 1970).

La didactique de l'expression corporelle s'empare de ces problématiques et tente detrouver une réponse éducative originale. Elle éclaire des pratiques d'enseignement que lestextes officiels de 1967 ne font qu'évoquer. Elle s'appuie aussi sur un contexte culturel richeoù s'expérimentent des pratiques d'expressions nouvelles, danse moderne, théâtre gestuel,mime. Jacqueline Robinson (1997) nomme ces années 1960/70 "Années de floraison" de ladanse. Le courant expressionniste issu d'Allemagne (Mary Wigman) s'incarne à travers lapersonnalité de Karin Waehner. Elle influence directement les enseignants d'EPS formés àL'Ecole Normale Supérieure d'Education Physique.

Après les événements de 1968, des pédagogues expérimentent avec leurs élèves denouvelles façons d'apprendre à partir des valeurs annoncées : expressivité et créativité, gagesdu renouveau d'un être social libéré et acteur de sa vie. L'expression corporelle à l'école estdonc l'objet d'un engagement idéologique et pédagogique qui modifie à la fois les perceptionsdu corps en mouvement pour les enseignants d'EPS initiés à la normativité des formessportives et gymniques et qui modifie aussi les pratiques pédagogiques dont l'activité del'élève devient première. « Tout l'art pédagogique consiste à s'adapter aux besoins de l'enfanten remettant en question son propre savoir » (Bertrand et Dumont, 1974 : 36)

- Les orientations pédagogiques : entre libération corporelle et activité adaptativeLa didactique de l'expression corporelle est une tentative de structuration cohérente

d'une activité physique éducative et scolaire. Elle s'inscrit dans les finalités éducatives quivisent le développement de la personnalité et de ses capacités à s'adapter à un environnementchangeant en mobilisant les aspects créatifs de la personne et la maîtrise de ses émotions.Cette didactique respecte la recherche de toute institution éducative à enseigner « ce qui vautla peine d'être enseigné et donc de s'efforcer de mettre l'accent sur ce qu'il y a de plus général,de plus constant dans les manifestations de la culture humaine » (Forquin, 1989 : 160).

L'engagement de la personne dans une expansion-communication maîtrisée estsouhaitée et se démarque donc des psychodrames, happenings, qui existent dans les pratiquessociales. Pujade-Renaud (1977) et le Groupe de Recherche en Expression Corporelle deToulouse (1970, 1972) expérimentent ces nouvelles voies d'expression et questionnent lesfinalités de l'institution scolaire qui sont normatives et ne laissent aucune place à un - être - au- monde libéré des carcans de la vie sociale.

Il importe de mesurer ici la mise en place, dans le cadre de l'éducation physique etsportive, d'une activité qui met le corps en jeu de façon tout à fait originale, voire mêmecontraire aux pratiques sportives et qui porte ainsi en elle dès le départ sa marginalitééducative. Ainsi se construit dans le cadre scolaire l'idée généreuse et perturbatrice d'unenseignement qui favorise l'expression du corps dont les formes ouvrent vers des réponsesimprévues, imprévisibles, où les émotions priment sur l'effectuation motrice.

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- La nature des savoirs, savoirs-faire et savoirs-être : Des moyens au service d'unthèmePour la première fois est proposé dans le cadre scolaire un traitement opérationnel du

mouvement expressif et inventif. Il s'appuie sur les travaux de Laban repris par Decrouxauquel il se réfère, qui caractérisent le mouvement à partir de composantes dont le jeucombinatoire ouvre les possibilités d'expression.

Là encore, s'établit un contenu de savoir qui ne sera plus mis en cause ensuite :l'articulation originale des facteurs du mouvement que sont le corps, l'espace, le temps,l'énergie.

Les élèves apprennent dans des situations pédagogiques à explorer les combinaisonspossibles à partir de mouvements très simples et non codifiés.

L'expression est aussi communication, et la recherche de lisibilité de ses actions estpermanente. La notion de thème prend alors tout son sens, à la fois comme inducteur del'activité exploratoire, de la créativité, et comme support à la création. Il s'agit d'élaborer desréponses originales non stéréotypées et maîtrisées en vue de les communiquer à autrui. Lethème peut à la fois être un matériau de départ de l'action, un processus à l'œuvre, uneintention pour communiquer. Le flou de ce nouveau concept va entraîner des interprétationsde la part des enseignants qui se traduiront souvent par une transposition corporelle d'undiscours ou d'une pensée. Inversant par-là même l'idée forte des didacticiennes pour quimouvement et pensée sont en inter relation permanente et s'enrichissent mutuellement,accroissant les capacités adaptatives de l'être humain. Le thème facilite aussil'interdisciplinarité et l'activité réflexive. La participation des élèves et l'échange verbalsuscité participent à l'appropriation des connaissances et à une première ébauche d'auto et deco-évaluation.

L'enseignant est alors un guide facilitant l'émergence de trouvailles personnelles dansdes situations contraignantes qui rendent compte d'une mise en jeu corporelle originale etmaîtrisée. Ce guidage est nouveau car il doit inciter l'élève à "oser être" à s'engager face auxautres dans un climat de sécurité. Le groupe est alors un moyen pour s'affranchir.

- Les publics visésL'école maternelle et primaire sont les lieux d'expérimentation féconds pour les

didacticiennes Bertrand et Dumont qui mettent à l'épreuve leur questionnement à savoir quoienseigner, comment enseigner, quelle danse ? L'art du mouvement s'adresse à tous les élèves,filles et garçons, prenant ainsi le contre pied des propositions institutionnelles qui valorisentl'enseignement de la danse et des activités d'expression pour les filles. « La danse n'est ni aumasculin ni au féminin » (Bertrand et Dumont, 1974 : 31)

Les enseignants doivent adapter leur enseignement aux possibilités motrices,affectives et cognitives des élèves. La démarche proposée reste commune à tous, enfants etadolescents.

- Les didactiques et les programmes : un dépassement et une mise en oeuvreLes écrits de Bertrand et Dumont affinent sans contredire les textes officiels de 1967.

Il apparaît une conception élargie du corps dans ses capacités à inventer et ressentir. La priseen compte des « qualités psychomotrices pour créer les gestes propres à son style, s'exprimermieux... favoriser une création personnelle » est affirmée. L'enseignant doit chercher àintéresser les élèves, à favoriser l'expression spontanée et à mettre en place des situationscorrespondant au niveau des élèves. Cependant, la maîtrise des actions est déterminante dans

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les apprentissages. La relation musique-mouvement incite à des coordinations gestuellesmesurées et l'expressivité du corps sert une intention.

Les instructions officielles reflètent une réalité métissée où des pratiques nouvellesviennent se superposer aux plus anciennes. Les valeurs éducatives l'emportent sur les valeursculturelles des arts. La danse est d'abord une activité d'expression. Les approches esthétiquesdu corps évoluent et créent de nouvelles conventions : l'esthétique des formes laisse la place àl'esthétique des sensations. L'authenticité de l'être (beauté intérieure) prime sur les figurescorporelles (beauté extérieure). La transformation des perceptions ne s'opère pas sansrésistance et querelle entre enseignants déroutés par des références éloignées de leur champculturel d'appartenance.

Les articles de la revue EPS reflètent cette difficulté en proposant des articles dontl'éclectisme est évident. Certains incitent à une mise en place de la pédagogie nouvelle oùl'intérêt des enfants, leur activité créatrice sont le support des apprentissages (les dansescollectives sont aussi un support à l'activité créative). Le jeu est réhabilité comme moyend'apprendre. Ces articles visent un public de jeunes enfants.

D'autres articles au contraire proposent une approche plus technique des danses.Cependant, ce sont les qualités du mouvement qui sont recherchées, par une recherched'écoute et de concentration, par une éducation sensitive aidée en cela par l'utilisationd'images évocatrices. Les ressources organiques sont mobilisées et l'esthétique proposée estcelle de la danse moderne.

La danse libre de Malkowski est une référence pour l'activité globale qu'incitent lesmouvements naturels débarrassés des stéréotypes sociaux. Les instituteurs utiliseront la danselibre comme moyen d'éducation pour les enfants. Dans le second degré elle n'existe pascomme référence culturelle.

III. Les années 1985/95. Une place à l'école pour la danse contemporaine- Un contexte qui incite à justifier une pratique d'enseignementLes didactiques de la danse sont nombreuses et la parution de livres marque l'effort

produit par les didacticiens pour formaliser des pratiques d'enseignement au-delà de la simpleélaboration de fiches pratiques. Des recherches sont menées dans le cadre universitaire(Arguel, Cadopi) parallèlement à l'écriture des praticiennes (Metzler, Bonnery, Guerber-Walsh, Leray, Maucouvert, Levieux, Perez et Thomas, Pinot et Terret). Ces derniersparticipent à l'application générale des éducateurs à utiliser les connaissances scientifiquesnotamment celles de la psychologie cognitive pour ce qui relève des apprentissages et aussi dela sociologie pour les problèmes relatifs à la culture.

D'autres auteurs s'expriment dans des articles (Orsseaud-Flammand, Delga, Pineau,Dréan Bessou, Bonjour, Bar). Leur liste n'est pas exhaustive, mais ceux que nous citons sontles plus marquants de ces années de « justification et de démonstration de l'ancrage de lapratique de la danse à l'école » (Saint Jores, 1989).

Le contexte scolaire est favorisant : de nouveaux programmes sont envisagés et lessavoirs enseignés après une période de remise en question sont réhabilités et doivent fairel'objet « d'un examen approfondi » (Chevènement, 1995). Un appel à la modernisation del'école est lancé par le ministre qui donne pour objectif l'accès au lycée pour un nombre accrud'élèves. Il est donc nécessaire de revoir les enseignements afin de mieux les adaptés auxenjeux sociaux, et de reconsidérer les méthodes pour apprendre en tenant compte del'hétérogénéité de plus en plus grande des élèves. Les sciences de l'éducation connaissent unessor important dans les années 90 et si elles n'entrent pas directement dans les élaborationsde contenus d'enseignement, elles "produisent des savoirs sur un processus - l'éducation - qui

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est aussi un champ de débats philosophiques et politiques à haute teneur symbolique et unchamp de pratique" (Charlot, 1995 : 35). L'intelligibilité qu'elles proposent interroge lespratiques d'enseignement. Les travaux de Bourdieu et Passeron (1970) bousculent lestentatives d'innovation dans le cadre d'une école qui loin de ses finalités annoncées ne permetpas l'évolution sociale par l'éducation.

La décentralisation incite les établissements scolaires à penser leur projet éducatif entenant compte de la population scolaire et des ressources locales. La loi d'orientation de juillet1989 insiste sur la nécessité de mettre l'élève au centre du système éducatif.

Le contexte de l'EPS est aussi en effervescence de productions de contenusd'enseignement et d'évaluation des acquisitions par les élèves. En 1982, une équipe derecherche en didactique est crée à l'Institut National de Recherche en Pédagogie. Le syndicatdes enseignants d'EPS (SNEP) porte aussi le désir d'une professionalisation reconnue « ledéveloppement des productions didactiques est pour l'EPS comme pour les autres disciplinesune condition décisive pour réussir la démocratisation de l'enseignement » (Rouyer, 1985).

L'éducation physique se soumet donc aux exigences de l'institution, à ce que PierreArnaud (1992) appelle "l'orthodoxie scolaire" qui privilégie l'acquisition de savoirs et deconnaissances sur la pratique physique ludique et symbolique, spontanée et culturellementsituée.

Des notions importantes construisent les discours pédagogiques : le projet, l'évaluationdes acquisitions, la différenciation.

La danse scolaire trouve sa place dans les programmes et comme dans les autresdisciplines, les enseignants cherchent à montrer sa spécificité et son importance dans laformation globale de l'élève. Les modélisations didactiques les plus nombreuses fontapparaître la danse contemporaine comme pratique culturelle de référence, une pratiqueculturelle métissée, engageant l'interdisciplinarité et favorisant l'expression de stylespersonnalisés. Une définition de la danse scolaire semble trouver un certain consensus :« danser, c'est produire seul ou à plusieurs des formes motrices signifiantes pour quelqu'un,quelles que soient les formes de pratiques sociales et les motifs de danser » (Cadopi etBonnery, 1990 : 133). Comment les différents auteurs rendent-ils opérationnelle cettedéfinition ?

Les orientations pédagogiques s'affirment et évoluent nettement vers despréoccupations culturelles. S'il est encore question de développement de l'être dans toutes sesdimensions (Arguel), d'expression et de communication suscitant l'imaginaire et lesymbolique (Bessou, Metzler, Orsseaud-Flammand, Guerber-Walsh) un glissement s'opèrevers des objectifs éducatifs ancrés dans les pratiques artistiques. Il est alors question"d'appropriation esthétique du réel" (référence à Vaross) d'activité artistique où le goût del'art, la sensibilité au monde est recherchée. Au-delà donc d'une exploration personnelle de soimise en exergue dans les années précédentes, il s'agit de construire une identité parl'expression d'un style personnel qui prend en compte les codes esthétiques contemporains etdont la dialectique symbolisation-stylisation produit le mouvement dansé original.

Ainsi, la danse à l'école doit « favoriser l'accès au fond culturel plutôt qu'à des formescorporelles particulières » (Arguel, 1980). Cette dernière montre que chaque technique dedanse correspond à une approche de l'homme différente, elle encourage, une forme de dansequi privilégie l'expérience et le vécu au détriment du vu et la permissibilité technique de lapart de l'enseignant. Cependant, l'attitude expérimentale ainsi que la recherche du langagecorporel personnalisé incitent à l'acquisition de techniques fondamentales qui vont permettrela construction d'habiletés morphocinétiques (Cadopi et Bonnery), de motricité expressive(Orsseaud-Flammand, Metzler, Bessou). Des effets sont attendus au niveau du corps

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(organique et imaginaire), du mouvement et de l'esthétique (Guerber-Walsh, Leray,Maucouvert).

Les élèves doivent pourvoir vivre un projet de création, qui met en jeu un processus etune démarche qui sollicitent la créativité, mais aussi une connaissance des conventionsesthétiques. L'acte chorégraphique communique du sens et des émotions qui sont lus etappréciés par d'autres, formant ainsi ce que Marcelle Bonjour appelle une "communautéprovisoire" (1995 : 101) qui est capable de compréhension et de construction de mémoirefavorisant par là une acculturation positive.

Est affirmée dans tous les écrits une danse scolaire, qui ressemble à la dansecontemporaine, « type de danse perçu comme le plus favorable à cette démarche de création »(Pinot,Terret 1995). Elle est expressive et créative et en cela incite à l'utilisation de langagesdiversifiés. Les deux valeurs ainsi attribuées à la danse scolaire alimentent des finalitéséducatives qui d'une part cherchent à promouvoir la personne dans sa totalité motrice,affective et cognitive, et d'autre part à faciliter l'entrée des élèves dans la culture artistique.

La nature des savoirs enseignés s'exprime à partir de la recherche de "fondamentaux",de "paramètres intrinsèques" susceptibles d'englober l'ensemble des styles de danse. On peutrépertorier plusieurs sortes de savoirs en rapport avec les éléments caractéristiques de lacréation :

1°) Des savoirs liés au mouvement, à la motricité expressive, au corps, aux formesmotrices. Ceux-ci font référence à des travaux scientifiques sur les apprentissages moteurs. Ilssont repris dans le cadre de la spécificité du mouvement dansé par Marielle Cadopi quis'inspirant de Paillard, Pailhous et Serre, explique que la danse est « une activité reposantprincipalement sur l'utilisation d'actions motrices à modèle interne formel qualifiées dès lorsde morphocinèses » (1990) L'importance de l'articulation entre les processus sensori-moteurset cognitifs incite les didacticiens à promouvoir des actions motrices intentionnellesparticulières car l'intention n'est pas hors du mouvement. Ainsi, pour engager la sensibilité del'élève dans la qualité de la forme motrice qu'il produit, il importe de le centrer sur lemouvement lui-même. Le traitement didactique de Laban identifie les multiples combinaisonspossibles entre les facteurs du mouvement que sont le corps - l'espace - le temps - l'énergieafin de trouver des qualités de mouvements correspondant à des émotions à partager. Cesmatériaux sur lequel s'élabore le mouvement dansé doivent être explorés, sélectionnés voirrépétés pour être communiqués ensuite et ils deviennent le réservoir des contenusd'enseignement. Ils facilitent des entrées dans l'activité, ils permettent les situations de jeuxvariées pour les plus jeunes, ils favorisent les passages entre la « technique créative et latechnique de style » ( Guerber-Walsh, Maucouvert, Leray, 1990) en apportant unecompréhension nouvelle de l'autre et inversement. Autrement dit, "la recherche de sensations"(Pinot, Terret) que procure l'exploration du mouvement dansé procure l'émotion.

2°) Des savoirs sociaux spécifiques à la danse peuvent être envisagés selon qu'il estquestion de relations avec les autres danseurs, relations vis à vis de ceux qui regardent, etrelations en tant qu'appréciateur de danse. L'écoute et à la complicité kinesthésique semblentêtre les fondements de la relation en danse. Elle nécessite l'acquisition de valeurs sociales,mais aussi la mise en synergie des facultés émotionnelles et cognitives. L'authenticité de lapersonne qui est un savoir-être essentiel en danse expressive se réalise lorsque le geste "juste"correspond aux capacités physiques et aux intentions de communication. L'échange, le respectde l'autre s'exercent à partir de la situation de communication qui partage les rôles de danseuret de spectateur : démonstration est faite du choix de la danse artistique, danse dont lafonction de représentation est première.

3°) Des savoirs liés au spectacle (Bonnery) que d'autres didacticiens nomment dessavoirs liés au principe de communication (Pinot,Terret) ou liés à la gestion (Perez,Tomas). Ilimporte d'apprendre à articuler des intentions de communication, des émotions, un argument,

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avec les composantes du mouvement et une mise en scène qui prennent en compte le mondesonore et les effets à produire sur le spectateur. Les élèves danseurs et spectateurs apprennentà observer les danses, à intégrer des conventions notamment celles concernant l'espacescénique et la lisibilité du mouvement. Ainsi se construit ce que Marcelle Bonjour (1995)appelle le partage des savoirs symboliques, une expérience collective d'un donné à voirélaboré qui rompt avec l'expression spontanée.

4°) Des savoirs liés à la méthode expérimentale et à la démarche de processus decréation. Dans la suite des travaux d'épistémologie génétique de Piaget, les didacticiensprennent en compte l'idée que le sujet forme ses connaissances, apprend en interactionconstante avec les objets et pour reprendre Prost (1985) « les savoirs ne se transmettent pas ilsse reconstruisent et chacun le fait pour son compte, à sa façon, et en suivant son proprerythme ». Ainsi les processus et les opérations opérées par l'apprenant sont fondamentaux. Ilimporte donc de faciliter par des situations pédagogiques l'expression des représentations dela tâche à accomplir et d'inciter les apprenants à se confronter à des problèmes dont lesrésolutions passent par une transformation de ces représentations initiales (Cadopi, Bonnery).Nous retrouvons dans ces écrits les influences des travaux en didactique de l'INRP (Famose,Durant, Marsenach) inspirés eux-mêmes des recherches en didactique des mathématiques(Brousseau et Chevallard) et la théorie des situations.

Les apprentissages moteurs exigent de passer par le "faire". L'activité adaptative quiest produite rend compte des réorganisations successives nécessaires et s'apparente à l'attitudeexpérimentale : observations, hypothèses, essais, reformulations et communications sont lesactivités cognitives indispensables à la transformation des actions et au progrès.

La pédagogie de la réussite des années 1980 repose sur l'activité réelle des élèves dansles apprentissages. Ils sont capables à la fois d'annoncer leurs intentions, de mesurer le résultatde leur action et la méthodologie employée. La danse créative engage les élèves à avoir desprojets de communication, à explorer les possibles par l'improvisation, à isoler ou sélectionnerles réponses, à les exploiter, à les associer (Orsseaud-Flammand), et enfin à'extraire ducontexte général une notion qualitative (Guerber-Wash et alii). L'évaluation est un outilimportant pour connaître les apprentissages attendus et réalisés. C'est donc un outil pourl'enseignant et l'élève. Il objective les savoirs ou objets d'enseignement. Les grilles de lecturedes danses révèlent les esthétiques partagées, l'approche de la notion d'art et les références auxformes de danse.

Par exemple, pour Bonnery le danseur et le spectateur doivent pouvoir exprimer etlire :

- les combinaisons opérées entre les composantes du mouvement (savoirs moteurs)

- La mise en scène, la relation au monde sonore (savoirs liés au spectacle)- L'interprétation, authenticité engagement, présence, (savoirs sociaux)

- L'originalité (savoirs méthodologiques). L'originalité donne aussi la valeur esthétiquede la danse qui réfère aux pratiques artistiques contemporaines dont les techniques corporellessont au service d'une intention dans le but de produire un effet sur le spectateur.

La fonction de représentation est privilégiée (surtout dans le secondaire) et semblesupporter à elle seule la référence artistique.

Les articles de la revue EPS des années 1980 rendent compte de l'effervescenceculturelle par leur nombre. L'analyse d'Isabelle Saint-Jores témoigne des mêmes dominantesque les nôtres concernant les apprentissages en danse. L'auteure parle de « pédagogiepolymodélisante de créativité », et de la référence incontournable à la danse contemporaine.Cette dernière « correspond à une pratique différenciée et autonome ne nécessitant pas à priori(selon Bar,1989) la maîtrise d'une codification esthétique préétablie ». Les composantes du

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mouvement de Laban constituent les savoirs-faire. L'activité créatrice est décrite autour detrois pôles : la motricité, l'affectivité et l'intelligence. La faculté d'exprimer sa subjectivité etd'être reconnue par des spectateurs à travers la communication de sensations est un savoirsocial nouveau.

La pédagogie de la découverte reste un élément important. Cependant la pédagogie derésolution de problème ouvre de nouvelles perspectives didactiques en faveur d'une démarcheconstructiviste. L'évaluation est critériée et s'affine : « sont appréciés les caractères techniquesde l'exécution, les processus de création, l'interprétation... dans l'efficacité à transmettre unmessage à jouer un rôle » (Saint Jores).

On constate aussi un nombre important d'interviews de chorégraphes et d'articles écritspar des professionnels. Nikolaïs (chorégraphe contemporain) semble influent sur le traitementdidactique de Guerber-Walsh, Leray et Maucouvert. Elles reprennent l'approche non littéraledu geste et la notion de "motion" qui libèrent le mouvement dansé de la personne, car lemouvement possède sa propre signification et l'art de la danse résulte dans cette abstractionrecherchée.

Le foisonnement culturel pour la danse dont rend compte la revue, s'inscrit dans l'essordes compagnies et des lieux d'expression. L'année 1988 est l'année de la danse. Lesenseignants s'organisent pour échanger avec leurs élèves les chorégraphies. Dans le seconddegré l'association sportive scolaire (l'UNSS) met en place des rencontres de danse où unesélection des groupes de danse s'opère à partir d'une évaluation qui sert de référence auxpratiques d'enseignement du secondaire. Mireille Dréan (1985 : 27) insiste sur la qualité del'engagement des danseurs, l'obligation du travail créatif pour ne pas tomber dans la dérivepossible du spectaculaire : « le jugement porte sur ce que les élèves projettent de leur être leplus profond... évitons de ne regarder que la maîtrise d'un savoir-faire ». Ces rencontres sefont aussi sous l'égide de danseurs contemporains et l'ouverture à la création artistique estréelle.

À la même période les rencontres de Chartres : "Danse au cœur" pour les élèves dupremier et du second degré, organisent un temps de partage autour de créations scolaires etd'artistes.

Les stages "Danse à l'école" forment un ensemble d'enseignants dont l'objectif est dedonner une référence artistique à la danse scolaire. De nombreux professionnels de la danse yparticipent et se forment eux aussi simultanément à la culture scolaire. Ces expériences qui nesont pas accessibles à tous les enseignants par leur nécessaire pratique sélective dégagent uncertain nombre d'experts qui sont mobilisés sur le terrain et dans l'écriture de didactiques.

Cependant, l'accent mis sur la danse contemporaine et l'approche artistique neconcerne pas tous les enseignants. Il existe, en continuité avec la période précédente, un fortcourant "APEX" ou la pratique éducative est plus forte que la pratique culturelle. Les activitésd'expression sont encore valorisées dans l'enseignement et font l'objet en 1986 d'unepublication formalisant une didactique qui tente de préciser tous les aspects restés flous etaussi de s'emparer des avancées de la pédagogie et des connaissances sur les différents modesd'apprentissages. Les auteurs Levieux Francette et Jean Paul, veulent à l'encontre de Pujade-Renaud faire de l'expression corporelle une discipline d'enseignement. Cette dernière disait del'expression corporelle qu'elle était « une pratique de l'informel, de l'esquisse de la trace,contrairement à la danse qui inscrit le geste dans l'espace, le rythme et la mémoire ». Pour cesdidacticiens, la communication corporelle est un acte de socialisation de création qui prend encompte autant des techniques que la recherche d'authenticité de la personne. Les progrès àréaliser dans ce cadre favorisent une éducation à l'action, à l'analyse et à la transformation desoi.

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La démarche pédagogique est centrale en activité d'expression. Elle doit tenir comptedes élèves, de leurs capacités et aussi des objectifs éducatifs que l'enseignant ne doit paslâcher. Une stratégie est proposée : l'exploitation des conduites motrices des élèves en vued'une diversification. L'enseignant a un outil qui objective un grand nombre de variables aveclesquelles il va jouer.

On répertorie quatre grandes classes : la trilogie corps espace temps ; la mise en jeu del'expression par l'accentuation ; la recherche d'expressions variées (personnages, objets,émotion, style d'expression) ; la présentation au public.

Celles-ci ont des variables (stratégie en étoile) mobilisables selon les besoins del'expression.

À partir d'un opérateur, thème de mise en situation-problème, l'enseignant détermineles capacités de création privilégiées, les capacités d'exécution et définit ensuite sesprocédures concernant le matériel et les individus. L'évolution des consignes tient compte desvariables et du but recherché par les élèves dans la théâtralisation.

La notion de stratégie pour mettre en oeuvre les capacités de création est importantecar elle utilise des objectifs intermédiaires (imiter, mémoriser, improviser, imaginer,communiquer, enchaîner, fixer une production, mettre en scène) qui vont constituer le filrouge de la démarche choisie.

On imagine bien la place déterminante de l'enseignant au moment du choix desopérateurs, du choix des situations, des consignes et des processus pour faciliter l'activitécréatrice et imaginative des élèves.

Si l'enseignement des activités à visée expressive et esthétique reste marginal dansl'éducation physique, il repose sur des pratiques très diverses. La recherche de mise en jeu desqualités expressives du corps, avec une éthique fondée sur la libération du corps etl'épanouissement personnel perdure. En même temps s'expérimentent des activités dontl'écriture maîtrisée des corps en référence avec des expressions culturelles contemporainesinterrogent les liens entre des valeurs éducatives et des valeurs artistiques.

Les publics visés par ces écrits sont ouverts aux différents niveaux de pratiques de lamaternelle à l'université. L'effort de formalisation tente essentiellement de répondre auxquestions : pourquoi la danse à l'école, qu'est ce que la danse scolaire, quels sont les outilsdidactiques et les facteurs ou variables sur lesquels les enseignants peuvent exercer descombinaisons en accord avec le niveau de maturité des élèves et à leurs besoins immédiats.

La danse est une pratique éducative pour les garçons comme pour les filles. La mixitéest recherchée comme moyen d'amélioration des relations sociales. Pour Guerber-Walsh,Leray et Maucouvert, la proposition vis à vis de la sexualité est celle de l'androgynie à l'imagedu chorégraphe Nikolaïs où les corps dansants sont des mouvements esthétiques sansdifférenciation sexuelle. Bonnery considère l'élève pourtant les illustrations de son ouvrage nemontrent que des filles en activité. Pour Perez et Tomas, les rôles des danseurs ne sont pasdéterminés par le sexe, le corps est un matériau et la mixité scolaire est approchée comme ilest de coutume à l'école sans distinction.

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- Les didactiques et les programmes : une opérationalisationLes programmes de 1985 pour l'école élémentaire et le secondaire tentent de redéfinir

un cadre où la diversité des élèves soit mieux pris en compte. Les contenus d'enseignementsont peu revisités et l'accent est mis sur les méthodes pour favoriser la réussite du plus grandnombre. À l'école maternelle et élémentaire les activités d'expression sont privilégiées. Ellesincitent à la « recherche de courtes mises en scène du répertoire gestuel sur des thèmes et desrythmes que les élèves inventent ou qu'on leur propose ».

Au collège la danse et activités d'expression sont un domaine d'action particulier. En6ème-5ème la danse est expressive au service d'une intention utilisant le mouvement et lesdéplacements en correspondance avec la musique. En 4ème-3ème les élèves doivent vivre unecréation collective faite de mouvements et de figures sur une musique dont la dansecontemporaine est la pratique de référence. Pour permettre l'évaluation des progrès, lesenseignants doivent déterminer des niveaux d'habiletés dissociés des niveaux de performance.Les activités d'expression étaient appréciées, la danse est notée selon des critères à définir.L'enseignant a pour consigne de n'évaluer que ce qu'il a enseigné, il est donc obligé mettre auclair ses contenus d'enseignement. Ce que ne font pas les programmes qui n'ont qu'unefonction d'exhortation.

Nous remarquons la similitude des propositions entre les didacticiens et l'institutionscolaire qui ont choisi un même cadre de réflexion pédagogique et éducative.

Les didacticiennes de l'époque sont sous une double influence : celle desprofessionnels qui privilégient l'aspect artistique et posent des questions d'esthétique. Onretrouve la notion de formes empruntée aux autres arts, de "motion" et d'abstraction, deconventions d'écriture et on parle d'acte chorégraphique, d'œuvre donnée à l'appréciation despectateurs en devenir de clairvoyance.

L'influence de la culture scolaire, elle, met en avant les valeurs expressives de soi pourle développement harmonieux de toute la personne dans ses capacités à créer et àcommuniquer et donc à s'intégrer dans un groupe social.

Il semble que s'opère une confusion entre des valeurs éthiques et des valeursesthétiques, l'une semblant gommer l'autre. De cette oscillation advient un glissement du motexpression. L'expression du corps valorisée précédemment était le véritable sujet et objet del'enseignement. Il devient un qualificatif d'une activité ou d'une production ou d'une danse. Ily a donc dépassement du sujet dans l'expansion de soi vers un objet qui l'englobe avec desornements multiples dont la cohérence et l'unité représentent la valeur nouvelle de lacommunication.

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IV. Les années 1995 / 2001. Une place à l'école pour l'art- Un contexte d'intégration et de généralisationNous l'avons observé précédemment, les textes officiels de 1985 sont un début de

questionnement des contenus d'enseignement à transmettre, une incitation à la clarificationpar les enseignants eux-mêmes. Dès le début des années 1990, une réflexion nationale estmenée pour élaborer de nouveaux programmes qui paraîtront en 1995 pour le premier degré,et en 96, 97, 98 pour le collège, 1999, 2001 pour le lycée. Les disciplines scolaires doiventêtre considérées non seulement en tant que productrices de savoirs fondamentaux utiles àl'intégration sociale et culturelle, mais surtout comme support de développement decompétences des élèves. L'approche des savoirs scolaires doit mettre à jour l'activitédynamique et constructive des sujets apprenant.

Dans le premier degré, comme dans le second degré l'institution organise par le biaisdes inspections pédagogiques, des groupes de travail en vue de l'élaboration de nouveauxprogrammes. Un groupe technique disciplinaire (GTD) est mis en place sur le plan nationalpour faire des propositions à partir des productions académiques. Le contexte scolaire exercedonc des pressions pour formaliser une didactique. Un cadre théorique est donné pourl'ensemble des activités physiques. Il ne s'agit plus de déterminer les objets d'enseignement enfonction de la spécificité d'une activité (démarche proche du culturalisme très influent dans ledomaine de l'EPS), mais de définir les compétences à faire acquérir aux élèves en tenantcompte des "logiques" de l'activité qui, dans un premier temps, doivent être redéfinies. Ledomaine danse et activités d'expression des années 80, devient celui des Activités PhysiquesArtistiques (APA). Il s'ouvre donc à un ensemble de pratiques qui intègre des activitésnouvelles dont le traitement didactique n'a jamais été formalisé : toutes les danses, les arts ducirque, le théâtre.

Dans le second degré, sept académies sont sollicitées pour présenter leur travaux(Paris, Créteil, Caen, Poitiers, Bordeaux, Grenoble, Lille). Elles fournissent les orientationspédagogiques et les enjeux de formation, puis définissent les compétences propres audomaine des APA et les compétences spécifiques. Ces dernières répondent aux questions « Cequ'il y a à faire, ce qu'il y à faire pour faire », enfin des repères sur l'élève en activité doiventêtre produits. La plupart des académies citées s'appuie sur les travaux de Delignieres quipropose de classer les ressources constitutives de la compétence en 4 catégories : les habiletésmotrices ou disponibilité corporelle, les habiletés méthodologiques ou démarche, lesconnaissances et les attitudes. Ce découpage inspire le traitement didactique. « Pourprogresser dans un sens d'expertise, l'élève devra maîtriser des compétences relevant desquatre champs et se nourrir de leur inter action permanente » (Créteil, 1998 : 112).

Le contexte politique exige une meilleure prise en compte de la situation des jeunesvis à vis de l'échec scolaire qui engendre de plus en plus d'actes de violence. La nécessité dedonner du sens à l'école est un objectif prioritaire et les recherches pédagogiques portant surune épistémologie des savoirs scolaires semblent incontournable. L'approche anthropologiquedes savoirs met à jour les incohérences et la perte de sens de l'activité scolaire. Les savoirssont des réponses à des questions fondamentales que l'homme s'est posées et se pose encore etpourtant ces questions semblent échapper à l'école (Develay, 1998). Les savoirs sont devenusdes techniques décontextualisées qui ne mobilisent plus la grande masse des jeunes.

Le contexte culturel artistique est stabilisé avec une reconnaissance de nombreusescompagnies qui affirment toutes leurs particularités dans leurs expressions. De nombreuxouvrages sur la danse paraissent et alimentent une réflexion portant sur l'expressioncontemporaine, la perception des corps, le statut du danseur dans la création, les mises enespace qui perturbent les repères, les attitudes des spectateurs dont l'investissement culturelest exigé.

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Les finalités de L'EPS se diversifient. La santé, la sécurité, la solidarité, laresponsabilité et l'autonomie participent à l'éducation à la citoyenneté. Une incitation forte estdonnée à l'école pour faciliter l'intégration sociale.

1. Le premier degré, entre activité physique et activité artistique, art et interdisciplinarité

Les équipes départementales d'Education Physique et Sportive font des propositionsdidactiques concernant les activités d'expression pour certains, de danse pour d'autrespermettant une opérationalisation des nouveaux programmes concernant notamment ledéveloppement des compétences. Elles sont au nombre de cinq et les propositions didactiquestentent d'énoncer des situations pédagogiques qui les mobilisent. Ainsi par exemple, lacompétence 4 : « s'engager dans une action individuelle et collective visant à communiquer unsentiment ou une émotion » se traduit en enjeux d'apprentissage suivant : communiquer avecles autres à l'aide d'un langage gestuel. Une trame de cycle d'apprentissage envisage des jeuxpour entrer dans l'activité qui incitent à l'écoute et à la relation (sculpteur, aveugle, miroir...),des jeux avec des objets. Ensuite des situations organisées par objectifs et ateliers permettentd'élaborer une mini production dansée.

Les jeux dansés sont importants et les publications présentent les situations sous cetteforme. On joue au chorégraphe et au danseur, on joue à découvrir son corps, on joue et onchante, on joue les opposés... Les propositions restent encore très proches de l'activitéphysique originale mobilisant la créativité et l'expression.

Cependant il semble que le travail interdisciplinaire et en partenariat, tout comme lesincitations ministérielles de 1998 pour le développement de l'éducation artistique et lesinitiatives fortes d'un groupe national sur le développement de la danse à l'école, font évoluerles jeux de corps et d'expression vers des jeux artistiques où l'ouverture culturelle estrecherchée.

Monique Delga (1998) propose une démarche de création se référant à la dansecontemporaine « qui va s'appuyer initialement sur les plaisirs de se livrer à des jeuxd'expression chez les enfants de 3 à 6 ans ». Il s'agit de créer des chorégraphies pour être vu,avec échéance de spectacle. Quatre étapes sont identifiées : Trouver et retenir des formescorporelles - Organiser en composant - Enrichir la production - Mise en scène etchorégraphie. L'ouverture du champ culturel de la danse artistique est recherchée ainsi que laformation du spectateur cultivé.

La parution d'un ouvrage : La danse à l'école. Pour une éducation artistique de JackyLascar (2001) annonce bien dans le titre même son propos. Il s'agit de mettre en valeur laplace des arts dans la vie à travers la pratique dansée. Les arts comme vecteur deréconciliation de l'unité de la personne. Le livre est préfacé de Jacqueline Robinson donnantainsi la tonalité concernant la danse de référence. Une danse créative, expressive, celle qui est"au plus profond de nous" et dont il s'agit d'en apprendre le langage. Les effets attendus decette pratique sont importants : responsabilité et autonomie, disponibilité corporelle etémotionnelle; voie de l'intégration et de formation culturelle.

La prise en compte de la singularité de chaque enfant est soulignée comme un facteurfavorisant la réussite et la créativité. Elle incite à la tolérance, à la prise en compte desdifférences.

Les intervenants sont aussi d'horizons divers : les enseignants, les maîtres-formateurset les artistes. La pratique interdisciplinaire ainsi que la prise en compte des compétencestransversales mobilisent les acteurs de ce livre dans une pédagogie du projet, avec des actionsen partenariat afin de mieux accompagner les enfants dans l'expression d'une sensibilité desituation. Les savoirs mis en jeu concernent la matière du mouvement, la présence etl'acceptation des autres différents, la création par les processus exploration-choix-

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composition. Nous pouvons observer que sur le plan des contenus il n'y a rien de neuf. Lelivre se veut plus opérationnel pour les enseignants, en offrant des pistes et des outils à partirde situations véritablement vécues et décrites. Nous notons que la description des projets etdes mises en situation oublient les exigences d'écriture à partir de la notion de compétences.La danse et ses qualités intrinsèques qui suscitent l'activité motrice singulière reposant surl'imaginaire et le sensible reprend toute sa place, comme celle de l'enseignant accompagnantles élèves sur le chemin de l'art.

2. Le second degré, les activités physiques artistiques

L'analyse comparée des différents travaux des académies et l'analyse d'un livre paru en2001 devraient permettre d'envisager les consensus et les singularités.

- Les orientations pédagogiques : l'écoute de soi et le langage poétiqueLes grandes finalités éducatives sont de deux ordres : le développement personnel

optimum et l'intégration sociale et culturelle. Les orientations suivent ces deux axes :1er axe (situé au niveau du développement de l'élève) : il est encore question de la

personnalité dans une situation de représentation (Paris) dont il s'agit de mobiliser le potentielcréatif (Créteil), de faire accéder à l'intériorité (Poitiers), à la révélation de soi (Caen) et à lasingularité (Bordeaux), de faciliter la construction identitaire par la mise en jeu de la présence(Grenoble), et de provoquer l'imaginaire personnel et l'écoute de soi (Lille).

2ème axe : au niveau culturel : Le projet et la production artistique sont les élémentsdéclencheurs qui soulèvent la question du beau (Caen), du langage poétique (Bordeaux,Grenoble), et qui organisent les choix esthétiques, développe le goût (Lille) et lacontemplation (Caen). La transmission du patrimoine et la conscience d'une communautéculturelle doivent être présents (Bordeaux, Caen). Tribalat (1997) parle "d'éducationesthétique du citoyen".

La notion d'esthétique est présente mais n'est jamais explicitée. « L'appropriationesthétique du réel » de Vaross qui définissait la danse des années précédentes n'est plusmentionnée.

Il en est de même pour le concept flou d'artistique. Les textes semblent naviguer d'unenotion à l'autre sans qu'il soit possible de les différencier nettement. Pourtant, le lien entrel'esthétique et l'artistique est recherché. L'artistique semble reposer sur la prise de parolepersonnalisée (Caen), sur l'évocation de sens et d'émotions (Bordeaux), davantage surl'imaginaire personnel que sur l'univers de référence, sur les oeuvres originales (Lille, Créteil),sur la qualité et la liberté des formes (Poitiers), sur la mise en jeu dialectique de la raison et del'intuition (Caen).

L'esthétique renvoie au langage poétique, à la question du beau et du goût, auxjugements des formes. Gilles Mons (1999) parle du concept de poétique intégré au langagedes didacticiens de la danse à l'école comme un mythe qui engloberait toutes les attentes d'uneactivité artistique. La poétique serait alors la référence nouvelle. Mais là encore il est difficilede dire si elle caractérise l'art ou l'esthétique.

Nous relevons ici les influences de Laurence Louppe qui intervient beaucoup dans lescolloques ou stages de formation des enseignants, ainsi que celles de Marcelle Bonjour.Toutes les deux mettent l'accent sur les valeurs fondamentales de l'art chorégraphiquecontemporain : « individualisation d'un corps et d'un geste sans modèle, exprimant uneidentité ou un projet irremplaçable, production d'un geste... Travail sur la matière du corps, lamatière du soi... La non anticipation sur la forme, l'importance de la gravité comme ressort dumouvement... authenticité personnelle, respect du corps de l'autre, principe de non arrogance,

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exigence d'une solution juste et non seulement spectaculaire, la transparence des processus etdes démarches engagés » (Louppe,1997 : 37)

Lorsqu'elle définit ce qu'elle appelle la poétique de la danse contemporaine, LaurenceLouppe parle de "mouvance des esthésies" où les échanges des états de corps entre danseurset spectateurs se négocient dans l'expérience qui élargie ainsi la sensibilité. Le Sentir estretravaillée ensuite par les processus d'élaboration du mouvement partagé. L'œuvre d'art estun dialogue. Il ne s'agit pas ici de communiquer par le mouvement, mais de vivre desexpériences émotives et sensitives sollicitant l'empathie et non la compréhension. Dans cetteconception, tout mouvement est expressif mais ne se donne pas l'expressivité comme but etl'approche poétique mobilise aussi bien les connaissances que les pratiques enfouies du sujet.

Pour les didacticiens cités plus haut, l'activité artistique implique l'élève dansl'engagement de sa sensibilité et de son imaginaire, dans une expression personnalisée.L'approche esthétique explore les formes à travers un registre sensoriel et émotif, et ceci enpuisant dans le patrimoine afin d'affiner le jugement du beau. La nature des savoirs devraitpouvoir affirmer ou infirmer cette première analyse.

- Nature des savoirs : des compétences en fonction de rôlesLes élèves sont invités à produire des oeuvres, des danses singulières qui sont

présentées et appréciées. Pour réussir cette performance de présenter sa danse, l'élève doits'approprier des savoirs ou développer des compétences qui dans les académies se répartissentselon les rôles de danseurs, chorégraphes spectateurs. Rôles intégrés aux pratiques sociales deréférence, et qui tiennent compte des finalités scolaires, développer ses capacités motrices, sesrelations sociales et son ouverture culturelle.

Les savoirs du danseur (approche culturelle pour certains) ou champ des compétencesdont les ressources reposent sur les habiletés motrices (approche éducative pour d'autres) :

Les qualités d'interprétation passent par une maîtrise de son corps dans sa disponibilitéà combiner l'espace, le temps et l'énergie mais dans une perspective d'habiletés motricesvisant à rendre le mouvement fluide, à découvrir des états de corps. Il est question de nuanceset de vocabulaire gestuel, d'intelligence kinésiologique (Bordeaux), de savoirs des formes(mobilisation segmentaire, traces, dynamiques pour Lille), de motricité expressive, (faite dedynamique, de vocabulaire, d'équilibre et de coordinations pour Paris), d'équilibre de tonicitéet de coordinations (Créteil), de techniques et de logique motrice espace-temps-énergie(Caen), de tonus, de fluidité, de dynamique, de re-équilibration (Poitiers). La trilogie espace-temps-énergie est revisitée et affinée semble t-il par de nouvelles approches du corps et n'estplus envisagée ici uniquement comme une possibilité de création de mouvements originaux,mais plutôt comme une connaissance d'états de corps propices aux mouvements dansés. Onretrouve ici l'influence des techniques corporelles de kinésiologie (Feldenkrais, Body-mindCentering, Alexander, Godard...) et celles de l'Orient (Taï-Chi, Zhi Neng, Qi Qong). Ellestentent de débarrasser les corps des codes conventionnels et de techniques corporellespréétablies, et facilitent ainsi la disponibilité des danseurs à toute écriture chorégraphique. Lesrecherches des états de corps, corporeité pour Michel Bernard (1990 ; 68), des gestesfondateurs pour Hubert Godard (1995 ; 224) montrent les portées symboliques de toute actionmotrice mettant en jeu la fonction tonique. Ces auteurs affinent les travaux de Wallon et deLaban. Ils interrogent l'organisation gravitaire ou la construction d'une expressivité quirendent compte d'une relation spécifique au monde ou aux objets. Si les danseursprofessionnels suivent de nombreux stages, les enseignants qui les côtoient font de même, etce nouveau travail du corps fait résonance en faveur d'une éducation corporelle en deçà destechniques dansées.

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Les savoirs du chorégraphe sont déclinés en savoirs « créer, composer, écrire avec soncorps pour dire ». Il s'agit de construire des cohérences et des effets chorégraphiques dans unespace scénique maîtrisé (Bordeaux Caen), de rendre lisible pour les autres sa danse(Grenoble) avec des règles de lisibilité comme le contraste (Coltice), d'utiliser desconnaissances relatives au cadrage et à la mise en scène dans une recherche d'originalité(Lille). La démarche de création est au cœur des savoirs du chorégraphe qui passe d'uneexploration gestuelle personnelle ou avec d'autres danseurs à une sélection qui tient compte àla fois des ressources individuelles et culturelles. Il s'agit d'être cohérent, de mettre en oeuvredes conventions artistiques qui s'appuient sur la connaissance des styles et de favoriser unelecture de sens et d'émotion. La notion d'effets à produire sur le spectateur témoigne del'enracinement culturel lié aux formes spectaculaires. Le chorégraphe est un metteur en scènequi harmonise un sens, un propos, une intention en jouant avec des codes reconnus par lapratique artistique de la danse contemporaine.

Les savoirs du spectateur constituent un autre champ de compétence. Il s'agit d'êtrecapable de développer un regard qui apprécie et reconnaît les qualités d'interprétation et decomposition (Caen), qui connaît les styles et sait analyser et argumenter une oeuvre (Créteil,Lille, Bordeaux), regard sensible qui lit les émotions et les effets (Grenoble) ainsi que lesimages en mouvement afin de les décrire (Coltice). Le spectateur exerce un regard avertigrâce à sa pratique de danseur et de chorégraphe. Il synthétise par ses qualités perceptivestoutes les connaissances acquises que ce soit celles issues de l'action (connaissancesprocédurales) ou celles issues du patrimoine (connaissances déclaratives).

Le champ des compétences en danse est très ouvert et laisse bon nombre d'enseignantsperplexe quant à l'expertise nécessaire pour mener à bien cet enseignement. Les didacticiensne proposent pas une réduction de la pratique dansée comme cela se passe dans les pratiquessociales. (Par exemple, les savoirs du danseur hors l'école concernent uniquement ledéveloppement d'une motricité morphocinétique, d'états de corps, d'apprentissages detechniques et de styles). Ils envisagent l'enseignement de la danse dans une totalité, comme unsystème dont l'ensemble des éléments le constituant produit grâce aux inter actions, uneéducation culturelle et artistique.

Les artistes qui interviennent dans le cadre scolaire ont des difficultés à envisager defaçon dynamique et en inter relation les rôles d'interprète, de chorégraphe et de spectateur.Pour eux l'essentiel est le rapport au corps singulier que leur univers artistique procure.Engager des débutants dans des actes de création et de composition les dérange beaucoup.

Nous pouvons faire l'hypothèse que les enjeux éducatifs incitent à une modélisationd'une pratique artistique dansée tout à fait originale qui extrait des pratiques culturelles dessavoirs particuliers exprimant le mieux ce qui les caractérisent : mise en jeu corporelle,création, composition, présentation et appréciation. Le processus doit être expérimenté dès ledébut des apprentissages et malgré la fragilité des matériaux investis.

Les articles sur la danse de la revue EPS sont nombreux même si la programmation del'enseignement de la danse reste minime, de l'ordre de 3% si l'on tient compte des leçonsobservées en inspection. Ils se font l'écho des incitations institutionnelles pour décliner descompétences à développer : savoir écouter, improviser, interpréter. Les articles faisantréférence à la danse contemporaine sont encore importants. La démarche créative et ouverteaux sensibilités diverses du monde culturel est encore privilégiée. La danse est affirméecomme activité artistique dont les styles variés ne doivent pas entraver les créationspersonnelles mais au contraire favoriser une inscription corporelle singulière. Ainsi le hip-hop, le flamenco, le rock, le modern-jazz, les arts du cirque sont autant d'écritures corporellespossibles qui peuvent motiver les élèves, mais les démarches créatives et les compétences àdévelopper restent les mêmes.

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Danser les arts (Perez et Thomas, 2001) est un livre qui invite au décloisonnementdisciplinaire pour une éducation artistique qui dans le cadre scolaire participefondamentalement à la formation de la personne reliée à sa culture. Ces auteures avaient en1994 publié un ouvrage de didactique qui tentait de positionner l'enseignement de la dansedans le cadre de l'éducation physique et sportive. Il semble intéressant de noter l'évolution deleur réflexion qui est à l'image de celle des experts ou des didacticiens de la danse à l'école.L'enseignement de la danse prend du sens dans le cadre de l'éducation artistique. Lalittérature, la poésie, les arts plastiques et la musique sont les partenaires privilégiés del'expérimentation corporelle et apportent des possibilités d'investigation que le registre sportifne favorise pas. Les auteures proposent une étude des notions qui traversent les arts, analysentla posture à construire pour développer l'imaginaire, la création et la communication quimobilisent tout à la fois technique et expression dans un rapport non antagoniste.

Elles font une lecture transversale des textes du premier et second degré. Elles en fontun traitement autour de trois pôles identifiés : le pôle éducatif, culturel et enfin des pratiquesartistiques.

L'éducation artistique crée le lien social, forme le citoyen au jugement critique,favorise une image positive de soi. Elles n'apportent rien de nouveaux quant à la nature dessavoirs et savoirs-faire spécifiques à la danse dont la référence reste la danse contemporaine.Elles reprennent les fondamentaux du mouvement dansé et montrent comment ils permettentde traverser les styles. Il s'agit d'un véritable plaidoyer pour le danse contemporaine, dansequi se « nourrit du métissage avec les autres cultures... et dont les créations explosent lesfrontières entre les arts ».

Elles élargissent leur propos en déclinant un ensemble de savoirs à construire par lespratiques artistiques. Savoirs liés à trois processus : le processus de symbolisation, decommunication et d'expression, le processus de création : improvisation, et composition, etenfin le processus lié à une méthodologie participant à la formation du jugement.

Une place privilégiée est faite au corps sensible et à l'ouverture sensorielleincontournable pour la construction de l'image de soi et pour une compréhension de l'artcontemporain qui est définie comme « la recherche d'une expérience totale des sens ».

Comme pour le précédent ouvrage de Lascar, Perez et Thomas donnent des exemplesde mise en oeuvre dans le cadre scolaire de projets interdisciplinaires. Là encore, ladescription des projets réalisés ne met plus en avant la notion de compétences à développerchez les élèves mais des rouages très précis mis en oeuvre pour la réalisation des projets decréation.

- Les publics visésLes élèves des collèges et des lycées sont décrits selon leur maturité et leurs intérêts.

La construction de leur identité, tout comme les problèmes liés aux relations garçons-fillessont pris en considération pour choisir les compétences à développer (Paris) ou les styles dedanses correspondant mieux que d'autres au motivation (Créteil). À aucun moment la dansen'est envisagée pour réduire les exclusions dues aux échecs scolaires.

Seuls les travaux de Daniel Motta à l'INRP rendent compte d'une ébauche de réflexiondidactique concernant la contribution de la danse (activité de représentation par le corps) pourla construction de l'identité personnelle. Ils interrogent l'identité de genre. Sonexpérimentation s'appuie sur des cycles d'enseignement en milieu difficile où la mobilisationdes élèves est « bridée par leur conformation aux stéréotypes du masculin et du féminin »(1999, 2001). Le développement personnel de l'élève passe par l'exercice d'une réflexivitéphysique, sensible sur les normes de genre que la société distribue.

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- Les didactiques et les programmes : dépassement vers le sensible et l'imaginaireLes textes des programmes de l'école, des collèges et des lycées sont les grandes

références incontestées, voire soutenues et propagées par les didacticiens. Les APAconstituent « un domaine d'échange, de compréhension, de rencontre » à l'image de touteautre forme artistique, évocatrice d'émotions et de sens, la danse est création, expression. Untriple enjeu éducatif est énoncé d'où vont se décliner les compétences : l'affirmation de sapersonnalité ou l'équilibre personnel, l'ouverture culturelle et la mise en oeuvre d'uneméthodologie, ici d'une démarche créative organisée dans le temps et dans l'espace.

La pratique artistique exige un enseignement contraint qui structure les intentions, lesprojets de danse mobilisant l'activité cognitive. Dès le cycle des apprentissages fondamentauxà l'école élémentaire « l'élève parvient à une réelle prise de conscience de la signification de ladanse » (programme de 1995). Les contraintes de l'activité de représentation exigent à la foisdes connaissances, des relations sociales donc le développement des capacités cognitives etsociales. Les contraintes liées à l'action motrice obligent à la maîtrise, l'anticipation, lamémorisation et aussi le ressenti. Là encore l'activité cognitive est grandement sollicitée. Ellese double d'une mise en jeu de la sensibilité et d'une inter-sensorialité mobilisant l'ensemblede la personne.

Nous avons pu constater dans notre travail de recherche que la didactique de la dansescolaire n'échappe pas aux exigences de l'institution de former et d'éduquer l'élève dans sescapacités intellectuelles plus que motrices, de solliciter plus l'activité rationnelle que sensibleou sensorielle. Les écrits des didacticiens corrigent ou affinent sur ce point les attendusinstitutionnels en privilégiant l'imaginaire et le corps sensible.

V. InterprétationUne première analyse interprétative tentera d'approcher les négociations opérées par

les didacticiens entre les effets d'une pratique personnelle nourrissante et fortifiante et lesattendus éducatifs. Car « ce qui est appris par le corps, n'est pas quelque chose que l'on peuttenir devant soi, mais quelque chose que l'on est » (Bourdieu, 1994 : 123). Nous évoluonsalors dans le domaine des valeurs, des enjeux de formation, de l'éthique.

Ensuite, il nous paraît opportun de rechercher derrière les savoirs, savoirs-faire etsavoirs-être quels sont les éléments de culture transmis, quelle corporéité dansante est àl'œuvre et comment elle s'intègre à la culture scolaire.

Enfin, la prise en compte des élèves, que ce soit dans leur maturité, leur sexe, leurculture de référence nous semble problématique et questionne de fait une formation parl'activité artistique.

- Des négociations réussies dans le tempsEn effet la danse s'est installée à l'école alors que tout ce qui la constitue

culturellement dans l'histoire est contraire à celle de la culture scolaire.La mise en avant du corps singulier et en mouvement, dans une nudité symbolique,

met en pièce le corps immobile, unifié, homogénéisé, masqué dans le groupe classe.Les capacités expressives du corps reliées à l'activité sensorielle, sensuelle d'un

rapport au monde qui cherche l'harmonie fusionnelle, l'empathie, contrecarrent ledéveloppement recherchée des capacités à raisonner logiquement, de la distance qu'opère laconnaissance du monde à travers des savoirs théoriques qui donnent leurs compréhensions.

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L'idée tout à fait saugrenue dans le cadre scolaire, que danser apprend autre chose quedes mouvements ou des pas, que danser c'est aussi développer une pensée sur le monde, desrelations aux autres particulières, une disponibilité aux oeuvres d'art, fait pourtant son chemin.

On peut comprendre que pour arriver à cela, les didacticiens aient mené, et mènentencore un combat acharné au développement de la danse dans le système scolaire. À tous lesniveaux d'intervention, les enseignants se battent encore pour assurer leur pratique. Il s'agitbien de militantisme, malgré une présence institutionnelle affirmée. Une telle énergiedéployée n'a pu se réaliser que par la pratique dansée personnelle. Tout didacticien porte enlui les stigmates d'une passion pour les arts vivants, d'une sensibilité vibrante pour lemouvement et pour la lecture des oeuvres, d'une incorporation d'éléments de cultureartistique.

Si nous regardons les établissements scolaires comme des lieux d'échanges,d'appropriation et de transmission culturelles, nous observons les évolutions dans le temps deceux qui les fréquentent : les "pratiquants culturés" en formation. Les propositions didactiquesnous renseignent à ce sujet. Elles suivent l'histoire de l'évolution et du développement de ladanse moderne. Dans un premier temps, il y a l'insubordination à la technique perçue commeun formatage corporel. Les modifications esthétiques qu'elle entraîne s'appuientessentiellement sur des valeurs accordées à l'individu dans la maîtrise possible de sonexpression. Le "pratiquant culturé" est un sujet en quête de liberté d'expression, dont lesressources personnelles sont sollicitées pour affirmer une singularité. Cependant, nous avonsconstaté que l'expression, valeur fondamentale et structurante de l'activité corporelle,s'accordant avec les nouvelles valeurs scolaires de formation (années 1970), devient dans lespratiques artistiques (années 1995) une des qualités intrinsèques du mouvement. Il ne s'agitplus pour les danseurs-élèves de s'exprimer, mais de participer à un projet collectif expressif.Ce glissement nous paraît modifier assez fondamentalement à la fois les contenusd'enseignement, les pratiques pédagogiques et les objectifs de formation. Le "pratiquantculturé" s'approprie les conventions des chorégraphies contemporaines et sa liberté résidedans la façon dont il les utilise. L'influence du courant abstrait de Cunningham estdéterminant, ainsi que la spectacularisation favorisée par l'installation de compagnies dans desstructures subventionnées.

L'ouverture culturelle, la rencontre avec les artistes valorisent les acquis sur le travaildu corps qui doit se libérer des tensions et des stigmates d'une expression quotidienne, ainsique des conventions d'écriture qui régissent la lisibilité des danses. Les notions persistantes"d'oser être", de "présence" "d'habiter son mouvement", "de geste juste" renvoient davantage àdes techniques maîtrisées, qu'à une personnalité qui se montre et qui invente.

Les nouvelles valeurs accordées à la création, plutôt qu'à la créativité (non pas qu'ellene soit plus sollicitée, car la création l'englobe, mais ce n'est plus la finalité, reliée à desoeuvres chorégraphiques imposent nous semble-t-il davantage une appropriation culturelle del'art contemporain qu'une contestation possible. L'idée même de citoyenneté attachée à lapratique artistique est assez étonnante. Car l'artiste est celui qui interroge et se trouve souventà la marge des structures politiques et sociales de la vie en société. Le jugement critiquerepose sur un regard averti. Il marque aussi bien les connaissances à acquérir que la possibilitéd'une expression contestatrice guidée. Le "pratiquant culturé" développe une intelligibilité deses actions qui facilite une intégration sociale et culturelle, il maîtrise ses émotions et doit êtrecapable de neutralité aussi bien pour l'expression de ses sentiments que pour son corps sexué.

Il n'existe pas de divergences dans les écrits didactiques concernant les valeursaffichées. Pour les didacticiens-praticiens d'activités physiques artistiques la valeur artistiqueenglobe et totalise les notions de création et d'expression, de codes esthétiques et de corpssensible. Et de fait, ils produisent un système didactique qui les articule jusqu'à les confondre.

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Les enseignants d'éducation physique et sportive, que nous avons interrogés et qui sontnon spécialistes de cette activité restent attachés essentiellement à la valeur de l'expressivitédu corps, ressource à solliciter pour développer la personnalité. Elle motive leur choix pourprogrammer une activité d'expression disent-ils, activité complémentaire à la pratiquesportive. Elle structure encore des approches pédagogiques qui ne font jamais référence à despratiques artistiques et cependant reprennent à leur compte son organisation : créationcollective d'une danse, mise en espace et représentation, appréciation à partir de codescollectifs qui puisent dans l'histoire culturelle implicite de chacun.

Il existe même des pratiques de terrain contestataires (notamment en Lycéed'Enseignement Professionnel) qui jugent la danse contemporaine élitiste, trop éloignéeculturellement des élèves et proposent d'autres valeurs que la création artistique, par exempledes valeurs sociales où les jeux de mouvements sur des rythmes mobilisent les énergies et laperformance physique dans une adhésion de groupe et dont les références sont clairementaffichées (hip-hop, rock, cirque...). Les valeurs éducatives fondées sur la reconquête d'uneestime de soi, ainsi qu'une identité sociale partagée génèrent des pratiques éducatives qui noussemblent reconstruire un des fondements de la danse, que les anthropologues décriventcomme « un besoin élémentaire d'ordre et de rythme » (Kaeppler, 1998 : 26, 28), ainsi que lapossibilité d'expérimenter simultanément l'identique et le différent dans une adhésion à ungroupe. Les "pratiquants culturés" sont alors des sujets qui maîtrisent des rapports sociaux, etqui mettent en jeu une esthésie des relations où les émotions sont donc fondamentales.

- Regard sur les savoirsLa danse proposée à l'école est une danse créative et expressive. L'expression

corporelle se voulait être une propédeutique aux différentes techniques de danse. Elle serefusait donc tout modèle. Cependant la danse moderne expressive était son inspirationprincipale et nous l'avons déjà dit rejoignait à la fois les valeurs éthiques et esthétiques. Lechoix de la danse contemporaine dans ses différents registres d'expression devint ensuite uneréférence car elle faisait preuve de nombreuses modélisations possibles. Les derniersprogrammes marquent une nouvelle étape. Les activités physiques artistiques englobentl'ensemble des danses, le théâtre et les arts du cirque. Un schéma didactique est proposé àtoutes ces pratiques dansées, et elles sont transformées pour une pratique scolaire formatrice.Le rock, le tango, tout comme un numéro de jonglage doivent subir le traitement didactiquequi a pu être élaboré pour les danses à objectif artistique. Cette ouverture se justifie par ladiversité des pratiques sociales qui motivent enseignants et jeunes. Il semblerait donc possiblepour l'institution scolaire que les élèves développent les mêmes types de compétences quelque soit le support dansé.

L'évolution de la nature des savoirs va dans le sens d'une importance accordée auxsavoirs liée à la représentation, composition et mise en scène et à l'appréciation, ce qui permetd'inclure ainsi toutes les pratiques dès lors qu'elles sont mises en espace est soumises àl'appréciation. Par contre les savoirs concernant les mises en jeu corporelles (la motricité, lesformes) semblent pour la danse contemporaine, insister davantage sur l'aspect sensible, larecherche d'états de corps disponibles aux différentes énergies et sur les coordinationsd'actions, alors que dans les autres danses, les techniques de pas sont incontournables et il estquestion de reproduction et de création. Là aussi les états de corps son recherchés en fonctiondes styles abordés et c'est ce qui caractérise à la fois la présence et la motricité.

Les didacticiens cependant font encore référence à la danse contemporaine, et lesprojets donnés en exemple et menés avec des partenaires artistes relatent des rencontres avecl'art contemporain. Dans le premier degré, les danses traditionnelles sont abordées sous unaspect créatif.

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Les fondamentaux du mouvement dansé constituent pour tous la réserve des savoirs àincorporer. Les élèves apprennent en explorant ces facteurs qui sont donnés par l'enseignantcomme consignes ou contraintes au mouvement. Ils permettent la composition autour de leurexploration ainsi que l'originalité des réponses.

Les enseignants proposent des situations pédagogiques contraignantes et l'explorationest toujours guidées en donnant des repères de réussite. Le passage par l'observation etl'échange verbal incite à clarifier les intentions et les processus mis en oeuvre ainsi que lesconventions mises en commun.

Toutes les parties du corps peuvent être sollicitées pour produire du mouvement. Lecorps est une matière qui se déleste des tabous sociaux, qui peut être touché et toucher, quipeut éprouver le plaisir des sensations et devenir un objet à regarder. Le corps n'est cependantpas qu'un objet, il est aussi un sujet par la qualité du mouvement qu'il donne à voir.

Pour réussir ce tour de passe-passe concernant l'approche corporelle en regard avecson statut dans la vie sociale, les enseignants utilisent de plus en plus des partenaires-danseurs, qui portent dans leur corps cette flexibilité, cette fluidité qui s'échappent desapparences exigées par la vie collective. La visée artistique passe par le regard nouveau surles corps, regard critique sur les enkyloses et les stéréotypes. La contestation se réalise dans lecadre d'une référence culturelle et artistique qui se montre. Par exemple, la valorisation del'androgynie qui favorise l'égalité ; les prises de risque toujours contrôlées par desanticipations aux actions qui règlent les déséquilibres, les poids de corps, les appuis ; Lelâcher-prise, la détente musculaire voire l'abandon préconisé dans une maîtrise gestuelleadaptée.

Tous ces savoirs sur le corps participent d'une histoire culturelle qui tente d'harmoniserles besoins organiques des corps (le corps biologique) et la vie sociale urbaine (le corpssocial). Pour mener à bien ces apprentissages, les enseignants ne peuvent échapper eux-mêmes à l'expérience corporelle et aux échanges culturels qui donnent les cadres desrecherches.

Cependant, nous pouvons nous interroger comment cet enseignement se différencieselon les "publics" visés, selon les élèves.

- Des élèves, "pratiquants culturé"... qui restent dans l'ombreTous les écrits de didactiques n'ont qu'un objectif, favoriser l'éducation des élèves,

participer à leur transformation personnelle, physique et intellectuelle. Cependant nous notonsleur absence ou leur présence fugitive due à une prise en compte de leur âge, de leur maturité.En effet, les propositions didactiques pour les écoles maternelles et les lycées sont différentesdans les situations proposées. Il est question de jeu, de permettre l'activité ludique à partir decontraintes pour les premières, de situations d'exploration guidées à partir de consignes pourinciter aux mouvements personnels pour les secondes. Pourtant, le sens du travail,(exploration-recherche, choix-sélection, composition-mémorisation) semble identique, ilimporte de travailler sur les matériaux, les fondamentaux que sont les combinaisons possiblesentre les corps et ses parties, l'espace, le temps, l'énergie, dans des interrelations gestuelles.

Jacqueline Lascar relate une expérience en maternelle à partir d'un jeu, "1, 2, 3 soleil",qui devient une danse par les propositions d'enrichissement des trajets, et des rencontres, parla mémorisation, par le jeu avec la vitesse (lent/vite), et avec l'espace (haut/bas).L'enseignante parle "d'enchaînement chorégraphique".

Tizou Perez, témoigne d'un projet au lycée sur musique et danse. Elle propose unesituation qui met en relation l'analyse musicale faite et une mise en jeu corporelle. Les élèves

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peuvent choisir à partir de 5 propositions, en voilà une : « Gestuelle lente et continue sur laligne mélodique, avec passage au sol, et utilisation dominante des bras et du buste ».

Nous pouvons observer les différentes propositions selon la maturité de l'élève qui ade plus en plus d'autonomie et en même temps des contraintes structurantes. Pourtant, l'imagede la danse qui est engagée nous semble de même nature.

Les didacticiennes citées, interviennent dans le cadre de la formation des maîtres etleurs objectifs portent sur la danse créative et sur la conception des situations pédagogiques.Les enseignants ensuite doivent par la connaissance qu'ils ont de leurs élèves faire despropositions cohérentes.

L'éducation artistique, la pratique de la danse créative ont les mêmes fondementséducatifs et les mêmes enjeux quels que soient les âges.

Il en est de même pour les élèves filles et garçons. Les didacticiens affirment que ladanse est bonne pour tous sans distinction de sexes. Cependant lorsque nous interrogeons lesnon experts, le premier frein à l'enseignement de la danse est la représentation qu'en ont lesgarçons, activité féminine par excellence. Que ce soit pour les enseignants ou pour les élèvesd'ailleurs !

Cette difficulté n'est jamais abordée puisque le corps est plutôt envisagé comme unmatériau que comme un sujet social. Les experts mettent souvent en place dans leursétablissements scolaires des ateliers artistiques, des options ou des groupes de volontairesdans le cadre de l'association sportive. Les garçons sont très peu présents, et les expériencespédagogiques réussies (hors mis dans le primaire) reposent la plupart du temps sur desgroupes féminins.

Dans les LEP où les stéréotypes sociaux sont encore plus forts, les problèmes liés à lamixité semblent insolubles. La danse semble participer à la reconnaissance du pôle féminin etde la construction de l'identité de genre.

Quant aux publics difficiles, les écrits didactiques ne les évoquent pas. Pourtant, dansles collèges dits sensibles, les activités artistiques favorisent des mises en place de projets,mais les procédures mises en jeu, les rencontres sollicitées semblent plus importantes que lamise au point d'une didactique singulière.

Dans les stages de formation, les enseignants disent leur difficulté à "faire entrer endanse" les élèves. Car disent-ils les cultures d'appartenance sont hétérogènes et souvent trèséloignées de celle de l'enseignant. En effet l'élève est un "pratiquant culturé" en formation,qui, par les apprentissages doit renforcer ou non ses accords implicites avec les modes depensée de la culture. Aussi, devrions nous considérer derrière les savoirs de la danse créativece qui touche aux identités culturelles. Ceci est valable pour les élèves mais aussi pour lesenseignants, afin que les transmissions qui se réalisent à l'école soient les plus conscientes etles plus maîtrisées.

Michèle COLTICEProfesseur PRAG, IUFM de Lyon

Chercheur au Laboratoire de didactiqueUFR Staps de Lyon.Cris.

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ROBINSON, J. (1997) L'aventure de la danse moderne en France, Paris, Bougé.

ROCHEREAU, J. (1998) Un espace qui aspire, partout à la fois, Expérience et transmission,Colloque Danse, Brut de Béton, Clermont Ferrand.

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VERGNAUD, G. (1989) Difficultés conceptuelles, erreurs didactiques et obstaclesépistémologiques, in La construction des savoirs, Bednarz et Garnier (ed.), Ottawa, Agence d'Arc.

WALLON, H. (1970) De l'acte à la pensée, Paris, Fammarion.

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VI.

Didactiques de la danse à l’école : principes, valeurs etenjeux pédagogiques

I. L’autonomie relative de la « pédagogie »La danse à l’école est une danse essentiellement orientée dans ses principes, valeurs et

modalités d’enseignement par les pédagogies scolaires, et un peu également par l’histoire dela danse chorégraphiée. Curieuse de connaître la création chorégraphique contemporaine maislégèrement en décalage vis-à-vis de la pluralité des manières de former les danseursaujourd’hui (dans les écoles de danse), la danse à l’école n’est donc pas un cours de danse« classique » ou « jazz », « Graham », ou « Limon », etc. Si elle tend actuellement às’appuyer sur des formes de danse censées intéresser un public d’élèves (la danse hip hop parexemple), elle reste toutefois attachée à des principes scolaires et éducatifs généraux quiconduisent les didacticiens à établir des bases fondamentales à toutes danses : ce qu’ilsappellent aussi les fondamentaux du mouvement dansé. Les récentes mesures prises pourréglementer l’enseignement de la danse dans les écoles de danse et les conservatoiressemblent avoir fortement rapprocher les pédagogies enseignées dans les conservatoires enformation initiale de celles de l’école. Néanmoins, la danse apprise dans les conservatoiresvise à faire pratiquer aux élèves différents styles de danse, ce qui n’est pas le cas en milieuscolaire.

La « pédagogie » en danse s’est donc autonomisée par rapport à la création artistique,sans complètement se détacher d’elle puisque certains projets en danse visent à faire pratiquerla danse aux enfants et à les conduire à voir des spectacles afin de les familiariser avec cetunivers artistique et à leur présenter différentes démarches de création. Plus exactement,l’enseignement de la danse à l’école en est venu à se développer au croisement de plusieursespaces : scolaires, sportifs, formations amateurs et professionnels en danse, tout ens’autonomisant vis-à-vis du champ de la production chorégraphique. La pédagogie crée sespropres règles, ses propres principes, en fonction de « modèles » de corps qui ne représententpas l’ensemble des possibles de la création contemporaine. Dans ce sens, les didactiques de ladanse à l’école sont à comprendre dans leurs interfaces avec les différents espaces sociaux etsymboliques qui les rendent possibles. Elles ont évidemment aussi dépendantes des logiquesinstitutionnelles qui les réglementent (même si les pratiques concrètes prennent de la distancevis-à-vis des cadres institutionnels) (Faure, 2001/1).

Il n’est donc pas étonnant que des programmes pédagogiques mis en œuvre pourdéfinir les cadres de l’enseignement de la danse dans les écoles de danse et dans lesconservatoires soient si proches des didactiques de la danse scolaire et en empruntent lesprincipes de progression par classes d’âge et de niveau, d’acquisition de compétences,d’objectifs pédagogiques et d’évaluation des élèves. En un sens, l’organisation scolairegénérale des enseignements, déjà présente dans les formations initiales et professionnelles dedanse, s’est renforcée ces dernières années, notamment depuis la mise en place du diplômed’état de professeur de danse (en danse contemporaine, classique et jazz) de la loi de juillet1989 et de la création de lieux de formation autorisés à préparer aux épreuves du professorat.

Dans ce texte, nous rendrons compte des principes, valeurs et des enjeux desdidactiques de la danse à l’école, en veillant à distinguer (quand les auteurs le font) les cyclesscolaires. Nous terminerons en présentant les mots-clés des didactiques les plus récentes.

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- Une danse « des associations à l’école » en 1991En 1991, trois pédagogues et didactiennes de la danse, Nicole Guerber Walsh,

Claudine Leray et Annick Maucouvert, proposaient d’établir les principes d’une danse quipourrait s’exercer en formation initiale mais aussi en milieu scolaire, de la Maternelle àl’Université (Guerber Walsh, Leray, Maucouvert, 1991). Elles précisaient qu’au-delà desstyles de danse, un point commun réunit toutes les danses, à savoir le corps humain et sabiomécanique. Les auteurs déterminaient alors les facteurs du mouvement dansé et de lacomposition scénique.

Les facteurs du mouvement dansé et de la composition scénique selon Nicole Guerber Walsh,Claudine Leray et Annick Maucouvert

1 : corps 2. poids 3. contact 4. espace 5. temps 6. Intensités 7. interactionPerceptionsIntentionsSensations

RegardKinesthésieCœnesthésieconcentration

Appuis,allégements,

pressionsSuspensionsEquilibres

RésistancesContacts

Ecoute dupartenaire, de

son actionZone et

processusd’appuis

initiateurs dumouvementTractions

SuspensionsRepoussés

Portés

PropreScénique

ImaginaireFormeMasse

MatièreEnvironnement

DuréesRythmesStructures

EnergieDynamismes

ForcesrésultantesQualitésfluidité

ObjetsAccessoiresPersonnes

Environne-mentLumières

L’objectif du pédagogue, estimaient-elles, était le développement des potentialités desélèves. Il devait par ailleurs contribuer à leur apporter une « culture générale », en tenantcompte des caractéristiques des enseignés. Ce dernier point n’était toutefois pas pleinementdéveloppé, ce qui est d’ailleurs assez commun à beaucoup de didactiques réclamant une priseen compte des différences des élèves, mais qui en fin de compte réduisent ces différenciationsà des classes d’âge uniquement (prenant ainsi en défaut les différences de sexe, desdifférences sociales et culturelles des élèves).

De leurs analyses, il en découlait deux types de situation pédagogique : une dominante« modèle » et une dominante « créativité », à partir desquelles elles étudiaient la pratique dedanse en 7 points. Elles consignaient leurs résultats dans des tableaux comparatifs que nousrésumons ci-dessous.

Tableaux comparatifs de deux modèles de situations pédagogiquesNicole Guerber Walsh, Claudine Leray, Annick Maucouvert, Danse : de l’école… aux

associations, revue EPS, Paris, 1991.Le mouvement et les consignes qui l’impulsent

Dominante : modèle Dominante : créativitéTraité en référence au contenu formel ou qui s’élaboreautour de principes de base (apprentissages de phraseschorégraphiques)

Traité en référence aux connotations personnelles.

Engendré par l’image donnée par l’enseignant Engendré par un thème et sa résolution individuelle.Conforme au modèle Elaboré par l’élèveImitation d’un mouvement dont l’enseigné tente decomprendre la complexité et les différents niveaux designification.

Significations personnelles. Emergence d’uneintériorité.

Interprétation du geste Résultat de la liaison du rationnel et du subjectif.

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Comportements de l’enseignéDominante : modèle Dominante : créativitéComportements attendus :Qualités d’observation : fidélité au modèle, exactitudeet efficacité d’un mouvement. Rigueur par rapport auxcritères d’analyse du geste : concentration,disponibilité, sensibilité, sensations, perceptions, prisesde repères.

Comportements attendus :Qualités de réflexion relatives à l’analyse du thème.Rigueur et précision pour traiter le sujet. Se laisserguider par son intériorité (geste et imaginaire). Plaisirde découvrir par soi-même : rigueur d’une auto-analysedu geste, concentration, compréhension, perception,sensations, sensibilité, prises de repères, auto-évaluation.

Concentration et attention :D’abord excentrées (en rapport avec le modèle) puisintériorisées par les images et les sensationskinesthésiques.

Concentration et attention :Intériorisées (corps, sensations, imaginaire)simultanément à une décentration par rapport au thèmeet à l’imaginaire rationnel qui le sous-tend (attentionexcentrée).

Perspective de progression :Désir de perfectionnement en référence au modèle et àla connaissance de soi, vers la complexité et la« virtuosité »

Perspective de progression :Vers une connaissance de soi-même et de sespossibilités. Meilleure gestion de sa sensibilité tout enrespectant les contraintes thématiques

Organisation générale de l’enseignementDominante : modèle Dominante : créativitéLa séance :L’intervenant prépare un enchaînement contenant desnotions essentielles et fondamentales susceptibles defaire comprendre et sentir des principes du mouvementet d’entraîner à la mémorisation et à la coordination dugeste.Présentation de contenus déjà élaborés soit parl'enseignant soit par les élèves et démontrés.Développer la précision, la fidélité au modèle.Nécessité d’une convergence.

La séance :Présentation d’un thème et exploitation desimprovisations des élèves vers une pratiqueindividuelle ou collective, réfléchie, raisonnée.Faire émerger une cohérence entre le thème,l’improvisation et la composition.Présentation d’une trame thématique et des directivesprécises élaborées par l’enseignant qui sollicitent, parle biais de situations ouvertes, la personnalité del’élève, ses possibilités personnelles (...).Convergence nécessaire par rapport au thème.Divergence conduisant à une production personnalité.

La tâche :Chaque composante est définie, analysée, décryptée,par l’enseignant.Appropriation du mouvement par l’élève et respect descomposantes intrinsèques.

La tâche :Les limites de la tâche, les situationsd’expérimentation, les opérations à mettre en œuvresont définies.Les modalités de transformation ne le sont pas.Le mouvement résulte d’une analyse et d’une synthèsepersonnelle par rapport au thème.

Procédures :Prise de conscience de son corps en mouvement par lamédiation de l’image modèle et des images mentalessoutenant le geste.

Procédures :Découverte du mouvement dansé à travers lesconnotations et la sensibilité personnelles sollicitéespar les consignes.

Prises de repères :Utilisation de repères visuels et d’images jusqu’àl’appropriation de repères kinesthésiques.Perception du mouvement évoluant de l’extérieur versl’intériorisation.

Prises de repères :Prise en compte du vécu personne. Intériorisation dumouvement liant les sensations kinesthésiques etl’imaginaire, évoluant vers une structure.

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Organisation du coursDominante : modèle Dominante : créativitéOrganisation spatiale :Nécessité d’organiser le groupe classe dans l’espace enfonction d’une action commune.Nécessité du respect de son propre espace pour untravail collectif commun.Se situer par rapport aux autres.Ecoute, adaptation synchronisation.

Nécessité d’une prise en compte des repères spatiauxen fonction d’actions diversifiées.Orientations répondant aux motivations et aux repèresindividuels.Aucune direction n’est privilégiée ; les espacess’interpénètrent.Nécessité d’une prise en compte de l’autre,observation, écoute, adaptation.

Organisation temporelle :Succession d’étapes distinctes : démonstrations,observations, répétitions, corrections.Unité d’une séance, et addition de séquences d’uneséance à l’autre ; l’enchaînement de fin de cycle résultele plus souvent d’additions de différentes séquences.

Organisation temporelle :Etapes distinctes : présentation du thème, explorations(improvisations), élaboration-structuration(composition), répétition, observation, correction.Progression sur plusieurs séances à propos d’un mêmethème. Chaque séance se termine par une courtecomposition. La composition générale a lieu en fin decycle.

Logiques de progression :Continuité entre les différentes étapes d’uneprogression du simple au complexe. Logique linéaireou succession de phrases différentes (additiond’éléments) ; Dans chaque séquence, les progressionssont spécifiques et dépendent de l’analyse effectuée parl’enseignant.

Logiques de progression :Etapes de l’exploration répondant à des organisationset logiques personnelles : choix, développements,additions, soustractions, combinaisons, connectionsconscientes et kinesthésiques.Les progressions dépendent de l’analyse dumouvement et de sa dimension scénique effectuée parl’enseigné d’après le thème.

Influence de la MusiqueDominante : modèle Dominante : créativitéLa musique : utile pendant les premières étapes del’apprentissage. Support rythmique, comptes précis.Evocations rythmiques, mélodiques, dynamiquessusceptibles de soutenir l’idée et la qualité du geste. Lesilence est une difficulté si le groupe doit effectuer unmouvement commun avec un tempo intériorisé.Certains gestes ne sont pas compatibles avec unsupport sonore rythmé ; ils sont autonomes dans leurdynamique, accentuation, respiration. Ils se définissenten fonction des durées illustrées, par exemple, par desmusiques électroniques, concrètes...

Eviter les rythmes trop prégnants si le thème nel’impose pas. Evocations sonores susceptibles destimuler l’imagination. Le silence ou une musique nonrythmée facilite les premières investigations du geste ;car alors aucune structure sonore temporelle nes’impose et n’interfère avec le geste personnel.Après la phase d’élaboration, une structuration s’opère,favorisée par des repères sonores en adéquation avec legeste.

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Evaluation

Par l’enseignantDominante : modèle Dominante : créativitéAttitude de l’enseignant :Le choix de l’exercice correspond à des objectifsprécis. Clarté de la démonstration.

Attitude de l’enseignant :Le choix de propositions de situations correspond à desobjectifs précis. Clarté des principes exposés et duthème proposé.

Qualité d’observation :Simplicité du vocabulaire des explications mécaniqueset imaginaires Utilisation de la voix comme support durythme et de l’énergie.

Qualité d’observation :Capacité d’alimenter ou enrichir la recherche de l’élèvepar des images et des propositions gestuelles.Attitude congruente. Présence et attention soutenue.Rôle de catalyseur.Analyse de la structure rythmique et des intensités dugeste.

Notion de progression :Du simple au complexe, accumulation d’élémentssemblables (répétition, développements).

Notion de progression :Du simple au complexe en respectant le ou lesprincipe(s) de base. Développement et structuration parla conjugaison de différents facteurs.

Evaluation (suite)

Par l’enseignéDominante : modèle Dominante : créativitéQualités d’observation et d’analyse des reproductionsdes partenaires.L’observation confronte l’enseigné aux difficultésrencontrées. Celles-ci se manifestent dans l’écart entrele modèle et la réalisation.

Qualités d’observation et d’analyse des productions despartenaires.L’observation confronte l’enseigné aux difficultés quise manifestent dans l’écart entre thème et réalisation.La connaissance et la prise de conscience par l’élèvedes critères de réussite sont à la base de la mise enplace d’une auto-évaluation.

- Les Cahiers de pédagogie du Centre National de la Danse de 1999Les Cahiers de pédagogie du CND s’adressent aux futurs professeurs de danse. Les

cahiers consacrés à l’éveil et l’initiation à la danse définissent l’organisation d’un cours dedanse (et non un cours de danse à l’école). Neuf points relatifs aux objectifs de l’enseignant etaux compétences requises par l’élève sont présentés. Dans un texte introductif, BernadetteLeguil (directrice de l’institut de recherches chorégraphiques à Lyon et formatrice en danse)précise que l’éveil à la danse est la découverte des éléments fondamentaux de la danse, tandisque l’initiation est l’acquisition de la technique et l’étape de structuration du corps. Le but del’enseignement est d’aider l’enfant à se construire en tant qu’artiste, à se « développer »physiquement et intellectuellement (Leguil, 1999).

Dans ce texte, une séance implique des choix qui sont :- de définir des objectifs explicites,

- d’inventer, de construire des situations d’apprentissage,- d’objectiver le regard porté,

- de situer le niveau d’exigence,- de définir les contenus et les modalités de l’évaluation.25

Neuf étapes dans l’enseignement sont délimitées, il s’agit de : développer ladisponibilité ; susciter et préserver le plaisir du mouvement ; faire découvrir progressivementle corps et ses possibilités ; développer l’habileté corporelle dans le mouvement dansé ;

25 L’Eveil et l’initiation à la danse, op. cit., p. 9.

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associer l’approche de la musique et de la danse ; percevoir, découvrir et structurer l’espace ;favoriser la socialisation de l’enfant et la pratique collective ; inciter à observer, analyser etverbaliser ; transmettre l’art de la danse en préservant la dimension artistique de la danse.

Chacune de ces étapes est traitée en trois points : objectifs, exemples de cheminspédagogiques et compétences souhaitées. Nous ne donnerons qu’un exemple concernant ledéveloppement de la disponibilité :

Objectifs Exemples de cheminspédagogiques

Compétences souhaitées

Favoriser la perception

Favoriser la proprioceptionPermettre et développer l’écoute desoi, l’écoute de l’autreDévelopper l’engagement de chaqueenfant dans la danse

Favoriser la concentration etl’attention

Tenir compte de l’état de réceptivitédes enfants à leur arrivée dans lecours et proposer un premierexercice qui les rassemble pourconstituer un groupe(je ne donne pas ici les autresexemples)

Etre « présent », être à l’écoute

Etre sensibleEtre concentré, être confiant.

Etre ouvert à la nouveauté, à ladifférence ; être curieux del’inconnu.Etre capable de proposer.Différencier la contraction et lerelâchement puis la tension et ladétente.

Concernant l’acquisition de la technique en danse contemporaine aux niveauxsupérieurs, c’est-à-dire dans les cycles d’observation et d’orientation, le cycle élémentaireet le cycle supérieur, les cahiers de la pédagogie du Centre national de la danse obéissent làencore à une organisation de l’enseignement en objectifs et compétences. L’élève est ici unchercheur, un créateur. La démarche pédagogique s’organise autour de 5 points :

1°) Le mouvement est traité d’un point de vue bio-mécanique en prenant en compte leséléments suivants : poids du corps, appuis, rapport au sol, équilibre, déséquilibre ; colonnevertébrale, mobilité du dos, du buste, du bassin et de la tête ; amplitude et mobilité dans letravail des jambes ; amplitude et mobilité dans le travail des bras ; tours ; sauts ; qualités demouvement ; points d’initiation du mouvement, coordination.

2°) Le temps, la musique et le silence ; phrasé, rythme, durée.

3°) L’espace : formes, volumes, directions, orientations, niveaux, regard.4°) L’improvisation et la composition.

5°) La personnalité de l’élève. Les objectifs ici sont de « participer à l’épanouissementde la personnalité », de « développer la capacité de l’élève à s’exprimer oralement à propos dela danse » et d’ « amener l’élève à mettre en jeu sa personnalité dans un projet artistique. »26

Cette présentation des programmes de pédagogie en formation initiale est proche decelle qui organise les programmes EPS depuis 1992. Il semble donc qu’une volontéd’homogénéisation entre les programmes scolaires et les programmes de la danse (en vue depréparer les futurs enseignants au diplôme d’état de danse) en soit à l’origine. C’est ainsi quedes objectifs de « socialisation » sont introduits sur un modèle similaire à celui de la Chartedes Programmes visant à « permettre aux jeunes de construire leur vie personnelle, leur vie

26 Les Acquisitions techniques en danse contemporaine, Centre national de la danse, en collaboration avec la Citéde la musique, cahiers de la pédagogie, décembre 1999, p. 31.

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professionnelle et d’être des citoyens responsables. »27 La charte préconise également undécoupage pédagogique en objectifs et compétences selon les cycles, ce qui est censé faciliterl’évaluation en fin de cycle. L’ensemble des situations pédagogiques est ainsi orienté vers descompétences à atteindre et entre dans le cadre d’une « pédagogie du projet. »28 Nousretrouvons régulièrement ce terme dans les didactiques récentes de la danse à l’école.

- Une danse « scolaire » existe-t-elle ?À mi-chemin de la discussion sur les didactiques, il devient pertinent de poser la

question, que nombre de didacticiens soulèvent de manière explicite ou implicite, d’une danse« scolaire ». Nous avons vu que la pédagogie de la danse (tant en formation initiale qu’àl’école) avait acquis une certaine autonomie vis-à-vis du champ chorégraphique, du sportégalement, en développant ses propres conceptions du corps dansant, et en se rapprochant desprincipes et valeurs scolaires qui accompagnent les objectifs d’acquisition de connaissances etqui sont actuellement le développement de l’individu, la formation du futur citoyen,l’encouragement à l’autonomie des élèves dans une pédagogie du « projet ». Nous avonssouligné le fait que cette orientation pédagogique dépassait le strict cadre de la danse àl’école, et était perceptible dans les pédagogies de la danse initiale. Est-ce que cela signifieque la danse est en voie de devenir une activité scolaire presque comme les autres ? Les avisdes didacticiens divergent quelque peu. Il y a ceux qui oeuvrent dans ce sens en vue delégitimer la pratique en montrant que la danse peut avoir un traitement identique à ce qu’aconnu l’EPS ou encore le dessin et la musique, qu’elle peut donc être « notée » (évaluée)selon des critères qui lui sont propres. D’autres défendent l’idée de l’irréductibilité de la danseà une discipline scolaire en raison de ses principes artistiques (qui reposent notamment sur ledéveloppement de l’imaginaire et de la sensibilité), tout en revendiquant l’intérêt de lapratique dans un cadre scolaire.

Pour Michèle Coltice, la danse scolaire renvoie à une « danse didactisée » qui intègreles intentions éducatives de l’école, par l’EPS en partant de l’activité du sujet. Cette dansemet en jeu l’affectif, le moteur et le cognitif. Elle est donc une danse décontextualiséeculturellement qui n’envisage pas l’élève dans sa dimension culturelle et sociale, maisuniquement d’un point de vue de la psychologie génétique (Coltice, 2000). Il s’agitglobalement d’une pratique corporelle appréhendée à partir d’une connaissance sensible(parfois aussi réfléchie) des paramètres « fondamentaux » du mouvement dansé, orientée dansune démarche de création — qui aboutit souvent (mais pas nécessairement) à unecomposition, répondant alors aux exigences de l’écriture chorégraphique.

C’est ainsi que Nicole Guerber-Walsh propose d’exposer les fondements de la dansepour pouvoir l’enseigner à l’école (Guerber-Walsh, 1995). Sans exclure l’imaginaire,l’enseignement des fondamentaux du mouvement dansé s’appuient sur des connaissancesscientifiques de l’activité motrice ainsi que sur les analyses du mouvement existantes(l’éducation somatique, la kinésiologie appliquée au mouvement du danseur…). L’objectifpédagogique est bien de contourner les styles et leurs spécificités pour atteindre lemouvement dansé à partir de ses paramètres que sont : le corps, l’espace, le temps, le poids(en référence à von Laban), la fluidité et la qualité, associés aux paramètres de la scène quisont : le contact, les interactions et les intensités. Les pratiques de danse à l’école sont doncavant tout des expériences créatives qui nécessitent une connaissance des matériauxfondamentaux de la danse et qui aboutissent à une composition. La démarche de créationn’exclue pas l’imitation, la reproduction de modèles qui sont à ressentir, à analyser pour êtredépassés et élargis.

27 Extrait de la charte des programmes, dans D. Delignières et C. Garsault, « Connaissances et compétences enEPS, revue EPS, n° 280, nov-déc. 1999, p. 43-47, p. 43.28 Ibidem, p. 44.

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« À travers ce premier support (le modèle] sont inculqués les principes de gestes quisemblent essentiels. Puis les différents niveaux de construction gestuelle sont abordés au coursdes répétitions et transformations. L’enseignant insiste sur certains paramètres comme le temps[…], le poids […], le corps considéré dans sa globalité, en parties isolées ou interconnectées.L’espace se traite sous diverses facettes […] Il convient aussi de préciser la qualité dumouvement (intensité) qui peut être doux, coulé, continu ou bien figé, cassé, haché, percussif,ou encore guidé, soutenu d’une façon homogène, etc. des contacts s’établissent entre lesdanseurs qui évoluent sur scène ou dans la salle de cours en groupe […] Enfin il est question decomposition scénique par la prise en compte de l’environnement, des interactions multiplesentre les personnes […], avec les objets, avec les installations. » (Guerber Walsh, 1995 : 58)

La particularité des didactiques actuelles est de cibler un public scolaire : le public desécoles maternelles et/ou primaires et le public du secondaire, qui est perçu d’une manièrehomogène, sans référence réelle aux différences sexuelles et sociales. Au-delà d’unedidactisation d’un « art du mouvement » ancré dans une démarche de création, la danse àl’école se décline aujourd’hui en programmes répondant à des objectifs et visant l’acquisitionde compétences par cycles. Ces analyses des situations pédagogiques conduisent logiquementles enseignants à élaborer des stratégies d’évaluation. Enfin, la danse à l’école s’insère dansun projet d’éducation scolaire qui obéit aux principes idéologiques que nous avons déjàlonguement évoqués (ceux de la citoyenneté, de l’autonomie des élèves, du respect des autres,de la confiance en soi, de l’épanouissement personnel, d’ouverture culturelle).

C’est ainsi que d’après Selon Tizou Perez et Annie Thomas, la danse à l’écolematernelle et élémentaire répond aussi aux exigences de l’enseignement de l’EPS et comportetrois enjeux principaux :

- le développement des capacités organiques et motrices des enfants- l’accès des élèves à la culture (ouvrir le regard du spectateur sur les

œuvres artistiques de son temps)- le développement des savoirs et des connaissances liées à la vie

physique (développement des savoirs tels que l’attention, l’observation, l’anticipation,la prise de décision ; développement des savoirs socio-affectifs tels que l’écoute desoi, des autres, l’affirmation de sa présence au monde, l’acceptation des autres) (Perezet Thomas, 1994 : 15).

Le point d’organisation de l’enseignement de la danse reste le processus de création.Enfin, l’enseignement de la danse est pensé, là encore, en fonction d’objectifs et decompétences à atteindre selon les cycles.

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Figure 4 : Tizou Perez et Annie Thomas, EPS Danse. Danser en milieu scolaire, CRDP des pays de laLoire, Nantes, 1994, p. 39.

Concernant l’évaluation, Tizou Perez et Annie Thomas préconisent une évaluationformative qui cible le progrès de l’élève. Elle se fait par observation, dans un effort decommunication et d’adaptation à la représentation de l’autre. L’évaluation concerne laproduction du groupe ainsi que les progrès de chaque élève ; elle comprend également uneauto-évaluation et une évaluation collective (celle des spectateurs)

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- La danse à l’école maternelleDans le cadre de l’école Maternelle, les objectifs sont plus généraux. Isabelle Bellicha

et Nicole Imberty précisent que la danse est une « pratique corporelle artistique », un« langage corporel ». Il ne s’agit évidemment pas de former les enfants à la danse, mais deleur proposer « une expérience personnelle qui favorise [leur] développement (Bellicha etImberty, 1998). La danse en Maternelle s’inscrit dans l’interdisciplinarité et doit être mise enrelation avec d’autres domaines d’activités. Mettant en jeu l’imaginaire, l’enseignant aidel’enfant à entrer dans une démarche de création. Là aussi une évaluation est requise ; celle-ciest également formative, c’est-à-dire orientée vers les progrès des enfants. Le spectaclefinalise le travail et fournit l’occasion aux enfants de s’invertir dans un projet, de créerensemble, d’apprendre à s’adapter à l’espace scénique, d’apprendre à danser sous le regarddes spectateurs et enfin de partager avec les familles ce qui a animé la classe pendant lacréation chorégraphique. Le maître mot de l’activité est bien l’épanouissement de l’enfant.

« En proposant aux enfants de danser à l’école, nous favorisons leur épanouissement,nous les aidons à grandir. Les compétences transversales telles que l’écoute, le regard,l’autonomie, l’engagement dans les activités proposées, la sociabilité, sont largementvalorisées. » (Bellicha et Imberty, 1998 : 26)

- La danse à l’école élémentaireConcernant l’école primaire uniquement, Marie Romain estime de son côté que la

danse est une « discipline scolaire émergeante », conçue comme « une activité créative etrécréative indispensable au bien-être et à l’épanouissement de l’enfant » (Romain, 2001 : 8).Elle s’accorde avec d’autres didacticiens pour dire que la danse privilégiée dans le cadre del’école est la danse contemporaine, qui serait non pas une technique particulière, mais un« objet culturel de référence » révélant « que les possibilités motrices sont illimitées et que letravail technique du danseur consiste à prendre conscience des éléments qui régissent le corpsnon comme une mécanique mais comme un circuit d’énergie, de dynamismes, de sensations,et d’en faire jaillir l’expressivité » (Romain, 2001 : 14).

Nous retrouvons les principes de la danse fondamentale appréhendée par NicoleGuerber Walsh, mais l’accent est mis sur les sensations et l’expression. Il est à remarquerégalement que cette danse « fondamentale » s’ancre principalement dans une forme de dansechorégraphiée, qui est la danse contemporaine. Il serait plus exact de dire qu’elle s’enracinedans une partie de cette forme de danse, à savoir la danse moderne expressionniste et sesfiliations contemporaines.29

Marie Romain invite à composer des situations pédagogiques en fonction des niveauxde maîtrise et de cycles. Au-delà des finalités et des objectifs généraux de la danse à l’école, ils’agit de définir les compétences et les savoirs à transmettre pour chaque cycle et enfin demettre en place des séances en adéquation avec les attentes du pédagogue. L’évaluation est làencore importante « parce qu’elle contribue à la formation du spectateur « critique » et à laprogression individuelle des enfants, en identifiant ce qui est réussi et ce qui reste un problème àrésoudre. Elle donne lieu à de nombreux échanges de points de vue et participe à la transformation desreprésentations ; elle favorise la tolérance et l’ouverture vers les autres » (Romain, 2001 : 123).

29 En effet, nous ne cesserons de préciser que la « danse contemporaine » est plurielle. Le point de focale varieselon qu’on la considère du point de vue de la production chorégraphique actuelle, du point de vue des courantsmajeurs (Graham, Cunningham, etc.) ou du point de vue de cette orientation pédagogique qui s’appuiehistoriquement sur une rupture avec le formalisme et l’académisme, pour privilégier la « singularité » du gestecréé par un « sujet » en considérant la danse comme un « langage » permettant l’expression personnelle.

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Figure 5 : Marie Romain, La danse à l’école primaire, Retz, col. Les guides ressources, Paris, 2001, p. 53.

Figure 6 : Figure 7 : Marie Romain, La danse à l’école primaire, Retz, col. Les guides ressources, Paris,2001, p. 54.

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Figure 8 : Figure 9 : Marie Romain, La danse à l’école primaire, Retz, col. Les guides ressources, Paris,2001, p. 55.

- La danse et la leçon dans le SecondaireTravaillant la question de l’enseignement de la danse dans le secondaire, Thierry

Tribalat en rappelle les enjeux :- confronter les élèves à une pratique artistique

- contribuer à l’éducation esthétique- proposer une formation complète et équilibrée sur le plan moteur

- contribuer à lutter contre une idéologie scientiste. Ne pas exclure doncl’approche du sensible

- contribuer par l’éducation sensible et artistique à une nouvelleéducation de la citoyenneté.30

Il s’interroge sur la définition de l’art et en délimite des frontières : il s’agit d’uneactivité créatrice par son objet (pour la danse, l’objet est la représentation du corps) centréesur le sujet (l’art de la danse a une fonction de symbolisation dans laquelle l’artiste est à lafois sujet et objet). De ce fait, l’activité physique artistique est une activité de symbolisationqui est en relation avec le champ artistique en comportant une dimension poétique et plastiqueen lien avec les autres arts. Enfin, dans la danse, le corps est le médium de l’activité.

L’enseignement se mène sur trois registres qui sont le développement de conduites decréation artistique sollicitant l’imaginaire et la créativité ; la confrontation à une cultureartistique en développant un regard sur les formes et enfin la transmission de savoirsnécessaires à la maîtrise de procédés et de techniques qui seront utilisés dans un projet finalisé(Tribalat, 1997).

30 Thierry Tribalat, La Danse et la leçon - EPS et la mise en activité physique artistique, cours de préparation àl’agrégation EPS, CNED (non daté), texte dactylographié.

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Ce panorama des didactiques récentes de la danse invite à synthétiser les démarchesqu’elles sous-tendent en relevant et explicitant leurs principes, à travers l’exposition des mots-clés qui sont communs à beaucoup d’entre elles.

II. Les mots clés des didactiques de la danse à l’écoleS’il n’existe pas de définition unifiée de la danse à l’école, en revanche la lecture

croisée du corpus des textes met en exergue une série d’expressions présentes dans lesdidactiques les plus récentes. Nous proposons de relever les plus récurrentes et d’analyser lesens que leur donnent les auteurs.

- Approche transversale ou interdisciplinaire : la danse comme formatrice d’uneculture artistiqueLa transversalité entre des arts est fréquemment requise, de la maternelle au

secondaire. Pour les auteurs, il s’agit d’aider les élèves à se construire une culture artistiquecontemporaine, et de se familiariser avec les démarches (ou méthodologies) de différentscréateurs qu’ils soient chorégraphes ou qu’ils appartiennent à d’autres domaines. Parfois,mais plus rarement (généralement pour la maternelle et le primaire) la transversalité est aussirequise entre les savoirs scolaires. La danse doit pouvoir prendre sens dans le cours defrançais, de langue, etc. La chorégraphie est elle-même liée à des notions de géométrie. Lesavoir en danse n’est donc pas clos sur lui-même.

« La transversalité de la pratique chorégraphique est observable dans la créationcontemporaine […] La transversalité entre les arts préside à la démarche de "danse à l’école". »(Leguil, 1999 : 33)

« La polyvalence des maîtres donne sa spécificité à l’école élémentaire. Loind’impliquer une simple juxtaposition d’enseignements disciplinaires, elle favorise la mise enœuvre de démarches faisant appel à plusieurs disciplines pour construire ou conforter unapprentissage. Elle crée les conditions pour mener des activités diversifiées, mais coordonnéesconcourant au même objectif, pour mettre en place au travers des différentes disciplines lesprocédures intellectuelles telles qu'apprendre à comparer et sélectionner des informations, à lesmémoriser, les organiser, à analyser les contenus d’une illustration, d’un graphique, d’unschéma, à argumenter, à s’auto-évaluer et analyser et comprendre les causes d’un échec, àtrouver les conditions de la réussite... autant d’éléments qui conduisent à l’autonomie ets’acquièrent dans toutes les activités de la classe en même temps qu’ils sont au service desdifférents contenus disciplinaires. »31

« […] le projet interdisciplinaire développe des « compétences transversales » à l’école,au niveau des objectifs généraux poursuivis. Ainsi, la pluridisciplinarité favorise chez l’enfant ledésir de connaître, l’envie d’apprendre, l’acquisition de l’autonomie. Elle lui permet égalementd’acquérir des méthodes de travail, d’apprendre à rechercher et à traiter de l’information, àélaborer un projet, à le mener à terme, à organiser son travail, seul ou avec les autres. » (Lascar,2000 : 241)

31 B.O. n° 5, du 9 mars 1995, L’Ecole maternelle, l’école élémentaire, p. 21.

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- L’autonomie des élèvesAu cœur du projet éducatif de l’action culturelle et artistique à l’école, l’autonomie ne

cesse d’être invoquée. Elle est un objectif à atteindre pour les enseignants, que ceux-cienseignent le français, les mathématiques, l’EPS ou la danse. La notion est présente dans lestextes officiels comme dans les didactiques de la danse.

« Le développement de l’enfant passe par la mise en jeu de sa capacité à imaginer.L’imitation différée permet la constitution d’images mentales, indispensables à l’autonomiecorporelle et à l’équilibre affectif et intellectuel. » (Coltice, 1993 : 83)

« Ainsi, la danse intégrée dans un processus d'éducation visant le développementoptimum de l'individu (être multidimensionnel) dans des perspectives d'autonomie, de flexibilitéet de créativité, pose une problématique particulière [...] Il s'agit de créer cet espace ouvert oùl'être s'exprime comme il veut et le ressent. Il s'agit d'un travail de recherche esthétique sur lemouvement qui se présente comme l'expression de l'intériorité du sujet, de ses sensations etémotions. » (Commeignes, s.d. : 77)

« En proposant aux enfants de danser à l’école, nous favorisons leur épanouissement,nous les aidons à grandir. Les compétences transversales telles que l’écoute, le regard,l’autonomie, l’engagement dans les activités proposées, la sociabilité, sont largementvalorisées. » (Bellicha et Imberty, 1998 : 26).

- La métaphore du langage et de la poésieSi les auteurs, cherchant à définir ce qu’est la danse, s’accordent pour beaucoup

d’entre eux pour comparer cette pratique artistique à un langage par lequel les élèvescommuniquent leurs émotions, et s’expriment. Ils ne font en fait que réactualiser un ancienschème de pensée puisque la métaphore du langage est très ancienne dans l’histoire esthético-philosophique de la danse chorégraphiée. On la trouve déjà dans certains textes de laRenaissance portant sur la « danse mesurée » qui affilient la danse à une « poésie muette. »En effet, le langage dansé n’est pas verbal. La danse serait un mode d’expression corporel,une rhétorique d’action permettant d’exprimer ce que les mots taisent, jugée souvent pluspuissant que les mots (Faure, 2001). Nous retrouvons la métaphore tout au long de l’histoirede la danse, du XVIIème siècle à la danse moderne (Guy, 1991).

Le geste de danse n’est dans cette perspective jamais gratuit. Il exprime, donne dusens, communique aux autres. Et quand il est chorégraphié, il se rapproche d’une langueécrite. Pour Gil Mons, l’emploi de la métaphore poétique relève aussi d’une nécessitéd’expertise : les didacticiens doivent créer un langage formel et le communiquer et trouvantune rhétorique propre.32 Il est en effet plus aisé de concevoir la danse comme un langageayant sa propre logique, car alors on peut le traiter comme un « objet », en définir lesfonctions, les régularités. Le didacticien appliquerait à la définition de la danse sa propreconstruction théorique de cette pratique. Le corps serait donc perçu comme un ensemble designaux, de codes signifiants. Enfin, si la danse est un langage, alors elle a sa place comme lagrammaire française, comme le langage mathématique. Dans ce sens, la métaphoreparticiperait de la légitimation (par la rhétorique) de la danse à l’école (Mons, 1999).

« Premier apprentissage de la connaissance qui va de la curiosité à la réflexion, par desdéductions infinies - des recherches patientes - toutes sortes d’aventures à vivre où la matière,l’imaginaire, nous conduisent à l’expérience d’une poétique corporelle — la danse. C’estl’expérience d’un langage. C’est un outil avec lequel les culturels se sont exprimés. » (Dupuy,1986 : 3)

« Danser demande à l’enfant de développer un langage corporel. » (Lascar, 2000 : 10)

32 Gil Mons, « La danse et ses regards : regard, incertitude et sens », texte non daté, dactylographié, fourni parl’auteur.

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« Comme pour le langage « écrire avec son corps » c’est respecter une syntaxe ; il fautla majuscule de début de phrase, le déroulement gestuel qui constitue le propos de la phrase etle point qui symbolise la fin de phrase. » (Lascar, 2000 : 187)33

« En sollicitant la sensibilité et la créativité, en développant le pouvoir expressif ducorps et en permettant d’accéder à une autre forme de langage, la danse contribue à laformation artistique et permet de s’approprier le réel d’une manière poétique et esthétique,pour en construire une représentation symbolique communicable aux autres » (Romain, 2001 :15)

« [La danse] est un art plastique dans la mesure où elle façonne l'apparence des corps,crée des formes et sculpte l'espace chorégraphique ; elle est aussi un art musical dans sadimension poétique et rythmique. Mais cette poésie s'enracine dans la chair, cet art s'incarne,s'incorpore et se sublime dans l'instant, tout risque pris - le regard de l'autre, l'absence de tracestangibles, l’œuvre dansée qui échappe... » (Arguel, 1992 : 203)

- Une démarche de création : l’enfant danseur, compositeur et spectateurPour les auteurs, la pratique de la danse participe d’une démarche de création. L’élève

ne danse pas pour danser ; il n’apprend pas un style particulier. En revanche, sa pratique leconduit à créer, seul et avec les autres des mouvements qui généralement sont chorégraphiés.La création passe en effet par deux processus : la créativité et la composition. Dans unpremier temps, il s’agit d’amener les élèves à « libérer » leur imagination, en leur donnant desconsignes, en leur fournissant des thèmes, des idées d’expression. Dans un second temps, unemise en ordre de la créativité est nécessaire, engageant à faire des choix, à élaguer les« trouvailles » gestuelles et à composer un « ouvrage » de danse. Ainsi, Tizou Perez et AnnieThomas, en référence à plusieurs chercheurs, définissent la créativité comme une attitudedivergente qui, par différentes sollicitations, conduit l’individu à chercher, à explorer desréponses originales à un problème, qui met en jeu l’imagination, c’est une pensée tâtonnante,qui répugne l’apprentissage par cœur.

La création serait de l’ordre de la pensée convergente, qui ordonne, mène desdéductions prudentes et rigoureuses, répète, conserve et produit (Perez et Thomas, 1994 : 12-14 ; Arguel, 1994 ; Commeignes, s.d.)

« La création est labeur, travail, gestation. La créativité reste le champ des possiblessous-tendu par une marge d’imprévisibilité et de spontanéité. La création est conception,engagement, réalisation, production particulière : à la fois œuvre et processusd’accomplissement de l’œuvre. La créativité est une potentialité individuelle ou collective, plusou moins bien partagée entre les individus, une aptitude à faire surgir du nouveau, à innover, àinventer, à créer. Mais innover n’est pas créer ! »(Arguel, 1994 : 34).

S’appuyant notamment sur les travaux de Alain Beaudot et de propos de lachorégraphe-pédagogue Jackie Taffanel, Dominique Commeignes définit la créativité commeune potentialité, un produit et un processus, rejoignant en cela également les analyses deMireille Arguel. La potentialité est une propriété individuelle susceptible de « se révéler »dans certaines conditions ; elle est expressive (spontanéité du premier jet), productive (usagede contraintes techniques), inventive (mises en relation d’éléments encore jamais associés),innovante (modifications des fondements d’un domaine) ou émergente (production de chosesqui n’existaient pas auparavant). Le produit est défini par son originalité et sa rareté. Lesdispositions mentales mise en œuvre serait la pensée divergente (induisant une pluralité demoyens et de but dans l’action) et la pensée convergente qui, comme l’ont écrit Tizou Perez etAnnie Thomas, vise un but à atteindre et met en œuvre les moyens les plus efficaces pour yparvenir.

33 En italique par l’auteur, p. 187.

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La créativité implique donc le hasard, la médiation, elle est association d’idéesauxquelles la pensée rationnelle n’aurait pas songé (Commeignes, s.d.).

La finalité de la démarche de création est généralement le spectacle. Ce derniercomporte des objectifs pédagogiques précis : participer à un projet du début à la fin, accepterde se montrer aux autres et, à son tour, être un spectateur.

« Il s’agit de construire un projet expressif selon une démarche de création, donnant lieuà une production pour communiquer un sens, une émotion, mettant en jeu des formescorporelles évocatrices du réel ainsi que des connaissances liées à la lisibilité de lacomposition. » (Coltice, 1999 : 32).

La démarche de création s’inscrit plus largement dans une pédagogie particulière(pédagogie du projet, pédagogie de la création), se posant comme alternative par rapport auxautres démarches pédagogiques à l’école mettant en jeu essentiellement la rationalité, lessavoirs à acquérir. En cela, des didacticiens rejoignent les propos des défenseurs de l’actionculturelle à l’école qui se posent aussi en novateur au niveau pédagogique en introduisantl’idée de création, de recherche, d’exploration ; ici, le savoir n’est pas acquis (notamment parimitation d’un modèle et reproduction), mais se « construit ».

« La pratique de la danse, comme d’autres activités artistiques, peut aider les élèves àconstruire un rapport positif avec l’école et leur donner le désir d’apprendre, de se transformeren développant leurs capacités d’imagination et de création. » (Romain, 2001 : 15)

« Ce qui fait la spécificité de l’action culturelle, c’est sa pratique, le "enseigner la mêmechose, mais autrement" des années 80 est devenu au début des années 90 "agir sur les savoirs-références, les comportements sociaux et les pratiques de création". » (Cittério, 1993 : 21)

« À l’école, les explorations en danse nourrissent la créativité motrice et émotionnelle.Au cours de ces moments de recherche, des instants magiques apparaissent. De ces trouvaillesindividuelles ou collectives, naît une parole du corps de plus en plus juste, première esquisse dela composition chorégraphique. Exploiter ces trouvailles gestuelles, c’est considérer la danse àl’école comme une discipline d’enseignement artistique et admettre que toute expérienceaboutisse à une réalisation « expression-communication » du groupe-classe. C’est pour unenseignant, être convaincu que chaque enfant, même le plus jeune, doit arriver à construire« une phrase gestuelle » structurée avec son début, son déroulement et sa fin. » (Lascar, 2000 :187-188).

« À ce niveau, nous avons tenté de définir l’élève au centre du triptyque, savant, citoyenpoète. Puis nous avons essayé de définir une « démarche poétique » et de la mettre en relationavec les compétences à faire acquérir à l’élève, et celles de l’enseignant […]. Nous pouvonsconsidérer l’élève comme un savant « constructeur de son savoir », comme un citoyen qui vaconstruire peu à peu ses règles, et comme un poète qui regarde le monde au travers du filtre deses sensations […]. L’élève sera donc considéré comme un chercheur en quête de lui-même,d’une plus grande connaissance des autres, de savoirs et de règles. L’enseignant sera le guide dece chercheur pour entrer dans l’activité artistique. L’enseignant et l’élève partiront d’un projetnégocié. Pour mener à bien ce projet, une « démarche poétique », que nous avons assimilé à unprocessus de création commun à toutes les activités artistiques, sera proposée à l’élève. »34

- Une éducation artistiqueLa danse à l’école entre dans le cadre d’une éducation artistique ; elle n’a pas

d’autonomie propre, contrairement à une discipline scolaire traditionnelle. Ce point légitimed’ailleurs l’interdisciplinarité et la transversalité. Il implique par ailleurs un ensemble deprises de position pédagogique et politique que nous avons analysé dans un précédentchapitre. Rappelons seulement que l’éducation artistique est ancrée dans l’idéologie de la

34 Les Activités physiques artistiques dans l’éducation physique et sportive, Actes de l’Université d’été 1998,Talence, 26-29 octobre 1998, p. 46.

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démocratie culturelle considérée comme « l’une des missions fondamentales du service publicd’éducation », comme il est écrit dans la Circulaire n° 98-153, du 22 juillet 1998« L’éducation artistique et culturelle de la maternelle à l’université ».

« L’éducation artistique fait partie de l’éducation globale de l’enfant. Elle est pour lejeune enfant et pour l’adolescent un aspect majeur du développement de sa personnalité et de saréussite dans la vie et dans sa vie. [...] En conséquence, l’acte éducatif vise à faciliter, àpromouvoir, à étoffer tout ce potentiel d’humanité dont l’enfant est porteur. » (Leguil, 1999 :23)

Les ressorts pédagogiques de cette éducation artistique sont bien la créativité et lacréation originales qui représentent les aspirations éducatives les plus fondamentalesactuellement (Mons, texte s.d.).

L’éducation artistique repose également sur l’idée de « développement » de l’enfant.Elle est ainsi censée développer ses « potentialités » et/ou sa « sensibilité », « l’ouvrir » aumonde (à son monde intérieur et au monde extérieur). La Charte de l’enseignement artistiquespécialisé en danse, musique et théâtre de mars 200135 rappelle ces deux faits en précisant quel’éducation artistique est le « premier vecteur de la démocratisation culturelle » et qu’elle« participe à la formation de la personnalité » des enfants en développant « leur culturepersonnelle et leur capacité de création et de mémoire ».

« L’éducation artistique, c’est peut-être faire accéder l’enfant à une connaissancesensible de lui-même, c’est-à-dire développer ses perceptions, ses sensations, ouvrir une portesur son monde intérieur, le dévoiler pour l’aider à devenir soi et cet accès à son unicité autorisela reconnaissance de l’autre différent de lui. » (Lascar, 2000 : 9)

- Les « fondamentaux »Comme nous l’avons vu à plusieurs reprises, la danse à l’école est perçue en tant

qu’ « art du mouvement » ou « langage corporel » qui se décompose en différents paramètres.Tous les auteurs ne sont pas d’accord sur l’ensemble des paramètres. Globalement, l’onretrouve la bio-mécanique du corps, son rapport au temps (et à ses variétés : rythmes,durée…), à l’espace, les dynamiques du mouvement (ou qualités) impliquant parfois le« poids » du corps (la gravité). À cette bio-mécanique se rajoutent des notions d’imaginaire,de sensibilité, de sensations, d’émotion, d’expression. Enfin, quand l’art du mouvement semet au service d’une production chorégraphique, les auteurs incluent également des notionsde composition et d’interaction, de regard.

« Ces bases fondamentales prennent en compte : les images mentales, lessensationskinesthésiques et cœnesthésiques susceptibles de transformer à long terme,consciemment et inconsciemment les schèmes moteurs. » (Guerber Walsh, 1991 : 36).

Selon Michèle Coltice, les fondamentaux de la danse sont la communication, lessensations, les accords avec le temps, l’espace et la dynamique, les interrelations. Cesfondamentaux produisent des formes différentes et construisent des images liées à l’intentiondu danseur (Coltice, 2000). Pour Thierry Tribalat, la danse est alors transformation du réel àtravers la sensibilité et l’imaginaire (Tribalat, texte sd) De la même manière, DominiqueCommeignes écrit que la spécificité de la danse à l’école est de « faire entrer le sujet dans uneactivité artistique à part entière, dans le sens où il suscite un regard différent sur le monde etsur soi et où il amène une interprétation singulière du réel sur la base d’une activitéimaginaire. » (Commeignes, s.d. : 77).

35 « Charte de l’enseignement artistique spécialisé en danse, musique et théâtre », La lettre d’information,Ministère de la culture, supplément du N° 80, mars 2001.

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ConclusionDe cette exposition un peu détaillée, nous constatons que les didactiques récentes de la

danse sont relativement cohérentes et homogènes. Elles tracent les frontières d’une danse« scolaire » ou « didactisée » dont le socle est une certaine forme de danse contemporaine.Ses principes reposent sur le corps en mouvement expressif et communicatif mis au service(mais pas systématiquement) d’une écriture chorégraphique (d’une production scénique). Aucœur de cette danse se trouve le sujet — l’enfant ou l’adolescent et qui se « développe ».Placé dans une « démarche de création » il est alors invité à explorer et surtout à exprimer sesémotions, ses sensations, son « monde intérieur », sa motricité, son imaginaire.

La démarche n’est cependant pas individualiste. Il s’agit bien au contraire de mettre enplace une pédagogie du « projet » visant à élaborer un ouvrage ou à mener un atelier de danse,avec l’enseignant et avec les autres élèves. La pédagogie du projet requiert de l’autonomie, del’engagement, de la confiance en soi et aux autres, une écoute des autres, un respect mutuel,une position critique vis-à-vis des œuvres produites. L’évaluation prend sens dans cetargumentaire, tout en visant la progression de l’élève. Enfin, la danse à l’école participe del’éducation artistique qui porte les valeurs de la démocratie culturelle censée pallier lesinégalités sociales et culturelles, et former des citoyens, des êtres responsables et autonomes.

D’un point de vue critique, nous dirons que si le « sujet » est placé et revendiqué aucentre des préoccupations des didacticiens actuels, il est cependant à remarquer que très peud’entre eux ne se soucient véritablement des différenciations sociales et sexuelles (pour neciter que les variables les plus déterminantes sur un plan sociologique) et n’interrogentabsolument pas le rapport différencié des élèves à l’école et au savoir. Seules les catégoriesd’âge sont prises en compte. De fait, l’hétérogénéité des individus (des perceptions du corpsdansant, les rapports différenciés au corps selon les origines sociales, le sexe, l’âge) estignorée.

Par ailleurs, la plupart des discours reposent sur deux aspects non réfléchis :1°) le premier se rapporte aux catégories de pensée politique et idélogique à l’oeuvre

dans les discours et jamais réinterrogées — ceux qui se rapportent à la citoyenneté, àl’autonomie de l’élève, etc. — et qui font des didactiques non seulement des outils detransmission de la danse mais aussi, d’une certaine façon, des outils politiques de lasocialisation scolaire, passant par le corps des élèves ;

2°) le second relève d’un parti pris théorique non objectivé, orienté vers la psychologiegénétique piagétienne. Le sujet est l’Élève considéré presque uniquement dans sa progressionscolaire en cycle et donc dans son développement (pensé selon la classe d’âge). Malgré ceparti pris, les didactiques se réfèrent rarement aux travaux de la psychologie dudéveloppement. Si elles leurs empruntent quelques notions, et surtout un mode deraisonnement, les didactiques ne font toutefois jamais le lien entre leurs cadres théoriquesimplicites et leur mise à l’épreuve rigoureuse sur le « terrain » de la danse à l’école. Lesintentions didactiques (dans leur majorité) sont bien de créer des situations d’apprentissage,de donner aux enseignants des outils pédagogiques pour mener une séance, seul ou en faisantintervenir un artiste extérieur à l’établissement scolaire, mais pas de produire de laconnaissance « scientifique ».

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

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Bibliographie du chapitre VIARGUEL, M. (1991) Création – Créativité, Marsyas, 8 : 30-34.

ARGUEL, M. (1992) Le corps du danseur : création d’un instrument et instrument d’unecréation, Danse. Le corps enjeu, Paris, PUF, col. Pratiques Corporelles, p. 203-209.

B.O. n° 5, du 9 mars 1995, L’Ecole maternelle, l’école élémentaire.

BELLICHA, I., IMBERTY, N. (1998) La danse à l’école maternelle, Paris, Nathan

Charte de l’enseignement artistique spécialisé en danse, musique et théâtre, La Lettred’information, Ministère de la culture, supplément du N° 80, mars 2001.

COLTICE, M. (1992) La danse au collège, Spirales, centre de recherche de l’UFR APS ,Lyon 1, 6 : 75-96.

COLTICE, M. (1999) L’éducation artistique par la danse, revue EPS, 280 : 32-35.

COLTICE, M. (2000) La danse au collège : le modèle de "pratiquant culturé", thèse dedoctorat en sciences de l’éducation, Université Lumière Lyon 2.

DELIGNIERES, D., GARSAULT, C. (1999) Connaissances et compétences en EPS, revueEPS, 280 : 43-47.

FAURE, S. (2001) Corps, savoir et pouvoir. Sociologie historique du champ chorégraphique,Lyon, PUL.

FAURE, S. (2001/1) La "nature socio-historique" des pratiques et leurs modalitésd’incorporation. A propos des techniques de danse, Actes du colloque : Les politiques des savoirs,Université Lumière Lyon 2, ISPEF, 28-29 juin 2001, Cd Rom.

GUERBER WALSH, N., LERAY, C., MAUCOUVERT, A. (1991) Danse : de l’école… auxassociations, Paris, éditions revue EPS.

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LEGUIL, B. (1999) Texte introductif aux cahiers de la pédagogie, L’Eveil et l’initiation à ladanse, Centre national de la danse, en collaboration avec la Cité de la musique.

Les Acquisitions techniques en danse contemporaine, Centre national de la danse, encollaboration avec la Cité de la musique, cahiers de la pédagogie, décembre 1999.

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MONS, G. (1999) Quel sens conférer à l’introduction de la notion de "poétique" dans lesdiscours didactiques sur la danse à l’école ? in La Danse, une culture en mouvement, Centre deRecherches Européennes en éducation corporelle, CREEC, Actes du colloque international mai 1999,Université Marc Bloch, Strasbourg, p. 33-46.

MONS, G. La danse et ses regards : regard, incertitude et sens, texte non daté, dactylographié,fourni par l’auteur.

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TRIBALAT, T. (1997) Le champ des APA, Actes de l’université d’été « Activités physiquesartistiques dans l’enseignement de l’EPS, Voiron, p. 13-21.

TRIBALAT, T. La Danse et la leçon - EPS et la mise en activité physique artistique, cours depréparation à l’agrégation EPS, CNED (non daté), texte dactylographié.

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Troisième partie :

Les perspectives scientifiques de lamotricité et de l’incorporation des

mouvements de danse

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VII.Études du développement moteur chez l’enfant : vers

une approche multidimensionnelle

IntroductionLorsque l’on s’interroge sur le développement moteur, deux grandes questions

viennent guider les chercheurs. Qu’est ce qui se développe ? et comment s’opèrent leschangements ? La première question conduit à identifier ce qui change au cours del’ontogénèse. Une fois mis en évidence les changements, apparaît la seconde question quiconsiste à savoir sous l’effet de quels facteurs s’opèrent ces transformations. Cette questionpose un problème plus redoutable. Il s’agit en effet de savoir si la prédominance d’unestratégie motrice à un moment donné du développement est plutôt caractéristique descontraintes musculo-squelettiques ou de l’état de maturation du SNC. De récentes étudesdéveloppementales (Hadders-Algra et al, 1996 ; Assaiante et al, 1998 ; Schmitz et al, 1999)ont montré la coexistence précoce de stratégies motrices depuis les plus simples jusqu’auxplus élaborées. En fait, c’est la fréquence d’occurrence de ces différentes stratégies qui sembleévoluer au cours de l’enfance. Néanmoins la question se pose toujours de trouver au cours desdifférentes phases du développement les facteurs déterminants pour la sélection et lastabilisation d’une stratégie donnée dans le répertoire des possibles.

Cette grande question est actuellement au cœur des débats qui animent la communautéscientifique du développement moteur. Pour certains auteurs la maturation des réseauxnerveux (Forssberg, 1985 ; Hirschfeld and Forssberg, 1994 ; Berger, 1998 ; Hadders-Algra etal, 1996 ; Crenna, 1998) constitue le facteur déterminant. D’autres auteurs (Thelen, 1984 ;Savelsberg et Van der Kamp 1993 ; Newell, 1996) privilégient l’évolution des contraintesbiomécaniques comme étant l’élément déterminant du développement moteur. Enfin, pour untroisième courant de recherche, les changements qui s’opèrent dans le développement moteursont nécessairement liés à des modifications dans le développement des fonctions cognitives(Piaget, 1936 ; Mounoud, 1986 ; 1993 ; Vinter et Mounoud, 1991 ; Vinter, 1998 ; Hatwell,1999). Dans cette mosaïque qui compose le paysage du développement moteur de l’enfant, laspécificité de ma contribution scientifique repose sur une approche fonctionnelle dudéveloppement moteur qui résulte de la maîtrise progressive au cours de l’enfance desfonctions de coordination, d’anticipation et d’adaptation (Assaiante, 2000). Cette approchefonctionnelle du développement moteur implique également d’ouvrir une fenêtre sur ledéveloppement du contrôle exercé par le SNC au cours de l’élaboration d’une action.

Cette diversité d’approches sur le développement moteur où apparaît un certainnombre de consensus et de divergences, est surtout révélatrice de la richesse de ce modèled’étude et du dynamisme important de la recherche dans ce domaine. Un des objectifs de cetterevue est de convaincre le lecteur qu’une approche multidimensionnelle du développementmoteur, basée sur l’ouverture et l’intégration de champs disciplinaires différents, souventcomplémentaires, est en fait indispensable pour une meilleure compréhension de ce sujetd’étude.

I. Contrôle nerveux du développement moteur- Approche maturationnisteLes études classiques de Gesell (1933), McGraw (1952), André-Thomas (1956) et

Peiper (1963) concevaient le nouveau-né comme un organisme biologique immature,

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principalement doté de réponses réflexes et relativement insensible à son environnement. Pources auteurs, le développement moteur du jeune enfant était intimement lié à la maturation desstructures cérébrales. Ainsi, la maturation des structures sous-corticales à la naissancepermettait l’expression des réflexes archaïques, tels que la marche automatique ou le« grasping », présents depuis la naissance jusqu’aux environs de 2-3 mois. La disparition deces réflexes était expliquée par la maturation des centres corticaux venant inhiber les réflexesprimitifs contrôlés sous-corticalement. Ces réflexes sont remplacés par la suite par descomportements volontaires contrôlés à un plus haut niveau. Cependant cette conceptionmaturationniste du développement moteur s’accommode mal de la coexistence de réflexesprimitifs et de comportements plus élaborés. De plus, de nombreuses données plus récentesont montré que le bébé possède, dès la naissance, de très larges compétences, telles quel’expression d’une motricité évoluée à travers un mouvement de saisie volontaire assisté d’unsoutien postural adapté de la tête (Amiel-Tison et Grenier, 1980) ou encore des capacitésd’orientations posturales favorisant la découverte du monde environnant (Casaer, 1979 ;Bullinger, 1991).

L’explosion des études systématiques de la prime enfance à partir des années soixante(Spitz, 1965) et la seconde vague des années quatre vingt marquant l’étude descomportements précoces (Jouen et Hénocq, 1991) a profondément modifié l’idée que l’onpouvait se faire du jeune nourrisson. La représentation du nouveau-né a évolué vers unorganisme extrêmement complexe, présentant des niveaux de fonctionnement corticalisés etdéveloppant toute une activité comportementale difficilement explicable par la présence desimples arcs réflexes.

- Théorie sélectionniste appliquée au développement moteurEmpruntée au développement des processus cellulaire et synaptique (Courrège et al,

1973 ; Changeux et Danchin, 1976 ; Changeux, 1983 ; Changeux et al, 1984), la théoriesélectionniste a rapidement été élargie au développement cognitif (Bresson et de Schonen,1979 ; Changeux et Dehaene, 1989 ; de Schonen et al, 1994) et semble s’appliquer avecautant de cohérence au développement moteur (Sporn et Edelman, 1993 ; Hadders-Algra et al,1996 ; Schmitz et al, 1999 ; Forssberg, 1999).

Dans le cadre de cette théorie, les structures cérébrales post-natales sont en interactionavec l’environnement qui se définit à la fois par les caractéristiques de l’espèce et celles del’individu. Ce modèle postule que la diversité des compétences du sujet et des interactionsavec l’environnement repose sur un générateur interne de diversité qui inscrirait dans lecerveau un répertoire de réseaux neuronaux génétiquement prédéterminés. A partir desinteractions du sujet avec son environnement, le développement consiste en une sélection despossibilités génétiquement anticipées compatibles avec les propriétés de l’environnement eten une élimination des autres. Avec l’expérience une stabilisation de ces réseaux s’opère.Dans le modèle sélectionniste de développement, les périodes sensibles, ou périodes critiquesau cours desquelles les interactions structures et environnement sont intenses,correspondraient à une étape transitoire d’innervation et de connectivité maximale où lescontacts synaptiques seraient encore labiles, engendrant selon Changeux et Dehaene (1989)un maximum de diversité.

Un certain nombre d’arguments expérimentaux empruntés à la littérature dudéveloppement moteur s’accorde tout à fait avec cette théorie sélectionniste. Ledéveloppement moteur procéderait par sélection, sur la base d’informations afférentesproduites par le mouvement (Sporn et Edelman, 1993). De plus, cette approche permet derevisiter la notion de variabilité ou de diversité des patrons moteurs, particulièrement présenteau cours de certaines phases précoces de l’ontogénèse (Forssberg et al, 1991 ; Konczak et al,1995 ; Assaiante et Amblard, 1995). Le développement des patrons d’activation des muscles

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posturaux lors d’un rétablissement d’équilibre en station assise (Hadders-Algra et al, 1996) seprête particulièrement bien à cette démonstration. Avant la station assise autonome, le jeuneenfant présente une grande variabilité de patrons d’activités musculaires en réponse à uneperturbation externe. Parmi ce large répertoire de réponses musculaires, coexiste déjà lepatron adulte. Avec l’âge et les expériences sensori-motrices nouvelles, la variabilité décroîtet la sélection s’opère. Des résultats similaires rapportant chez de jeunes enfants de 3-4 ans lacoexistence de différents patrons moteurs matures et immatures ont été obtenus lors d’unmouvement volontaire de délestage bimanuel (Schmitz et al, 1999).

Jusqu’à présent, les processus de sélection sont peu connus, du moins concernant ledéveloppement moteur (Forssberg, 1999). Certaines données expérimentales tendent àmontrer que la sélection d’un patron moteur peut être accélérée par l’entraînement (Hadders-Algra et al, 1996 b). Forssberg (1999) fait l’hypothèse que la persistance d’un patron moteurimmature dans le cas de certaines pathologies infantiles telles que les infirmités motricescérébrales pourrait résulter d’un déficit des mécanismes de sélection. La même hypothèsepourrait être formulée concernant les déficits moteurs présentés par des enfants autistes(Schmitz, 2001 ; Schmitz et al, soumis).

- Pathologies du développement moteurL’étude des anomalies du développement moteur est une source précieuse

d’informations aussi bien pour les maladies elles-mêmes que pour le développement moteurnormal et les mécanismes neurobiologiques qui le sous-tendent. Les lésions cérébraleslocales, survenant aux périodes fœtales ou périnatales dans les aires corticales sensori-motrices, les régions du thalamus et des ganglions de la base conduisent à des troublesneurologiques regroupés sous la dénomination clinique d’infirmes moteurs cérébraux (IMC).

Chez ces nourrissons dits « à risque », certains examens neuropédiatriques cherchent àrepérer dans le répertoire moteur précoce l’expression de signes de normalité sur lesquelss’appuyer pour relancer le processus de développement des stratégies posturo-cinétiques(Amiel-Tison et Grenier, 1980 ; Atlanti-Soyer, 1994). Dans cette perspective, l’étude de lamotilité, c’est-à-dire l’aptitude globale du fœtus ou du bébé à produire spontanément desmouvements, constitue des données précieuses pour évaluer l’équipement fœtal (Prechtl,1997) et néonatal (Cioni et Prechtl, 1990 ; Mellier, 1991 ; Cioni et al, 1992 ) et y déceler desindices utiles au dépistage précoce de diverses anomalies des comportements moteurs futurs.

La majorité des travaux rapportés dans la littérature du développement moteurconcernent des enfants IMC spastiques. Ces études rapportent aussi bien des déficits liés aucontrôle postural (Nashner et al, 1983 ; Brogren et al, 1998 ; Woollacott et Burtner, 1996 ;Woollacott et al, 1998 ) que des déficits liés à la réalisation d’activités de préhension(Eliasson et al, 1991 ; Gordon et Duff, 1999 ; Gordon et al, 1999 ; Forssberg et al, 1999) ouencore à la réalisation de tâches locomotrices (Berger et al, 1982 ; Berger, 1998 ; Crenna et al,1992 ; Crenna, 1998). Le dénominateur commun de toutes ces études est constitué par lapersévération de patrons moteurs immatures probablement liée à la perte de sélection dupatron moteur pertinent pour la tâche à exécuter (Crenna et Inverno, 1994 ; Crenna, 1998).Les études posturales (Nashner et al, 1983 ; Brogren et Hadders-Algra, 1996 ; Woollacott etal, 1998) montrent que les enfants IMC en réponse à une perturbation du support présententune inversion de la séquence de recrutement musculaire allant normalement du distal vers leproximal, accompagnée d’une co-activation excessive des muscles antagonistes. Cette co-activation est également retrouvée au cours de la locomotion (Crenna, 1998 ; Berger, 1998).La locomotion de ces patients se caractérise également par une augmentation des réflexesd’étirement à courte latence et un bas niveau d’activation associé à une faible modulation desmuscles gastrocnémiens (Berger et al, 1982 ; Crenna et al, 1992). De plus, l’introduction deperturbations en cours de locomotion entraîne des réponses immatures aussi bien au niveau

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des réponses musculaires des jambes qu’au niveau des potentiels évoqués cérébraux qui neprésentent pas de différentiation (Berger, 1998).

D’autres maladies du développement telles que la trisomie 21 et l’autisme sontégalement étudiées. Même si les déficits majeurs de ces pathologies touchent principalementla sphère cognitive, il en résulte néanmoins un retard notable dans les acquisitions posturo-cinétiques (Schumway-Cook et Woollacott, 1985 ; Ulrich et al, 1992 ; Bee, 1997) et certainsdéficits dans les fonctions d’anticipation posturale et de coordination motrice (Schumway-Cook et Woollacott, 1985 ; Kanner, 1943 ; Schmitz et al, soumis ; Vernazza-Martin et al,soumis). Les études de réactions posturales réalisées chez les enfants trisomiques en réponse àune perturbation externe du support ont rapporté un retard significatif dans l’activation despatrons musculaires adaptés (Schumway-Cook et Woollacott, 1985). De plus les capacitésd’adaptation de la réponse aux changements des caractéristiques de la perturbation sont trèsfaibles. Ces enfants montrent également une certaine incapacité à activer les musclesposturaux de façon anticipée lors de mouvements volontaires du bras (Schumway-Cook etWoollacott, 1985). Le retard rencontré par ces enfants dans la maturation du contrôle posturalse retrouve également dans l’apparition de la locomotion autonome. Néanmoins, une étudeeffectuée avec des enfants trisomiques âgés de 11 mois a montré que la capacité à générer durythme locomoteur dans les conditions de marche sur un tapis roulant avec maintien posturalest semblable à celle des enfants normaux (Ulrich et al, 1992). Ces auteurs suggèrent doncque les réseaux neuronaux responsables de la marche sont disponibles chez ces enfants aussitôt que chez les enfants normaux et ne seraient donc pas responsables du retard d’apparitionde la marche autonome.

Actuellement, les syndromes autistiques sont considérés comme l’expression cliniquede troubles du développement du système nerveux central, d’origine génétique etépigénétique. Bien qu’ils ne soient pas dominants et variables selon les enfants, la pathologieautistique comprend également un ensemble de troubles concernant la sphère sensori-motrice : troubles de la posture et du tonus, anomalies de positionnement des segments,anomalies d’anticipation des mouvements, troubles de la locomotion parfois décrite commedigitigrade ou pseudo-parkinsonnienne (Maurer et Damasio, 1982). Dès 1943, Kannersoulignait les troubles de l’anticipation posturale chez de jeunes enfants autistesprincipalement lorsqu’il s’agit pour eux de s’accorder avec la posture de la personne qui lesporte. Un certain nombre de marqueurs neurobiologiques ont été identifiés ces dernièresannées à partir d’études en imagerie cérébrale. Ils impliquent le développement du cervelet(Courchesne et al, 1994), du cortex frontal (Zilbovicius et al, 1995), temporo-pariétal(Townsend et al, 1996) ou encore temporo-occipital (Jambaque et al, 1998). Récemment, unehypothèse unificatrice d’un déficit du codage temporel pouvant s’exprimer aussi bien sur lasphère cognitive que sur la sphère sensori-motrice a été formulée et fait actuellement l’objetd’un programme de recherche coordonné sur la parole, la vision et la motricité (Massion,Assaiante, Deruelle, Gepner, Habib et Mestre, Projet Fondation de France, 2000-2001). Dansnotre équipe, nous travaillons à mettre en évidence ce type de déficit chez des enfants etadolescents autistes au travers de la fonction d’anticipation dans une tâche bimanuelle dedélestage (Schmitz, 2001 ; Schmitz et al, soumis). Depuis peu, dans le domaine despathologies du développement cognitif, il semble que l’on assiste à une sorte de réhabilitationdes études fines de la motricité au service d’un dépistage précoce des signes autistiques(Teitelbaum et al, 1998 ; Baranek, 1999). En effet, une des fonctions essentielles de lamotricité est de permettre le dialogue entre l’organisme et son environnement notamment autravers des entrées sensorielles. Cette fonction de « communication » jouée par ledéveloppement moteur est particulièrement cruciale pendant la période de la petite enfance etconstitue un indicateur précieux du développement dans sa globalité.

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II. De la contrainte biomécanique à l’exploitation des propriétés dusystème- Approche écologique ou couplage perception actionL’approche écologique de la perception et de l’action a été initiée par Gibson (1966 ;

1979). La spécificité de cette approche réside dans l’importance qui est donnée au couplageentre la perception et l’action. Dans ce couplage, la perception d’un objet dépend des actionsque le sujet peut réaliser sur cet objet et, en retour, les actions sont déterminées elles-mêmespar ce qui est perçu de l’environnement et de son propre corps. Il en résulte un état d’équilibreplus ou moins stable qui assure l’exécution d’activités sensorimotrices, d’apparencecomplexe, à partir d’indices perceptifs relativement simples contenus par exemple dans leflux optique. Dans le cas de l’approche écologique, et contrairement à la plupart des modèlesde fonctionnement de la psychologie cognitive, on fait l’économie de l’intervention deprocessus cognitifs supérieurs tels que représentation interne ou programmation motrice dansla production du mouvement au profit d’une sorte de dialogue sensorimoteur plus direct avecl’environnement. En effet, les tenants de l’approche écologique considèrent que l’informationpertinente pour l’action est directement disponible pour le sujet dans son environnement. Deplus, le système moteur possède des propriétés d’auto-organisation face aux contraintes del’environnement ne nécessitant pas le recours à un programme moteur ni de paramétrisationspatio-temporelle précise de la commande motrice.

De nombreux chercheurs (Lee et Aronson, 1974 ; Butterworth et Hicks, 1977 ;Butterworth et Pope, 1983 ; Bertenthal et Bai, 1987 ; Stoffregen et al, 1987 ; Jouen et Lepecq,1989 ; Bertenthal et al, 1997; Bertenthal et Clifton, 1997), s’inspirant également des étudesdéveloppementales d’Eleanore Gibson (Gibson et Walk, 1960 ; Gibson et Walker, 1984 ;Gibson et al, 1987 ; Gibson, 1988 ; Gibson et Schmuckler, 1989), ont trouvé dans le cadre ducouplage perception/action un cadre théorique attractif pour l’interprétation des donnéesdéveloppementales relatives principalement à la première année de vie. En effet, à ladifférence de la théorie Piagétienne (1954), l’approche écologique renforce considérablementl’interaction entre le nourrisson et le monde environnant par la capacité immédiate du bébé,sans expérience préalable, à extraire de son environnement des informations perceptivespertinentes pour accroître ses connaissances (Gibson, 1966).

Dans la mouvance de la théorie écologique, différentes approches incluant leurspropres innovations conceptuelles et méthodologiques empruntées à des disciplinesapparentées à la biomécanique, les neurosciences et la dynamique ont vu le jour. A ce titre onpeut citer l’apport théorique de Bernstein (1967) qui en proposant son concept de réductiondes degrés de liberté pour le contrôle du mouvement a considérablement influencé les étudesdu contrôle moteur à partir des années 1970. L’approche dynamique, quant à elle, parl’intermédiaire de la contribution de différents développementalistes (Thelen, 1983 ; Thelen etUlrich, 1991 ; Thelen et Smith, 1994 ; Thelen, 1995 ; Corbetta et Thelen, 1996) a servi decadre heuristique pour appréhender au cours de l’ontogénèse l’interaction entre le systèmenerveux, le corps et l’environnement.

- Approche dynamique du développement moteurDans la théorie dynamique du développement, l’acquisition d’une nouvelle

connaissance se réalise par le réarrangement de connaissances existantes (Geert, 1994). A lanaissance, le bébé dispose de mouvements spontanés qui en fait ne sont pas totalementdésordonnées, ni aléatoires. La dynamique du mouvement va configurer cette activitéspontanée dont les structures spatio-temporelles vont persister dans les gestes futurs plusélaborés (Turvey et Fitzpatrick, 1993). Par l’exploration des interactions aléatoires entre lecorps et l’environnement, l’enfant développe sa motricité et découvre progressivement la

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façon d’articuler les structures de force (forces de gravité, réactionnelles, élastiques, etc…) etles configurations des membres avec les objets de l’environnement (Keller, 1999). Quandl’enfant grandit, la croissance modifie les échelles de force et de contrôle des nombreuxniveaux d’organisation, occasionnant un déséquilibre. Grâce à l’exercice et après unfonctionnement sur le mode de l’essai/erreur, le système retrouve un nouvel équilibre qui tientcompte des nouvelles contraintes biomécaniques du sujet, occasionnant l’émergence denouveaux patrons moteurs. Ainsi différentes études cinématiques et électromyographiquesrelatives à la mise en place de l’activité locomotrice (Thelen et al, 1981 ; Thelen et Fisher1982 ; Thelen et Whitley-Cooke, 1987) ont pu montrer que l’activité mature de marche peutémerger du patron stéréotypé de la marche automatique du nouveau-né. Ces auteurs suggèrentque les modifications graduelles dans l’organisation du patron de la marche sont provoquéesprincipalement par les exigences fonctionnelles dynamiques de la locomotion bipède, lecontrôle de l’équilibre et le développement de la force au cours de la première année de vie.

La variabilité est un trait caractéristique du développement. Loin de chercher àcontourner cette difficulté « méthodologique », l’approche dynamique, au contraire, a souventfocalisé sa recherche sur la variabilité des comportements en favorisant les étudeslongitudinales individuelles (Thelen et Whitley-Cooke, 1987 ; Thelen et al, 1993 ; 1996). Autravers de la variabilité, ces études ont permis de révéler l’instabilité du système, propice à lamise en place de nouveaux patrons moteurs. Ainsi, la compréhension des mécanismes quicontribuent au développement des habiletés motrices nécessite une analyse de la variabilitéaussi bien que de la régularité des performances (Ulrich et al, 1991). Enfin, il est important dedistinguer la variabilité au niveau de la performance d’une action de la variabilité des modesde contrôle qui peuvent sous-tendre l’exécution d’une action (Newell et Corcos, 1993). Cesdeux sources de variabilité sont bien évidemment pertinentes pour le développement commepour l’apprentissage de nouvelles habiletés.

L’aspect multidimensionnel est une caractéristique de l’approche dynamique quipermet de favoriser l’interaction entre différents niveaux d’analyse sans contraintehiérarchique ou anatomique (Thelen et Spencer, 1998). Il s’agit par exemple de coupler lesdifférentes niveaux qui sous-tendent une action de saisie : but, paramètres temporels,paramètres de charge, (Thelen et Spencer, 1998), ou bien de coupler les différents membresimpliqués dans une action de saisie (Corbetta et Thelen, 1994), ou encore de couplerl’émergence d’une nouvelle habilité avec une autre habileté précédemment acquise (Corbetta,1999). Il est important aussi de remarquer que l’émergence d’acquisitions motricesfondamentales telles que la préhension ou la marche impose au système des contraintesperceptives et motrices radicalement différentes des contraintes perceptivo-motricesjusqu’alors exercées. Ainsi différentes études (Adolph, 1995 ; Corbetta, 1998) ont pu montrerque l’acquisition de la marche autonome affecte temporairement les capacités de préhensionet de perception du bébé qui manifeste alors une sorte de régression en réactivant un patron desaisie bimanuelle, qui correspond à une forme primitive de l’activité de préhension. Parconséquent, ces nouvelles contraintes doivent être réorganisées et intégrées aux connaissanceset habitudes motrices précédentes de manière à permettre le développement decomportements nouvellement adaptés (Corbetta, 1999). Ces résultats soulignent à nouveaul’intérêt de l’approche multidimensionnelle pour une meilleure compréhension dudéveloppement moteur dans sa totalité.

- Emergence motrice par apprentissageL’observation du mouvement dans sa globalité laisse apparaître des constantes dans

son organisation à la fois dans son aspect ontogénétique et dans son aspect expertise du geste.Newell (1995) a observé que les changements de forme de mouvement déterminés par Gesell(1929) dans son ouvrage sur l’ontogénèse des comportements chez l’enfant ont tendance à

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réapparaître au cours de l’apprentissage moteur de l’adulte. Un certain nombre d’autresauteurs (Bernstein, 1967 ; Newell et Emmerik, 1989 ; Schneider et al, 1989 ; Thelen et al,1992) ont également fait l’hypothèse que l’acquisition d’une habileté sensori-motrice au coursde l’enfance suit une progression similaire à celle de l’apprentissage d’une nouvelle habiletéchez l’adulte. Dans un premier temps, les mouvements sont dominés par une dynamiquepassive intersegmentaire incontrôlable, spécifique du mouvement, ce qui conduit à unmouvement inefficace et une faible stabilisation posturale. Dans un deuxième temps, lessujets apprennent à supprimer les effets néfastes de la dynamique passive par un contrôlemusculaire actif. Ce contrôle musculaire actif se traduit initialement par une co-contractionmusculaire accompagnée d’une rigidification des articulations, puis plus tard par uneactivation sélective des muscles qui neutralisent spécifiquement les couples de forcesperturbateurs. Enfin, les sujets apprennent à utiliser la dynamique passive inhérente aumouvement, de façon à réduire la quantité de contrôle musculaire actif et d’énergiemétabolique nécessaire pour réaliser l’habileté. En effet, si le contrôle est indispensable, ildoit également apprendre à se limiter à celui des variables pertinentes pour l’action, car toutcontrôle est source de perturbation, ce qui implique d’éviter le contrôle des variablessecondaires (Scholtz et Schöner, 1999).

Différents arguments expérimentaux puisés dans la littérature du développementmoteur supportent cette proposition. Le développement de la stabilisation de la tête surl’espace au cours de la locomotion (Assaiante et Amblard, 1993; Assaiante et al, 1993; 1998)du saut (Assaiante et al, 1997) ou encore du maintien de l’équilibre sur support perturbé(Berger et al, 1995) a révélé le passage d’un fonctionnement en bloc à un fonctionnementarticulé de l’ensemble tête-tronc au cours de l’ontogénèse. Ces résultats ont été obtenus àpartir d’une analyse cinématique. De même l’analyse électromyographique rapporte que lesenfants co-activent leurs muscles antagonistes plus souvent que les adultes dans le cas dediverses tâches posturales et locomotrices (Schmitz et al, 1999 ; Woollacott et al, 1987;Berger et al, 1985; Forssberg, 1985). Ainsi, il est intéressant de noter qu’un certain nombre derésultats expérimentaux sur le développement du contrôle moteur peut également s’interpréterdans le cadre du schéma proposé pour l’apprentissage, sur la base des principes fonctionnelsci-dessus énoncés, même si ce n’est pas toujours leur cadre originel d’interprétation.

- Limites des approches écologique et dynamique appliquées au développementmoteurCes approches semblent être particulièrement pertinentes dans la période dite de

développement sensorimoteur de l’enfant, c’est-à-dire au cours de la première année de vie oùse mettent en place les grandes habiletés motrices telles que la saisie manuelle, l’acquisitionde la verticalité et la marche bipède autonome. Ces approches, au travers principalement desétudes sur la locomotion et la saisie manuelle, ont permis notamment de compléter lesdonnées sur le développement des coordinations entre membres inférieurs et également entremembres supérieurs.

Il est à regretter cependant que la majorité des auteurs ayant choisi d’interpréter leursdonnées sur le développement moteur selon ces modèles théoriques, choisissentexclusivement la tranche d’âge de 0 à 2 ans. Or, le développement moteur ne se limite pas àcette période de la petite enfance. L’approche ontogénétique constitue une dynamique qui vadu nouveau-né jusqu’à l’adulte en passant par des phases de croissance régulières et d’autresplus intenses en modifications internes. Pourquoi la période de l’adolescence pourtant richeen déséquilibres en tout genre et également en acquisition de nouvelles habiletés motricesn’est-elle pas explorée par ces approches ? Inversement comment l’approche écologique oul’approche dynamique peut-elle expliquer des phénomènes de discontinuité dans les modes de

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contrôle moteur, survenant aux alentours de 6/7 ans et qui ne sont sous-tendus par aucunerupture au niveau de la croissance physique ?

Différents auteurs tels que Bertenthal et Clifton (1997) ont également remarqué cettelimite dans les études actuelles. Pour ces auteurs, l’évolution de l’approche écologiqueappliquée au développement moteur doit passer par l’exploration d’autres phases dudéveloppement et par l’élargissement du cadre théorique afin d’appréhender les interactionsentre perception, action et cognition au cours de la réalisation d’habiletés complexes à desâges plus avancés. Cet élargissement visant à intégrer la réorganisation des structuresnerveuses dans le couplage fort qui lie le corps, l’environnement et le cerveau est égalementpréconisé par d’autres auteurs tels que Thelen et Spencer (1998) et Corbetta (1999). Même siles barrières conceptuelles et méthodologiques peuvent encore persister, cette approchemultidimensionnelle du comportement est néanmoins souhaitable pour l’ensemble deschercheurs qui travaillent sur le développement.

III. Développement du contrôle postural : de la prédominance visuelle àl’alternance des autres modalités sensorielles- Prédominance de la vision chez le jeune enfantL'influence de la vision dans la mise en place des activités posturo-cinétiques a été

largement étudiée dans la littérature. Des études effectuées chez le bébé (Jouen, 1986) et chezle jeune enfant (Lee et Aronson, 1974 ;Brandt et al, 1976 ;Butterworth et Hicks, 1977 ;toffregen et al, 1987) ont montré que les informations visuelles, en particulier d'originepériphérique, jouent un rôle privilégié dans l'élaboration et le contrôle de l'équilibre postural.De plus, une dominance de la contribution visuelle a été rapportée à chaque période clé où lejeune enfant acquiert une nouvelle habileté posturo-cinétique (Butterworth, 1986 ; Berthentalet al, 1997). Ainsi, il a été observé une augmentation de la sensibilité au flux visuel aumoment où les jeunes enfants apprennent à s'asseoir de façon autonome (Butterworth etHicks, 1977). La sensibilité visuelle augmente à nouveau dès que l'enfant commence à se tenirdebout (Lee et Aronson, 1974) et dès qu'il commence à marcher (Stoffregen et al, 1987 ;Sundermier et Woollacott, 1998). Les diverses approches: stimulation visuelle par chambremobile (Lee et Aronson, 1974 ;Butterworth et Hicks, 1977 ;Jouen, 1986 ;Stoffregen et al,1987 ;Bertenthal et Bai, 1987 ;Jouen et Lepecq, 1989) ou bien rétablissement d'équilibre enl'absence d'indice visuel (Forssberg et Nashner, 1982 ;Shumway-Cook et Woollacott, 1985)arrivent à la conclusion d'une prédominance de la vision dans le contrôle postural chez lejeune enfant. Ainsi, il apparaît que dès la naissance, le bébé est capable d’extraire du fluxvisuel les caractéristiques pertinentes pour induire une perception de son mouvement propreet de l’utiliser pour réguler sa posture. Cette capacité initiale est, de plus, renforcée parl’expérience du déplacement actif du bébé.

Lee et Aronson (1974) ont été les premiers à souligner l’intérêt majeur de l’attributionprécoce de la fonction proprioceptive à la vision. Ils ont suggéré que la proprioceptionvisuelle permet la mise au point ou la calibration d’autres systèmes proprioceptifs, tels que lesrécepteurs des muscles et des articulations. En effet, les informations en provenance desmécano-récepteurs contribuent à la constitution d’un référentiel stable qui est utilisé pourorganiser le mouvement. Or chez les enfants, les mécano-récepteurs sont nécessairementsensibles aux changements de taille et de poids des différents segments corporels qui sontinhérents à la croissance. Par conséquent, ces informations doivent être en permanencerecalibrées par d’autres sources d’information plus stables relatives au mouvement, telles quevisuelle et vestibulaire. L’information proprioceptive visuelle présente l’avantage majeur den’être nullement affectée par la croissance du squelette. De ce fait, le système visuel constitueun invariant solide sur lequel s’appuyer pour construire et maintenir un contrôle postural fin.

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De nombreux résultats en posture (Shumway-Cook et Woollacott, 1985) et enlocomotion (Assaiante et al, 1988 ; ssaiante et Amblard, 1992) suggèrent, de plus, que laprédominance visuelle n'est pas exclusive de la petite enfance et qu'elle se poursuit jusqu'auxenvirons de 6 ans. Shumway-Cook et Woollacott (1985) ont observé une période de transitiondans le développement du contrôle postural qui se produit aux alentours de 4-6 ans. Ainsi, desmodifications dans l'utilisation des indices visuels continuent à être observées au long del'enfance, de même que des améliorations notables dans le contrôle postural. Nos proprestravaux (Assaiante et al, 1988 ;Assaiante et Amblard, 1992) ont contribué à montrer quel'influence des informations visuelles périphériques sur le contrôle de l'équilibre locomoteurne varie pas de façon monotone avec l'âge. La contribution visuelle périphérique augmente de3 à 6 ans, âge auquel elle est alors maximum. De plus, jusqu'à 4 ans, l'enfant n'est pas encorecapable de marcher sur une poutre étroite en éclairage stroboscopique à 5 flashes par seconde,c'est-à-dire en l'absence de vision de mouvement (Assaiante, 1990).

- 6/7 ans : une période de transition dans la contribution des modalitéssensoriellesA partir de 6 ans jusqu'à l'âge adulte, la prédominance de la contribution visuelle dans

le contrôle de l'équilibre tend à diminuer progressivement. Forssberg et Nashner (1982) ontrapporté que l'effet du flux visuel sur la posture est négativement corrélé avec l'âge. De plus,une négligence transitoire des indices visuels périphériques semble se produire aux environsde 7 ans (Assaiante et al, 1988). Une étude de Peterka et Black (1990) rapporte que, entre 7 et15 ans, le contrôle postural est plus affecté par la perturbation des informations somato-sensorielles que par la perturbation des informations visuelles. Lors de nos précédentesexpériences sur le développement de l'équilibre locomoteur chez l'enfant, nous avons puobserver l'influence jouée par la vision sur la vitesse moyenne de marche (Assaiante et al,1988 ; Assaiante et Amblard, 1992). La restriction visuelle, limitée à une vision frontale de 30degrés, se traduit généralement par un ralentissement de la marche qui se révèle êtremaximum à 6 ans. Le résultat marquant est cependant la disparition de l'effet de la restrictionvisuelle à 7 ans. Ainsi, il apparaît à 6 ans une véritable sur-utilisation des indices visuelspériphériques suivie à 7 ans d'une négligence brutale de ces mêmes indices. Enfin, lacontribution visuelle périphérique réapparaît progressivement à partir de 8/9 ans jusqu'àatteindre son niveau chez l'adulte. Une étude récente du contrôle postural en conditionsinstables (Nougier et al, 1998) rapporte que c’est précisément à partir de 7 ans que la visioncentrale devient plus efficace pour réguler les oscillations médio-latérales, alors que la visionpériphérique, quant à elle, devient plus performante pour contrôler les oscillations antéro-postérieures. Ce résultat récent s’accorde tout à fait avec l’ensemble de nos résultats quisoulignent une évolution irrégulière du contrôle de l'équilibre locomoteur chez l'enfant, avecune véritable transition entre 6 et 7 ans.

Nous pensons que cette discontinuité est le signe de la mise en place d'une nouvellestratégie sensori-motrice, précédée d'une phase de régression où l'enfant réactualise unestratégie sensorielle plus ancienne, qui est celle de la dépendance visuelle. Or, 7 ans estprécisément l'âge où en situation d'équilibre difficile l'enfant commence à adopter la stratégiede stabilisation de la tête sur l'espace, principalement d’origine vestibulaire (Assaiante etAmblard, 1993). Ce mode de fonctionnement est le signe d'une maîtrise motrice des degrés deliberté du cou associée à une maîtrise sensorielle, permettant, en conditions dynamiques, uneinterprétation correcte des informations spatiales en provenance de la tête (Lund et Broberg,1983 ; oll et Roll, 1988 ; urfinkel et Levik, 1991 ;Hlavacka et al, 1992). Nous interprétonsdonc ces résultats comme révélant une prédominance passagère de la contributionvestibulaire, permettant l'installation de cette nouvelle stratégie. Cet enrichissement de lacontribution vestibulaire est en fait le prélude à une alternance future des contrôles sensoriels(vestibulaire, visuel et somesthésique) qui peuvent être coordonnés ou bien sélectionnés

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indépendamment selon leur efficacité respective en fonction du contexte environnemental,comme c'est le cas chez l'adulte (Brandt et al, 1976 ;Woollacott, 1988; Ohlmann, 1988 ;Assaiante et Amblard 1995 ; Amblard, 1996).

- Contribution visuelle chez l’adulteChez l'adulte, de nombreux travaux ont contribué à démontrer que la vision, en

particulier d’origine périphérique, intervient de façon prépondérante dans le contrôle del'équilibre en situation posturale instable, que ce soit de façon transitoire lors de laperturbation d’une plate-forme (Woollacott et al, 1986) ou de façon continue lors du maintiensur un support déstabilisant (Amblard et Crémieux, 1976 ; mblard et Carblanc, 1980 ;Amblard et al, 1985 ; Mesure et al, 1995 ; Lekhel et al, 1994 ; Perennou et al, 1997). Il en estde même lors du contrôle de l’équilibre en locomotion difficile sur un support étroit(Assaiante et al, 1989; Assaiante, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1992) ou en locomotion surtapis roulant (Prokop et al, 1997). La manipulation des informations visuelles (Berthoz et al,1979 ; Paulus et al, 1984) et plus récemment des caractéristiques du flux visuel (Stoffregen,1985 ; Stoffregen et al, 1987 ; Flückiger et Baumberger, 1988 ; Dijkstra et al, 1994a ; 1994b ;Masson et al, 1995) ont donné lieu à un nombre important de travaux sur le contrôle postural.De nombreuses études (Peterka et Black, 1990 ; Sundermier et al, 1996) ont rapporté unaccroissement de la contribution visuelle au contrôle de l’équilibre au cours du vieillissement.Il en est de même dans le cas d’atteintes pathologiques diverses survenant chez l’adulte, tellesque la maladie de Parkinson (Bronstein et al, 1990 ; 1996 ; Azulay et al, 1999), le syndromecérébelleux (Bronstein et al, 1990) ou encore des lésions du système vestibulaire (Lacour etal, 1997).

IV. Principes fonctionnels de la construction des stratégies d’équilibreLes diverses stratégies d’équilibre adoptées par l’enfant et l’adulte reposent sur deux

principes fonctionnels d’organisation spatiale. Premièrement le choix d’un référentiel stableimpliquant la stabilisation d’un segment corporel, à partir duquel s’organise le contrôle del’équilibre. Deuxièmement, la maîtrise progressive des degrés de liberté des différentesarticulations du corps. L’application de ces deux principes fonctionnels implique égalementune maîtrise de l’organisation temporelle des stratégies d’équilibre. L’organisation temporellepeut être soit ascendante (depuis les pieds jusqu’à la tête) soit descendante (depuis la têtejusqu’aux pieds) en fonction du choix du référentiel stable. Enfin, le contrôle temporel del’action permettant une coordination efficace entre posture et mouvement peut se faire selonun mode anticipé ou rétroactif.

- Deux principes fonctionnels d’organisation spatiale :1. Choix d’un référentiel stable

Toute activité posturo-cinétique peut s’organiser à partir de deux principauxréférentiels stables. Il s'agit soit du support sur lequel se tient le sujet, soit de la verticalegravitaire. Dans le cas du support, classiquement privilégié dans la littérature relative aucontrôle postural, le sujet se réfère principalement à la proprioception et aux informationscutanées en provenance des effecteurs. Dans le cas de la verticale gravitaire le sujet prendappui sur la verticale gravitaire en stabilisant sa tête sur l'espace à partir des informationsprincipalement vestibulaires (Roberts, 1976 ; Berthoz et Pozzo, 1988).

La tête est le segment porteur des capteurs visuels et vestibulaires, qui sont tous deuxparticulièrement impliqués dans le contrôle de l'équilibre postural et locomoteur. Il estprévisible que dans le cas d'une perturbation subie au niveau des effecteurs, l'organisme

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cherchera à minimiser les mouvements de tête induits par les oscillations du tronc et ceci dansle but d'assurer un traitement optimum des réafférences sensorielles en provenance de la têteau profit du contrôle de l'équilibre en cours de mouvement. C'est alors la tête qui en quelquesorte prend le relais des effecteurs et, par le jeu des afférences et réafférences vestibulaireset/ou visuelles, s'appuie sur cet autre référentiel stable que constitue la verticale gravitaire etstabilise son orientation dans l'espace. Cette stabilisation confère à ce segment privilégié lespropriétés d'une plate-forme de guidage inertiel (Berthoz, 1991). En effet, d'après desobservations réalisées chez l'animal (Friedman, 1975 ; Frost, 1978) et des études effectuéeschez l'homme adulte (Ripoll et al, 1986 ; Berthoz et Pozzo, 1988 ; Grossman et al, 1988 ;Assaiante, 1990 ; Pozzo et al, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1993 ), il ressort que la positionde la tête, et plus particulièrement la direction du regard (Grossman et al, 1989), sont assezbien stabilisées au cours de la réalisation de différentes tâches locomotrices, et constituentainsi les références stables autour desquelles s'articule le mouvement.

Dans le cas d’un contact intermittent avec le support ou de la perturbation de cedernier, la stabilisation d’un autre segment, tel que le bassin, peut également être envisagée enraison de sa proximité avec le centre de gravité. En effet, stabiliser le bassin revient àcontrôler le centre de gravité (Massion, 1992). Gurfinkel et collaborateurs (1981) ont pumettre en évidence la stabilisation du bassin dans le cas de sujets se tenant sur une plate-formeoscillant autour de l’axe des chevilles. Ainsi, la stabilisation du bassin sur la based’informations gravitaires est tout à fait envisageable puisque des hypothèses ont déjà étéformulées sur l’existence de gravicepteurs situés au niveau de l’abdomen (Gurfinkel et al,1981 ; Mittelstaedt, 1983). Dietz et collaborateurs (1989, 1994) ont également proposél’existence de gravicepteurs situés au niveau des articulations impliquées dans la posture, dontle rôle serait de mesurer les effets de la gravité sur les différents segments corporels. Cesgravicepteurs pourraient être les organes tendineux de Golgi, propriocepteurs sensibles à latension exercée par une contraction active du muscle (Dietz et al, 1992).

Il est à signaler enfin, que le choix d’un segment anatomique à stabiliser, que ce soit latête ou le bassin, est vraisemblablement dépendant des contraintes dynamiques liées àl’exécution de l’action et que la stabilisation de l’un n’est pas exclusive de la stabilisation del’autre.

2. Maîtrise progressive des degrés de liberté des différentes articulations du corps

Chez l'homme, la station érigée consiste en une succession de modules superposésdepuis les pieds jusqu'à la tête. Chacun de ces modules a une régulation centrale etpériphérique spécifique et sa position est régulée de façon autonome (Gurfinkel et al, 1971 ;Massion, 1992). Ces modules superposés peuvent être contrôlés de façon plus ou moinsindépendante. Prenons par exemple le cas du contrôle de l’ensemble tête-tronc.

La coordination de l'ensemble tête-tronc repose sur le contrôle de l'articulation du cou.Le cou est un système multi-articulé qui permet un contrôle différentiel des rotations de la tête(tangage, lacet, roulis) suivant les trois axes principaux (Waele et al, 1988). Le contrôle del'ensemble tête-tronc peut s'effectuer suivant deux modes principaux: a) La tête peut êtrestabilisée sur le tronc. C'est ce que Nashner (1985) appelle la "strap-down strategy", et dans cecas l'articulation du cou est bloquée. Ce fonctionnement en bloc de l'ensemble tête-troncprésente l'avantage de minimiser le nombre de degrés de liberté à contrôler simultanément aucours du mouvement (Bernstein, 1967). Il permet en outre une mise en œuvre plus directe etplus rapide des influences visuelle et vestibulaire au niveau des effecteurs. b) La tête peut êtrestabilisée sur l'espace. C'est ce que Nashner (1985) appelle la "stable-platform strategy", etdans ce cas l'articulation du cou est libérée. Ce fonctionnement articulé de ces deux segmentssuppose la maîtrise des trois degrés de liberté de l'articulation du cou, et de ce fait la prise encompte de l'orientation de la tête sur le tronc, pour une interprétation correcte des

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informations visuelles et vestibulaires au service du contrôle de l'équilibre (Lund et Broberg,1983 ; Gurfinkel et al, 1988). Cette dichotomie de fonctionnement en bloc versus articulé peuttout à fait être étendue aux autres couples de segments anatomiques consécutifs.

Les données expérimentales, issues de la littérature ainsi que nos propres travaux(Assaiante, 2000), indiquent que le choix du référentiel corporel à stabiliser, de même que lemode de couplage des articulations dépendent vraisemblablement : 1°) des contraintesdynamiques qui définissent la difficulté de la tâche motrice, 2°) de l’environnement danslequel l’action est exécutée et 3°) des caractéristiques propres à chacune des périodes del’ontogénèse. Ainsi, ces résultats nous amènent au concept de référentiels multiples quipourraient agir de façon complémentaire ou de concert, afin de produire au cours dumouvement le contrôle de l’équilibre le plus performant.

- Deux principes fonctionnels d’organisation temporelle :1. Organisation ascendante versus descendante

L’organisation temporelle, autrement dit la séquence d’intervention des différentssegments corporels engagés dans le mouvement, est intimement liée au choix du référentielstable à partir duquel s’organise le contrôle de l’équilibre en cours de mouvement. Ainsi dansle cas où le support constitue le référentiel stable, le sujet organise sa posture de façonascendante depuis les pieds jusqu’à la tête. En revanche, dans une situation plus dynamique,telle que la marche sur un support étroit, où la tête stabilisée sur l’espace peut constituer leréférentiel stable, le sujet organise sa posture de façon descendante depuis la tête jusqu’auxpieds. Dans le cas d’un contact intermittent avec le support où le référentiel stable choisi peutégalement être le bassin, il s’agit de considérer une organisation temporelle de l’équilibredescendante depuis le bassin jusqu’aux pieds et ascendante depuis le bassin jusqu’à la tête.Ainsi, il apparaît que la séquence de mouvements prend son origine sur le segmentpréférentiellement stabilisé.

2. Contrôle anticipé versus rétroactif de la coordination posture / mouvement

Le contrôle multi-articulaire du corps implique aussi la maîtrise des paramètrestemporels, qui va permettre, soit de façon anticipée soit de façon rétroactive, une coordinationefficace entre posture et mouvement. Bien sûr dans le cas d’une perturbation extérieureintervenant à l’insu du sujet, seul le contrôle rétroactif permet de maintenir ou de rétablirl’équilibre, chez l’enfant comme chez l’adulte. En revanche dans le cas d’une perturbationposturale prévisible, que la source soit externe ou interne au sujet, il est alors possibled’assurer la fonction d’équilibre grâce à un contrôle anticipé. Chez l’enfant, comme chezl’adulte, les deux modes de contrôle sont présents et utilisés pour assurer la coordination entreposture et mouvement.

Il est classiquement admis que le contrôle anticipé apparaît et devient mature plustardivement que le contrôle rétroactif (Bernstein, 1967 ; Kelso, 1982 ; Haas et al, 1989). Eneffet, l’acquisition du contrôle anticipé repose sur la transformation de corrections posturalesrétroactives, en corrections posturales anticipées sur la base du développement desreprésentations internes des perturbations à venir. Tout au long des étapes de sondéveloppement moteur l’enfant doit anticiper sur la base d’une mémoire sensori-motrice quiévolue avec l’âge. Pour anticiper, le cerveau s’appuie sur des représentations internes descaractéristiques du corps, du monde extérieur et de leurs interactions réciproques (Massion,1997). Ces représentations internes sont lentement élaborées au cours de l’ontogénèse(Mounoud, 1983) et sont matures relativement tard au cours de l’enfance (vers 10-12 ans),s’agissant du contrôle de l’organisation spatio-temporelle de l’anticipation (Gachoud et al,1983 ; Riach and Hayes, 1990 ; Eliason et al, 1995 ; Schmitz, 2001 ; Schmitz et al, soumis).

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Ces deux modes de contrôle anticipé et rétroactif se développent progressivement aucours de l’enfance. De nombreuses études posturales en réponse à une perturbation du supportont pu montrer des réponses rétroactives appropriées chez de jeunes enfants dès 15 mois(Forssberg et Nashner, 1982 ; Schumway-Cook et Woollacott, 1985). En revanche lesréponses similaires à celles de l’adulte ne sont pas obtenues avant 7 ans (Schumway-Cook etWoollacott, 1985). Avant l’âge de 2 ans, une des causes principales de l’instabilité du jeuneenfant est imputée à un manque d’efficacité des processus d’anticipation au niveau ducontrôle postural (Haas et al, 1989). A partir de 2 ans, en revanche, Haas et Diener (1988)rapportent que les jeunes enfants sont capables d’anticiper une perturbation et d’ajuster leurréponse posturale en utilisant un contrôle proactif. La réalisation d’une habileté motricecomplexe telle que le saut principalement basée sur la fonction prédictive est égalementacquise à partir de 2 ans (McKinley et Pelland, 1994). Néanmoins la maîtrise de la fonctiond’anticipation s’accroît progressivement au cours de l’enfance pour atteindre le niveau del’adulte (McKinley et Pedotti, 1992). En fait, les jeunes enfants présentent très tôt aprèsl’acquisition de nouvelles habiletés motrices, les ajustements posturaux anticipés qui y sontassociés, même si la forme la plus souvent présentée n’est pas encore celle de l’adulte. Cesfaits sont rapportés aussi bien dans des tâches posturales impliquant l’ensemble du corps(Haas et al, 1989 ; Hay et Redon, 1999 ; Assaiante et al, 2000) que dans des tâchesbimanuelles impliquant la seule stabilisation de l’avant bras chargé du poids à délester(Schmitz et al, 1999). Ainsi il apparaît que le développement du contrôle rétroactif n’est pasachevé quand le mode de contrôle anticipé commence à émerger chez l’enfant. Comme lesoulignent Hay et Redon (1999), la vraie question qui se pose est de connaître la contributionrespective de ces deux types de contrôle au cours du développement. Il est suggéré pardifférents auteurs (Hay, 1979 ; Bard et al, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1995 ; Hay et Redon,1999 ; Assaiante, 1998) que les contrôles anticipé et rétroactif évolueraient de façon nonlinéaire et en alternance au cours de l’enfance entraînant de ce fait des changements qualitatifsdans la coordination entre posture et mouvement.

V. Quatre périodes déterminantes au cours de l’ontogénèse- De la naissance à la station debout : Stabilisation de la tête : un référentielprivilégié pour le bébéCette période correspond environ à la première année de vie de l'enfant, depuis la

naissance jusqu'à l'acquisition de la station debout. Il apparaît dans la littérature un véritableconsensus pour concevoir la maturation posturale, réalisée au cours de la première année del'enfant, comme une verticalisation progressive et céphalo-caudale des différents segments ducorps jusqu'à l'obtention finale de la station debout. Le développement postural s'effectueainsi suivant une progression intéressant successivement les muscles du cou, puis ceux desbras, ceux du tronc et enfin ceux des jambes. De la même façon, la mise en place des réponsesmusculaires en réaction à un déséquilibre imposé obéit à un gradient céphalo-caudal, bien quela perturbation soit produite au niveau du support sur lequel repose l’enfant (Woollacott etSchumway-Cook, 1990). D’un petit être asymétrique et en flexion à la naissance, le bébédevient progressivement, au cours de la première année, un petit être symétrique et enextension.

Le contrôle de la tête constitue pour le bébé le point de départ de toute organisationposturale future. Très tôt, il présente des réactions de redressement de la tête en réponse à unestimulation vestibulaire (Jouen, 1982). Ce comportement compensateur vise à restaurerl'orientation de la tête du petit sujet sur la verticale gravitaire. Cette acquisition estfondamentale, car le segment céphalique est un maillon essentiel dans la chaîne posturale. Ilpermet l'orientation dans l'espace (Paillard, 1971 ; 1974) et constitue, par sa stabilisation, labase indispensable d’une future organisation descendante de la régulation posturale en cours

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de mouvement chez l'adulte (Roberts, 1976 ; Berthoz et Pozzo, 1988 ; Assaiante et Amblard,1993).

La station assise autonome correspond à la première situation naturelle où le petitenfant maintient la tête et le tronc à la verticale. Le contrôle de l'équilibre devient alors bi-segmentaire et permet déjà une analyse des coordinations tête-tronc. Cette posture présente,de plus, l'avantage pour le jeune enfant d'être particulièrement stable et de libérer ses mains.Cette libération des mains est rapidement mise à profit par notre jeune sujet pour élargir sesactivités exploratoires, en mobilisant la tête et ainsi passer maître dans l’art de la manipulationdes objets alentours. Un des objectifs majeurs à cet âge est en effet la motricité exploratoiredu segment céphalique et l'enfant apprend à mouvoir la tête sur un tronc solidement ancré surle sol. Il est possible de considérer que le jeune enfant présente alors dans ce cas unfonctionnement articulé de l'ensemble tête-tronc.

La stabilisation de la tête en position assise constitue un pré-requis à l’apparition de lasaisie bimanuelle (Thelen et Spencer, 1998). En effet, la stabilisation de la tête et du regardsur la cible à atteindre établit un référentiel stable qui améliore la saisie du bébé (Bertenthal etVon Hofsten, 1998). De plus, de récentes études effectuées en position assise (Hadders-Algraet al, 1996) révèlent l’importance de la stabilisation de la tête pour le contrôle postural dujeune enfant. En effet, en réponse à des translations inattendues du support vers l’avant, lesjeunes sujets âgés de 5 à 6 mois activent prioritairement les muscles du cou avant ceux dutronc et des jambes, suggérant un recrutement musculaire descendant. En revanche, les jeunesenfants ayant déjà acquis la station érigée présentent dans la même situation expérimentale,un recrutement ascendant (Brogren et al, 1996). Ce recrutement ascendant a également étérapporté chez les adultes testés en station debout (Horak et Nashner, 1986) ou assise(Forssberg et Hirschfeld, 1994) en réaction à une perturbation du support. Cette organisationascendante observée dans le cas d’une perturbation au niveau du support traduitvraisemblablement le fait qu’une fois maîtrisées, les réactions posturales d’origineproprioceptive sont plus rapides et efficaces que celles émanant du segment céphalique.

Dès l'apparition de la station bipède et a fortiori de la marche autonome, le petit enfanttombe principalement sous les contraintes de l'équilibre antigravitaire désormais appliquées àl'ensemble du corps. C'est en effet le moment où le contrôle de l'équilibre, après avoir étésegmentaire, devient global. L’accession à la bipédie est considérée comme une acquisitioncapitale, propice à la mise en place d'un nouveau mode d'organisation de l'équilibre entraînantle passage à la deuxième période. De plus, l’acquisition de cette nouvelle habileté posturaleouvre de nouveaux horizons au jeune enfant qui passe d’un espace de préhension à un espaceconsidérablement plus vaste : l’espace locomoteur.

- L'apparition de la bipédie : Stabilisation du bassin : un référentiel de base pourorganiser le contrôle de l’équilibreLa deuxième période débute avec l'apparition de la station bipède. De nouveaux

problèmes d'équilibre se posent alors au jeune enfant. L'élévation du centre de gravité et laréduction de la surface d'appui au sol, au regard des postures précédemment adoptées (assiseou couchée), augmentent l'instabilité du corps. La maîtrise des membres inférieurs ainsi que lacoordination entre les parties inférieures et supérieures du corps deviennent un facteurdéterminant du maintien de l'équilibre. Différentes expériences de maintien de l’équilibrepostural en réaction à des perturbations du support révèlent l’apparition de réponsesorganisées dans les muscles des jambes dès que la station debout est acquise (12 à 14 mois).A partir de 2 ans, l’activation séquentielle des muscles des jambes ressemble aux synergiesposturales ascendantes de l’adulte avec cependant des latences plus longues et plus variables(Woollacott et al, 1987). Il est intéressant de noter, dans ces conditions, une maturation

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caudo-céphalique, c’est-à-dire ascendante de l’organisation des réponses musculaires enréaction à la perturbation du support sur lequel se tient l’enfant.

Berger et collaborateurs (1995) ont réalisé chez l’enfant une étude des stratégiessensori-motrices adoptées en situation de perturbation du support au moyen de translationsantéro-postérieures. Il ressort de cette étude, aussi bien à 2 ans qu’à 6 ans, un très faibleamortissement de l’amplitude des oscillations induites depuis les pieds jusqu’à la tête et ceciquelle que soit la fréquence des oscillations induites (0.25; 0.33; 0.50 Hz). Ce résultat peuts’expliquer par un raidissement de l’ensemble du corps suggérant, pour le contrôle de laposture, un fonctionnement en bloc de toutes les articulations. Chez l’adulte, en revanche, ilexiste un fort amortissement des oscillations au niveau de la tête, qui peut être interprétécomme étant la conséquence d’un contrôle postural articulé. Enfin, en l’absence de vision,l’adulte ne se différencie plus de l’enfant, avec un amortissement des oscillationsparticulièrement affaibli au niveau de la tête, suggérant comme l’enfant un comportement enbloc de tout son corps. Ce dernier résultat semble écarter toute interprétation purementbiomécanique des différences entre enfant et adulte.

La locomotion bipède constitue pour les marcheurs débutants une activité d'équilibredifficile, même dans les conditions simples de marche sur un support plat et dégagé. En effet,la marche bipède nécessite le maintien intermittent de l'ensemble du poids du corps sur uneseule jambe au moment de la phase d'oscillation (Thelen, 1984 ; Brenière et al, 1989 ;Assaiante et Amblard, 1995). L'importance capitale des problèmes posturaux au début del'apprentissage de la marche a également été soulignée par des approches biomécaniques(Thelen, 1986 ; Bril et Brenière, 1988 ; Brenière et al, 1989). Ces derniers auteurs ont ainsiinsisté sur l'importance de l'écartement des pieds, destiné à élargir la base de sustentation afind'obtenir une plus grande stabilité. Ils ont montré que l'évolution avec l'âge de la maîtrise de lamarche se traduit par la diminution progressive de cet écartement des pieds jusqu'à sa valeurminimale atteinte vers l'âge de 3 ans. Cet âge correspond précisément à l'apparition de lacapacité de l'enfant à marcher sur des supports étroits (Assaiante, 1990 ; Assaiante et al,1988). Récemment, Mesure et collaborateurs (2000) ont mis en évidence chez le sujetparkinsonien, une détérioration de l’équilibre locomoteur qui se traduit notamment par unaccroissement de l’écartement des pieds au cours de la marche, comme c’est le cas chez lejeune enfant. Ce résultat a été interprété par ces auteurs comme une régression de ces patientsvers des stratégies locomotrices du jeune enfant.

Dans une étude antérieure (Assaiante et al, 1993 ; 1998) réalisée avec de jeunesmarcheurs débutants, nous avons cherché quels pouvaient être les segments corporelsstabilisés à partir desquels le jeune enfant construit son équilibre en dépit des perturbationscréées par la locomotion.

Nos résultats révèlent que la stabilisation du bassin sur l'espace est présente dès lapremière semaine de marche autonome. Les épaules ne sont stabilisées sur l'espace qu'à partirdu deuxième mois d'expérience de marche. Enfin, la tête n'est toujours pas stabilisée surl'espace au bout de 12 mois de marche autonome. Il ressort de ces résultats une évolutionascendante de la maîtrise des degrés de liberté des différentes articulations au cours del'ontogénèse. Ainsi la stabilisation précoce du bassin semble constituer un prérequis àl’apparition de la marche et à la stabilisation ultérieure des segments supérieurs au service ducontrôle de l’équilibre. Par ailleurs, le calcul des fonctions d’intercorrélation entre lesrotations latérales des segments, bassin, épaules et tête nous révèle une organisationascendante du contrôle de l'équilibre, à partir du bassin stabilisé.

De plus, les taux de corrélation élevés entre les rotations de la tête et des épaulessuggèrent un fonctionnement en bloc de l’ensemble de ces deux segments. Enfin, lesenregistrements électromyographiques confirment chez le jeune enfant ayant 6 moisd’expérience de marche que la stabilisation du bassin est assurée avant le lever du pied. En

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effet, il apparaît, du côté controlatéral au pied soulevé, une activité du muscle stabilisateur dela hanche, le moyen fessier, qui démarre avant le décollement du talon et qui précède ainsil'activité du tibialis antérieur ipsilatéral, suggérant une organisation temporelle descendantedepuis le bassin jusqu’aux pieds. Cette anticipation peut occasionnellement se retrouver chezun enfant moins expérimenté ayant seulement 1 mois d’expérience de marche. Dans ce cascependant, la fréquence d’apparition de cette anticipation est beaucoup plus rare. Ainsi,l’ensemble de ces résultats obtenus chez le jeune marcheur conduit à envisager l’existenced’une organisation temporelle du contrôle de l’équilibre qui prend son origine au niveau dubassin, puisqu’elle est ascendante à partir du bassin stabilisé jusqu’à la tête et descendantedepuis le bassin jusqu’aux pieds.

Si à l'évidence, le début de cette seconde période correspond à l'apparition de labipédie, la limite supérieure est en revanche plus délicate à établir. Néanmoins, au regard denombreuses études ontogénétiques, il ressort que l'âge de 6 ans apparaît comme un âgecharnière dans l'étude du contrôle de l'équilibre des activités posturo-cinétiques. En effet,Woollacott et collaborateurs (1987) nous rapportent que vers l’âge de 6 ans les synergiesposturales redeviennent plus variables et que leurs latences s’allongent temporairement, avantde reprendre leur évolution vers celles de l’adulte. Il faut attendre l'âge de 7 ans pourobserver, en cas de déséquilibre, des synergies posturales comparables à celles de l'adulte.C'est également à cet âge, concernant la locomotion, que l'intensité de l'activation desmuscles, notamment pour le gastrocnémien, atteint le niveau observé chez l'adulte (Berger etal, 1985). Il apparaît aussi que seul le groupe des enfants de 6-10 ans présente la réponseélectromyographique compensatoire typique de l’adulte, à savoir la suppression du réflexed’étirement après une perturbation occasionnée lors de la marche (Berger et al, 1987 ; 1988).Par ailleurs, différentes études cinématiques nous révèlent que les caractéristiques de lamarche adulte, que ce soit au niveau des accélérations et décélérations (Bernstein, 1967)comme au niveau de la fréquence et de la longueur du pas (Ferrandez et Paihlous, 1986)n'apparaissent qu'aux alentours de 5-6 ans.

Une première étude cinématique des coordinations tête-tronc réalisée au cours de lamarche chez l’enfant de 3 à 8 ans ainsi que chez l’adulte (Assaiante, 1990 ; Assaiante etAmblard, 1992 ; 1993), nous a permis de déterminer au moins trois phases déterminantes dansle développement du contrôle de la tête lors d'une épreuve de marche difficile sur un supportétroit.

La première phase regroupe les enfants de 3 à 6 ans qui adoptent peu souvent lastratégie de stabilisation de la tête sur l'espace. Lorsqu'ils l'utilisent c'est uniquement lors de lamarche sur le sol qui, à leur âge, ne présente plus de difficulté d'équilibre. Lorsque ladifficulté d'équilibre s'accroît, ces jeunes enfants ont souvent tendance à raidir l'ensemble tête-tronc pour mieux contrôler leur équilibre, d'où le pourcentage important de corrélations tête-tronc positives et plus particulièrement à l'âge de 6 ans. La deuxième phase regroupe, danscette étude, les enfants de 7 et 8 ans chez qui la stratégie de stabilisation préférentielle de latête sur l'espace devient nettement plus fréquente, même lorsque l'épreuve locomotriceprésente des difficultés d'équilibre. Cette amélioration de la stabilisation de la tête surl'espace, non encore différenciée du point de vue des composantes angulaires, est associée àun effondrement des corrélations tête-tronc. La troisième phase, enfin, est caractéristique desadultes et nous montre que la stabilisation préférentielle de la tête sur l'espace devient presquesystématique et s'applique sélectivement à la composante du roulis, qui est la rotation la plusimpliquée dans le contrôle de l'équilibre latéral. Parallèlement il n'y a plus de corrélationstête-tronc significatives, du moins pour le roulis. Ainsi le développement de la stabilisation dela tête sur l'espace en cours de locomotion se fait par étapes successives avec unediscontinuité marquée entre 6 et 7 ans. En effet, l'amélioration de la stabilisation de la tête surl'espace observée à 7 ans est précédée par une apparente régression à 6 ans où les enfants

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présentent une forte tendance à stabiliser la tête sur le tronc. C'est pourquoi nous avons choiside situer à 6 ans la limite supérieure de cette deuxième période.

- 7 ans : utilisation préférentielle de la stabilisation de la tête sur l'espace ensituation d'équilibre difficileCette période débute aux alentours de l'âge de 7 ans. Elle est caractérisée par la

maîtrise de la stratégie de stabilisation de la tête sur l'espace étendue aux activitéslocomotrices présentant des difficultés d'équilibre. Cette stabilisation, au début encoremalhabile, est appliquée sans distinction aux trois composantes de rotation du segmentcéphalique (Assaiante, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1993). Dès l'âge de 7 ans, l'enfant estcapable de libérer l'articulation du cou, passant ainsi du fonctionnement en bloc à unfonctionnement articulé de l'ensemble tête-tronc au cours d'une épreuve difficile d'équilibrelocomoteur. Les auteurs de cette étude postulent, de plus, que cette stabilisation de la tête surl’espace sert de base à une organisation descendante du contrôle de l’équilibre. Ces résultatsmettent bien en valeur les changements notables qui caractérisent l’âge de 7 ans comme unepériode charnière dans l’évolution des stratégies d’équilibre.

Le caractère tardif de la maturation des muscles du cou engagés dans des réponsesposturales est attesté par des études de Debû et collaborateurs (Debû et al, 1988 ; Debû etWoollacott, 1988). Ces auteurs rapportent que les réponses enregistrées au niveau des musclesdes jambes en réaction à une perturbation du support atteignent les caractéristiquestemporelles de l’adulte plus tôt (10 ans) que celles des muscles du cou. En effet, entre 11 et 16ans apparaissent encore des améliorations notables au niveau des muscles du cou tant auniveau de la fréquence d’occurrence des réponses que de la réduction notable des latences.

- Caractéristiques de l’adulte : Contrôle sélectif des degrés de liberté del'articulation du cou et organisation descendante du contrôle de l'équilibreEn situation d'équilibre difficile, comme au cours de la marche sur support étroit,

l'adulte adopte une stratégie de stabilisation de la tête sur l'espace associée à un contrôlesélectif des degrés de liberté de l'articulation du cou. La composante angulaire sélectivementcontrôlée dépend probablement de la tâche réalisée par le sujet. Dans le cas où l'équilibrelatéral est perturbé, c'est la composante de rotation du roulis qui est sélectivement contrôlée(Assaiante, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1993). Cette stabilisation sélective de la tête enroulis, observée uniquement chez l’adulte, peut s’expliquer par un gain limité du réflexevestibulo-oculaire, susceptible de compenser les oscillations de la tête au cours de la marche(Gresty et Bronstein, 1992). Cette stabilisation sélective de la tête en roulis a également étérapportée chez l’adulte lors d’épreuves locomotrices en avant et en arrière sur sol normal ainsique sur un support caoutchouc mousse épais (Nadeau et al, soumis).

La stratégie de stabilisation de la tête sur l'espace a déjà été décrite chez l'adulte dansdiverses épreuves posturo-cinétiques (Ripoll et al, 1986 ; Grossman et al, 1988 ; Assaiante,1990 ; Pozzo et al, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1993). L’hypothèse est faite par cesdifférents auteurs (Berthoz et Pozzo, 1988 ; Pozzo et al, 1990 ; Assaiante et Amblard, 1993;1995) que la stabilisation de la tête sur l'espace sert de base à une organisation temporelledescendante du contrôle continu de l'équilibre. Grâce à la méthode des intercorrélationsconjuguées, il a été possible de définir pour la première fois des stratégies d'équilibre latéraladoptées par l'adulte au cours de tâches posturales non perturbées (Amblard et al, 1992 ;1994). Parmi ces stratégies posturales qui constituent le répertoire de l'adulte, il existe unestratégie purement descendante initiée au niveau de la tête. Cette stratégie a été observée dansdes conditions posturales difficiles telles que un pied posé devant l'autre sur un support decaoutchouc mousse épais (Lekhel et al, 1994). Elle disparaît lorsque les conditions deviennent

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plus clémentes telles que par exemple avec un support solide, confirmant tout à fait lapertinence de l'organisation temporelle descendante du contrôle de l'équilibre en situationdifficile. Ainsi ces résultats constituent, chez l'adulte, une des premières preuvesexpérimentales d'une organisation temporelle descendante de l'équilibre. Par ailleurs, au coursde la marche sur support étroit, le calcul des latences a révélé que la tête et le tronc étaientpratiquement synchrones, chez l'adulte, en roulis. Ce résultat plaide également en faveur d'uncontrôle postural anticipé au niveau de la tête, et donc organisé de façon descendante, enréponse aux perturbations engendrées par la locomotion (Assaiante, 1990).

Plus récemment, un certain nombre d’études réalisées chez l’adulte sain est venuconfirmer cette organisation descendante du contrôle de l’équilibre lors de situationsparticulièrement instables. Il en est ainsi lors de la marche sur un support de caoutchoucmousse épais (Thomachot et al, 1995 ; Amblard, 1998 ; Nadeau et al, soumis) ou encore lorsde la station assise sur une balancelle (Pérennou et al, 1997 ; Pérennou, 1998).

VI. Modèle ontogénétique de l’organisation sensori-motrice du contrôlede l’équilibreSur la base des principes fonctionnels spatiaux et temporels et des différents résultats

expérimentaux énoncés ci-dessus, nous avons proposé avec Bernard Amblard (Assaiante etAmblard, 1995) un modèle ontogénétique simple et heuristique de la construction desstratégies d'équilibre depuis la naissance jusqu'à l'âge adulte. Ce modèle propose, au cours de4 périodes successives de l'ontogénèse, l'existence d'un va-et-vient entre deux modesd'organisation temporelle du contrôle de l'équilibre : ascendant ou descendant, auxquels sontassociés deux modes de fonctionnement des ensembles de segments corporels : en bloc ouarticulé. Ce modèle concerne, tout d’abord, les stratégies d'équilibre continu élaborées parl'enfant lors de diverses activités posturo-cinétiques naturelles non perturbées, telles que laposture ou la locomotion. De plus, ce modèle s'applique à des situations d'équilibre difficilemais cependant toujours adaptées aux capacités des jeunes sujets. L'avantage d'une telleapproche réside dans le fait que l'enfant est placé dans une situation limite où il doitobligatoirement adopter, et ainsi nous révéler, la stratégie la plus efficace alors à sadisposition. Ainsi se trouvent évités les problèmes de choix et de préférences individuelles,qui sont inhérents aux situations plus clémentes autorisant une certaine vicariance (Ohlmann,1988).

- Alternance entre deux modes d'organisation temporelle et deux modes decouplage articulaire au cours du développementLa première période correspond environ à la première année de vie depuis la

naissance jusqu'à l'acquisition de la station debout. Elle est caractérisée par une verticalisationprogressive et céphalo-caudale des différents segments du corps. La tête est alors le point dedépart de toute organisation posturale. Ces données suggèrent une organisation temporelledescendante du contrôle de l'équilibre à laquelle serait associé un fonctionnement articulé del'ensemble tête-tronc. La deuxième période est située entre le début de la station bipède etl'âge de 6 ans, qui semble constituer un âge charnière, aussi bien pour le contrôle del'équilibre postural que locomoteur. Nous avons vu que l'équilibre locomoteur s'organise defaçon ascendante à partir du bassin stabilisé et qu'il est assorti d'un fonctionnement en bloc del'ensemble tête-tronc. Dans le cas du contrôle postural, nous faisons l'hypothèse quel'organisation temporelle de l'équilibre est également ascendante, mais à partir des piedssachant, comme nous avons vu, que toutes les articulations sont bloquées afin de minimiser lenombre de degrés de liberté à contrôler simultanément. Les troisième et quatrième périodes sesituent entre 7 ans et l'âge adulte. Elles sont toutes deux caractérisées par un retour à un

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fonctionnement articulé de l'ensemble tête-tronc qui autorise une stabilisation de la tête surl'espace. Cette stabilisation de la tête sur l'espace, qui au cours de la troisième période, porteindistinctement sur les 3 degrés de liberté de l’articulation du cou, sert de base à uneorganisation temporelle descendante du contrôle de l'équilibre. Il est à noter cependant que lalimite supérieure de la troisième période demande encore à être définie. Pour cela une étudedétaillée sur la période de l’adolescence devrait nous fournir de précieuses informations. Eneffet, compte tenu des modifications de croissance importantes qui caractérisent cette périodeet qui s’accompagnent de bouleversements au niveau du schéma corporel, se pose toutnaturellement la question d’une évolution ou d’une régression transitoire au niveau ducontrôle de la coordination entre posture et mouvement. Enfin la quatrième période,caractéristique de l'adulte, se distingue de la précédente en ce qu'elle introduit dans lefonctionnement articulé de l'ensemble tête-tronc la notion d'un contrôle sélectif des degrés deliberté du cou, approprié à la tâche réalisée.

- Intérêts d’un modèle ontogénétiqueCe modèle ontogénétique, outre l'avantage de mieux comprendre la construction des

stratégies d'équilibre au cours de l'ontogénèse, peut également apporter une aide dansl'analyse des dysfonctions de l'équilibre, qu'elles surviennent chez l'enfant ou chez l'adulte. Eneffet, il est prévisible, par exemple, que toute atteinte précoce des outils sensori-moteurs quiprésident à la stabilisation de la tête dans l'espace, base de l'organisation descendante descontrôles posturo-cinétiques, retardera considérablement, voire empêchera, la mise en placede cette stratégie élaborée. De plus, il est prévisible qu'une atteinte plus tardive de ces mêmesoutils se traduira par un retour automatique à une stratégie antérieure simplificatrice, c'est-à-dire au fonctionnement en bloc de l'ensemble tête-tronc, assorti d'une organisation ascendante.Au titre des atteintes responsables de cette limitation ou régression, il est possible d’envisagerles atteintes vestibulaires (Bronstein, 1988 ; Pozzo et al, 1991), la cécité, les torticolischroniques (Gresty, 1989), les déformations transitoires de la colonne vertébrale, et d'autresatteintes de la motricité générale telles que la maladie de Parkinson ou même le vieillissement(Dietz, 1992 ; Dietz et al, 1993 ; Mesure et al, 1999).

Par ailleurs, ce modèle ontogénétique présente l’avantage d’offrir un cadre cohérent derésultats scientifiques et de réflexions théoriques qui permet de mieux comprendrel’apprentissage et la maîtrise des capacités d’équilibre au cours de l’ontogénèse, en insistanttout particulièrement sur l’évolution des modes de contrôle et l’existence de périodes« critiques » au cours du développement moteur. Il est important, pour un futur enseignant enpratiques sportives, de garder en mémoire que le développement moteur est le fruit d’uneinteraction entre le développement musculo-squelettique et l’évolution des modes de contrôle.Ainsi ce qui est essentiel de connaître ce n’est pas uniquement l’évolution des performancesau cours de l’enfance mais tout particulièrement les différentes stratégies ou modes decontrôle qui sous-tendent les performances étudiées. De plus, la connaissance de périodescharnières, propices à l’installation de nouveaux modes de contrôle, repérées dans ce modèleontogénétique, devrait pouvoir se révéler particulièrement précieuse pour optimiserl’apprentissage des habiletés motrices.

Il est important de rappeler que la croissance ne suit pas une évolution linéaire avecl’âge, elle procède plutôt par bonds successifs sur un rythme à 4 temps (Keogh et Sugden,1985). Par exemple, depuis la naissance jusqu’aux environs de 3 ans, les modifications detaille et de poids sont très rapides et très importantes. Ensuite, jusqu’à la puberté, on assiste àdes changements morphologiques qui sont effectifs certes, mais beaucoup plus lents. Enrevanche, les modifications corporelles s’accélèrent à nouveau au moment de la puberté où onassiste, sur une période courte, à des changements structurels et fonctionnels très importants.Enfin, les modifications deviennent mineures quand l’individu a atteint un stade mature. Il est

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intéressant de souligner qu’une des périodes charnières du développement du contrôle moteur,repérée entre 6 et 7 ans se situe précisément dans une phase de croissance particulièrementrégulière et donc apparemment peu propice à être la cause de tels changements. Ainsi, il estcapital, pour un enseignant de pratiques sportives, de prendre en compte, outre les pousséesde croissance, les changements qualitatifs qui interviennent dans les modes de traitement auservice du contrôle de l’équilibre. Inversement les modifications profondes et brutales del’adolescence posent des questions pertinentes quant aux conséquences au niveau desperformances motrices. Des études de Malina (1990) réalisées au cours de l’adolescence aumoment précis du pic de croissance ne rapportent pas de détérioration systématique d’habiletémotrice dans l’exécution des tâches physiques. Néanmoins, la question se pose de connaîtreles modes de contrôle employés au cours de cette période de mutation afin de préserver lesperformances motrices.

- L’entraînement peut-il accélérer l’évolution des fonctions motrices ?Un certain nombre d’études ontogénétiques ont eu pour sujet d’étude les interactions

entre développement et entraînement (Hadders-Algra et al, 1996b ; Woollacott et al, 1998 ;Schmitz et Assaiante, en préparation). Certaines données expérimentales tendent à montrerque la sélection d’un patron moteur peut-être accélérée par l’entraînement chez le jeune enfantlors d’un rétablissement d’équilibre en situation assise (Hadders-Algra et al, 1996b). Dans lecas du rétablissement d’équilibre en situation debout, des travaux ont pu montrer égalementune amélioration des réponses musculaires avec l’entraînement chez l’enfant (Woollacott etal, 1998 ). Il est intéressant, néanmoins de remarquer que l’organisation temporelle desréponses musculaires n’était en rien modifié par les effets de l’entraînement lors de cettedernière étude.

Dans notre équipe, nous nous sommes aussi posé la question de savoir sil’entraînement d’une coordination bimanuelle était susceptible de modifier l’organisationtemporelle des ajustements posturaux anticipés. Les premiers résultats lors de l’analyse despatrons musculaires semblent indiquer que l’entraînement n’affecte pas la prédominancecaractéristique des groupes d’âge des stratégies musculaires sous-jacentes à la stabilisation del’avant-bras postural, à savoir co-contraction des fléchisseur/extenseur pour les plus jeunes etinhibition tardive du fléchisseur postural pour les enfants de 7-8 ans. Ainsi le contrôle duréglage temporel ne dépendrait pas de l’entraînement mais de l’âge de nos sujets et pourraitainsi être un indicateur de choix pour apprécier la maturation du système nerveux central(Schmitz, 2001 ; Schmitz et Assaiante, en préparation).

Bien sûr le champ des interactions développement et entraînement reste encorelargement inexploré et l’apprentissage des activités sportives constitue un modèle de choixpour étudier cette thématique. Les travaux expérimentaux réalisés dans les conditionsappauvries de laboratoire où l’entraînement est nécessairement limité, s’ils apportent quelqueséléments de réponse contribuent davantage à élargir le champ des questions. En effet, dans lecas, par exemple, de la pratique intensive d’un sport favorisant les capacités d’équilibre, laquestion reste ouverte de savoir si les bonnes performances de l’enfant entraîné sont sous-tendues par une stratégie d’équilibre caractéristique de leur âge mais optimisée, ou bien sil’enfant entraîné met en place plus tôt que les autres une stratégie plus élaborée. Enfin, dansl’hypothèse d’une accélération du développement postural, cette avance est-elle transférable àd’autres épreuves d’équilibre ou limitée essentiellement à l’épreuve entraînée ?

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- Référentiels posturaux multiples : apprendre à sélectionner au cours del’ontogénèseL’ensemble des résultats rapportés dans cette partie sont en faveur de l’existence de

référentiels stables multiples, qui agiraient en alternance ou de concert, en association avec unfonctionnement en bloc ou articulé des segments corporels, pour permettre l’organisationtemporelle la plus efficace du contrôle de l'équilibre en cours de mouvement. Si la premièreétape pour l’enfant consiste à construire les éléments de son répertoire de stratégiesd’équilibre, la deuxième étape consiste à apprendre à sélectionner les éléments pertinents dece répertoire, en fonction de l’activité à exécuter et du contexte environnemental. C’estprécisément ce choix d’un référentiel parmi un répertoire de référentiels multiples (corporelset sensoriels) disponibles, associé au choix de mode de couplage des différentes articulations,associé enfin à une coordination efficace entre posture et mouvement, que l’enfant doitapprendre à gérer au cours de son développement (Assaiante, 1998 ; 2000).

Sélectionner dans le répertoire la stratégie posturale adéquate, revient à anticiper lesconséquences du mouvement prévu afin de préserver l’équilibre postural et l’efficacité dugeste. Pour anticiper, le cerveau s’appuie sur des représentations internes des caractéristiquesdu corps, du monde extérieur et de leurs interactions réciproques. La construction chezl’enfant des représentations internes qui comprend le développement du schéma corporel, dela mémoire sensori-motrice et du répertoire des stratégies posturales, constitue une lignedirectrice pour nos travaux actuels et nos études futures. Chez l’enfant, les représentationsinternes se construisent peu à peu à partir de son action, de ses apprentissages de nouvelleshabiletés et de ses adaptations successives à de nouvelles contraintes internes qui seproduisent tout au long de l’ontogénèse. Elles servent de base au développement de lafonction d’anticipation qui améliore progressivement au cours de l’enfance la coordinationentre posture et mouvement ainsi que l’optimisation du geste (Assaiante, 2000).

VII. Construction des représentations internes au cours de l’ontogénèse- La motricité pour découvrir le monde et découvrir son corpsLe jeune enfant est avant tout un être moteur et toutes les expressions motrices qu’il

manifeste vont lui permettre de découvrir le monde. Cette découverte progressive du mondeselon les étapes du développement moteur est illustrée par la succession des trois espacesdéfinis par Stern et Stern (1907). L’espace buccal est le plus précoce. C’est à sa bouche que lenourrisson porte tout objet, non pour le manger, mais grâce au réflexe vital de succion pourréaliser une concordance entre ses sensations et ses mouvements et ainsi extraire desinformations précieuses sur l’objet. L’espace proche est le deuxième à se mettre en place, ilest caractérisé par les progrès de saisie et de manipulation du bébé ainsi que par l’acquisitiondes stations autonomes assises et debout. Enfin, l’espace locomoteur, conquis parl’acquisition de la marche autonome, agrandit considérablement les interactions du bébé avecle milieu et sa découverte du monde environnant. De plus, grâce à sa nouvelle autonomie dedéplacement, le jeune enfant a la possibilité d’assurer la continuité de ces trois espaces. Nousvoyons ainsi que la conquête du monde environnant est intimement liée à aux grandesacquisitions motrices qui rendent l’enfant plus autonome.

La motricité a aussi un autre rôle fondamental qui est d’apprendre à l’enfant àconnaître son corps. En effet au cours des premiers mois de la vie, l’enfant ne différencie pascomplètement sa propre personne de son entourage. Il doit apprendre ce qui est son corps etce qui ne l’est pas. Les interactions qu’il exerce avec son entourage animé ou inanimé l’aidentpeu à peu à définir ses limites corporelles (Deldime et Vermeulen, 1997). L’image du corps seforme peu à peu relevant d’après Paillard (1982) du « corps identifié ». À cet égardl’expérience du jeune enfant avec le miroir constitue une situation « expérimentale »

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privilégiée. Dès 6 mois, l’enfant manifeste de l’intérêt pour son image dans un miroir.Néanmoins, la reconnaissance de soi dans le miroir passe par une progression en trois temps(Lacan, 1949). Dans un premier temps, l’image est pour l’enfant une réalité dont il cherche às’emparer, dans un second temps l’image n’est plus un objet réel. Enfin vers 16-18 mois,l’image devient image propre par identification du corps à son image. En intégrant son imageà son propre corps, l’enfant conquiert ainsi son identité et également son unité corporelle quisuccède à un état antérieur de corps morcelé (Lacan, 1949).

Le schéma corporel, quant à lui, relève davantage du « corps situé » (Paillard, 1982).Cette distinction fonctionnelle proposée par Paillard a le mérite d’introduire un peu de clartédans des notions assez proches. D’après Paillard, (1982, 1997 ; 1999a) le schéma corporel seconstruit principalement sur des bases proprioceptives, alors que l’image corporelle se nourritdavantage d’informations extéroceptives, notamment visuelles. Vers l’âge de 3 ans, leséléments essentiels du schéma corporel sont présents. L’analyse des dessins d’enfant constitueun apport précieux dans ce domaine, de même que les pointages des différentes parties de soncorps sur instruction verbale ou encore la dénomination des différentes parties anatomiquesmontrées sur le corps de l’interlocuteur. Simultanément à l’élaboration du schéma corporel, seforment les notions spatiales de base, telles que dedans/dehors, en haut/en bas… Ainsi lasituation des objets de l’environnement est évaluée par rapport au corps pris comme référence(Paillard, 1982). Nous voyons bien au travers de ces quelques illustrations combiendéveloppement moteur et développement cognitif sont étroitement liés.

- Représentation du mouvement au cours de l’enfanceLa notion de la permanence de l’objet marque une étape décisive pour le

développement de la représentation. Les conduites intentionnelles signalant la connaissancepar l’enfant des conséquences de son geste apparaissent vers 8-9 mois. Enfin le début del’intériorisation des schèmes, marquant une forme de représentation et l’enchaînement deplusieurs expressions motrices, survient aux environs de 16 mois (Deldime et Vermeulen,1997). Pour résumer l’évolution, au cours des deux premières années, qui permet d’extrapolerdu plan moteur au plan de la représentation mentale, Hubert (1949) déclare : « Laconnaissance, c’est d’abord le geste qui réussit, puis le geste reproduit intentionnellement,puis le geste qui s’ébauche ou qui s’imagine ».

La transition entre le moteur et le représentatif apparaît notamment dans lescomportements imitatifs, tels que faire semblant, les gestes symboliques tels que faire unsigne de la main pour dire au revoir et enfin le langage qui permet d’évoquer des situationspar les seules expressions verbales. L’imitation est à la base de nombreux apprentissages,particulièrement au cours de la petite enfance. L’imitation est également une sourced’interaction sociale qui se manifeste dès la naissance (Nadel, 1986). L’émancipation de lapensée par rapport à l’action, son développement à partir du monde réel s’amorcent au coursde la période de 3 à 6 ans, définie comme la période préopératoire dans la théorie Piagétiennedu développement de l’intelligence (Piaget, 1936).

L’apprentissage d’activités physiques à dominante morphocinétique, telles que ladanse ou la gymnastique, offre une situation expérimentale de choix pour étudier laconstruction des représentations motrices au cours de l’enfance et de l’adolescence (Cadopi etIlle, 1999). Ainsi, il apparaît que les enfants jusqu’à l’âge de 8 ans se représententmentalement les mouvements en image alors que les enfants de 11 ans se représententverbalement les séquences de leur enchaînement de danse (Cadopi et al, 1995). Ainsi chez lesenfants, la nature et l’efficacité de l’encodage des mouvements morphocinétiques dépend desstratégies mnésiques qu’ils utilisent et de leurs capacités d’imagerie mentale. Enfin, dès l’âgede 10 ans, la simulation mentale de l’enchaînement de mouvements gymniques produit des

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effets positifs sur la performance sportive chez des gymnastes de haut niveau (Cadopi et al,1997), comme cela a été également rapporté chez l’adulte (Cadopi et Ille, 1999).

1. Représentation mentale du mouvement chez l’adulte

Actuellement, il existe tout un champ de recherches qui vise à déterminer les réseauxde structures corticales impliquées dans la représentation de l’action (voir pour revueJeannerod, 1999). A la différence du cheminement de l’enfant qui passe, comme nous l’avonsvu, de l’action à la représentation, ces études mettent en avant les capacités de l’adulte àsimuler mentalement une action, à l’imaginer ou encore à la décrire verbalement. Ainsi desrésultats ont montré que la simulation mentale d’une action active la même représentationmotrice qui sous-tend la préparation et l’exécution réelle d’une action en intégrant les mêmescontraintes temporelles et biomécaniques (Decety et al, 1989). De cette façon, la simulationmentale contribue à l’entraînement au même titre que l’activité réelle (Jeannerod, 1994). Nousavons vu que l’enfant de 10 ans et plus particulièrement l’adolescent étaient capables desimulation mentale efficace pour l’amélioration de leurs performances motrices, dans le cadre,néanmoins, très restreint d’un entraînement sportif de haut niveau. Qu’en est-il dans le cadredu développement normal ? La question mériterait d’être étudiée. Différentes études utilisantles techniques d’imagerie cérébrale (voir pour revue Jeannerod, 1999) ont montré que lesmêmes structures corticales, notamment les cortex moteur, sensori-moteur, prémoteur et l’airemotrice supplémentaire, qui sous-tendent l’exécution réelle de l’acte moteur, sont miseségalement en action lors de la simulation mentale. Il a également pu être montré que le cortexpariétal postérieur est activé de façon comparable que le sujet exécute un mouvement de sonrépertoire moteur ou bien qu’il l’imagine (Decety et al, 1994).

Par ailleurs, différentes études (Fadiga et al, 1995 ; Iacoboni et al, 1999), émanant dugroupe de Rizzolatti, ont pu mettre en évidence, chez l’homme adulte, que l’observation d’unacte moteur active les mêmes réseaux que ceux qui participent à son exécution. Plusprécisément, il s’agit de deux aires corticales situées respectivement dans le cortex frontalinférieur gauche et le cortex pariétal supérieur droit, qui ont les propriétés de s’activer aussibien lors de l’observation d’un mouvement des doigts de la main droite réalisé parl’expérimentateur que lors du mouvement imité par le sujet lui-même (Iacoboni et al, 1999).A cet égard, une autre étude très récente (Stevens et al, 2000 ) rapporte que les cortex moteuret pariétal ne sont actifs que lors de l’observation d’un mouvement biologiquement possible.Ainsi, il apparaît que l’activation des structures motrices pourrait constituer une base neurale,tout à fait envisageable, pour les représentations motrices facilitant ainsi non seulementl’imagerie motrice, mais aussi l’imitation et l’apprentissage par observation. Qu’en est-il de lamaturation de ces aires corticales au cours du développement, connaissant l’importance del’imitation pour accéder à des acquisitions motrices nouvelles ? Même si actuellement lesméthodes contraignantes qui sont utilisées dans ces études sont encore difficilementenvisageables chez l’enfant, ces résultats offrent néanmoins des perspectives tout à faitséduisantes pour une meilleure compréhension du développement moteur.

2. Perturbation de l’image du corps et du schéma corporel chez l’adolescent

L’adolescence est une période particulière dans l’ontogénèse qui est caractérisée pardes changements morphologiques rapides et massifs. Les disproportions temporaires, souventdysharmonieuses, du développement morphologique peuvent entraîner une maladressepassagère assortie d’un « affaissement » dans les attitudes posturales. La représentationmentale du corps est perturbée dès le début de la croissance pubertaire (Deldime etVermeulen, 1997). Des enfants jusqu’alors égaux en taille peuvent devenir brusquement trèsdifférents avec des écarts de taille allant jusqu’à 12-15 cm, ce qui peut occasionner fierté ougêne en fonction de la place qu’ils occupent au sein de leur groupe social (Bee, 1997). Chez

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les adolescents, le besoin de conformité aux normes sociales est très puissant. L’imagecorporelle se trouve ainsi fortement influencée par les normes idéalisées par la société etvéhiculées par les médias telles que la force musculaire et la beauté physique (Deldime etVermeulen, 1997). Dans ce contexte, apparaissent parfois des comportements déviants telsque l’obésité et l’anorexie mentale, si le décalage entre le corps souhaité et l’image quel’adolescent se fait de son corps est trop grand.

Jusqu’à présent, l’adolescence a fait l’objet de peu d’études spécifiques du contrôlemoteur, probablement en raison d’une assimilation hâtive au stade adulte. La question quinous intéresse est de savoir si cette détérioration transitoire du schéma corporel et de l’imagedu corps a aussi des conséquences sur les représentations internes du mouvement, et pourraitainsi affecter les fonctions d’anticipation et de coordination qui sont à la base del’organisation du contrôle postural. Notre hypothèse est que cette période pourrait être unepériode charnière où le mode de contrôle rétroactif serait préférentiellement utilisé, audétriment du contrôle anticipé, révélant ainsi une régression passagère dans le développementdu contrôle moteur, ultime étape avant d’atteindre les potentialités de l’adulte.

ConclusionLa rédaction de cette revue a été l’occasion d’une part, de brosser un tableau des

études actuelles du développement moteur et d’autre part de situer l’ensemble de mes travauxet de mes interprétations sur le développement de la fonction posturale chez l’enfant, dans lecadre plus général de la construction d’une sphère sensori-motrice qui apparaît comme uneinterface privilégiée entre l’environnement et la cognition (Paillard, 1999b).

Par son aspect multidimensionnel, le développement moteur me paraît être unexcellent modèle pour l’étude des fonctions intégratives de coordination, d’anticipation etd’adaptation qui permettent à l’enfant, par sa capacité d’action, d’être un véritable acteur deson développement. Comment le cerveau, lui-même en cours de maturation, organise etcontrôle la gestion du répertoire des stratégies motrices afin de produire des actions efficacesqui rendent l’enfant de plus en plus autonome, reste l’une des questions essentielles poséespar le développement moteur.

Le récent développement d’études en imagerie cérébrale fonctionnelle chez l’enfantnous ouvre des perspectives nouvelles, tout à fait captivantes, qui conduisent à la conceptiond’un développement moteur étroitement lié au développement de fonctions cognitives quipermettent de passer de l’action à la représentation de l’action et ainsi d’agrandirconsidérablement son champ d’investigation et de connaissance.

Cet énorme potentiel d’assimilation et d’adaptation dont l’enfant fait preuve au coursde l’ontogénèse constitue également un vaste champ de recherches cognitivo-motrices desplus intéressantes. Ainsi, il apparaît que le développement moteur chez l’enfant estactuellement un champ d’étude en pleine expansion, riche de nouvelles approchesmultidimensionnelles et de questions passionnantes pour les années à venir.

Christine AssaianteChargée de Recherches CNRS

Laboratoire Développement et Pathologie du Mouvement,Marseille.

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VIII.

La motricité du danseur : approches cognitive etdéveloppementale

Peu d’études scientifiques concernent la motricité du danseur. Sans doute par craintede passer à côté de la signification de la danse, rares sont donc les auteurs qui se sontintéressés à l’analyse des processus cognitifs et sensori-moteurs mis en jeu dans ces habiletésmotrices atteignant pourtant un si haut degré de perfectionnement. Comme l’écrit Skrinar(1986), les danseurs semblent éprouver de la suspicion à l’égard de la recherche en dansecomme si l’analyse qualitative et quantitative de la motricité du danseur risquait de nier leurart. Pour Mary Wigman cependant (citée par Robinson, 1981), « L’analyse et le contrôle desprocessus du mouvement font partie du métier et sont le pain quotidien du danseur ». Au-delàde son essence artistique, la danse peut donc être livrable à l’étude scientifique en tant queproduction motrice. Il convient alors de préciser la nature de cette motricité ainsi que lesespaces de problèmes auxquels les danseurs sont confrontés.

I. La motricité du danseurElle présente des caractéristiques particulières soulignées par certains auteurs (Allard

et Starkes, 1991 ; Cadopi, 1994). Les habiletés motrices en danse reposent (nous ne disons pasque c'est la finalité de la danse, bien entendu) sur des formes corporelles et/ou des "dessinsdans l'espace", souvent évalués par rapport au projet initial du danseur lui-même ou duchorégraphe. La motricité déployée y est différente de la motricité " biologique", ordinaire,qui dépend essentiellement des propriétés de l’environnement, de celles des objets surlesquels agit le sujet et de ce sujet lui-même, motricité qualifiée de concrète. Celle du danseurest principalement de nature abstraite : la forme corporelle devient le but du mouvement quin’est déclenché par aucun objet existant, qui dessine dans l’espace « une intention gratuite quise porte sur le corps propre et le constitue en objet au lieu de le traverser pour rejoindre àtravers lui les choses. Il est donc habité …par une fonction symbolique, une fonctionreprésentative, une puissance de projection… » (Merleau-Ponty, 1945). Bien entendu onobserve aussi en danse des actions impliquant une motricité concrète : un porter par exemple,une manipulation d’objets. Mais, même sur ce fond concret, se développe largement unemotricité abstraite.

La motricité du danseur a été également appelée "morphocinétique" par Paillard(1980) et Serre (1985) par opposition à la motricité topocinétique. Les topocinèses sont desmouvements projetés dans l'espace recevant leur instruction d'un objectif spatialement repéréqu'il faut atteindre. Les morphocinèses sont par contre des mouvements qui reçoivent leurinstruction d'un modèle interne engendrant des formes motrices multiples, comme lesoulignait déjà Paillard en 1971. « D’une toute autre nature, semble-t-il, sont les mouvementsprojetés dans l’espace qui reçoivent leur instruction non plus d’un objectif spatialement repéréqu’il faut atteindre mais d’un modèle interne en quelque sorte, qui engendre un programme detrajectoires motrices dont la variété peut être surprenante chez l’homme. Ces mouvementssupposent une mobilisation graduée des effecteurs permettant de diversifier les parcours dansl’espace moteur suivant des combinaisons infinies : danse, attitude, expression corporelle,langage gestuel, graphisme, etc. » Il existe cependant en danse des actions dans lesquelles lesdeux dimensions, morphocinétique et topocinétique, cohabitent, comme dans les exemplesdéjà donnés ci-dessus.

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La motricité du danseur se caractérise aussi par le fait qu’elle se déploieprincipalement dans un milieu stable, constant, sans incertitude (sauf en ce qui concernel’improvisation que nous aborderons dans le dernier chapitre). On dit alors que les habiletésmotrices sont « fermées » (Poulton, 1957) par opposition aux habiletés motrices « ouvertes »dans lesquelles le sujet doit s’adapter en cours d’action à des modifications del’environnement imprévisibles ou difficilement prévisibles, que ce soit sur le plan spatialet/ou temporel et/ou événementiel. Dans les habiletés fermées, le sujet se consacre d’abord àacquérir un pattern moteur aussi proche que possible de celui qui serait théoriquement lemeilleur…, puis il s’attachera à travailler ce pattern afin d’en faire une habitude » (Knapp,1975).

Enfin, la motricité du danseur est une motricité d’expression par opposition à lamotricité d’effection. Nadel (1978) rappelle que la motricité d’expression, bien antérieure àcelle de l’effection, a des racines ontogénétiques profondes. À partir des travaux de Wallon,elle précise que « si le petit d’homme est démuni de tous moyens d’échanges directs avec lemonde physique par l ‘immaturité des systèmes extéroceptifs, il dispose néanmoinsrapidement des moyens de mettre en forme son corps en fonction de ses états organiques etposturaux. Ces réactions initialement physiologiques, qui s’expliquent par les connexionsétroites et directes existant entre système neuro-végétatif et activité tonique), engendrent desactivités différenciées de l’entourage et permettent rapidement l’organisation de liaisonsconditionnelles entre réactions du bébé et interventions de l’entourage qui font passerl’expression d’un état organique ou postural sur le versant de l’expressivité émotionnelle…En somme, l’enfant est poussé, réduit, contraint à développer ses capacités expressives poursurvivre ». La fonction tonique remplit ainsi une fonction expressive, c’est à dire « unefonction de prise d’attitude, de mise en forme du corps dans l’objectif de refléter et destimuler ses dispositions propres ». C’est un dialogue « tonico-émotionnel » pour signifierquelque chose à quelqu’un. Avec le développement de l’enfant et de celui de l’imitation,immédiate puis différée, une mise à distance entre les affects réels et leur expression motricedevient possible. L’activité motrice évocatrice et représentative, abstraite, peut alorss’installer, ce qui a fait dire à Pailhous (1979) : « C’est principalement parce que l’enfantimite que l’homme peut danser ».

Définir les caractéristiques de la motricité du danseur n’est pas suffisant pourl’analyser car elle se déploie dans des circonstances particulières. Or, toute action humainepeut être analysée comme l’atteinte d’un but dans des contraintes environnementales(conditions ambiantes), liées à la tâche (spécifiques), et au sujet lui-même. Ces contraintesdéfinissent un espace de problèmes cognitifs et sensori-moteurs dans lequel il déploie sonactivité. C’est aussi le cas en danse où l’on peut distinguer :

- les reproductions de formes corporelles (la première arabesque en danse classiquepar exemple) ou d'enchaînements de formes corporelles (la variation) ;

- les modulations d'une forme corporelle ou d'un enchaînement de formes corporelles(dans l'espace : plus grand ou plus petit ; dans le temps : plus vite ou plus lentement ; dansl'énergie : plus léger ou plus lourd …) ;

- l'improvisation : production immédiate, "spontanée", sous pression temporelle,d'enchaînements de formes, avec de nombreuses conditions d'exécutions possibles :

- seul, sans support sonore : il n'y a pas d'incertitude

- seul, avec un support sonore que le danseur ne connaît pas : il y a uneincertitude temporelle,

- à plusieurs, " à l'écoute" temporelle et/ou spatiale, voire formelle, despartenaires : il y a alors incertitude spatiale, temporelle, événementielle ;

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- la composition : production de formes ou d'enchaînements de formes, sans pressiontemporelle, pour créer une chorégraphie, seul ou à plusieurs.

Pour la clarté de l’analyse, nous distinguerons dans ce qui suit deux catégoriesd’espace-problèmes : les reproductions ou « rappels moteurs » et les improvisations. Nousprésenterons les principaux résultats obtenus tant du point de vue du contrôle de laperformance que de l’apprentissage en fonction de l’âge des sujets (adultes et enfants) et duniveau d’expertise, en précisant aussi les pistes de recherche envisageables.

II. Les rappels moteurs- les modèles théoriquesQue ce soit avec des débutants ou des experts, les enseignants, chorégraphes ou

maîtres de ballet ont fréquemment recours à des démonstrations accompagnées ou nond'explications verbales. Ils demandent en fait souvent au danseur de produire une action àpartir de l’observation visuelle d’un modèle. Dans d’autres cas, le danseur peut aussi créerune action ou un enchaînement et les reproduire. Ces reproductions motrices sont qualifiéesde « rappel moteur » d’un point de vue scientifique. Les processus permettant d’en rendrecompte ont été analysés par plusieurs auteurs dont Bandura et Schmidt dans le cadre desmodèles théoriques du traitement de l’information qui font largement appel à la notion dereprésentation et de mémoires.

1. La théorie de l’apprentissage socio cognitif par observation

Nous sommes capables de réaliser certaines actions après avoir vu quelqu'un d'autreles faire même si, en général, la performance n'est pas aussi bonne, le geste n'est pas aussi liéque celui du modèle (surtout si celui-ci est un expert). Ceci implique le prélèvement, lors del'exécution par le modèle, d’un certain nombre d'informations que nous pouvons assimiler etexploiter ensuite pour produire la performance. Dans ce cas, l’observation visuelle d'unmodèle est le premier stade pour l'acquisition des habiletés motrices, notamment en danse.Lors de la démonstration, le danseur se forme une représentation de ce qu'il faut faire à partirdes informations qu'il traite et mémorise. Jusqu'à ce jour, la plupart des travaux surl'apprentissage par observation d'un modèle ou "modeling" se sont appuyés sur la théorie del'apprentissage social de Bandura (1977, 1986). Rappelons brièvement que pour l’auteurquatre sous-processus sont impliqués.

- les processus attentionnels : l'observateur doit prêter attention à ce qui est montré etsélectionner les informations qu'il considère comme utiles ou du moins qu'il peut considérercomme telles étant donné son niveau de développement, ses connaissances antérieures et sonniveau d'expertise. L'attention est déterminée par de nombreuses variables dont le degréd'attractivité du modèle et les conditions de présentation du modèle (réel/filmé par exemple).

- les processus de rétention : pour que ces information soient retenues, il faut qu'ellessoient codées en mémoire à partir de représentations imagées ou verbales selon le type detâche et les propriétés du mouvement ou des enchaînements (nombre et ordre deséléments/forme et qualité de l'exécution). Les représentations imagées sont particulièrementimportantes chez les jeunes enfants pour lesquels les habiletés verbales sont encoreinsuffisamment développées et pour les actions qui demandent des coordinations spatio-temporelles complexes, comme c’est le cas en danse.

- les processus de reproduction motrice : cette représentation sert à guider le pratiquantpour l'action motrice elle-même : planification, détection et correction d'erreurs. Ceci ne vautque si le sujet a des capacités motrices suffisantes pour reproduire ce qu'il voit, faute de quoil'apprentissage par observation est inefficace.

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- les processus motivationnels : il convient de noter le rôle important de variablesmotivationnelles que nous ne développerons pas dans le cadre de cet article.

De nombreux auteurs se sont intéressés à ce type d'apprentissage dans le domaine de lamotricité. On en trouve une excellente synthèse dans la récente revue de questions deMcCullagh et Weiss (2001). Mais force est de constater qu'il n'existe que très peu d'étudesmenées en danse, ce qui s’explique dans la mesure où les différents chercheurs s’intéressentdavantage aux processus du contrôle et de l’apprentissage moteurs en général plutôt qu’à leurexpression dans une activité physique particulière.

2. La théorie des schémas de Schmidt

C’est en fait à Adams (1971) que l’on doit la première modélisation théorique ducontrôle et de l’apprentissage moteurs, appelée théorie de la boucle fermée. Pour l’auteur, ilexisterait deux types de traces en mémoire : une trace mnésique permettant de sélectionner etinitier le mouvement, et une trace perceptuelle qui est une est une représentation du résultatattendu, utilisée comme référent pour la correction des erreurs. Cette trace se construit avec lapratique sur la base des feed back reçus et de la connaissance des résultats. Très rapidement,cette modélisation s’est avérée insuffisante pour rendre compte de l’ensemble des actions : parexemple un geste très rapide ne peut être contrôlé en boucle fermée et il faudrait que l’êtrehumain stocke un nombre infini de traces en mémoire.

La théorie des schémas de Schmidt (1982) a apporté un certain nombre de réponses àces questions Globalement, il existerait des formes généralisées de programmes moteurspermettant de donner naissance à une classe d'actions, sans que soient définies les conditionsparticulières de leur exécution. Un programme moteur généralisé (PMG) possède donc desparamètres "flottants" dont il faudra spécifier les valeurs : durée globale du geste, vitesse,degré d'ouverture des articulations par exemple. Il suffirait donc de ne mettre et de neconserver en mémoire qu'un PMG par classe d'actions, ce qui serait très économique pour lesystème humain (si tant est que l'on puisse définir quels sont les critères permettant deregrouper les actions en classe). Selon Schmidt, chaque fois que l'on accomplit une action, onmet en mémoire quatre types d'informations : les conditions initiales de la réalisation del'action (en particulier la position du corps et de ses segments), les paramètres du mouvementutilisés pour spécifier le PMG dans l'action, les résultats du mouvement et les conséquencessensorielles de l'action.

Ces informations organisées en schémas sont stockées dans deux types de mémoire :

- la mémoire de rappel ou d'évocation : elle conserve les relations fonctionnellesconstruites lors des actions précédentes entre trois variables : les conditions initiales, laspécification des paramètres et les résultats des mouvements. Ces relations vont ainsiconstituer un ensemble structuré de connaissances générales qui pourront produire certainesdes caractéristiques de la future action.

- la mémoire de reconnaissance : elle conserve les relations fonctionnelles construiteslors des actions précédentes entre trois variables : les conditions initiales, les résultats dumouvement et les conséquences sensorielles. Le schéma de reconnaissance qui y est stocképermet au sujet de produire les conséquences sensorielles attendues de son action. Il peutalors comparer les conséquences sensorielles réelles à ses attentes Il dispose ainsi d'uneréférence interne d'exactitude, indépendante de celle que peut lui donner la connaissance desrésultats.

Il est intéressant de noter que les deux schémas sont d'autant plus opérants que lenombre d'essais et la variabilité de la pratique en apprentissage ont été plus importants : lesrelations fonctionnelles se traduiraient sous forme de règles mettant en rapport paramètres etrésultats. Seules les règles seraient conservées en mémoire à long terme, tandis que les

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situations particulières de leur construction seraient oubliées. Mais si l’une des quatre sourcesd’information citées plus haut vient à manquer, les schémas respectifs se dégradent etl’apprentissage ne peut avoir lieu.

- Représentations cognitives, performance et apprentissage en danseCompte tenu des caractéristiques des actions morphocinétiques et des modèles

théoriques présentés ci-dessus, on peut penser que le sujet effectue un codage représentatif dece qu’il doit rappeler, élaborant ainsi une référence interne lui permettant non seulement dereproduire la figure ou l'enchaînement demandés mais aussi d'évaluer ceux qu'il exécute ouceux qu'il voit. Il s’agit donc d’un contrôle représentatif de l’action qui peut être évalué aussibien dans la performance (chez des novices comme chez des experts) que dans le décourstemporel de l’apprentissage.

Le contenu et la structure de ces représentations varient en fonction du niveau dedéveloppement cognitif du sujet (Lautrey, 1990 ; Piaget et Inhelder, 1966), de son degréd'expertise et des caractéristiques de la tâche (Leplat, 1985). Mais elles comprennent toujours,et au moins, des informations sur la figure ou l'enchaînement eux-mêmes (les caractéristiquesspatiales de la ou des forme(s) à réaliser, parfois leurs caractéristiques temporelles, l’ordre deséléments), et, éventuellement, les moyens pour y parvenir (certains experts disent coder avecla respiration ou par onomatopées l'intensité et la durée des forces à mettre en jeu ).

1. Résultats chez les adultes

Nous nous sommes personnellement intéressées aux premières représentations que lessujets élaborent pour agir, à leur contenu, à la coordination entre contrôle représentatif etsensori-moteur de l'activité et à l'évolution de ces représentations en fonction du degréd'expertise et des caractéristiques des actions à rappeler.

Du point de vue de la méthode, les différentes expériences présentent descaractéristiques générales communes :

- la séquence dansée à apprendre est constituée de un élément à cinq élémentsenchaînés, exécuté(s) par une danseuse experte, filmée de dos. Il n'y a pas de musique ;

- les sujets doivent apprendre la séquence en l'observant à la vidéo; le nombred'observations est libre ou imposé selon les expériences ;

- les performances motrices des sujets sont filmées, chronométrées et analysées par aumoins deux juges (dont un juge "aveugle") sur la base d'une grille critériée, le modèle servantde norme. Cette grille permet l'analyse des aspects quantitatifs de la performance (nombre etordre des éléments) et de ses aspects qualitatifs : note de "forme" cotant la précision despositions de départ et d'arrivée, plans, trajectoires, orientations, et note de "qualité" cotant laqualité de l'exécution liée notamment à la localisation des actions segmentaires, à la fluidité etau dynamisme du mouvement ;

- l'accès aux représentations se fait par inférence à partir d'observables qui peuvent êtredifférent : modelage de mannequins, reconnaissance de différences par rapport à unenchaînement-modèle, verbalisations des sujets

Nous avons ainsi analysé (Laugier et Cadopi, 1996) la représentation formée par desadultes novices en danse à qui l'on demande d'apprendre pour les faire des enchaînementsmodèles montrés à la vidéo en manipulant le degré d'abstraction de la motricité (figurativeversus arbitraire). Deux enchaînements composés l'un d'éléments figuratifs (montrer du doigt,s'accroupir, se relever en posant les mains sur les hanches par exemple) l'autre d'élémentsarbitraires ont été proposés. La représentation formée par les sujets a été étudiée dans une

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épreuve de reconnaissance de différences par rapport au modèle. Les résultats montrent qu’ilsse représentent correctement les propriétés spatiales et chronologiques des mouvements,quelle que soit leur nature figurative/arbitraire. L'analyse des rappels moteurs montre aussique les aspects quantitatifs et qualitatifs de la performance ne sont pas traités de la mêmefaçon : tous les sujets sont capables de rappeler le nombre et l'ordre des éléments des deuxséquences, par contre on note un effet facilitateur de la motricité figurative tant au niveau durespect des caractéristiques spatiales que de la qualité du mouvement. Ici encore les notes deforme sont supérieures à celles de qualité ; de plus, les sujets vont toujours significativementplus lentement que le modèle et disent faire surtout un codage imagé.

Jean (1994) a étudié le même problème en fonction du degré d'expertise des sujets enutilisant les mêmes enchaînements. Les résultats montrent qu'il faut aussi dissocier les aspectsquantitatifs et qualitatifs de la performance : tous les sujets, novices et experts, sont capablesde rappeler le nombre et l'ordre des éléments de la séquence dansée, qu'elle soit figurative ouarbitraire. Par contre, les aspects qualitatifs ne sont pas traités de la même façon selon le degréd'abstraction de la motricité et le niveau d'habileté des sujets : si le contenu figuratif del'enchaînement facilite la performance chez les sujets novices, il n'a pas d’importance chez lesexperts.

D’autres chercheurs ont analysé la représentation de l’espace dans un solo en danse enfonction de l’expertise. Pour Minvieille-Moncla, Ripoll et Audiffren (2001), Minvieille-Moncla, Audiffren et Ripoll (soumis), la création d’un solo demande un certain typed’interactions avec l’environnement afin d’en construire une représentation qui serait utile aurappel, qu’il soit moteur ou graphique. Les auteurs ont donc cherché à vérifier les propriétésde cette représentation (existence d’une homothétie entre le parcours dessiné et le parcoursréel). Huit sujets danseurs novices et experts devaient composer leur solo pendant unepréparation de dix minutes. Ensuite ils devaient exécuter ce solo, le reproduire graphiquementen positionnant dans l’espace les éléments remarquables, l’exécuter une fois de plus vingtminutes après. L’analyse des données spatiales de distance et d’angle par rapport à ceséléments montre une très bonne représentation spatiale des danseurs, quel que soit le niveau.L’effet de l’expertise se traduit dans la qualité des repères spatiaux en relation avec la distanceparcourue. La représentation temporelle pose problème mais elle est meilleure chez lesexperts. Les résultats sont discutés dans le cadre des modèles théoriques rendant compte destypes de « navigation » dans l’espace (aller d’un point à un autre) et des liens entre perceptionet action.

En conclusion, les résultats essentiels de ces différentes expériences montrent que lesreprésentations jouent un rôle dans la performance motrice en danse, mais qu'il est différentselon les propriétés du mouvement à réaliser et le degré d'expertise des sujets. Les propriétésspatiales sont toujours bien traduites dans la représentation que le sujet élabore pour sonaction ou après l’action ; mais les propriétés temporelles, cinématiques et dynamiques dumouvement ou des enchaînements semblent échapper à un contrôle représentatif, du moinschez les novices.

Les résultats obtenus renforcent aussi l'idée qu'il est important de distinguer les aspectsquantitatifs des aspects qualitatifs de la performance. Cette nécessité déjà évoquée par certainsauteurs (McCullagh, Stiehl et Weiss, 1990) pose le problème du choix d'outils de mesuresuffisamment sensibles et adaptés pour des activités complexes. Les questions soulevées noussemblent mériter d'être approfondies, car elles posent le problème des relations entreperception, représentation et action et, au-delà, celui de l'aménagement des situationsd'apprentissage et de la nature des consignes à donner aux sujets, point sur lequel nousreviendrons.

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2. Résultats chez les enfants

Peu de recherches ont été conduites ce domaine, ce qui est d’autant plus surprenantque les caractéristiques de l’observateur sont fondamentales dans la théorie de Bandura. Alorsque des processus cognitifs rendant compte d’une partie importante du contrôle et del’apprentissage comme l’attention, les capacités mnésiques, le codage, le regroupement,l’étiquetage et la répétition sont facilement disponibles chez l’adulte, ce n’est pas le cas chezles enfants, la maturation de ces processus de traitement de l’information dépendant de leurdéveloppement cognitif.

Parmi les recherches menées en danse, on note les points suivants : a) les travauxconcernent des sujets novices, alors qu’il existe pourtant de jeunes experts dans différentesactivités physiques, b) les enchaînements qu'on demande aux sujets d'apprendre sont souventconstitués de mouvements appartenant déjà à leur répertoire moteur (Gould et Roberts, 1982 ;McCullagh, Stiehl et Weiss, 1990), c) certains travaux prennent en compte les différencesd'âge mais rares sont ceux qui adoptent un point de vue développemental dans la mesure oùles âges choisis pour les expériences ne sont pas établis sur des critères de développementcognitif ou moteur d) les variables dépendantes concernent essentiellement des aspectsdescriptifs de la production motrice, e) comme le notent McCullagh et al. (1989),apprentissage et performance ne sont pas souvent bien distingués dans les études et quand ilest question d'apprentissage, le nombre d'essais n'est jamais très élevé. Cependant desrésultats intéressants figurent dans plusieurs travaux

Yando, Seitz et Ziegler (1978) ont insisté sur la nécessité d’étudier le rôle des facteursdéveloppementaux et ont ainsi proposé un modèle s’appuyant à la fois sur les travaux deBandura et ceux de Piaget. Le niveau de développement cognitif des capacités attentionnelles,mnésiques, de codage symbolique, des stratégies de maintien et de répétition de l’information,verbales et/ou imagées, ainsi que le niveau de développement moteur et des habiletés motricespermettent alors d’interpréter certains résultats et de proposer des pistes d’intervention.

Dans le domaine de la motricité, plusieurs chercheurs ont dès lors pris ces variables encompte. Les résultats principaux montrent que l’attention sélective, la vitesse de traitement del’information, les processus de contrôle ne parviennent pas à maturité avant 12 ans. Lesenfants débutants n’ont soit pas de stratégies d’apprentissage, soit des stratégies moinsefficaces que des experts du même âge, mais de toutes façons inférieures à celles des adultesde même niveau d’expertise.

Parmi les recherches les plus récentes, Weiss, Ebbeck et Rose (1992) ont demandé àdeux groupes de sujets (5 ans à 6 ans 11 mois/8 ans à 9 ans 11 mois) de reproduire unenchaînement de six pas qui a été soit montré et expliqué verbalement, soit expliquéverbalement seulement. Les sujets doivent soit répéter verbalement l'enchaînement avant de lefaire, soit le faire immédiatement. Les auteurs analysent les aspects quantitatifs (nombre etordre des éléments) et qualitatifs (forme) de la production motrice en prenant en compte laperformance et l'apprentissage. Les résultats montrent qu'il existe des différences en fonctiondu type de modèle présenté et de la possibilité qu'ont les sujets de faire ou non une répétitionverbale, selon que l'on considère la performance ou l'apprentissage sur les aspects quantitatifsou qualitatifs. Les enfants les plus âgés ont bien entendu des scores supérieurs à ceux des plusjeunes, mais comparables en performance et en apprentissage quel que soit le type de modèleprésenté. Chez les enfants les plus jeunes par contre la condition "modèle+répétition verbale"donne des résultats supérieurs à la répétition seule pour les scores quantitatifs en performance.Les conditions "modèle" et "modèle + répétition" sont aussi efficaces pour les scores de formeet donnent des résultats bien supérieurs à la seule description verbale.

Cadopi, Chatillon et Baldy (cités dans Cadopi, 1994) ont analysé la représentation quedes sujets âgés de 6, 8, 10, 12 et 20 ans se forment lorsqu'on leur demande d'apprendre unenchaînement de danse de cinq pas pour pouvoir le reconnaître (condition "apprendre pour

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reconnaître") ou le faire (condition "apprendre pour faire") en le regardant autant de fois qu'ilsle veulent. On présente ensuite à tous les sujets une séquence de 6 enchaînements dont l'unseulement est le modèle. Les autres sont identiques à une différence près portant sur soit surdes propriétés spatiales de l'enchaînement (orientation ou position du corps), soit sur lenombre de pas (répétition d'un pas), la trajectoire ou la vitesse du mouvement. On leurdemande alors de dire s'il s'agit du modèle ou non et d'expliquer leur réponse. Les résultatsmontrent a) un effet du but de l'apprentissage sur le nombre d'observations demandées : il esttoujours supérieur dans la condition "apprendre pour faire", ce qui peut s'expliquer en termesde coût cognitif pour la préparation d'un transfert intermodal vision-proprioception ; b) uneffet de l'âge sur ce nombre d'observations : il est faible et pas différent chez les six ans et leshuit ans, augmente à dix ans, chute à 12 ans, est de nouveau élevé chez les adultes; cesrésultats sont compatibles avec ce que l'on sait du développement quantitatif et qualitatif desressources attentionnelles et mnésiques et du développement de l'activité d'imagerie ; c) uneffet de l'âge sur les performances au test de reconnaissance : jusqu'à dix ans les sujets ont leplus grand mal à détecter et expliquer les différences de trajectoire et vitesse. Tout se passecomme si le codage et la mémorisation des composantes cinématiques du mouvement leurposaient de gros problèmes, du moins lors de l'observation initiale. Par contre, il n'y a pasd'effet du but de l'apprentissage sur le nombre de bonnes réponses émises par les sujets.

Dans une autre étude menée chez des sujets novices de huit et 11 ans, Cadopi,Chatillon et Baldy (1995) ont analysé l'évolution des représentations pour l’action et desperformances motrices en fonction de l'âge. Les sujets devaient apprendre en l'observantautant de fois qu'ils le voulaient un enchaînement dansé de trois éléments pour le faire. Lesrésultats ont montré un effet de l'âge sur le nombre d'observations demandées et sur le nombrede sujets capables de réaliser l'enchaînement dans sa totalité, toujours plus élevé chez lessujets de 11 ans que de huit ans. Les notes de forme ne sont pas significativement différentesentre les deux groupes, mais celles de qualité sont plus élevées chez les sujets de 11 ans. Ilsvont toujours significativement plus vite que le modèle et seuls les plus âgés ont unereprésentation précise de la structure temporelle de l'enchaînement. Ils disent effectuer uncodage essentiellement imagé, qui peut se doubler ou non d'un codage verbal chez les sujetsde 11 ans.

Bouffard et Dunn (1993) se sont intéressés aux stratégies d’apprentissagespontanément mises en place par des enfants de six et neuf ans dans une tâche d’apprentissagede mouvements de mains issus du langage des sourds-muets. Les résultats mettent clairementen évidence que les sujets les plus âgés demandent un plus grand nombre d’observationsavant de rappeler les séquences et ont des stratégies de mémorisation plus variées (mimer laséquence, la coder verbalement etc). De même, dans l’expérience déjà citée (Cadopi et al.,1995) les sujets de 11 ans demandent spontanément aussi un plus grand nombred’observations que ceux de huit ans, ce qui leur permet une meilleure sélection desinformations et utilisent aussi un codage verbal en plus du codage imagé.

Ille et Cadopi (1999) ont étudié les performances de rappel d’enchaînements degymnastique au sol chez des novices et expertes en gymnastique âgées de huit à 13 ans enanalysant le rôle des stratégies de mémorisation et des habiletés d’imagerie. Même s’il s’agitde gymnastique, cette expérience est à noter car elle prend en compte le degré d’expertisechez des enfants. Les résultats montrent que les performances augmentent avec l’âge et ledegré d’expertise. L’étiquetage est la stratégie la plus employée, même si elle nes’accompagne pas d’une augmentation significative des performances. Ces dernières sont lesmeilleures chez les sujets présentant des capacités d’imagerie élevées qui seraient enparticulier utiles pour la mémorisation des éléments chorégraphiés composant lesenchaînements.

En conclusion, et comme nous l'avons déjà souligné, les travaux entrepris neconcernent que des sujets novices. Ils montrent que le niveau de développement moteur et

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cognitif a un effet sur la façon dont les informations sont perçues, mémorisées et répétées. Ilsmontrent aussi que ceci est en interaction avec la possibilité ou non qu'ont les sujets d'utiliserdes stratégies de répétition et avec le type de stratégie utilisée selon ce qui est à mémoriser(Housner, 1984). Mais au-delà des différences dues aux facteurs cognitifs, il est tout à faitpossible que le développement moteur même des enfants, leur expérience motrice et leurdegré d'expertise interagissent avec leur habileté à reproduire ce qui leur est montré. Or il n’ya que très peu d’études en ce domaine. On peut néanmoins citer celle de Roberton, Halversonet Harper (1997) qui ont étudié les effets du modeling verbal et visuel sur le saut à cloche piedchez des enfants de six ans. Ceux-ci ont été classés en fonction du degré de coordination desactions entre bras et jambes dans le saut. Contrairement aux résultats attendus, les enfants lesplus avancés sur le plan des coordinations n’ont tiré aucun bénéfice de la démonstrationexplicitée. Les résultats peuvent être interprétés en termes de surcharge cognitive : le fait dedissocier les instructions relatives aux différents segments les aurait empêchés de percevoirles aspects les plus saillants de l’action, c’est à dire le mouvement relatif des bras et desjambes comme totalité.

Ces résultats sont particulièrement intéressants car ils permettent de questionner en faitles modèles purement cognitifs du contrôle et de l’apprentissage moteurs. D’autres approches,comme celle de la perception directe (Johansson, 1973 ; Kozlowski et Cutting, 1977 ; Scullyet Newell, 1985, Scully, 1986 ; Williams, Davids, Burwitz et Williams, 1992), défendentl’idée que les sujets perçoivent les invariants du patron moteur, c’est à dire les relations,essentiellement cinématiques, qui lient les mouvements des différents segments du corps entreeux. Les expériences en ce domaine reposent sur la technique du « kinematic point lightdisplay » ? Celle-ci consiste à filmer les mouvements des sujets à partir de capteurs placés surles articulations puis à ne restituer à l’image que les déplacements de ces points remarquables,tout en gommant tous les autres indices : l’observateur ne voit que des points lumineux sedéplacer sur un écran. Les différents chercheurs ayant travaillé en ce domaine ont montréqu’il était tout à fait possible à partir de ces seules informations de reconnaître des actionsusuelles (marcher, sourire, reconnaître le sexe d’une personne en train de marcher). Mais leursrésultats ne concernaient que des tâches de reconnaissance et pas de rappel. Ille et Cadopi(1996) ont cependant étudié le rappel de locomotions dansées de complexité croissante aveccette procédure chez des danseuses adultes novices et expertes. Elles ont montré que tous lessujets étaient effectivement capables de reconnaître et différencier les différentes marches,mais les novices les qualifient « d’étranges » alors que les expertes les reconnaissent commeétant des pas de danse. Les rappels moteurs, analysés selon deux critères, le respect de lacoordination générale et celui de qualité motrice, indiquent que les novices, contrairement auxexpertes, ont d’autant plus de difficulté à exécuter les locomotions que celles-ci sontcomplexes : même après six essais, la coordination générale est toujours imparfaite. Cecirepose le problème des liens entre perception et action en fonction du niveau d’expertise sanstoutefois apporter de réponses satisfaisantes : les novices ne sont-elles pas capables d’extraireles bonnes informations des patrons lumineux ou bien le peuvent-elles sans être capables deles traduire au plan moteur ? C’est sans nul doute une piste de recherche intéressante.

D’ailleurs les liens entre perception et action, observation d’un modèle et exécution,sont aujourd’hui au cœur de nombreux débats au plan international. Suite à différents travauxen neurosciences (voir en particulier Rizzolati et Gallese, 1997, Rizzolati, Fadiga, Fogassi etGallese, 1999 ; Pozzo et al., 2001) ont entrepris un programme de recherche à ce sujet pourpouvoir confirmer que la perception des actions s’appuie sur la simulation par l’observateurdu comportement observé : la kinesthésie de l’observateur serait prise en compte dans laperception du mouvement biologique, ce qui supposerait l’existence d’un référentiel communà la kinesthésie de l’observateur et du modèle observé.

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- Analyse temporelle de l’apprentissageIl y a réellement peu de travaux sur le décours temporel de l’apprentissage moteur en

danse, c’est à dire sur ce qui change réellement temporellement avec la pratique. Récemment,Delcor et al. (2001) ont étudié la dynamique de la construction d’une représentation visuo-motrice lors de l’apprentissage d’une séquence de formes motrices présentées par vidéo. Lesauteurs font l’hypothèse que l’exactitude des performances de rappel est étroitement liée à ladynamique de construction de la représentation, c’est à dire que les performances, analyséessous la forme de séries temporelles, permettent de mettre en évidence une relationdéterministe entre les rappels rendant compte de l’activité de mémorisation. Douze sujetsayant pratiqué la danse mais considérés comme de niveau « intermédiaire » ont été repartis endeux groupes ont rappelé une séquence de mouvements du bras 60 fois. Le groupe 1 avait uneprésentation du modèle pour les 60 essais tandis que le groupe 2 ne l’avait que pour les 30premiers.

Le rappel d’une séquence de mouvements morphocinétiques alors que le modèle n’estplus présent perceptiblement, nécessite, comme nous l’avons déjà écrit, la construction enmémoire d’une représentation ou d’une référence interne pour guider l’action. Cettereprésentation visuo-motrice se construit au cours de l’apprentissage lors des présentationssuccessives du modèle qui déclenchent un processus de réorganisation des informationsrelatives au patron mémorisé. En d’autres termes, la présentation du modèle permet« d’affiner » la représentation visuo-motrice afin qu’elle soit la plus précise possible.Toutefois même en fin d’apprentissage, on observe que les rappels restent variables et qu’ilsne sont jamais exactement identiques au modèle. Les variations en début d’apprentissageseraient majeures et rendraient compte principalement des erreurs contenues dans lareprésentation. Ensuite, quand la représentation visuo-motrice aura atteint le niveau maximald’exactitude par rapport au modèle, les variations seront principalement l’expression d’unevariabilité aléatoire inhérente à tout système biologique. L’arrêt de la présentation du modèlen’aura alors aucune conséquence sur la précision des rappels. Les résultats montrent en effetqu’avec les essais l’exactitude des rappels augmente, jusqu’à se stabiliser à une valeurmaximale, sans jamais pour autant atteindre le modèle. Les modèles d’analyse utilisés(procédures ARIMA) mettent en évidence que pour les 30 premiers essais des deux groupes,la performance observée au temps t est fonction de la performance au temps t-1. L’historicitéde la série se résume à cette dépendance d’un essai à l’essai précédent : il y a une activité« d’affinement » de la représentation visuo-motrice après chaque nouvelle observation dumodèle. L’exactitude maximale est stabilisée au bout de 30 essais. On peut penser que chaquenouvelle présentation du modèle, une fois la représentation déjà stabilisée en mémoire à longterme, engendre une (ré)activation de la représentation sans pour autant permettre uneamélioration de son contenu. Pour le groupe 2 lors des 30 derniers essais sans modèle, la sérieest devenue stationnaire. Les rappels sont alors déterminés par une seule et mêmereprésentation consolidée en mémoire à long terme.

Il convient d’approfondir ces résultats en prenant en compte de façon précise ce quirelève des aspects spatiaux et temporels des coordinations motrices mises en jeu etd’apprécier aussi les effets de l’expertise.

Il n’y a pas d’étude développementale de ce type qui nécessitent en fait un graind’analyse des rappels moteurs beaucoup plus fin que celui qui est traditionnellement utilisé. Ilfaut en effet quantifier sur le plan cinématique et/ou dynamique les productions du sujet enfonction du temps.

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- L’expertise mnésique en danseComme nous l’avons déjà écrit on demande souvent en danse aux sujets de reproduire

de longues séquences de mouvements. Le rôle de la mémoire est donc fondamental dans cetype d’activités car la performance du sujet dépend de sa capacité à encoder, maintenir etretrouver les informations utiles Or, on constate en danse, comme dans de nombreusesactivités, que les sujets experts ont des performances mnésiques supérieures à celles des sujetsnovices (Allard & Starkes, 1991) Deux courants de recherche permettent de rendre compte deces résultats : le premier s’intéresse à l’influence de la base de connaissances des sujets, ledeuxième s’attache à montrer l’importance de la nature du codage de l’information enmémoire.

Dans les activités nécessitant des rappels d’enchaînements d’actions comme lepatinage artistique (Deakin et Allard, 1991) ou la danse classique (Starkes, Deakin, Lindley etCrisp, 1987), on retrouve une interaction entre le degré d’expertise et le caractère structuré dumatériel à mémoriser : les experts n’ont de meilleures performances de rappel que si lematériel à mémoriser est structuré selon les règles de leur discipline. La supériorité desexperts serait due à l’influence de leur base de connaissances sur la discipline, ce qui leurpermet d’en reconnaître les patrons usuels. Les informations à mémoriser peuvent ainsi êtreregroupées en groupements signifiants ou “chuncks” et organisées hiérarchiquement,garantissant le stockage d’une plus grande quantité d’information ainsi qu’une récupérationplus efficace par le biais de structures de rappel préexistantes (Richard, 1987). De plus, lesliaisons usuelles entre éléments influencent la probabilité d'apparition d'un élément à la suited'un autre : cette diminution des éventualités probables permet d'améliorer le stockage et larécupération de chaque élément. De plus encore la connaissance de la discipline permet aussiaux experts d’étiqueter verbalement les mouvements, notamment en danse classique (Smythet Pendleton, 1994). Dans cette approche, la supériorité des experts est donc strictementspécifique à leur domaine (Ericsson et Smith, 1991 ; 1989).

Mais tous les résultats des recherches ne vont pas dans le sens d’une spécificité del’expertise. Dans une étude faite en danse moderne par Starkes, Caicco, Boutilier et Svevsek(1990), les sujets experts rappellent mieux que les novices des enchaînements de danse, mêmesi ceux-ci ont été constitués par un tirage aléatoire de divers mouvements. Il est doncnécessaire d’envisager d’autres facteurs influençant la mémorisation des actions motrices.

Afin de proposer une hypothèse alternative à celle de l’influence de la base deconnaissances des sujets, certains auteurs comme Smyth et Pendleton (1989, 1994) se sontintéressés à la nature du codage des informations dans la mémorisation de mouvements,notamment dans la mémorisation de formes corporelles, en s’appuyant sur le modèle de lamémoire de travail de Baddeley et Hitch (1974) et Baddeley (1992). Pour ces auteurs, lesystème mnésique est composé d’un administrateur central et de deux systèmes esclaves.L'administrateur central a fonction d'interface entre la mémoire permanente et les systèmesesclaves. Le premier système esclave, la boucle phonologique, stocke les entréesphonologiques sous le contrôle d’un processus articulatoire. Il traite le matériel verbal d’unpoint de vue purement phonologique. Le deuxième sous système, le calepin visuo-spatialmaintient et manipule les informations visuelles et la référence spatiale des objets.

Cette conception de la mémoire repose sur le paradigme expérimental dit de doubletâche qui consiste à ajouter une deuxième tâche à la tâche primaire de mémorisation, demanière à produire une interférence sélective. À l’aide de ce paradigme, Baddeley et Hitchont montré que la saturation des capacités de la mémoire à court terme n’interdit pasd’effectuer des actions de traitement puisque les différents sous systèmes de mémoire sontindépendants.

Pour Smyth et Pendleton (1989), le calepin visuo-spatial est responsable du rappelmoteur de localisations spatiales, mais la mémorisation de formes corporelles se fait sous le

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contrôle d’un troisième module qu’elles nomment « kinesthésique spatial ». Celui-ci seraitmis en jeu dans la mémorisation de mouvements centrés sur le corps. Dès 1967, Posner avaitdéjà montré que le rappel d’informations de nature kinesthésique n’était pas comparable aurappel d’information de nature spatiale. Dans cette optique, l’expertise des danseurs seraitdonc la conséquence d’une utilisation de ce codage kinesthésique particulièrement adapté à lamémorisation d’actions motrices, et ceci indépendamment du degré de structuration dumatériel. Smyth et Pendleton (1994) ont comparé les performances de rappel de danseursprofessionnels et novices pour des empans de gestes et de mouvements de danse en conditiond’interférence motrice et verbale. Les résultats obtenus montrent que les performances dessujets sont particulièrement affectées par les deux tâches d’interférence. De plus, les auteursne retrouvent pas l’interaction classique entre la nature du matériel et le degré d’expertise dessujets car les performances de rappel des experts sont supérieures à celles des novices quelleque soit la nature du matériel à mémoriser. Ce ne serait donc pas l’utilisation de leur base deconnaissances qui permettrait aux experts d’obtenir de meilleurs résultats que les novices,mais l’utilisation d’un codage sollicitant le registre kinesthésique de la mémoire de travail.

Pour tenter de rendre compte de ces résultats contradictoires, nous avons mené dansnotre équipe une série d’expériences dans lesquelles nous avons testé le type de matérielutilisé (danse classique vs danse moderne), son degré de structuration (structuré vs nonstructuré) et la condition d’encodage (trois modalités : sans tâche d’interférence, avec tâched’interférence motrice, avec tâche d’interférence verbale) chez des danseurs experts.

Dans ce qu’ils ont d’essentiel, les résultats montrent que les performances de rappellibre des danseurs dépendent en partie du degré de structuration du matériel. La base deconnaissance des sujets a donc une influence sur les processus de mémorisation. Ils montrentaussi que la mémorisation d’enchaînements suppose un encodage de nature verbale. Parcontre, la tâche d’interférence motrice ne semble avoir aucune influence sur les performancesde rappel. Contrairement à Smyth et Pendleton (1994), nous ne pouvons faire l’hypothèsed’un encodage de nature kinesthésique comme alternative à celle de l’influence de la base deconnaissances. Le registre kinesthésique de la mémoire de travail n'est donc passystématiquement impliqué dans la mémorisation de formes corporelles (Jean, Cadopi et Ille,2001).

Ces résultats nous ont conduit à envisager d’autres cadres d’interprétation et à analyseren particulier le rôle du calepin visuo-spatial. Pour Salway et Logie (1995), le calepin visuospatial gère la planification et le contrôle du mouvement car la mémorisation deconfigurations spatiales est perturbée par une tâche d’interférence de nature à la fois motriceet spatiale telle qu’un tapping séquentiel sur quatre cibles.

Nous avons ainsi comparé les performances de danseurs experts et novices dans destâches de rappel d’enchaînements de mouvements centrés sur le corps mais n’appartenant pasà la danse (langue des signes française) selon quatre modalités d’apprentissage : sans tâched’interférence, avec tâches d’interférence motrice, verbale, spatiale. Les résultats montrent uneffet global de l’expertise et de l’encodage, mais pas d’interaction. La tâche d’interférencemotrice ne détériore jamais les performances de rappel de façon significative. La différenceentre experts et novices est marquée dans les conditions tâche d’interférence verbale etspatiale. Ces résultats infirment de nouveau l’hypothèse de Smyth et Pendleton maiscorroborent en partie celle de Salway et Logie (1995) : le calepin visuo-spatial est mobilisédans la mémorisation de séquences de mouvements. Mais dans l’ensemble, ils vont dans lesens des recherches de Feyereisen et Van der Linden (1997) pour lesquels le rappel deséquences de mouvements mobilise toutes les composantes de la mémoire de travail ycompris l’administrateur central selon les caractéristiques des mouvements à mémoriser(Jean, 2001).

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À l’issue de ces travaux, quatre axes de travail pourraient être approfondis :

- la nature du matériel à mémoriserLes tâches de mémorisation utilisées dans les différentes expériences rapportées sont

différentes : par exemple Smyth et Pendleton demandent aux sujets de mémoriser de courtesséquences de mouvements discrets préalablement appris alors que Jean s’intéresse au rappeld’enchaînements de mouvements sans apprentissage préalable. On peut supposer que lesprocessus impliqués sont différents.

- la théorie de la mémoire de travail à long terme (Ericsson et Kintsch,1995)

Si aucune tâche d’interférence n’a d’effet sur le rappel chez les sujets experts, c’estpeut être parce qu’ils n’utilisent pas les fonctions de rafraîchissement de l’information enmémoire de travail dans la mesure où ils disposeraient de structures de récupération enmémoire à long terme Si c’est le cas, l’instauration d’une tâche intercalée entre l’observationde la séquence de mouvements et son rappel ne doit pas affecter les performances de rappelchez les experts et les détériorer chez les novices. Les résultats obtenus vont nettement dans lesens de cette hypothèse (Jean, Cadopi et Delcor, 2001), mais il reste à analyser la nature deces structures de récupération.

- les processus de vicariance utilisables par les expertsDans une recherche sur les stratégies utilisées par les danseurs experts, Poon et

Rodgers (1997) montrent que ces sujets ont à leur disposition un grand nombre de stratégiesdifférentes qui reposent sur des codages différents ("étiquetage", "imagerie", "marquage" parexemple) et qu’ils sont capables de les utiliser de façon intégrée. Il est donc possible que lessujets experts aient la possibilité de s’adapter aux effets d’interférence par l’utilisation destratégies compensatoires. On retrouve ici l'idée d'une flexibilité cognitive permettant auxsujets disposant d'un large éventail de processus de sélectionner ceux qui sont utiles pour unetâche donnée dans des conditions données (Gaonac'h, 1990 ; Reuchlin, 1978).

- les études développementalesIl existe bien entendu de nombreuses études développementales sur les processus

mnésiques chez les enfants (voir en particulier Bideaud et Courbois, 1998), mais, à notreconnaissance, rien n’a été fait en danse. C’est une perspective de recherche que nousdéveloppons dans notre équipe.

III. Rapports entre langage, image et action : La formulation desconsignes dans l’apprentissage en danse

Les enseignants de danse n’utilisent pas que des démonstrations, loin s’en faut. Ils ontsouvent recours à des consignes verbales pour guider les apprentissages. La formulationmême de ces consignes, c’est à dire la manière dont elles renvoient aux différentesdimensions du mouvement, a fait l’objet d’un certain nombre de recherches. Rappelons que ledanseur est confronté à des problèmes cognitifs (que nous avons déjà analysés) et sensori-moteurs. Au plan sensori-moteur, il est contraint par ce que peut faire son organisme (systèmeneuro-musculo-squelettique) par rapport aux propriétés cinématiques et cinétiques desmouvements demandés. Il doit notamment rechercher une fluidité dans l'exécution, apportéepar une succession de tensions et relâchements que l'expert est capable de créer de manièretrès localisée et de laisser se propager. N'importe qui est capable d'incliner le buste à droite.Mais l'on constate, dans une motricité "ordinaire" que cette inclinaison s'accompagne souventd'une inclinaison de la tête du même côté, d'un léger affaissement des membres inférieurs etd'une compensation au niveau du bassin vers la gauche. Le danseur expert est capable, lui, de

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réaliser cette inclinaison sans que la tête ne participe au mouvement, en donnant uneimpression d'allongement et d'allégement du corps et sans compensation au niveau deshanches. Il est donc capable de contrôler différemment une action ordinaire. Il est aussicapable de créer des coordinations nouvelles à partir des éléments de son répertoire moteurhabituel. Coordination et contrôle ne renvoient pas aux mêmes processus.

La coordination est définie comme étant le processus qui contraint les variables libresdu système en des unités comportementales nouvelles. Parmi tous les mouvements quel’individu peut réaliser, seuls certains sont pertinents en fonction de la demande de la tâche. Sibien que certains degrés de liberté sont bloqués, "gelés", et d'autres contrôlés pour aboutir àdes formes de mouvement repérables.

Le contrôle désigne les processus par lesquels des valeurs sont assignées à cette unitécomportementale : il s'agit du réglage au plan métrique ou quantitatif de ce que Schmidt(1982) nommait les paramètres (intensité, vitesse, durée) du programme généralisé. Enfinl'habileté caractérise le fait que le pratiquant identifie et adopte des valeurs optimales lors ducontrôle de ces paramètres dans la réalisation de la tâche.

Ainsi, lorsqu'un sujet ne dispose pas, dans son répertoire moteur, des unitéscomportementales nécessaires pour atteindre le but fixé à la tâche, il se trouve dans une tâchede coordination ; quand ces nouveaux patrons de coordination sont en place, la tâche devientune tâche de contrôle.

On trouve peu dans la littérature professionnelle ou scientifique consacrée à la dansed'indications très précises sur le contenu des consignes données aux danseurs pourl'apprentissage en fonction de ces deux paramètres. Elles sont en fait variées : souventdescriptives en danse classique (en termes de description chronologique de ce qu'il y a à faire)et prescriptives (en termes de propriétés biomécaniques du mouvement - "allongez le dos" -ou de caractéristiques spatiales du mouvement - "pensez au dessin que doit faire votre brasdans l'espace - ), elles sont plus souvent remplacées en danse contemporaine par desconsignes " imagées " ou analogiques ("imagine que tout ton corps est léger et lumineux"). Leproblème théorique qui se pose ici et donc celui des rapports entre langage, image et action(Erbani et Lagarde, 1995 ).

C’est à Annett (1985, 1991, 1994) que l’on doit un des principaux modèle théoriquepermettent d’en rendre compte : le pont Action-Langage-Image (ALI). Pour lui, l'imagejouerait le rôle d'interface entre le langage et l'action. L'auteur, s'interrogeant sur les relationsentre ces trois registres, constate que des sujets, experts ou non, décrivent difficilement cequ'ils sont pourtant capables de faire avec une grande précision. Par contre l'évocation imagéede l'action est un intermédiaire très utile pour pouvoir ensuite en parler. Le courant passe biende l'image à l'action mais aussi de l'action à l'image. Annett considère ainsi que le codageimagé des informations est un intermédiaire entre le langage, formalisation arbitraire desinformations, et l'action. De nombreux travaux expérimentaux viennent à l'appui de cespositions même si la modélisation sous-jacente n’est pas encore très claire.

Par ailleurs Ashen (1984) accorde une part importante aux processuspsychophysiologiques dans l'imagerie, mais prend également en compte la signification querevêt l'image pour le sujet. Trois entités composent ainsi son modèle intitulé I.S.M. « mage,Somatic response and Meaning » L'image I correspond à une “sensation” activéecentralement, la réponse corporelle, S aux modifications psychophysiologiques quil'accompagnent l'image et M à la signification personnelle de cette image pour un sujet donné.L'utilisation d'une expression particulière dans les consignes peut ainsi avoir chez les sujetsdes significations diversifiées. Murphy et Jowdy (1992) rapportent à ce sujet, suite à uneexpérience auprès de jeunes patineurs, que l'utilisation d'une image comme celle d’une boulede lumière véhiculant de l'énergie, a eu chez certains sujets des répercussions négatives sur laperformance (image d'un effet destructeur, d'un effet aveuglant ou d'un état de semi-

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conscience), alors que cet effet était positivement stimulant chez d'autres sujets. Les auteurssuggèrent que dans le premier cas les individus actualisent à travers l'imagerie une formed'anxiété liée à leur histoire.

Il est donc possible de réfléchir à la formulation même des consignes, en danse plusqu’ailleurs, en prenant en compte le niveau d’habileté auquel se situe le sujet : coordinationou contrôle. Dans le 1er cas, on peut penser que la consigne doit porter sur les propriétésfigurales de ce qu'il faut apprendre et la formulation comporter essentiellement des élémentsdescriptifs et chronologiques, du type : "monter le bras droit latéralement au-dessus de la tête,puis incliner le buste à droite…" que le sujet pourra se représenter. On dit ou on écrit ce qu'ily a à faire en décrivant les séquences de mouvements (cf. les manuels de danse, par exempleGuillot et Prudhommeau, 1969 ; Magill et Schoenfelder-Zohdi, 1996). Dans ce cas, uneformulation traditionnelle de la consigne permet une activité d'imagerie visuo-spatiale(Annett, 1994 ; Hall, 1980 ; Housner, 1984). Dans le 2ème cas, elle doit porter sur lespropriétés cinétiques et cinématiques de ce qu'il faut réaliser, la qualité du mouvement : laformulation devra évoquer, suggérer la qualité motrice recherchée à partir d’imagespersonnalisées, par exemple "imagine que l'espace est piquant quand tu fais ce mouvement".La formulation analogique permettrait une activité d'imagerie kinesthésique (durée, rythme eténergie du mouvement). Pinard et Renaud (1990), reprenant le modèle de Dreyfus et Dreyfus(1987), ont montré que l'on pouvait faciliter l'apprentissage des danseurs et aider à leurformation artistique en respectant certaines étapes : au niveau débutant il faudrait mettrel'accent sur l'aspect visuo-spatial du mouvement ; ensuite il faudrait insister sur la prise deconscience des sensations kinesthésiques associées à l'aspect visuo-spatial ; au niveau avancéil faudrait privilégier les aspects séquentiels des enchaînements en insistant sur la mise enrelation des aspects visuo-spatial, kinesthésique et cinétique ; au niveau expert enfin lesconsignes doivent orienter le danseur vers l'intentionnalité émotionnelle du geste.

Dans une étude menée auprès de 44 enseignants de danse au Canada, Overby (1990)constate que le recours aux consignes analogiques est majoritaire, quels que soient le niveaudes danseurs et la nature des tâches. De plus, les images utilisées font aussi bien référence àdes caractéristiques visuelles que kinesthésiques. Pour un même mouvement, par exemple lerelevé (relever sur une pointe de pied ), les consignes peuvent porter a) sur les lignes demouvement : "imagine l'eau d'une fontaine qui jaillit du centre de tes pieds, monte le long detes jambes, de ton buste jusqu'au dessus de ta tête et qui enveloppe ton corps en retombant"(traduit par nous) ou b) sur le mouvement dans son ensemble : "imagine que tu es immergéejusqu'au cou dans une piscine remplie d'eau parfaitement et absolument calme".

Hanrahan (1994), Hanrahan, Tetreau et Sarrazin (1995), Hanrahan et Salmella (1986,1990) ont essayé pour leur part de vérifier si l'utilisation de consignes imagées est réellementefficace pour l'amélioration de la performance chez des danseurs de bon niveau, dans destâches qu'ils connaissent déjà bien, donc des tâches de contrôle selon notre dichotomie(développé de jambe sur le côté, arabesque et grand battement de jambe devant). Les analysescinématiques ne font apparaître un effet positif des consignes imagées que pour deuxmouvements seulement (le grand battement et l'arabesque). Mais les sujets rapportent que lesconsignes les ont aidés à sentir le mouvement, à être plus détendus, à réduire l'effort. Cesverbalisations mettent aussi en évidence qu'il est particulièrement important que les consignesdonnées comportent des informations sur la direction des forces à exercer et sur les parties ducorps qui bougent ou qui, au contraire, restent immobiles.

Dans une série d'expériences sur les problèmes de contrôle d'équilibre postural chezdes danseurs classiques professionnels, Hugel, Cadopi, Kohler et Perrin (1996) montrent aussique les danseurs définissent de manière intime leur équilibre : ils parlent de "dilatation ducorps", de "racines". Lorsqu'on leur demande de dessiner ce qui les aide à être en équilibre, ilsdessinent soit la direction des forces qui permettent la réalisation de la position (pour nous ils'agit ici d'une représentation de type biomécanique), soit des représentations de soleil ou de

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fontaine (pour nous il s'agit alors d'une représentation métaphorique qui met l'accent sur lespropriétés kinesthésiques du mouvement). Ce type de représentations externes de la motricitémise en oeuvre (même si dans ce cas la formulation verbale ou graphique est postérieure àl'action) traduit le fait que l'aide au contrôle d'une habileté motrice peut passer à la fois par desconsignes de type biomécaniques, très concrètes (pousse vers le bas) mais aussi par desanalogies (image de la fontaine).

Juaire et Pargman (1995) montrent que des consignes présentées sous forme graphiquefacilitent le rappel moteur par rapport à des consignes verbales. Mais les résultats, tout à faitinterprétables dans le cadre des positions d'Annett, mériteraient d'être rediscutés compte tenude la nature des consignes verbales données qui ne sont en fait que des étiquettes facilitant lamise en mémoire de la séquence.

Laugier (1995) a expérimenté l'effet de consignes de nature différente surl'apprentissage d'un mouvement de danse contemporaine chez des débutants adultes novicesdans trois conditions différentes : présentation d'un modèle, consignes verbales descriptives,consignes analogiques. L'apprentissage a été mesuré au bout de 18 essais et dans une tâche detransfert. Les résultats, dans ce qu'ils ont d'essentiel, montrent que tous les sujets progressententre le pré-test et le post-test mais qu'il n'y a pas d'effet de la nature des consignes sur cetapprentissage. Bien que décevants dans une première approche, ces résultats sontparticulièrement intéressants compte tenu des questions qu'ils permettent de poser concernantd’une part les outils d’analyse à utiliser, d’autre part la nécessité de “ travailler ” etd’individualiser la formulation analogique des consignes.

Il existe peu d'études développementales en ce domaine ; elles se situent dans le cadrede l'apprentissage par observation et ne portent pas essentiellement sur les points soulignés ici(pour une revue voir Mc Cullagh, Weiss et Ross, 1989 ; McCullagh et Weiss, 2001).

Trouver la bonne consigne imagée pour guider l'apprentissage n'est pas chose facile.Pour Hanrahan (1994), il est impératif de respecter huit étapes :

1. Analyser le mouvementCeci demande une analyse approfondie, technique et biomécanique, pour savoir

quelles sont les parties du corps qui doivent se mouvoir, dans quelle direction, jusqu'à quelpoint.

2. Préciser un but positif et spécifique au danseurIl s'agit d'attirer son attention sur ce qui est réellement important au moment du travail

: une partie du corps ou bien le mouvement dans son ensemble, la dynamique du mouvement,la prévention d'une blessure éventuelle, le rythme ?

3. Préciser les qualités et les dynamismes souhaités du mouvementSi l'on cherche la légèreté, cela renvoie-t-il à la qualité de ce qui flotte dans l'eau ou à

une suspension ou à planer sur des nuages ?4. Trouver une forme d'énergie existante dans la nature appropriée à la

dynamique du mouvementUne brise légère ou des rafales de vent n'évoqueront pas chez le sujet les mêmes

images et n'induiront pas la même dynamique de mouvement.5. Déterminer où l'image doit être située : à l'extérieur du corps ou dans le

corps .Ceci dépendra des analyses et des choix effectués aux étapes 1 et 2. En début

d'apprentissage l'image des vagues permet de travailler de façon assez globale les

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suspensions, tombés, rattrapés. Mais imaginer que des petits ballons se gonflent entre lesvertèbres entraîne un travail subtil et précis plus approprié à des experts qu'à des débutants.

6. Préciser la direction souhaitée pour la circulation d'énergie dans l'imageL'énergie doit-elle être projetée du centre du corps puis à travers les membres vers la

périphérie, vers un point particulier de l'espace ?7. Choisir et adapter l'adapter l'image en fonction du sujet et de son niveau

8. Vérifier que cette image n'a pas de connotation négative pour le sujetEn conclusion, dans les habiletés motrices morphocinétique où le sujet doit mettre en

oeuvre une motricité abstraite, le guidage représentatif de l’action au plan des instructionsverbales prend une importance toute particulière. Pour permettre au sujet de satisfaire auxdemandes de la tâche, il est nécessaire d'adapter les consignes qu'on lui donne à la nature decette tâche, analysable en termes de coordination ou de contrôle. Une formulation analogiquede cette consigne semble bien adaptée aux tâches de contrôle dans la mesure où elle constitueen quelque sorte un aménagement symbolique du milieu, qui rend alors plus concrète lamotricité à mettre en jeu. Mais elle demande de la part de l'enseignant de danse non seulementune connaissance approfondie du mouvement mais aussi une grande sensibilité par rapport aumonde qui l'entoure. En danse, trouver une " bonne" consigne imagée implique unedimension poétique qui va bien au-delà des aspects scientifiques que nous avons évoqués etque seule cette sensibilité permet. L'intitulé de l'article d'Hanrahan (1994) " In search of agood dance image " prend ici toute sa signification.

IV. L’improvisationImproviser, c’est être dans l’ici et le maintenant, faire dans l’ici et le maintenant, seul

ou à plusieurs, sans rien vouloir ni prévoir à l’avance, sans prendre le temps de se représenterfaute de ne plus être dans la présence, mais ce n’est sans doute pas faire au hasard. Il n’y a pasdans l’improvisation de résultat fixé à l’avance à atteindre qui puisse organiser le déroulementdes actions, pas d’attente, pas d‘ordre pré-établi : improviser est une forme particulière d’êtreau monde, mais qui implique néanmoins une intention : c’est être dans l’accueil de ce quiémerge, mais en étant libre de ses choix de réponse.

Les tâches d’improvisation sont donc différentes des tâches de rappel. La motricité dudanseur y conserve certes des caractéristiques principalement abstraites, mais l’espace duproblème n’est pas le même : la production motrice du sujet se fait sous pression temporellecontinue et dans la plus grande incertitude. Ceci n’empêche pas que l’improvisation puisseêtre analysée d’un point de vue scientifique : comment les liens entre perception etaction s’établissent-ils et fonctionnent-ils ? Comment les processus attentionnels, mnésiques,moteurs nécessaires à toute action sont-ils impliqués? La réponse est surprenante : il n’y aquasiment pas de travaux scientifiques relatifs à la motricité du danseur dans l’improvisation,activité par essence humaine. On doit à Vallet (2001) la première thèse à ce sujet. Elle écrit,sur la base des travaux de Pressing (1998) « L’improvisateur doit opérer un codage sensorielet perceptuel en temps réel, procéder à une allocation parfaite de l’attention, interpréter lesévénements, prendre des décisions, faire des prédictions (des actions des autres), stocker enmémoire et rappeler, corriger des erreurs, contrôler ses mouvements et intégrer de manièreoptimale et ‘sans couture » tous ces éléments dans un ensemble d’états qui reflètent à la foisla perspective personnelle de l’improvisateur sur l’organisation de la performance et unecapacité à atteindre le public » (Vallet, 2001, p. 248).

Dans un article déjà ancien, Serre (1988) avait montré que la plupart du temps lesdanseurs confrontés à ce type de tâches dans un cours utilisaient les éléments les plus récentsqu’ils avaient travaillés en les combinant de façon. Pour l’auteur, quand le projet

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d’improvisation est déclenché, les actions du danseur sont finalisées par rapport au butdemandé, par exemple improviser sur le thème « locomotion » en étant à l’écoute despartenaires. Le danseur doit donc être attentif à ce que font ses partenaires, traiter desinformations temporelles, spatiales et événementielles, la production des formes motricespouvant alors être prise en charge par le recours à des coordinations plus ou moinsautomatisées. Les données de cette expérience sont en fait fort incomplètes, l’effectif dessujets étant très faible et l’exploitation statistique des résultats n’ayant pas été faite. Il est donchasardeux d’en tirer des conclusions.

Dans un autre cadre d’analyse, Manteau et al. (2001) ont cherché à clarifier lesprocessus cognitifs mis en jeu en situation d’improvisation collective. L'étude a été conduiteen référence au cadre sémiologique d'analyse du cours d'action qui prend en compte le pointde vue intrinsèque de l’acteur (Theureau, 1992, 2000). Deux niveaux d'organisationintrinsèques de l'activité ont été considérés : l'organisation globale (structures significatives)et l'organisation locale (signes sous-jacents et leurs composantes) en relation avec lescontraintes extrinsèques. L'analyse globale vise à mettre en évidence les structures typiquesdu découpage séquentiel de l'improvisation, et les préoccupations globales des danseurs auxdifférents moments. L'analyse locale vise à caractériser plus finement l'évolution del'engagement, l'activité perceptive et exploratoire, et les connaissances mobilisées par lesdanseurs.

L’étude a consisté à réaliser puis à confronter individuellement six danseurs àl’enregistrement vidéo d’une séquence d’improvisation collective vécue préalablement. Ilsétaient incités à expliciter leurs actions, communications, focalisations, interprétations etsentiments au cours de la situation. Trois axes d’analyse des données ont été retenus : 1°)l’analyse des activités individuelles laissant apparaître des organisations significatives pourl’acteur, 2°) la coordination des activités individuelles montrant des décalages entre lesintentions des danseurs en relation, 3°) la production de formes collectives manifestant uneforme d’organisation dépassant celle des activités individuelles.

Du point de vue de l'analyse des activités individuelles, les premiers résultats mettenten évidence des organisations-types d'actions, significatives pour l'acteur, telles que desphases "d'attente", de "recherche de contact", "d’ouverture" et de "fermeture" auxinformations visuelles et auditives de la situation.

Du point de vue de la coordination des activités individuelles, on observe desdécalages entre les intentions, les attentes des danseurs en relation : on peut parler de« rendez-vous manqués » provenant de la difficulté à établir un mode de communication dansla furtivité de la relation.

Du point de vue de la production collective, les danseurs font progressivementapparaître des formes significatives identifiables pour un observateur extérieur. Ces formesémergent notamment de redondances, de récurrences ou d'échos entre les activitésindividuelles. Elles manifestent une forme d'organisation dépassant celle des activitésindividuelles, qui est parfois pressentie, mais qui n'est pas nécessairement perçue commesignificative dans le cours de l'action (on note des décalages entre les perceptions del'improvisation collective des danseurs, en tant qu'acteur et en tant que spectateur, lors desentretiens).

Plusieurs axes de questionnement peuvent être alors posés : ce qui fait signe pourchaque danseur, ce qui l’incite à rentrer en relation avec un autre, ses attentes, le mode decommunication qu’il instaure, les conditions des relations réussies et des "rendez-vousmanqués", et les décalages d'interprétations entre danseurs.

Pour nous, ce type de travaux est réellement d’un grand intérêt car il replacel’improvisation dans un cadre phénoménologique. Mais il ne dit rien des processus du

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contrôle moteur qui pourraient mettre en évidence des aspects comportementaux nonaccessibles par la seule étude des verbalisations du sujet. C’est dans ce sens que vont d’autresrecherches actuelles.

Minvielle, Audiffren et Ripoll (2001) se sont intéressés à l’influence de l’imageriementale sur les processus d’enchaînement et d’improvisation individuelle chez des danseursdébutants. A partir des résultats obtenus sur l’analyse de stratégies d’apprentissage en vue durappel de mots, ils font l’hypothèse que l’imagerie faciliterait la capacité à réutiliser deséléments mémorisés en situation d’improvisation. Cette facilitation pourrait s’observer à 3niveaux :

- la fluidité de l’enchaînement (absence de ruptures ou ruptures peu fréquentes ettrès courtes)

- la richesse du répertoire d’éléments et des combinaisons d’éléments

- la nouveauté des liaisons produitesLes résultats obtenus montrent bien un effet positif de l’activité d’imagerie. Les

auteurs en concluent que la capacité à enchaîner des pas de danse sous une forme improviséene dépendrait pas de la quantité du vocabulaire possible d’éléments à enchaîner mais de lacapacité à combiner ces éléments entre eux. Cette dernière dépendrait elle-même desconditions d’apprentissage à enchaîner qui faciliteraient d’une part la rapidité de mise enrelation des éléments, d’autre part la variété de la production des groupements d’éléments etenfin la création de nouvelles associations d’éléments.

Vallet (2001) a cherché à observer les performances mnésiques et attentionnelles desujets familiarisés avec l’improvisation et de sujets totalement novices impliqués dans dessituations leur permettant de générer librement des actions, ainsi que l’influence d’unepratique de l’improvisation sur ces performances. Elle utilise aussi un paradigme de doubletâche pour apprécier les performances dans des tâches où le sujet génère ses actions librement(actions endogénérées) par rapport au même type d’actions dans lesquelles des contraintessont imposées (actions exogénéres), chez des experts danseurs, musiciens et sportifs. Lestâches motrices utilisées sont certes plus simples que celles que l’on rencontre dans une réelleimprovisation, mais elles permettent néanmoins de placer les sujets dans des situationscomparables au niveau des processus impliqués.

Deux points sont particulièrement à noter dans les résultats concernant :- les capacités mnésiques mises en jeu dans l’improvisation. Si l’on compare les

performances mnésiques en cours d’action aux performances mnésiques des actions, onconstate un effet de l’improvisation : une formation intense mais sur un laps de temps court àl’improvisation chez des sujets naïfs tend à avoir un effet positif sur la mémorisation en coursd’actions quand celles-ci sont générées par le sujet lui-même, ce qui n’est pas le cas si ellessont imposées. La mémoire en action semble donc bénéficier de la pratique del’improvisation.

- il existerait dans l’improvisation un conflit entre la créativité et la contraintetemporelle des réponses dépendant de la nature prescriptive ou non de la consigne : lesimprovisateurs experts sont capables de maintenir une vitesse de réponse élevée au détrimentcependant de la créativité dans leurs réponses.

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D’autres études sont en cours (Berthoz et al., 2001) concernant la génération detrajectoires locomotrices. Que se passe-t-il par exemple quand on demande à deux danseursde se déplacer sur deux trajectoires circulaires identiques et parallèles en étant à l’écoutespatiale et temporelle l’un de l’autre ? Ceci leur impose de prendre en compte un certainnombre d'indices sur leur propre position dans un espace donné et sur les positions relativesde l’autre.

Dans une perspective psycho-cognitive, pour ajuster un trajet locomoteur à celui departenaires que l’on veut éviter, rencontrer ou suivre, il faut se représenter son déplacementdans l'environnement selon une perspective personnelle (de type route, impliquant unréférentiel égocentré) ou une perspective aérienne (de type cartographique ou allocentrée). Lanotion de référentiels relatifs propose une approche alternative. La chorégraphe israélienneEshkol et le comportementaliste Golani (1992) ont décrit, à l'aide d'un ensemble de signes, lesmouvements des danseurs et celui d’animaux dans trois référentiels différents et simultanés.Le premier est appelé "référentiel corporel", le deuxième "référentiel environnemental" et ledernier "référentiel relatif au partenaire", c’est à dire le référentiel dans lequel lesmouvements des danseurs ou des animaux sont utilisés l'un par rapport à l'autre. De ce fait, onpeut supposer que la présence d'un second sujet se déplaçant dans l'environnement du premierest de nature à modifier les caractéristiques de sa propre trajectoire. La question desréférentiels dans lesquels sont codés ces mouvements demeure ouverte à l'heure actuelle maisdes recherches ont donc été entreprises dans ce sens

Enfin, d’autres recherches mériteraient d’être entreprises concernant le contrôlemoteur dans l’improvisation, mais elles relèvent d’un autre cadre d’analyse : celui desthéories dynamiques du contrôle moteur. On y trouve quatre notions essentielles :

- le système est contraint et limité par les propriétés de l’organisme du sujet, de cellede l’environnement et de celles de la tâche ;

- les systèmes vivants sont d’une telle complexité qu’ils développent spontanémentune auto-organisation. Cette réduction de complexité est permise par un nombre réduit dedescripteurs macroscopiques spécifiques ;

- des patrons ou coordinations de base préférentiels émergent parmi l’ensemble despossibles (la coordination motrice peut être résumée par un petit nombre de variables ditescollectives ou essentielles (paramètre d’ordre) qui définissent qualitativement la coordinationpréférentielle) ;

- la stabilité : les patrons préférentiels sont stables. La perte de stabilité est l’indiced’un système en transition sous l’effet d’une contrainte (dite paramètre de contrôle) quil’oblige à se modifier pour trouver un autre état stable.

On peut penser que dans la situation d’improvisation ce sont bien des coordinations debase préférentielles qui émergent, fruit de la relation entre les improvisateurs. Il faudrait enidentifier les différents paramètres responsables. Mais les recherches sur les coordinationscollectives d’actions en ce domaine sont encore très peu nombreuses et il n’en existe pas endanse.

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ConclusionLe but de cet article était de faire le point sur les recherches entreprises sur la motricité

de danseur dans le domaine de la psychologie cognitive et du développement en abordant cequi relève des processus cognitifs et des processus sensori-moteurs, tant du point de vue ducontrôle que de l’apprentissage dans des tâches de rappel moteur et d’improvisation. Certes ily a de nombreux résultats dans certains domaines, notamment dans celui du contrôlereprésentatif de la performance, que ce soit chez les adultes et chez les enfants.

Mais il y a aussi beaucoup de zones d’ombre : le décours temporel de l’apprentissage,ce qui change réellement avec cet apprentissage du point de vue moteur, la nature desconsignes à donner aux sujets pour les faire progresser, et surtout tout ce qui concernel’improvisation. Force est de constater qu’il n’y a que peu d’études chez les adultes et pasd’étude développementale concernant ces quatre points.

Devant la complexité du problème, la nécessité de mener des recherches spécifiquesen ce domaine nous paraît impérative, d'autant plus que la motricité du danseur a été en faitpeu étudiée en tant que telle par les chercheurs. Mais ces travaux ne pourront s'effectuer,selon nous, sans la collaboration des professionnels de la danse.

Marielle CADOPIUPRES EA 2991

UFR STAPS, Montpellier

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IX.Étudier l’apprentissage de la danse.Ou passer du laboratoire à la classe

IntroductionDes siècles durant, l’enseignement tout comme la discipline de la danse relevaient de

l’art. Expliquer, comprendre, clarifier, démythifier l’apprentissage ou l’enseignement, nefaisait pas bon ménage dans le contexte artistique. Ni dans la pensée, ni dans la pratique.Enseigner la danse, c’était suivre diligemment la tradition des grands maîtres, sans laquestionner.

Il n’aura fallu qu’un demi-siècle pour que cette situation se retrouve complètement etirrémédiablement changée. De l’apprentissage à l’enseignement, tout est maintenant objet dequestionnement et de recherche de réponses, aussitôt remises en doute. La présence de ladanse dans les universités, doublée de la démocratisation croissante de son enseignement, enplus du renouvellement constant des besoins de la formation chorégraphique ne sont pas desraisons étrangères à la recherche d’assises scientifiques valides pour la pratique pédagogiquecontemporaine.

Cet article survole la littérature scientifique de langue anglaise parue au cours desquinze dernières années sur le thème de l’apprentissage de la danse. Ce faisant, il donnera unaperçu de l’évolution des thèmes et des méthodologies de recherche mises de l’avant, en vuedu développement des nouvelles connaissances sur cette question. On constatera que larecherche sur l’apprentissage de la danse s’apprête à outrepasser son ancrage initial dans lechamp de l’apprentissage et du contrôle moteur, pour emprunter d’autres voies d’études larapprochant davantage de sa nature artistique, culturelle et esthétique

II. Premier point d’ancrage : l’apprentissage moteurApprendre à danser est-il plus difficile que nécessaire ? La façon traditionnelle

d’enseigner la danse est-elle vraiment la plus efficace ? Voilà des questions types à la sourcedes premières études sur l’apprentissage de la danse. Par les thèmes abordés, autant que parles méthodes de recherche mises de l’avant, ces études reflètent leur ancrage en apprentissagemoteur. Largement développé en éducation physique et sportive ce champ d’études, àl’origine du moins, portait essentiellement sur l’acquisition des habiletés motrices, de mêmeque sur l’examen des expériences psychomotrices pouvant y contribuer ou y nuire.

Plusieurs articles ou chapitres de livre ont fait état des connaissances déjà développéessur ces questions par les spécialistes de l’éducation physique et sportive, et ont encouragél’implantation dans la classe de danse. Dans un article du « Kinesiology and Medecine forDance », Lynette Overby de l’Université Howard (1991-1992) par exemple, explique lasignification de connaissances disponibles sur les thèmes de la connaissance des résultats, dumodelage, et de l’imagerie mentale dans la classe de technique danse, puis en dégage desimplications pratiques pour les enseignants. De la même manière, Margaret Skrinar (1988)d’une part, et le duo de Donna Krasnow et de Steven Chatfield (1996) d’autre part, ont faitétat d’études menées en classes d’éducation physique et sportive, mais aussi d’études menéesen classes de danse sur les grands thèmes de l’alignement corporel, de la connaissance desrésultats, du transfert de la formation, et en encouragent le développement pour le champ de ladanse. Skrinar (1988) en particulier, attire l’attention sur la complexité des mouvements et la

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longueur des séquences à mémoriser comme des caractéristiques justifiant le bien fondé demener des études propres à l’apprentissage de la danse. Sans prétendre à l’exhaustivité, voiciregroupés par grands thèmes, quelques-unes de ces études.

- La connaissance des résultats.Thème de décades d’études menées dans le cadre de l’éducation physique et sportive,

la connaissance des résultats réfère au « feedback » ou plus précisément, à l’informationdonnée à l’élève sur son exécution, de manière à ce qu’il puisse en tenir compte dans sesexécutions subséquentes. Bien que l’apprentissage de la danse, tout comme celui des habiletéssportives, repose en grande partie sur la répétition, tous les chercheurs reconnaissent lasupériorité du feedback sur la répétition, comme un facteur d’apprentissage (Krasnow etChatfield, 1996). Nombre d’études ont aussi démontré que l’information véhiculée avaitavantage à porter autant sur ce que le mouvement devrait être que sur les succès et insuccès del’élève.

Dans le cas particulier de la danse, une équipe de l’Université du Massachusetts(Clarkson, James, Wattins, et Foley, 1986) a documenté l’effet du feedback amplifié(Augmented Feedback) sur la pronation du pied dans les exercices à la barre. Un premiertravail à base d’explication du placement correct, et de corrections avec miroirs et indicesverbaux ayant eu lieu, un système a été placé aux pieds des élèves, pour qu’un signal sonoresoit émis à chaque fois qu’ils roulaient le pied vers l’intérieur. Trois expériences, avec groupecontrôle, ont été menées pour en vérifier l’effet. La première auprès de dix novices, laseconde auprès de huit élèves ayant des problèmes chroniques de pronation du pied, et enfinla dernière menée en classe de danse durant toute la barre auprès de quatre élèves souffrantaussi des problèmes chroniques de pronation du pied. Dans toutes les expériences, les élèvesdes groupes expérimentaux ont enregistré des résultats significativement supérieurs. Leschercheurs ont conclu à l’efficacité du feedback amplifié pour faciliter l’apprentissage initialdu placement du pied dans le travail à la barre auprès de l’élève débutant, autant qu’auprès del’élève expérimenté qui aurait développé un placement fautif. Le feedback amplifié faciliteraitle maintien du placement correct même dans le cadre de la classe technique.

Lynette Overby (1991-1992) fait aussi mention d’une étude sur ce même thèmequ’elle a réalisée auprès de patineurs artistiques pour améliorer l’interprétation artistique deleur routine. Un travail en studio de danse où les athlètes ont été invités à se centrer surl’utilisation du regard, sur la projection et sur l’utilisation des bras a été réalisé, et desenregistrements vidéo de leurs performances ont servi la fonction de feedback. Les jugementsportés sur la performance avant et après l’entraînement ont révélé une améliorationsignificative de la composante artistique des notes (scores) des plus jeunes patineurs.

- La mémorisationLa rétention de séquences de mouvements est en danse, aussi centrale à

l’apprentissage qu’à la performance sur scène. La charge de mouvements et leur complexité yjustifie la pratique d’un encodage souvent réalisé par le biais de nominations verbales ou parl’établissement de relations entre les mouvements. La capacité de rappel de la séquenceapprise serait liée au processus d’encodage (Puretz, 1986). Elle a été l’objet de plusieursétudes dont les suivantes.

Une étude, menée par une équipe canadienne de l’université Mc Master (Starkes,Deakin, Lindley and Crisp, 1987) a comparé la capacité de rétention de deux séquences par dejeunes danseurs novices et d’expérience. La première séquence comportait huit mouvementsde ballet chorégraphiés, la seconde, huit mouvements de ballet établis au hasard. Dans les

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deux cas, l’apprentissage a été réalisé à partir d’un enregistrement vidéo, sans musique, enfaisait appel tantôt à la reproduction physique, tantôt à la mémorisation verbale. Le rappelmoteur a été capté sur vidéo, et la dictée du rappel verbal noté par l’expérimentateur. Établispar analyse de variance, les résultats ont démontré une capacité supérieure de rétention pourles danseurs expérimentés, dans le cas de la séquence chorégraphiée. Les deux groupes ne sesont pas démarqués selon leur recours à la reproduction physique ou à la mémorisationverbale au moment de l’apprentissage. Bien qu’ils aient tous deux manifesté un piètre rappelde la séquence établie au hasard, les résultats appuyaient un meilleur rappel verbal pour cetteséquence. Dans tous les cas, le dernier mouvement était le plus souvent oublié. Les auteursconcluent que le niveau d’habileté plus que l’expérience influencerait la capacité de rappel, etque la piètre performance des deux groupes pour le rappel de la séquence établie au hasardappuierait l’influence de la structuration chorégraphique sur ce dernier. Dans une secondeexpérience menée seulement auprès des danseurs expérimentés, à partir d’une séquence dehuit mouvements chorégraphiée avec musique, les résultats ont démontré qu’en fournissantdes indices de relation aux mouvements la musique contribuait au rappel.

L’influence de la répétition physique ou mentale, et du temps (une demi-heure, deuxjours, une semaine) sur le rappel d’une séquence apprise a été l’objet d’une autre étuderéalisée par Puretz à l’Université d’État de New York (1986). Le rappel a été établi encomparant l’enregistrement vidéo de la séquence mémorisée, à celui de l’apprentissage initial.Selon les résultats, la répétition mentale serait tout aussi efficace que la répétition physiquepour le rappel d’une séquence de mouvement, ce qui entraîne des implications importantespour l’utilisation du temps de classe. De plus, il n’y aurait pas de perte significative dans laprécision du mouvement, même après une semaine sans pratique. La description de l’étudereste vague cependant quant à la mesure de la précision.

Comme on le verra plus tard, d’autres études ont abordé la mémorisation de séquencede mouvements dansés, en empruntant d’autres voies méthodologiques.

- TransfertQuelques études ont abordé le transfert des apprentissages en danse, sous les angles du

transfert bi-latéral, c’est-à-dire, celui de l’exécution d’un mouvement d’un côté à l’autre ducorps, ainsi que sous l’angle de l’utilisation du transfert du poids dans les composantes de laclasse technique. Puretz (1983), par exemple, a voulu vérifier la croyance voulant quel’apprentissage d’une séquence du côté préféré du corps soit automatiquement transféré del’autre côté, sans pratique. L’étude a été développée de manière à examiner l’influence duniveau d’habileté (novices; expérimentés), de la direction du transfert (préféré vers non-préféré ; non-préféré vers préféré) enfin de la pratique (un seul essai; plusieurs). L’expériencea été faite auprès deux groupes de danseurs étudiants universitaires, l’un novice, l’autreexpérimenté, à partir de l’apprentissage de deux séquences de huit temps, préalablementcaptées sur vidéo. La comparaison de l’enregistrement vidéo de l’apprentissage initial de laséquence du côté préféré, et du côté non-préféré, à celui de l’exécution de l’autre côté, arévélé un meilleur transfert allant du côté non-préféré vers le préféré, contredisant lacroyance, autant chez les novices que chez les danseurs expérimentés.

De leur côté, Gray et Skrinar (1984) ont examiné comment l’utilisation du centre degravité était transférée d’une partie à l’autre de la classe, depuis le réchauffement jusqu’à lapartie dansante, dans des classes de Ballet et de danse moderne de niveaux débutant,intermédiaire et avancé. À cette fin, la fréquence d’utilisation de six bases de support (trèsétroite, étroite, moyenne, large, ancrée au sol, et aucune) a été observée au cours dudéroulement d’un total de six classes. Les résultats ont révélé une grande disproportion desbases de support pendant le réchauffement entre les classes de Ballet et de Moderne, et unegrande similarité pendant la partie dansante. Les auteurs concluent à un besoin de pousser

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l’étude du phénomène de manière à vérifier si un transfert négatif pouvait résulter d’une telleutilisation du poids dans les diverses parties de la classe.

- ImagerieDe tous les thèmes abordés en apprentissage de la danse, l’imagerie mentale est celui

pour lequel la littérature est la plus considérable. Déjà, en 1937 Mabel Todd avait fait allusionà des lignes de mouvements pouvant être gage d’efficacité motrice. Toutefois, l’ouvrage« Human Movement Potential : Its ideokinesis Facilitation » publié par Lulu Sweigard en1974, est sans doute celui qui a été le plus influent de l’utilisation de l’image comme supportou initiateur de mouvement dans l’enseignement de la danse. L’assertion voulant qu’uneimage correcte du mouvement mette le cerveau en meilleure position pour déterminer lesgroupes musculaires à activer et selon quel degré, est à la base de l’ouvrage (Krasnow andChatfield , 1996).

Plusieurs articles à portée pédagogique ont été publiés sur ce thème dans despériodiques professionnels. À titre d’exemples mentionnons The Use of Imagery inChildren’s Dance – Making it Work « par Teresa Purcell (1990), « Enhancement ofAlignment Trough Imagery « par Sandra Minton, ou encore « Creating Dance Imagery :Basic Principles for Teachers « par Christine Hanrahan (1995).

L’importance de l’imagerie mentale dans toutes les sphères de la pratique pédagogiquede la danse a incité Lynette Overby (1990) à en faire un examen systématique afin d’en mieuxcomprendre les multiples utilisations comme outil pédagogique, et d’en observer lesmanifestations en situation réelles d’enseignement. Deux outils de recherche ont étédéveloppés et validés dans ces buts. Le premier de type questionnaire, intitulé « Survey ofDance Teachers, SDT », avait pour but de recueillir la réflexion des enseignants sur ce thème.Le second de type instrument d’observation intitulé « Systematic Observation Instrument,SOI » avait pour but de décrire l’utilisation de l’image au cours de l’enseignement. Nousn’avons pas répertorié d’études descriptives de la pratique reposant sur ces deux instrumentsde recherche. Néanmoins, ces outils ont contribué à la définition de concepts tels quel’imagerie visuelle, l’imagerie kinesthésique, l’imagerie directe et l’imagerie indirecte.

Alors que l’utilisation de l’imagerie mentale est largement répandue en enseignementde la danse, peu d’études en ont systématiquement évalué les effets sur la performance oul’alignement. Comparer les effets de l’ « Ideokinesis » et de la relaxation sur l’apprentissaged’habiletés techniques simples et d’enchaînements, a été l’objet de la thèse de maîtrise deKaren Anne Studd en 1983. À cet effet, l’évaluation des exécutions pré et postexpérimentation a été confiée à des juges, qui ont travaillé à partir d’enregistrements vidéo.Les résultats ont démontré l’efficacité supérieure de l’ « Ideokinesis » pour les mouvementstechniques simples seulement. Un peu plus tard, dans le cadre de sa dissertation de doctorat,Lynette Overby (1986) s’est livrée à l’examen des relations existant entre l’expérience endanse, l’habileté à utiliser l’image et la conscience corporelle. À cet effet, 20 danseurs noviceset 20 danseurs d’expérience ont été invités à réaliser deux tâches faisant appel à la consciencecorporelle, et à compléter quatre questionnaires portant sur différentes facettes de l’imageriementale. Les mesures soumises à une MANOVA 2x 2 x 2 ont permis de démarquer lesdanseurs novices sous trois des quatre mesures d’imagerie. L’ensemble des résultats a appuyél’existence de relations entre l’expérience en danse, l’habileté à utiliser l’image et laconscience corporelle.

Largement appuyés sur les travaux d’Irene Dowes (1981) ceux de Christine Hanrahande l’Université d’Alberta (1990, 1994, 1995) ont abordé diverses facettes de l’utilisation del’imagerie mentale dans l’apprentissage de la danse. Afin d’en évaluer l’effet facilitant aucours de la performance d’un battement, d’un retiré, et d’une arabesque, elle a mené une étude

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auprès de 65 étudiants répartis en trois groupes : un groupe contrôle, un groupe soumis à uneapproche par relaxation, et un groupe soumis à l’utilisation d’images. Plus spécifiquement,l’effet de deux types d’images a été examiné. L’un comportant un flot d’énergie dirigé dansdes directions données, l’autre plus global n’indiquant aucune direction. Toutes les exécutionsont été captées sur vidéo, le danseur s’exécutant devant un mur quadrillé. L’angle d’amplitudedes jambes, mesuré directement sur l’image arrêtée apparaissant à l’écran, a servi de mesurede performance. Les résultats ont révélé l’efficacité supérieure d’un seul type d’image, pourun seul mouvement. Soit l’image directionnelle, dans le cas du battement. Bien quel’ensemble des résultats allait dans le sens de l’effet facilitant de l’image dans l’exécution, ilsmettaient aussi en lumière l’importance de l’influence des caractéristiques de la tâche, et de laqualité de l’image. Cette étude a été mise à contribution dans l’élaboration de principes decréation d’images facilitant l’exécution de mouvements techniques. Au nombre de huit, ilssont les suivants : 1) identifier les parties du corps à mettre en mouvement et dans quellesdirections ; 2) identifier le but de l’exercice ; 3) identifier les qualités de mouvementsdésirées ; 4) trouver une forme existante d’énergie correspondant aux qualités désirées ; 5)déterminer où l’image sera localisée dans le corps ; 6) déterminer les directions désirées duflot d’énergie ; 7) créer une image répondant aux éléments précédents ; 8) s’assurer quel’image n’a pas de connotations négatives ou d’effets indésirables pour l’élève.

Plus récemment, une équipe de chercheurs, appartenant à plusieurs universitésaméricaines et canadiennes (Krasnow, Chatfield, Starr, Jensen et Dufek, 1997), a examinél’effet combiné de l’imagerie mentale et du conditionnement physique, sur la performance etl’alignement. Trois buts étaient poursuivis : 1) développer et valider des outils de mesure de laperformance de mouvements dansés, et de l’alignement ; 2) évaluer l’effet d’unconditionnement physique à base d’imagerie, sur la performance ; 3) évaluer l’effet d’unconditionnement physique à base d’imagerie sur l’alignement. La méthodologie de recherchecomportait quatre composantes liées au développement des méthodes d’entraînement, auchoix et regroupement des sujets, à l’élaboration des protocoles de mesure et au traitementdes données. Vingt étudiants de niveau universitaire ont été répartis en quatre groupes :imagerie, conditionnement physique, imagerie et conditionnement physique, contrôle. Tousont exécuté une séquence de danse moderne apprise à partir d’un enregistrement vidéo, demême qu’un grand plié en première position. Ce dernier a été exécuté une fois isolément sansmusique, puis, une autre fois avec musique après un mouvement excentrique du corps, defaçon à reproduire un réel environnement dansant. Les performances de tous ont été évaluéesavant et après la période d’expérimentation de huit semaines, par trois juges entraînés àl’utilisation de deux instruments de mesure spécialement élaborés et validés pour l’étude. Lamesure d’évaluation de la compétence à performer (Performance Competence EvaluationMeasure), et la mesure de l’alignement dynamique (Dynamic Alignment Measure). Lesrésultats établis par analyse de variance n’ont pas démontré de différences significatives entreles groupes. Ni pour l’alignement, ni pour la performance. Cependant tous les sujets saufdeux, se sont améliorés au cours de l’entraînement. Faits intéressants, des gains significatifsdans la mesure de la performance ne se sont pas toujours accompagnés de gains dans lamesure de l’alignement. Également, la grande variabilité de la mesure de l’alignement ensituation dynamique tend à démontrer l’avantage du recours à ce type de mesure dans le cadred’études de transfert de la formation à la performance. Enfin, les deux instruments de mesuredécoulant de cette étude représentent des contributions méthodologiques dignes de mention.

La description précédente fait état d’études positivistes menées en danse en s’appuyantsur les méthodologies de recherche relevant principalement de l’apprentissage moteur. Detype expérimental, elles ont tenté de documenter des liens existant entre certaines variables, etdes mesures quantitatives de l’efficacité motrice ou du rappel des mouvements. Dansl’ensemble, il s’agit d’efforts isolés, de rigueur inégale, ne permettant pas de tirer deconclusions d’ensemble. La mesure du mouvement dansé ressort comme la difficulté majeure

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rencontrée par les chercheurs. Malgré tout, ces efforts ont démontré le bien fondé de menerdes études spécifiques à la danse. Des principes d’apprentissage issus d’études menées à partird’activités physiques et sportives ne se sont pas avérés justes dans le cas de la danse. Il estaussi important de noter que seul l’apprentissage technique et l’enchaînement ont été abordésdans le cadre de ces études, laissant pour compte, l’improvisation, la composition, etl’appréciation, entre autres. Mais la recherche ne s’arrête pas là. La littérature fait état d’autrestypes d’études.

III. L’observation de l’apprentissage de la danseDes études descriptives des stratégies d’élèves au cours de l’apprentissage d’une

variété de tâches sont de plus en plus présentes dans le paysage de la recherche enapprentissage de la danse. Elles viennent, en quelque sorte, combler le peu de connaissancesdisponibles sur les manières naturelles des apprenants de gérer et de réguler leurs propresapprentissages d’habiletés motrices en l’absence d’un guide externe (Bouffard et Dunn,1993). Plusieurs chercheurs croient pourtant que ce que fait l’élève au cours del’apprentissage est déterminant de ses résultats.

Ces études se démarquent des études expérimentales de plusieurs façons. Aucuneintention de prouver les anime. Elles ne mettent en jeu aucun traitement ou méthodeexpérimentale. Elles se contentent de décrire les stratégies auxquelles les élèves ontnaturellement recours pour accomplir les tâches qui leur sont confiées. Les méthodes dedescription qualitatives se substituent aux mesures quantitatives. Les données sont recueilliespar le biais d’entrevues, d’entrevues ciblées (focused interview), d’observation, de journauxd’élèves ou de chercheurs, lesquelles sont analysées de façon inductive. Ces études, enfin,vont au-delà des apprentissages purement moteurs pour en aborder d’autres de nature plusartistique et esthétique, appartenant à la composition, l’improvisation et l’appréciationchorégraphique. Certaines enfin, quittent le laboratoire pour se dérouler dans le contextenaturel de la classe de danse.

Dans cette veine, est une étude menée par une équipe de l’université d’Idaho, pourdécrire les stratégies déployées par des étudiants de niveau universitaire pour apprendre desenchaînements chorégraphiques de différents niveaux de difficulté (Hernandez, Walker, Goc-Karp, Guilfoyle et Friesen, 1996). L’étude a pris place dans le cadre d’un cours de Jazzcomportant six rencontres de 50 minutes réparties sur trois semaines. Deux enchaînements,l’un facile et l’autre difficile, ont été chorégraphiées par des experts, puis enseignés à septdanseurs de niveau débutant, intermédiaire, et avancé. Les données furent recueillies à partird’interviews, de journaux de bord et d’enregistrement vidéo des performances. Plusspécifiquement, les interviews ont été ciblées sur la perception des apprentissages réalisés à lafin de chaque semaine. Trois grandes catégories ont émergé de l’analyse inductive desdonnées : 1) connecter des habiletés motrices pour former des phrases ; 2) connecter desphrases pour former des séquences de danse ; 3) l’influence des pairs sur ces stratégies. Lesstratégies différaient selon les préférences perceptuelles des étudiants et leurs relations avecles pairs. Les débutants ont privilégié des modes visuels et kinesthésiques; les intermédiairesdes modes visuels, kinesthésique et verbal ; tandis que les avancés ont privilégié des modesprincipalement verbaux. Les stratégies augmentaient au gré du degré de difficulté desenchaînements. Les plus courantes ont été : l’observation de l’enseignant, l’observation desoi, l’imitation des mouvements de l’enseignant, révision, filage avec comptes, aide des pairs,et comparaison. Les étudiants sont demeurés fidèles à leurs modes d’apprentissage, autantpour les combinaisons faciles que difficiles. Les chercheurs ont conclu au besoin depoursuivre ce genre d’étude en vue d’une meilleure compréhension des démarchesd’apprentissage propres aux diverses tâches de la danse.

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De leur côté, Marcel Bouffard et John Dunn, (1993) ont examiné les stratégiesd’apprentissage autogéré manifestées par des enfants de six et neuf ans pour mémoriser desséquences de mouvements allant au-delà de leur capacité de mémorisation (supra-memory-span). Celle-ci ayant été préalablement mesurée, elle était estimée à 2.2 pour les enfants de sixans et à 2,86 pour les plus vieux. L’apprentissage d’une séquence différente pour chaquegroupe d’âge a été fait à partir d’un enregistrement vidéo, en prenant soin d’informer lesenfants qu’ils pouvaient prendre autant de temps qu’ils le désiraient, et revoir la vidéo autantde fois qu’ils le jugeaient nécessaire. Enfin, ils étaient invités à exécuter la séquenceseulement s’ils étaient certains d’en avoir mémorisé tous les mouvements, dans le bon ordre.Leur performance était alors captée sur vidéo. Les résultats ont révélé que les enfants de neufans avaient une meilleure capacité de rappel, en dépit de l’ajustement de la séquence à lacapacité de mémorisation. Les enfants de six ans ne semblaient pas pleinement conscients dece qu’ils avaient mémorisé de la séquence. Ayant davantage recours à l’anticipation et à larépétition, les enfants de neuf ans pouvaient mieux évaluer dans quelle mesure ils avaientatteint l’objectif d’apprentissage. Les enfants plus âgés avaient davantage recours au langageparlé pour encoder la séquence, ce qui aurait contribué à leur capacité supérieured’autogestion.

Paulette Côté-Laurence de l’Université Brock en Ontario, s’est livrée à l’examen desstratégies déployées par des élèves en situation de composition. Huit étudiantes de premiercycle universitaire, possédant divers degré d’expérience en danse ont été invitées à composer,en 30 minutes, trois séquences à partir des mêmes sept actions. Chaque séquence composée,de même que le travail d’élaboration ont été captés sur vidéo. Les élèves ont ensuite étéinvitées à commenter sur leurs méthodes de travail, ainsi que sur leurs facilités et difficultés.L’évaluation des compositions reposait sur le concept de flexibilité de Torrance. Elles ont étéanalysées en termes d’action corporelle, de configuration spatiale, de dynamismes et detransition. Les trois compositions de chacune des étudiantes plus expérimentées se sontavérées plus variées entre elles. Toutes les actions y ont été variées et répétées. Pour lesétudiantes moins expérimentées, l’expérience de composition s’est avérée plus difficile d’uneséquence à l’autre. Elles ont même eu l’impression d’être au bout de leurs ressources à la finde la troisième composition. Quant aux plus expérimentées, elles auraient pu continuer àtrouver encore d’autres variantes. Au plan des stratégies, les plus avancées ont procédéglobalement en créant une atmosphère différente pour chaque séquence. Les moinsexpérimentées ont procédé par action, ce qui augmentait la difficulté à créer des transitions.

Dans le cadre d’une communication scientifique présentée à la Conférence Dance andthe Child : International, Fionna Bannon (1997) du Collège universitaire de Scarborough auRoyaume Uni, a déploré l’absence d’études portant sur les apprentissages d’ordre esthétiqueen danse. Longtemps ces apprentissages, autant que l’expérience esthétique elle-même, ont-ilsété ignorés des chercheurs parce que considérés aussi évasifs, qu’insaisissables(Broudy,1972). Pourtant nombre de chercheurs croient que le développement esthétique peutêtre grandement influencé par les mises en contact de l’élève avec l’art. À la lumière destravaux réalisés par Nelson Goodman, Howard Gardner et de nombreux autres chercheurséminents de l’université d’Harvard (1988), dans le cadre du Projet Zero, Bannon a présentéles grandes lignes d’une étude qu’elle envisageait sur les apprentissages d’ordre esthétique endanse, c’est-à-dire ceux permettant à l’élève d’établir une relation à l’œuvre chorégraphique etd’en dégager une signification. Reposant sur une série d’études de cas, l’étude visait à décrirele développement esthétique d’étudiants de premier cycle en danse au cours des troispremières années de leur formation. Des entrevues semi-sructurées, ajoutées au recueil desréactions spontanées déployées en cours de visionnement d’œuvres chorégraphiques (streamof consciousness) étaient les stratégies de recueil de données privilégiées. L’auteur n’a pascaché la difficulté d’utilisation de telles techniques de recueil de données. Elle n’a pas cachénon plus la difficulté d’établir l’éventail de critères esthétiques à prendre en compte dans le

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recueil et l’analyse des données. Bref, cette présentation posait plus de questions qu’ellen’offrait de réponse, mais faisait voir un champ d’étude encore vierge, en instance dedéveloppement pour la danse.

IV. Lorsque l’apprentissage de la danse se fait perceptionAux études précédentes portant sur des apprentissages de la danse observés en

laboratoire, s’en ajoutent d’autres portant sur des apprentissages réalisés dans le contextenaturel de la classe. Le sens d’apprentissage y est très vaste, se rapprochant davantage de laperception que de l’acquisition de savoirs, d’habiletés ou de connaissances. Ces études ont, enquelque sorte, la mission de faire entendre les voix des jeunes d’âge scolaire sur leurexpérience d’apprentissage de la danse. Les travaux de Stinson (1992, 1993, 1997) del’université de la Caroline du Nord à Greensboro, et de quelques autres chercheurs (Koff,1995 ; Sanson, 2001) sont de cette nature. Menées dans le cadre de programmes scolairesd’enseignement de la danse, elles portent sur un grand nombre de classes, s’échelonnentparfois sur plusieurs années, et incluent deux à trois professeurs. Elles s’appuient sur desméthodes de recherche dites « interprétatives », reposant principalement sur l’entrevues semi-structurée ou spontanées, et l’observation participante.

Parmi les thèmes qui ont émergé des études de Stinson, celui de la relation affectiveentre l’enseignant et ses élèves est revenu à plusieurs reprises, comme un facteur critiqued’apprentissages scolaire, y compris ceux de la danse (1992, 1993). Aux dires de plusieursélèves de « High School », la classe de danse serait un endroit spécial où ils expérimententsécurité et liberté. Certains emploient la métaphore de la famille pour décrire le contexteaffectueux qu’ils y retrouvent. La classe de danse serait aussi l’occasion d’apprendre à seconnaître, à connaître les autres, et de découvrir le monde (Stinson,1993). Le plaisir est unautre thème récurrent parmi les significations que décrivent ces jeunes. Depuis l’interactionsociale jusqu’à l’acte de création, en passant par les façons inhabituelles de se mouvoir etl’apprentissage lui-même, le plaisir provient de plusieurs sources. Son opposé, le déplaisir estaussi présent, relié parfois à de veines attentes, à des raisons personnelles, comme la fatigue,l’inconfort physique ou simplement le manque d’attrait ou d’entrain. L’auteur conclut à lagrande complexité des significations que donnent les élèves à leurs classes de danse, etdiscute d’éléments plus fondamentaux qu’elles soulèvent pour l’enseignement de la danse àl’école.

De plus, en collaboration avec Karen Bond de L’Université Temple à Philadelphie(2000-2001), Susan Stinson s’est livrée à une vaste exploration de l’expérience qu’ont lesjeunes de la danse, et des significations qu’ils en retirent. D’inspiration phénoménologique,cette étude se démarque des précédentes par sa portée internationale, et par le nombre de sesparticipants qui excède 600, âgés de 3 à 18 ans. Elle s’appuie sur des données recueillies demultiples façons, empruntant des modes multiples (dessins, vidéo, poèmes, entrevues, chantsetc.). Plusieurs grands thèmes de l’ordre de la compétence, de l’environnement, du niveau deconscience, du concept de soi et enfin de l’innommable, c’est-à-dire, ce qui dépassel’ordinaire quotidien, ont émergé de l’analyse. Seuls les résultats descriptifs de ce dernierthème sont l’objet de l’article. Ils appuient et développent l’idée qu’une expérience de ladanse allant au-delà de l’ordinaire (superordinary), soit partagée par une majorité de jeunesoccidentaux de tous les groupes d’âge. Multidimensionnelle et complexe, cette vision de ladanse englobe autant l’excitation que la tranquillité, autant l’urgence de danser que lacomplète liberté. Chacune des auteurs discute les révélations de l’étude au gré de sa formationet culture réciproque. Adepte des théories critique et féministe de l’éducation, Susan Stinsoncentre sa conclusion autant sur ce que les participants ont ou n’ont pas identifié, et desretombées possibles pour les politiques d’enseignement de la danse à l’école. De formationphénoménologique, Karen Bond oriente la sienne vers le scepticisme qu’engendrent souvent

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les phénomèmes « superordinaires » en éducation, et l’indigence de la formation deséducateurs pour y faire face.

Le sens des pratiques somatiques pour le jeune danseur en formation ressort commeun autre thème d’investigation, appartenant à ce courant de recherche, et sur lequel onretrouve de plus en plus de littérature (Green, 1999). S’appuyant sur les travaux de DonJohnson (1992) et d’Elizabeth Behnke (1990-91) lesquels ont amené le concept d’« autoritécorporelle », et démontré comment le corps est marqué par la culture dans laquelle il vit, JillGreen de L’Université de la Caroline du Nord à Greensboro (1999), entre autres, a menéplusieurs études qualitatives, de tradition « postpositiviste » sur ce thème. L’une d’elles aexaminé comment le corps de jeunes enseignantes de la danse en formation, était socialementmarqué. Trois buts étaient poursuivis : 1) interpréter comment ces jeunes étudiantespercevaient leur corps en relation à la société et le monde de la danse, 2) déterminer si etcomment elles établissaient une relation entre la pratique somatique, la conscience de lamarque sociale sur leur corps et expression créatrice, et 3) comprendre comment la somatiquepeut aider les étudiantes à devenir conscientes d’enjeux reliés au genre et à la constructionsociale du corps. Cinq étudiantes de premier cycle universitaire, de formations diverses, âgéesde 20 à 24 ans, et inscrites à un cours, intégrant approches somatiques et créativité,intitulé « The gendered body in dance education » ont participé à l’étude. Les explorationsmotrices, les exercices somatiques, et les discussions réalisées en classes ont servi d’outilsd’exploration des influences sociales sur le corps. Les données ont été recueillies par le biaisd’interviews individuelles et de groupe, d’observations et d’analyses de documents. Lesrésultats ont confirmé, chez les participants, une expérience antérieure de la danse marquéepar le mythe du corps parfait. L’influence du monde de la danse sur les perceptionscorporelles des participants serait canalisée par trois voies principales : 1) le contexte deformation et les préjugés (basés sur le rapport au corps idéal ) entretenus par les enseignants àl’égard des étudiants; 2) la pression de performer selon des comportements corporelsspécifiques et l’entraînement de corps dociles ; 3) les relations de pouvoirs entre lesprofesseurs et les étudiants. L’auteur discute des aspects paradoxaux des résultats etd’implications pour la formation en danse. Dans un récent article paru dans la « CORDNewsletter », Green (2001) présente l’idée du développement de théories sociales de lasomatique comme retombée directe de ce courant de recherche.

V. L’explicitation de l’apprentissage de la danse par l’observation deson enseignement

La description de l’interaction s’établissant entre professeur et élèves alors qu’ilstravaillent à l’apprentissage de diverses tâches de danse dans le contexte réel de la classe,ressort de plus en plus comme une voie additionnelle de recherche contribuant à lacompréhension de l’apprentissage. De façon générale, les études de ce type tendent à mettreau jour des composantes de la pratique pédagogique implicites ou prises pour acquises. Cefaisant, elles révèlent des phénomènes insoupçonnés ou méconnus, ou encore présentent desphénomènes connus sous un jour nouveau. Ces travaux prennent la forme d’études de cas oude pratique, et combinent souvent plusieurs techniques de recueil de données, dontl’observation participante, l’entrevue semi-structurée et l’analyse de contenu. La descriptionde l’interaction y est détaillée relatant les mots et comportements exacts manifestés par lesacteurs dans le feu de l’action. L’induction d’un même thème à partir de sources de donnéesdifférentes ou la triangulation, y est utilisée comme mécanisme de validation del’interprétation des données.

Weiyun Chen (1999) de l’Université Temple à Philadelphie, par exemple, s’estintéressée au développement de la pensée critique de jeunes enfants, en regard de la danse.Plus particulièrement, elle a examiné comment une enseignante d’expérience a exploité des

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stratégies constructivistes d’enseignement pour solliciter la pensée critique d’enfants dans lacomposition et l’interprétation de leurs propres danses. L’étude s’appuyait sur l’observation etl’enregistrement vidéo de 16 classes dont deux de niveau Maternel, deux de première année etquatre de troisième année, des interviews spontanées et semi-sructurées de l’enseignante, etenfin sur des interviews d’élèves appartenant à chacun des groupes. Trois thèmes ont émergéde l’analyse : 1) Relier les connaissances et idées des enfants au contenu de la leçon demanière à éveiller le désir d’engagement dans l’élaboration d’une danse ; 2) encourager etfaciliter l’invention d’idées et de mouvements ; 3) inviter les enfants à diverses formes demétacognition pour raffiner l’exécution de leur danse. La description détaillée des stratégiesconcrètes mises de l’avant par cette enseignante en regard de ces trois thèmes centraux offreau lecteur autant d’images du possible, dont il peut s’inspirer pour offrir de telles occasionsd’apprentissage dans sa propre pratique.

En faisant l’analyse détaillée de 24 situations d’improvisation issues d’un mêmeprogramme de danse enseigné par deux enseignantes auprès d’élèves débutants du premiercycle du secondaire, l’auteur de cet article, Madeleine lord (2001), de l’Université du Québecà Montréal, a cerné un ensemble d’apprentissages d’ordre procéduraux en jeu dans ledéveloppement de l’habileté à improviser. Deux questions ont guidé le recueil et l’analyse desdonnées : Quels objectifs d’apprentissage les enseignantes ont-elles explicités au cours del’interaction avec les élèves ? Quelles stratégies pédagogiques ont-elles mises de l’avant pouratteindre ces objectifs ? Une observation participante complétée d’un enregistrement vidéodes classes, ainsi que des entrevues menées auprès des deux enseignantes ont permis lerecueil des données. Six catégories d’objectifs assurant les assises de l’habileté à improviseront été mises à jour : 1) apprendre à générer du mouvement spontanément, 2) apprendre à seconcentrer, 3) apprendre à être physiquement alerte, 4) apprendre à prendre la responsabilitédes décisions de mouvement, 5) apprendre à entrer en relation avec les autres en mouvement,6) apprendre à observer le mouvement des autres. Les résultats décrivent aussi comment lesoccasions d’apprendre ont été offertes au cours du déroulement des situationsd’improvisation.

L’intégration des approches dites « somatiques » à l’enseignement des classestechnique est un thème que Sylvie Fortin (1993, 1995) de l’Université du Québec à Montréal,a abordé dans le cadre d’études de cas. Voulant documenter la croyance selon laquelle lesapproches somatiques influencent l’enseignement de la danse, elle a réalisé deux étudesdécrivant la pratique de Glenna Bateson d’une part, et de Martha Eddy d’autre part. Toutesdeux sont reconnues pour leur compétence à enseigner la technique de danse en s’inspirantdes approches somatiques. Sur la base de données recueillies par le biais d’observationparticipante, d’entrevues et d’analyse de contenu, les pratiques ont été décrites sous les anglesdes connaissances possédées par les enseignantes, des principes organisateurs de cesconnaissances pour l’enseignement, de la conception des classes et de la communication destâches en situation concrètes d’enseignement. Ces études ont permis l’amorce dudéveloppement des connaissances sur cette question.

ConclusionÉtudier la danse, c’est apprendre à interpréter, à créer et à apprécier des œuvres

chorégraphiques. L’apprentissage de la danse comme discipline artistique englobe donc unimpressionnant éventail de capacités, d’habiletés et de connaissances toutes et chacune posantdes exigences particulières d’apprentissage et d’enseignement. Cette synthèse des travaux derecherche menée sur le thème de l’apprentissage de la danse, atteste de l’infime partie de cesapprentissages qui a été abordée. Longtemps l’accent a été mis sur la composante technique,toutefois, on constate que l’adhésion au paradigme de recherche qualitatif et

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« postpositiviste » a ouvert de nouvelles voies d’investigation, autant pour l’apprentissagetechnique que pour toutes les autres formes d’apprentissage chorégraphique.

Il est intéressant par ailleurs, de constater que ces ouvertures nouvelles se marient à lafaçon contemporaine de comprendre le processus d’apprentissage. Les récentes découvertesen neurophysiologie, en neuropsychologie, et en psychologie cognitive, en effet, tendent à ledécrire comme un processus intégrateur complexe, actif et dynamique qui consiste à découvrirdes significations aux perceptions que l’on a de la réalité. Le cerveau procède naturellement àun traitement complexe des informations en faisant intervenir les émotions et l’expériencepersonnelle pour les rendre significatives. Non seulement ces découvertes récentes lemontrent-elles sous un jour nouveau, mais elles mettent aussi en évidence l’importance desstratégies pédagogiques, pour l’initier et le supporter.

Il semble donc que les trois derniers thèmes d’études répertoriés, à savoir, 1) observerl’élève en cours d’apprentissage, 2) mettre au jour les perceptions des élèves, et 3) expliciterl’apprentissage par l’observation de l’enseignement de la danse, et ceci, autant à l’égard de lacréation, de l’interprétation que de l’appréciation, et dans une variété de contextesreprésentent autant de voies d’étude à envisager pour le développement de nouvellesconnaissances de l’apprentissage de la danse.

Madeleine Lord Ed. D.Département de danse

UQAM - Montréal

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X.

Les modalités d’incorporation et d’appropriation destechniques de danse chorégraphiée : une approche

sociologique

IntroductionCe texte a pour objectif 1°) de rendre compte des concepts utiles en sciences sociales

pour saisir les modalités d’apprentissage de la danse, et 2°) de retracer les propositionsd’analyse sociologique portant sur les apprentissages de la danse en formation initiale. Cespropositions s’appuient en partie sur nos propres travaux qui ont consisté à observer, durantplusieurs années (huit ans) des cours de danse classique et contemporaine dans plusieursécoles de danse, conservatoires et écoles privées, en suivant des élèves sur 3 niveaux :débutants, intermédiaires et avancés. Les « matériaux » d’enquête ont été recueillis parentretiens approfondis avec les élèves, les professeurs, des danseurs professionnels et parfoisdes parents d’élèves (plus de 80 interviews), ainsi que par observation non participante (desdizaines de séances prises en note et/ou filmées). Après avoir exposé les résultats desrecherches sur les apprentissages, l’article rend compte de travaux portant sur les « éducationssomatiques » (Fortin, 2000 ; Godard, 1990 et 1992 ; Lesage, 1992) et sur leurs rôles etincidences quant aux modèles de corps mis en œuvre dans le travail de création deprofessionnels de la danse (Desprès, 2000).

Partant d’une épistémologie sociologique, les recherches dont il est question icis’intéressent aux interdépendances entre la motricité du sujet et les conditions d’apprentissagede la danse, en formation initiale (écoles de danse). Nous préciserons d’emblée quel’orientation théorique de ce travail rejète le schème de pensée amenant à penser l’individu entant qu’être isolé, fermé sur lui-même et qui interagirait avec un « environnement » extérieur,qui viendrait lui apporter des informations ou le contraindrait. La démarche sociologique adepuis longtemps abandonné ce modèle de pensée qui, selon Norbert Elias, est l’héritage noninterrogé de traditions de pensée occidentales (Elias, 1991) dont il nous faut impérativementremettre en question, car il induit des erreurs d’interprétation de la réalité sociale et del’homme (notamment en constitutant le schème de pensée individu/société ; l’individu et sonenvironnement, etc.) Ainsi, s’agit-il de considérer la motricité des élèves, comme unprocessus de construction au cours des années de travail et d’apprentissage, qui se dérouledans des relations aux autres, au sein de contextes sociaux spécifiques. « Apprendre parcorps », dans ce sens, ne relève pas uniquement d’une évolution individuelle (intra-), maisbien d’une inter-corporéité et inter-individuelle (les élèves se voient, le professeur les touche,le cours met en jeu des processus de mimétisme, d’imitation, etc.), qui est totalement articuléeà des procédures cognitives et intersubjectives : les situations d’apprentissage sont traméespar des pratiques langagières, font appel à la mémorisation, à la réflexion et pas uniquementau faire. Plus précisément, le « faire », l’ « agir » ne précède pas (ni ne suit), dans nos cadresde recherche en tout cas, les procédures cognitives de la saisie des gestes de danse.

Autrement dit, l’hypothèse qui structure ce texte (et traverse les recherches enquestion) veut montrer que 1er) apprendre à danser implique un rapport à l’espace, au temps,aux autres, au corps propre, dans des corps à corps liés à des interactions langagières, faisantparfois appel à de la réflexivité et à des prises de conscience savamment organisées, et que2ème) apprendre par corps dépend aussi des caractéristiques sociales/sexuelles des élèves. Cesecond point ne sera pas développé dans ce texte qui se concentre sur le premier point. Peu à

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peu, les savoirs du corps se constituent, d’abord maladroitement. Puis, en se perfectionnant,ils se fixent dans la mémoire sensori-motrice et kinesthésique (Faure, 2000).

De fait, les modalités d’incorporation et d’appropriation des techniques de dansechorégraphiée ont été saisies en analysant les contextes de leur réalisation, c’est-à-dire entenant compte des types de relations sociales qui se tissent entre élèves et professeurs, dansdes configurations différentes qui portent en elles des exigences et des enjeux de formationspécifiques.

Cette orientation engage à contextualiser les pratiques, à étudier les rapports entre lesélèves et les lieux d’apprentissage, entre ce qu’ils apprennent (ou leurs résistances àl’apprentissage) et les modes pédagogiques de « transmission ». La contextualisation porteégalement sur « ce » qui s’apprend, c’est-à-dire qu’elle tient compte impérativement desformes de danse dont il est question, des modèles de corps que ces dernières impliquent.

I. Le concept d’incorporationEn sciences sociales, un concept nous est particulièrement utile pour saisir les

modalités d’apprentissage et plus largement les modes de socialisation ; il s’agit del’ « incorporation ». Son intérêt heuristique revient principalement au modèle du sociologuePierre Bourdieu du « sens pratique » (Bourdieu, 1980) qui a théorisé certains élémentsannoncés dans les propos philosophiques de Merleau-Ponty, mais également dans d’autrespropositions de la socialisation du corps et/ou par le corps, telles que celles de Marcel Mauss,et dans un tout autre champ les études de Gregory Bateson et de Margaret Mead. D’autresauteurs font appel plus largement au concept d’intériorisation. Bref, une grande partie de cesdisciplines ne peut se passer de saisir la relation entre l’inter-individualité (la structureinterne) et l’expérience inter-individuelle et use très volontiers de tels concepts. Or, comme lefait remarquer Bernard Lahire, les concepts d’incorporation et d’intériorisation, ne sont enrevanche guère « construits » sur un plan théorique et méthodologique — les chercheurs leurfaisant davantage jouer un rôle rhétorique et stratégique dans le but de s’opposer à d’autresmodèles du social (Lahire, 1998). Un premier objectif ici est de constituer le conceptd’incorporation afin d’en faire un outil efficace pour saisir les apprentissages de la danse.

Dans la terminologie psychanalytique, l’incorporation désigne la phase corporelle del’introjection et de l’identification. Elle comporte des significations sexuelles et alimentaires :« se donner un plaisir en faisant pénétrer un objet en soi ; détruire cet objet ; s’assimiler lesqualités de cet objet en le conservant au-dedans de soi. » (Laplanche et Pontalis, 1967 : 200).Constituante de l’identité, l’identification se caractérise par un mécanisme psychologique quicomporte une double orientation : l’identification aux autres (l’identification hétéropathique)et à sa personne propre (identification centripète). Plus qu’une simple imitation, elle estl’appropriation active (mais inconsciente) d’un élément ou de plusieurs éléments qui serontconstitutifs de l’identité de la personne. Freud précise que l’identification peut êtremultiple — même si elle ne porte pas sur l’ensemble de l’ « objet » mais sur un de sestraits — et, de ce fait, elle peut constituer la pluralité des personnes psychiques (Laplanche etPontalis, ibidem : 188). L’opération corporelle de l’identification est évidemmentl’incorporation. L’intériorisation désigne une relation intersubjective et va de pair avecl’identification (ou l’incorporation) ; elle porte sur les choses (on incorpore un geste, un traitparticulier de cet objet ou d’un individu...) et est indissociable de la relation à cet objet ou àcet individu. Cela implique aussi l’idée d’appropriation, qui peut se dérouler dans uneimitation volontaire ou involontaire, qui implique également l’idée qu’à certaines conditionsl’individu peut être amené à donner un sens particulier aux choses « incorporées » ou àapprendre, et que ce sens varie d’un individu à un autre, dans des circonstances précises.

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Plus largement, les individus intériorisent (ou incorporent) et s’approprient, dès lanaissance, les propriétés sociales et langagières des relations qui se tissent autour d’eux etavec eux. Le terme d’appropriation est essentiel. Il permet au chercheur d’envisager lapluralité des actes ou des modes d’intériorisation des modèles de comportement et laisse unelarge part à la réinvention, à la re-création. Les formes d’appropriation plurielles ne sont passynonymes de liberté ; celles-ci sont conditionnées par les circonstances de la pratiquecréatrice d’usages et de représentations différentielles (Chartier, 1987).

L’incorporation renvoie également à un ancrage phénoménologique (Faure, 2001/1).La lecture des thèses de Maurice Merleau-Ponty conduit en effet à penser l’incorporation entant qu’acquisition d’habitudes sensori-motrices et d’habitudes mentales produites dans uneexpérience interrelationnelle qui ne préexiste pas aux individus (Merleau-Ponty, 1964). Ellecorrespond à un ajustement des habitudes déjà acquises à de nouvelles conduites —ajustement qui réoriente le rapport aux autres, aux objets, à l’espace, au temps. Le processusd’incorporation est donc bien la conséquence d’un type d’interrelation : les mouvements, lespensées, les manières de parler, etc. (qui sont différents comportements) sont perçus par lepartenaire comme des possibilités pour lui de mouvements, de pensées, de manière de parler,etc., sans nécessairement en passer par l’imagerie mentale, la représentation ou par unestratégie mentale consciente. Par exemple, Merleau-Ponty note que c'est dans un contextesignificatif et par identification avec ses proches (avec leur style langagier), que le sens desmots est compris par l'enfant (Merleau-Ponty, 1988).

Dès lors, l’incorporation peut se définir comme étant la saisie corporelle de gestes etde comportements moteurs et mentaux expérimentés et appris dans un type de relations avecd’autres individus, dans un cadre formel (un cours de danse) ou informel (la socialisationfamiliale). Les contextes de l’incorporation circonscrivent le champ des possibles desappropriations plurielles, conscientes ou non conscientes, des individus (Faure, 2000).

II. Habitudes, programmes d’actionLa théorie de l’incorporation n’exclut pas les apports des travaux de psychologie

cognitiviste, dans l’interprétation des modalités d’apprentissage de la danse. En effet, sil’incorporation implique l’expérience, le faire — et donc renvoie à des appropriationssensibles, physiques des gestes de danse saisis par imitation, reproduction de « modèles » (leprofesseur montrant les gestes notamment), reproduction différée de modèles, ou bien encore« reconstruits » en fonction de consignes —, elle repose également sur des procédurescognitives que sont les représentations, l’imagerie mentale, la réflexion en action, etc.L’organisation de ces dimensions motricielles, sensibles, cognitives est dépendante non pasuniquement du type d’élève (de son niveau de maîtrise, de son âge…) mais aussi desconditions de pratique qui lui sont offertes.

Ces différents concepts renvoient à des « familles » théoriques rarement mises enperspective l’une par rapport à l’autre, ce que nous allons tenter de faire. Il s’agit de la famillecognitiviste d’une part (avec la notion de programme d’action en particulier) et la famillesociologique (relative aux concepts dispositionnels) d’autre part.

- Les approches cognitivistesDans ce rapport, ces approches sont longuement développées, nous n’y reviendrons

pas. En revanche, nous retiendrons certains concepts particulièrement utiles et en cohérenceavec les approches sociologiques de l’incorporation, et qui sont exposés par Marielle Cadopiet Andrée Bonnery à propos de leur analyse de l’apprentissage de la danse. Dans cetteperspective, nous retiendrons que, pour certains chercheurs, l'acquisition / mémorisation des

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mouvements correspond à la construction d'un « pattern d'informations kinesthésiques »(Cadopi et Bonnery, 1990) — ou à un « programme d’action » —, c'est-à-dire à une formeglobale kinesthésique, acquise par imitation et reproduction des gestes montrés parl'enseignant. Marielle Cadopi et Andrée Bonnery évoquent différents travaux d’après lesquelsles mouvements et les déplacements en danse relèvent d’un « modèle interne » formel(morphocinèses) associés à des topocinèses qui sont des activités posturales à partirdesquelles les différentes parties du corps s’organisent solidairement dans une situation quileur impose certaines contraintes.

La notion de « programme d’action » est proche des concepts de schème et de schémalargement travaillés dans la théorie de Schmidt (Cadopi et Bonnery, 1990). Largement citéedans les travaux portant sur les apprentissages moteurs, elle se distingue de la plupart desautres modèles par l’importance qu’elle accorde à la pratique (des essais et erreurs) dansl’acquisition des habiletés motrices et par l’emploi de la notion de « schéma » dont elle fait lepoint d’ancrage de son analyse de l’apprentissage corporel.

Ainsi, selon Schmidt, l'individu abstrait de ses expériences antérieures (et semblables àla nouvelle situation qui lui est proposée), un ensemble d'informations qui conditionnent laréalisation de l'action nouvelle. Pour lui, les programmes d’action sont nécessairementgénéraux, composés d’informations, qui vont concerner des situations voisines de leursconditions d’acquisition (Simonet, 1986). Les informations concernent notamment la positiondu corps avant la réalisation d'un mouvement (en danse classique, chaque exercice est précédéd'une préparation permettant de placer le corps dans une position correcte avant de débuter lemouvement), les paramètres du mouvement (son rythme, par exemple) ou encore le résultatattendu de l'action (tenir un équilibre), et enfin les conséquences sensorielles (ce qui a étésenti, vu, entendu lors de l'action précédente et qui sert de point de repère kinesthésiques à lanouvelle action).

Ces informations ont été intériorisées dans deux types de mémoire : 1/ La mémoired'évocation, conservant les relations fonctionnelles entre les conditions initiales de l'action, lesparamètres du mouvement et les résultats des mouvements. Cet ensemble de relationsfonctionnelles constitue la base structurée et structurante des mouvements à venir. Ellegarderait les informations des situations antérieures sous forme de règles incorporées. 2/ Lamémoire de reconnaissance, reposant en grande partie sur les conséquences sensorielles desmouvements et permettant à l'individu de reproduire ces conséquences dans le nouveaumouvement, ce dernier étant réajusté en fonction des sensations de la personne (Cadopi etBonnery, 1990). La mise en œuvre d’un schéma (ou programme d’action) va découler, selonSchmidt, d’un objectif à atteindre et de l’évaluation des conditions au départ de l’action. Lasélection dépend des expériences passées (mémoire d’évocation) et des résultats obtenus quiont fait l’objet d’une évaluation (mémoire de reconnaissance). Enfin, de la répétition naît unecompréhension pratique et mentale de l’action. D’autres chercheurs ont montré que pour quela répétition joue un tel rôle, il faut que les conditions d’effectuation soient extrêmementstables (Bertsch, 1995). La répétition peut contenir un risque, celui de former des stéréotypesde réponses et ainsi de former des programmes moteurs rigides et peu adaptés aux nouvellessituations (Faure, 2000).

- Les approches sociologiques en terme de « dispositions »Les concepts dispositionnels propres à une certaine démarche sociologique renvoient à

l’idée que le passé des individus se conserve dans le corps, par les habitudes non conscientes :les dispositions motrices et mentales. Le concept de « disposition » permet de dire qu’unepersonne est potentiellement capable d’agir ou de penser d’une certaine façon dans descirconstances particulières, à condition d’avoir acquis dans le passé des modes d’action, depensée et de perception. Loi individuelle de comportement qui dépend d’événements de

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même type et de situations propices ou non à son actualisation, une disposition se manifestedans des actions, et existe de manière potentielle dans les corps, même sans être agie. Cetteprésence invisible s’explique par l’idée d’après laquelle les expériences sociales s’inscriventdans les tissus organiques. Le social transforme le biologique ; plus exactement, ce sont lesfaçons dont elles ont été saisies (émotionnellement, affectivement, pratiquement,intellectuellement...) qui orientent et impriment le système nerveux et les neurones (Bourdieu,1980 ; Lahire, 1998).

La notion de disposition tient d’une très ancienne tradition intellectuelle qui renvoieinitialement aux notions d’hexis et d’habitus désignant l’acquisition d’habitudes incorporées(Héran, 1987). Pour Pierre Bourdieu, les dispositions sont structurées par les structuressociales et constituent l’habitus d’un individu. Style « personnel » d’un habitus de classe,l’habitus est acquis lors d’une trajectoire sociale singulière, essentiellement dans la primeenfance, au cours de laquelle la personne a incorporé les propriétés spécifiques à sa position(celle de sa famille) dans le monde social. Les éléments nouveaux résultant d’expériencesultérieures à la socialisation primaire affectent ces structures sans les modifierfondamentalement (Bourdieu, 1980). De fait, l’habitus (l’ensemble des dispositions) estconstant tout en étant capable d’intégrer des informations inédites et de s’actualiser dans leprésent. Il tend toutefois à se mettre à l’abri des crises et des mises en question douloureusesen « choisissant » les lieux et les événements auxquels il est successible de s’adapter.Prédisposant à choisir ce pour quoi on est fait, puisqu’il détermine les goûts et les espérances,l’habitus limite de cette manière le pensable, le souhaitable. Sa régularité et sa constanceimpliquent une supériorité de l’homogénéité sur l’hétérogénéité des dispositions, sans êtrenécessairement cohérent. S’il arrive que les dispositions ne soient pas en accord avec lessituations où elles devraient être réactualisées, c’est davantage en raison des bouleversementsde ces dernières que de la structure de l’habitus, qui est relativement inerte de par soninscription biologique dans les corps (Bourdieu, 1997). Contre ce modèle homogénéisant,Bernard Lahire propose un modèle pluraliste, estimant que chaque individu possède unepluralité des dispositions, issue de modes de socialisation différents (Lahire, 1998). Le« stock » ou le « répertoire » de schèmes d’action et de pensée disponibles dans chaque acteursocial s’actualise ou se met en veille en fonction des contextes rencontrés lors de sonparcours.

III. - Images, représentationsL’incorporation s’appuie également sur des représentations et une activité imageante

de la part des élèves, que la perspective sociologique replace dans des situations précisesd’apprentissage. Dans le cadre du cours de danse ou de la répétition de ballets, les danseurssont ainsi amenés à rechercher pour eux-mêmes des mouvements (révision), à faire descorrections parfois très analytiques (corrections) et également à répéter mentalement unpassage dansé (afin de se rassurer avant d’entrée sur scène, par exemple). Ces quelquesexemples de mises en situation impliquent des représentations conscientes. Lesreprésentations sont interprétées par des psychologues cognitivistes comme étant desprocessus internes d’abstraction du mouvement qui est ainsi formalisé, codé et donc« figurable. »(Chevallier, 1995). L’imagerie mentale facilite, dans cette optique,l’organisation des actions avant leur effectuation ou solliciterait l’attention et la concentration,parce qu’elle porte sur les composantes cognitives de la pratique ou sur ses facteurskinesthésiques. La sociologie dispositionnelle critique en partie cette hypothèse en dénonçantson ignorance des circonstances et des processus interindividuels par lesquelles une image ouune représentation des actes se constitue dans la pratique ? dans les relations particulières auxautres et au monde. Toute la sociologie n’est pas d’accord avec cette critique. En effet, cesorientations psycho-cognitivistes rejoignent le mode de pensée de certaines sociologies

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cognitives relatives notamment aux modèles de l’action rationnelle. Pierre Bourdieu leur asubstitué la théorie du « sens pratique », définissant par-là un ajustement non réflexif, nonconscient, entre un habitus et un champ d’action. De cet ajustement préconscient, pré-réflexif,« par corps », est engendrée une maîtrise pratique des situations et un sens du jeu, duplacement et de l’anticipation des choses à faire ou à dire en fonction des situations.

L’étude sociologique de la danse tend à montrer, dans certaines conditions, que ce quiest déterminant est un principe d’action issu de la répétition non réfléchie des mouvements ;dans d’autres (dans les corrections notamment), des exercices d’imageries ou sollicitant laréflexion ou la représentation participent totalement de l’incorporation des savoir-faire (Faure,2000). Dans le cas d’un apprentissage obéissant à la « logique de la discipline »36 (et plussouvent relatif au mode traditionnel d’apprentissage de la danse classique) les corrections sontpeu analytiques et renvoient davantage à des représentations normatives du corps (avoir leventre plat, etc.) ainsi qu’à la structure des pas qui sont relativement formels et codifiés. Cesreprésentations vont de pair avec la construction de l’image de soi des élèves, dont le moded’appropriation des gestes de danse repose en grande partie sur l’observation dans le miroir.En elle-même la vision (se regarder) ne suffit pas ; faut-il encore que les jugements de valeurassociés au corps objectivé dans le miroir soient énoncés. Les métaphores participent de ceprocessus. Les plus courantes dans le modèle de la « discipline » (et en particulier en danseclassique) se rapportant à l’apparence du corps (un corps qui doit être mince, élancé, etc.) et àses positions (Faure, 2000/1)

Dans le cas d’un apprentissage répondant à la « logique de la singularité » (etfréquemment dans les cours de danse contemporaine), les corrections sont largementsuggestives, décrivant les positions du corps en référence régulièrement à des représentationsanatomiques. L’usage des métaphores et là encore courant mais diffère de celui repéré dans lemodèle de la « discipline ». La représentation mentale (pas nécessaire juste d’ailleurs) dumouvement, croisée avec la perception du mouvement (et beaucoup moins avec la vision dumouvement dans le miroir que dans les cours de danse classique), conduit vers l’auto-correction.

L’analyse de l’acquisition des positions de danse, des savoir-faire, n’est toutefois pascomplète si nous oublions d’évoquer (même si nous n’entrons pas ici dans le détail) le fait queles élèves danseurs sont amenés à travailler ensemble, à se corriger mutuellement, à se faire« répéter » des mouvements. L’imagerie mentale, en tant que stratégies d’action contrôlées,sert alors à préparer les actions à venir (Suchman, 1990). Bref, la relation d’enseignementn’est pas univoque (professeur-élèves) et la recherche scientifique a tout à gagner à étudierces rapports d’entre-aide dans les processus d’incorporation, notamment dans la« fabrication » des images mentales et dans les corrections (Faure, 2000).

IV. Les modes d’incorporation des mouvements de danseL’incorporation renvoie à la question de la mémorisation des gestes de danse.

Comment se remémore-t-on les mouvements de danse ? Partant de quelques idées de MauriceHalbwachs (Halbwachs, 1994), la démarche sociologique est en mesure de proposer desétudes reposant sur un intérêt particulier porté au contexte de mémorisation et aux « objets »mémorés. Autrement dit, l’analyse de l’incorporation (renvoyant à une mémorisationcorporelle et cognitive des mouvements de danse) invite à s’intéresser à la « nature » de ce quiest mémorisé et à observer, à partir de là, ce qui est « restitué ». Il est fait une doublehypothèse : 1°) les « objets » (ou la nature des savoirs et savoir-faire appris) sont en partieporteurs de leurs conditions de mémorisation ; 2°) la mémorisation et la « restitution »dépendent de circonstances relationnelles plus ou moins significatives pour l’individu

36 Nous renvoyons à la première partie de cette synthèse,au texte 3.

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(sociologie compréhensive) (Faure, 2000). Cette perspective se rapproche donc des thèsescognitivistes, soulignées par Marielle Cadopi in supra, qui proposent une interprétation desmeilleures performances à mémoriser en fonction de la structure des disciplines (danseclassique, patinage artistique) (Deakin et Allard, 1991 ; Starkes, Deakin, Lindley et Crisp,1987). Nous rajouterons à cela, que nos observations, surtout pour les non experts, ont faitapparaître l’importance des entre-aides et des interactions dans la remémorisation, facilitantainsi des « rattrapages » très rapides. Pour les experts en situation de danser sur scène, cesrattrapages s’accompagnent souvent de tactiques de « faire semblant » et de « dissimulation »consistant à faire « comme si » le mouvement de rattrapage était programmé dans lachorégraphie par exemple.

Par ailleurs, certains contextes et objets sont en eux-mêmes porteurs d’indicesobjectivés sur lesquels vont s’appuyer les processus de mémorisation, parce qu’ils sontstructurés et que cette structure est permanente. Ainsi, peuvent-ils être expérimentésrégulièrement, prenant un sens univoque pour l’individu (même si ce sens n’était pas ou n’estplus conscient). C’est le cas des savoir-faire de la danse classique, fortement formalisés etdonnant lieu à une « grammaire » gestuelle qui s’accompagne de noms de pas, d’un « jargon »très précis et d’exercices routinisés, effectués dans le but de progresser dans un « langage »corporel relativement stable, se complexifiant toutefois au fur et à mesure de l’avancée dans laformation.

Le langage est donc particulièrement important dans ces expériences. L’on peut ainsiproposer qu’une mémoire stable et des rappels aisés sont rendus possibles grâce àl’incorporation de leur structure objective, dans des conditions de restitution proches de cellesde leur acquisition (comme dans la danse classique). L’expérience du danseur a donc moinsd’importance que dans le cas suivant, où en dehors de toute forme d’objectivation, la mémoire(et la mémorisation) est davantage une reconstruction du passé, plus largement dépendante ducontexte où elle est sollicitée. Dans ce cas, l’évocation avec d’autres est déterminante,supposant quelques efforts réflexifs et une part d’indétermination ou d’approximation quant àl’exactitude des faits et des pratiques mémorés. Aussi, moins un style de danse (ou de touteautre expérience) est formalisé, plus il peut faire l’objet d’appropriations plurielles nedépendant pas seulement du « degré » d’incorporation chez les individus.

Autrement dit, la formalisation et la stabilisation des éléments des actions passées(stabilisation impliquant la répétition à l’identique des actions ou des choses à apprendre) sontdes conditions indispensables à la structuration de la mémoire, une mémoire structurée par cescadres sociaux objectivés et répétitifs, et structurante pour des actions futures (Faure, 2000).

Cela conduit à penser que le type de savoir et de savoir-faire transmis induit un certainnombre de conditions de l’apprentissage. Les travaux didactiques de la danse montrent ainsiqu’une technique formalisée ou codifiée (comme la danse classique) sous-tend peu de variétédans ses contextes de « transmission » ; tandis qu’une technique plus souple produit du mêmecoup une souplesse (non indéfinie) de ses modes d’acquisition et d’appropriation (de la« classe » technique à l’atelier d’improvisation en danse contemporaine) (Peix-Arguel, 1980 ;Pujade-Renaud, 1976 ; Faure, 2000)

Cette orientation de recherche peut contribuer à réfléchir aux processus cognitifs de lamémoire, et ne s’opposent pas à la recherche en psychologie cognitive. Par exemple, uneétude de Julie Jean et de Marielle Cadopi (1998) a eu pour objectif d’analyser les processusmnésiques permettant de rendre compte de l’expertise en danse. L’étude prend en compte ledegré de structuration des enchaînements dansés mémorisés. Deux enchaînements de danseclassique et de danse moderne étaient visionnés à des danseurs. Dans chacune de ces deuxdisciplines, un des enchaînements était chorégraphié et l’autre se constituait des mêmeséléments mais organisés aléatoirement. Leur durée respective était de trente secondes. 24sujets experts, âgés de 16 à 21 ans, se répartissaient en 3 groupes. De fait, pendant le

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visionnage, un groupe ne faisait rien (contrôle), un autre marquait avec les mains (rappelmoteur) et le dernier commentait (rappel verbal). Il en ressort que la structure del’enchaînement et le type de tâche effectué pendant le visionnage n’influencent pas le rappel,mais il est meilleur en danse classique. Autrement dit, les enchaînements en danse classiquesont mieux rappelés que les autres sans que cela ne dépende du type de rappel des éléments(moteur, verbal ou contrôle) ni de la chorégraphie. L’on peut envisager, au regard de l’étudesociologique des processus de mémorisation dans l’apprentissage de la danse, que le rappeldes enchaînements de danse classique tient (au moins en partie) de la nature-même de cetteforme de danse, c’est-à-dire du degré de structuration de ses savoir-faire impliquant unestructuration « interne » plus stable et plus aisément mobilisable dans des expériences deremémoration comme celles-ci.

- Langage et incorporationL’étude sociologique des modes d’incorporation des techniques de danse place au

cœur de sa réflexion les liens entre langage et apprentissage (Faure, 2000). D’une part larelation pédagogique est intersubjective autant qu’ « inter-corporelle » : pour expliquer unexercice, le professeur montre le mouvement en associant des déictiques, les noms des pas,des conseils, des comptes, des consignes diverses, des jugements de valeur, des métaphores,etc. D’autre part, les savoir-faire transmis sont eux-mêmes structurés par du langage plus oumoins formel selon les formes de danse (et rappelés par les noms des pas, les noms des partiesdu corps qui sont travaillées, etc.) (Faure, 1999 et 2000/2). Il est à préciser que les pratiqueslangagières ne sont pas des modalités d’incorporation isolées, mais s’articulent aux modesd’observation, aux processus d’imitation, aux corrections, aux répétitions des actions, àl’invention de gestes, aux improvisations, etc., bref à toutes les modalités d’apprentissagepouvant être mises en œuvre dans un cours de danse. Par ailleurs, les pratiques langagièressont variées, et discontinues pendant les leçons et relèvent de « registres » différents :analytiques, performatifs, évaluatifs, appréciatives, métaphoriques, descriptives, etc. Larecherche montre qu’au fur et à mesure que les danseurs acquièrent de l'assurance et del'expérience, les démonstrations du professeur se font plus rares, les pas sont seulementévoqués par un signe gestuel (une esquisse de mouvement), tandis que les pratiqueslangagières sont privilégiées (Faure, 2000). La logique socio-historique de la codification dela forme de danse classique induit des modalités d’incorporation (telles quel’imitation / reproduction du vocabulaire technique, les répétitions des exercices et leurscorrections, etc.) indissociables de pratiques langagières non ou peu explicatives. Cesdernières se fondent très largement sur des catégories mentales (donc langagières) serapportant à des schèmes d’action objectivés. Autrement dit, parce que les mots « justes »existent (le nom des pas est précis et en lien avec l'action), et qu'ils constituent le« vocabulaire » de la danse classique, les enseignants peuvent aider les élèves à se souvenirdes mouvements en cours d'action, à partir de jeux de langage constituant une sorte dedescription de l’action motrice qui aide l’acquisition pratique des savoirs de la danse classique(Faure, 2000/2). Avec l’expérience, les danseurs incorporent les gestes et les mots et sont deplus en plus capables 1°) de se passer de démonstration complète et 2°) d’apprendre unexercice en suivant les consignes verbales d’un enseignant, contrairement aux débutants quenous avons observés qui apprennent en regardant le professeur (tout en l’écoutant) et enfaisant avec lui les mouvements (Faure, 1998, 2000). Par ailleurs, Madeleine Lord faitréférence à des travaux (Hernandez, Walker, Goc-Karp, Guilfoye et Friesen, 1996) où, pourl’acquisition d’un enchaînement de mouvements en danse jazz (donc relativement formalisés)les élèves, selon leurs niveaux d’expertise, s’appuyaient sur des paramètres différents pourapprendre les mouvements : les débutants privilégiaient la vue et les modes kinesthésiques ;les intermédiaires les modes visuels, kinesthésiques et verbaux ; les avancés les modes

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principalement verbaux, et ce aussi bien pour les exercices jugés faciles que pour ceux perçuspar les chercheurs comme étant difficiles.

De son côté, la danse contemporaine, qui laisse une grande place à la logique de lasingularité, fait parfois appel au vocabulaire classique. Cependant, la majeure partie de sespratiques langagières sollicite des registres d’action différents. Cela amène les professeurs àdiversifier leurs démarches pédagogiques en fonction de ces registres et, nécessairement, àfaire varier leurs jeux de langage. Certaines sont à la marge du langage verbal (énoncer lescomptes musicaux en faisant des onomatopées, en s’exclamant...), alors que d’autresdécoulent au contraire d’analyses quasi savantes du mouvement. Les premières se rapportentgénéralement à un engagement corporel de l’enseignant, qui danse avec les élèves, mime despassages, ou qui intervient directement sur le corps du danseur pour rectifier ses positions.Les secondes s’apparentent à des pratiques discursives. Prenant la forme d’explicationsdétaillées, elles sont articulées à des démonstrations et engagent des représentations mentalesdu corps (Faure, 2000/2).

Un autre chercheur en sciences sociales, Joëlle Vellet, travaillant sur les conditions derépétition des danseurs professionnels, montre également l’importance du langage dans letravail de recherche et de mémorisation des mouvements. Le langage, sous diverses formesliées à l’esthétique des chorégraphes (tous les chorégraphes n’emploient pas les mêmesréférences, les mêmes mots, parce que leur forme de danse diffère et renvoie également à desimaginaires particuliers) participe à faire émerger le mouvement dont l’expérience ne selimite pas à une saisie empathique du geste, à une qualité du toucher de chorégraphe àdanseur, de professeur à l’élève. Dans ce sens, la parole permet au chorégraphe d’aller au-delàdu geste, il apporte des éléments supplémentaires pour réaliser le mouvement et facilite ainsil’interprétation qui dépasse la simple reproduction/imitation du mouvement montré par leprofesseur ou le chorégraphe. L’acte créateur en dépendrait selon elle. Le langage serait doncun moyen pour l’interprète de construire ses propres chemins à partir de la matière(langagière, corporelle) donnée par le chorégraphe (Vellet, 2000 ; Vellet 1999).

- Musique, rythme et apprentissage moteurLors de l’apprentissage de la danse, en situation « réelle », le mouvement se mémorise

avec ses cadres rythmiques et temporels. Il a une durée, un tempo, une vitesse. Or, ce pointn’est guère étudié dans la recherche scientifique. Cela mérite donc d’être traité mêmepartiellement, car les recherches sont manquantes sur ce point.

En danse classique, le pas est appris sur la musique alors que l'enseignement de ladanse contemporaine favorise une appropriation différentielle de la musique n’excluant pasune exécution avec la musique, induisant également la possibilité de danser sans supportmusical (Faure, 2000). Plus largement, en dehors de tout ancrage rythmique (musical ou nonmusical), un mouvement n’est pas dansé, mais théâtralisé. L’on trouve également des« pauses » dans les écritures chorégraphiques ; instant particulier de la mise en scène ouconcentration d’énergie pour le danseur, la pause n’a de sens que prise entre deuxmouvements rythmiques. Par conséquent, apprendre un mouvement revient à intégrer unerythmique, à en donner une au mouvement, ou encore à saisir (ou à inventer) une dynamiquecorporelle qui sera propre à chaque danseur. En réalité, les pas se mémorisent avec (et grâceà) leur dynamique (strictement imposée par les professeurs ou créée en partie par les élèves).Cependant, la structuration temporelle ou rythmique des mouvements n’est pas la même selonles formes de pratique de danse.

Dans notre perspective de recherche il apparaît que la logique de la « discipline » (endanse classique) privilégie l'approche formelle de la musique : apprendre à compter les tempsmusicaux, en effectuant les passages dansés à partir de leur armature temporelle objectivée

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(par les comptes). Jeanne Bamberger décrit deux modes de traitement de la musique. Selon cechercheur, l'approche figurale se rapporte à un traitement global, ressenti de la musique,fondée « sur ce que signifie entendre sans tenir compte d'aucune connaissance théorique sur lamusique. » S'oppose à elle, l'approche formelle qui conceptualise l'expérience musicale ; danscette perceptive l'élève peut « apprécier (et noter) un passage en fonction du nombre debattements par mesure et de la présence de modèles rythmiques particuliers qui se dégagentde l'arrière-plan métrique. » (Bamberger)37 Ainsi, en danse classique, la régularité desmouvements et leur harmonisation impliquent un rapport objectif au temps et donc au rythme.Les professeurs comptent à voix haute, en montrant l'exercice. L'objectivation des temps (pardes comptes) se déroule d'abord à travers la voix du professeur qui scande le rythme musical ;puis les élèves se le disent mentalement, en dansant. Préciser les comptes favorise unemémorisation fixe et formelle de l'exercice, reposant sur des points de repère rythmiques(écoute des comptes) et visuels (démonstration). Le rythme objectivé s'impose ainsi à l'élèveet le contraint à ajuster son rythme propre (tel qu'il a envie de danser et tel qu'il entend lamusique) en fonction de celui qui est formalisé par l'enseignant. Certains élèves comptent àhaute voix, en même temps que le professeur. Ainsi, le rythme s'incorpore en effectuant lesmouvements sur des temps objectivés et en les répétant. Une fois connue, la structurerythmique n'est plus à rappeler, les danseurs l'appliquent en s'aidant de comptes, et avecl'habitude, il n'est plus besoin de compter du tout : elle est devenue quasi automatique,existant de manière infra-consciente, sauf dans les situations particulières provoquant larupture avec ce sens pratique rythmique. En effet, il arrive que des danseurs ne réussissent pasà entendre la musique comme les autres, il leur faut alors refaire une écoute analytique dumorceau de musique. Dans les cours de danse classique, le sens (pratique) musical s'acquiertquand les élèves ont une certaine maîtrise de la danse (niveaux intermédiaire et avancé). Ildevient alors possible d'apprendre les mouvements sans compter, mais en apprenantglobalement l'exercice avec son rythme musical. Progressivement, les élèves passent d’uneappropriation par objectivation (mentale autant que corporelle) de la musique (les comptes), àson appréciation plus « phénoménologique », ne se référant plus nécessairement à descomptes, mais aux modulations du tempo et de la mélodie (Faure, 2000).

En danse contemporaine, les modalités rythmiques des mouvements sont plus variéesqu’en danse classique. Tout en s'assurant d'une certaine homogénéisation entre danseurs, lerythme musical peut faire l’objet d’appropriations plus personnalisées que dans la danseclassique. Celles-ci se constituent en fonction d’une « écoute » ou d’une « énergie »individuelles qui se réalisent dans les mouvements, notamment en s’aidant de la respirationqui donne ainsi une cadence et des impulsions particulières aux mouvements. Cette spécificités’inscrit dans le processus d’autonomisation de l’histoire de la forme de danse contemporaine,qui a affirmé son indépendance par rapport à la musique, en défendant l'idée que lemouvement peut se suffire à lui-même, car il a une rythmique propre (principe du« mouvement pour le mouvement »). Les modes d’acquisition et d’appropriation des gestes dedanse dépendent ainsi de l’état du champ de la danse chorégraphique, dont l’autonomierelative s’est accompagnée de conceptions différentes, voire concurrentielles, du mouvementet de sa relation avec un support sonore. L’une suit strictement les codes académiques(approche formelle tenant compte de la mélodie, de l’harmonie et du rythme sur lesquelles lemouvement doit s’ajuster parfaitement). Sans exclure totalement la logique classique de lamusique, l’autre introduit d’autres dimensions dans l’approche de la musique, tels que savibration, son timbre, sa durée, etc. L’objectivation des comptes fait toutefois partie del’apprentissage dans les formes de pratique de danse. S’ils ne sont pas toujoursimmédiatement donnés aux élèves dans les cours de danse contemporaine, c’est quel’enseignant souhaite que les élèves les « cherchent » par eux-mêmes, puis échangent leurs

37 Théorie de Jeanne Bamberger présentée par Howard Gardner, dans Les Formes de l'intelligence, Odile Jacob,Paris, 1997, p. 119.

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points de vue. Dans un tel cas, loin d'être fermés aux suggestions des danseurs, les professeursde danse contemporaine proposent souvent une interprétation de l’enchaînement demouvements. Les élèves sont alors invités à apporter leur propre « qualité » rythmique àl’enchaînement chorégraphié.

- Des conditions sociales de la mémorisation aux compétences des danseursApprendre un exercice nécessite une attention particulière se portant à la fois sur la

structure rythmique de l'exercice (en écoutant la musique, en se concentrant sur les comptes etle rythme fournis par l'enseignante) et sur l'organisation des pas et des mouvements. Lesélèves les moins expérimentés saisissent de manière pratique les relations entre la structurerythmique et l'organisation des mouvements, en dansant en même temps que le professeur quimontre l'exercice. Par une sorte de synchronie interactionnelle, ils se coordonnent auprofesseur, qui lui-même articule gestes et descriptions verbales. Les élèves les plusexpérimentés apprennent les exercices en observant la démonstration de l'enseignant, enl'écoutant, mais également en réduisant leur participation motrice lors de la première saisie.De leur côté, les enseignants procèdent à de nombreuses recommandations et montrent moinsles mouvements que dans les classes débutantes. De la sorte, ils tendent à faire porterl'attention des élèves sur les passages les plus délicats de l'exercice, les décomposantlentement si nécessaire — la logique globale de l’exercice ou du mouvement doit être saisierapidement en comptant sur les « sub-routines », d’après la terminologie de Jérôme Bruner(1983), c’est-à-dire sur une certaine maîtrise pratique des savoir-faire et du contexted’apprentissage. Le mode d'appropriation des exercices dans les classes avancées reposeégalement sur une gestion de l'effort et des difficultés. Les pas complexes sont « travaillés »alors que les pas connus sont appris en les esquissant ou en les évoquant verbalement.

Autrement dit, l'appropriation pratique des exercices est davantage à l’œuvre chez lespratiquants débutants qui saisissent l'exercice à partir d'une imitation / modélisation d’un« modèle » représenté par le professeur dont les nombreuses pratiques langagières ne font pasl’objet d’une prise de conscience. Les élèves saisissent la globalité de l'exercice et éprouventdans leur corps la spécificité des actions montrées par l'enseignant. Parallèlement, les élèvesexperts ont des appropriations plus « sélectives » dans le sens où ils apprennent un exercice ense dégageant du faire. La mémorisation se déroule alors davantage en réactivant les structuresstables de l'exercice ou du mouvement qui ont été incorporées au fil des années de pratique.Seuls les pas complexes et les articulations délicates entre la musique et le mouvement sonttravaillés en profondeur. L'imitation est alors, dans un certain sens, différée. De fait, les élèvescommencent par observer le professeur, marquent un peu l'exercice, puis ajustent leursperceptions initiales à l'action, pendant quelques essais (Faure, 1998, 2000).

Les modes d'appropriation dépendent non seulement des niveaux de maîtrise desélèves, mais aussi du contexte d'apprentissage. Les élèves avancés mais non professionnelsadoptent à nouveau un comportement « pratique » lorsqu’ils ont à expérimenter un exerciceparticulièrement difficile ou lorsqu’ils sont amenés à changer de professeur (lors des stagespar exemple). Il devient ainsi évident que la maîtrise pratique dépend du rapport qui s’établitavec d’autres personnes, dans un contexte particulier et n’est pas uniquement le produitd’habiletés et d’habitudes incorporées. Plus exactement, pour que ces dernières soientactivées, cela implique un temps d’adaptation (prises de points de repères) à la nouvellesituation. La maîtrise va donc moins porter sur l’acquisition de schèmes moteurs (savoir tenirun équilibre, savoir effectuer une pirouette...) que sur la formation d’une capacité à prendredes repères rapidement, à ajuster au moindre coût (qu’il s’agisse de temps et d’efforts) lessavoir-faire appris dans un contexte à une autre situation. Or, ce processus complexe engagefréquemment une réflexivité pendant l’action.

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Pour conclure provisoirement sur cette approche sociologique de l’apprentissage de ladanse, nous distinguerons deux types de mémoire du corps ou d’ « intelligence du corps » : lesens pratique (Bourdieu, 1980) et la « mètis » (Détienne et Vernant, 1974). Nous avons vuque le mode d’incorporation a partie liée avec la nature sociale et langagière des formes desavoirs parce que ces derniers sont constitués et transmis dans des contextes interrelationnels.Un type de savoirs et de savoir-faire formalisés induit un mode de mémorisation stable (lesens pratique), engageant peu de jeux langagiers explicites parce que leur « contenu »correspond quasiment à une « grammaire » langagière et corporelle. À l’opposé, nousobservons une mémoire beaucoup plus instable et dépendante d’éléments non incorporés (lecontexte, les objets, les personnes) dans l’acquisition de savoirs et de savoir-faire moinsformalisés (la mètis). Dans ce cas particulier, la mémorisation encourage les explications dusavoir et du savoir-faire « transmis », qui ont davantage approprié de manière réflexive quedans la situation des savoirs codifiés. Le premier processus correspond globalement auxsituations d’apprentissage de la forme de danse classique ; le second aux situationsd’apprentissage de la forme de danse contemporaine (Faure, 1998, 2000).

L’approche des sciences sociales sur l’apprentissage de la danse invite, enfin, à lepenser non pas uniquement du point de vue de l’apprenant, mais en regardant au plus près despratiques et de la « nature » des mouvements, des savoirs et savoir-faire, qui renvoient enmême temps à des « modèles » du corps, à des « motricités » spécifiques.

V. Sensations, motricités et modèles de corps- Les éducations somatiquesLa recherche en sciences sociales concernant les pratiques de danse porte son intérêt

sur des méthodes spécifiques d’entraînement du danseur, que sont les « éducationssomatiques » ou les release techniques. Ces dernières interrogent les conditions dudéveloppement de la motricité, les formes de motricités de la danse, et engagent à étudier lesrapports entre sensations, perception et motricité (Desprès, 2000).

Différentes analyses du mouvement, réappropriées par les pédagogues de dansecontemporaine, se sont constituées au cours du XXe siècle (celles de Gerda Alexander,Matthias Alexander, Bonnie Bainbridge Cohen, Moshé Feldenkrais, etc.). Ces analyses nesont pas déconnectées de la pratique mais constituent bien des « éducations somatiques » quiprennent appui sur des connaissances en neuropsychologie, neurophysiologie, en anatomie etphysiologie, et intègrent des perspectives psychologiques. Elles renvoient surtout à un rapportau corps différent de celui de la tradition académique : le corps n'est plus le corps machine(inconscient) exécutant quasiment mécaniquement des gestes qui lui ont été inculqués, maisun corps de sensations que la conscience peut diriger, maîtriser pour modifier les positionscorporelles (Dupuy, 1990). En effet, beaucoup de pédagogues contemporains attribuent leséchecs et les abandons en danse aux résultats de l'imposition d'une discipline motricielleirréfléchie (Godard, 1990).

Ces éducations somatiques émergent pour la plupart de théories du mouvement,théories en action, ayant pour objectif de faciliter l'acquisition du geste « juste ». Un desprincipes majeurs de ces théories est formulé par Moshé Feldenkrais : « si nous ne savons pasce que nous faisons, nous ne pouvons pas faire ce que nous voulons. » (Rouquet, 1985 ;Feldenkrais, 1994). Cette conception de l'apprentissage du mouvement s'appuie sur la prise deconscience, l'écoute de soi et le respect de l'individualité de chacun. Si l'objectif del’application de ces théories à la danse est l'amélioration de la maîtrise du corps enrecherchant son bien-être, elles visent également à éviter les blessures des danseurs en activitéet à améliorer la technique au cours de la vie professionnelle en palliant d’une certaine façonles faiblesses musculaires du corps vieillissant.

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Pour Benoît Lesage les éducations somatiques, ce qu’il appelle les release techniques,ont une perspective commune qui est celle de la psychomotricité. L’eutonie, la méthode deMatthias Alexander, de Moshé Feldenkrais ou encore la kinésiologie appliquée aumouvement dansé recherchent la prise de conscience du corps en mouvement en vued’améliorer la mobilité physiologique et de réduire les tensions (Lesage, 1992). Ellesvalorisent un modèle de corps « globalisant » affirmé à deux niveaux : locomoteur etpsychosomatique. C’est encore un corps composé « de trajets d’énergie » et qui, sur le planpsychomoteur, fait appel à l’imagination, à l’analyse, à l’observation des perceptions internes.Ces techniques conduisent donc à connaître son corps d’une certaine façon, et à le « sentir ».Elles mettent en jeu trois types de rapport au corps : un rapport privilégiant l’aspect sensitivo-sentoriel (comme l’eutonie) ; un rapport basé sur l’analyse et la représentation du corps(kinésiologie) ; et enfin un rapport qui fait appel au « mouvement juste » et privilégiel’approche intuitive du corps comme dans certains arts martiaux (Matthias Alexander).Cependant, si les analyses du mouvement sont caractérisées par l’une de ces dominantes, iln’en reste pas moins qu’elles se réfèrent toutes, dans une moindre mesure, aux trois approchesdu corps :

- L’approche du « corps senti » est caractéristique de l’eutonie, créée en 1957 parGerba Alexander qui s'était formée aux principes de Dalcroze et Delsarte. Elle travaille àpartir de la relation tonus musculaire / vigilance / fonctions végétatives. « Nos états affectifset émotionnels, dit-elle, ne peuvent s'authentifier que par un jeu tonique. » (Lesage, 1992 :229). Il s'agit pour elle de refouler le tonus musculaire, et de le rendre flexible afin quel'individu puisse s'adapter à différentes situations. Le travail se fait, dans un premier temps,sur la sensorialité : il s'agit de développer les sensations à partir d'exercices. Le mouvementest abordé à partir de micro-mouvements. L'eutonie se veut pédagogie et thérapie, quidéveloppe la « conscience du corps » par l'observation des sensations et des perceptions. Ellen’implique pas de travail d'imagination.

- La kinésiologie appliquée au mouvement dansé met en jeu un corps analysé etreprésenté. Promue au départ par Odile Rouquet et Hubert Godard, la kinésiologie vise àanalyser et à comprendre les mécanismes du mouvement pour que les danseurs s’enfassent une représentation juste, référée à l’anatomie fonctionnelle. De fait, les référencesscientifiques sont constantes. Cependant, l’analyse n’exclut pas l’imagination. Il s’agitbien de travailler avec des images tout en ayant une connaissance exacte du mouvementpour se défaire de certains schémas toniques et moteurs. La kinésiologie travaille donc surla « mémoire du corps ».

Selon Odile Rouquet, la kinésiologie est la science du mouvement, reposant sur l'idée quele corps humain est un équilibre de forces (la pesanteur, la pression atmosphérique, lesfrottements, la force musculaire). Le placement en danse est issu d'un ajustement entre lesforces (Rouquet, 1985). Il existe des blocages dans le corps qui empêchent l'effectuation dumouvement dansé ou d'une position juste. La kinésiologie se propose alors d'analyser d'oùvient le blocage par observation du corps, puis de le désamorcer. Le point corporeldéterminant est le bassin ; la connaissance de cette zone du corps est donc indispensable (os etarticulations). Le pied est aussi un élément déterminant à connaître car un « pied tout ratatinédans un chausson ou complètement tendu "roulera" constamment sur le sol et ne pourra jouerson rôle de base stable de l'édifice.» (Rouquet, 1985 : 20). Enfin la cage thoracique doit êtreconnue afin de visualiser le passage de la respiration, qui est un moyen pour faciliter le travailmusculaire. Les mauvaises positions proviennent fréquemment de la méconnaissance (par ledanseur ou par son professeur) des articulations, et du squelette. Il s'agit alors d'apprendre àlocaliser muscles, os et tendons, à comprendre le fonctionnement anatomique, afin d'agir surun dysfonctionnement empêchant la correcte réalisation du mouvement. Enfin, lesmouvements s'articulent de la périphérie à l'axe du corps, dernière notion capitale enkinésiologie : « L'axe représente "une ligne d'énergie" qui ne s'arrête pas au corps, il se

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poursuit à l'infini au-dessus de la tête — image de la suspension — et en-dessous des pieds —image de l'enracinement. » (Rouquet, 1985 : 32).

Les travaux actuels menés par Hubert Godard en kinésiologie appliquée au mouvement dudanseur proposent une analyse du mouvement à partir de la colonne vertébrale mue par lagravité : la sensation du poids de haut en bas. Et son mouvement inverse : le grandissement,l'anti-gravitation, un mouvement vers le haut. Le mouvement de danseur naît de ces deuxchamps. Le poids est lié à l'expire, à la relation au sol, à la chute, inversement, le saut etl'équilibre vont dépendre du « potentiel d'ouverture vers le haut. »38

- L’approche intuitive du corps, comme chez Matthias Alexander, est proche decelle que l’on peut trouver dans certains arts martiaux. Elle se fonde sur le « mouvementjuste ». Il s’agit de changer radicalement les habitudes et les réflexes en inhibant certainsschémas corporels. Le travail n’implique pas de visualisation et aucune donnée anatomiqueou fonctionnelle n’est fournie au pratiquant. Il s’agit pour lui de prendre conscience d’unehabitude, de marquer un moment d’arrêt pour ne pas la reproduire, puis de penser des« directions d’énergie » qui vont permettre au mouvement de se faire autrement. Le travailnécessite ainsi une pensée consciente pendant l’effectuation de mouvements.

En conclusion, les observateurs des release techniques estiment qu’elles ont encommun de refuser le travail en force, la crispation et de privilégier la vigilance tout enlaissant le mouvement se faire. La motricité volontariste est alors inhibée pour laisser place àune action dans le « non-vouloir. » (Lesage, 1992). Ainsi, elles modifieraient le schémacorporel ainsi que l’image de soi (Lesage, 1992 : 240).

- Présentation de trois logiques du mouvement danséL’introduction des éducations somatiques dans la formation des danseurs correspond à

l’émergence d’un nouveau rapport au corps dansant, défini par Aurore Desprès comme uncorps « moderne » pensé en terme « d’énergies », de « sensations », de « qualité demouvement », en rupture avec la pensée classique à l’œuvre dans une danse codée, norméespar des conventions strictes et reposant sur la « mimesis », c’est-à-dire sur un apprentissageen imitation, reproducteur de modèles (Desprès, 2000). Dans certaines formes de la dansecontemporaine, les gestes s’expérimentent plutôt qu’ils ne s’apprennent par imitation. Un teltravail place les sensations au cœur du processus de création des mouvements. L’auteur posealors à juste titre ce que signifie « sentir » dans le monde de la danse ? Elle confrontedifférentes conceptions liées à un mode spécifique d’incorporation de la danse.

« Il semble que le « sentir » soit un mot-tiroir qui, lorsqu’on l’ouvre, fait graviter autourde lui, d’autres concepts qui vont le colorer d’un sens particulier. Certains vont associer le« sentir » à l’ « imaginer », d’autres au « constater », au « penser », au « prendre conscience »,au « différencier », au « relâcher », à « l’écouter », au « contacter », etc. Cette multiplicitédéfinitionnelle fait donc de la « sensation » un concept restant souvent générique, flou etimprécis et explique qu’il ne soit jamais véritablement imposé comme un concept-clefdéfinissant la logique de la danse contemporaine. » (Desprès, 2000 : 6).

Aurore Desprès s’attache à définir des « logiques de la sensation » en dansecontemporaine, en prenant exemple sur différents chorégraphes. Le point commun de ceslogiques est leur opposition au « mouvement formel ». Pour ces chorégraphes, il ne s’agit passeulement de remettre en question un « habitus perceptif et culturel » (celui qui encode lemouvement dans un esthétisme formalisé), mais de travailler sur les habitudes corporelles etperceptives afin d’élaborer un autre sens aisthétique (qui suit la logique de la sensation) dumouvement dansé. Le travail, par exemple, de la chorégraphe Odile Duboc ou encore celui de

38 Hubert Godard, « Présentation d’un modèle de lecture du corps en danse », Danse. Le corps enjeu, PUF, Paris,col. Pratiques corporelles, 1992, p. 209-221, p. 210.

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Trisha Brown ou encore de la danse improvisée invite ainsi à modifier le sens du mouvement.Ce dernier n’est pas nécessairement le sens kinesthétique analysé par les chercheurs enmotricité, ce qui amène à ouvrir le champ des recherches.

En effet, l’auteur donne trois orientations au sens kinesthésique : la sensibilitéextéroceptive (tournée vers l’extérieur, mettant en œuvre les cinq sens que sont la vue, letoucher, le goût, l’odorat et l’ouïe) ; la sensibilité intéroceptive (liée aux informationssensorielles provenant des organes et de la vie végétative, telle que la sensation de faim) ; lasensibilité proprioceptive (centrée sur les muscles, les tendons, les articulations, les canaux del’oreille interne, et permettant notamment la marche ainsi que le contrôle des aptitudes etrenseignement sur l’activité du corps). Le sens kinesthésique (ou encore le sens dumouvement) implique la recherche de l’équilibre (peur de tomber), il serait aussi uneconnaissance imageante du corps (pouvoir se déplacer les yeux fermés) en lien avec leschéma corporel.

Réciproquement, le sens du mouvement des danseurs contemporains quiexpérimentent le travail de ces chorégraphes fait davantage intervenir le mouvant, l’instabilitéet le sensible, un mouvement en transformation, par contraste avec le fixe, le stableimpliquant une forme achevée, un mouvement-position. Ces orientations du mouvementcontemporain remettent ainsi en cause une conception du mouvement traditionnelle, en lienavec une conception formelle, voire mécanisée, du monde et du corps. Elles conçoivent lemouvement comme une « qualité » — non comme une « quantité » ou une « performance »(améliorer toujours ses performances, sa rapidité, etc.) dans une perspective compétitive.Nous retrouvons bien les dispositions mentales et corporelles des éducations somatiques, maiscelles-ci sont mises au service de la création chorégraphique, pas seulement de la formationou de l’entraînement des danseurs.

La danse peut donc se construire avec de micro-mouvements, dans une immobilitéapparente. Il n’y a pas « représentation du mouvement » dans le cerveau, mais une« émulation » de l’action dans un corps quasi immobile.39 De fait, la sensation ne provient pasde l’extérieur ni ne vient stimuler le comportement dans un laps de temps bref ou au contrairequi permet le contrôle du mouvement par la maîtrise des entrées sensorielles, comme lesthèses béhavioristes le supposent. Selon Aurore Desprès, ce point de vue correspond en fait àun type de corporéité, où la sensation est passive et le mouvement actif. Certaines orientationsde la danse contemporaine semblent déconstruire ce schéma de pensée et ce schéma sensori-moteur. Le travail des sensations devient en effet actif, il apparaît comme une rechercheréflexive intériorisée ou comme une exploitation interne et consciente des mouvementsminimaux. En danse, ce travail réceptif et intériorisé n’est pas individualiste comme dans laméditation ; il se fait avec les autres danseurs, à partir de consignes du chorégraphe ou duprofesseur et implique nécessairement le regard des autres.

Le travail des sensations impliquées dans le mouvement en danse contemporainedonne tort encore à la phénoménologie qui considère la sensation comme une pré-réflexion,dans un rapport à un « pré-langage ». Aurore Desprès montre, en effet, qu’un grand nombrede chorégraphes lie « sensations » à « pensée », à « images » en usant de métaphores pouramener les danseurs à faire cette recherche intériorisée. Il n’y a donc pas coupure entresensation et réflexion. La sensation est d’emblée conceptuelle dans le travail de TrishaBrown. Elle s’inscrit dans un « processus de mouvement » et non dans un état de corps.

En conclusion, l’auteur met en perspective trois logiques du mouvement, chacune enlien avec un type de corporéité :

- La logique du geste-usage ou du mouvement-action, que l’on trouve dans uneesthétique formelle (exemple de la danse classique) et qui domine la corporéité occidentale

39 Aurore Desprès se réfère à Alain Berthoz, Le sens du mouvement, Odile Jacob, Paris, 1997.

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(en particulier dans le sport moderne). Cette logique distingue le sensible et l’intelligible, poseun but à l’action, crée un écart entre le sensible et l’action pour parvenir à un but (l’écartpouvant être la réflexion, le calcul, la stratégie). C’est ce modèle de corps que les thèsesbéhavioristes rendent compte généralement et renforcent en pensant l’action comme une suiteordonnée d’opérations (réception, prévision, programmation) vues comme des moyenspratiques permettant d’atteindre le but à atteindre. Dans cette orientation, le sujet de l’actionest volontaire, « investi », et obéit à une logique activiste.

- La logique du geste usé en danse contemporaine interroge la précédentelogique. Elle propose une alternance entre faire et ne rien faire, entre l’effort et le repos. Lemouvement ne vise pas toujours une fin ; il est un flux qui utilise la sensation de « poids » ducorps, et qui joue du temps (du kairos), de l’occasion pour se déployer en dehors des cadresprévus, intégrant dans la chorégraphie des « instants-événements ».

- La troisième logique, la plus radicale, est celle du geste aisthétique. Il s’agitvéritablement de « laisser tomber » les anciennes habitudes motrices en se situant dans un« non-faire ». Cette démarche est encore peu répandue en France mais est très développéechez les chorégraphes américains posts-modernes qui recherchent le « degré zéro » dumouvement. Ce dernier advient en s’appuyant sur les sensations, « sur ce qui est porteur » : lepoids, le contact avec la terre, les supports que peuvent être l’air, le corps de l’autre, desobjets, etc. Le mouvement se transforme sans arrêt, en étant en déséquilibre constant. Onretrouve ce type de mouvement dans la danse Contact Improvisation ou encore dans la dansede Trisha Brown.

Les deux dernières logiques du mouvement interrogent les pédagogies traditionnellesde la danse. Selon l’auteur, elles proposent une « pédagogie du processus » par opposition à la« pédagogie du mimesis » (modèle à imiter en vue d’atteindre un résultat). Il ne s’agit doncplus de transmettre des codes, des exercices correspondant à des formes à imiter, mais demettre en place un « protocole » de recherche de mouvement, où chacun suit son cheminpropre, en expérimentant un corps en mouvement obéissant aux principes : de poids, du non-faire, de la réversibilité, des directions « sans efforts », de la pluridimentionnalité du geste etde la perception. Dans ce cadre, nous avons à faire à une pédagogie portant sur le corps enmouvement uniquement, qui ne vise pas une production chorégraphique. Elle est donc plutôtéloignée de ce que proposent, aujourd’hui, les didactiques de la danse à l’école.

Sylvia FaureGRS- Faculté d’anthropologie et de Sociologie

Université Lumière Lyon 2

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XI.

De la création à la scène

IntroductionL’élaboration d’un produit chorégraphique passe par différentes étapes :

- la création : danseurs et chorégraphes élaborent la chorégraphie. Lechorégraphe s’efforce de guider les danseurs dans leurs improvisations etcompositions alors que les danseurs font l’effort d’une compréhension « par corps »du travail chorégraphique proposé.

- puis la scène, avec ses rituels propres : réappropriation par le danseur d’unechorégraphie, fixée en définitive par le chorégraphe et confrontation avec le public.

I. Espace des styles chorégraphiques, statut du chorégraphe et margesd’actions du danseur

- Position du chorégraphe et place du danseurLa place accordée au danseur au sein du processus de création dépend de la posture

esthétique du chorégraphe mais aussi de son statut institutionnel. Sa posture esthétique est liéeà une méthode de création qui définit les modalités de l’interprétation. Des chorégraphescomme Bouvier-Obadia, Fatoumi-Lamoureux, C. Bastin, J. Nadj, G. Appeix, H. Diasnas ouC. Diverrès, souvent autodidactes ou formés dans des filières d’excellence relativementhétérodoxes (comme M. Béjart), travaillent souvent à partir d'improvisations. Ils posentd’emblée les danseurs comme « co-auteurs » de sa propre danse, ce qui implique lerecrutement de danseurs, expérimentés, pas nécessairement formés à la techniqueacadémique.

Au contraire, les « héritiers » de Cunningham et de l’académisme, comme D. Hervieu,A. Prejlocaj, H. Robbe, pour la plupart formés à la danse académique dans des institutionslégitimées par l’Etat (conservatoires et écoles supérieures), proposent, plus systématiquement,une écriture chorégraphique pré-existante mettant en valeur les qualités plastiques ettechniques de danseurs suffisamment jeunes pour se plier à leurs exigences ( encore« modelables »). Le danseur s’approprie la danse que lui propose le chorégraphe et, par larépétition, la fait sienne, réintroduisant ultérieurement la dimension de l’interprétation.

Un chorégraphe peut passer d’une méthode à l’autre au sein d’une même création,apportant une trame gestuelle et demandant aux danseurs d’improviser à partir d’elle. Aucours des années 1990, la méthode de l’improvisation se généralise jusque chez leschorégraphes les plus influencés par le style académique.

C’est le cas de Dominique Bagouet qui, progressivement, axe son travail sur la question del’interprétation » laissant à ses danseurs plus expérimentés une plus grande marge d’action au sein d’uneécriture chorégraphique très serrée. Cette démarche semble en partie due à sa collaboration avec ChristianBoltanski qui souleva alors la question des rapports de domination entre chorégraphe et danseurs.

Rares sont les chorégraphes qui affirment comme Luc Petton que « le danseur nel’intéresse que pour son corps ». L’appartenance au champ de la danse contemporainesuppose de marquer une rupture, au moins discursive, avec les rapports de dominationsupposés propres au monde et à l’idéologie de la danse classique. La plupart des chorégraphes

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contemporains désignent le danseur, non comme un exécutant, mais comme un interprète àpart entière, c’est à dire comme acteur de la danse et même parfois « co-créateur ».Dominique Bagouet se plaignait que le public, les médias et l’institution s’intéressent trop àlui et pas assez à ses danseurs.

On peut relever de nombreux propos de chorégraphes qui vont dans ce sens:« Le danseur n’est pas un stylo avec lequel le chorégraphe écrit la partition. Entre celui-ci et l’œuvre, il ya le danseur actant, interprète de lui-même…Le défi de la danse aujourd’hui concerne la reconnaissancede « l’auteur-danseur » libre de sa créativité, autonome, « s’agissant » et non le singe de formes imposéespar un épouvantail »40. (Diverrés)

« Dans le contexte des pratiques de danse qui ne favorisent pas la séparation entre l’humain et l’artistique,la danseuse, le danseur est conscient que le moindre mouvement de son bras l’entraîne à participer à unecréation et non pas à la servir, à s’y mêler au point de s’y confondre, de s’y exister ».41 (Saporta)

Ces deux chorégraphes, issues du mouvement des années 1980 et de cette générationde chorégraphes marqués dans leur adolescence par Mai 68, toutes deux en CCN, réaffirmentavec force la volonté de rejeter l’opposition classique entre chorégraphe-auteur tout puissantet le danseur-exécutant, dichotomie évoquant la distinction académique des rôles, voire celle,plus générale, entre patron et ouvriers. Cette dénégation des rapports de pouvoir entredanseurs et chorégraphe permet de réaffirmer le caractère « contemporain » du rapportdanseurs/chorégraphe et d’évacuer tout débat sur ce sujet en situant la conception du projetd’ensemble chez le chorégraphe. La division du travail mise en place laisse une marge de« créativité » au danseur, mais réserve la responsabilité finale ainsi que les lauriers ou lescritiques au chorégraphe. Le danseur est alors un interprète-exécutant au sein d’une totalitéagencée par le chorégraphe-créateur.

La plus ou moins grande fragilité du chorégraphe dans le champ institutionnel peutêtre rapprochée de la méthode de création employée et du profil des danseurs « utilisés ».C’est l’analyse que fait Laure, une ancienne danseuse de Prejlocaj, chorégraphe consacré(CCN et répertoire de l’Opéra de Paris) qui se doit de « tenir son rang » malgré une « baissede créativité » (selon Laure) : « Il engage principalement des jeunes danseurs qui sortent duconservatoire et qu’il a repérés lorsqu’il va y donner un stage. Il a toujours la même écriture,très formelle avec les mêmes combinaisons de mouvements, à la limite de l’académisme. Il nepourrait pas travailler avec des danseurs expérimentés qui verraient qu’il n’a rien à proposer,c’est pour cela qu’il lui faut des petits jeunes… ».

Le turn over relativement important de cette compagnie indique qu’elle marquesouvent une période de transition pour les jeunes danseurs sortis du conservatoire qui, assezrapidement, semblent ne pas y trouver l’espace d’expression espéré.

De même, Luc Petton, compagnie aide au projet, qui ne bénéficie pas d'une réellereconnaissance institutionnelle ou médiatique laisse très peu de marges de liberté à sesdanseurs, en écrivant très précisément la chorégraphie et en insistant sur les qualitésplastiques et formelles des danseurs, afin de ne pas remettre en cause son statut fragile.Réduire le danseur à une fonction d’exécution pure peut être une façon de maintenir sonascendant sur le groupe et le projet chorégraphique et d’éviter ainsi toute crise de légitimité.

Au contraire, la progressive affirmation d’un chorégraphe dans la maîtrise de sonpropos ainsi que dans la reconnaissance institutionnelle peut le conduire à laisser plus de« liberté » d’interprétation aux danseurs. C’est ce qu’analyse I. Ginot (1999 : 185) à propos deD. Bagouet qui, une fois consacré, s’interroge sur le fondement du rapport entre lechorégraphe et le danseur et sur la place laissée au danseur :

40 Catherine Diverrès, in La danse à l’épreuve de la mémoire, Ministère de la Culture et communication,Département des études et de la prospective, 1998.41 Karine Saporta, in La danse à l’épreuve de la mémoire, Ministère de la Culture et communication,Département des études et de la prospective, 1998.

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« J’éprouve actuellement un grand désarroi vis-à-vis de l’héritage de la danse dans son ensemble. Dans cecontexte, le créateur impose des gestes à ses danseurs qui les exécutent mécaniquement pour ainsi dire,selon un académisme qui n’a plus de sens. Je souhaite, dès maintenant, composer des chorégraphiesmoins prétentieuses, moins mathématiques, fondées sur la générosité et la simplicité des mouvements etsur la poésie. Je ne veux plus, du coup, travailler avec des danseurs, mais avec des hommes et des femmesqui dansent, avec émotion, avec leur personnalité. Ce qui ne veut pas dire que je ne crois pas êtreresponsable du projet dans sa globalité ».

Le souci de D. Bagouet de redonner une liberté au danseur s’accompagne del’assurance que son rôle de créateur global ne peut être contesté ou contestable. Il s’agit, pourlui, de faire du danseur un acteur de la chorégraphie, acteur qu’il aura cependant« découvert » et dont il aura percé les potentialités et la « véritable personnalité » au momentdu recrutement et pendant la période de création. Cette prise de position est corrélée à uneévolution de son « style » toujours très formel et presque académique, caractérisé parl’utilisation du vocabulaire classique subverti qu’il fait évoluer dans ses chorégraphies parl’introduction de ce qu’Isabelle Ginot nomme « la maladresse » comme moyen d’expressionde l’identité du danseur, conçu comme sujet et non plus comme objet. Cette « maladresse »est exprimée par le danseur par les contrastes et le sentiment qu’il n’est pas tout à fait à l’aisedans la chorégraphie proposée : « Par exemple, C. Bourigault, c’est une sorte de grandpersonnage, un peu Valentin le désossé, mais avec un côté très romantique, une espèce denoblesse et en même temps il a juste ce qu’il faut de « dyslexie » pour ne pas se figer làdedans… ».

I. Ginot précise le propos de Bagouet. « La maladresse du danseur face à l’écriture du chorégraphe, c’estla mise en conflit, l’écart, ou l’échec d’un sujet à s’ajuster exactement à une forme. ».

Si le danseur est alors plus exposé dans les caractéristiques d’une personnalitéidentifiée et « révélée » par le chorégraphe, la logique du pouvoir s’est déplacée sur le terraind’un dialogue défini et décidé par D. Bagouet avec l’assurance d’une œuvre déjà considérableet reconnue. Le recrutement s’oriente alors davantage vers des danseurs expérimentés, dont ils’agit moins de modeler le corps que d’instrumentaliser la « personnalité » afin de donner uneautre texture à la représentation. Cependant, l’ouverture laissée aux danseurs trouve seslimites dans la nécessité économique et symbolique de la signature qui ne peut être faite quecelle du chorégraphe-créateur. Le danseur doit alors, pour aller jusqu’au bout de la libertécréatrice qui lui est accordée, développer son propre langage dans un cadre institutionnel luipermettant d’apposer sa marque et son style propres. C’est le cas de nombreux interprètes deBagouet qui ont quitté la compagnie et sont devenus chorégraphes (Angelin Prejlocaj, C.Bourigault, M. Kelemenis).

- Improviser et composer : un moment gratifiant où le danseur se vit comme« auteur »Le travail de création, en particulier lorsque le danseur improvise, est un travail sur

« la sensation », de pré-incorporation de l’habitus propre à l’univers du chorégraphe. Cetravail ne peut se faire sans un « échange » : incoporation de routines, mais aussi émergencede nouvelles formes qui n’auraient pas vu le jour sans le jeu interactif mêlant danseurs etchorégraphe. La forte dépendance mutuelle est régulièrement affirmée, voire revendiquée, parles danseurs quand ils évoquent cette phase de construction du produit artistique : « Lepartage, c’est obligatoire pour faire une création, si le danseur n’est pas là, le chorégraphe nepeut rien faire. Pour qu’on corresponde à ce qu’il veut, il est obligé d’être à l’écoute ».(Claudia, danseuse, 15 ans d’expérience professionnelle).

Il s’agit, pour le chorégraphe, de modeler et de dégager des lignes directrices à partirdes dispositions et des propositions du danseur. Cet aller-retour incessant entre le danseur et

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le chorégraphe est un modelage continu du « matériel » que chacun apporte et le momentpendant lequel la prépondérance d’un point de vue s’affirme.

Claudia relate ainsi la phase de création avec Ian Fabre durant laquelle elle improvise et apportel’essentiel de la gestuelle : « Il m’apportait uniquement quelques précisions corporelles, mais quimodifiaient la qualité du mouvement. Par exemple, il m’a fait changer l’angle de ma main puis de moncoude sur beaucoup de mouvements, ce qui donnait une allure « cassée » à mes mouvements…C’est moi,qui apportais l’essentiel du mouvement, mais en même temps c’est lui le chorégraphe, parce qu’ilmodifiait par petites touches pendant les impros et ça donnait autre chose ».

Le chorégraphe livre la plupart du temps, des thèmes issus de ses lectures, depeintures, de spectacles de théâtre ou de cinéma. En théorie, tout peut être utilisé pour inspirerune création, mais le thème utilisé s ‘inscrit souvent dans une stratégie de distinction àl’intérieur du champ chorégraphique. Certains chorégraphes s’inspirent de lecturesphilosophiques, alors que d’autres inscrivent leur conception dans une réflexion sociale issuedu « terrain » ou tirent de leur histoire personnelle la « matière » de la pièce. Le danseurimprovise à partir d’indications gestuelles du chorégraphe ou à partir d’un thème ou d’unesérie de thèmes.

L’élaboration de la pièce « Fruits » de C. Diverrès est exemplaire de la modulation durôle du danseur pendant toutes les phases d’un processus de création et des interactions entredanseurs et chorégraphe.

Formée chez Béjart, C. Diverrès débute la chorégraphie au début des années 1980. Sa rencontre avec unmaître Buto oriente sa gestuelle où des moments de suspens alternent avec des enchaînements physiquesoù se succèdent les chutes et des mouvements brisés toujours retenus qui demandent au danseur, à la foisun contrôle très strict et un grand relâchement afin de ne pas s’épuiser musculairement. Elle émaille sondiscours de nombreuses références à la philosophie et appartient à cette mouvance de chorégraphescontemporains qui revendiquent leur engagement dans une réflexion d’ensemble sur le monde social. Lesphilosophes cités comme Lévinas ne sont pas les plus légitimes dans l’espace des philosophesprofessionnels (Soulié, 1995) et sont de ce fait plus susceptibles d’une appropriation par des« intellectuels » autodidactes. Elle considère que « le danseur ne peut pas être un simple exécutant maisun artiste autonome » et que « chacun doit trouver la nécessité de son propre geste ». Jusqu'à la pièce« Fruits », elle travaillait en collaboration avec Bernardo Montet son conjoint et la même équipe dedanseurs pendant près de huit ans. La séparation du couple de chorégraphes succède à l’éclatement de lacompagnie, seul parmi les anciens, reste Fabrice. La pièce « Fruits » est faite avec une nouvelle équiperecrutée par audition que la chorégraphe doit « former » à son univers, elle qui considère qu’il faut à peuprès trois ans pour qu’un danseur intègre la spécificité de sa gestuelle.

La chorégraphe propose dans un premier temps des thèmes tirés d’un poème d’Hölderlin qu’elle distribueaux danseurs afin qu’ils le lisent et s’en « imprègnent ». Les thèmes choisis par C. Diverrès sont : ledésir, le danger, l’amour, le temps, la résistance, la violence, la corruption, la grâce, la joie. Ces thèmesgénériques et marqués socialement par les référents philosophiques et psychologisants (le désir), sontautant de prétextes pour un travail d’improvisation mais servent aussi à plonger les danseurs dans uneatmosphère qui influera sur leur façon de faire un mouvement : ce que C.D. appelle, dans sa terminologie,« un état de corps ». Les improvisations s’étalent sur près d’un mois, chaque jour étant consacré àtravailler collectivement autour d’un des ces thèmes. La plupart du temps, les danseurs ont à préparerindividuellement une petite composition pour le lendemain autour d’un des thèmes qu’ils peuvent illustreren demandant à d’autres danseurs de faire partie de leur composition ou en utilisant des objets, un texteou une musique, mais la plupart du temps l’improvisation se fait en silence. Ce travail d’immersioncollectif renforcé par le fait que de nombreux danseurs partagent un appartement (seul un des danseurshabite Rennes) contribue à souder un rassemblement d’individualités qui, pour la plupart, ne seconnaissent pas et se découvrent au fur et à mesure des journées de création.

La chorégraphe donne des indications qui constituent le fil directeur ou la « formesociale »42 dans laquelle les danseurs esquissent une première danse qui suggère des« images » à la chorégraphe, affine son propos en le confrontant au réel du corps desdanseurs. C’est une véritable phase de collaboration mais qui est en même temps basée surune répartition des tâches. La chorégraphe apporte le sujet et décentre le regard en étant à la

42 Simmel, comment les formes sociales se maintiennent.

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fois proche et lointaine. C’est une « étrangère » au sens où Simmel (1984) l’entend, synthèsede « distance et de proximité », dans la mesure où elle participe directement au processus decréation mais reprend toujours une distance vis-à-vis de celui-ci pour pouvoir continuer àremplir son rôle de « directeur » de danseurs.

Le rôle du danseur est celui d’un participant actif puisqu’il s’investit aussi bienphysiquement que mentalement, en faisant lui-même un travail de recherche (lecture,expositions, etc.) qui l’aide à comprendre la demande du chorégraphe et à se fondre dans sonunivers. Ce travail préalable peut être complété par des discussions informelles avec lechorégraphe ou les autres danseurs et conditionne la « spontanéité » du danseur quiimprovise. Durant cette phase, le danseur se sent pleinement co-créateur et en tire desgratifications proches de celle décrites par Delbos et Jorion à propos de l’apprentissage dumétier de paludier par les enfants qui se socialisent professionnellement en affichant un« désir de bien faire » et un « désir d’apprendre » (1984). Ces désirs sont inhérents à lavolonté de penser le métier de danseur comme celui « d’auteur » ou, du moins,« d’interprète ». Par ce biais, la notion de « création », est réintroduite dans le travail le pluscodifié qui soit et permet au danseur de laisser transparaître son « intériorité ». La nécessité dese maintenir dans la compagnie et d’y trouver « artistiquement » son compte conduit ledanseur à faire de la composition et/ou de l’improvisation un moment de la légitimation dubien-fondé de sa place dans la compagnie, à la fois aux yeux des autres danseurs (enparticulier lorsqu’il est nouveau et travaille avec une équipe déjà constituée) et duchorégraphe.

Elle peut être propice à la « découverte de soi », le danseur explorant une nouvellefacette de sa personnalité, parallèlement à l’apprentissage de compétences physiquesinhabituelles. La thématique de « l’écoute du corps » à travers les perceptions sensori-motrices rejoint celle de « l’intériorité travaillée » (Vigarello, 1978 : 297) au principe de la« créativité ». Le danseur se révèle capable de « faire des choses qu’il n’aurait jamais pensépouvoir faire », en particulier après une séance d’improvisation particulièrement intense. Lescorrections, les demandes répétées du chorégraphe sont alors perçues comme le signe d’unvéritable échange, le danseur se mettant au service du chorégraphe qui concentre son attentionsur le danseur et le « nourrit ». La thématique de la « nourriture » est fréquemment utilisée parles danseurs au cours des entretiens. Cette métaphore qui fait du chorégraphe « une mèrenourricière » est le plus souvent associée à la figure d’un chorégraphe charismatique.

L’autonomie accordée au danseur dans les exercices de composition chorégraphiqueet/ou les improvisations, ouvre au danseur la possibilité d’habiter par leur expériencesingulière la danse signée par le chorégraphe. Loin du modèle de la danseuse classique décritepar Mallarmé43, il s’agit de permettre au danseur d’investir la forme proposée et même d’enêtre la source.

- « Créer » : un ensemble de compétence

1. « Créer » : une compétence sociale

L’espace de création réservé au danseur au cours de l’élaboration du produitchorégraphique est, le plus souvent, celui du travail d’improvisation, adopté aujourd’hui par

43 A savoir que la danseuse n’est pas une femme qui danse, pour ces motifs juxtaposés, qu’elle n’est pas unefemme, mais une métaphore résumant un des aspects élémentaires de notre forme, glaive, coupe, fleur, etc, etqu’elle ne danse pas, suggérant, par le prodige de raccourcis ou d’élans, avec une écriture corporelle ce qu’ilfaudrait de paragraphes en prose, dialoguée autant que descriptive, pour exprimer, dans la rédaction : poèmedégagé de tout appareil du scribe ». Stéphane Mallarmé, « Crayonné au théâtre », Divagation, in Isabelle Ginot,op. cit, p. 206.

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la plus grande partie des chorégraphes contemporains : faire « improviser » les danseurs estquasiment devenu une banalité.

Le travail d’improvisation demande au danseur la capacité de « se mettre en jeuphysiquement et intellectuellement » autour de thèmes plus ou moins conceptuels.L’improvisation, enchaînement « spontané » de mouvements sur un support musical, devientici élaboration et composition sur un thème, en particulier lorsqu’il n’est pas narratif maisconceptuel (par exemple, improviser sur « le temps », ou « le désir »). Cet exercice requiert lacapacité psychologique de s’exposer publiquement et d ‘ « inventer » à partir d’un« concept » : autant de dispositions acquises dans l’univers scolaire. Se « laisser aller »,« trouver un état » sont autant de formules qui désignent le pouvoir d’éprouver la symbioseentre la représentation de « l’idée » et le mouvement. De nombreux danseurs évoquent ladifficulté initiale de comprendre l’exercice même de l’improvisation, le trouvant « déplacé »,« impudique », « intello et prise de tête » ou s’avouant « incapables d’inventer ». Pour ceuxqui ont peu de capital scolaire et culturel, souvent issus de milieux populaires, l’acculturationà l’exercice de l’improvisation, censé être « liberté » par rapport aux codifications de la danseclassique ou du Hip Hop (figures imposées), suppose un dépassement de leur rapport initialau corps et à leur « intériorité ». Cet effort est encore plus visible chez les filles issues demêmes milieux qui ont intériorisé une certaine « pudeur » dans leur éducation (Boltanski,1971 : 205), mais aussi au sein d’une formation académique, où elles ont incorporé lesvaleurs, sexuellement signifiantes, du rôle social réservé aux femmes. À l’inverse les jeunesdanseurs issus de la petite bourgeoisie intellectuelle manifestent une plus grande facilité àimproviser, à s’engager physiquement et à mettre en jeu leur « personnalité ».L’improvisation n’est pas sans rapport avec « l’aisance », « cette sorte d’indifférence auregard objectivant des autres qui en neutralise les pouvoirs » et qui « suppose l’assurance quedonne la certitude de pouvoir objectiver cette objectivation, s’approprier cette appropriation »(Bourdieu, 1977). Cette « aisance » du mouvement n’est pas nécessairement liée à l’aisancelangagière : nombreux sont les danseurs qui évoquent leur timidité naturelle dans le cadre desinteractions de la vie quotidienne et leur soudaine « liberté » - perçue comme une« libération » - d’expression de leur « moi profond » lorsqu’ils « entrent en improvisation ».Improviser c’est à la fois se « lancer » mais aussi « contrôler » pour ne pas « perdre la face »ou commettre une « gaffe » par rapport aux attentes du chorégraphe, c’est montrer uneaptitude à objectiver sa « personnalité » dans un cadre formel imposé.

Improviser, c’est mettre en œuvre un ensemble de répertoire pré-constitués au cours dela formation dans une école et/ou la sédimentation de diverses expériences scolaires,familiales, professionnelles mobilisées et recomposées en vue de s’accorder avec la demandedu chorégraphe, les impératifs de son « style » et de sa technique corporelle. Il s’agit, d’unecertaine manière, de faire preuve « de culture », c’est-à-dire de mettre en œuvre « unensemble commun de schèmes fondamentaux, préalablement assimilés, à partir desquelss’articule selon un « art de l’invention » analogue à celui de l’écriture musicale, une infinitéde schémas particuliers, directement appliqués à des situations particulières. Les topoi ne sontpas seulement des lieux communs, mais aussi des schèmes d’invention et des supports del’improvisation, (…) ils fournissent des points d’appui et des points de départ auxdéveloppements, surtout improvisés, à la façon dont les règles de l’harmonie et du contrepointsoutiennent « l’invention » musicale la plus inspirée et la plus libre en apparence… »(Bourdieu, 1967 : 371).

L’improvisation est donc un exercice socialement situé, tout comme la psychanalysel’est dans le champ des thérapies. Véritable compétence professionnelle, elle révèlel’adaptabilité du danseur aux différents univers chorégraphiques rencontrés.

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2. « Créer » : une compétence professionnelle

L’acquisition d’un nouvel « habitus » corporel se fait avec le consentement du danseurqui y voit une caractéristique de son métier et un moyen d’accumuler un capital d’expérienceinscrit dans la mémoire du corps. Il doit, d’une certaine façon, s’effacer devant le modèle quilui est proposé pour pouvoir pleinement « entrer dans la danse ».

C’est ce qu’atteste Giovanni en parlant de son « engagement » chez C. Diverrès : « On vient ici pourentrer dans un moule précis et ce n’est pas du tout péjoratif. Je crois qu’il est nécessaire d’en passer par-làpour apprendre autre chose. J’ai compris qu’il me fallait mettre de côté ce que j’ai pu acquérir jusqu’àaujourd’hui, ce que j’avais déjà en moi en tant qu’expérience de danseur, pour n’être plus qu’un corps quis’efface, afin d’être en harmonie avec le travail ».

La suspension relative des savoir-faire corporels propres aux danseurs et la capacitéd’épouser une autre technique, une autre conception du mouvement, sont des compétences quipermettent de distinguer le danseur professionnel de l’amateur aussi doué soit-ilathlétiquement. Pouvoir passer d’une compagnie à une autre suppose la malléabilité du corps,plasticité rarement atteinte dans la mesure ou la plupart des danseurs travaille dans desregistres assez voisins de ce auxquels ils sont prédisposés (par leur formation, leurmorphologie, leurs expériences antérieures). Si la danse est l’art de la transformation, c’estaussi le métier où le corps est le terrain de ce changement. C’est ce qu’expérimente le danseurqui découvre un autre univers chorégraphique, une autre façon de concevoir le mouvement.Le corps n’est pas seulement « l’enjeu » d’une technique corporelle, mais aussi celui d’uneadaptation des affects et des sensations aux exigences d’une production artistique. Nombreuxsont les danseurs qui évoquent une expérience professionnelle où ils ont vu leur corps changercomme s’il était « possédé » :

C’est le cas de Carole, jeune danseuse de formation « classique », fraîchement arrivée dans la compagnieC.Diverès : « Physiquement, j’avais mon corps qui tremblait. Tout semblait ne plus tenir qu’à un fil. Jesentais un vide d’énergie et en même temps une grande force. Cela fait un peu peur de se retrouvercomme ça. On se demande ce qui se passe. En réalité, tout va très bien. On essaie de prendre du recul etl’on s’aperçoit qu’il y a des changements. C’est la transformation du corps. » De même, Bénita,récemment arrivée dans la compagnie : « Je me découvre un corps auquel je suis inhabituée, je le voischanger… ».

Ce « double regard » sur son propre corps qui devient « inhabituel » indique le travailprogressif et quotidien du processus de transmission d’un habitus corporel qui recompose lesdispositions de chaque danseur. « Prendre du recul » par rapport à son propre corps consistealors à évaluer et discerner les changements et à se les approprier par le jeu du « test », durecommencement pour soi des mouvements appris pendant le cours ou la « répétition »,jusqu'à ce qu’ils soient « naturalisés » dans les schémas psychiques et physiologiques dudanseur. La modification d’une des trois composantes de l’émotion - le geste, l’expérienceconsciente et le processus physiologique - définie par Gerth et Mills44 entraîne unbouleversement des deux autres. Avoir la « maîtrise de son corps » dans l’espace, c’estsimultanément contrôler ses affects et l’effet de la représentation face au chorégraphe et/ou aupublic.

La méthode de l’improvisation explicite les compétences professionnelles spécifiquesmobilisées par le danseur. L’improvisation est une pratique professionnelle dans la mesure oùil s’agit de répétition, de reproduction en vue d’une correction, d’inflexion selon uneorientation décidée par le chorégraphe. Le danseur qui improvise se distingue des danseurs dediscothèque qui l’espace d’un soir, « se lâche », « s’éclate » comme ils disent. En effet, il doitnécessairement mémoriser ce qu’il a fait, pour en faire une « matière » à travailler. Lamémoire implique la distance au rôle et donne au chorégraphe la possibilité d’exercer son

44 Hans Gerth et C. Wright Mills, Character and Social structure, New York, Columbia UP, 1989, p 160. Cit. inLoïc Wacquant, Carnets ethnographiques d’un apprenti boxeur, Agone, Mémoires sociales, 2000.

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regard et son choix. C’est pourquoi « improviser » demande souvent un apprentissage etapparaît, dans le discours des danseurs, comme un travail. Certains danseurs sont plusexpérimentés que d’autres, tel ce danseur capable d’improviser pendant plus d’une heure et derestituer l’intégralité de son improvisation à la demande avec la même intensité. Ceprofessionnalisme s’acquiert par une pratique répétée et l’apprentissage d’un « doubleregard » qui autorise un « laisser aller » tout en objectivant et en enregistrant une série deséquences gestuelles reproductibles. Le danseur mobilise des schèmes psycho-moteurs quiorganisent des combinaisons de mouvements déjà inscrits dans le corps. Le corps est à la fois« pense-bête », par les routines qu’il met en œuvre mais aussi source d’innovation et deproduction immédiate, utilisable grâce à une réflexivité qui ne passe pas par le chemin del’intellect (au sens scolastique du terme), mais par celui d’une connaissance et d’uneconscience spécifiquement corporelle. Cette objectivation dans le jeu de l’improvisation,renforcée par les précisions et les interventions verbales du chorégraphe sous formed’encouragements (et parfois de consternation), marque le processus d’incorporation quipermet à la création de « prendre corps » collectivement.

Le jeu sur les émotions et sur le langage contribue à façonner un corps dansant,expression d’une individualité et d’une signature chorégraphique.

II. Trouver des « états » : incorporation et activité langagière- Le travail d’improvisation : trouver des « états »Certains chorégraphes, comme les metteurs en scène adeptes de la méthode

Stanislawski, peuvent pousser le danseur dans des états psychologiques intenses, en ledéstabilisant et en le poussant dans ses retranchements, afin de voir, dans son corps enmouvement, la représentation qu’il se fait du thème ou de l’émotion préalablement imaginée.

« Tu vas demander à l’interprète de sortir des choses de lui qui ne sont parfois pas évidentes, tu vasl’emmener dans des chemins où il ne serait peut être pas passé…Il y a un moment donné, où tu vas luidonner le cadre le plus serré possible pour qu’il n’échappe pas à ce que tu désires de lui…Utiliser le jeudes affects pour servir la danse, c’est intéressant mais tu dois évaluer jusqu’où tu peux aller avec lapersonne…Pour le danseur, ça peut lui donner une révélation de lui-même qu’il ne serait pas allerchercher tout seul. » (Jean Gaudin)

Le chorégraphe joue ainsi sur les affects du danseur mettant en pratique l’idéequ’interpréter c’est « vivre » le rôle. Elle induit un risque, tant physique que psychique, pourle danseur qui peut être « malmené » par le chorégraphe pour lui faire exprimer dessentiments qui donnent à voir une autre qualité dans la gestuelle.

Ainsi, les séances d’improvisation peuvent conduire à des états de transes, un « étatd’effervescence qui change les conditions de l’activité psychique » (Durkheim, 1968 : 603).

Barbara évoque cette sensation lors d’une séance d’improvisation faite sur le thème du « cheval » : « Jen’ai jamais vu beaucoup de sauts surgir d’une improvisation. Avec le cheval, tout à coup, tout le mondesautait. C’était incroyable. Travailler sur l’état du cheval a été un moment passionnant. Seulement l’étatsans le mouvement. Comment à l’intérieur du corps voir une transformation, juste une sensation. Cela nepart pas dans un mouvement. Il faut aller creuser à l’intérieur. Parfois cela ne bouge presque pas. C’est lecorps lui-même qui prend une forme. ».

La découverte « d’un état », locution indigène, est régulièrement mentionnée par lesdanseurs. Elle souligne le caractère « enrichissant » et « créatif » de la collaboration avec lechorégraphe. Pendant une séance d’improvisation le danseur peut modifier ses perceptions etles approfondir à partir d’un sujet proposé par le chorégraphe.

Je participe à une séance d’improvisation dans la compagnie C. Diverrès avec cinq autresdanseurs de la compagnie. La chorégraphe, assise dans un coin du studio, guide le déroulement de laséance : « Vous êtes la montagne…dans la montagne il y a des ruisseaux, vous êtes le ruisseau (temps de

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pause)…il y a aussi des arbres, vous êtes un arbre…il y a des animaux, soyez un animal » (elle varie leton de la voix et répète plusieurs fois la même chose). Pendant les vingt premières minutes del’improvisation, je me sens très mal à l’aise, j’ai l’impression d’être dans une secte, je fais comme lesautres et essaie de bouger en me repérant progressivement à sa voix et aux images mentales qu’ellepropose même si je me demande ce que je fais chez les fous ! ! ! Ainsi, lorsqu’elle évoque les animaux dela montagne, je me mets à faire des sauts comme la plupart des autres danseurs. Au bout d’environ 45minutes d’improvisation, l’effort physique et les directives de C. Diverrès ont fait sauter mes résistancesd’ordre rationnel et j’ai la sensation de participer à une danse collective dans laquelle je trouve desinterlocuteurs privilégiés (je me mets ainsi à improviser avec un danseur reprenant en écho sesenchaînements et y ajoutant autre chose auquel il répond de même). Les variations de ton de C. Diverrèsde plus en plus pressante au fil de la séance, ses interventions répétées sous formes de métaphores(« Vous êtes le feu sous la montagne et la glace au dessus ») et de mots psalmodiés (le feu, la glace, etc.)induisent une rythmique particulière qui met dans un état dans lequel tout semble possible physiquementet où l’autocontrôle, bien que présent, apparaît sensiblement relâché (Bateson, 1977)45. A un moment, ellenous demande de nous remémorer des personnes proches, notre grand père, notre mère (« Et voici votregrand père, il est fatigué, d’ou vient il ? qu’avez vous à lui dire ? ») et enfin elle nous demande de nousimaginer âgés, attendant la mort. L’état émotionnel dans lequel elle a réussi à mettre à la foiscollectivement et individuellement les danseurs permet alors une forme de libération des contraintes quifait éclore des mouvements commandés par la nécessité d’expulser la tension et non plus par le simplesouci de bouger ou de montrer ce que l’on sait faire. La manipulation psychologique entreprise parC.Diverès qui, en quelque sorte, joue le rôle de grande prêtresse, fonctionne dans la mesure où elle estinscrite dans un espace délimité (le studio de danse) et dans le cadre d’un travail de créationchorégraphique mais aussi parce que les danseurs lui reconnaissent le droit de jouer ce rôle de guide etont le sentiment « d’apprendre énormément » sur leur art à son contact(comme me le dira un desdanseurs).

Certains chorégraphes insistent sur « les couleurs que doit prendre tel ou telpersonnage », d’autres utilisent des métaphores, prétextes à parler au corps comme « être uncheval « ou « sois animal » ou des concepts « tu représentes le désir, la souffrance, la joie,etc. ».

C’est ce que montre Pascal danseur chez C. Blaise : « C. a des idées précises, elle prépare sa création surla littérature, des tableaux. On lui demande « C’est quoi ta nourriture ?, pour qu’on soit sur la mêmelongueur d’onde que toi ». Elle nous dit « J’ai une idée de trio, d’une atmosphère de pièce qui va raconterça ». Quand on a créé « gueule de loup » à partir de l’Espagne, la tauromachie, la fierté et la foi del’espagnol, le premier jour d’impro, elle a fixé à chacun sa couleur : « Essayez de respecter vos couleurs.Nasser, tu es celui qui vient de l’extérieur. Pascal, tu es celui qui est dans l’intérieur ». Elle ne définissaitpas les choses, elle a commencé à les définir dans les impros. On avait chacun lu les livres, donc on étaitdans des « couleurs » et elle intervenait pour nous encourager à poursuivre dans telle ou telle voie. »

L’interprétation intellectuelle des indications du chorégraphe va parfois à l’encontred’une « compréhension par corps » guidée par des interventions qui ne sont pas seulementverbales (ce peut être un froncement de sourcil, un sourire encourageant, etc.). C’est qu’il nes’agit pas pour le danseur de s’expliquer ce que veut véritablement le chorégraphe, mais desaisir et de sentir les intentions qui l’animent. L’observation des autres danseurs (surtout si cesont des « anciens ») ou du chorégraphe, surtout s’il danse dans la création, permet de décoderles discours et de les adapter aux dispositions motrices et sensorielles. Comme le soulignePierre Bourdieu « c’est parce que le corps est (…) exposé, mis en jeu, en danger dans lemonde, affronté au risque de l’émotion, de la blessure, de la souffrance (et rien n’est plussérieux que l’émotion qui touche jusqu’au tréfonds des dispositifs organiques), qu’il est enmesure d’acquérir des dispositions qui sont elles-mêmes ouverture au monde » (Bourdieu,1997). Le regard du chorégraphe est alors structurant et soutient le danseur dans son travail derecherche et de possible innovation. Les indications répétées, les thèmes donnés la veille àpréparer pour le lendemain, les lectures, les films et autres supports d’inspiration rendentpossible l’intuition « artistique ». Cette interaction entre le « moi » du danseur et le regard duchorégraphe permet l’action « créatrice » qui « engage si profondément l’identité de lapersonne que ses actes ont nécessairement un très grand pouvoir expressif » (Strauss, 1994).45 Gregory Bateson signale que les danses de transe s’accompagnent par des prières, in « Les usages sociaux ducorps à Bali », Actes de la recherche en sciences-sociales, 1977, n°14, pp. 3-31.

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Le travail d’improvisation est un premier essai où le danseur, tout en suivant lesdirectives du chorégraphe, recherche des sensations qui le rapprochent à la fois de sareprésentation intime du sujet proposé et des consignes qui lui ont été données par lechorégraphe. Cependant, il reste maître de son identité corporelle et combine les deuxnécessités, concurrentes mais complémentaires, d’avoir à exprimer sa « singularité » et le« désir » de l’employeur. Cette objectivation de son corps dans une attitude d’auto-observation et d’écoute représente la première phase de mise à disposition du corps dans uncadre formellement construit par le chorégraphe que l’on peut rapporter à la notion « d’arrièreplan » définie par John R. Searle (1995) comme « l’ensemble des capacités nonintentionnelles, ou pré-intentionnelles qui permettent aux états intentionnels de fonctionner. »Ce sont les dispositions acquises antérieurement par le danseur qui sont autant decompétences mobilisables qui s’adaptent à « l’arrière plan » donné plus ou moinsexplicitement par le chorégraphe et qui orientent et structurent à la fois la perception de cetarrière-plan mais aussi la recherche « d’états » vécus comme individuels par le danseur.

C’est parce que le danseur a une conscience plus ou moins précise de l’univers et de lagrammaire corporelle du chorégraphe qu’il « improvise » d’une façon plutôt que d’une autre,mais c’est aussi parce qu’il adapte en partie consciemment ses dispositions qu’il ressent cetteimprovisation comme une expérimentation intime.

Le « décalage » que peut expérimenter le danseur, volontairement ouinvolontairement, entre l’imaginaire du chorégraphe et le sien, révèle que l’improvisation estintrinsèque à un mode de travail instauré par le chorégraphe et qu’il ne s’agit pas pour ledanseur de se « laisser aller » hors cadre.

Fabrice raconte ainsi cette expérience avec une chorégraphe : « Elle nous demandait de travailler sur lafluidité, l’air et l’eau. Elle nous a dit que « Tout ce qui était gestuelle cassée, chute, tout ça ne l’intéressaitpas ». Or moi, c’est ce qui m’intéressait à l’époque. J’étais pas tout à fait d’accord avec son travail et j’aigardé ses consignes de fluidité, mais au lieu d’être dans l’ouverture et la projection, je me suis déguisé envieille femme et j’ai traversé le studio comme ça. Elle n’était pas contente parce que cette impro sortait dece qu’elle avait fixé… ». Cet exemple, montre qu’improviser ne consiste pas à déformer ou sortir descadres du jeu fixé par le chorégraphe, mais à développer des propositions modelées par sa proprepersonnalité dans un registre professionnel, c’est à dire dans le respect des consignes données parl’employeur.

D’où la question des écarts entre les dispositions respectives du chorégraphe et dudanseur, qui doivent être compatibles et évaluées comme telles lors du recrutement, pour qu’ily ait production créatrice. L’injonction paradoxale lancée sous différentes formes par lechorégraphe au danseur -« Surprend moi dans les limites que j’ai imposées » - pose laquestion du degré de « surprise » acceptable mais aussi nécessaire pour que le danseur ne sedésengage pas du jeu.

Ainsi Pascal, raconte la colère qu’il a éprouvée lors d’une séance d’improvisation avec le chorégrapheJean Gaudin qui l’avait choisi pour faire un solo : « On travaillait pour une « création », il m’a lancé surune impro et je me suis aperçu qu’il l’avait déjà utilisée pour une autre de ses pièces. Du coup, on s’estengueulé, je lui ai dit : « Tu peux pas me lancer sur ce thème, on est en création ». Et là il m’a dit « Quelleest la partie de ton corps que tu préfères ? » et là, j’ai fait une impro. Il m’a dit : « Provoque moi et moi jete provoquerai ». Je me suis retrouvé à improviser : six heures par jour d’impro et il était étonnéparcequ’il voyait que j’étais infatigable. »

Le chorégraphe comme le danseur est ainsi soumis à l’impératif de « l’invention » etcet exemple montre les ajustements que chacun doit faire pour permettre à l’autre d’innover.Le danseur exprime ici une autre forme d’injonction que l’on peut résumer ainsi : « Donne-moi les cadres et le regard qui me permettent d’exprimer quelque chose de moi qui puisse tesurprendre ».

Le processus d’incorporation est pleinement réalisé pendant les répétitions par lefaçonnage des corps conduit par le chorégraphe.

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Il est particulièrement exemplaire chez la chorégraphe C. Diverrès qui précise : « Si la danse estmauvaise, il est visible que les danseurs exécutent quelque chose qu’ils n’arrivent pas à maîtriser… Jevois toujours les défauts du mouvement. Je vois ce que j’imagine et que nous n’en sommes pas là. Je voisle défaut dans le corps, l’énergie qui ne traverse pas, même si cela fonctionne, si c’est justerythmiquement. Quand je ne vois pas ce que je veux, quand un geste n’est pas compris, si le corps n’a pascompris l’énergie, le temps, la justesse du geste, c’est terrible. »

Il s’agit d’un regard « totalitaire » pour lequel le corps du danseur se doit decorrespondre à l'image mentale qui anime les corrections et les colères du chorégraphe. Letemps de la répétition est une explicitation des normes et valeurs senties intuitivementpendant la période de création et une intériorisation systématisée par le rabâchage desenchaînements, les rectifications de détails par le chorégraphe, afin de pouvoir faire le « gestejuste ».

Le « défaut du mouvement » résulte d’une discordance des capacités motrices avec laperception idéale qu’en a la chorégraphe mais révèle aussi la difficulté que le danseur peutéprouver à intérioriser ses exigences tant corporellement que mentalement (physique etpsychique étant quasi indissociables dans le mouvement). L’investissement quasi-physique duchorégraphe qui essaie de faire coïncider dans les corps en mouvement les normes propres àson « style » chorégraphique et les dispositions inscrites dans chacun des danseurs explique lesentiment de déception intense quand le danseur, tout en remplissant son contrat (respect de larythmique et de la synchronisation avec les autres danseurs), affiche son « incompréhension »par l’absence de « justesse » dans ses gestes.

L’intériorisation de « l’habitus » propre au chorégraphe s’établit alors par le biaisd’une acculturation progressive qui multiplie les supports de transmission tant corporels quelangagiers (le cours, les discussions informelles avec des anciens de la compagnie, le travailde création puis celui de répétition).

- Langage et processus d’incorporationLa compréhension intellectuelle des demandes du chorégraphe ne suffit généralement

pas au danseur pour correspondre aux attentes. La coïncidence avec l’image mentale duchorégraphe s’obtient progressivement par tâtonnements et compromis mutuels, lechorégraphe pouvant renoncer à certains aspects et en conserver d’autres que le danseur aproposé pendant les séances d’improvisation. Orienter et diriger les émotions contribue à fairecoïncider l’imaginaire du danseur avec les schèmes proposés, intériorisés au fil d’un travail ouse mêlent intuition et correction. Comme au cours de la formation, le langage intervient dansl’intériorisation de techniques du corps spécifiques46.

L’activité langagière du chorégraphe vise à donner des impulsions et des orientations,et à indiquer la rythmique propre à la danse. Cette « intelligence du corps » à laquelles’adresse le chorégraphe n’utilise pas le langage rationnel comme vecteur privilégié mais plusencore que l’enseignant, un langage imagé destiné à « faire comprendre » le sens et la formeque doit prendre le mouvement.

La question est posée en ces termes par Pierre Bourdieu (1987) : « Une des questions posées estde savoir s’il faut passer par les mots pour faire comprendre certaines choses au corps, si quand on parleau corps avec des mots, ce sont des mots justes théoriquement, scientifiquement, qui font le mieux

46 Sylvia Faure note que « Les pratiques de danse, en tant que techniques du corps se déroulant dans desconfigurations sociales particulières, sont tramées par des pratiques langagières multiples qui sont desinstruments d’action (et non des discours organisés) liées aux autres dimensions de l’apprentissage quistructurent les manières de transmettre et d’incorporer des savoirs faire ; certaines pratiques langagières suscitentparfois - dans certaines conditions - des prises de conscience réflexives ». Sylvia Faure, « Dire et (d’) écrire lespratiques de danse. Opposition entre pratiques discursives et non discursives », Cahiers internationaux deSociologie, Vol. CVIII (161-178), 2000.

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comprendre au corps, ou si parfois, des mots qui n’ont rien à voir avec la description adéquate de cequ’on veut transmettre ne sont pas mieux compris par le corps. ».

L’utilisation d’un méta-langage à la fois propre au milieu professionnel et à l’universspécifique du chorégraphe, cherche à transmettre au danseur une information qu’il peutimmédiatement interpréter corporellement. Cette médiation discursive facilite ainsi l’activitémême de création. Comme le souligne Bernard Lahire (1998 : 197), « le langage est trèssouvent inséré, enserré dans le cours de l’action, contribuant à le faire avancer, à le modifier,etc., mais pas désencastré (et désencastrable) des gestes, des mouvements, des déplacements,etc. »

Le corps a sa propre temporalité distincte de celle, plus scolastique, de lacompréhension intellectuelle qui voit dans le langage un producteur de sens rationnelimmédiatement appréhendable.

Les indications verbales du chorégraphe peuvent relever, au cours de la mêmeintervention, du registre de la métaphore et d’indications plus techniques qui nécessitentl’usage d’un langage rationnel :

C. Diverrès donne ses corrections pour la répétition de la phrase de groupe : « Les mains mortes, lesmains sont mortes. Tombe dedans par les reins/ monte sur tes jambes/ tourne avec le dos/ le poids desbras entraîne le dos » Un temps de pause. Reprise : « Les mains ! » / puis à Paul l’un des danseurs :« Dans le saut, ne pas trop voyager, dans le grand plié tu es en bas trop vite ».

Les indications techniques relèvent d’un savoir-faire sur le corps que la chorégrapheessaie d’inculquer à ses danseurs par le biais d’injonctions où l’allégorie est intimement mêléeà la précision technique. Ainsi la directive « les mains mortes » renvoie-t-elle conjointement àune image symboliquement chargée et à une attitude corporelle qui demande d’isoler lesmains du reste du corps, afin qu’elles ne soient pas les initiatrices musculaires du mouvement,mais, par leur poids - « mortes » signifie ici « les laisser pendre » - entraînent le reste ducorps47. Le processus d’incorporation est rythmé par les différentes phases qui scandentl’élaboration d’une pièce : il est à la fois individuel et collectif. Il n’est possible que dans uncercle d’initiés qui détiennent déjà la connaissance générique d’un méta-langage acquispendant les années de formation et/ou les expériences professionnelles.

L’incorporation de la gestuelle n’est jamais aussi accomplie que lorsque le danseur estidentifié par ses pairs comme « danseur de chez… » : façon de dire que celui-ci est« marqué » voir « prisonnier » du « style » qu’il a incorporé. La façon de se mouvoir, lamorphologie du corps lui-même (les danseurs qui ont travaillé avec des chorégraphes quidemandent un travail au sol ont particulièrement un buste développé) attestent une signaturede la danse qu’ils sont susceptibles de produire, même après avoir quitté le chorégraphe48. Lecorps devient alors son propre référent et l’acte moteur peut précéder la réflexivité : c’est ceque le danseur appelle le « senti », les « sensations », voire « les états de corps ». Cesvocables indigènes désignent la possibilité, lorsque les schèmes mentaux et corporels sontintériorisés, de trouver « naturellement », par le « laisser faire », les « sensations justes ». La« justesse » ressentie est alors le signe d’une adhérence quasi-parfaite entre lescaractéristiques psychomotrices du danseur et les conventions qui l’ont structuré. Elle suscitechez le chorégraphe une satisfaction proche de la « jubilation » provoqué par la possibilitéd’exprimer ce qu’il imaginait. C’est rendre réelle une image mentale qui prend vie à traversles danseurs en mouvement.

47 Jacques Bouveresse souligne que « Si d’une manière générale, "l’image peut remplacer une description ", c’estévidemment pour autant qu’elle est elle-même une sorte de description », in Le mythe de l’intériorité.Expérience signification et langage privé chez Wittgenstein, Paris, Ed. de Minuit, 1976, p. 93.48 Durkheim souligne que : « la meilleure manière de s’attester à soi même et d’attester à autrui qu’on fait partied’un même groupe, c’est de s’imprimer sur le corps une marque de distinction ». Les formes élémentaires de lavie religieuse, op. cit, p. 333.

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- « Créer » : un travail collectifC’est parce que le travail de création - et en particulier l’improvisation - est

simultanément expression de l’intériorité et présentation à un public restreint (le chorégrapheet les danseurs) qu’il est une transition entre « l’intime » et le « collectif ». Les séances oùtrois à quatre danseurs se mettent à improviser simultanément, sont exemplaires de cettetension entre la nécessité de tenir compte des autres et d’affirmer sa singularité à l’intérieurdes consignes du chorégraphe. L’équilibre entre débordement et trop fort contrôle dans lamise en scène de l’expression émotive est associé à la présence des autres membres ducollectif : danseurs et chorégraphe. Au même titre que la locution « J’ai peur », queWittgenstein49 situe entre ce qui est de l’ordre du « cri » (soit de la pure expression) et ce quiest de l’ordre de la « description » (soit de la communication), la pratique corporelle del’improvisation, peut être considérée comme un compromis entre expression et représentation,entre ce qui procure immédiatement une satisfaction et une émotion à celui qui l’éprouve et cequi vise à communiquer une signification à autrui. L’exposition d’une forme d’intimité auregard des autres danseurs et du chorégraphe est une présentation de soi qui intègre le danseurau groupe.

L’improvisation à plusieurs permet de découvrir en situation le corps de l’autre enmouvement et dans des situations inattendues. Il permet de fixer des repères et, à terme, desroutines, tout en permettant à chacun d’innover au contact de l’autre et de sortir de sespropres habitudes gestuelles. La confrontation avec autrui autorise le danseur – dans lelangage indigène - à aller « au-delà de lui-même », à « accéder à un autre état ». La possibilitéde « sortir de soi » est alors déterminée par le sens d’un jeu où il s’agit de se laisser guider,non par l’autre, mais par l’interaction qui fait le jeu. L’improvisation collective évoque les« formes sociales » de Simmel (op. cit.) qui « sont à elles-même leur propre fin » par lasociabilité qu’elle induit entre les danseurs. Elle peut alors conduire à une certaine forme decommunion, sentiment collectif qu’il s’agira de retrouver ultérieurement sur scène. Dans cesmoments –là, une vision du groupe, comparable métaphoriquement à un corps, se dessine oùchaque partie doit rester vivante, engagée et singulière, pour faire exister le tout. L’individuest alors porté par le groupe et les mouvements réalisés sont l’expression d’une « forcecollective »50 qui dépasse les particularités de chacun.

L’utilisation d’un vocabulaire quasi-religieux pour décrire les périodes de création intense est courante.Ainsi Cécile, danseuse chez C.Diverrès raconte « l’intensité et le partage de la dernière création » : « Onavait vraiment l’impression que quelque chose nous dépassait, qu’on était les instruments de quelquechose de plus fort…Je suis allée très loin chercher des choses que je n’avais jamais exploré. J’ai pu lefaire parce que tous les autres danseurs m’ont aidé, on était tous soudé pendant cette création. C.Diverrèsavait réussi à créer une atmosphère très étrange où on pouvait se livrer parce qu’on savait que ce qui étaiten train de se passer était très important et nous dépassait ».

C’est ce « corps collectif » que le chorégraphe s’efforce de maîtriser, de coordonner et,parfois, de façonner, afin d’y imposer sa marque, reconnaissable dans l’expression - même dela singularité de chacun de ses danseurs. L’improvisation trouve alors une fonction proche decelle que lui prêtait Jacques Coppeau dans son travail avec les comédiens, c’est-à-dire « créer(…) le sens de leur interdépendance réciproque, de leur appartenance à un groupe, à unensemble qui les dépasse et qui oriente leurs actions» (Lambert, 1998), tout en préservant lestatut dominant du chorégraphe, maître d’œuvre d’un « style » identifiable dans le corps -

49« Un cri n’est pas une description. Mais il y a des transitions. Et les mots "J’ai peur » peuvent plus ou moins serapprocher du cri. Ils peuvent beaucoup s’en rapprocher et être également très éloignés." Cf. LudwigWittgenstein, Tractatus logico-philosophicus, suivi de Investigations philosophiques, Paris, Gallimard, 1961, p.320.50 Emile Durkheim remarque que « les esprits particuliers ne peuvent se rencontrer et communier qu’a conditionde sortir d’eux même ; mais ils ne peuvent s’extériorise que sous la forme de mouvement. C’est l’homogénéitéde ces mouvements qui donne au groupe le sentiment de soi et qui par conséquent le fait être », in Les formesélémentaires de la vie religieuse, op.cit, p. 330.

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même des interprètes. Le cours quotidien, quand il est donné par le chorégraphe, contribue àcréer ce sentiment de cohésion indispensable pour que le travail de création se déroule demanière collective.

C’est ce que remarque Louise qui compare deux créations avec un même chorégraphe, mais dans desconditions de préparation différentes : « Pour la première création, tous les matins il donnait un atelier, uncours…Pour la deuxième, comme il était stressé par le temps, pas de cours. C’est bien, quand tu as uncours, de mettre les énergies en commun… Dans la deuxième, on a mal travaillé parcequ’on était tousavec nos énergies disparates, sans aucune préparation on démarrait par le travail de création. C’est aussiune question de générosité de la part du chorégraphe… ».

Le cours quotidien permet à la fois une socialisation entre danseurs mais aussi avec lechorégraphe et prépare les corps individuellement tout en ébauchant les fondations d’un corpscollectif qui repose sur les mêmes schémas corporels (même si chacun peut ensuites’exprimer « librement »).

L’interdépendance est tributaire des cadres qui la structurent et la connaissance desrègles du jeu par toutes les parties est nécessaire pour éviter tout débordement ou quiproquo.L’arrivée d’un nouveau venu peut perturber le déroulement normal des interactions comme lemontre l’exemple suivant :

La chorégraphe C.B. avait le projet de faire un duo d’hommes avec Pascal qui a l’habitude de travailleravec elle et Michel recruté sur audition. Ce duo d’amour donne lieu à des quiproquos entre les deuxdanseurs, l’un hétérosexuel, l’autre homosexuel, c’est ce que relate Pascal : « Un duo d’hommes, çaréveille des sentiments troublants. C.B. n’est pas partie d’un point de vue psychologique, mais sur lamatière et son mot d’ordre a été l’aimantation et après on est partis en impro. Deux corps qui n’arriventpas à se quitter, qui sont attirés l’un vers l‘autre. Avec Michel qui est homo, il y a eu des confusions, ausens que, quand on est en création, on me propose un thème, je plonge, je fais les choses, je teste. Maisune fois qu’on à fini la répétition, je redeviens Pascal et tout est oublié. J’ai embrassé, j’ai eu desattouchements, mais je sais ce qu’est le travail et je sais gérer, mais Michel, lui, il a eu du mal, il n’avaitpas l’habitude de l’impro à ce degré là. ».

La connaissance du jeu et de la certitude qu’il ne s’agit que d’un jeu permet ladistinction entre espace professionnel et espace privé, séparation qui est l’indice d’unesocialisation professionnelle plus grande. « Ceci n’est qu’un jeu » et, comme le préciseGregory Bateson51, « les actions auxquelles nous nous livrons maintenant ne désignent pas lamême chose que les actions dont elles sont des valants pour ». Le cadre fictionnel de ce jeu(le duo d’amour), par le fait qu’il prend corps au fur et à mesure que les improvisations sesuccèdent, entre en concurrence avec le réel (« Je suis hétéro et tu es homo, et tout ceci n’estqu’un jeu ») induisant un malentendu et un véritable trouble dans la relation. Cette situation àdouble cadre de référence et instructions contradictoires est caractéristique du travaild’improvisation qui pose la question de la véracité de ce qui est exprimé entre les différentsintervenants, danseurs et chorégraphes. Cette oscillation entre imaginaire et réel permet« l’intensité » des émotions et l’innovation pendant le processus de création, au sein d’uneinterdépendance qui assure la cohésion de l’ensemble.

51 Gregory Bateson, « The message « This is play », in Schaffner B., Group Process. Transaction of the secondconference, New York, Josiah Macy Jr Fondation, p. 145-242

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III. L’heure des choix- Le chorégraphe comme organisateur et « directeur de danseurs »Si la phase de création donne libre cours à une relative liberté dans l’exercice de

l’improvisation et de la composition, les nécessités de la cohésion de l’ensemble et lesimpératifs économiques impliquent que le chorégraphe fasse des choix. Il est aussi celui quicoordonne52 le collectif et impose en dernier ressort, son point de vue. Les réflexions de C.Diverrès sur le sujet permettent d’éclairer ces choix :

« Il y a le temps de la création lui-même et celui de la pièce. On s’accorde un moment déterminé pourexplorer, ensuite il faut organiser, structurer et répéter les choses. Pour « Fruits », je me suis dit que lapièce aurait pu durer deux heures et demie sauf que je n’ai pas le temps de faire répéter et d’organisercette durée-là. Donc, je dois m’arrêter, rythmer quelque chose qui est du temps économique, sinon ilaurait fallu commencer plus tôt et jouer plus tard. C’est aussi le temps réel. Le temps réel est un tempséconomique forcément ».

Le chorégraphe centralise l’information et doit aussi coordonner non seulement lescénographe, le costumier, le compositeur, le responsable des lumières et du son, mais aussiles institutions sources de subventions et les programmateurs. Cette responsabilité le conduit àfaire des choix arbitrés par des enjeux économiques et artistiques. La prise en compte desréactions de la critique et du public susceptible d’apprécier l’œuvre ou du moins, d’y réagir,de l’espace scénique dans lequel la première représentation aura lieu, sous-tend généralementla plupart des décisions prises par le chorégraphe. Pour que « l’œuvre » ait une existence endehors des studios de répétition, il faut qu’elle s’inscrive dans un temps économique, ce quiconduit souvent à la raccourcir, à rejeter des séquences trop radicales, en bref, à la restructurerà partir des séances d’improvisation et de composition. Il s’agit, pour le chorégraphe, detrouver des articulations rythmiques qui puissent associer les différents moments inventéspendant la création. Le temps économique peut aussi restreindre le temps de la création dansla mesure ou le chorégraphe, pressé par les délais, raccourcit la phase de recherche. Ainsi « aumoment de la mise en forme, toutes les composantes du monde de l’art sont présentes àl’esprit de la personne qui fait les choix, laquelle prévoit les réactions possibles à l’œuvre encours et se décide en conséquence » (Becker, 1998 : 214).

Le danseur se voit en partie « dépossédé » de sa créativité pendant la phase decréation.

« De toutes les propositions qui dépassaient le nombre de 70, j’ai dû en conserver une dizainequi font maintenant partie de la pièce…De l’amour, j’ai gardé celle (improvisation) de Fabrice…J’aigardé le danger de Barbara. Pourquoi ? On ne sait pas. Parfois, je me dis que c’est tellement arbitraire. Etpuis à un moment tout s’organise… » (Diverrès)53.

Le chorégraphe reprend son rôle décisionnel qui avait pu être atténué ou transformépendant la phase de création. En faisant des choix « arbitraires », il impose son « style », quidépend lui-même de sa position dans l’espace des chorégraphes (matérialisé par le nombre deprogrammations, le type de théâtre dans lequel la compagnie est diffusée, le statutinstitutionnel). L’identification artistique a pour corrélât l’obligation de faire des choix quisont d’autant plus précis que la « griffe » est institutionnellement consacrée. L’enjeu résidedans « l’opération de transsubstantiation symbolique, irréductible à une transformationmatérielle » (Bourdieu, 1975) qui fait du chorégraphe un « créateur ». Les deuils que ledanseur doit faire, sont liés à l’impératif pour le chorégraphe d’affirmer que « cette danse »est caractéristique de « sa danse ». La justesse du regard acquis au fil des années, est l’indicede l’intériorisation des multiples paramètres qui définissent une marque distincte de celle des

52 Comme le soulignent Corbin et Strauss : « l’accomplissement du travail à l’intérieur d’une organisation est unacte collectif coordonné ». « The articulation of work through interaction », The Sociological Quartely, 34, 1, p.17-83.53 C. Diverrès in Fruits, Mémoire vivante.

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autres concurrents dans le champ. L’élaboration d’une « œuvre » suppose la permanence decertains éléments et le rejet d’autres : elle conduit à la répétition qui suppose l’abandon dudanseur à la direction impulsée par l’employeur. Le danseur doit ainsi renoncer parfois à uncertain nombre d’images auxquelles il s’est identifié et peut se trouver confronté de façonassez brutale à la désillusion :

Claudia, évoque sa perte de confiance dans le discours « rassembleur » du chorégraphe C.Bqu’elle perçoit comme une utilisation du « désintéressement » du danseur : « Ils disent tous « On va faireune aventure ensemble », mais c’est faux, car ils sont très jaloux de leurs petits enfants…On n’est pasinterchangeable mais, dans le fond, on est de la main d’œuvre. A la fin c’est « sa création », c’est « sontruc ». Jamais, elle ne nous a pas demandé : « Qu’est ce que tu as pensé de cette création ? ». Ca nel’intéresse pas de savoir ce qu’on pense. »

La répétition est alors « remise de soi » où le danseur peut se sentir proche d’un simpleexécutant. Le souci du chorégraphe est alors, comme le remarque C.Diverrès, de « faire tenirla structure indépendamment des danseurs ». Une fois que la structure est fixée, les danseursdoivent s’y installer et essayer de se l’approprier au fur et à mesure du travail de répétition.

La répétition renoue avec la tradition académique d’allégeance du danseur envers lechorégraphe qui précise, refait faire - parfois jusqu’à l’épuisement - le même enchaînement etfait du danseur un instrument de travail. Il s’agit de formaliser les « inventions » de la périodede création et de combiner différentes séquences tout en incluant des phrases de transition.Les scènes de groupe (trio, quatuor, etc.) sont écrites et peuvent être des moments de liaisonentre un solo ou un duo élaboré en partie par les danseurs. La dureté et la précision du travailsont variables selon le niveau d’exigence du chorégraphe et le degré de définition de son« univers ». La légitimité charismatique du chorégraphe joue alors pleinement pour susciterl’engagement des danseurs qui ont le sentiment qu’il sont, avant tout, les instruments de« l’œuvre », le chorégraphe remplissant une fonction de « passeur ».

Giovanni recruté, chez C.Diverrès remarque qu’ « il est prêt à tout accepter d’un chorégraphe qui avéritablement un univers et (que) le sentiment de participer à la construction d’une œuvre d’ensemble estplus fort que tout ».

La répétition est vécue comme un passage obligé pour comprendre et intérioriserl’attente du chorégraphe et, par ce biais, servir l’œuvre au-delà du rapport hiérarchique avec lechorégraphe.

Le moment de la répétition est aussi celui où se mettent en place les différentsparamètres qui concourent à l’élaboration du produit artistique.

- La multiplicité des paramètres

1. Décors, costumes

La danse contemporaine collabore depuis ses débuts avec des artistes-plasticiens(Christian Boltanski et Dominique Bagouet), des scénographes, des stylistes et destechniciens du spectacle qui ont un point de vue esthétique dans l’exercice de leur métier.Nombreux sont les chorégraphes qui confient les décors à des « scénographes » expérimentés.Ils apportent une connaissance technique pour la réalisation de leurs fantasmes et despropositions esthétiques qui donnent du relief à la danse. Le projet final doit intégrer lescontraintes propres à la danse : les danseurs peuvent y être associés bien que les décisionssoient principalement prises par le chorégraphe.

Dans une correspondance entre C. Diverrès et D. J. scénographe qui propose « une grille au milieu duplateau » afin d’évoquer le thème de la «brisure » et la difficulté de « passer les frontières », voici quelleest la réponse de C.Diverès : « J’ai pensé à la grille au milieu du plateau. C’est une proposition pluséquilibrée d’un point de vue scénographique…Il y a des séquences où le mouvement ne peut êtrecontraint dans l’espace parce que multidirectionnel, plus la vitesse, mais la proposition est très

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intéressante. Le seul problème avec ces passages est de faire le yoyo avec cette grille… ». Les contraintesspécifiques à la spatialisation des danseurs et l’adéquation au décor sont évoquées et montrent que lechorégraphe doit établir constamment un compromis entre le décor et la danse.

Les danseurs sont tenus d’intégrer un paramètre supplémentaire. Il influe directementsur leur manière de danser : le décor peut réduire l’espace ou représenter un obstacle mais ilest crée aussi par une atmosphère particulière sur scène et participe de la « mise en état » donton a vu l’importance dans l’interprétation.

Les impératifs de la danse et du décor entrent parfois en contradiction, en particulierlorsque la matérialisation de l’idée esthétique de départ accroît significativement les risquesencourus par les danseurs.

« La conception du sol provient d’une image de Beyrouth. L’idée de départ est la calcination. Mais saréalisation a posé un certain nombre de problèmes. Le matériau utilisé au départ était de la poussière depneu et nous nous sommes aperçus que les danseurs avaient des difficultés à respirer. » Ce commentairede C. Diverrès est révélateur des difficultés que le danseur peut rencontrer dans la pratique de son métier :elles peuvent aller jusqu’à l’accident de travail quand la sécurité du danseur est ignorée au profit de lamise en scène. C’est le cas de ce spectacle, où le revêtement en polyesther choisi par le chorégraphe et lescénographe s’est avéré « destructeur », selon les termes d’un danseur : les danseurs terminaient les piedstout ensanglantés.

Les costumes peuvent aussi devenir des contraintes que le danseur doit gérer commeune des composantes du travail d’interprète. Lorsqu’un costume est lourd où malaisé à porter,le danseur essaie de s’adapter en intégrant à sa gestuelle le poids ou la contrainte du vêtement.Le sens du jeu modifie jusqu'à la qualité du mouvement et en fait une source « d’inspiration »comme l’observe Pascal confronté a un costume dont la coupe l’oblige à avoir le corps enbiais :

« Tu t’inspires du costume que tu as. Plus tu travailles et tu approfondis en création, t’as tellementapprofondis que ça te permet d’aller encore plus loin quand t’es sur scène. Mon costume il m’habite, c’estlui qui me fait danser, je ne suis jamais droit. Je suis droit à la fin du spectacle et sinon je suis tout letemps courbé et bossu. »

2. La place de la musique

La relation à la musique propre à la danse contemporaine marque une rupture parrapport au ballet classique et s’inspire des acquis de la danse moderne américaine, enparticulier du chorégraphe Merce Cunningham qui avait pour collaborateur le compositeurJohn Cage, établissant la différenciation entre le rythme des corps et celui de la musique.Cette autonomisation du rythme corporel par rapport à celui de la musique est une descaractéristiques majeures de la danse contemporaine française. Comme le souligne IsabelleGinot (Ginot, Michel, 1995), « l’histoire des rapports entre danse et musique peut aisément sereprésenter comme un arc borné d’un côté par leur rigoureuse adéquation mutuelle, et del’autre, par l’autonomie absolue prônée par le couple Cage/Cunningham ». Les chorégraphesse situent à l’un et l’autre de ces deux pôles, cependant certains rejettent la correspondancemusique/danse définissant ainsi un « style » et une offre artistique plus difficiles d’accès. Lamusicalité de la danse est alors perçue comme autonome, le corps du danseur étant producteurde rythme musical.

C’est la perception qu’en a Dominique Bagouet : « La danse est musicale parce que c’est un artdu temps, elle est rythmique, elle ne peut pas être donnée à plat, donc elle est forcément musicale. C’estune question de dimension. C’est une musique qu’on n’entend pas, mais c’est peut être une dimensionsilencieuse de la musique. C’est la partie silencieuse de la musique, là où les mots s’arrêtent et où ce n’estpas encore de la musique, peut être. Je ne sais pas exactement ce que c’est, mais c’est là que ça se passe,dans cet espace qui n’est pas palpable dans le temps, qui est juste après qu’on a fini de parlé : c’est lemouvement, ce n’est pas la musique, et c’est avant le son. C’est dans ce sens que je trouve que c’est unart musical. Tous les repérages, toute la technique de la danse peuvent s’apparenter à un art musical.Même le système de codes : on peut coder, on peut noter une danse comme une partition musicale, on

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peut la compter comme la musique, la rythmer, lui donner des valeurs de soupirs, silences, croches,doubles-croches, comme la musique »54.

Cette vision de la danse comme source rythmique autoréférencée prive de supportmusical traditionnel de la supériorité qui lui était conférée dans le ballet classique. Le corpsdevient le creuset d’une créativité qui s’exerce à la fois dans le mouvement et dansl’expression musicale et acquiert une légitimité qui ne lui était pas reconnue dans la traditionacadémique. Le corps représenté peut alors suer, le danseur souffler dans le silence : la fatiguesuscitée par l’effort donne lieu à une rythmicité propre (certaines parties dansées en silencefont entendre les souffles des danseurs qui donnent alors une cadence au mouvement). Lacomposition musicale ne prend plus le pas sur l’expression du mouvement. Concevoir que ladanse a sa propre rythmique ouvre des perspectives nouvelles. Ainsi, l’écriturechorégraphique peut être déjà mise en place lorsque la musique, élaborée indépendammentpar un compositeur intervient. Les danseurs doivent alors être fidèles à la chorégraphie, touten la dansant sur une rythmique musicale différente de celle incorporée pendant la période decomposition. De même, le support d’un texte déclamé peut être utilisé par le chorégraphe, lesdanseurs doivent alors se conformer à la « signature musicale » de la danse apprise ets’accorder à la temporalité spécifique du texte. La multiplication des supports qu’autorisel’autonomisation de la musicalité propre à la danse est fondée sur la volonté de rompre avecles prénotions et les hiérarchies héritées de l’Antiquité qui, depuis Platon, plaçaient lamusique avant la danse.

Pour les danseurs, l’absence de support rythmique ou la prise en compte de plusieursrythmiques simultanées peut présenter des difficultés, en particulier pour ceux qui ont étéformés dans le cadre de l’enseignement de la danse classique où la musique est le repérageessentiel. Le recours au comptage est alors fréquent pendant les répétitions, voire mêmependant les représentations. Cependant, un grand nombre de danseurs signalent la nécessité detrouver leur propre « rythme corporel », pour pouvoir épouser un environnement sonorerythmiquement très finement codé et dépasser la réflexivité traditionnellement à l’œuvre dansla danse académique. C’est par la répétition que le danseur s’approprie la musicalité de ladanse et réussit à la combiner avec celle d’autres supports : musique, chant, bruitages outexte. Cette opération complexe de coordination est l’une des spécificités de la dansecontemporaine qui, sous une apparence de liberté, multiplie les codes et demande auxdanseurs d’être capable de gérer simultanément différents paramètres rythmiques.

IV. La scène : sens pratique et professionnalismeL’incorporation de la demande du chorégraphe ne peut se faire pratiquement sans une

volonté de « possession » du danseur car « faire danser quelqu’un c’est le posséder »(Bourdieu, 1997), mais c’est aussi, dans le même temps, se déposséder du pouvoir absolu de« création », le danseur devenant le « créateur » de l’œuvre la représentation. La capacité dedécouvrir « intimement » ce que veut le chorégraphe permet à nombre de danseurs derevendiquer une identité d’interprète et non d’exécutant.

C’est ce que montre Fabrice qui a travaillé près de huit ans chez C. Diverrès : « J’ai passé huitans à faire ce travail…J’ai pris ce qui résonnait le plus en moi…Quand j’ai commencé, j’adorais sagestuelle, je pouvais faire les choses dix fois, c’est comme si c’était mon langage. Plus le temps a passé etplus ce qui m’a intéressé c’est la capacité à se transformer…Certains disent de moi que je me suis fait« bouffer » par C.Diverrès mais je sais que je suis parti au moment où c’est moi qui possédais pleinementcette danse que j’ai faite mienne et que maintenant je peux m’en détacher »

54 Dominique Bagouet in Isabelle Ginot, Dominique Bagouet, Un labyrinthe dansé, Paris, Centre national de ladanse, 1999, p. 185.

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L’assimilation apparaît comme la condition préalable au détachement nécessaire pourpoursuivre une « carrière » de danseur. Rester dans un seul registre c’est s’interdire desemployeurs potentiels et se condamner, à terme, à travailler avec le même type dechorégraphes et à se laisser « posséder » par eux.

Interpréter, c’est créer, comprendre, déchiffrer et dans une certaine mesure exécuter.Chacun de ces termes renvoie à des étapes différentes qui se combinent au fil de l’élaborationet de la production de l’œuvre. La scène donne au danseur la responsabilité de faire vivre auxyeux du public la construction préalablement mise en place. La « première » représentationest décisive autant par ses implications économiques que pour la cohésion et la force dupropos. Il est porté par le collectif des danseurs et chacun d’eux peut y réinvestir son identitéafin de ne pas se limiter à l’exécution des enchaînements. L’incorporation de l’habitus propreà un chorégraphe implique la participation active du danseur qui y trouve pleinement soncompte dans le jeu de la scène. L’investissement émotionnel et le sentiment de transcender ladanse sont reliés au processus d’appropriation qui peut conduire, parfois à cet « état degrâce » dont parlent tous les danseurs et qui fait du danseur un « créateur in vivo ».

- Les rituelles d’avant scène : gestion du « stress » et « métamorphoses »Si la scène est le lieu d’expression privilégié du danseur, où son autonomie

d’interprète et sa dimension artistique peuvent « naturellement » s’exprimer, la façon de s’ypréparer est inséparable de la pratique du métier. Les rituels d‘avant-scène remplissent unedouble fonction : modes de gestion du stress, ils sont aussi le moyen pour le danseur d’opérerla transformation physique et mentale indispensable pour remplir son « rôle ». Ces séquencesde gestes visent à mettre le danseur dans un « état » qui, en lui donnant le sentiment de« devenir » le personnage de scène, le rassurent et désinhibent corps et psyché.

« Je suis une danseuse très ancrée dans la perception et le rapport au moteur et après j’ai des tics pour meconcentrer, des personnages qui ont vécu dans ma sensibilité, qui l’ont formée. Avant de danser, je nepense qu’à une chose « Faut que tu joues, faut que tu sois légère » et je me répète ça 1000 fois. C’est mafaçon à moi de rentrer dans la perception, c’est arrivé à cet état de jeu et ça fait partie de monpersonnage. »

Il s’agit alors de mettre le corps en condition, mais de telle façon qu’il soit intimementorienté vers la prestation qui doit suivre sur scène.

Certains refont toujours les mêmes exercices physiques tel ce danseur qui faitsystématiquement ses « quatre séries d’abdos et 100 pompes » parce qu’il est un « danseurphysique » ou cet autre qui fait des exercices de « chi qong » basés sur la respiration qui luipermettent de « se concentrer ». Le rituel participe à la construction de son identité dedanseur, à l’image qu’il se fait de lui-même et lui permet ensuite de se projeter sur scène.

La préparation peut être une prise de contact préalable avec l’espace scénique, afin des’imprégner de « l’atmosphère » de la salle, dédramatiser la scène, mais aussi pour « prendreses marques », c’est-à-dire savoir où se placer avant même de commencer les « filages »(répétitions précédant le spectacle) avec l’ensemble de la compagnie.

La loge devient l’espace de transition entre le monde normal et celui de la scène où ledanseur doit subir une véritable métamorphose. Elle se matérialise par l’installations d’objetspersonnels destinés à créer une intimité et par le rituel du maquillage :

« J’arrive dans le théâtre, je prépare ma loge, je sors des photos, mon maquillage. J’aime quand tout estordonné. Le maquillage n’est pas le même pour chaque spectacle. C’est moi qui me maquille. Pourcertains spectacles, je mettrai en valeur le regard, la bouche, être un peu plus pâle, un peu plus foncé. Jene creuse pas mon visage, il l’est suffisamment comme ça. Par exemple, dans « L’ascète de SanClément » où je danse l’ascète, il y a juste un fond de teint. Il faut être le plus pâle possible, le plusnaturel, je force pas trop sur les traits, ni sur la bouche… »

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Le maquillage est une technique qui fait partie du métier, adaptée par le danseur enfonction du personnage mais aussi de ses caractéristiques physiques. Il porte à l’objectivationde son propre corps et à une instrumentalisation qui renforce celle due à la danse. Laconnaissance de son visage et son utilisation dans le cadre fixé par les indications duchorégraphe, guident cette opération de transsubstantiation. Cette manipulation du visage àlaquelle le danseur se livre seul (la plupart des compagnies, même les plus connues, n’ayantpas de maquilleurs) est liée à l’activation des conventions mises en place lors des répétitions.Par cet acte « quasi magique », mais conscient et contrôlé, l’individu se fond dans uneidentité de danseur construite dans la phase de création. Tout comme la femme divinisée queBaudelaire55 évoque dans son éloge du maquillage, « l’artiste » fait son métier « ens’appliquant à paraître magique et surnaturel » : il faut qu’il « étonne », qu’il « charme »,« idole », il doit se « dorer pour être adoré ».

La réactivation des schèmes mentaux et corporels est accompagnée par d’autressupports :

« En général, j’ai des petits textes ou des cartes postales qui correspondent aux différents moments de lacréation. Dans « L’ingénu », j’ai des textes de Pasolini, je les relis, j’ai aussi une photo, ça me recentre, çame met dans un état. J’ai une photo et j’ai mon costume qui est là, je regarde ma chemise, mon pantalon,ça suffit à me remettre dans le personnage. Dans « L’ascète » j’avais une carte postale de Chagal quej’avais trouvée. C’est un couple qui ne se regarde pas et je trouvais que ça correspondait à l’ascète. »

S’habiller c’est non seulement changer de costume, mais aussi changer de dispositionsmentales. Une photo, un texte, le costume sont ainsi des « déclencheurs » qui amorcent lamétamorphose, relayés ensuite par un travail de préparation physique spécifique :

« Pour « L’ascète », j’avais une certaine façon de me préparer. Je m’ébouriffe les cheveux, je grossis lessourcils et puis je fais beaucoup de grimaces, je prépare la mâchoire, le nez, et beaucoup d’isolation duregard. Je fais des allers-retours comme si j’étais appelé par une voix. Je m’assouplis et comme je doismonter sur l’armoire par la force des bras, je fais quelques tractions. Parfois, quand je suis trop stressé, jeme fais une petite barre classique, des demi-pliés et des ports de bras. »

La préparation physique associe postures corporelles et sentiments correspondants caradopter, « certaines positions ou certaines postures, c’est, on le sait depuis Pascal, induire ourenforcer les sentiments qu’elles expriment. Le geste, selon le paradoxe du comédien ou dudanseur, renforce le sentiment qui renforce le geste » (Bourdieu, 1987). Cet ajustement del’exercice physique au rôle que le danseur doit exécuter sur scène est une façon de prendrepossession de l’espace.

Le « trac » est régulièrement évoqué par les danseurs interviewés. Eprouvé avantl’entrée en scène, il se manifeste par des battements de cœur qui s’accélèrent, l’estomac noué,les jambes qui « tremblent » et le corps qui « transpire ». Il appartient à la phase de transitionqui voit passer le danseur de son identité quotidienne à celle qu’il doit assumer face au public.Les traductions psycho-physiologiques de la métamorphose sont parties intégrantes du ritueld’avant scène et soulignent le côté « artiste » de pratiques routinières. Le « trac » est ainsi cequi relève de la « vocation » et du « désintéressement » dans un métier qui requiert desressources et des compétences précises. Il explicite l’aspect « prise de risque » et « remise enjeu perpétuelle » que chaque danseur aime à évoquer dans l’intérêt qu’il trouve à exercer cemétier. Pierre Michel Menger (1997) souligne, dans son ouvrage sur la profession decomédien, le paradoxe suivant : « alors que le trac fait partie de la présentation la pluscommune des souffrances du métier, il n’est mentionné que par 1% des comédiens, avec cetteambivalence bien connue qui en fait, tout ensemble, un aiguillon et un handicap, et que lecomédien doit apprendre à contrôler dans l’équilibre instable entre des états opposésd’excitation et d’inquiétude paralysante. » En ce qui concerne les danseurs interrogés, ilapparaît que cette ambiguïté trouve son fondement dans la représentation de soi comme

55 Baudelaire, Eloge du maquillage

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professionnel et artiste, le « trac » étant le signe vécu et manifesté par tout l’être du danseur,de sa capacité à échapper à la « routine » et à se renouveler à chaque fois. Dire son « trac »,c’est exprimer l’incertitude propre à cette profession, mais sous l’angle valorisant l’artiste quise remet en question, et qui une fois sur scène, habite pleinement son rôle et sa danse. Car le« trac » n’est jamais aussi fort que lorsque l’ « oubli immédiat » dès l’entrée dans l’espacescénique face au public, est souligné.

« J’ai toujours le trac. C’est un truc qui fatigue. C’est la peur. Je suis assez tranquille avant le spectacle etplus je me rapproche du plateau, plus je tremble. T’entends le public qui arrive, qui parle. Une fois quec’est parti, que tu as fait le premier pas qui t’entraîne sur le plateau, d’un seul coup, le trac il part et c’estincroyable. D’un seul coup, je ne suis plus Jérôme, je suis le personnage… » (Jérôme, danseur).

Il est aussi préparation mentale à affronter le public : bien qu’éprouvéindividuellement il est partagé collectivement et contribue à une solidarité émotionnelle quirepose sur la distinction entre le groupe de danseurs et le public.

- La scène une expérience collective entre « mythe », « imprévus » et « routines »La « scène » est le point d’orgue du processus de création. Expérience individuelle et

collective c’est une des sources de satisfaction régulièrement mise en avant par les danseurs.Avec la phase de création, la scène est l’espace dans lequel le danseur peut investirpleinement la danse et se l’approprier. Nombreux sont ceux qui parlent de « transcender ladanse » que le chorégraphe a mis en place : manière de dire que le jeu qui se déroule sur scènen’est plus celui de la répétition. L’interaction avec le public est alors présentée comme lemoteur d’un dépassement de soi et la rhétorique du don / contre-don (pas toujours vérifiée)redouble le sentiment de responsabilité du danseur face à l’œuvre.

1. « L’état de grâce »

« L’état de grâce » est cette expérience-limite, assez rare qui symbolise les joies dumétier et qui confère au danseur sa dimension d’interprète. La concordance entre les danseursmais aussi avec les techniciens (lumières en particulier), la « symbiose » avec le public fontadvenir cette disposition émotionnelle et physique. L’incorporation est alors véritablementvécue comme une transsubstantiation, où le danseur n’est plus « équilibre entre engagement etdistanciation, mais « totalement », c’est-à-dire mentalement et corporellement, investi dansson rôle, de concert avec ses partenaires, en communion avec le public.

« Des soirs, tu sais que c’était magique et le public, il le ressent. En « état de grâce », tu peux faire tout ceque tu veux, au niveau de la danse, au niveau technique et musculaire, c’est comme s’il y avait undépassement…Tu le ressens aussi au niveau des autres danseurs qui sont plus ou moins sur la mêmelongueur d’onde. A ce moment là, j’ai le sentiment qu’ils me permettent de m’exprimer pleinement et quemoi je les tire et les pousse à se dépasser. » (Pascal)

Lorsque le danseur interprète un rôle, il lui est plus facile de s’y investirpsychiquement et d’ « entrer » dans la danse par le biais d’une recherche émotionnelle sur lesfacettes du personnage. Cependant, une danse non narrative n’implique pas que le danseur n’yinvestisse pas des affects mais ils s’éprouvent dans le mouvement et sa rythmicité. La« transcendance » vécue sur scène est alors l’expression d’une adéquation parfaite entre desschèmes appris et répétés et les dispositions physiques et mentales du danseur. Elle procure audanseur la sensation de vivre pleinement « l’instant présent ».

Le sentiment que « tout marche », que les douleurs du corps « disparaissent », que« l’osmose avec les autres danseurs, la musique et le public » est « réalisée », indique lecaractère à la fois personnel et partagé de l’expérience.

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Ce moment exceptionnel est un des critères les plus régulièrement mis en avant pourjustifier le choix de ce métier. La spécificité des professions du spectacle vivant apparaîtpleinement dans ces instants particuliers perçus comme « incomparables » par rapport auxautres professions. Les danseurs vivent alors leur profession comme « une chance » etcertains vont même jusqu'à juger que tous les sacrifices valent cet « état de grâce », ajoutantun argument supplémentaire au discours sur « la vocation de l’artiste ». Les compensationsnarcissiques, le sentiment exaltant de « création » et celui d’atteindre une dimension presque« magique » sont les thèmes les plus fréquemment évoqués pour expliquer les sensations quirésultent de ce temps « suspendu ». La scène devient l’espace de réalisation « d’un mondeidéal », « au monde réel où s’écoule sa vie profane », le danseur en « superpose un autre qui,en un sens, n’existe que dans sa pensée, mais auquel il attribue, par rapport au premier, unesorte de dignité plus haute. » (Durkheim, 1968 : 603).

Cette expérience intérieure du danseur est parfois perçue par le public comme« présence » : on fait alors allusion à « la présence exceptionnelle » de tel ou tel danseur.

Cependant si ces « états » qui relèvent du divin font du métier d’artiste un mythe, lequotidien en fait une profession où la gestion de l’imprévu, la distance au rôle et les routinessont fréquents.

2. Gestion de l’imprévu et routinisation

La « mise en danger », « la prise de risque » liées à l’espace scénique, sontsystématiquement avancées pour expliquer la nécessité d’être « toujours en éveil », à« l’écoute » de soi-même (blessures, démotivation, fatigue nerveuse, etc.), de ses partenaireset du public. Cette intelligence pratique mise en œuvre pour parer aux imprévus (raté d’unporté, problème de lumière, etc) constitue la mètis (Détienne, Vernant, 1974) du danseur,intelligence polymorphe capable d’agir sur « le devenir, le changement et ce qui ne restejamais semblable à soi ».

« Sur scène, j’ai comme un sixième sens, je vois tout, même ce qui se passe derrière moi…Le métier,c’est quand tu arrives à anticiper l’accident et à te conduire de telle manière que personne dans le publicne remarque rien. » (Jérome, dix ans de scène).

Le coup d’œil, la maîtrise de soi sont des caractéristiques du professionnel confirmé.Dans certaines compagnies, qui prolongent en cela une tradition héritée du théâtre, le soir dela dernière représentation, les danseurs s’amusent à changer des éléments dans lachorégraphie, changements imperceptibles aux yeux du néophyte, mais destinés à tester lacapacité d’anticipation et de réaction à l’imprévu des partenaires.

Cette disponibilité à soi-même et à l’entourage s’exprime dans le cadre formel d’unestructure chorégraphique déjà fixée et répétée longuement. « L’urgence » de la scène, liée à lareprésentation de l’œuvre face à un public, n’autorise pas une réflexivité de type scolastique(sauf pendant les pauses où le danseur sort de scène et peut évaluer ses actions et les rectifier)mais suppose un « sens pratique » en perpétuel ajustement aux aléas rencontrés.

« De façon plus générale, l’habitus a ses ratés, ses moments critiques de déconcertement et dedécalage, écrit Pierre Bourdieu (1997) : « la relation d’adaptation immédiate est suspendue, dans uninstant d’hésitation où peut s’insinuer une forme de réflexion qui n’a rien à voir avec celle du penseurscolastique et qui, à travers les mouvements esquissés du corps (celui, par exemple, qui mesure du regardou du geste, à la façon du joueur de tennis refaisant un coup raté, les effets du mouvement accompli oul’écart entre ce mouvement et le mouvement à effectuer), reste tournée vers la pratique et non vers celuiqui l’accomplit. ».

La réflexivité est ici proche du « réflexe » et les rectifications que le danseur fait dansl’urgence ne sont pas issues d’une réflexion intellectuelle, mais témoignent d’une« intelligence du corps » qui autorise l’innovation. « Inventer » sur scène, c’est savoir gérerl’imprévu qui peut être de diverses sortes : un accident qui entraîne une blessure, un des

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partenaires qui se trompe dans un mauvais jour, la bande sonore qui s’interrompt, unprojecteur qui ne veut pas s’allumer ou le public qui manifeste son mécontentement. Lacapacité de réponse à un événement imprévisible dépend du degré de routinisation del’organisation sur scène. Anselm Strauss (1994) remarque que les routines peuvent êtreenvisagées comme des « ressources » qui font partie intégrante de l’action et par « chaquesituation particulière dans laquelle se déroule une action nécessitera un minimum« d’ajustement » ». Ainsi, plus le spectacle est répété et structuré, plus les danseurs ontintériorisé les schèmes corporels, rythmiques et mentaux proposés par le chorégraphe, et plusla faculté d’ « improvisation » en situation est développée. Être sur scène, c’est disposer d’unensemble de « réflexes » qui sont des réponses adaptées au type d’univers dans lequel lesdanseurs se produisent :

C’est ce que remarque Fabrice qui a passé huit ans dans la même compagnie : « Gérer l’imprévu, c’estinventer, mais c’est la logique de l’œuvre qui te dicte ta conduite…C’est instinctif, ça ne passe pas par latête, tu n’as pas le temps… ».

De même, Sébastien, blessé pendant un spectacle de la compagnie où il travaille depuis quatre ans, restesur scène et « improvise » : « Je me suis blessé à la cheville, je ne pouvais plus rien faire, juste marcher,j’ai improvisé un personnage lunaire qui se calquait bien avec l’univers de Christiane…Quand je suissorti de scène, on a décidé que je continuais pour la suite du spectacle ce personnage qui ne danse pasmais qui se promène parmi les autres danseurs… »

Savoir réagir dépend de l’expérience de la scène accumulée, dans la mesure où lamémoire du danseur a intériorisé une série de situations-types et de réponses appropriées toutau long de sa vie professionnelle. Cette connaissance pratique est d’abord une connaissancede son corps et des façons de l’orienter, de compenser, voire de cacher ses faiblesses. Ainsi,une faiblesse au niveau de l’équilibre peut être rectifiée après identification immédiate par unerétraction des orteils qui stabilisent la voûte plantaire. Ces formes de « routines d’exception »s’acquièrent par le travail sur scène, mais aussi en répétition et dans le cadre du cours dedanse. « L’instinct » qui dicte immédiatement la conduite à tenir lorsqu’un incident survient,dépend du temps déjà passé sur scène et avec le chorégraphe pour trouver la solution la plusappropriée.

Les tactiques utilisées pour ne pas « perdre la face » relèvent parfois de la« mystification » (Goffman, 1979) et cherchent à assurer la « cohérence de l’expression ».Pour le danseur, il s’agit de ne jamais sortir de son rôle : une chute, un porté raté, un décalagerythmique sur un mouvement d’ensemble ne doivent pas être perçus par le public (embarras,ralentissement, mauvaise humeur). La règle qui consiste à « continuer coûte que coûte »suppose chez le danseur à la fois une distance et un engagement immédiat pour pouvoir faireface aux imprévus qui jalonnent l’expérience de la scène. La « maîtrise des impressions »demande une véritable « discipline dramaturgique » (Goffman, 1979) pour éviter de mettre àjour un désaccord ou une inimitié avec un partenaire, la fatigue physique ou un accident quisurvient sur la scène. C’est pourquoi la « distance au rôle » que préconise Diderot dans « Leparadoxe du comédien » est souvent nécessaire pour surmonter les difficultés de la scène,mais rarement vécue comme telle, car génératrice de malaise ou associée à un échec.

Le contrôle de soi est une des compétences professionnelles acquises et requises pourexercer le métier de danseur. Il s’exerce, non seulement, lors d’événements inattendus, maisaussi au début de la carrière du danseur peu expérimenté. La scène est un espace-temps quidemande un apprentissage progressif. Savoir se placer, donner l’intensité appropriée aumouvement, être à l’écoute de ses partenaires et du public, être en rythme à la fois avec lamusique et le reste du groupe s’apprend en scène « in vivo ». Le retour réflexif sur laperformance réalisée suppose que le corps et l’intellect enregistrent les sensations et lesimages comme un cinématographe et permettent d’évaluer les faiblesses et de circonscrire lescorrections à apporter. Ce travail d’auto-objectivation que fait le danseur après unereprésentation, en particulier après la « première », est enrichi et relayé par les remarques et

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les corrections du chorégraphe et des autres danseurs, avec, parfois, l’aide de la vidéo.Cependant si la réflexivité est possible après la « scène », voire pendant les moments de pauseoù le danseur peut réfléchir derrière les coulisses, elle est plus difficile dans l’action.

Lorsque certains enchaînements sont plus difficiles que d’autres, ou que la rythmiquemusicale demande des décalages inhabituels qui n’ont pas été suffisamment appropriés lorsdes répétitions pour être exécutés de façon « naturelle », le danseur est obligé de faire appel àdes repères mnémotechniques qui matérialise la distance au rôle qu’il doit conserver pourpoursuivre la représentation. Il s’agit alors d’une forme de répétition de la séquence proche dumimétisme dans laquelle le danseur s’appuie sur l’écriture chorégraphique et renonce à sa« liberté » d’interprétation pour pouvoir « assurer ».

« C. nous dit que s’il y a un truc qui va pas, on doit revenir à l’écriture, on oublie les états et par l’écritureil y a des choses qui vont revenir. » (Pascal, danseur chez C.B).

Ce « retour à l’écriture » est alors vu comme une « technique de protection » quipermet la représentation. Mais la distance que demande l’exécution de la chorégraphie quantelle n’est pas suffisamment intériorisée ne semble pas propice à l’interprétation réussie. Le« double regard » peut même, dans certains cas, empêcher le bon déroulement de la danse.Ainsi, lorsque le danseur doit prendre un risque physique dans une acrobatie, une trop grandeobjectivation peut l’empêcher de se « lancer ».

« Je devais me jeter en arrière sur le sol et chuter sur le dos. D’habitude, je fais ça dans le mouvement, jecalcule les risques, mais en même temps, je me lance…Là, j’étais trop en train de me surveiller, j’étaispas sûr de moi et je me regardais trop faire, finalement je me suis pas senti de la faire cette chute. »(Giovanni, 15 ans de carrière).

Si le danseur doit contrôler ce qu’il fait, il doit être capable, dans certains cas, demobiliser des affects qui lui permettent de passer une étape physique infranchissable sans unedisposition à sublimer sa souffrance.

« Pour la pièce « Fruit » qui était épuisante physiquement, je me souviens qu’avec un autre danseur,quand on sortait quelques moments de scène, on se posait la question de savoir comment récupérer pourpouvoir faire la suite. Physiquement, c’était très difficile. Dans la pièce il y avait un moment donné où ilfallait passer un cap, se brancher ailleurs pour pouvoir dépasser la fatigue. ». (Fabrice ancien danseur deC. Diverrès).

Se « regarder danser » est alors perçu comme l’indice d’une incapacité à trouver la« grâce » et d’un échec personnel. C’est pourquoi la présence des partenaires peut permettrede se « replonger » dans un « état » ou du moins dans une dynamique qui évite de rester« absent » sur le plateau. Il s’agit alors parler d’un autre type de « double regard », non plusseulement du danseur sur lui-même, mais doublé de l’attention qu’il accorde aux interactionsavec ses partenaires.

Lorsque le spectacle a été longuement répété et/ou dansé, certains automatismes sontfixés individuellement et collectivement et autorisent le danseur a expérimenté d’autressensations et à renouveler « la prise de risque » qui est alors vue comme un moteur de lacréativité.

C’est le cas de Mélanie engagée dans la compagnie Montalvo, qui estime « avoir grandi » avec lespectacle « Paradis » qu’elle a joué plus de 300 fois : « Aujourd’hui, je maîtrise bien la gestuelle de DHervieu. J’ai mis du temps à vraiment la comprendre mais maintenant j’y mets vraiment de moi-même.Elle me pousse à aller dans ce sens et je vois que je prend plus de plaisir à faire certains enchaînements etque je m’amuse avec sa gestuelle qui est devenu la mienne ».

Cette sensation n’est véritablement possible qu’au terme d’une collaboration assezlongue et concerne principalement les danseurs qui travaillent dans les CCN et quelquescompagnies indépendantes. Elle permet au danseur de réinvestir la danse et d’y trouver un« plaisir » subordonné au sens du jeu qu’il peut y investir.

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Certains chorégraphes intègrent dans la structure de la pièce des phases« d’improvisation » qui se différencient de celles réalisées pendant la création par leurcaractère à la fois très contrôlé (le cadre formel est complètement fixé) mais en même tempstrès libre puisque le danseur porte toute la responsabilité de l’instant.

« Elle donne des indications scéniques, de regroupement ou de positionnement dans l’espace à certainsmoments mais pour le reste on improvise pendant vingt minutes…ça fait partie de son écriture de laisserles danseurs se mettre dans un état sur scène… C’est une liberté très difficile pour les danseurs de pouvoirimproviser… » (une danseuse récemment entrée chez une chorégraphe qui intègre dans l’écriturechorégraphique des moments d’improvisation).

Cette « liberté » laissée aux danseurs n’est envisageable qu’à la condition qu’ils aientau préalable incorporé le « style » du chorégraphe. Il ne s’agit pas d’improviser n’importecomment mais à « à la manière de… », afin que la signature soit identifiable par lesspectateurs. L’exercice suppose une collaboration relativement longue avec le chorégraphe etdes périodes de recherche et de répétition qui permettent à la fois une liberté sur scène etrespect des fondamentaux de la gestuelle propre au « style » de la compagnie. La coopérationavec les autres danseurs est alors indispensable et la connaissance « par corps », acquise aucours des spectacles précédents et de la création, est sollicitée pour trouver « un état »collectif et individuel. « L’orchestration des habitus » véritablement à l’œuvre dans cesmoments d’improvisation collective est mesurée par l’autonomie et la capacité de « l’équipe »de trouver de nouvelles configurations tout en restant dans le cadre de conventionspréalablement intériorisées. C’est alors la plasticité même de l’écriture chorégraphique quirévèle la force des schèmes corporels et mentaux assimilés.

3. Etre en scène : un travail collectif

« Parfois il suffit d’un toucher de main d’une partenaire ou d’un partenaire pour que çareparte » remarque un danseur. C’est l’interdépendance entre les différents membres de« l’équipe » qui signale la « défaillance » momentanée de l’un des danseurs et motive unréajustement collectif. Ce rapport permanent entre l’expérience individuelle et collective estanalysé par Norbert Elias (1995 : 55) qui compare un groupe de danseurs et la société dansson fonctionnement : « Les pas et les révérences, tous les gestes et tous les mouvementsqu’effectue chaque danseur se règlent entièrement sur ceux des autres danseuses et danseurs.Si l’on considérait séparément chacun des individus qui participent à cette danse, on necomprendrait pas la fonction de ses mouvements. La façon dont l’individu se comporte enl’occurrence est déterminée par les relations des danseurs entre eux… ».

Les danses de groupe dans lesquelles les enchaînements se font à plusieurs demandentune coordination entre les danseurs et un sens du placement, c’est-à-dire une vision lucide ensituation de sa position et de celles de ses partenaires. Dans certaines combinaisons trèscomplexes, les danseurs sont obligés, en fonction de la surface du plateau et des conditions dumoment, de procéder à des ajustements immédiats pour éviter la collision, anticiper sur desportés acrobatiques afin de réceptionner leur coéquipier sans danger.

La familiarité entre les partenaires est la condition de possibilité d’un soutien quipermette de conserver « la cohérence de l’expression » malgré un accident, une blessure ou unaffrontement avec le public (départ en plein milieu du spectacle, manifestation demécontentement). Cette familiarité s’acquiert dans les phases de création et de répétition ets’approfondit pendant l’expérience de scène faisant de chaque danseur un équipier, c’est-à-dire « quelqu’un dont la coopération dramaturgique est indispensable pour entretenir unedéfinition donnée de la situation » (Goffman, 1979).

Mais l’interdépendance entre les différents membres ne signifie pas absence deconflits ou, du moins, de débats. Lorsque deux danseurs entretiennent des inimitiés, lechorégraphe doit rappeler les priorités qui sont en jeu sur l’espace scénique, espace « sacré »

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au sens où les interactions de la vie « profane » ne doivent pas transparaître et rester secrètes.Les fausses notes ne sont pas permises, la « définition de la situation » exigeant l’unanimité,mais elles peuvent néanmoins modifier les interactions et l’expérience du danseur sur scène.

Louise, depuis deux ans dans la compagnie Eddy Mallen, voit une nouvelle équipe engagée pourreprendre une pièce qu’elle avait déjà dansé et dans laquelle elle n’arrive pas à s’intégrer : « Je ne mesentais pas bien dans le rapport surfait. On n’était pas sur la même longueur d’onde par rapport au vécude la création sur scène. Ce travail est vraiment un travail d’impro en groupe, on improvise sur scène surun canevas. Il y a des trajets qui sont donnés, des états de corps, c’est à dire des sauts, des tours, desmouvements arrêtés, des courses…Les choses se sont fixées rapidement et, dès que tu changeais quelquechose sur scène, les autres le vivaient mal. Dans la première équipe, il y avait cette liberté là qui s’estperdue…Les autres danseurs, à la fin, il vivait en groupe, moi j’avais pas envie d’en être, ça été mal pris.Il y avait une des danseuses qui était nouvelle, en plein spectacle dans les coulisses, je l’ai entendu dire àd’autres « Louise, elle est chiante, etc. » C’est pas respectueux et pas professionnel…C’est vrai qu’après,sur scène, je peux pas échanger quoi que ce soit avec elle, même si le public ne remarque rien. »

La dimension conflictuelle qui existe dans n’importe quel univers de travail peutavoir des conséquences néfastes dans un métier qui doit assurer une représentation collectived’un produit construit et élaboré avec le concours du collectif. Comme le souligne Louise,même si le déroulement de la pièce peut être assuré sans accroc, tout ce qui constitue parfoisl’intérêt d’une pièce, ou du moins un paramètre important, le travail sur l’émotion, est alorsen partie supprimé par l’absence de « complicité » entre les danseurs.

La scène peut être aussi un lieu de « communion » où les différents membres de lacompagnie vivent une expérience presque religieuse par l’intensité du « partage », enparticulier à travers la « contagion » de « l’état de grâce »56. Ces instants adviennent lorsquel’investissement pendant la phase de création a été particulièrement intense et que lesdanseurs ont le sentiment de défendre un propos « artistique ». Les critiques des médias, voirecelles du public, peuvent renforcer la cohésion du groupe qui se sent alors investi d’unemission : faire vivre « l’œuvre ». La compagnie est parfois assimilée, dans ces moments, àune famille, c’est-à-dire à un corps collectif, un « lieu de fusion » (Bourdieu, 1993) où lesvaleurs esthétiques et les rapports affectifs sont l’armature de l’adhésion de chacun desmembres. Ce sentiment d’appartenance se traduit par une sociabilité de « compagnie » oùdanseurs et chorégraphes se retrouvent le soir au restaurant, organisent des soirées propices àune proximité émotionnelle et physique. Les attouchements, les élans affectifs réassurent etrenouvellent la communion entre les membres.

Ainsi, les chorégraphes Fatoumi-Lamoureux organisent une fête dans leur maison de campagne après lestrois jours de représentation au théâtre de la Ville. La plupart des danseurs de la compagnie sont là. Ils seserrent régulièrement dans les bras, une des danseuses se met à pleurer et se blottit sur la poitrine d’un desdanseurs de la compagnie. On m’explique que c’est « normal », c’est le contre-coup du spectacle….

Toutefois, cette fusion apparente doit être nuancée dans la mesure où les arrivées et lesdéparts rythment les différentes pièces. Les reprises de rôle, le renouvellement d’une partie del’équipe font intervenir des éléments nouveaux et en modifient la structure et la cohésioninterne.

C’est ce que souligne Fabrice qui fait une « reprise de rôle » dans une compagnie dont les membrestravaillent depuis deux ans sur la pièce : « Je commence à trouver ma place au sein du groupe et surscène. Il s’est passé quelque chose entre nous (les autres danseurs) les deux derniers soirs sur le plateau. Ilfaut chercher dans ce sens… ».

Le nouvel arrivant doit, dans le cadre de la création et des répétitions, apprendre à« trouver sa place », aidé en cela par les autres danseurs, plus anciens, mais c’est l’épreuve de

56 Comme le remarque Emile Durkheim : « La contagion n’est pas une sorte de procédé secondaire par lequel lecaractère sacré, une fois acquis, se propage ; c’est le procédé même par lequel il s’acquiert. C’est par contagionqu’il se fixe. On ne peut s’étonner qu’il se transmette contagieusement ». Les formes élémentaires de la viereligieuse, op. cit.

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la scène qui lui donne le droit de faire partie du collectif. « Être sur le plateau » conforte lessolidarités et approfondit la dynamique collective préalablement enclenchée. La connaissancedu corps des partenaires, de ses réactions, de ses faiblesses s’acquiert en situation. Cetapprentissage informel est indispensable pour qu’une « complicité » s’établisse entre lesdanseurs et facilite ainsi la danse.

- Le rapport au public : secrets, osmose et affrontementLe public est considéré comme profane et tout le travail des danseurs est de proposer

un produit fini qui ne révèle pas les « secrets » de fabrication afin de garder toute « lamagie du spectacle ». Souvent évoquée dans le registre du don et du contre-don, la relationavec le public est d’abord fondée sur une information inégalement répartie. Les danseurs et lechorégraphe sont ceux qui « savent » et élaborent l’œuvre alors que le public est en situationde réception.

L’invention de la pièce, les répétitions ne sont pas accessibles au public qui, de ce fait,n’est pas en mesure d’évaluer les « erreurs » des danseurs ou de percevoir les accidents et lesconflits qui peuvent survenir sur scène. La définition de « l’erreur » est prioritairementréservée aux pairs ou a l’employeur. Comme le note E. Hughes (1996), « le groupe descollègues (…) défende régulièrement avec opiniâtreté son propre droit à définir les erreurs età décider dans chaque cas particulier si l’une d’elle a été ou non commise ». Même lorsque lepublic est composé de « spécialistes », ce qui est parfois le cas dans la danse contemporaine,seuls les danseurs et le chorégraphe peuvent précisément dire s’il y a eu ou non erreur, si uneimprovisation a pallié à un accident. C’est pourquoi on peut reprendre les analyses de Simmelsur la société secrète dans laquelle les « insiders » sont tenus par des liens que le public, d’« outsiders », ressent mais ne peut partager. En dissimulant des événements qui adviennentsur scène, les danseurs permettent la « cohérence de l’expression », définissant ainsi laspécificité de leur profession en élevant les barrières de la dissimulation par rapport auxprofanes57.

Néanmoins le public n’est pas un simple récepteur, mais un « organisme » vivant quiinflue sur le déroulement de la représentation. Les danseurs parlent ainsi d’un « bon public »qui a pu les « transcender » ou « d’un mauvais public », « froid », pour lequel ils se sontcontentés d’exécuter les pas. Une des compétences professionnelles du danseur consiste àpouvoir évaluer et influencer le public.

« Après quinze ans de carrière je « sens » le public et je sais à peu près ce que je peux faire pour fairerepartir la machine quand ça flanche. Des fois, je sens que ça merde rythmiquement et que les gensdécrochent. Dans ces moments-là, je redonne un peu de jus…Je saute plus haut, je mets plus d’énergiedans les enchaînements, j’essaie de tirer le public ». (Jérôme)

L’interaction entre les danseurs et le public commande des réactions qui peuvent setraduire corporellement dans l’engagement physique du danseur. En « état de grâce », larelation fusionnelle, « l’osmose » avec le public décuplent les dispositions physiques.

Le public donne lui aussi « une représentation d’équipe » (Goffman, 1979) et apposesa marque sur la représentation, notamment lorsqu’il manifeste son mécontentement par desdéparts, des interventions verbales. Les danseurs doivent alors s’efforcer de ne pas êtreperturbés et de poursuivre leur exhibition en mobilisant toute une série de techniques deprotection dont l’une des plus efficaces est la « croyance » dans le caractère « avant-gardistede l’œuvre ». Le risque lié au public est pris en compte par les chorégraphes qui se définissent

57 Hughes remarque qu’ « une partie du problème social et psychologique du métier correspond à la sauvegarded’une certaine liberté et d’une certaine distance sociale par rapport à ceux qui sont concernés par le travaileffectué de la façon la plus critique et la plus intime ». « Le travail et le soi », in Le regard sociologique, op. cit,p 84.

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par la provocation, faisant de la réaction prévisible des spectateurs une des composantes de lacréation. Le danseur est ainsi conduit à acquérir une compétence particulière qui relève du« maintien de la face » en situation extrême.

Claudia raconte ainsi son expérience avec Ian Fabre, chorégraphe connu pour ses provocations. Il met enscène des danseuses nues auxquelles il fait danser sur pointes des variations classiques sur des musiquescontemporaines : « Avec Ian Fabre j’ai appris à être sur scène pendant trois heures, à me faire sifflerdessus par le théâtre de la Ville ».

De même, Fabrice évoque ses premières représentations avec C. Diverrès : « Je me donnais à fond et jevoyais progressivement la salle se vider, certaines personnes nous hurlaient: « Arrêtez de danser pourcette merde ». J’étais tout nouveau dans la compagnie et même si les anciens m’avaient prévenu et C.Diverrès en parlait constamment pendant la création, ça été une expérience traumatisante, mais en mêmetemps ça m’a forgé. Je sais que maintenant je peux danser dans n’importe quelles conditions et continuermême si la réception est violente… ».

Le rapport au public est ainsi diversement vécu en fonction du « style »chorégraphique.

De même, les conditions matérielles de représentation pèsent sur l’exerciceprofessionnel du danseur et la connexion qui s’établit avec le parterre. Selon la réputation duthéâtre, selon le nombre de spectateurs et la disposition de l’espace scénique, l’investissementdu danseur varie.

Pascal se remémore ainsi un épisode d’une tournée dans laquelle la disposition de l’espace scénique amodifié le contact avec le public : « Tu sens la différence quand tu es dans une salle ou il y a 500personnes ou 80 personnes. Avec le temps, j’ai appris à pouvoir donner autant à une salle de 60 personnesqu’à une salle de 1200 personnes ». Avec « l’ascète de san clemente » de JG, on avait fait une minitournée dans le Nord, on venait de faire Amiens dans une salle comble. On part à Boulogne sur mer, leplateau du théâtre était magnifique, une salle de 600 places. On se prépare et Jean vient avant le spectaclepour nous dire « il n y a que 80 personnes » car le théâtre n’avait pas fait de pub…Il a demandé à fairemonter le public sur scène. On a mis deux rangées de chaises sur tout le plateau. Comme il y a beaucoupd’éclairage, on les a rapprochés, la poursuite on l’a mise derrière les spectateurs. Jean nous a donné lesdirectives au niveau du regard, de faire comme si le public n’était pas là, le regard toujours au loin. Ça adonné du piment. Il n’y avait que 80 personnes mais c’était transcendant d’être nez à nez avec le public.On ne devait pas le regarder. On a pris notre pied, on avait jamais eu de public sur un plateau. C’était à lafois très flippant au niveau concentration mais en même temps ça développe la vigilance. Au niveauconcentration, c’est flippant d’être prévenu à une heure du spectacle que tu vas danser sur une scène plusréduite avec les spectateurs dessus alors que tu t’es préparé pendant toute la journée…il faut savoir gérerton espace et le public face à toi… ».

L’imprévu de ce changement de répartition de l’espace demande ainsi au danseur uneadaptation qui le conduit à modifier ses repères de l’espace dramatique. Le professionnalismedu danseur est mesuré par sa capacité à s’ajuster aux aléas des conventions qui structurentl’espace de représentation. Le contact direct avec le public bien qu’inhabituel est ainsi perçucomme un facteur stimulant pouvant inciter à « se transcender ». La capacité à rompre la« routine » rejoint celle qui consiste à faire preuve de « créativité », condition pour se pensercomme « interprète-créateur ».

Cependant, pour qu’une pièce puisse exister et les danseurs s’investir aussi bienindividuellement que collectivement, celle-ci doit « tourner », c’est à dire disposer de relais dediffusion.

- La scène diffusion et recréation« Une pièce se modifie par le vécu et le calme des danseurs au fur et à mesure. Elle se modifie par

la patine, le parfum, l’énergie, la vitesse. C’est pour cela qu’elle doit tourner, pour prendre vie »58

Ces propos de C. Diverrès illustre l’importance de la diffusion d’une pièce autant pourque les danseurs puissent travailler et se connaître sur scène que pour le caractère évolutif et

58 Catherine Diverrès.

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correctif qui permet à une création de prendre son essor. Le chorégraphe par sa fonction et sonregard extérieur (même lorsqu’il danse, il essaie de développer celui-ci pour revenir sur laprestation de l’ensemble) change, améliore en évitant d’altérer le « propos » chorégraphique.Il peut intervenir pendant une représentation, lors des moments de « sortie de scène » endonnant des indications individuelles qui permettent aux danseurs de modifier la qualitéd’exécution de la chorégraphie.

Ainsi, Philippe Jamet n’hésite pas à parler au danseur lorsqu’il sort du plateau pour l’encourager ou luidonner des précisions quant à son interprétation : à un danseur « sois plus léger dans les sauts », à unedanseuse « regarde le public, tu dois le provoquer, rappel toi ce qu’on a vu à la dernière répétition »…

Ce type d’intervention rappel les injonctions que le coach lance à son « poulain »pendant un match de boxe, lui reprécisant les enchaînements vus pendant l’entraînement(Wacquant, 1988).

La plupart du temps, les mises au point après la représentation se font dans le cadre deréunions de travail ou pendant des discussions informelles, lorsque le collectif partage desmoments de vie quotidienne (le cours de danse, le restaurant, une soirée chez le chorégrapheou l’un des danseurs). Le « filage », sorte de répétition du spectacle qui peut être entièrementeffectué ou seulement « marqué » (c’est à dire que le danseur se contente de marquer lesenchaînements), est le moment privilégié des corrections où le chorégraphe procède à un bilandes représentations précédentes. Il fait des réaménagements individuels et/ou collectifs, touten tenant compte de l’espace scénique qui n’autorise pas le même type de représentation d’unsoir à l’autre (variable selon la profondeur du plateau, la largeur de la scène).

Ainsi la pièce prend progressivement une identité et les danseurs se l’approprient parl’exercice répété de la confrontation avec un public différent chaque soir et les corrections deplus en plus fines et précises qui orientent leur interprétation.

Au contraire une diffusion trop restreinte peut entraîner des conséquences dramatiquesà la mesure de l’investissement consenti pendant la période de création. La frustrationengendrée par le peu d’occasion de se produire sur scène peut provoquer l’éclatement ducollectif.

« C. Diverrès a très mal joué sur ce coup là. On s’était tous énormément investi sur la pièce et le fait de nepas pouvoir la danser à fait exploser le groupe. Pour la « première » on a vécu une telle communion quepour tous les danseurs, il était vital qu’on danse et que l’on tourne avec cette pièce qui nous tenait tant àcœur. Elle n’a pas tenu compte des contraintes économiques, elle aurait pu réduire l’installation etraccourcir de 15 mn le spectacle pour qu’il soit plus lisible et surtout moins cher. Après cette pièce trèsforte et que l’on a pratiquement pas tourné, elle a voulu faire une création plus « commerciale » dans lesens où elle pourrait la vendre. On était tous crevés et on ne pouvait plus rien donner et surtout pas vivrequelque chose de moins fort, les danseurs sont partis presque tous en même temps ».

Ce témoignage illustre les contraintes de la production artistique dans le cadre d’unmarché de la diffusion et la répercussion qui s’ensuit sur la vie même des danseurs.

Pierre-Emmanuel SorignetDocteur en sociologie

ENS/EHESS.

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Conclusion

La spécificité de notre objet d’étude conduit à conclure sur un nécessairedéveloppement de la recherche scientifique en danse, qui implique un travail d’étroitescollaborations avec les « gens de terrain » (chorégraphes, danseurs, enseignants) comme lepensent plusieurs auteurs de ce rapport. L’intérêt de ce développement résiderait donc :

1°) dans la prise en compte de spécificité des formes de danse, de mouvements, etdes situations d’exercice de la danse qui ne sont pas assimilables à celles des sports ni àd’autres techniques artistiques mettant en jeu le corps ;

2°) dans le développement de travaux inter-disciplinaires croisant les démarches dechamps de recherche différents pour mieux saisir les mécanismes de l’apprentissage maiségalement de la création artistique ;

3°) dans une meilleure connaissance scientifique des modes d’incorporation etd’appropriation en vue de repenser les situations pédagogiques jusqu’alors plutôt étudiersous l’angle pratique (par la pédagogie et la didactique) notamment dans un cadre scolaire.

4°) Nous avons ainsi souligné que le savoir scientifique portant sur la danse n’étaitguère constitué, les études et recherches rigoureuses font défaut ou sont trop dispersées, danstous les champs disciplinaires. Cette réalité, en tout cas française, est assez paradoxale parrapport à l’histoire des savoirs de la danse chorégraphiée occidentale, où art et science n’étaitpas séparés. En effet, dès la Renaissance, l’art de la danse était devenu un objet d’études, oùse croisaient des perspectives aussi différentes que la science du mouvement, la philosophie,la rhétorique… Les connaissances sur le mouvement dansé ont alimenté également ceux dumouvement humain. Aujourd’hui, des chorégraphes (c’est le cas de Cunningham) et desnotateurs de mouvement travaillent à l’aide de logiciel qui permettent de décomposer desmouvements, d’en inventer de nouveaux, de les mettre en scène, et de conserver en mêmetemps les chorégraphies. Dès lors, l’angouement actuel pour les techniques informatiquesmises au service des sciences cognitives saurait trouver, auprès de certains chercheursen écriture de la danse, un enrichissement de savoir-faire et de connaissances.

5°) Par ailleurs, la mise en place de conditions favorables au déploiement de larecherche en danse ne peut que participer d’une meilleure connaissance en matière dudéveloppement de la motricité d’une part, et de recherches cognitivo-motrices d’autrepart, en les articulant aux études sur la maturation du cerveau, ainsi qu’aux études en imageriecérébrale. La recherche inter-disciplinaire, quant à elle, serait un atout essentiel pour laconnaissance des processus de mémorisation et d’incorporation, des stratégies mentaleslors de la saisie de mouvements, des modes et de conditions d’apprentissage demouvements différenciés.

6°) Enfin, en travaillant plus particulièrement sur les stéréotypes sociaux et sexuelsquant aux pratiques de danse à l’école, et en prenant en compte les caractéristiquessociologiques et culturelles des élèves et des enseignants, le développement de la recherche endanse serait susceptible d’avoir des « retombées » concernant, d’une part, les apprentissagesdes identités sexuelles/sociales et de la formation des représentations et des modes depensée susceptibles d’être liées aux différences sexuelles, et d’autre part, des « retombées »pratiques quant à la mise en place des projets pédagogiques et d’une maîtrise mieux raisonnéede leur condition de réalisation ainsi que des modes d’appropriation différentiels par lesélèves.

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En résumé les thèmes de recherche qu’ouvre cette synthèse, se rapportent auxdomaines suivants :

Ø Les techniques informatiques concernant la recherche cognitivo-motrice(écriture et modélisation des mouvements dansés).

Ø La recherche inter-disciplinaire sur les dimensions corporelles, cognitives,langagières et spatiales/rythmiques des apprentissages des formes de dansechoréraphiée.

Ø La recherche inter-disciplinaire sur les processus de création.

Ø La recherche inter-disciplinaire sur les processus de mémorisation dans la miseen place de pédagogies du corps (implicites ou explicites).

Ø La recherche inter-disciplinaire concernant la formation des identitéssexuelles/sociales ainsi que des représentations et modalités cognitives liéesaux différences de sexe (de genre) et se rapportant en particulier : à laperception et réalisation de mouvements ; à la perception du corps dansant ;aux modalités de la créativité dans/par une activité corporelle et artistique ; auxrapports à l’espace, au temps ; à la perception de la musique dans une activitéphysique artistique lors d’un apprentissage formel et dans un travail decréation ; aux rapports au travail avec des partenaires, aux consignes donnéesdans un cours ou dans un atelier de danse.

Ø La mise en réseau de chercheurs travaillant sur le développement de lamotricité et de chercheurs travaillant sur les motricités spécifiques de la danse.

Pour terminer nous rappelerons qu’une revue a existé, regroupant des articles dechercheurs de différents champs, il s’agissait de « La recherche en danse » aux éditionsChiron, qui ont publié également des livres et des actes de colloque. La revue avait le soutiende l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV) et de l’association Danse en Sorbonne. Elle n’a pasperduré, existant dans des temps où la recherche en danse était peu développée, alors mêmeque son contenu était de grande qualité. Outil essentiel pour les chercheurs de toutesdisciplines travaillant sur la danse, un projet de revue semblable mériterait sans doute d’êtrerepris, mais dans une perspective d’ouverture large aux mondes scientifiques, et pasuniquement dirigée vers un public de professionnels de la danse.

La place de la science dans la danse et de la danse dans la science n’en serait quemieux assurée, à condition qu’elle soit, au moins au départ, soutenue par des institutions (telsque les ministères impliqués par ce type de projet : ministères de la recherche, de l’éducation,de la culture et de la communication), et qu’elle ne dépende pas d’un centre de recherche oud’un pôle universitaire particulier (même si l’un d’eux peut l’accueillir), afin d’éviter une tropforte centralisation sur un site et/ou dans une discipline scientifique susceptible d’encouragerles logiques de cooptation et les erreurs de jugement portées sur le travail de collèguesappartenant à d’autres espaces de la recherche.

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SommaireMEMBRES DE L’ÉQUIPE DE TRAVAIL SUR LA SYNTHÈSE « DANSE » ................................................................... 1INTRODUCTION (S. FAURE) ............................................................................................................................ 3

I. Les limites de la pluridisciplinarité......................................................................................................... 3II. La problématique.................................................................................................................................. 4III. Une danse chorégraphiée ou représentative ......................................................................................... 5IV. Présentation du plan............................................................................................................................ 6Bibliographie de l’introduction.................................................................................................................. 8

PREMIÈRE PARTIE : LES MODES D'APPRENTISSAGE DE LA DANSE CHORÉGRAPHIÉE (HORS CADRE SCOLAIRE).PERSPECTIVE SOCIO-HISTORIQUE ................................................................................................................. 8I. SOCIOLOGIE HISTORIQUE ET ETHNO-HISTOIRE DES FORMES D’APPRENTISSAGE DE LA DANSE. UNECOMPARAISON ENTRE DANSE CHORÉGRAPHIÉE ET DANSE COMMUNAUTAIRE (S. FAURE)................................. 10

I. La discipline : émergence de la logique pédagogique ........................................................................... 10II. Les modes traditionnels/pratiques de transmission de la danse ............................................................ 12III. Le mode scolaire de transmission de la danse ou le modèle de la « pédagogie » ................................. 14Bibliographie du premier chapitre........................................................................................................... 17

II. LA RUPTURE AVEC LE MODÈLE DE TRANSMISSION DISCIPLINAIRE DE LA DANSE : LA DANSE MODERNE AU XXE

SIÈCLE (S. FAURE) ....................................................................................................................................... 19I. Les précurseurs.................................................................................................................................... 19

- Un corps « naturel » en rupture avec le corps formel de la danse classique ......................................... 19- Un corps expressif ………………………………………………………………………………………19- Une éducation complète…………………………………………………………………………………19- Influence de l'éducation physique sur la pédagogie de la danse moderne française.............................. 21- Principes des analyses et théories du mouvement………………………………………………………21

II. Le développement de la danse contemporaine en France ..................................................................... 23- La tension « formalisme » / « création-expression »........................................................................... 24

Bibliographie du chapitre II .................................................................................................................... 25III. UNE DIDACTISATION DE LA DANSE CHORÉGRAPHIÉE : IMPLICATIONS PÉDAGOGIQUES, COGNITIVES ETMOTRICES (S. FAURE) .................................................................................................................................. 26

I. Didactiques de l'enseignement traditionnel en danse classique ............................................................. 28II. Les didactiques de danse contemporaine : modèle de la « singularité » ............................................... 29III. Les didactiques et leurs implications cognitives et motrices................................................................ 30Bibliographie du chapitre III ................................................................................................................... 34

SECONDE PARTIE : DANSE À L'ÉCOLE ........................................................................................................... 35IV. HISTOIRE ET POLITIQUES DE L’INTRODUCTION DE LA DANSE À L’ÉCOLE (S. FAURE) ................................. 37

I. Les années cinquante : l’initiation........................................................................................................ 38II. Les années 60-70 : le bouleversement des valeurs ............................................................................... 38III. Les années 1980 et le début des années 1990 : la période de militantisme........................................... 39IV. La fin des années quatre-vingt-dix : les APA ...................................................................................... 40V. Le contexte idéologique et politique actuel .......................................................................................... 40VI. Des enseignants et des pratiques........................................................................................................ 42

- Des résistances toujours .................................................................................................................... 42- Des maîtres et des discours sur les situations didactiques en danse ..................................................... 43

Bibliographie du chapitre IV ................................................................................................................... 45V. LES DIDACTIQUES DE LA DANSE SCOLAIRE (M. COLTICE) .......................................................... 47

I. Introduction. La danse mise au défi de la didactique............................................................................. 47- Pourquoi parler de défi ? ................................................................................................................... 47- La danse scolaire : une pratique dansée spécifique ?........................................................................... 48- Une méthodologie pour l'analyse ……………………………………………………………………….48

II. Les années 1970. Une place à l'école pour le corps expressif............................................................... 49- un contexte qui incite au militantisme pédagogique ……………………………………………………48- Les orientations pédagogiques : entre libération corporelle et activité adaptative …………………… 49- La nature des savoirs, savoir-faire et savoir être : des moyens au service d'un thème ……………….. 50- Les publics visés ……………………………………………………………………………………… 50- Les didactiques et les programmes : un dépassement et une mise en œuvre ………………………… 50III. Les années 1985-95 : Une place à l'école pour la danse contemporaine ……………………………..51- Un contexte qui incite à justifier une pratique d'enseignement ............................................................ 52- Les didactiques et les programmes : une opérationalisation ................................................................ 58

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IV. Les années 1995 / 2001. Une place à l'école pour l'art........................................................................ 59- Un contexte d'intégration et de généralisation .................................................................................... 59

1. Le premier degré, entre activité physique et activité artistique, art et interdisciplinarité ................. 602. Le second degré, les activités physiques artistiques....................................................................... 61

- Nature des savoirs : des compétences en fonction de rôles ……………………………………………. 61- Les publics visés ................................................................................................................................ 64- Les didactiques et les programmes : dépassement vers le sensible et l'imaginaire ................................ 65

V. Interprétation...................................................................................................................................... 65- Des négociations réussies dans le temps............................................................................................. 65- Regard sur les savoirs........................................................................................................................ 67- Des élèves, "pratiquants culturé"... qui restent dans l'ombre................................................................ 68

Bibliographie du chapitre V..................................................................................................................... 70VI. DIDACTIQUES DE LA DANSE À L’ÉCOLE : PRINCIPES, VALEURS ET ENJEUX PÉDAGOGIQUES (S. FAURE)....... 72

I. L’autonomie relative de la « pédagogie » ............................................................................................. 72- Une danse « des associations à l’école » en 1991 ............................................................................... 73- Les Cahiers de pédagogie du Centre National de la Danse de 1999..................................................... 76- Une danse « scolaire » existe-t-elle ? ................................................................................................. 78- La danse à l’école maternelle............................................................................................................. 81- La danse à l’école élémentaire ........................................................................................................... 81- La danse et la leçon dans le Secondaire.............................................................................................. 83

II. Les mots clés des didactiques de la danse à l’école.............................................................................. 84- Approche transversale ou interdisciplinaire : la danse comme formatrice d’une culture artistique........ 84- L’autonomie des élèves ..................................................................................................................... 85- La métaphore du langage et de la poésie ............................................................................................ 85- Une démarche de création : l’enfant danseur, compositeur et spectateur ............................................. 86- Une éducation artistique .................................................................................................................... 87- Les « fondamentaux » ....................................................................................................................... 88- Conclusion ……………………………………………………………………………………………………….. 88

Bibliographie du chapitre VI ................................................................................................................... 90TROISIÈME PARTIE : LES PERSPECTIVES SCIENTIFIQUES DE LA MOTRICITÉ ET DE L'INCORPORATION DESMOUVEMENTS DE DANSE.............................................................................................................................. 90VII. ÉTUDES DU DÉVELOPPEMENT MOTEUR CHEZ L’ENFANT : VERS UNE APPROCHE MULTIDIMENSIONNELLE(C. ASSAÏANTE)........................................................................................................................................... 92

Introduction ............................................................................................................................................ 92I. Contrôle nerveux du développement moteur ......................................................................................... 92

- Approche maturationniste.................................................................................................................. 92- Théorie sélectionniste appliquée au développement moteur................................................................ 93- Pathologies du développement moteur ………………………………………………………………. 93

II. De la contrainte biomécanique à l’exploitation des propriétés du système ........................................... 96- Approche écologique ou couplage perception action .......................................................................... 96- Approche dynamique du développement moteur................................................................................ 96- Emergence motrice par apprentissage ................................................................................................ 97- Limites des approches écologique et dynamique appliquées au développement moteur....................... 98

III. Développement du contrôle postural : de la prédominance visuelle à l’alternance des autres modalitéssensorielles ............................................................................................................................................. 99

- Prédominance de la vision chez le jeune enfant.................................................................................. 99- 6/7 ans : une période de transition dans la contribution des modalités sensorielles ............................ 100- Contribution visuelle chez l’adulte................................................................................................... 101

IV. Principes fonctionnels de la construction des stratégies d’équilibre.................................................. 101- Deux principes fonctionnels d’organisation spatiale ........................................................................ 101

1. Choix d’un référentiel stable ...................................................................................................... 1012. Maîtrise progressive des degrés de liberté des différentes articulations du corps .......................... 102

- Deux principes fonctionnels d’organisation temporelle ................................................................... 1031. Organisation ascendante versus descendante............................................................................... 1032. Contrôle anticipé versus rétroactif de la coordination posture / mouvement................................. 103

V. Quatre périodes déterminantes au cours de l’ontogénèse................................................................... 104- De la naissance à la station debout : Stabilisation de la tête : un référentiel privilégié pour le bébé .... 104- L'apparition de la bipédie : Stabilisation du bassin : un référentiel de base pour organiser le contrôle del’équilibre.......................................................................................................................................... 105- 7 ans : utilisation préférentielle de la stabilisation de la tête sur l'espace en situation d'équilibre difficile......................................................................................................................................................... 108

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- Caractéristiques de l’adulte : Contrôle sélectif des degrés de liberté de l'articulation du cou etorganisation descendante du contrôle de l'équilibre ............................................................................ 108

VI. Modèle ontogénétique de l’organisation sensori-motrice du contrôle de l’équilibre .......................... 109- Alternance entre deux modes d'organisation temporelle et deux modes de couplage articulaire au coursdu développement ............................................................................................................................. 109- Intérêts d’un modèle ontogénétique ................................................................................................. 110- L’entraînement peut-il accélérer l’évolution des fonctions motrices ? ............................................... 111- Référentiels posturaux multiples : apprendre à sélectionner au cours de l’ontogénèse ....................... 112

VII. Construction des représentations internes au cours de l’ontogénèse ............................................... 112- La motricité pour découvrir le monde et découvrir son corps............................................................ 112- Représentation du mouvement au cours de l’enfance........................................................................ 113

1. Représentation mentale du mouvement chez l’adulte .................................................................. 1142. Perturbation de l’image du corps et du schéma corporel chez l’adolescent................................... 114

Conclusion............................................................................................................................................ 115Bibliographie du chapitre VII ................................................................................................................ 116

VIII. LA MOTRICITÉ DU DANSEUR : APPROCHES COGNITIVE ET DÉVELOPPEMENTALE (M. CADOPI) .............. 128I.La motricité du danseur ...................................................................................................................... 128II. Les rappels moteurs.......................................................................................................................... 130

- les modèles théoriques..................................................................................................................... 1301. La théorie de l’apprentissage socio cognitif par observation....................................................... 1302. La théorie des schémas de Schmidt ............................................................................................ 131

- Représentations cognitives, performance et apprentissage en danse .................................................. 1321. Résultats chez les adultes ........................................................................................................... 1322. Résultats chez les enfants........................................................................................................... 134

- Analyse temporelle de l’apprentissage ............................................................................................. 137- L’expertise mnésique en danse ........................................................................................................ 138

III. Rapports entre langage, image et action : La formulation des consignes dans l’apprentissage en danse............................................................................................................................................................. 140IV. L’improvisation ............................................................................................................................... 144Conclusion............................................................................................................................................ 148Bibliographie du chapitre VIII............................................................................................................... 148

X. ETUDIER L'APPRENTISSAGE DE LA DANSE. OU PASSER DU LABORATOIRE À LA CLASSE (M. LORD) ........... 153Introduction .......................................................................................................................................... 153II. Premier point d’ancrage : l’apprentissage moteur............................................................................. 153

- La connaissance des résultats........................................................................................................... 154- La mémorisation ………………………………………………………………………………………153- Transfert ……………………………………………………………………………………………….154- Imagerie ……………………………………………………………………………………………….155

III. L’observation de l’apprentissage de la danse ................................................................................... 158IV. Lorsque l’apprentissage de la danse se fait perception ..................................................................... 160V. L’explicitation de l’apprentissage de la danse par l’observation de son enseignement........................ 161Conclusion............................................................................................................................................ 162Bibliographie du chapitre IX ................................................................................................................. 163

X. LES MODALITÉS D’INCORPORATION ET D’APPROPRIATION DES TECHNIQUES DE DANSE CHORÉGRAPHIÉE : UNEAPPROCHE SOCIOLOGIQUE (S. FAURE) ........................................................................................................ 166

Introduction .......................................................................................................................................... 166I. Le concept d’incorporation ................................................................................................................ 167II. Habitudes, programmes d’action ...................................................................................................... 168

- Les approches cognitivistes ............................................................................................................. 168- Les approches sociologiques en terme de « dispositions » ................................................................ 169

III. Images, représentations .................................................................................................................. 170IV. Les modes d’incorporation des mouvements de danse....................................................................... 171

- Langage et incorporation ................................................................................................................. 173- Musique, rythme et apprentissage moteur ........................................................................................ 174- Des conditions sociales de la mémorisation aux compétences des danseurs ...................................... 176

V. Sensations, motricités et modèles de corps......................................................................................... 177- Les éducations somatiques .............................................................................................................. 177- Présentation de trois logiques du mouvement dansé ......................................................................... 179

Bibliographie du chapitre IX ................................................................................................................. 181XI. DE LA CRÉATION À LA SCÈNE (P.-E. SORIGNET) .................................................................................... 184

Introduction .......................................................................................................................................... 184I. Espace des styles chorégraphiques, statut du chorégraphe et marges d’actions du danseur................. 184

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Page 246: rapport de recherche sur les apprentissages et le developpement des activités artisitiques

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- Position du chorégraphe et place du danseur .................................................................................... 184- Improviser et composer : un moment gratifiant où le danseur se vit comme « auteur »...................... 186- « Créer » : un ensemble de compétence ........................................................................................... 188

1. « Créer » : une compétence sociale............................................................................................. 1882. « Créer» : une compétence professionnelle …………………………………………………… 193

II. Trouver des « états » : incorporation et activité langagière ............................................................... 191- Le travail d’improvisation : trouver des « états ».............................................................................. 191- Langage et processus d’incorporation .............................................................................................. 194- « Créer » : un travail collectif .......................................................................................................... 196

III. L’heure des choix....................................................................................................................... 198- Le chorégraphe comme organisateur et « directeur de danseurs » ..................................................... 198- La multiplicité des paramètres ......................................................................................................... 199

1. Décors, costumes ....................................................................................................................... 1992. La place de la musique............................................................................................................... 200

IV. La scène : sens pratique et professionnalisme............................................................................. 201- Les rituelles d’avant scène : gestion du « stress » et « métamorphoses » ........................................... 202- La scène une expérience collective entre « mythe », « imprévus » et « routines » ............................. 204

1. « L’état de grâce » ..................................................................................................................... 2042. Gestion de l’imprévu et routinisation.......................................................................................... 2053. Etre en scène : un travail collectif............................................................................................... 208

- Le rapport au public : secrets, osmose et affrontement ..................................................................... 210- La scène diffusion et recréation ....................................................................................................... 211

Bibliographie du chapitre XI ................................................................................................................. 213

CONCLUSION (S. FAURE) ........................................................................................................................... 215BIBIOGRAPHIE GENERALE ………………………………………………………………………………..216SOMMAIRE ................................................................................................................................................ 243

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