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Rapport de stage OIM

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Sciences Po Lille

Master Carrières Européennes et Internationales

Majeure Conflits et Développement

Daphné Barbotte

Rapport de stage de fin d’études

Organisation Internationale pour les Migrations

Mission de Mexico, Mexique 1er février - 2 août 2013

L’Organisation Internationale pour les Migrations au Mexique : défis de la gestion des migrations internationales dans la région

centraméricaine.

Maître de stage : Camille Goirand

Tutrice de stage : Denisse Velázquez Galarza

Rapport remis le 2 septembre 2013

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« L'OIM pose le principe selon lequel les migrations s'effectuant en bon ordre

et dans le respect de la dignité humaine sont bénéfiques pour les migrants et la

société. »

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Remerciements Je tiens à remercier l’équipe de Sciences Po Lille pour m’avoir fournie une formation

solide et de qualité durant ces cinq dernières années, ainsi que de très bonnes opportunités de stage qui m’auraient sans doute été inaccessibles sans la carte Sciences Po. Merci particulièrement à Camille Goirand pour son suivi pendant ces deux années de Master ainsi que son aide et ses précieux conseils qui m’ont à plusieurs reprises poussée à me

dépasser. Merci également à Anne Bazin et Charles Tenenbaum pour leur disponibilité, leur suivi et leur soutien, notamment lors de la recherche de stages, ainsi que leur investissement important pour les étudiants de la majeure tout au long de la formation. Merci à mes parents de m’avoir soutenue pendant ces cinq années, de m’avoir encouragée et appuyée dans tous mes projets, en France comme à l’étranger. Par ailleurs, merci à la sympathique équipe de l’Organisation Internationale pour les

Migrations de m’avoir accueillie pendant ces six mois. Merci au Docteur Thomas Lothar

Weiss, chef de mission, de m’avoir donnée l’opportunité de ce stage. Je tiens surtout à remercier Denisse Velázquez et Eva Reyes de m’avoir prise dans leur équipe et de m’avoir

fait confiance. Merci pour leur soutien, leurs conseils et l’expérience qu’elles m’ont permis d’acquérir. Enfin je tiens à remercier toutes les personnes rencontrées lors de ce séjour au Mexique : Nyvse, mes colocataires, amis, camarades de boxe, danseurs, musiciens, voyageurs et j’en passe. Leur présence a fait de ce premier séjour au sein de la culture latino-américaine une expérience très enrichissante et inoubliable.

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Sommaire

Remerciements iii

Liste des acronymes et abréviations vii

Introduction 1

I. L’OIM et la promotion des migrations dans le respect de la dignité humaine 4

a. L’OIM dans le monde 4

b. L’OIM au Mexique 7 i. Le contexte migratoire mexicain 7 ii. Le travail de l’OIM au Mexique 8

c. Stage au sein de l’Unité pour la Traite des Personnes, l’Enfance Migrante et le Genre de la mission de l’OIM à Mexico 10

i. Conditions de travail et missions au sein de l’OIM 10 Accueil et conditions de travail 10 Définition des missions 11 Collaborations 12

ii. Analyse des tâches réalisées en tant que support de l’Unité pour la Traite 13 Appui à la capacitation des institutions mexicaines sur le thème de la traite 14 Assistance directe aux migrants vulnérables et aux victimes de traite 17 Représentation de l’OIM lors d’événements 21 Autres activités ponctuelles 24

iii. Bilan du stage 25

II. L’OIM : un organisme phare défié par le contexte migratoire mexicain et les évolutions du système international 26

a. Le paradoxe migratoire : un thème très politisé, entrave au travail de l’OIM 26 i. Mise en perspective régionale du contexte migratoire mexicain 26 ii. La nouvelle loi migratoire mexicaine de 2011 : un renforcement de la politique sécuritaire

sous couvert de dépénalisation de la migration 30 iii. Enjeux et défis de l’action de l’OIM au Mexique 31

b. Le Mexique tiraillé entre multilatéralisme et bilatéralisme pour la gestion des migrations 33

i. Avantages de la diplomatie multilatérale pour la gestion des migrations 34 ii. Reconfiguration et limites du multilatéralisme au Mexique 37 iii. L’erreur stratégique du Mexique quant à la gestion bilatérale de la question migratoire 39

c. Faiblesses des projets de l’OIM au Mexique 41 i. La question des ressources financières dans le cadre de la projectisation 41 ii. L’évaluation de projets : un élément clé mais manquant 44

d. Vers une gestion supranationale des migrations ? 47 i. Migrations : le « dernier rempart de la souveraineté de l’Etat » remis en cause 47 ii. La nécessité d’un régime international de gestion des migrations 50

Conclusion 54

Bibliographie 57

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Table des annexes 61

Annexe 1 : Etats membres et observateurs de l’OIM 62

Annexe 2 : Structure organique de l’OIM 64

Annexe 3 : Enoncé de mission et orientation stratégique de l’OIM 66

Annexe 4 : Carte du Mexique fédéral 66

Annexe 5 : Carte des principales routes migratoires et zones de séquestration et de traite des migrants au Mexique 68

Annexe 6 : Organigramme de l’OIM Mexico 69

Annexe 7 : Document-type de systématisation des données des ateliers J/TIP 70

Annexe 8 : Bulletin sur la formation des Consuls latino-américains 73

Annexe 9 : Bulletin sur la « formation de formateurs » 75

Annexe 10 : Statistiques des Cas de Washington (2005-2013) 79

Annexe 11 : Du Mexique aux Etats-Unis, histoires de victimes de traite des personnes (exemples de cas assistés) 81

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Liste des acronymes et abréviations AIGM : Agenda International pour la Gestion des Migrations

AMARC : Association Mondiale des Radiodiffuseurs Communautaires

CdM : Chef de Mission

CDHDF : Comisión de Derechos Humanos del Distrito Federal - Commission des Droits de

l’Homme du District Fédéral

CEPAL : Commission Economique pour l’Amérique Latine

CIM : Comité Intergouvernemental pour les Migrations

CIME : Comité Intergouvernemental pour les Migrations Européennes

CRM : Conferencia Regional sobre Migración - Conférence Régionale sur la Migration

HCR : Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés

INM : Instituto Nacional de Migración – Institut National de Migration

NU : Nations Unies

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economiques

OI : Organisation Internationale

OIM : Organisation Internationale pour les Migrations

ONG : organisation non-gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

PICMME : Comité Intergouvernemental Provisoire pour les Mouvements Migratoires

Européens

POE : Port of Entry – Port d’Entrée

RI : Relations internationales (discipline)

SRE : Secretaría de Relaciones Exteriores – Secrétariat de Relations Extérieures

UNCT : United Nations Country Team – Equipe Pays des Nations Unies

UNDAF : United Nations Development Assistance Framework – Plan Cadre de l’Aide au

Développement des Nations Unies

UNFPA : Fonds des Nations Unies pour la Population

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Introduction

Un visa pour l’enfer. Un titre qui résume bien la réalité de la traite d’êtres humains à travers le monde. C’est grâce cet ouvrage de Célhia de Lavarène, journaliste française ayant participé aux missions de l’Organisation des Nations Unies (ONU) en Bosnie et au Libéria en

tant qu’experte sur la traite d’êtres humains, que j’ai découvert, en 2008, le thème de la traite

des personnes à des fins d’exploitation sexuelle. Depuis, j’ai conduit quelques actions bénévoles, à Sciences Po ou ailleurs, afin de faire

prendre consciences aux gens de l’existence de cette forme d’esclavage moderne présente partout dans le monde. Lors de la première année de Master, j’ai vu la rédaction du policy paper comme l’opportunité d’aller plus loin dans mon engagement, en approfondissant mes

connaissances sur le sujet. Ce travail de recherche a confirmé mon intérêt pour le thème, et renforcé ma volonté d’obtenir de l’expérience de terrain tout en mettant en application mes connaissances sur le sujet dans un cadre professionnel.

C’est donc tout naturellement que j’ai décidé d’orienter mes recherches de stage de fin

d’études vers les organisations luttant contre la traite – aussi bien au cœur du système des Nations Unies (NU) que les organisations de la société civile nationale et internationale, ou encore certaines institutions du gouvernement français.

Mon choix s’est porté vers l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) pour plusieurs raisons. Premièrement, je souhaitais acquérir une expérience en organisation internationale (OI) afin de compléter mes expériences précédentes dans le secteur privé et les organisations non-gouvernementales (ONG).

Ensuite, l’OIM apparait comme le chef de file en matière de gestion des migrations et semblait donc être un des acteurs les mieux placés pour combattre le phénomène de la traite. Par ailleurs, le travail de l’OIM se concentre sur l’assistance aux victimes de la traite, sans entrer dans les aspects de persécution du crime ou de poursuite des criminels. Cet accent mis sur l’assistance aux victimes m’a beaucoup plu, d’autant plus que c’est l’aspect que j’avais

moi-même mis en avant dans mon policy paper comme élément clé dans la lutte contre le phénomène.

Enfin, une possibilité de stage de fin d’études dans une OI représente une opportunité non négligeable pour pénétrer l’organisation et multiplier ses chances de pouvoir y faire

carrière. Il y a actuellement environ 214 millions de migrants internationaux dans le monde1,

soit 3.1% de la population globale2. La migration est un phénomène ancien qui permet l’évolution et la rencontre des sociétés. Pourtant, depuis plusieurs années, elle est considérée comme un phénomène nocif, un problème, une menace. Or de nombreux enjeux sociétaux et globaux demeurent liés, de près ou de loin, à la thématique migratoire.

1 UN, “United Nations' Trends in Total Migrant Stock: The 2008 Revision”, http://esa.un.org/migration [consulté le 18 août 2013]. 2 ibid.

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Le travail de l’OIM est inédit en ce qu’il cherche à casser les tabous liés à la migration et faire ressortir les aspects positifs du phénomène, souvent occultés. En venant en aide à des migrants dans des situations différentes de par le monde, l’OIM nous rappelle la

diversité du phénomène migratoire, et sa complexité. L’assistance ne sera en effet pas la

même pour un réfugié soudanais qui fuit la guerre, un déplacé interne haïtien qui tente de reconstruire sa vie après un tremblement de terre destructeur, ou encore une jeune mexicaine victime de traite aux Etats-Unis.

Le Mexique est une référence mondiale en matière de migration : rappelons que le

pays est traversé par le couloir migratoire le plus important du monde3 en termes de nombres de personnes transitant chaque jour. Entre 2003 et 2008, 10,3 millions de personnes ont ainsi franchi la frontière mexicano-américaine4.

De plus, les fortes inégalités sociales et économiques qui parsèment le pays, ainsi que le niveau élevé de corruption au sein des institutions officielles et le pouvoir des organisations criminelles, en font un terrain idéal pour le développement de la traite des personnes sur tout le territoire.

Bien souvent, on oublie de voir la traite depuis la perspective migratoire. On se

concentre sur l’aspect « crime organisé » ou encore « violation des droits de l’homme ». Mais la traite des personnes est également source de migrations importantes, qu’elles soient

internes à un pays, régionales ou intercontinentales. Plus fréquemment, les réseaux de traite vont se baser sur les routes migratoires

existantes pour recruter et transporter leurs victimes. Les migrants sont ainsi devenus très exposés aux réseaux de trafiquants, de par leur vulnérabilité initiale due à leur statut même de migrant. La pauvreté, la violence, les guerres, les catastrophes naturelles… toutes ces raisons

qui poussent les gens à migrer vont aussi les rendre plus vulnérables et en faire des proies plus faciles pour les réseaux de traite des personnes et de trafic de migrants. Il apparait donc essentiel d’approcher le thème de la traite des personnes, entre autres, du point de vue migratoire – afin d’en saisir pleinement les causes et enjeux sociétaux, économiques, politiques, culturels… La traite des personnes est un phénomène complexe, qui demeure peu connu en comparaison avec son envergure.

L’ensemble de ces éléments ont fait du Mexique un terrain certes difficile, mais idéal pour un apprentissage professionnel et empirique des thématiques migratoires. Sur le plan personnel c’était l’occasion de découvrir un nouveau continent, une nouvelle culture et d’apprendre une nouvelle langue. L’objectif de ce rapport est de rendre compte de manière critique du travail de l’OIM au Mexique concernant la gestion des migrations internationales dans la région.

3 Auteur inconnu, « Mexique. Le plus important couloir migratoire du monde », Courrier international, 25 janvier 2008. Lien : http://www.courrierinternational.com/breve/2008/01/25/le-plus-important-couloir-migratoire-du-monde [consulté le 16 juillet 2013]. 4 ibid.

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Dans un premier temps sera exposé le travail de l’OIM en général, et dans le pays, et plus particulièrement les missions qui m’ont été confiées durant les six mois de stage notamment en matière de lutte contre la traite des personnes.

Dans un second temps, il s’agira de mettre en perspective et de proposer une analyse

critique du fonctionnement institutionnel de l’OI et des défis qui s’imposent à l’organisation, à partir d’études de cas issus de mon expérience de stagiaire.

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I. L’OIM et la promotion des migrations dans le respect de la dignité humaine

a. L’OIM dans le monde

« L’Organisation Internationale pour les Migrations est l’organisation intergouvernementale chef de file sur la scène migratoire5 ». Indépendante de l’ONU, l’OIM

a été créée en 1951 pour faire face aux déplacements de populations importants à la suite de la seconde guerre mondiale en Europe. L’organisation est alors née sous la forme du Comité Intergouvernemental Provisoire pour les Mouvements Migratoires Européens (PICMME)6.

Une succession de changements au cours des décennies ont fait évolué le PICMME en

Comité Intergouvernemental pour les Migrations Européennes (CIME) en 1952, puis en Comité Intergouvernemental pour les Migrations (CIM) en 1980 – faisant dépasser les frontières européennes à l’organisation pour élargir son mandat à l’échelle internationale – pour finalement la faire devenir en 1989 l’OIM actuelle. En l’espace de 50 ans, l’organisation

est passée du statut d’agence logistique à celui d’institution majeure en charge de la

gestion des flux migratoires dans le monde7. Basée à Genève, en Suisse,

l’OIM possède la pleine personnalité juridique et compte aujourd’hui 151 Etats membres et 12 Etats observateurs. Cf annexe 1 pour la liste détaillée. Les organes de l'Organisation sont le Conseil, au sein duquel chaque Etat membre possède un représentant ; le Comité Exécutif, composé de 33 Etats membres élus pour deux ans ; et l'Administration, comprenant un Directeur général, un Directeur général adjoint et un personnel dont l'effectif peut être déterminé par le Conseil8. Le Conseil détermine les grandes orientations de l’organisation, le Comité exécutif en supervise les politiques, les opérations et la gestion, et l’Administration la gère et la dirige.

5 OIM, “A propos de l’OIM”. Lien : http://www.iom.int/cms/fr/sites/iom/home/about-iom-1.html [consulté le 20 mai 2013]. 6 OIM, « A propos de l’OIM », « Historique ». Lien : http://www.iom.int/cms/fr/sites/iom/home/about-iom-1/history.html [consulté le 20 mai 2013]. 7 ibid. 8 OIM, « A propos de l’OIM », « Constitution ». Lien : http://www.iom.int/cms/fr/sites/iom/home/about-iom-1/constitution.html [consulté le 18 août 2013].

L’OIM en chiffres

Créée en 1951

97 Etats Membres en 1998 151 Etats Membres en 2013

12 Etats observateurs

473 bureaux de terrain 9000 employés

2 700 programmes en cours sur +400 sites

Budget annuel 2011 : 1.3 milliard USD

Source : OIM, « IOM – FACTS AND FIGURES (2013)”, Site internet de l’OIM. Lien : http://www.iom.int/files/live/sites/iom/files/About-IOM/docs/facts_figures_en.pdf [consulté le 20 mai 2013]

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L’OIM compte plus de 470 bureaux de terrain, y compris des bureaux de pays, bureaux régionaux ou encore bureaux de liaison. Cf annexe 2 pour la structure organique détaillée de l’organisation.

Pour 2013, la partie administrative du budget a été établie à 39 398 792 francs suisses9, soit environ 42, 9 millions de dollars USD10. La partie opérationnelle du budget est, elle, estimée à 642,7 millions de dollars USD, ce qui représente un accroissement de 27,3 millions de dollars USD par rapport au budget pour 2012, qui s’élevait à 615,4 millions de dollars USD11.

L’OIM œuvre aux cotés des gouvernements, organisations de la société civile et

autres organisations internationales afin de « favoriser la compréhension de la problématique migratoire, d’encourager le développement économique et social par le biais de la migration et de veiller au respect de la dignité humaine et au bien-être des migrants 12».

A noter que même si l'OIM n'a pas de mandat de protection juridique, il n'en reste pas moins que «ses activités contribuent à la protection des droits de l'homme, et qu'elles ont pour effet ou pour conséquence de protéger les personnes concernées par la migration13 ».

L’OIM cherche à relever les défis croissants que pose la gestion des flux migratoires,

tout en cherchant à favoriser la compréhension des questions de migration, afin de promouvoir les migrations au nom des bénéfices économiques, sociaux, culturels et humains que les sociétés peuvent en retirer. L’OIM revendique ainsi le droit à la liberté de mouvement, et c’est dans cette optique que son action se concentre sur la protection des droits des personnes migrantes, pour une migration respectueuse de la dignité humaine et bénéfique pour tous : migrants, mais aussi pays et sociétés d’origine, de transit et de

destination. A titre d’exemple, une comparaison simple des chiffres permet de témoigner des

bénéfices économiques de la migration. Selon la Banque mondiale14, le montant des rémittences envoyées dans les pays en développent en 2011 atteignait 351 milliards de dollars, contre 129 milliards de dollars donnés par la communauté internationale dans le cadre de l’aide au développement. Ainsi les sommes envoyées par les membres des diasporas

dépassent largement les montants que les bailleurs de fonds dédient à l’aide au

développement.

9 Conseil de l’OIM, Programme et budget pour 2013, 4 octobre 2012. Lien : http://www.iom.int/files/live/sites/iom/files/About-IOM/governing-bodies/fr/council/101/MC_2349.pdf [consulté le 20 août 2013]. 10 Selon le taux de change au 20 août 2013. 11 Conseil de l’OIM, Programme… op.cit. 12 OIM, « A propos de l’OIM », « Historique »…, Op. cit. 13 OIM, « A propos de l’OIM », « Enoncé de mission ». Lien : http://www.iom.int/cms/fr/sites/iom/home/about-iom-1/mission.html [consulté le 20 mai 2013]. 14 Adams Bodomo, “Sending money back home beats foreign aid”, Celebrating Progress Africa, 8 May 2013. Lien: http://www.cp-africa.com/2013/05/08/sending-money-back-home-beats-foreign-aid/ [consulté le 20 mai 2013].

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Domaines d’activités de l’OIM Migration et genre Urgences humanitaires Politiques migratoires et recherche Migration et développement Droit de la migration Dialogue international de l'OIM sur la migration Coopération régionale et internationale Migration et santé

La formation des migrants L’intégration des migrants Aide à la réinstallation Aide au retour volontaire et à la réintégration Contre la Traite Gestion de l’immigration et des frontières Programmes de réparation Migration et changement climatique

Source: Site internet de l’OIM, Nos activités. Lien : http://www.iom.int/cms/fr/sites/iom/home/what-we-do.html [consulté le 20 mai 2013]

Par ailleurs, il semble que ces rémittences soit mieux investies et permettent un développement économique et social plus important et durable car davantage ancré dans les réalités et les besoins locaux15. Cet exemple constitue un élément parmi d’autres

soulignant les avantages de la migration internationale. C’est cette perception positive de la

migration que l’OIM cherche à véhiculer à travers son action. Afin de parvenir à une gestion humaine et ordonné des migrations, l’OIM cherche à

« promouvoir la coopération internationale sur la scène migratoire, à faciliter la recherche de solutions pratiques aux problèmes migratoires et à offrir une assistance humanitaire aux migrants dans le besoin », y compris les réfugiés et les déplacés internes. L’action de l’OIM se concentre donc sur les quatre piliers suivants16 :

Migration et développement,

Migration assistée,

Migration régulée, Migration forcée.

Mais ces piliers ne sont pas compartimentés et la plupart des activités de l’OIM

recoupent ces quatre domaines. Il s’agit entre autres de la promotion du droit international de la migration, de la protection des droits des migrants, de la santé dans le contexte migratoire ou encore de la dimension sexo-spécifique et les questions de genre dans la migration. Cf annexe 3 pour plus de détails sur l’orientation stratégique de l’OIM.

15 ibid. 16 OIM, « A propos… », op. cit.

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Le Mexique en bref Les Etats Unis Mexicains sont une République fédérale composé de 31 Etats et d’un District Fédéral. Superficie : 1 964 375 km2. Population : 116 220 947 PIB/Hb (PPP) : $15,30 Population vivant sous le seuil de pauvreté : 51.3%

Source : CIA, “Mexico”, The World Factbook, 7 May 2013. Lien : https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/mx.html

b. L’OIM au Mexique

i. Le contexte migratoire mexicain

En matière de migration, le Mexique est une référence au niveau mondial étant donné la multiplicité des facteurs et perspectives de la migration. En effet, le Mexique est à la fois un pays d’origine, de transit et de destination pour des centaines de milliers de migrants chaque année, avec ses 4 353 km de frontière terrestre17 partagés avec les Etats-Unis au nord et le Guatemala et le Belize au sud. Cf carte en annexe 4. La frontière avec les Etats-Unis est la plus importante avec ses 3 141 km18, et constitue par ailleurs la frontière la plus traversée au monde.

Depuis le début du XXIe siècle, on estime

à environ 1 million le nombre de Mexicains voyageant chaque année aux Etats-Unis19. Parmi eux, 150 000 traversent la frontière de manière irrégulière20. Il apparait alors peu surprenant que les Mexicains vivant aux Etats-Unis représentent à eux seuls plus de 30% de la population immigrée du pays et plus de 65% de la population d’origine hispanique

21. On peut tout de même relever que 500 000 Mexicains sont rapatriés chaque année depuis les Etats-Unis22.

Par ailleurs, chaque année, plus de 150 000 migrants arrivent au Mexique de manière

irrégulière en franchissant la frontière sud, notamment via le Chiapas, dans l’espoir d’arriver

aux Etats-Unis23. La grande majorité de ces migrants vient d’Amérique centrale et du sud, mais on rencontre également quelques individus originaires d’Asie et d’Afrique.

En réponse à ce phénomène massif de migrations irrégulières, des centres d’internement (ou centres de détention) ont été aménagés aux alentours de la frontière sud. Y sont enfermés les migrants centre-américains et extrarégionaux qui ont tenté de passer la

17 CIA, “Mexico”, The World Factbook, 7 May 2013. Lien : https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/mx.html 18 ibid. 19 Thomas Lothar Weiss and Pedro Arturo López Chaltelt, Mexico: Public Policies Benefiting Migrants, IOM, 2011. 20 Pew Hispanic Center, ”US Unauthorized Immigration Flows are down Sharply Since Mid-Decade”, 2010. 21 National Population Council of Mexico (CONAPO), Migración y Salud. Latinos en los Estados Unidos, 2008. 22 Thomas Lothar Weiss and Pedro Arturo López Chaltelt, Mexico… op.cit. 23 Secretaría de Gobernación, Informe del Estado Mexicano sobre Secuestro, Extorsión y otros delitos cometidos contra personas migrantes en tránsito por Territorio Mexicano, 16 de julio de 2010.

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frontière de manière irrégulière. Ces centres se trouvent majoritairement dans les Etats du Chiapas, de Campeche, de Tabasco et du Quintana Roo.

En raison de la dimension importante du phénomène migratoire au Mexique, les migrants se voient exposés à des conditions sanitaires et climatiques extrêmes, faisant face tout au long du voyage à une multitude de risques tels que les mutilations corporelles lors des voyages en train, la faim, la soif, la chaleur, toutes sortes de maladies, la mort, mais également le risque de devenir victime d’attaques, d’extorsion, d’enlèvements, ou encore de traite24. Les routes principales de traite et trafic de migrants suivent ainsi les routes migratoires qui traversent le pays. Cf carte en annexe 5.

ii. Le travail de l’OIM au Mexique

Le Mexique est membre de l’OIM depuis 2002. Le bureau de représentation de l’organisation dans le pays fut inauguré en mars 2005 dans la capitale. Depuis, 4 sous-bureaux ont été créés pour couvrir les couloirs migratoires nationaux les plus importants. Il y a actuellement 2 sous-bureaux dans l’Etat du Chiapas, à la frontière avec le Guatemala, dans les villes de Tapachula (depuis juin 2009) et Tuxtla Gutiérrez (depuis août 2011). Un bureau a également été ouvert à Ciudad Juárez, dans l’Etat de Chihuahua, à la frontière avec les Etats-Unis, en avril 2010. Mais face à la hausse de l’insécurité dans la ville ces deux

dernières années le bureau a été fermé début 2013. Enfin le bureau le plus récent a ouvert en mars 2012 à Acayucan dans l’Etat de Veracruz – sur la côte caribéenne25. Il a cependant été fermé en août 2013 en raison du manque de fonds.

Au 1er août 2013, la mission de l’OIM comptait 22 employés répartis entre le bureau central (17) et les sous-bureaux (2 à Tapachula, 3 à Tuxtla) ainsi que de nombreux stagiaires (7 au 1er août 2013).

Le bureau central de l’OIM au Mexique est composé de trois unités principales : l’Unité d’Opérations, l’Unité de Développement de projet, et l’Unité pour la Traite des

Personnes, l’Enfance Migrante et le Genre. Cf annexe 6 pour l’organigramme complet de

la mission.

Le travail de la mission se fait entièrement sur projets. Cela signifie que l’organisation

n’obtient des fonds que lorsqu’elle a des projets en cours. Les fonds alloués par les bailleurs sont consacrés à un projet précis, et incluent les salaires des personnels impliqués dans le projet, les coûts de fonctionnement de la mission pour la période définie, et les fonds pour le projet en lui-même.

Le budget de la mission et le nombre d’employés vont donc varier selon les mois ou les années, en accord avec le nombre de projets en cours et le montant des financements accordés par les bailleurs pour chacun de ces projets. Lors de mon arrivée, plusieurs employés ont quitté l’OIM puisque leurs projets se sont terminés. Quelques mois plus tard de

24 INM, Grupos beta. El brazo humanitario del instituto nacional de migración, Date inconnue. Lien : http://publications.iom.int/bookstore/free/Dossier_Grupos_Beta.pdf [consulté le 22 mai 2013]. 25 OIM, Brochure de présentation de la mission de Mexico.

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nouveaux fonds ont été alloués par le gouvernement mexicain pour un projet et cinq nouveaux employés ont ainsi fait leur entrée.

La mission de Mexico est toujours très discrète sur le montant des fonds gérés en tout et pour chaque projet. Il existe un manque flagrant de transparence sur la question puisque les noms des bailleurs et le montant des fonds alloués ne sont connus que du Chef de Mission (CdM) et du Directeur financier. Ainsi, lorsque j’ai demandé à ce dernier de me communiquer le budget annuel de la mission pour l’inclure dans cette présentation, il a refusé.

Au Mexique, l’OIM travaille étroitement avec le gouvernement et la société civile dans le but de renforcer leurs capacités respectives afin de faciliter la protection et l’assistance aux personnes migrantes. Ses partenaires principaux sont le Secrétariat de Relations Extérieures (Secretaría de Relaciones Exteriores - SRE) et l’Institut National de

Migration (Instituto Nacional de Migración - INM). L’OIM coopère également avec des instances comme l’Institut National des Femmes

(Insituto Nacional de las Mujeres), le Système pour le Développement Intégral de la Famille (Sistema para el Desarrollo Integral de la Familia), le Bureau du Procureur Général de la République (Procuraduría General de la República), la Commission Nationale des Droits de l’Homme (Comisión Nacional de los Derechos Humanos) et le Congrès de l’Union

(Congreso de la Unión). Par ailleurs, l’OIM collabore également avec les gouvernements étatiques, les églises, les radios communautaires ou encore les refuges pour migrants.

L’OIM travaille aussi étroitement avec le système des NU, et en particulier avec certaines agences telles que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) ou encore ONU Femmes.

Il convient de noter qu’au Mexique, comme dans quelques autres pays, l’OIM est

intégrée assez fortement au système des NU via sa participation à l’équipe pays des Nations Unies (United Nations Country Team - UNCT). Son travail repose donc parfois sur des règles onusiennes, e.g. concernant les règles de sécurité et le management du personnel. Malgré tout l’organisme conserve une certaine indépendance vis-à-vis de l’ONU dans sa manière

d’opérer et demeure un organisme intergouvernemental à part.

De manière générale, les activités principales de l’OIM au Mexique incluent : - La prévention de la traite des personnes et des enlèvements de migrants en transit

ainsi que l’assistance aux victimes de ces crimes ; - L’appui au retour volontaire de migrants dans leurs pays d’origine ; - L’appui direct aux migrants vulnérables ; - Le renforcement des programmes de rapatriement et de réinsertion des migrants

mexicains dans leurs communautés d’origine ; - La recherche, publication et diffusion d’information et de campagnes sur diverses

thématiques migratoires ; - Le renforcement du gouvernement et de la société civile.

A ma demande, mon stage avec la mission de l’OIM s’est déroulé au sein de l’Unité

pour la Traite des Personnes, l’Enfance Migrante et le Genre (Unidad para Trata de

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Personas, Niñez Migrante y Género). Apres avoir écrit un policy paper lors du Master 1 sur la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle en Haïti, j’avais en effet envie d’acquérir

de l’expérience professionnelle sur le sujet.

c. Stage au sein de l’Unité pour la Traite des Personnes,

l’Enfance Migrante et le Genre de la mission de l’OIM à

Mexico

Mon stage s’est déroulé sur six mois, du 1er février au 2 août 2013. Voici un aperçu des conditions dans lesquels il a eu lieu, ainsi qu’une analyse des missions et travaux qui m’ont été confiés tout au long de la période.

i. Conditions de travail et missions au sein de l’OIM Accueil et conditions de travail

Mon arrivée au sein de la mission s’est très bien passée. J’ai été accueillie par ma

tutrice de stage, Denisse Velázquez Galarza, qui m’a fait faire un tour des lieux et présentée

à l’ensemble de la mission. L’unité à laquelle j’ai été intégrée est constituée de Denisse,

Coordinatrice de l’unité, et Eva Reyes, juriste et experte sur la traite qui a été contractée uniquement pour un projet précis sur la traite financé par le gouvernement des Etats-Unis.

Selon les périodes s’ajoutent également entre une et six stagiaires de différentes nationalités et de formations diverses – bien que toutes en lien avec les relations internationales.

La mission de l’OIM est située dans une vieille maison dans un quartier calme de la

ville, à l’écart des autres bureaux de l’ONU. Etant arrivée à un moment où il n’y avait pas

beaucoup de stagiaires j’ai tout de suite eu un bureau et des équipements informatiques personnels. Les stagiaires arrivées les mois suivants n’ont pas eu cette chance dû au manque

de place et de matériel. On peut donc dire que j’étais privilégiée par rapport à certaines

stagiaires concernant mes conditions de travail plus que correctes. Par ailleurs, l’atmosphère de travail est restée dans son ensemble plutôt

sympathique. Bien que la personnalité du CdM ait créée de fortes tensions entre lui-même et les employés, qui étaient en grande majorité toujours très stressés, je n’ai pas été affectée

autant que les autres par ces pressions dû au fait que je n’étais « que » stagiaire. Il m’est

cependant arrivé d’être confrontée directement à ses sautes d’humeur, ce qui force la maitrise de soi tout en apprenant à se détacher et prendre du recul dans les relations professionnelles.

Au sein de l’Unité de Traite l’ambiance était plus sympathique, bien que stressante. L’unité manque d’organisation et cela s’en ressent dans le travail quotidien : retards dans les rendus de documents, préparations de projets à la dernière minute… ce n’étaient donc pas les

conditions optimales pour un apprentissage professionnel. Cela m’a particulièrement gênée

lorsqu’il s’agissait de préparer le voyage aux Etats-Unis d’une famille mexicaine dans le

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cadre du programme de réunification familiale, et qu’on ne les prévenait que quelques jours

avant le départ de la date du voyage et des modalités. Après discussion avec Denisse nous avons tenté de mieux nous organiser mais le nombre important de tâches à réaliser au quotidien n’a pas vraiment permis de progrès dans ce domaine.

Il me semble que le manque d’organisation provient également du manque d’expérience de Denisse en tant que coordinatrice (moins d’un an à ce poste) et de sa difficulté à déléguer le travail. Même quand elle assignait des tâches, que ce soit à Eva l’experte de projet ou aux stagiaires, elle souhaitait toujours vérifier en détail ce qui avait été

fait et se rajoutait ainsi de nombreuses taches à la pile de travail qu’elle avait déjà à faire.

D’où les importants retards inévitables dans toutes les activités de l’Unité. Néanmoins je me suis peu à peu habituer à cette façon de travailler et ai ainsi su me

créer et saisir des opportunités tout en acquérant une solide expérience professionnelle. Définition des missions Mon rôle de stagiaire avait été défini dans la convention de stage principalement comme celui d’un appui à la préparation des activités de deux projets principaux : le projet de Renforcement de la législation contre la traite dans les Etats de la République et le projet de Renforcement des capacités d’attention et de protection des migrants vulnérables en

Amérique centrale. Parallèlement la convention annonçait ma possible implication dans diverses réunions

de travail, séminaires, ateliers de formations et tout autre événement organisé par l’OIM ou

auquel elle serait invitée, ainsi que la rédaction de documents de travail et l’appui aux

activités quotidiennes de l’Unité en général.

A mon arrivée j’ai eu un début de briefing incomplet sur mon rôle concret, ce qui a rendu délicat le début du stage ainsi que la compréhension et l’entrée dans mon rôle. Denisse

avait peu de temps pour bien me présenter les activités et j’ai donc principalement découvert les projets et appris mon travail au fur et à mesure des activités. Par chance, durant mon premier mois la stagiaire qui était là avant moi a pu m’aider à me familiariser avec les

procédures et les projets. Cependant j’étais sans cesse obliger de demander des explications et des informations, d’insister pour pouvoir parler avec Denisse et mieux comprendre mon

travail, ce qui est devenu pesant à la longue. En fin de compte, mon travail s’est peu à peu adapté aux besoins de l’Unité, ainsi

qu’à mes compétences et intérêts. Davantage que de travailler sur le projet de Renforcement des capacités d’attention et de protection des migrants vulnérables en Amérique centrale, j’ai

ainsi été mise en grande partie sur les Cas de Washington. Il s’agit d’un programme de l’OIM Washington, qui consiste à faire venir aux Etats-Unis les familles des victimes mexicaines trafiquées chez le voisin américain. Après quelques semaines de stage, j’étais quelque peu déçue que mon travail se cantonne majoritairement à des tâches administratives et logistiques. J’aurais effectivement

Page 24: Rapport de stage OIM

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préféré faire davantage de travaux de fond sur le thème de la traite ou de la migration. Mais finalement je me suis aperçue que le travail de l’Unité de Traite en général demeurait très logistique. Bien que nous travaillions directement avec les familles des victimes de la traite par exemple, notre travail se limitait finalement à les aider à préparer leur voyage aux Etats-Unis : demander les passeports, les visas, acheter les billets d’avion et les accompagner à

l’aéroport. Mais en fin de compte je me suis habituée à ce travail et, lorsque j’ai pu accompagner

pour la première fois une jeune fille à l’aéroport pour son départ à New York, j’ai été très

heureuse en ce que j’avais pu un peu contribuer à améliorer sa vie future et surtout à retrouver sa sœur ainée.

Le reste des activités de l’Unité est également centré sur un appui logistique, comme

pour le renforcement des capacités des refuges pour migrants et leur approvisionnement en matériel, lits, médicaments. Et lorsque le travail demandé se faisait davantage sur le fond, je n’y participais que de loin, comme en appuyant l’organisation des ateliers de formation des fonctionnaires fédéraux, ou bien en faisant quelques commentaires lors de la rédaction de propositions de projets ou de documents des Nations Unies.

En soi, j’ai été déçue les premières semaines au vu du décalage entre mes attentes vis-

à-vis de ce stage et la réalité. Mais petit à petit je me suis appropriée la mission et les valeurs de l’OIM et ai pu profiter de cette expérience a 100%. Collaborations Au cours du stage, j’ai été amenée à collaborer avec une grande diversité d’acteurs,

tant en interne qu’en externe. Au sein de l’OIM, mis à part mes collègues de l’Unité, j’ai principalement collaboré

avec l’Unité d’Administration et Finances, par laquelle il fallait passer pour toute demande de paiement concernant les dépenses liées aux projets (paiement de passeports, remboursements de coûts de transports…). Il fallait par ailleurs respecter une procédure spécifique pour toute demande de paiement, assez lourde mais avec laquelle je me suis rapidement familiarisée.

J’ai également été en contact permanent avec l’Assistante du CdM, qui me demandait parfois d’aller à tel ou tel événement en son nom, et qui coordonne le fonctionnement de la mission.

Enfin, la coopération a été importante avec l’Unité d’Opérations, qui est celle qui négocie des tarifs préférentiels avec les compagnies aériennes et achète les billets d’avion que l’Unité de Traite lui demande pour les cas de réunification familiale. Par ailleurs, j’ai également été en contact tout au long de mon stage avec le Manager de Projets de l’OIM Washington, qui coordonne les cas de réunification familiale des victimes de traite mexicaines aux Etats-Unis. La collaboration impliquait une coordination

Page 25: Rapport de stage OIM

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dans la prise de contact avec les victimes/avocats/familles des victimes afin d’organiser le

voyage le plus rapidement possible et dans les meilleurs conditions, ainsi que des contacts très réguliers tout au long de la préparation de chaque cas. De plus, chaque dépense liée à un cas devait préalablement être approuvée par le Manager de Washington.

Nous étions également en contact avec les équipes de l’OIM des aéroports de Chicago, Newark, John F. Kennedy à New York, Los Angeles et Miami, afin de coordonner avec eux les arrivées et/ou transits des familles par ces villes. De plus, durant les processus de préparation du voyage, j’ai développé une

collaboration avec l’ambassade des Etats-Unis à Mexico, notamment avec le service des visas de victimes et avec l’équipe de Homeland Security qui devait intervenir pour certains cas de haute sécurité.

Tous ces collaborateurs nous ont permis de faire avancer certains cas plus rapidement, en avançant les rendez-vous consulaires ou en négociant directement avec les autorités mexicaines ou les compagnies aériennes pour laisser sortir des mineurs auxquels ils manquaient certains documents. Dans un cas en particulier la coopération a été particulièrement efficace et a bien mis en valeur l’importance de la coordination entre les différentes institutions et la valeur ajoutée de chacune.

J’ai également eu affaires aux autorités mexicaines, notamment lors des demandes de

passeports. Contrairement à la collaboration avec les autorités américaines, celle-ci ne s’est

pas toujours aussi bien passée. Dans certains bureaux étatiques du Ministère de l’Intérieur, les

fonctionnaires n’avaient jamais entendu parler de l’OIM, ne comprenaient pas bien le

programme mené et refusaient donc de nous fournir l’assistance demandée alors que nous

l’obtenions très facilement dans d’autres Etats. L’obtention des passeports a donc été compliquée pour certains cas, retardant par conséquent le processus de réunification.

A présent je vais introduire plus en détail le travail que l’on m’a confié durant ces six

mois et ce que j’en ai retiré.

ii. Analyse des tâches réalisées en tant que support de l’Unité pour la

Traite

Comme son nom l’indique, l’Unité à laquelle j’ai été intégrée se concentre sur trois

thématiques principales liées à la migration : la traite des personnes, les questions de genre dans la migration, et le cas des enfants migrants.

Au vu de mon début de spécialisation sur le thème de la traite durant le Master 1 et de mon intérêt pour le thème, j’ai surtout été assignée à des tâches concernant le premier élément. J’ai tout de même pu participer, ponctuellement, à des événements sur le thème des

enfants migrants et du genre dans la migration, tout en ayant un aperçu de l’aide apporté aux

refuges pour migrants vulnérables.

Page 26: Rapport de stage OIM

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Appui à la capacitation des institutions mexicaines sur le thème de la traite

Ma première mission a été d’appuyer l’organisation et le suivi des ateliers de

formation organisés par l’OIM pour les législateurs mexicains et la société civile de chaque Etat sur la nouvelle Loi Générale en Matière de Traite (« Ley General Para Prevenir, Sancionar Y Erradicar Los Delitos En Materia De Trata De Personas Y Para La Protección Y Asistencia A Las Víctimas De Estos Delitos »), adoptée le 14 juin 2012 au niveau fédéral.

Le projet est financé par le Département d’Etat américain J/TIP. Le but est de faire

connaître et comprendre la nouvelle Loi Générale aux législateurs mexicains et acteurs de la société civile afin de renforcer leurs capacités respectives en matière de prévention, persécution et éradication du phénomène.

Pour ce faire, Eva Reyes, consultante embauchée pour le projet, a conduit des ateliers de capacitation dans chaque Etat de la Fédération. Chaque fois, il y avait un atelier pour le Congrès étatique, et un atelier pour la société civile. Les ateliers dirigés à la société civile accueillaient des représentants de l’Institut National pour les Migrations, de la Commission

Etatique des Droits de l’Homme, des ONG d’aide aux migrants ou aux victimes de traite, d’universitaires etc. Au 31 juillet 2013, 70 ateliers avaient été conduits et plus de 3 300 personnes formées26.

Mon travail se faisait à la fois en amont et en aval de chaque atelier. En amont des

formations, en marge de l’organisation pure et dure de l’atelier qui incluait de contacter les

personnes cibles, de se mettre d’accord sur la date et le lieu avec la partie prenante de chaque

Etat, ou encore de contracter un traiteur, nous devions répondre à des exigences pointilleuses du gouvernement américain.

La politique américaine est très stricte sur le type de personnes qui peuvent recevoir des fonds via les projets financés par le gouvernement. En effet il ne faut pas qu’une personne

ayant dans le passé violé d’une manière ou d’une autre des droits humains puisse prendre part

à un des ateliers financés par le gouvernement américain. Par conséquent, nous devions compiler une liste détaillée des futurs participants à l’atelier qui possédaient le pouvoir de

porter une arme ou de maintenir en détention une personne, appelée vetting. Pour cela, nous envoyions des formulaires d’inscription aux personnes invitées.

Le problème est que nous devions envoyer le vetting au gouvernement américain 30 jours ouvrés avant la date de chaque atelier. Ce qui impliquait de prévoir très à l’avance chaque formation pour avoir le temps de tout organiser et de récolter les fiches d’inscriptions

– chose peu aisée au Mexique où le respect des dates butoirs est loin d’être le sport national.

Dû aux retards, certains ateliers ont dû être reprogrammés dans quelques Etats car le temps nécessaire au vetting avait été largement dépassé et ne permettait pas l’organisation de la

formation dans des conditions optimales. Une fois l’atelier mis en place, il fallait ensuite que je prépare les matériels

nécessaires à son déroulement : liste de présence, agenda, texte de la loi en question, et 26 Document interne.

Page 27: Rapport de stage OIM

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questionnaires pré et post-atelier. En effet, afin de mesurer l’impact de chaque atelier de formation, chaque participant était soumis à un test de cinq questions avant le début de la séance afin de mesurer les connaissances déjà possédées sur la nouvelle Loi Générale et le thème de la traite. Les participants refaisaient le même test à la fin de la séance, et nous pouvions ainsi voir la marge de progrès qu’avait permise l’atelier.

Au retour des ateliers, je devais ainsi systématiser les données récoltées. Pour chaque

atelier, j’ai calculé la marge de progression générale des participants grâce à l’atelier afin

d’en tirer le bilan et de permettre également, éventuellement, une amélioration de la méthode d’enseignement. Par ailleurs, les participants évaluaient également chaque fois la qualité de l’atelier et de l’exposante. Cette procédure de systématisation était une exigence de J/TIP, à intégrer aux rapports trimestriels et annuel. Cf annexe 7 pour un document-type de systématisation des données.

Une fois le travail de systématisation terminé, nous envoyions les diplômes à chaque participant. Le diplôme ne dépendait en aucun cas du taux de réussite d’une personne au test,

qui était de toute façon anonyme. Il s’agissait seulement d’une attestation de participation à la formation, sensée attester des nouvelles connaissances et compétences acquises par le participant.

A part ce qui touchait purement aux ateliers, j’étais également en charge de préparer le

voyage de la ou les collègues qui allaient exposer durant les ateliers : faire la demande d’autorisation auprès du CdM, demander aux collègues d’Opérations d’acheter les billets d’avion, réserver l’hôtel, coordonner la réception à l’aéroport avec les parties prenantes, et

faire la « Security Clearance » obligatoire sur le site des NU, déclaration informatique que chaque employé du système doit réaliser lorsqu’il part en voyage, pour des raisons de sécurité.

En raison de la limitation des fonds je n’ai jamais pu aller en voyage avec Eva ou

Denisse assister à un atelier dans un autre Etat. J’ai cependant pu y prendre part à plusieurs

reprises dans le District Fédéral. Je suis d’abord allée à la Commission des Droits de l’Homme du District Fédéral

(Comisión de Derechos Humanos del Distrito Federal - CDHDF) avec Eva et Denisse afin d’assister à l’atelier une première fois, d’en découvrir le contenu, de voir comment étaient

conduits les exercices de groupes, en bref de m’imprégner du projet. Quelques mois plus tard, à l’INM, j’ai assisté Eva durant le déroulement de l’atelier,

en présentant certaines parties et en coordonnant les activités de groupe. A ce niveau-là, je connaissais déjà presque le contenu de la présentation par cœur puisque j’avais eu l’occasion

de la voir de nombreuses fois au cours des mois précédents, notamment lors d’événements

autres que ces formations J/TIP auxquelles Eva et Denisse avaient participé. Ces événements autres incluaient les conférences auxquelles Eva et/ou Denisse étaient

invitées à parler de la traite des personnes, tout comme celles organisées par l’OIM dans le

cadre d’autres projets, mais qui reprenaient les mêmes éléments. En fin de compte, le projet

Page 28: Rapport de stage OIM

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J/TIP a servi de base pour développer des ateliers de formation plus généraux afin de toucher un public plus large.

Ainsi, le 19 février, nous avons conduit un atelier de sensibilisation et capacitation de quelques heures à l’ambassade du Pérou à Mexico, en présence de 19 représentants consulaires des ambassades d’Amérique centrale et latine présentes dans la capitale

mexicaine. Cf annexe 8 pour le bulletin sur cette formation. De plus, dans le cadre du projet régional de l’OIM, les bureaux régionaux de l’OIM

et du HCR au Costa Rica ont organisé un atelier de formation sur six jours sur le thème des droits des migrants en Mésoamérique à conduire dans chaque Etat membre. La particularité de cet atelier est qu’il s’agissait d’une « formation de formateurs ». En d’autres termes, les

personnes à former devaient être choisies de manière stratégique dans chaque institution ciblée afin qu’elles puissent elles-mêmes répliquer la formation auprès de leurs subordonnés.

L’Unité de Traite de l’OIM Mexico a constitué le point relais pour aider à l’organisation de cet atelier au Mexique. J’ai donc contribué à la rédaction et l’envoi des

invitations aux participants des institutions clés du gouvernement et de la société civile et au suivi des inscriptions. J’ai organisé les coffee breaks en collaboration avec un traiteur contracté pour les six jours de formation. Comme pour les ateliers J/TIP, j’ai préparé les

matériels pédagogiques, les manuels de formation, les listes de présence etc. J’ai également fourni un appui logistique durant toute la formation, avant, pendant et

après chaque session quotidienne, et ai appuyé Denisse et Eva dans la conduite des exercices de groupes.

A la fin, j’ai coordonné les examens passés par les candidats et le suivi de chacun. Cette fois-ci, l’obtention du diplôme dépendait de la note obtenue à l’examen. Sur 33

candidats, seules deux n’ont pas été diplômées, et ce uniquement pour n’avoir pas assisté au

nombre minimum requis de sessions sur les six jours. Cf annexe 9 pour le bulletin sur cette formation.

Cette formation a été très enrichissante pour moi également, puisqu’elle a élargi le

champ de mes connaissances à davantage que le seul thème de la traite. Ont été abordés les droits humains des migrants et des réfugiés, les questions de genre dans la migration, les enfants migrants non accompagnés, les indigènes…

Les discussions entre participants étaient très éclairantes puisqu’ils faisaient part de

leurs expériences respectives dans le domaine de la protection et assistance aux migrants. Venant de milieux différents, les groupes « Beta » de protection aux migrants le long des routes migratoires, les juges et avocats, ou encore les employés d’ONG ou de refuges pour migrants ont débattu de leurs visions respectives sur les problèmes existants en matière de migration au Mexique et dans la région, et les manières de les adresser.

En parallèle de la formation des acteurs de la lutte contre la traite, j’ai également

participé aux programmes d’assistance directe aux victimes de traite.

Page 29: Rapport de stage OIM

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Assistance directe aux migrants vulnérables et aux victimes de traite

L’OIM assiste les migrants et leurs familles dans le cadre de deux projets différents : le projet régional de l’OIM et le programme de l’OIM Washington. Dans le cadre du projet régional, l’OIM vient en aide à tous types de migrants dits

vulnérables, que sont les femmes, les enfants non-accompagnés, les malades et handicapés, les demandeurs d’asile, les migrants extra-continentaux, la communauté Lesbienne-Gai-Bi-Transsexuel-Transgenre-Intergenre (LGBTTI) et les victimes de crime. C’est par ce biais que nous avons pu conduire diverses actions avec les consulats des

pays d’Amérique centrale à Mexico, grâce auxquels nous avons organisé le retour dans leur

pays d’origine de mineurs migrants, ou encore la réunification d’un jeune Colombien avec son père, refugié à Mexico.

Les victimes de traite étrangères ou nationales rencontrées au Mexique peuvent également bénéficier d’un programme d’assistance et de protection et, si elles en expriment le souhait, de rapatriement.

Mais la majorité des cas que j’ai conduits s’inscrivaient dans le cadre du Programme

de Retour, Réintégration et Réunification Familiale des Victimes de Traite des Personnes aux Etats-Unis géré par l’OIM Washington, qui vient en aide aux victimes de la traite mexicaines se trouvant aux Etats-Unis.

Le déroulement d’un cas est le suivant. Une victime de traite est détectée aux Etats-

Unis par une organisation de la société civile. Celle-ci entre en contact avec l’OIM

Washington et remplit une demande d’assistance. L’avocat de la victime et l’OIM

Washington vont alors aider la victime à obtenir un visa U (domestic violence) ou un visa T (trafficking), valable quatre ans et qui permet à la personne de résider légalement et travailler sur le territoire américain. A terme, l’idée est d’obtenir la résidence permanente.

Une fois la victime en règles, l’OIM Washington envoie à Mexico le dossier de la victime avec les informations des membres de la famille à faire voyager aux Etats-Unis. C’est

là que mon travaille commençait. Je devais prendre contact avec la famille de la victime au Mexique – un époux, une épouse, des grands-parents en charge des enfants de la victime – afin de commencer avec eux la procédure de demande de passeport. A noter que les membres de la famille qualifiant pour le programme de réunification sont uniquement les membres directs : époux, enfants, parents, frères et sœurs

27. Bien souvent, ces familles vivaient dans de petits villages, sans téléphone fixe, sans

internet, sans compte en banque. Les adultes étaient souvent analphabètes, les enfants allaient à l’école mais avaient parfois de grosses difficultés. Le processus de demande de passeport, qui a l’air simple au premier abord, devenait alors infiniment compliqué puisque bien souvent

les personnes n’avaient pas les papiers demandés, tels leur acte de naissance, et vivaient loin

de la délégation du SRE où ils devaient se rendre pour faire la demande.

27 Une réforme est en cours afin d’ouvrir la réunification aux petits-enfants des victimes également.

Page 30: Rapport de stage OIM

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Afin de faciliter le procédé, je devais donc contacter lesdites délégations pour leur expliquer le programme et le cas assisté, dans le but de faciliter et rendre plus flexible la procédure. La plupart du temps cela fonctionnait, mais de temps en temps la procédure se compliquait davantage, comme expliqué précédemment.

Par ailleurs, il fallait trouver un moyen de faire parvenir l’argent nécessaire au paiement des passeports à la famille avant leur rendez-vous. Les familles n’ayant

généralement pas de comptes en banques, nous devions transférer l’argent via des maisons de change. Il fallait alors faire preuve d’anticipation, tant au niveau des montants qui allaient être nécessaires qu’au niveau du timing pour envoyer l’argent à la famille – qui n’avait

généralement pas les moyens d’avancer de grosses sommes. Une fois les passeports obtenus, il fallait organiser la venue des membres de la famille

à Mexico afin qu’ils passent un entretien consulaire en vue d’obtenir le visa dérivé U ou T. Pour cela, je remplissais les formulaires en ligne du gouvernement américain afin de prendre rendez-vous au Centre d’Attention aux Demandeurs de Visas (Centro de Atención para Solicitantes - CAS) et au Consulat. Cette procédure est laborieuse et beaucoup d’informations sont nécessaires, ce qui oblige à bien préparer les dossiers avant toute

sollicitude afin de ne manquer d’aucune information, ce qui pourrait nuire à la demande de visa.

Le jour des rendez-vous, je me rendais avec les membres de la famille au CAS et au Consulat. N’ayant cependant pas la permission d’entrer, je les attendais dehors et les aidais

seulement à préparer l’entrevue à l’avance, en les rassurant sur les questions qu’on leur

poserait et révisant avec eux les documents à présenter. Dans les 24 à 48h qui suivaient, les visas étaient prêts et nous allions les chercher au Consulat. Le lendemain, la famille prenait l’avion pour les Etats-Unis. Là encore, j’allais les chercher à l’hôtel pour les accompagner à

l’aéroport et les préparer à leur vol. Durant l’intégralité de leur séjour à Mexico, les familles sont logées et nourries aux

frais de l’OIM. Tous les documents de voyages et les billets d’avion sont également pris en charge par le projet, ainsi que les frais de déplacement induits par les procédures administratives.

La plupart des personnes concernées par le programme n’étaient jamais sorties de leur

ville ou village. Il ne faut pas oublier non plus que ce voyage représente un changement de vie considérable pour chaque famille, qui laisse tout derrière elle pour aller recommencer une vie dans un pays étranger dont elle connait à peine la culture et ne parle en général pas la langue. Les voyageurs sont donc dans un état de stress important, et mon travail était de les rassurer et les aider au maximum.

Souvent, il était difficile d’obtenir un vol direct depuis Mexico jusqu’à la ville dans

laquelle la famille allait s’installer. Afin de faciliter le moment de l’escale, nous faisions en

sorte de toujours, à moins que cela soit vraiment impossible, faire passer la famille par un port d’entrée (Port of Entry - POE) au sein duquel était présente une équipe de l’OIM. Les

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POE sont les aéroports de Chicago, Newark, John F. Kennedy à New York, Los Angeles et Miami, qui comptent parmi les zones avec le nombre le plus important d’immigrés mexicains.

Dans les POE, l’OIM aide ainsi les familles à passer l’immigration et en cas de problème avec les visas ou autre peuvent intervenir directement pour régler la question.

J’ai trouvé la coordination entre les bureaux de Mexico, Washington et les équipes des POE plutôt bien rôdée. A chaque fois, Mexico annonçait le départ, l’équipe du POE

annonçait la réception et le second départ, et l’équipe de Washington annonçait l’arrivée à bon

port de la famille via ses contacts avec l’avocat de la victime. Dans deux des cas que j’ai gérés, la victime était rentrée des Etats-Unis et voyageait

donc avec ses enfants. Dans le premier cas, la victime était rentrée suite aux menaces faites par son ex-compagnon, le trafiquant, à l’encontre de leur jeune fils, qui vivait avec lui au

Mexique. La procédure de demande de visa pour cette femme a donc été très compliquée puisqu’elle a dû faire des démarches additionnelles étant donné qu’elle était entrée et sortie des Etats-Unis illégalement et que son statut n’avait pas encore été régularisé.

Le premier rendez-vous à l’ambassade a donc été un échec et son visa lui a été refusé. Comme elle vivait à Mexico dans un refuge de haute sécurité avec son fils, ça n’a pas été trop compliqué de retourner à l’ambassade pour sa seconde demande de visa. Son fils lui étant né

aux Etats-Unis, son voyage était plus simple à organiser. Au final la mère et le fils ont pu s’envoler pour le Texas en toute sécurité.

Dans le deuxième cas, la victime avait déjà obtenu son visa T et bénéficiait d’une

autorisation spéciale du gouvernement américain pour rentrer trois mois au Mexique. En effet lorsqu’un Mexicain obtient un visa, quel qu’il soit, il ne peut normalement pas retourner au Mexique avant plusieurs années. Dans ce cas-là victime a obtenu un Advance Parole pour pouvoir faire les corrections nécessaires à l’acte de naissance de son fils et obtenir les

passeports de ses deux enfants. Nous avons donc dû faire de ce cas une priorité afin que la famille voyage avant l’expiration du Parole de la victime. Elle avait elle-même fait les demandes de passeport de ses enfants, nous n’avions donc plus qu’à les faire venir à Mexico

et organiser la demande de visa et le voyage.

En somme, ce travail d’assistance est demeuré très logistique : organiser les voyages, réserver les hôtels, faire les demandes d’argent à l’OIM pour couvrir les besoins de la

famille… mais en fin de compte j’ai beaucoup aimé cette activité. La première fois que j’ai

rencontré une des victimes et son fils, le projet s’est soudain concrétisé et j’ai réalisé que

j’allais pouvoir contribuer à l’amélioration de la vie des personnes que j’avais en face de

moi. Le côté humain était très fort dans chacun des cas : je connaissais l’histoire de la

victime et sa famille, j’étais en contact régulier avec eux pendant des semaines, voire des mois pour les cas les plus compliqués, puis je passais quelques jours avec eux avant le grand départ. La plupart des victimes étaient à peine plus vieilles que moi, voire même plus jeunes. Je me suis attachée à ces personnes, surtout quand il y avait de jeunes enfants qui bien souvent détendaient l’atmosphère et rendaient les choses plus faciles.

Page 32: Rapport de stage OIM

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L’ambiance était cependant toujours un peu spéciale car les familles des victimes ne savant pas en général ce qui est arrivé à leur époux/enfant/frère ou sœur. Par conséquent,

lorsqu’une mère de famille dont le mari avait été trafiqué et exploité aux Etats-Unis m’a

demandé pourquoi l’OIM aidait sa famille, je n’ai pu que lui répondre vaguement que son

mari avait demandé à faire partie du programme de réunification familiale que nous menions. J’ai bien senti qu’elle savait que je ne lui disais pas tout et je me suis sentie gênée. Mais

j’étais obligée de respecter la requête de son mari et son droit à ne pas dévoiler son histoire. Si elle était amenée à savoir la vérité, c’est de toute façon mieux qu’il en parle lui-même à son épouse plutôt qu’elle l’apprenne par un tiers.

Au final, je suis déçue que l’OIM Mexico ne procure pas de réel suivi de ces cas. J’aimerais savoir ce qu’ils deviennent, si la décision de vivre aux Etats-Unis était la bonne. En effet, arrivant sans éducation, parfois sans qualifications, je me demande comment les personnes que j’ai aidées à voyager s’en sortent. Ont-elles trouvé du travail ? Sont-elles intégrées dans la communauté où elles vivent ? Est-ce qu’elles n’auraient pas été plus

heureuses en restant chez elles dans leur village d’origine ? Bien sûr parfois, pour des raisons de sécurité, il est impossible que la victime et sa famille restent au Mexique – risques de représailles, de re-victimisation… Et en théorie il y a des ONG qui aident les victimes de traite, ou les migrants en général, à s’intégrer aux Etats-Unis. Mais dans les faits, font-elles bien ce travail ? Les familles sont-elles aidées ou lâchées dans la nature, livrées à elles-mêmes pour se reconstruire une vie ? Toutes ces questions sont restées sans réponse. J’aurais

beaucoup aimé pouvoir accéder à un suivi, une sorte d’évaluation de l’impact du programme pour savoir si oui, effectivement, le déménagement au Etats-Unis était la meilleure solution pour ces familles.

Par ailleurs, dans un cas que j’ai traité, par manque de fonds nous n’avons pu faire

partir qu’un membre de la famille. Il s’agissait d’une jeune fille qui allait rejoindre sa sœur

aînée, la victime. La mère et les deux jeunes frère et sœur sont eux restés au Mexique, dans

l’attente de l’obtention de nouveaux fonds. Bien que dans ce cas la famille ait choisi elle-même quel membre allait rejoindre la victime en premier, ce fut un moment très déchirant. N’ayant le droit de rentrer au Mexique durant plusieurs années, la jeune fille, au moment de

partir, ne savait pas quand elle allait revoir sa mère. Ce cas-ci fut le premier que j’ai eu à coordonner, d’autant plus complètement seule.

J’ai eu donc un peu de mal à gérer la situation et parler avec la famille au moment du départ. Dans ce cas, ne fait-on pas empirer la situation en déchirant à nouveau la famille ? Ou cela vaut-il la peine puisque la victime pourra, elle, retrouver un proche ? Chaque famille le vit différemment et c’est donc très difficile de savoir ce qui est mieux pour chacun. Deux mois avant la fin de mon stage, de nouveaux fonds ont été alloués aux Cas de Washington et nous avons pu rouvrir ce dossier afin de faire voyager les trois membres de la famille restant. Les Cas de Washington ont ainsi constitué la majeure partie de mon travail. Cette activité m’a beaucoup plue, malgré les difficultés et les obstacles rencontrés. En tout, j’ai pu

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assister six familles jusqu’au bout du processus, ce qui représente 13 personnes, dont neuf enfants ; ainsi que trois victimes – rentrées au Mexique pour diverses raisons. Cf annexe 10 pour les statistiques des Cas de Washington. J’ai également travaillé sur cinq autres cas, que je n’ai pas eu le temps de mener à terme avant la fin de mon stage. Cf annexe 11 pour un résumé de quelques cas traités.

En parallèle, j’ai également participé à de nombreux événements auxquels l’OIM avait

été invitée. Représentation de l’OIM lors d’événements

En tant que membre de l’UNCT, l’OIM est souvent invitée à des réunions inter-

agences des NU, ainsi qu’à des événements nationaux et locaux du gouvernement mexicain et de la société civile. Très souvent, le CdM ou la Coordinatrice de l’Unité m’envoyaient à

leur place aux événements afin de représenter l’OIM et leur faire un compte-rendu de ce qui s’était dit.

J’ai ainsi assisté à diverses présentations d’ouvrages et rapports qui ont élargi mon champ de connaissances sur des thèmes variés comme les enfants migrants détenus à la frontière sud, la construction de statistiques migratoires, l’implication des hommes dans la

lutte contre la traite, le droit international des droits de l’homme, ou encore le lien entre genre

et migration. La plupart du temps les exposants étaient des références dans le domaine en question

et les discours et débats étaient plutôt intéressants. Mais c’est arrivé quelques fois que les

exposants présentent des faits erronés, voire faux. Plusieurs fois j’ai été choquée par les généralisations et amalgames faits par certains exposants, notamment au vu de mes connaissances et de ma nouvelle expérience de terrain en matière de migration/traite/genre.

J’ai également participé à diverses réunions de l’ONU et ai pu approcher de l’intérieur

le fonctionnement de l’organisation. J’ai entre autres pu assister à la phase finale de rédaction

du Plan Cadre de l’Aide au Développement des Nations Unies (United Nations Development Assistance Framework – UNDAF) pour le Mexique ainsi qu’au Diagnostic Pays qui en servait de base. A la demande du CdM, j’ai contribué à réviser et commenter le

diagnostic pays afin d’y intégrer davantage la thématique migratoire. Suite à la réunion inter-agences sur l’UNDAF a eu lieu une réunion avec des

représentants de la société civile, afin de récolter leurs attentes et mieux cerner leurs besoins. Seulement, cette consultation a eu lieu après la rédaction finale de l’UNDAF et ne

permettait donc pas d’intégrer au document final les points soulevés ce jour-là. Cela illustrait très bien le côté hypocrite du travail de l’ONU, et la volonté de promouvoir une image, de jouer sur la communication, de se dire ouvert et démocratique, sans faire complètement suivre les actions.

J’ai tout de même pu assister à une table ronde très instructive organisée par la

Commission Economique pour l’Amérique Latine (CEPAL) sur le thème de l’économie

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mexicaine. Cet événement m’a changé des thèmes que je traitais habituellement. Les

interventions des panelistes étaient de haut niveau et les interactions avec l’audience – des représentants des agences de l’ONU – très intéressantes.

Ce qui a semblé étrange, c’est que les CdM eux-mêmes avaient été invités à cet événement, et que comme d’habitude le CdM de l’OIM envoyait un stagiaire pour le

représenter. Sauf que cette fois-ci, face à un public réduit composé quasi exclusivement des chefs d’agences ou de leurs seconds, je ne me sentais pas très à l’aise. J’ai aussi trouvé que

c’était un témoignage de manque d’intérêt, voire de manque de respect, que le CdM de l’OIM, une fois de plus ne vienne pas en personne aux événements auxquels il est invité. Ce

thème a déjà été débattu de nombreuses fois en interne, les collègues tentant de faire comprendre au CdM que ça n’a pas le même impact que ça soit un de ses subordonnés qui

aille sans cesse aux réunions et non lui en personne. De plus, j’ai pu assister à l’inauguration d’une nouvelle auberge pour migrants

vulnérables à Mexico. L’OIM avait été invitée en tant que donateur principal, ayant permis le réaménagement des salles de bain et équipé la cuisine.

Après une visite de l’auberge menée par les bonnes sœurs qui la tiennent, le CdM ainsi

que d’autres invités tels que le Représentant du HCR, des Ministres, ou encore des Consuls,

ont dit quelques mots sur le thème migratoire, leur travail, ce qu’ils attendaient de la nouvelle

auberge. Réservée aux femmes, l’auberge accueillait alors déjà des migrantes venant d’Amérique centrale, de Russie ou encore d’Afrique – de quatre à 80 ans.

Les migrantes avaient préparé des chants et certaines ont raconté leur histoire. Après un moment émouvant et quelques larmes, elles nous ont invités à venir déguster des plats traditionnels de chacun de leurs pays. J’ai beaucoup apprécié cet événement car pour une

fois ce n’était pas juste une table ronde avec de grandes paroles sur quoi faire et comment le

faire. Il s’agissait d’aller sur le terrain et voir la réalité de la migration, de parler avec les migrantes et avec celles qui les aident.

Le dernier type d’événement auquel j’ai pu assister fut le lancement d’une

radionovela sur le thème de la traite, intitulée « El silencio duele ». Le bureau régional de l’OIM au Costa Rica avait recueilli des témoignages de victimes de traite, de sexes, âges, et origines différentes, ayant subi diverses formes d’exploitation. En partenariat avec le centre de communication Voces Nuestras, le but du projet est de diffuser au maximum ces témoignages, réécrits et scénarisés pour en faciliter la diffusion à la radio, afin de faire connaitre le phénomène de la traite.

Dans le but de favoriser la diffusion de la radionovela au Mexique, l’OIM Mexico

s’est associée à l’Association Mondiale des Radiodiffuseurs Communautaires (AMARC). Le réseau étant bien implanté dans les communautés mexicaines les plus pauvres, où les personnes sont les plus vulnérables à la traite, l’espoir est grand que la sensibilisation puisse

toucher un certain nombre de populations vulnérables et de potentielles victimes. Le lancement de la radionovela a réuni des représentants de l’OIM Mexico, de

l’AMARC, de Voces Nuestras, de la Commission contre la Traite du Sénat de la République, ainsi que de l’Observatoire Contre la Traite des Personnes pour des Fins

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d’Exploitation Sexuelle du District Fédéral. Le public, peu nombreux, était une audience avertie et déjà engagée auprès de cette cause, qui a su rendre la discussion post-lancement intéressante et dynamique.

Enfin, aboutissement en quelque sorte de mon travail de représentante de l’OIM, j’ai

pu moi-même délivrer une présentation durant un événement auquel l’OIM avait été invitée,

dans la ville de Puebla. Dans le cadre d’une exposition photographique à propos des migrants qui

traversent le Mexique sur les trains de marchandise pour arriver aux Etats-Unis, le Musée du Chemin de Fer de Puebla avait organisé une table ronde sur le thème de « Migrations et Droits de l’Homme ». Avaient été invités à comme panelistes la Responsable du Programmes de Thématiques Migratoires de l’Institut des Droits de l’Homme Ignacio

Ellacuría de l’université Ibero, un prêtre qui travaille dans les auberges et refuges pour

migrants, et Denisse, la Coordinatrice de l’Unité de Traite de l’OIM. Mes collègues Denisse

et Eva étant toutes les deux déjà engagées auprès d’autres collaborateurs pour un atelier de

formation à Durango, Denisse m’a proposé de donner la présentation en son nom. Le thème étant libre, Eva et moi avons décidé que je présenterais le thème de « Genre

et Migration : Vulnérabilités des Femmes Migrantes ». J’ai moi-même préparé la présentation, tout en espérant que je ne recouperais pas ce que les autres panelistes avaient prévus d’exposer. En effet, l’organisatrice de la table ronde n’avait donné aucune indication sur le contenu attendu de chaque présentation et j’y suis donc allée à l’aveuglette. Par

ailleurs, bien que j’aie réalisé cet exercice des centaines de fois au cours de ma scolarité ainsi

qu’à une conférence internationale durant mon stage de troisième année en Australie, je redoutais de devoir parler pendant 20 minutes en Espagnol – langue que j’ai réellement

apprise à parler en arrivant au Mexique seulement. Le jour J, tout s’est bien passé. Nos trois présentations se sont finalement très bien

complétées : la représentante de l’Institut des Droits de l’Homme a présenté le contexte

général de la migration au Mexique, le prêtre a partagé son expérience concernant le travail avec les migrants, et j’ai terminé sur l’intégration de la perspective de genre dans la migration et notamment le thème de la traite des personnes, auquel les femmes migrantes sont les plus vulnérables.

J’ai eu de bons retours de ma présentation, y compris sur mon niveau de langue, et l’organisatrice de la table ronde m’a fait savoir qu’elle souhaitait pérenniser ce début de collaboration avec l’OIM afin de nous faire intervenir lors de prochains événements.

Page 36: Rapport de stage OIM

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Mis à part ces trois domaines d’activités principaux, j’ai ponctuellement participé à

des tâches différentes. En voici quelques-unes. Autres activités ponctuelles

En marge des activités principales qui m’étaient assignées, divers événements ou

activités ont ponctué mon stage. Tous les trimestres, l’Unité de Traite doit rendre un rapport au gouvernement des

Etats-Unis pour rendre compte de l’évolution du projet J/TIP sur la traite. J’y ai contribué

en aidant mes collègues à écrire en Anglais voire en traduisant depuis l’Espagnol, en relisant

le document final, en complétant l’information sur les différents ateliers et en combinant les annexes.

J’ai également appuyé la compilation des annexes pour les rapports semestriels du projet régional, notamment en écrivant des « bulletins » sur les événements menés dans ce cadre.

Par ailleurs, j’ai proposé à l’OIM un projet un peu différent de ce qu’il se fait

habituellement, plutôt de l’ordre du sponsoring. Un ami cinéaste italien vivant à Mexico, Giorgio, vient d’écrire un court-métrage, Ruta Sagrada (La Route Sacrée), retraçant l’histoire

de migrants durant leur voyage pour les Etats-Unis. Basé sur des entretiens et des histoires vraies, son scénario venait d’être achevé au moment où je l’ai connu et il était donc à la

recherche d’appuis pour réaliser le film. Déjà gagnant de nombreux prix à différents festivals pour ses courts-métrages précédents, le scénariste-réalisateur-producteur avait déjà une bonne expérience et un dossier solide. J’ai donc parlé de lui à Denisse, qui a accepté de le rencontrer afin de voir si l’OIM

pouvait soutenir son court-métrage de quelque façon. Avertie du manque de financements dont souffre l’OIM, j’avais prévenu Giorgio que

le soutien que nous pourrions éventuellement lui procurer ne serait certainement pas financier, mais que cela se limiterait à un « sponsoring emblématique », un appui de l’OIM à son film.

L’OIM étant l’organisation phare en matière de migrations, un appui officiel à son court-métrage pourrait lui conférer un poids et une crédibilité supplémentaires, et attirer des financeurs. En contrepartie du soutien de l’OIM au film, Giorgio s’est engagé à mentionner l’OIM dans les crédits du film, inclure le nom et le logo de l’organisation dans tout type de

document ou communiqué lié au film, ainsi que mentionner l’OIM comme sponsor du film

dans chaque interview accordée à la presse. Comme pour son film précédent, son objectif était de parvenir à faire une tournée

mondiale des festivals de cinéma et remporter des prix, augmentant d’autant plus la visibilité

de l’OIM. En somme, le compromis était de le soutenir pour lui amener des financements en échange d’une communication organisationnelle gratuite.

Denisse a aimé l’idée et s’est engagée à porter le projet. Cependant, les règles de

fonctionnement de l’OIM imposent qu’une telle initiative soit d’abord validée par le siège

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régional, dans notre cas au Costa Rica, qui la fera ensuite valider par le siège à Genève. A ce jour, nous n’avons eu aucun retour de la part du bureau de San José au Costa Rica. Au vu de

la lourdeur des procédures, le projet prendra sans doute plusieurs mois à se concrétiser et c’est une déception de n’avoir pas pu le voir se réaliser avant la fin de mon stage.

Enfin, fin juillet 2013, nous avons reçu la visite du Directeur Régional de l’OIM

pour la zone Mexique, Amérique centrale et Caraïbes. Ce fut l’occasion d’une discussion

générale sur le rôle des bureaux régionaux, qui depuis deux ans ont perdu leur compétence de développement et gestion de projet, afin de devenir entièrement des entités de soutien administratif et logistique aux bureaux de pays. Les diverses unités ont également présenté leurs projets respectifs, et j’ai eu l’opportunité de parler des Cas de Washington.

iii. Bilan du stage En définitive, ce stage m’a permis de développer de nouvelles compétences,

linguistiques, administratives et logistiques, tout en renforçant celles que j’avais déjà, notamment en termes de relationnel et de communication.

Bien que parfois lourd et pesant, mon travail m’a permis de bien comprendre le

fonctionnement interne et administratif de l’OIM, et en partie du système des NU. Le terme « bureaucratique » a ainsi pris tout son sens lors de ces six mois d’immersion en OI.

Mais mes missions m’ont également permises d’appréhender les défis en matière de communication et coopération entre parties prenantes : gouvernement, société civile, agences de l’ONU, Eglise, migrants… De par sa nature propre, chaque acteur a une vision

particulière des thématiques migratoires et une façon unique de les aborder. La collaboration est essentielle, mais peu évidente à obtenir de manière très efficace. Les dédoublements d’efforts restent également importants, dus à la compétitivité qui règne toujours entres les différents acteurs, voire au sein même d’un groupe d’acteurs (e.g. entre les agences des NU).

A un autre niveau, je me suis non seulement familiarisé avec les procédures des NU mais également avec les procédures migratoires des Etats mexicain et américain. Perdue au début, j’ai été le témoin de ma progressive compréhension et maitrise des questions

migratoires entre les deux Etats. En fin de compte, ce stage m’a permis d’acquérir un regard critique sur le

fonctionnement de l’OIM et des NU, tout en me fournissant des clés essentielles pour travailler dans le domaine de la coopération internationale et, pas à pas, contribuer à faire évoluer le système et son fonctionnement.

A présent, je vais tenter d’élargir le champ d’analyse du travail de l’OIM au Mexique

à partir de ce que j’ai pu observer durant mon stage et des recherches réalisées pour compléter

ces constats empiriques.

Page 38: Rapport de stage OIM

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II. L’OIM : un organisme phare défié par le contexte migratoire mexicain et les évolutions du système international

L’OIM est l’organisation phare dans le domaine des migrations à l’échelle

internationale. Ancrée sur la scène internationale depuis plusieurs décennies, l’OIM jouit

d’une présence globale d’où découlent une expertise unique, des capacités d’actions ainsi

que des ressources humaines et financières importantes. Le nombre de pays membres ne cesse d’augmenter, porté à 151 avec les récentes adhésions du Malawi et du Suriname. Le nombre de projets et l’impact de l’OIM semblent donc croitre avec le temps et la

reconnaissance grandissante accordée à l’organisation. La diversité des projets portés par

l’OIM souligne par ailleurs la multiplicité des dimensions du phénomène migratoire. Toutefois, les évolutions du système international dans les années 1990 ont eu un impact sur l’OIM en ce qu’elles ont amené à une harmonisation des modes de fonctionnement des organisations présentes sur la scène internationale. L’OIM a donc été confrontée à un changement de son mode d’administration, notamment avec l’introduction du

financement sur projets, ou projectisation28 en Anglais. Par ailleurs, les conséquences de la crise financière internationale se font aujourd’hui également ressentir au sein de l’organisation, et notamment au Mexique, avec la réduction des fonds alloués aux projets.

L’objectif de cette réflexion est d’analyser les principales caractéristiques de

fonctionnement de l’OIM au Mexique, afin de cerner les enjeux et limites de son action ainsi que les défis auxquelles elle est confrontée. Cette analyse sera basée sur des recherches académiques ainsi que sur des observations empiriques réalisées lors de mon stage.

a. Le paradoxe migratoire : un thème très politisé, entrave au travail de l’OIM

Depuis de nombreuses années, le thème migratoire fait polémique autour du monde.

Avec l’arrivée de la crise économique se sont renforcés toutes sortes de stigmas et d’attitudes

de rejet envers les migrants. Le Mexique, en tant que pays majeur de migrations dans le monde, n’a pas échappé au durcissement de sa politique migratoire, au nom de la sécurité nationale. La politisation du phénomène migratoire est donc devenue, depuis plusieurs années, un défi majeur pour le travail de l’OIM, qui, en tant qu’organisation humanitaire, se doit d’agir de manière neutre.

i. Mise en perspective régionale du contexte migratoire mexicain Comme énoncé précédemment (I.b.i), le Mexique est à la fois un pays d’origine, de

transit et de destination pour des centaines de milliers de migrants chaque année, ce qui lui

28 Afin de faciliter la lecture, nous utiliserons à partir de maintenant le terme de projectisation en référence au financement sur projets.

Page 39: Rapport de stage OIM

27

vaut l’appellation de couloir migratoire le plus important au monde. En conséquence, « plus de 10% de la population mexicaine vit aux États-Unis (soit 17% de la population active étatsunienne) où elle représente le premier groupe étranger. Au Mexique, le phénomène est inversé : à peine 1% de la population (1 million de personnes) est né à l’extérieur, dont les trois quarts aux États-Unis (majoritairement d’origine

mexicaine), et un petit quart en Amérique centrale29. » Le Mexique se caractérise par la diversité des flux migratoires qui le traversent. Au

nord, les déplacements vers les Etats-Unis ont fait de la zone frontalière une zone de conflits et de tensions sur les plans locaux et nationaux. En effet, le manque de programmes de protection des autorités mexicaines, combiné aux stratégies américaines de fermeture de la frontière, ont conduit les migrants mexicains à davantage recourir à des stratégies de passage risquées. Ils font de plus en plus appel à des réseaux de polleros (passeurs de migrants de manière irrégulière), voire au crime organisé, et tendent à emprunter des trajectoires de plus en plus dangereuses conduisant à la mort de centaines d’entre eux chaque année.

30 Pour rappel, depuis le début du XXIe siècle, on estime à environ un million le nombre

de Mexicains voyageant chaque année aux Etats-Unis31. Parmi eux, 150 000 traversent la frontière de manière irrégulière32.

Au sud, les flux migratoires entre le Mexique et le Guatemala se font avec une

intensité différente de ceux de la frontière nord et sont davantage hétérogènes. En effet différents types de motivations vont dicter le passage de cette frontière, variant avec le temps et les lieux de passage.

Les principaux flux de la zone sud du Mexique vont en direction du nord, soit du Guatemala vers le Mexique. On distingue entre trois types de flux principaux33 : - Les flux quotidiens ou réguliers de résidents des municipalités frontalières qui vont

du Guatemala au Mexique pour effectuer des activités diverses à caractère commercial, professionnel, scolaire ou familial ;

- Les flux de résidents guatémaltèques qui vont au Mexique dans le but de travailler ou chercher un emploi, notamment dans l’Etat du Chiapas ;

- Les flux de résidents de divers pays d’Amérique centrale ou de pays tiers qui ne font que transiter par le Mexique – via le Guatemala – afin de se rendre aux Etats-Unis. Chaque année, plus de 150 000 migrants arrivent au Mexique de manière irrégulière en franchissant la frontière sud, notamment via le Chiapas, dans l’espoir d’arriver aux Etats-Unis34.

29 Virginie Baby-Collin et Delphine Mercier « Introduction », Revue Hommes et migrations, n°1296, mars-avril 2012. Lien : http://www.hommes-et-migrations.fr/index.php?/numeros/le-mexique/6766-intr [consulté le 15 août 2013]. 30 Manuel Angel Castillo y Jorge Santibanez Romellon, Des observatoires frontaliers de flux migratoires au Mexique, date inconnue. 31 Weiss Thomas Lothar and López Chaltelt Pedro Arturo, Mexico: Public Policies Benefiting Migrants, IOM, 2011. 32 Pew Hispanic Center, ”US Unauthorized Immigration Flows are down Sharply Since Mid-Decade”, 2010. 33 Manuel Angel Castillo y Jorge Santibanez Romellon, Des observatoires… op. cit. 34 Secretaría de Gobernación, Informe del Estado Mexicano sobre Secuestro, Extorsión y otros delitos cometidos contra personas migrantes en tránsito por Territorio Mexicano, 16 de julio de 2010.

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28

On notera également qu’un type de flux va dans l’autre sens, du Mexique vers le Guatemala. Il concerne les résidents ou personnes originaires du Mexique ou des Etats-Unis qui traversent le territoire mexicain pour se rendre en Amérique centrale.

La carte suivante illustre de manière simplifiée les flux migratoires principaux décrits ci-dessus.

Carte : Flux migratoires internationaux en Amérique

A l’échelle continentale, le Mexique représente la troisième destination la plus prisée de l’ensemble des migrants du continent latino-américain et des Caraïbes, selon le graphique 1 ci-dessous. Par ailleurs, il s’agit du quatrième pays à avoir connu la plus forte croissance du nombre d’immigrants entre 2000 et 2010, avec 140% de migrants en plus, derrière l’Equateur (390%), le Chili (181%) et le Costa Rica (158%).

Graphique 1 : Nombre de migrants en Amérique latine et aux Caraïbes : les dix destinations les plus prisées en 2000, 2005 et 2010 (en milliers)35.

35 IOM, World Migration report 2010. The future of migration : Building capacities for change, 2010, pp. 117, 154, 155.

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En outre, comme l’indiquent les graphiques 2 et 3 ci-dessous, le Mexique est le premier pays d’émigration à l’échelle régionale, et le deuxième à l’échelle internationale, derrière la Russie.

Graphique 2 : Les dix premiers pays d’émigration d’Amérique latine et des Caraïbes en 2000 (en milliers)36.

Graphique 3 : Les pays à la population émigrante la plus nombreuse en 2000 (en milliers)37.

Face à l’intensité des flux migratoires, le gouvernement mexicain a fait évoluer sa

législation régissant les migrations afin de mieux canaliser le phénomène. La nouvelle loi migratoire de 2011 a ainsi apporté des changements essentiels au mode de régulation des migrations sur le territoire mexicain.

36 ibid. 37 ibid.

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Page 42: Rapport de stage OIM

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ii. La nouvelle loi migratoire mexicaine de 2011 : un renforcement de la politique sécuritaire sous couvert de dépénalisation de la migration

La loi prévoit la dépénalisation de la migration irrégulière, ceci afin de faciliter le

transit des migrants centraméricains traversant le territoire mexicains dans le but d’aller aux Etats-Unis. Toutefois, dans les faits, le transit par le Mexique n’a en rien été facilité.

Contrairement à ce qui avait été annoncé par le Président de la République Felipe

Calderón en 2011, le « visa de transit » n’a pas été créé38. La seule option restante pour les

migrants transitant par le Mexique reste alors celle du « visa de visiteur non autorisé à réaliser des activités rémunérées », permettant à un étranger de rester sur le territoire mexicain jusqu’à 180 jours. L’objectif officiel de ce visa est de faciliter la mobilité internationale, en permettant aux migrants centraméricains de transiter par le Mexique de manière légale, diminuant ainsi les risques encourus le long de la route migratoire.

Cependant, l’obtention de ce visa exige nombre de documents et de prérequis, tels que la solvabilité économique afin de pouvoir subvenir à ses besoins pendant six mois. Par ailleurs, le processus doit se faire depuis l’ambassade du Mexique dans le pays d’origine du migrant. En fin de compte, le processus de demande de visa s’est compliqué et bureaucratisé. En outre, les organisations de défense des migrants ont vite fait de rappeler que dans la plupart des cas, en raison de la précarité économique et sociale des migrants, ceux-ci sont incapables de remplir les critères exigés pour l’obtention du visa

39.

Selon l’association Sin Fronteras, il est donc nécessaire d’instaurer un « visa de transit », qui serait octroyé de manière automatique à toute personne entrant sur le territoire mexicain de manière irrégulière40. La création de ce visa bénéficierait à tous les étrangers, mais sa création serait pensée en priorité pour les centaines de milliers de migrants centraméricains transitant par le Mexique chaque année.

Malgré le vote de la loi et la dépénalisation de la migration irrégulière, les étrangers

sans papiers continuent d’être envoyés et détenus dans les stations migratoires à travers le pays, en raison notamment du manque de communication auprès des officiels de migration sur le contenu de cette nouvelle loi et de la corruption importante au sein de l’INM

41. Face à ces contradictions et problèmes d’application, la loi a fait l’objet de vives

critiques. Selon Primitivo Rodríguez Oceguera, fondateur de la Coalition pour les droits politiques des Mexicains à l’étranger, au-delà des bonnes intentions présentées afin de mieux encadrer les flux de population en provenance ou à destination des Etats-Unis, ce qui 38 Hanako Taniguchi, “La nueva Ley de Migración pide requisitos "imposibles" a migrantes”, CNN México, 16 de noviembre de 2012. Lien: http://mexico.cnn.com/nacional/2012/11/16/la-nueva-ley-de-migracion-pide-requisitos-imposibles-a-migrantes [consulté le 18 août 2013]. 39 ibid. 40 ibid. 41 ibid.

Page 43: Rapport de stage OIM

31

peut paraitre louable en termes de défense des migrants, « la loi propose une politique répressive qui s’inscrit dans la continuité de la politique états-unienne, mêlant migration et sécurité nationale42 ».

Selon lui, le vote de cette loi illustre l’instrumentalisation politique du Mexique par les Etats-Unis, l’application d’une stratégie sécuritaire nationale sous la houlette du voisin américain, qui lui fait faire le « sale boulot » en matière de politique migratoire. La loi ne permettrait donc pas vraiment d’affronter sérieusement « les enjeux du lien migration/développement, ni de la sécurisation des migrants centraméricains43 », pourtant de plus en plus nombreux à transiter par le cauchemar mexicain dans l’espoir d’atteindre le

rêve américain.

iii. Enjeux et défis de l’action de l’OIM au Mexique

En fin de compte, bien que la dépénalisation de la migration irrégulière ait été votée en 2011, il semble que la pénalisation prévale toujours au Mexique. Conséquence directe de cet état de fait, les migrants continuent d’emprunter des routes de plus en plus dangereuses. Ils sont ainsi davantage exposés aux amputations et autres blessures, aux maladies, aux enlèvements, abus et violations, à la traite des personnes ou encore à la mort. Concrètement, cela signifie plus de travail pour l’OIM, qui vient en aide à ces migrants

vulnérables via des soutiens psychologiques, médicaux, sociaux etc. L’OIM étant une organisation neutre qui promeut les migrations pour le bénéfice de

tous, elle devrait pouvoir, en théorie, parler du sujet et le promouvoir de manière neutre et apolitique. Néanmoins, la forte politisation du thème rend le travail de l’organisation délicat.

La migration est, on l’a vu, un sujet qui fait débat au Mexique, et soulève beaucoup de

réactions conservatrices et xénophobes. Il est par conséquent difficile de parler ouvertement du thème de manière publique. Au quotidien, cela signifie concrètement que le personnel de l’OIM n’est pas autorisé à accorder des entretiens à la presse sur le sujet. Seul le CdM

acceptera, de manière ponctuelle, une interview – qui demeurera générale et n’entrera pas

dans le débat migratoire. Ce contrôle et ces limites imposées en matière de communication s’expliquent par la

nécessité de ne pas faire de vagues, de ne se mettre aucun acteur national à dos en exposant de manière trop réaliste la situation migratoire mexicaine. Afin de pouvoir faire son travail, l’OIM doit soigner ses déclarations publiques afin de ne pas s’attirer les foudres du

gouvernement, ou encore du crime organisé mexicain. Contrairement aux acteurs de la société civile, l’OIM ne peut parler ouvertement de ce qui ne va pas dans une allocution destinée au public. L’analyse réaliste de la situation migratoire ne pourra se faire que dans le cadre de

rapports officiels, commandés par le gouvernement lui-même ou par l’organisation.

42 Primitivo Rodriguez Oceguera, « La nouvelle loi sur la migration au Mexique ou “Le bon, la brute et le

truand” », Revue Hommes et migrations, N°1296, mars-avril 2012. Lien : http://www.hommes-et-migrations.fr/index.php?/numeros/le-mexique/6782-la-nouvelle-loi-sur-la-migration-au-mexique-ou-le-bon-la-brute-et-le-truand [consulté le 18 août 2013]. 43 ibid.

Page 44: Rapport de stage OIM

32

La stratégie de communication et de coopération de l’OIM est ainsi essentielle pour

la pérennité de l’organisation au Mexique. Il s’agit de soigner ses relations avec le gouvernement, afin d’avoir une certaine liberté d’action, mais également avec la société civile, afin de se construire une crédibilité sur le sujet et de former des partenariats plus efficaces pour la protection des migrants.

La difficulté du travail de l’OIM au Mexique est de pouvoir venir en aide aux migrants, sans pointer du doigt les responsables du « cauchemar mexicain » que sont, entre autres, la politique du gouvernement et la corruption des agents de migration44. Ce sont en effet la politique migratoire de fermeture de frontières, associée aux abus et violations des migrants et de leurs droits par les employés des stations migratoires, qui constituent les éléments majeurs du chaos migratoire mexicain45

. En raison de son statut d’organisme

intergouvernemental, l’OIM n’a pas la liberté de parole et d’action qui serait nécessaire pour agir sur ces problèmes.

Ce n’est donc pas un secret que les droits des migrants sont violés en permanence

une fois qu’ils sont entrés sur le territoire mexicain. Les migrants eux-mêmes en sont pour la plupart conscients avant même d’entreprendre l’aventure migratoire. Mais comme l’a dit une

migrante victime de viol sur la route lorsqu’elle est arrivée dans un refuge : « ça fait partie du voyage46 ». L’OIM se voit obligée de taire une partie des informations qu’elle a en sa

possession, afin de pouvoir continuer à soutenir les quelques migrants qui lui sont référés. Il faut ainsi sacrifier la majorité des migrants, en ne faisant pas trop de vagues sur la politique et les violations du gouvernement, pour pouvoir en assister une minorité.

Du fait de la forte politisation du phénomène, le travail de l’OIM est donc devenu

frustrant en ce qu’un contrôle important des déclarations et positionnements officiels est nécessaire. L’organisation doit trouver son équilibre entre ses divers partenaires. Elle va ainsi, d’un côté, accepter silencieusement les invitations de la société civile lors d’événements

de dénonciation des violations des droits de l’homme dans les stations migratoires. Mais de

l’autre, elle va également participer aux consultations du gouvernement sur le sujet afin de

faire du lobbying en faveur d’un changement de politique. Le thème de la traite en particulier se révèle délicat puisque son fonctionnement à une

telle échelle suppose nécessairement la corruption de nombreux fonctionnaires gouvernementaux, à tous les échelons de pouvoir. Il est donc particulièrement essentiel, sur ce sujet, de peser ses mots et de ne jamais mentionner de noms, sous réserve de représailles des réseaux de crime organisé. Pour pouvoir travailler il faut, dans une certaine mesure, rester discret sur le travail accompli.

44 Discussions internes avec les membres de l’OIM. 45 Pablo Ceriani Cernadas (dir.), Présentation du rapport : Enfance migrante : les droits des enfants et adolescents migrant à la frontière Mexique-Guatemala (Niñez Migrante : los derechos de los niños, niñas y adolescentes migrantes en la frontera México-Guatemala), 7 février 2013. 46 Récit des propos d’une migrante centraméricaine violée sur la route, après son arrivée dans un refuge mexicain

où elle a refusé les soins qui lui étaient proposés.

Page 45: Rapport de stage OIM

33

La méfiance du gouvernement vis-à-vis de l’OIM s’est récemment exprimée à

Mexico. Depuis plusieurs mois, une note de presse présentant un projet, rédigée par l’OIM,

attend en effet la validation de la Présidence de la République afin d’être publiée. Le

gouvernement n’hésite donc pas à étouffer des éléments qui lui semblent possiblement

compromettants et pouvant raviver le débat sur la migration. Cette méfiance n’est cependant pas propre au Mexique ni à l’OIM. En effet, c’est au

Nicaragua que le Président de la République a également décidé d’interdire, au dernier moment, la publication du profil migratoire du pays rédigé par le HCR. Ces deux cas illustrent très bien dans quelle mesure les gouvernements sont capables de freiner le travail des OI sur le terrain lorsqu’elles dérangent.

L’OIM étant un organisme intergouvernemental, résultant de la volonté des gouvernements, on peut dès lors se demander jusqu’où peuvent aller les paradoxes et les contradictions dans l’action des Etats membres.

En fin de compte, au Mexique, la migration demeure un thème sensible de par les implications sécuritaires, économique, sociales etc. qui lui sont associées. La politisation du sujet est inévitable. Et pourtant l’OIM continue de se revendiquer neutre. Par conséquent, l’action de l’organisation se retrouve fortement compliquée et il devient de plus en plus délicat de gérer les migrations et défendre les droits des migrants, face à un Etat corrompu qui profite du chaos migratoire mexicain.

Ce paradoxe migratoire influe donc fortement la capacité d’action de l’organisation,

et rend inévitables les tensions entre acteurs. Par conséquent, l’action du Mexique en

matière de migration est tiraillée entre la diplomatie multilatérale, via l’OIM, et la relation unique entretenue avec les Etats-Unis sur le plan bilatéral.

b. Le Mexique tiraillé entre multilatéralisme et bilatéralisme pour la gestion des migrations

Défini simplement, le multilatéralisme est une coopération entre plus de deux

acteurs institutionnels dans le domaine international47. Par opposition, le bilatéralisme est donc une coopération entre uniquement deux acteurs institutionnels dans le domaine international.

La diplomatie multilatérale est au cœur de la formation des OI, permettant de donner

un cadre aux négociations et relations entre les divers acteurs de la scène internationale. Au sein de l’OIM, le multilatéralisme est vu comme un outil permettant de gérer le

phénomène migratoire à l’échelle mondiale de manière ordonnée, garantissant ainsi le respect de la dignité humaine et des droits des migrants, tout en bénéficiant aux sociétés. Au Mexique toutefois, nous avons vu précédemment que la nouvelle loi de migration de

47 Bertrand Badie et Guillaume Devin (dir.), Le Multilatéralisme. Nouvelles formes de l'action internationale, 7 mai 2007, La Découverte.

Page 46: Rapport de stage OIM

34

2011 illustrait l’alignement du Mexique sur la stratégie américaine davantage qu’une

quelconque implication dans la gestion concertée, coordonnée et multilatérale des migrations sur son territoire.

Il semble donc que la politique nationale mexicaine en matière de migration suive une stratégie bilatérale plutôt que des décisions concertées de manière multilatérale au sein de l’OIM notamment. La politique migratoire mexicaine semble aller de plus en plus vers une fermeture des frontières, qui rend plus difficile la mobilité humaine au lieu de la faciliter, contribuant ainsi à menacer la dignité et les droits humains des migrants. Le gouvernement mexicain ne parait pas ancré dans une optique de coopération multilatérale entre Etats sur le plan de la gestion des migrations, et semble au contraire privilégier les relations avec les seuls Etats-Unis. Bien que ceci puisse être concluant sur le plan de la gestion des migrations au nord du pays, cette politique laisse de côté les centaines de milliers de migrants traversant la frontière sud chaque année. Or, afin de gérer les migrations de manière compréhensive et durable, il est essentiel de prendre en compte le phénomène dans sa globalité, considérant les aspects géographiques, économiques, sociaux, environnementaux, etc.

Il apparait ainsi qu’au Mexique les migrations sont davantage gérées via le canal bilatéral que multilatéral, ce qui crée une asymétrie de relations avec les voisins du nord et du sud. L’OIM a donc du mal à imposer l’Agenda International pour la Gestion des

Migrations (AIGM) dans le pays, et son travail s’en trouve d’autant plus compliqué et

concurrencé.

Pourtant la diplomatie multilatérale présente de nombreux avantages pour la gestion de sujets transnationaux tels que les migrations internationales. Même face à la reconfiguration récente du multilatéralisme et ses limites, au vu du contexte actuel, le Mexique semble commettre une erreur en laissant principalement les Etats-Unis influencer sa politique migratoire.

i. Avantages de la diplomatie multilatérale pour la gestion des migrations

« Les agences multilatérales jouissent d’une stature qui leur facilite la tâche et

réduisent les aspérités diplomatiques48. » C’est ainsi que Brian Atwood, ancien Président de

l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), résume les avantages de la diplomatie multilatérale par rapport aux échanges bilatéraux.

Comme lui, de nombreux auteurs s’accordent à penser que le multilatéralisme est un

outil plus efficace que le bilatéralisme, du moins sur certains sujets d’envergure transnationale de par leur nature, tels que les migrations internationales ou la lutte contre le crime organisé49.

48 Brian Atwood, « Aide multilatérale versus aide bilatérale », 9 janvier 2013. Lien : http://ideas4development.org/aide-multilaterale-vs-aide-bilaterale-2/ [consulté le 19 août 2013]. 49 Juan “Jed” E. Dayang, Jr., “When is multilateral diplomacy more rewarding than bilateral diplomacy?”,

Reflective Diplomat, 7 mars 2011. Lien : http://jedayang.wordpress.com/2011/03/07/when-is-multilateral-diplomacy-more-rewarding-than-bilateral-diplomacy/ [consulté le 20 août 2013].

Page 47: Rapport de stage OIM

35

De tous temps, les Etats ont eu recours à des stratégies unilatérales ou bilatérales

pour gérer les migrations. Depuis quelques décennies cependant, les Etats reconnaissent de plus en plus qu’il est nécessaire de favoriser la concertation multilatérale afin de gérer efficacement le phénomène à l’échelle internationale. Il n’est plus possible de se cantonner à

des approches uni ou bilatérales50.

Un des avantages évidents du multilatéralisme est qu’il permet la participation d’une

variété d’acteurs aux négociations en cours, ouvrant ainsi le champ des interprétations et des perspectives d’action. Par ailleurs, un des bénéfices significatifs de la diplomatie multilatérale est le nivellement du terrain parmi des acteurs aux niveaux politiques et économiques hétérogènes51. Le multilatéralisme permet ainsi de limiter la prédominance des motivations personnelles des Etats.

En effet, en raison des déséquilibres existant au sein des relations de pouvoir entre les Etats puissants et ceux plus faibles, ces derniers ont tendance à considérer qu’il leur est

impossible de faire valoir leurs intérêts lors de relations bilatérales. Par conséquent, certaines thématiques sont mieux débattues et adressées dans le cadre de négociations entre plusieurs Etats. Le multilatéralisme permettrait ainsi de remédier aux limites du bilatéralisme, et d’être ainsi plus satisfaisant52.

Forts de cette prise de conscience, les Etats se réunissent plus fréquemment en vue

d’un dialogue informel et non contraignant, et d’un échange d’informations sur les migrations. Ces consultations offrent aux États l’opportunité « d’échanger des expériences et

des bonnes pratiques, de concourir à la bonne compréhension de la dynamique migratoire contemporaine et de recenser les intérêts partagés et complémentaires, ainsi que les perspectives de collaboration en matière migratoire53 ». La multiplication de ces consultations contribue à donner confiance aux Etats en leur capacité à collaborer, entre eux mais aussi avec d’autres acteurs.

Un dernier avantage non-négligeable du multilatéralisme est l’implication d’une

variété d’acteurs dans les négociations. Ces dernières décennies, de nouveaux processus de concertation ont ainsi été élaborés, permettant d’inclure cette nouvelle diversité d’acteurs.

A mi-chemin entre les processus multilatéraux et les négociations bilatérales se sont développés des processus consultatifs régionaux en matière migratoire. Ces processus informels sont généralement constitués de représentants d’Etats dans une région donnée, ou d’États ayant une approche similaire dans une ou plusieurs régions présentant des intérêts migratoires communs, d’OI et parfois d’ONG.

50 OIM, Migrations internationales et développement : Perspectives et expériences de l’Organisation

Internationale pour les Migrations (OIM), avril 2006. Lien : http://www.un.int/iom/IOM%20Perspectives%20and%20Experiences%20French.pdf [consulté le 20 août 20013]. 51 Juan “Jed” E. Dayang, Jr., “When is multilateral…”, op. cit. 52 ibid. 53 OIM, Migrations internationales…, op. cit.

Page 48: Rapport de stage OIM

36

Sur le continent américain, le Processus de Puebla a lancé en 1996, avec la création

de la Conférence Régional sur la Migration (CRM), le dialogue migratoire entre les onze pays membres (Belize, Canada, Costa Rica, El Salvador, Etats-Unis, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, République dominicaine), les Etats observateurs (Argentine, Colombie, Equateur, Jamaïque et Pérou), ainsi que certaines organisations internationales et régionales, y compris l’OIM

54. La CRM est une tribune offrant un cadre propice à l’échange de vues, de bonnes

pratiques et d’informations. Il s’agit également d’un espace d’échange privilégié et régulier entre les membres de la CRM et les ONG présentes sur le continent, qui interagissent d’habitude peu ou pas du tout. La CRM crée ainsi un environnement propice à la coopération bilatérale, et surtout multilatérale. Grâce à ce processus, les États ayant des perspectives migratoires différentes peuvent recenser leurs intérêts communs en matière migratoire et les domaines dans lesquels ils peuvent collaborer.

Concrètement, les Etats membres de la CRM ont créé un fonds destiné au financement des retours volontaires des migrants en situation de vulnérabilité dans la région. Administré par l’OIM, ce fonds peut être sollicité par tout Etat de la région dans lequel réside un migrant désirant rejoindre son pays d’origine. Sous certaines conditions, les OI et ONG peuvent également faire appel à la CRM pour appuyer des retours volontaires55. Ce système régional permet donc de favoriser les discussions et négociations multilatérales sur le continent américain en matière de migration. En tant qu’observateur de

la CRM, l’OIM peut ainsi s’intégrer d’une manière nouvelle dans les négociations

multilatérales régionales. L’organisation a accès aux discussions des Etats membres, ce qui lui

permet d’avoir un point de vue nouveau, différent de celui véhiculé en son sein, qui lui permet à son tour de mieux répondre aux besoins nationaux et régionaux.

Parallèlement, la présence de l’OIM au sein de la CRM et sa gestion du fonds de retour volontaire lui confèrent une place importante au sein du forum régional, garante de la reconnaissance accordée à l’organisation. A son tour, l’OIM peut également émettre des

recommandations et ainsi mettre à profit l’AIGM au niveau régional.

Grace à la CRM, l’OIM gagne donc en légitimité et en crédibilité pour agir sur le terrain des pays membres. Face à la méfiance du gouvernement mexicain à laisser l’OIM agir

librement sur son territoire, il semble que la CRM constitue un relais essentiel permettant de faciliter l’action de l’organisation sur les territoires nationaux des Etats membres.

Par ailleurs, le cas de la CRM illustre bien la reconfiguration du multilatéralisme qui a lieu depuis quelques années, avec l’intrusion des ONG dans les processus de

négociations multilatéraux et notamment au sein des OI.

54 CRM, www.crmsv.org [consulté le 20 août 2013]. 55 OIM Costa Rica, “Procesos regionales”. Lien: http://www.oim.or.cr/espanol/procesosregionales/crm/fondos.shtml [consulté le 20 août 2013].

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ii. Reconfiguration et limites du multilatéralisme au Mexique

Bien que les Etats aient tenté de freiner le mouvement, les ONG sont de plus en plus nombreuses à s’intégrer dans les négociations multilatérales. Soutenu par les OI, ce mouvement est de plus en plus difficile à contenir56.

Ainsi, depuis 20 ans, on note un rapprochement significatif des OI et des acteurs privés, pour plusieurs raisons. Premièrement, ce rapprochement est justifié par la recherche d’efficacité dans l’action des OI, très critiquées pour leur lourdeur bureaucratique. Ensuite, la recherche de fonds motive également ce rapprochement public-privé. L’association avec les

acteurs privés permet de créer de nouveaux instruments financiers pour soutenir les projets des OI.

Enfin, le système international actuel est un système compétitif, dans lequel les OI évoluent constamment. Les partenariats public-privé sont donc une réalité nouvelle et inéluctable de la diplomatie multilatérale57. Ceux-ci permettent au multilatéralisme d’être

davantage inclusif, et de reconnaitre formellement le travail des acteurs non-étatiques. Bien que les Etats demeurent les acteurs principaux de la diplomatie multilatérale, les groupes de la société civile sont désormais reconnus pour leur rôle clé et leur contribution à la recherche de modes de collaboration nouveaux58.

Concernant la thématique migratoire, dans la mesure où le phénomène concerne divers

acteurs en plus des gouvernements, l’expérience et les perspectives des parties prenantes non gouvernementales – dont les migrants, les associations de la diaspora, la société civile et le secteur privé – doivent être entendues et des opportunités concrètes de partenariats doivent être identifiées.

Au Mexique, l’OIM s’est donc associée avec des universités, des ONG de soutien aux migrants, d’anciens migrants, des associations communautaires ou religieuses, ou encore des refuges pour migrants, afin de construire une action cohérente et complète qui réponde aux besoins du terrain. Les Eglises tiennent également un rôle important, en raison de la forte religiosité de la population mexicaine. Il est donc essentiel pour pouvoir travailler sur la migration mexicaine de s’associer avec ces divers acteurs, ayant chacun leurs cercles

d’influence et permettant de gagner en légitimité, et ainsi d’assurer l’effectivité et la

pérennité des projets. A titre d’illustration, l’OIM a su s’associer avec l’AMARC afin de profiter de

l’influence de cette association dans les petites communautés mexicaines, dont sont souvent issues les victimes de la traite, pour lancer une campagne de sensibilisation et prévention du phénomène. Utiliser une association locale et déjà connue comme relais pour la campagne s’annonce beaucoup plus efficace en termes d’impact que si l’OIM avait lancé la campagne

uniquement à son nom.

56 Guillaume Devin, Les transformations contemporaines du multilatéralisme – introduction des sociétés dans la pratique multilatérale, 8 novembre 2011. 57 ibid. 58 Juan “Jed” E. Dayang, Jr., “When is multilateral…”, op. cit.

Page 50: Rapport de stage OIM

38

Néanmoins, ces partenariats connaissent également des limites, dues notamment à la nature et aux modes de fonctionnement différents des acteurs qui les composent.

Les acteurs qui s’allient dans des partenariats pour la gestion des migrations sont à

l’origine des acteurs aux aspirations similaires. Bien que cette association permette d’éviter dans une certaine mesure des dédoublements d’efforts et une duplication des actions, elle est parfois limitée par le manque de communication entre les acteurs. Dans un des Cas de Washington dont je me suis occupée durant mon stage, le manque de communication et d’échange d’information entre l’OIM, l’ONG en charge de la victime, et l’organe

gouvernemental sous la protection duquel elle était placée, a été problématique. Le visa U1 de la victime G. lui avait été refusé une première fois. Suite à cela, le

gouvernement mexicain et l’ONG qui encadrait la victime ont pris en charge la suite des

procédures afin d’organiser le rendez-vous suivant de la victime pour sa demande de visa. Dans le cadre de ce programme, l’OIM est censée accompagner chaque voyageur lors de

toutes les procédures administratives qu’il a à accomplir. Dans ce cas, le gouvernement et

l’ONG n’ont pas informé l’OIM de la date du nouveau rendez-vous pour le visa. Aucun membre de l’OIM ne s’y est donc rendu, et la victime s’est inquiétée de ne voir personne de l’OIM présent pour l’assister.

Dans ce cas, le manque de communication entre les partenaires n’a pas empêché la

victime d’obtenir son visa. Cependant il a provoqué chez elle un fort état de stress, qui est à tout prix à éviter vu les circonstances déjà difficiles dans lesquelles elle réalisait sa demande de visa. Ici le manque de coordination des acteurs a eu des répercussions sur le bien-être de la personne migrante à laquelle ils venaient en aide. Une autre limite aux partenariats est la différence d’implication et de politique de fonctionnement de chaque acteur. Souvent, une OI a des moyens alloués à un projet spécifique et peut ainsi le mener à bout. Les ONG en revanche ont en général des revenus plus limités et sont parfois obligées de mettre fin à un projet si les circonstances ont trop évolué et que les critères ne permettent plus d’accorder les financements au programme en

question. Ainsi, l’ONG mexicaine Sin Fronteras a décidé d’annuler son soutien à une victime de violence familiale portoricaine se trouvant au Mexique, au motif qu’elle était trop

instable et qu’il était devenu trop difficile de l’appuyer suite à l’abandon de ses enfants et ses disparitions répétées. En fin de compte, l’ONG a décidé de renoncer à soutenir la jeune femme au moment où elle avait le plus besoin d’aide. L’OIM souhaitait poursuivre le soutien,

mais ne possédait aucun fonds pouvant être dédiés à une telle action. L’organisation avait

ainsi été consultée par l’ONG afin de partager son expertise et jouer de ses relations afin de faire avancer le cas. Mais une fois Sin Fronteras retiré du projet et les fonds réalloués à un autre cas, l’OIM ne pouvait plus rien faire.

La différence d’implication et de raisonnement des différents types d’acteurs

apparait alors clairement. Les partenariats permettent certes d’étendre l’aide fournie, mais ils

peuvent également la limiter en imposant les contraintes budgétaires des uns aux autres. La

Page 51: Rapport de stage OIM

39

limitation de capacités humaines et financières de l’ONG, notamment par rapport à celle de l’OIM, expliquent que le projet fut abandonné une fois devenu trop compliqué et coûteux à gérer. Dans un cas comme celui-ci, l’impact du partenariat est limité.

En définitive, l’élargissement de la sphère multilatérale à des partenaires nouveaux contribue à la démocratisation de la politique internationale. Cependant, cela crée également des problèmes de coordination et de pouvoir : des rapports de force se créent, et les relations asymétriques prévalent. Par ailleurs, ces partenariats multi-acteurs font descendre l’OI du rang d’organisme inter-gouvernemental, représentant des volontés étatiques, à un simple partenaire parmi d’autres. Les partenariats sont donc finalement des

instruments pour les OI autant qu’ils sont des instruments de dépassement des OI. Ils contribuent à la différenciation du système international aussi bien qu’à l’intégration dans le système.

Toutefois, il convient de noter que l’accroissement des approches multilatérales n’a

pas vu diminuer les recours aux approches bilatérales. Celles-ci permettent en effet parfois de répondre de manière plus efficace aux problèmes migratoires spécifiques entre deux Etats, entre autres grâce aux liens historiques qui existent entre eux, notamment sur les plans de la migration de main-d’œuvre, de la gestion des frontières et du retour des migrants en situation irrégulière59. Dans le cas du Mexique, cette approche demeure controversée.

iii. L’erreur stratégique du Mexique quant à la gestion bilatérale de la question migratoire

Les relations bilatérales semblent être plus efficaces que la diplomatie multilatérale pour gérer certaines thématiques spécifiques entre deux pays. Néanmoins, dans le cas des migrations sur le territoire mexicain, il semble que le choix de la politique bilatérale ne soit pas le plus judicieux.

Comme on l’a vu avec l’analyse de la loi de migration de 2011, il semblerait que le

Mexique ait été instrumentalisé par les Etats-Unis dans la manière d’aborder la gestion

migratoire sur son territoire. Certes il peut paraitre plus efficace de travailler bilatéralement avec le voisin afin de gérer les migrations autour de la frontière. Mais le Mexique n’est pas

frontalier uniquement avec les Etats-Unis. Et l’adoption d’une stratégie principalement bilatérale pour gérer la thématique migratoire n’apparait pas comme optimale pour

appréhender le phénomène dans sa globalité. Il semble donc que le Mexique doive adopter une stratégie davantage compréhensive,

incluant tous les Etats voisins, au sens large, afin de gérer de manière concertée et cohérente les migrations dans la région. Le contexte migratoire mexicain est complexe, on l’a vu. Il est

donc essentiel de l’aborder depuis tous ses aspects, sans se focaliser uniquement sur un type de flux.

59 ibid.

Page 52: Rapport de stage OIM

40

Pourquoi alors le Mexique privilégie-t-il la diplomatie bilatérale face à une thématique multidimensionnelle complexe qui appelle une stratégie multilatérale ?

Il est clair qu’une stratégie multilatérale est plus délicate à élaborer et mettre en

place qu’une stratégie bilatérale. Il y a davantage d’objectifs spécifiques et d’attentes à remplir, davantage de risques de désaccords et d’incompréhensions, davantage de tensions potentielles et d’incompatibilité entre les partenaires. De manière générale, un partenariat multilatéral implique davantage d’interdépendance, et impose donc de faire confiance à plus de personnes et de s’exposer

60. Par conséquent, la diplomatie multilatérale est perçue comme une perte de temps, un exercice frustrant qui fournit peu de résultats concrets.

Le Mexique a donc préféré la « facilité » du bilatéralisme, sa simplicité et la rapidité de mise en place des projets et d’obtention des résultats, ceci aux dépens d’une action

efficace sur le long terme. Par ailleurs, au sein des relations bilatérales entre le Mexique et les Etats-Unis, il est

clair que ces derniers dominent les relations de pouvoir et imposent leurs intérêts facilement. Dans ce cas, il serait judicieux pour le Mexique de s’allier aux pays d’Amérique centrale, de former un petit groupe de négociation multilatérale afin de peser davantage face aux Etats-Unis et de pouvoir aborder la thématique migratoire depuis le pays d’origine des migrants.

Actuellement, la politique du Mexique ne fait que traiter les symptômes du

phénomène migratoire, de manière répressive et irrespectueuse des droits de l’Homme, et fondamentalement inefficace61. « Le droit à la mobilité et les migrations qui l'accompagnent relèvent aujourd'hui d'un enjeu global. Mais […] en cherchant à utiliser les migrations comme une variable d'ajustement national et à court terme, [le Mexique] n'en tire[nt] pas les bénéfices qu'elles peuvent procurer aux sociétés comme aux migrants62. » Au contraire, en facilitant la mobilité, le Mexique verrait ses coûts de migration diminuer, et les flux se réguler par une assistance et une information adéquate63.

En travaillant davantage avec les pays d’Amérique centrale, les migrations pourraient alors être gérées dès les pays d’origine, garantissant ainsi une meilleure information et protection des migrants. Le Mexique devrait donc davantage tirer profit des mécanismes de diplomatie multilatérale existant pour la gestion des migrations, afin de gagner en efficacité sur le long-terme.

Ainsi, le contexte migratoire mexicain et la stratégie du gouvernement pour sa gestion

sont complexes aussi bien qu’inadéquats. Ces états de fait contribuent à compliquer le travail de l’OIM et limiter l’impact des mesures prises et des programmes entrepris.

60 Dragan Klaic, “Is there much difference between bilateral and multilateral cooperation?”, SEAS Dock, date inconnue. Lien : http://www.seas.se/is-there-much-difference-between-bilateral-and-multilateral-cooperation/ [consulté le 20 août 2013]. 61 Bertrand Badie, Guillaume Devin, Rony Brauman, Emmanuel Decaux et Catherine Wihtol De Wenden, Pour un autre regard sur les migrations. Construire une gouvernance mondiale, 2008, Paris, La Découverte. 62 ibid. 63 ibid.

Page 53: Rapport de stage OIM

41

Toutefois, ce ne sont pas les seuls facteurs. En effet, depuis quelques décennies, l’OIM

est touchée par l’épidémie de la projectisation, qui change drastiquement sa manière de fonctionner et son mode de financement, compliquant ainsi le développement et la mise en place de projets. A ce jour, une des conséquences principales de ce changement est le manque d’évaluation des résultats et impacts desdits projets.

c. Faiblesses des projets de l’OIM au Mexique

i. La question des ressources financières dans le cadre de la projectisation

Comme pour toute activité, les ressources financières constituent l’aliment du moteur

de l’action de l’OIM. Le budget de l’OIM est divisé entre les dépenses administratives et les dépenses opérationnelles. La partie administrative est constituée de contributions en espèces des Etats membres, contributions qui varient chaque année selon une échelle d’évaluation adoptée par le Comité exécutif

64. La partie opérationnelle du budget est, elle, couverte par des contributions en espèces, en nature ou sous forme de service des Etats membres, d'autres Etats, d'organisations internationales, gouvernementales ou non gouvernementales, d'autres entités juridiques ou de personnes privées65.

Depuis 1994, l’OIM a adopté la stratégie de la projectisation. Dans ce cadre, chaque

activité correspond à un projet, ce qui permet alors de récolter des fonds auprès des bailleurs pour une activité spécifique. Par conséquent, le budget opérationnel est désormais dédié aux services et activités de soutiens aux opérations sur le terrain. Le secteur d’opérations peut être divisé en sept domaines : mouvements humanitaires, retours, lutte contre la traite, migration économique, coopération technique, santé des migrations et programmes de compensation66.

L’ennui au Mexique est que la part du budget opérationnel est assez réduite. D’une

part, le gouvernement a significativement réduit ses contributions au fil des ans, en raison de sa réticence à financer l’organisation pour les raisons évoquées précédemment et sa

préférence pour le bilatéralisme. D’autre part, le Mexique est considéré dans la classification internationale comme un

pays à revenu moyen. Il n’est donc en aucun cas considéré prioritaire par les donneurs qui

orientent davantage leurs financements sur des pays d’Afrique ou d’Asie67. Par conséquent, le

Mexique a très peu de fonds pour financer ses coûts sur le terrain, ainsi que les salaires des quelques membres du personnel jamais pris en compte dans les budgets des bailleurs, telles

64 OIM, « Chapitre VIII : finances », in Constitution, 1951. 65 ibid. 66 Conseil de l’Europe, Documents. Working Papers. 2003 Ordinary Session (Third Part), Volume V, 23-27 juin 2003. 67 Entretien avec Thomas Weiss, Chef de Mission de l’OIM au Mexique, mai 2013.

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42

que la responsable des ressources humaines ou encore l’assistante d’administration et

finances. Par conséquent, la plupart des employés sont condamnées à une certaine précarité,

avec des salaires dérisoires et des contrats de court-terme renouvelables tous les trois mois. Cette situation touche tous les employés de la mission, que ce soit car ils ne sont pas pris en compte dans les financements de projets et dépendent d’un budget opérationnel limité, ou bien que les bailleurs ne financent tout simplement pas les projets de manière à garantir des situations stables aux managers et assistants de projet sur le long-terme.

Mais le manque de fonds ne concerne pas que les salaires. Il a également des

répercussions sur les projets en eux-mêmes. En effet, lorsque je suis arrivée, seuls trois Cas de Washington étaient ouverts et en cours. On m’a alors expliqué que dû au manque de

financements, il avait fallu choisir entre tous les cas lesquels étaient considérés prioritaires. Cette sélection, qui revenait à décider quelles victimes de traite l’OIM allait

assister, amène certaines questions. Entre autres, quels critères sont utilisés pour choisir les cas prioritaires ? Les cas qui étaient en cours à mon arrivée avaient été considérés prioritaires chacun pour une raison différente. Le premier cas était prioritaire pour des raisons de sécurité, car la victime était revenue au Mexique et était menacé par son trafiquant. Le deuxième cas avait été choisi parce qu’un membre de la famille de la victime avait tenté de

mener les procédures seul et avait compliqué sa situation, ce qui compromettait l’obtention

de son visa. Enfin, le troisième cas était une priorité car le délai pour que la famille puisse prétendre à la résidence permanente en arrivant aux Etats-Unis était déjà presque écoulé.

En attendant, plusieurs autres cas qui avaient été commencés ont été laissés en suspens et les familles mises en attente, sans aucune idée de quand leurs dossiers pourraient être de nouveau ouverts et leur réunification familiale effective.

En l’occurrence, en mai 2013, de nouveaux fonds ont été alloués au programme.

Plusieurs cas ont ainsi pu être réouverts, et de nouveaux cas nous ont été communiqués. Néanmoins, dû à l’arrêt temporaire des fonds, la tâche a été compliquée. En effet, pour la

plupart des cas suspendus, il a fallu tout reprendre depuis le début car certains documents avaient expirés. Nous avons ainsi dû reprendre contact avec les familles, laissées des mois sans nouvelles du programme, et les aider à refaire les démarches nécessaires à l’obtention

des documents requis. Ces démarches signifiaient également de nouvelles dépenses, pour les documents et

les coûts associées des familles. En définitive, la suspension de certains cas pour manque de fonds a paradoxalement, lors de leur réouverture, causé des dépenses supplémentaires. De plus, comme les fonds étaient importants pour cette nouvelle période du programme, le bailleur nous incitait à dépenser beaucoup plus pour chaque cas.

Lorsqu’il s’agit de pouvoir davantage rembourser les dépenses associées des familles

c’est tant mieux. Cependant dans ce cas on nous demandait par exemple de donner USD 40 par personne par jour pour les repas, contre USD 10 pendant la période précédente. Au final toutefois, il s’agissait d’argent liquide donné à la famille et qu’elle pouvait dépenser comme

elle le souhaitait. Mais au lieu de les héberger dans une auberge de jeunesse cosy et sure, on

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43

devait leur réserver des hôtels quatre étoiles. Or il semble que le choix de l’hôtel ne leur

importait pas énormément, et il semblait donc ridicule d’héberger ses familles, venant de milieux pauvres, dans des hôtels si luxueux dont elles profitaient à peine vu leur état de stress à la veille du voyage qui allait changer leur vie.

Une telle augmentation de ces socles de dépense parait alors irraisonnée, notamment si on repense au fait que quelques mois plus tôt les fonds manquaient et nous avaient obligés à suspendre certains cas.

Cette pratique est une conséquence directe de la projectisation. En effet, les fonds alloués par les bailleurs étant dédiés à une activité spécifique, si l’argent n’est pas utilisé dans

sa totalité il ne peut être reporté sur un autre programme. Par conséquent, s’il n’est pas

dépensé, l’argent est perdu. Et ainsi l’année suivante le bailleur accordera des financements inférieurs pour le projet afin d’éviter de perdre des fonds. Il faut donc gaspiller un peu d’argent sur chaque cas, afin de coller parfaitement au budget accordé par le bailleur, et de

s’assurer un minimum de financements l’année suivante. Ce constat fut le même dans le cadre du projet de formation J/TIP sur la traite.

Puisque durant l’année l’équipe était parvenue à économiser et rationnaliser les dépenses pour chaque atelier, une fois les derniers mois de formation entamés le bailleur a exigé que l’argent économisé soit dépensé dans sa totalité avant la clôture du projet.

Or selon l’accord cet argent ne pouvait servir qu’à payer les pauses café et la nourriture des participants aux ateliers, en aucun cas les salaires. Par conséquent, l’équipe

s’est vue obligée d’acheter des montagnes de nourriture pour chaque atelier. La majeure partie de cette nourriture est encore stockée dans les locaux de l’OIM puisqu’elle n’a pas été

entièrement consommée durant les formations. Et une partie de ces réserves est déjà périmée. Dans un cas comme celui-ci, il parait réellement irraisonné d’acheter de la nourriture

qui va objectivement se perdre, uniquement afin de complaire aux exigences du bailleur. En outre, il nous était impossible de faire don de la nourriture à des refuges pour migrants ou autres, puisqu’elle était censée être destinée au projet J/TIP. En définitive, l’adoption de la pratique de la projectisation par l’OIM au Mexique ne

donne pas les meilleurs résultats. En raison du contexte mexicain notamment, celle-ci a des effets négatifs sur les salaires et statuts des employés de l’organisation. Par ailleurs, le développement de projets est soumis aux exigences des bailleurs, qui cherchent à atteindre des résultats précis sans tenir compte des réalités locales du terrain. Au final, l’OIM est obligée de développer de nouveaux projets à cause de ce focus sur la projectisation68

. L’organisation a donc tendance à créer des projets répondant aux exigences des bailleurs, au lieu de développer un cadre et des critères plus systématiques qui

68 Sida, Study of the International Organization for Migration and its Humanitarian Assistance, 2008. Lien : http://www.sida.se/Publications/Import/pdf/sv/200840-Study-of-the-International-Organization-for-Migration-and-its-Humanitarian-Assistance.pdf [consulté le 21 août 2013].

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permettent de déterminer quand et comment allouer des ressources définies à des programmes ou des pays précis69.

Par ailleurs, la hausse des exigences des bailleurs et le mode d’allocation des fonds

liés à la projectisation ont provoqué une lourdeur administrative croissante au sein de l’OIM, aussi bien que dans ses relations avec ses parties prenantes. Cette lourdeur

administrative, conséquence de la projectisation, va alors à son tour compliquer le développement et la mise en place des projets.

Une des conséquences de la difficulté croissante à faire financer des projets est alors le

relayage au second plan des phases d’évaluation qui devraient avoir lieu avant, durant et à la fin des projets. Seuls quelques projets sont effectivement évalués sur les résultats accomplis et les impacts à long-terme, mais la plupart ne le sont pas. Ceci constitue une réelle carence dans la méthode de gestion de projets au sein de l’OIM.

ii. L’évaluation de projets : un élément clé mais manquant Souvent négligée, l’étape de l’évaluation d’un projet est pourtant essentielle afin de

déterminer si le projet a atteint les objectifs définis et dans quelle mesure il impacte les bénéficiaires. L’évaluation est également une manière de faire preuve de transparence sur le déroulement du projet et de mesurer la performance de l’aide

70. L’évaluation permet de déterminer si les objectifs du projet ont été remplis, et si

globalement le projet a porté ses fruits. L’évaluation se conduit en plusieurs phases : il y d’abord l’évaluation ex-ante, qui permet de d’analyser le contexte avant la mise en place du projet. Au cours du projet, plusieurs évaluations peuvent ensuite être menées pour mesurer la progression des activités, notamment à mi-projet. Une fois le projet achevé une évaluation finale est alors conduite afin d’évaluer les résultats des activités sur la population bénéficiaire. Enfin, une évaluation ex-post est souvent recommandée quelques mois ou années plus tard afin de mesurer l’impact du projet sur le long-terme dans la région71.

L’évaluation apparaît alors comme un élément phare de la conception et mise en place d’un projet, puisqu’elle permet de se rendre compte de l’efficacité du projet. En cas de réplication, l’évaluation constitue un outil essentiel afin d’adapter les activités, améliorer les résultats et augmenter les impacts bénéfiques sur le long-terme. C’est grâce à une

évaluation rigoureuse que les erreurs commises durant la mise en place du projet pourront être évitées dans le cadre du projet suivant.

Malgré l’importance de l’évaluation, celle-ci n’est pas une étape systématique dans

les projets de l’OIM. En raison de la projectisation les bailleurs recherchent des résultats de

69 Norad, Evaluation of the International Organization for Migration and its Efforts to Combat Human Trafficking, 2010. Lien : http://www.norad.no/en/tools-and-publications/publications/publication?key=259795 [consulté le 21 août 2013]. 70Anne-Cécile Mailfert et Mélanie Sueur, Conception de projets, septembre-décembre 2012. 71 ibid.

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court-terme, afin de justifier le financement des projets. Ils sont dès lors très peu à exiger une évaluation poussée et sur le long-terme des projets mis en place.

C’est notamment le cas du Programme de Retour, Réintégration et Réunification Familiale des Victimes de Traite des Personnes aux Etats-Unis. Financé par le Département d’Etat américain (U.S. Department of State)72 et reconduit chaque année depuis 2005, le programme n’a jusqu’ici été soumis à aucune évaluation. En huit ans, les seuls éléments utilisés pour évaluer l’efficacité du projet sont les statistiques concernant le nombre de victimes et de familles assistées et le nombre de cas fermés. Ceci soulève certaines questions.

En n’évaluant pas l’impact à long-terme du programme sur les victimes et leurs

familles, comment savoir s’il leur a effectivement permis d’avoir une vie meilleure et a

donc rempli ses objectifs ? Certes, le programme ne prend en charge que des victimes exprimant le souhait soit

de retourner vivre au Mexique, soit de faire venir leur famille pour recommencer une vie aux Etats-Unis. Si on se concentre sur l’aspect réunification familiale aux Etats-Unis, en théorie, on pourrait penser que c’est donc la meilleure chose à faire et que le programme bénéficie à

toutes les personnes assistées. Néanmoins on peut se demander si la vie que recommencent les victimes dans le pays voisin représente vraiment une amélioration.

En effet, au départ, très peu de familles savent ce qui les attend réellement aux Etats-Unis. Le rêve américain existe encore, et la possibilité d’aller vivre aux Etats-Unis de manière légale en tente plus d’un. Cependant les familles concernées sont, comme on l’a dit,

la plupart issues de milieux précaires. Les adultes sont en grande majorité analphabètes, ou ont fait très peu d’études. Ils représentent donc de la main d’œuvre peu qualifiée, qui de plus ne parle pas Anglais. Trouver du travail s’annonce alors une tâche difficile lors de leur arrivée.

C’est d’ailleurs pour cela qu’un des cas pour lesquels notre assistance avait été requise a finalement été fermé. Un père de famille, trafiqué aux Etats-Unis, a demandé à être assisté par l’OIM pour faire venir sa famille. Mais lorsqu’au bout de deux mois il n’avait toujours pas trouvé de travail, il a décidé de revenir vivre au Mexique et nous avons donc fermé le dossier.

Les mineurs eux ont en général été scolarisés de manière régulière et ont même parfois quelques notions d’Anglais. Il s’agit toutefois pour eux de sortir du système scolaire mexicain et d’essayer de rependre où ils en étaient dans une nouvelle école, dans une langue étrangère, au sein d’un environnement inconnu.

En théorie, il existe des ONG qui viennent en aide aux victimes et aident les familles

à s’installer et s’intégrer. Il y a des programmes qui fournissent une aide financière aux familles les premiers mois qui suivent leur arrivé, leurs donnent des cours d’Anglais, et les 72 DOJ, DOH, DOS, DOL, DHL and USAID, Assessment of U.S. Government Efforts to Combat Trafficking in Persons, Septembre 2006. Lien : http://www.justice.gov/archive/ag/annualreports/tr2006/assessment_of_efforts_to_combat_tip.pdf [consulté le 22 août 2013].

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aident à trouver du travail. En pratique toutefois, il semble que ces programmes soient limités et que les ONG ne fournissent pas systématiquement l’aide promise

73. Par conséquent, une fois arrivées, les familles sont souvent livrées à elles-mêmes. En

général, la victime a déjà des repères puisque le temps de mener à bien le processus de réunification elle a vécu plusieurs années aux Etats-Unis. Elle demeure d’ailleurs assistée par un(e) avocat(e) ou un(e) travailleur/se social(e). Mais en fin de compte, il semble que l’intégration des familles mexicaines soient compliquée.

Bien sûr, dans certains cas, la décision de partir vivre aux Etats-Unis en va de la sécurité de la victime et sa famille. Les risques de représailles et de revictimisation sont tels qu’il est meilleur pour eux de déménager pour vivre en sécurité.

Néanmoins, le changement de vie et le départ pour les Etats-Unis n’est pas toujours gage de protection. G. est une jeune femme qui avait été piégée par un homme avec qui elle était partie vivre en Caroline du Nord et qui une fois arrivés s’était mis à l’exploiter. Une fois sauvée, et envoyée au Texas dans un refuge pour victimes de traite, G. a pourtant décidé de retourner vivre en Caroline du Nord, au motif qu’elle ne connaissait personne au Texas. Il se trouve que l’homme qui l’avait abusée était parvenu à revenir aux Etats-Unis après sa première déportation, et qu’ils vivaient ensemble de nouveau74.

Face à cette situation on peut alors se demander jusqu’où va le rôle de l’OIM. N’est-on pas censés assurer un minimum de suivi des cas afin d’éviter de telles situations de

revictimisation ? Comment s’assurer de la sécurité et du bien-être des victimes, sans aller à l’encontre de leur volonté ? Dans le cadre d’une thématique aussi délicate, il est difficile de trouver une solution unique. Un suivi au cas par cas serait donc nécessaire. Mais une fois de plus, le manque de financement va y mettre un frein. Il faudrait en effet créer un nouveau projet, différencié, qui possède des financements dédiés au suivi des victimes. Mais sur combien de temps assurer ce suivi ? Là encore, il parait difficile de budgétiser une telle activité, qui reposerait sur des suivis personnalisés de chaque famille.

Pour toutes les raisons évoquées précédemment, une évaluation rigoureuse et précise

du programme est donc nécessaire. Il est essentiel d’évaluer l’impact du programme de réunification sur les familles, de déterminer si elles parviennent à s’intégrer, à trouver du travail et à étudier, afin de savoir quels aspects du programme modifier ou maintenir.

Une telle évaluation a été réalisée par l’OIM en Europe. L’organisation a ainsi

cherché à évaluer l’efficacité des mesures d’intégration de victimes de traite en France,

Italie, Belgique, Hongrie, et au Royaume-Uni75. Il s’agirait de s’appuyer sur cette expertise

de l’OIM en Europe afin de conduire une évaluation similaire aux Etats-Unis. L’analyse conduite jusqu’ici nous a permis de faire ressortir les enjeux de l’activité de

l’OIM au Mexique, les obstacles à affronter et les défis à relever. Le contexte mexicain

73 Discussion avec Denisse Velázquez, Coordinatrice de l’Unité de Traite des Personnes, Genre et

Enfance Migrante, juin 2013. 74 Echange de mails avec l’OIM Washington et l’agence mexicaine qui avait pris en charge G. 75 OIM, Evaluation de l’Efficacité des Mesures pour l’Intégration des Victimes de la Traite, 2013.

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semble être un élément majeur de la complexité du travail de l’OIM au Mexique. On va alors

se poser la question du rôle des Etats au sein des OI. Devraient-ils conserver leur pouvoir, soumettant les OI aux décisions considérées d’intérêt national, ou au contraire devrait-on donner davantage de pouvoir à l’OIM afin de lui garantir une plus grande liberté d’action et

davantage d’efficacité ?

d. Vers une gestion supranationale des migrations ?

La migration étant un thème transnational, nous avons vu qu’elle appelait une gestion

multilatérale. Mais à ce jour, la gestion intergouvernementale menée par les Etats membres de l’OIM ne permet pas d’atteindre les objectifs définis sur l’AIGM. En effet, la migration demeure un des rares domaines sur lesquels les gouvernements ont gardé un pouvoir presque exclusif en matière de formulation des politiques publiques76. Mais face aux défis posés par les limites du mode de régulation actuel, il semblerait que la gestion des migrations requière une approche supranationale.

i. Migrations : le « dernier rempart de la souveraineté de l’Etat77 »

remis en cause

Comme on l’a vu avec le cas du Mexique, le travail de l’OIM est rendu difficile par le

manque de volonté politique et de coopération du gouvernement, qui privilégie les approches unilatérale et bilatérales à la diplomatie multilatérale. L’absence de politiques publiques multilatérales, produites par les OI, visant à répondre aux défis posés par les migrations internationales, représente une lacune importante. Par conséquent, il n’existe pas

de régulation ni de gestion concertée des flux migratoires et des effets qu’ils entrainent dans

les pays d’origine, de transit et de destination. Pourquoi la migration intéresse-t-elle les États au point qu’ils refusent d’en

partager la gestion avec les organisations internationales ? Nous allons nous baser sur la théorie des Relations internationales (RI) afin d’analyser les facteurs qui font que la migration

demeure aujourd’hui un des rares thèmes relevant quasi exclusivement des prérogatives de l’Etat, se présentant comme le « dernier rempart de [sa] souveraineté78 ».

Selon la théorie réaliste, paradigme dominant des RI à partir des années 1950, l’Etat

est l’acteur central de l’ordre international. Il agit de façon rationnelle pour préserver ses intérêts face aux autres Etats. Les rapports interétatiques sont alors fondés sur les notions de puissance et sécurité. Ce cadre théorique s’intéresse donc principalement aux préoccupations

76 Jacinthe Gagnon, « L’immigration, dernier rempart de la souveraineté de l’État? », Cahier de recherche, Vol. III, n° 3, septembre 2010. Lien : http://www.leppm.enap.ca/leppm/docs/Cahier%20recherche/Cahier_immigration_web.pdf [consulté le 22 août 2013]. 77 ibid. 78 ibid.

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de politique étrangère et de défense des Etats, dans le cadre duquel s’inscrit la gestion des défis mondiaux contemporains tels que ceux engendrés par les flux migratoires79.

De plus, depuis quelques années, sécurité et migration sont devenus des thèmes intimement liés. Par conséquent, l’Etat va demeurer l’acteur prédominant en matière d’élaboration de politiques migratoires. Les réalistes n’excluent pas le fait que l’Etat puisse

être influencé par d’autres entités, mais il reste le seul à exercer un pourvoir substantiel dans ce domaine. Une stratégie de gestion des migrations fondée sur la théorie réaliste ne peut donc pas conduire à la définition d’une politique mondiale et concertée de gestion des

flux.

Au cours de la récente phase de mondialisation, les Etats ont tout de même été amenés à utiliser davantage l’action multilatérale. La sphère de la migration n’a pourtant pas

été atteinte par ces transformations. Pourquoi ? Premièrement, la migration demeure sous l’autorité exclusive de l’Etat car elle sert à

légitimer son rôle80. Ensuite, les intérêts des pays développés et des pays en développement divergent sur la question, aussi chaque Etat préfère gérer la question comme il l’entend

81. Enfin, le sujet est lié aux thématiques de sécurité et d’identité des sociétés, deux responsabilités qui demeurent sous tutelle de l’Etat. Ceci justifie donc sa volonté d’en garder

le contrôle exclusif82. L’Etat fait ainsi l’objet de nombreuses attentes puisqu’il doit protéger au mieux

l’intégrité territoriale et la sécurité des citoyens. Mais pour cela il doit également prouver qu’il

est le mieux placé, le plus légitime, pour réguler les flux migratoires83.

En outre, avec la mondialisation, plusieurs des capacités de l’Etat ont été transférées au niveau international. C’est une autre des raisons pour laquelle il s’accrocherait à la migration, dernier rempart de sa souveraineté, et refuserait d’abandonner ce pouvoir à

l’échelle supranationale. En définitive, l’intervention exclusive de l’État en matière de migration répond à une logique apparentée à celle dépeinte par les tenants du réalisme classique : il s’agit de réguler la migration internationale pour protéger les intérêts nationaux. Mais en se centrant sur la seule question de la sécurité de l’Etat l’approche réaliste met de côté les enjeux sociaux de l’intervention étatique en matière de migration. En fin de compte, le concept de puissance n’est pas déterminant dans la définition des

politiques de migration. Cette question relève davantage de la souveraineté que de la

79 ibid. 80 Christina Boswell, “Theorizing Migration Policy: Is There a Third Way?”, International Migration Review, 41, 2007. 81 James Frank Hollifield, “The Emerging Migration State”, International Migration Review, 38, 2004. 82 Alejandro Portes and Josh DeWind, “A Cross-Atlantic Dialogue: The Progress of Research and Theory in the Study of International Migration”, International Migration Review, 38, 2004. 83 Christina Boswell, “Theorizing…”, op. cit.

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puissance d’un Etat ; de sa capacité à contrôler les flux à ses frontières84. Il semble donc nécessaire de changer l’approche actuelle de la régulation des migrations internationales.

En effet, l’Etat peut de moins en moins facilement, à lui seul, trouver des solutions aux problèmes qui interpellent toutes les nations. Il faut donc dépasser le prisme du réalisme pour aborder la migration depuis une perspective plus globale. De fait, au vu des évolutions du système international, l’Etat ne monopolise plus le pouvoir de déterminer les normes de contrôle des flux migratoires. Les seules raisons pour lesquelles il semble que l’Etat possède

toujours l’exclusivité de la prise de décision dans le domaine migratoire sont l’absence d’un

régime international effectif sur le sujet, ainsi que la primauté des intérêts économiques des Etats dans les relations internationales – qui les poussent à privilégier des stratégies unilatérales de défense de leurs intérêts85.

« Dans un univers où la mondialisation continue de s’accélérer, la réalité est que les employeurs, les trafiquants, les réseaux de migrants, les agents et les individus eux-mêmes ont déjà pris les choses en mains. Améliorer et établir des mesures nouvelles de gouvernance est nécessaire pour rationnaliser, améliorer et superviser ces initiatives ad hoc86 ». Une nouvelle structure mondiale de gouvernance est ainsi nécessaire pour la gestion des migrations internationales. Elle devrait s’appuyer sur les processus et accords existants, qu’ils relèvent d’approches nationales, bilatérales, régionales ou globales. Ceux-ci constituent en effet la base d’un futur régime international des migrations. Il convient donc de les coordonner et les renforcer afin d’éviter qu’à l’avenir les gouvernements tombent dans le « piège d’une stratégie isolationniste de la migration87 ».

C’est dans ce but que Saskia Sassen plaide en faveur d’une intervention étatique basée

sur le multilatéralisme supranational et favorisant l’inclusion des acteurs non

gouvernementaux88. Face à ces considérations et les insuffisances de la théorie réaliste considérant la

migration comme une fonction exclusive de l’Etat, nous allons tenter de répondre à plusieurs

questions : quels sont les éléments soulignant la nécessité et la pertinence du développement d’un régime supranational de gestion des migrations ? Quels facteurs en permettraient l’émergence ?

84 Eytan Meyers, “Theories of International Immigration Policy. A Comparative Analysis”, International Migration Review, 34 (4), 2000. 85 James Frank Hollifield, « Immigration et logiques d'États dans les relations internationales », Études internationales, 24, 1993. 86 Sergio Marchi, “Global migration: in need of a global response”, Revue Migrations Forcées [en ligne], n°37, avril 2011. Lien : http://www.fmreview.org/fr/non-etatiques/marchi.html [consulté le 22 août 2013]. 87 ibid. 88 Saskia Sassen, “Regulating Immigration in a Global Age: A New Policy Landscape”, Parallax, 11, 2005.

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ii. La nécessité d’un régime international de gestion des migrations

Certes les politiques migratoires nationales semblent insuffisantes pour la régulation des migrations internationale. Mais qu’est-ce qui assure qu’un régime supranational et le

développement de politiques internationales permettraient une meilleure régulation ? La création d’un système international semble la meilleure option car « l’Etat est

dépassé89 ». Il est nécessaire de renouveler la notion de souveraineté politique afin de transcender les frontières et d’accroitre les relations d’interdépendances

90. Les évolutions récentes du système international actuel ont causé une fragmentation

progressive du pouvoir des Etats au profit de nouveaux acteurs, dont les OI. Celles-ci s’annoncent donc désormais comme les acteurs à l’expertise d’action collective la plus solide91 et donc les mieux placés pour organiser un régime supranational de gestion des migrations. Comme le souligne la théorie libérale des RI, en opposition à l’approche réaliste, les

acteurs non-étatiques ont une importance capitale aux côtés des Etats dans la gestion des migrations. Ils permettent de mieux prendre en compte les enjeux sociaux et économiques de la migration, aussi importants que les défis sécuritaires. Pour les libéraux, la migration est un pan de la stratégie économique de l’Etat. Le marché sera alors un régulateur des relations internationales et des distorsions attribuables aux migrations internationales92. L’importance des acteurs non-étatiques est également mise en avant dans l’approche

constructiviste d’Alexander Wendt et Nicholas Onuf. Selon eux, l’Etat et les acteurs qui

évoluent autour de lui sont des agents sociaux. Ces agents ont des intérêts concurrents, qui façonnent les objectifs de chacun et transforment les structures qui les entourent, telles que les normes et institutions. L’Etat possède certes un rôle important dans l’établissement des

corpus de normes juridiques internationales, mais il n’est pas le seul acteur : la construction de ces normes découle en réalité des interactions entre agents et des concurrences entre leurs intérêts. Ainsi tous les agents ont un rôle. Saskia Sassen a renforcé cette idée dans ses travaux, en insistant sur l’importance de l’implication des acteurs non-étatiques dans la régulation de la migration93. Le dépassement de l’Etat se note également face à l’échec des politiques et mesures nationales de régulation en place actuellement. Déficientes, ces politiques sont inefficaces dans le contrôle des flux de migrants aux frontières. Tous les Etats sont ainsi confrontés à des flux d’immigration irrégulière ou non désirée. Ceux-ci érodent la souveraineté de l’Etat,

89 David Mitrany, A Working Peace System. An Argument for the Functional Development of International Organization, London, The Royal Institute for International Affairs, Oxford University Press, 1943. 90 ibid. 91 Jacinthe Gagnon, « L’immigration… », op. cit. 92 James Frank Hollifield, Immigrants, markets, and states: the political economy of postwar Europe, 1992, Cambridge, Mass.: Harvard University Press. 93 Saskia Sassen, Critique de l'Etat, Territoire, Autorité et Droits de l'époque médiévale à nos jours, 2006, Ed. Demopolis.

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incapable de contrôler totalement les passages à sa frontière94 et lui font ainsi perdre de sa légitimité à gérer la question. Face aux lacunes des politiques nationales, la porosité des frontières, et la perte de pouvoir de l’Etat face à la présence grandissante d’acteurs non-étatiques, il semble qu’une

politique migratoire efficace, résultant d’une coopération réelle entre acteurs, soit nécessaire. Ceci ne pourra être accompli que grâce à un régime international.

Pourquoi alors, dans une réalité contemporaine où les acteurs sont multiples sur la scène internationale, n’assiste-t-on pas à une concertation en matière de gestion des flux migratoires ? Afin que la migration dépasse le cadre national et soit prise en charge au niveau supranational, trois conditions doivent être réunies : la présence d’une menace, la

mobilisation des acteurs non étatiques, et l’existence d’organisations internationales et/ou

d’instruments juridiques internationaux exerçant un certain leadership ou ayant une légitimité

auprès des États95.

Premièrement, la présence d’une menace est nécessaire afin que les Etats s’y

intéressent et jugent le sujet digne de concertation. Dans le cas des migrations internationales, on peut penser à la récurrente menace identitaire avancée par certains Etats. Ainsi, la migration internationale fragiliserait les particularités culturelles et identitaires des sociétés d’accueil. Mais surtout, on peut penser à l’immigration irrégulière, perçue comme une menace sécuritaire. Toutefois jusqu’ici les Etats ne se sont pas mobilisés sur cette question car la vision des migrations comme menace n’est pas consensuelle parmi la communauté

internationale. En outre, les entrées clandestines sont généralement réprimées sévèrement. Tous les

Etats sont alors coupables de violations de droits de l’Homme dans la manière qu’ils ont de

traiter les immigrants clandestins96. Cette brèche pourrait encourager la concertation interétatique sur une politique publique internationale afin de moduler les flux de migrations irréguliers dans le respect des droits de l’Homme. Mais il semble que la violation massive des droits des migrants ne soit pas une menace assez pressante pour inscrire la gestion supranationale des migrations à l’agenda international.

Le deuxième élément nécessaire à l’émergence d’un système international est la

mobilisation d’acteurs non-étatiques. Ceux-ci se sont multipliés avec la mondialisation, mais ne possèdent toujours pas de personnalité juridique sur la scène internationale. Une conséquence de ceci est que ces entités ne sont pas reconnues en tant qu’acteurs clés dans la

94 Sarah Collinson, “Visa Requirements, Carrier Sanctions, 'Safe Third Countries' and 'Readmission': The

Development of an Asylum 'Buffer Zone' in Europe”, Transactions of the Institute of British Geographers, 21, 1996. 95 Jacinthe Gagnon, « L’immigration… », op. cit. 96 ibid.

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régulation des migrations, bien qu’ils fassent fortement progresser la réflexion sur les enjeux actuels. De plus ces acteurs remettent parfois en cause la légitimité de l’Etat, ce qui leur cause

d’être gardées éloignées des négociations multilatérales. En outre, dans le domaine de l’immigration, les acteurs non étatiques que l’on retrouve

à l’échelon international, régional ou encore local ont souvent des intérêts contradictoires et des positions qui s’affrontent, ce qui nuit nécessairement à une réelle mobilisation. Le manque de coordination des acteurs non-gouvernementaux, déjà isolés par les Etats, constitue ainsi un frein à l’émergence d’un système international de gestion des migrations.

Enfin, le dernier facteur requis pour la création d’un régime supranational est

l’existence d’OI et/ou d’instruments juridiques. Dans le cas des migrations, l’OIM est sans conteste l’organisation exerçant le plus fort leadership sur la question. Néanmoins elle ne possède pas de pouvoir normatif, et son indépendance vis-à-vis du système des NU limite le poids de ses actions.

De plus, quelques instruments juridiques existent dans le domaine migratoire, mais ceux-ci s’avèrent limités et incomplets. Il y a en effet quelques traités sur les droits des travailleurs migrants ou les droits des réfugiés97 mais de nombreuses dimensions des migrations ont été oubliées. Il n’existe pas non plus de Cour de justice dédié à la protection des migrants et au respect des traités.

En fin de compte, les normes existantes dans le domaine migratoire sont de deux sortes : les normes étatiques d’abord, élaborées de manière unilatérale afin de protéger les frontières, sécuriser le territoire nationale, octroyer la nationalité etc. Les normes de droit ensuite, élaborées au niveau multilatéral. Ces normes n’ont cependant aucune force contraignante sur les Etats, et leur disparité et dispersion est donc à l’origine des lacunes observables. Il est alors nécessaire de rechercher l’équilibre entre droits des migrants et respect des souverainetés nationales98.

En définitive, le modèle actuel de gestion des migrations est loin d’un cadre où pourraient s’élaborer des politiques publiques internationales ayant de réels impacts sur la gestion des flux migratoires. En fin de compte, de telles avancées reposent sur la volonté politique des Etats.

Néanmoins, dans les faits, on peut discerner quelques avancées dans la gestion multilatérale des migrations, annonciatrices d’une politique publique internationale future99. En effet, l’essor des processus consultatifs régionaux, abordé précédemment, s’inscrit dans « une stratégie plus large, au niveau international plus qu’au niveau

régional100 ».

97 Convention de Genève, 1951. 98 Jacinthe Gagnon, « L’immigration… », op. cit. 99 Frédérique Channac « Vers une politique publique internationale des migrations ? », Revue française de science politique 3/2006, Vol. 56, 2006. Lien : http://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2006-3-page-393.htm [consulté le 22 août 2013]. 100 ibid.

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En répliquant ou dupliquant d’une région à l’autre les conditions structurelles et institutionnelles et les réseaux politiques des processus consultatifs, les Etats vont en effet, à terme, permettre l’émergence d’une politique publique internationale des migrations101. Ainsi ce n’est pas la duplication de politiques publiques migratoires qui compte, mais bien le développement de processus consultatifs similaires au sein desquels les acteurs vont socialiser, influençant mutuellement leur compréhension des questions migratoires. Cette socialisation des gouvernements au sein des processus régionaux va également leur permettre de percevoir davantage leur intérêt à coopérer à l’échelle supranationale pour gérer les

migrations102.

De plus, nous avons vu que certaines OI participent à ces processus consultatifs régionaux. Cette implication n’est pas désintéressée puisque ceux-ci représentent à la fois un prolongement et un appui pour l’extension et la mise en œuvre des programmes de ces

organisations103. Cela semble particulièrement clair dans le cas de l’OIM, notamment au sein de la Conférence Régionale sur la Migration sur le continent américain.

« Toutes ces évolutions concomitantes montrent bien que, dans un contexte de rareté des ressources pour les organisations internationales, mais également à un moment où les discussions se font plus pressantes autour de la nécessité de formation d’un régime

international des migrations, l’OIM, en soutenant le développement de processus régionaux, accroît du même coup son importance et sa légitimité en tant qu’organisation internationale

globale spécialisée dans le domaine des migrations104 ». En initiant et en soutenant le développement des processus consultatifs régionaux,

l’OIM se met clairement en position de pouvoir coordonner toutes ces initiatives, dans le futur, à un niveau global et interrégional – créant ainsi de fait un régime supranational de gestion migratoire.

Dès lors, faut-il donner dès maintenant plus de pouvoir à l’OIM, afin de lui garantir les moyens nécessaires au leadership du régime international des migrations ? Faut-il modifier le mandat et la représentation étatique au sein de l’OIM et faire de l’organisation

un organisme supranational afin d’enraciner le régime et assurer la gestion effective des

migrations sur le long-terme ?

101 ibid. 102 ibid. 103 ibid. 104 ibid.

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Conclusion

La migration est un sujet très large et multiforme. Le phénomène revêt des aspects différents selon les contextes géographiques, sociaux, économiques. Les programmes qui en découlent sont donc très différents d’une région du monde à l’autre, selon les pays

d’intervention. Il s’agit d’un sujet vaste et dynamique qui semble appeler une infinitude de réponses.

De plus, les migrations sont facilitées par le phénomène de la mondialisation qui s’accompagne de l’accélération des mobilités humaines. Il est donc de plus en plus nécessaire de gérer et réguler les migrations internationales, de créer des cadres afin de limiter les abus et protéger les droits humains des personnes migrantes, tout en garantissant les effets bénéfiques des flux migratoires.

Cependant, l’action de l’OIM demeure fortement conditionnée par le contexte politique, social et économique des pays où elle est présente. Au Mexique, le renforcement récent de la politique migratoire a sonné le glas de la nouvelle orientation du gouvernement, décidé à s’aligner sur la politique du voisin américain et à fermer ses frontières. Parallèlement, les évolutions organisationnelles du système de coopération internationale ont entrainé une modification du mode de fonctionnement et d’administration de l’OIM.

Combinées, ces évolutions rendent plus difficile le développement de projets et programmes pour répondre aux problématiques migratoires identifiées sur le terrain. L’organisation reste

donc confrontée à des défis nouveaux auxquels elle va devoir trouver un moyen de répondre afin de conserver sa place d’organisme phare dans la gestion des migrations internationales.

Pour cela, il apparait essentiel que les Etats coopèrent avec les acteurs non-gouvernementaux dans le but de créer un système supranational de gestion des migrations, afin de développer des politiques publiques internationales contraignantes permettant une gestion plus efficace des migrations internationales.

Le but de cette expérience au sein de l’OIM était de voir si je me sentais capable de

travailler sur le thème de la traite de manière continue. Il s’agit en effet d’un sujet difficile, sur le plan humain, et frustrant sur le plan professionnel en ce que beaucoup de questions demeurent sans réponse. Le risque de la revictimisation est grand, ce qui pose la question de l’utilité même des actions menées pour venir en aide aux victimes.

Mais en fin de compte, la satisfaction qu’apporte l’aspect humain de ce type de travail

a rendu ces quelques mois très enrichissants et motivants. Assister directement des victimes de traite et leurs familles crée un mélange d’histoires de vie, de parcours et de trajectoires. Malgré la difficulté de la thématique je suis heureuse d’avoir pu côtoyer ces personnes et les

aider à un moment de leurs vies où elles en avaient besoin. Suite au stage, l’OIM Washington m’a proposé un contrat de deux mois afin de rester

à Mexico et poursuivre les cas d’assistance aux victimes dans le cadre du Programme de Retour, Réintégration et Réunification Familiale des Victimes de Traite des Personnes aux Etats-Unis. Reconnaissance du travail accompli durant mon stage et de mon investissement dans le programme, cette opportunité est apparue comme un excellent moyen de terminer un projet qui me tenait à cœur et avec lequel je suis maintenant très familière.

Page 67: Rapport de stage OIM

55

En outre, il peut s’agir d’un tremplin non-négligeable pour ensuite obtenir un emploi dans l’organisation.

En définitive, mon expérience au sein de l’OIM a confirmé ma volonté de travailler

dans le domaine de la coopération internationale et de la protection des droits de l’Homme. J’ai donc décidé de postuler à des postes au sein de l’organisation ainsi que

d’autres OI et institutions travaillant sur les thèmes de la traite, les droits des migrants, ou

encore les droits des enfants et des femmes. Je compte me servir de cette première expérience afin de me construire un parcours professionnel cohérent. Même si je ne trouve pas de poste de long-terme au sein de l’OIM suite au stage, cette expérience pourra toujours être mise en valeur dans mes recherches futures. J’ai désormais une connaissance du fonctionnement d’une OI de l’intérieur, ce qui pourra être utile que je me retrouve à travailler au sein d’une

telle organisation aussi bien que pour un de ses divers partenaires.

Page 68: Rapport de stage OIM

56

Page 69: Rapport de stage OIM

57

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Enfance Migrante, juin 2013.

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61

Table des annexes

Annexe 1 : Etats membres et observateurs de l’OIM 62

Annexe 2 : Structure organique de l’OIM 64

Annexe 3 : Enoncé de mission et orientation stratégique de l’OIM 66

Annexe 4 : Carte du Mexique fédéral 66

Annexe 5 : Carte des principales routes migratoires et zones de séquestration et de traite des migrants au Mexique 68

Annexe 6 : Organigramme de l’OIM Mexico 69

Annexe 7 : Document-type de systématisation des données des ateliers J/TIP 70

Annexe 8 : Bulletin sur la formation des Consuls latino-américains 73

Annexe 9 : Bulletin sur la « formation de formateurs » 75

Annexe 10 : Statistiques des Cas de Washington (2005-2013) 79

Annexe 11 : Du Mexique aux Etats-Unis, histoires de victimes de traite des personnes (exemples de cas assistés) 81

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62

Annexe 1 : Etats membres et observateurs de l’OIM

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63

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64

Annexe 2 : Structure organique de l’OIM

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9 bureaux régionaux en charge de la formulation de stratégies et plans régionaux : Dakar, Sénégal; Pretoria, Afrique du Sud; Nairobi, Kenya; Le Caire, Egypte; San José, Costa Rica; Buenos Aires, Argentine; Bangkok, Thaïlande; Bruxelles, Belgique; et Vienne, Autriche. 2 bureaux spéciaux de liaison en charge du développement et de l’entretien de relations avec d’autres

organes multilatéraux, les missions diplomatiques et les ONG : New York, Etats-Unis, et Addis Abeba, Ethiopie. 2 centres administratifs en charge de l’appui aux bureaux de pays sur les questions de technologies

de l’information et les services administratifs : Panama, Panama, et Manille, Philippines. Plus de 240 bureaux et sous-bureaux de pays en charge de l’analyse de la situation et des tendances

migratoires de chaque pays afin de planifier, développer et mettre en pace des projets et programmes pour répondre aux besoins identifies. 5 bureaux de coordination en charge de s’assurer que les réalités migratoires de chaque groupe de

pays sont bien prises en compte dans la programmation des activités régionales : Canberra, Australie (couvrant le Pacifique); Rome, Italie (couvrant la Méditerranée); Astana, Kazakhstan (couvrant l’Asie

centrale); Georgetown, Guyane (couvrant les Caraïbes) ; et Bangkok, Thaïlande (couvrant l’Asie du

sud). 4 bureaux de mobilisation des fonds et de conseil financier : Tokyo, Japon; Berlin, Allemagne; Helsinki, Finlande; et Washington, Etats-Unis. Source : OIM, « IOM – FACTS AND FIGURES (2013)”, Site internet de l’OIM. Lien : http://www.iom.int/files/live/sites/iom/files/About-IOM/docs/facts_figures_en.pdf [consulté le 20 mai 2013]

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66

Annexe 3 : Enoncé de mission et orientation stratégique de l’OIM

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67

Annexe 4 : Carte du Mexique fédéral

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68

Annexe 5 : Carte des principales routes migratoires et zones de séquestration et de traite des migrants au Mexique

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69

Annexe 6 : Organigramme de l’OIM Mexico

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Annexe 7 : Document-type de systématisation des données des ateliers J/TIP

1. Participants in pre and post-tests No Pre-test 50 Post-test 49

General Comments

At group level, it can be concluded that the workshop objectives have been met. However, the results highlight a relatively high number of confused and incorrect responses, especially on two issues: the nature of the crime of trafficking and migration issues and the treatment should be given to foreign trafficking victims.

Correct Confused Incorrect Unanswered

Pre 170 48 30 2

Post 196 30 15 4

Workshop #57 La Paz, Baja California Sur, Local Actors

April 30, 2013

Page 83: Rapport de stage OIM

71

For future training, therefore, the IOM suggests that reinforcement is made on these issues, in order to clear participants’ doubts and strengthen their knowledge of the subject.

2. Evaluation of the workshop

3. Invitation

Excellent

Very Good

Good

Aceptable

Bad

Duration

Clarity andknowledge

Relevance

Served itspurpose

Duration Clarity and knowledge Relevance Served its purpose

Excellent 25 36 38 32

Very Good 15 12 11 14

Good 8 4 3 5

Aceptable 3 1 1 2

Bad 1 0 0 0

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72

4. Support photos

5. Attendance list

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73

Annexe 8 : Bulletin sur la formation des Consuls latino-américains

Page 86: Rapport de stage OIM

74

Page 87: Rapport de stage OIM

75

Annexe 9 : Bulletin sur la « formation de formateurs »

IOM and UNHCR conduct training workshop for trainers On April 8, 9, 10, 11, 15 and 16, 2013, IOM and UNHCR jointly conducted a series of

training workshops on “Migrants’ and Refugees’ Human Rights in the Mesoamerican

Region: Identification, Protection and Assistance”. The workshops were aimed at

representatives from various State and Federal institutions as well as organizations from

the civil society and academic institutions. 33 people attended, coming from 12 different

institutions.

From left to right: Thomas Weiss, IOM, Dulce Diaz, INM, Hamdi Bukhar, UNHCR.

After opening words from Thomas Weiss, IOM’s Chief of Mission, Hamdi Bukhari,

UNHCR Representative, and Dulce Diaz, National Migration Institute’s Chief of Training,

the 6-day workshop sessions tackled a range of issues including:

- the global context and characteristics of migrations worldwide, in Mesoamerica

and in Mexico;

- Human Rights in international migration, refugees’ rights, and the specific

protection needs of asylum seekers and refugees;

- women in migrations as well as unaccompanied migrant children;

- human trafficking and migrant smuggling;

- identification of vulnerable migrants and their corresponding assistance and

protection needs.

Page 88: Rapport de stage OIM

76

Speakers included Eva Rojas, from IOM’s Regional Office in Costa Rica, Luis Diego

Obando, from UNHCR’s office in Costa Rica, and Denisse Velázquez and Eva Reyes from

IOM Mexico. Insightful comments were also provided by Luis Flores, from IOM Mexico’s

sub-office in Tapachula, Chiapas.

Eva Rojas, IOM Costa Rica Luis Diego Obando, UNHCR Costa Rica

Denisse Velázquez, IOM Mexcio Eva Reyes, IOM Mexico

Luis Flores, IOM Mexico - Tapachula

Page 89: Rapport de stage OIM

77

Additionally, the workshop sessions addressed pedagogical tools and methodology

to develop inter-learning processes, for the trained audience to conduct similar training

workshops for their colleagues within each institution.

Manuals were thus given to participants, as a strong tool to diffuse the information

learnt.

Volume 2 of the Manuel handed out to participants on the first day of the workshop.

Moreover, all along the workshop sessions, group activities were conducted to

enforce participants’ practical understanding of the topics dealt with.

Participants discussing various themes such s: what is human trafficking? What is a vulnerable migrant?

Page 90: Rapport de stage OIM

78

One of the groups preparing a poster of newspaper cuts dealing in a way with vulnerable migrants.

Participants during the reconstitution of two abused migrants’ trial. Finally, 31 of the 33 participants

passed the final exam. The ones who

didn’t were failed only for not attending

the minimum number of sessions which

was required. Overall, the participants

were satisfied with the quality and

content of the training, and granted the

speakers encouraging appreciations.

Page 91: Rapport de stage OIM

79

Annexe 10 : Statistiques des Cas de Washington (2005-2013) Le Programme de Retour, Réintégration et Réunification Familiale des Victimes de Traite des Personnes aux Etats-Unis a été lancé par l’OIM Washington en 2005. Voici quelques statistiques parlantes sur les cas assistés à ce jour (juillet 2005 – août 2013).

Tableau 1 : Nombre de victimes ayant bénéficié du programme # de victimes assistées pour

la réunification familiale aux Etats-Unis

# de membres de la famille réunis aux Etats-Unis

# de victimes assistées pour le retour au Mexique

42 98 4

Total : 46 victimes assistées.

Tableau 2 : Répartition des victimes par sexe

Nombre de victimes de sexe masculin Nombres de victimes de sexe féminin

11 35 Tableau 3 : Répartition des victimes par âge

< 18 ans 19-29 ans 30-39 ans 40-49 ans Age inconnu 3 20 14 7 2 adultes

Tableau 4 : Répartition des victimes par type d’exploitation

Exploitation sexuelle

Exploitation du travail Les deux

Prostitution Servitude

domestique Travail agricole Autre

21 (dont 20 femmes)

8 (dont 7 femmes)

5 (dont 4 hommes)

8 (dont 5 hommes)

4 (100% femmes)

Page 92: Rapport de stage OIM

80

Carte : Répartition des victimes selon les Etats d’origine et de destination, par sexe et

type d’exploitation

Source : document interne en cours d’élaboration.

Page 93: Rapport de stage OIM

81

Annexe 11 : Du Mexique aux Etats-Unis, histoires de victimes de traite des personnes (exemples de cas assistés) Ces bouts de récits, certes incomplets, sont une compilation des discussions tenues avec les familles des victimes et des informations contenues dans leurs dossiers.

Victime de traite sexuelle

R. est une jeune fille originaire de l’Etat de Puebla qui a été victime de traite à des fins de prostitution forcée. Suite à sa rescousse par la société civile américaine, elle a obtenu un visa T1 de victime de traite, qui lui permet de résider et travailler durant quatre ans aux Etats-Unis. Elle peut également faire bénéficier sa famille de ce statut migratoire particulier. Afin de l’aider

dans sa démarche, les bureaux de l’OIM

à Washington et Mexico l’ont assistée,

elle et sa famille, dans l’obtention des

passeports, visas T dérivés et l’organisation du voyage à New York. Les parents de R. ainsi que son frère et ses deux sœurs ont ainsi pu la rejoindre. A terme, grâce au visa T, ils pourront tous candidater pour obtenir la résidence permanente aux Etats Unis.

Esclave domestique

L. est une jeune fille originaire de l’Etat de Puebla. Avant-dernière d’une

famille de sept enfants, vers 17 ans L. commence à changer. Ses parents ne comprennent pas. Puis un jour elle décide de partir pour les Etats-Unis. Comme beaucoup de jeunes Mexicaines, il semblerait que L. soit tombée amoureuse d’un homme, qui lui a fait des promesses de vie meilleure. Mais une fois arrivée chez les Gringos, L. se retrouve à travailler comme domestique dans une famille. Exploitée, elle ne peut se reposer, est maltraitée, ne gagne presque rien. C’est une esclave domestique. Une fois sortie de sa situation d’exploitation, L. a pu faire

venir ses parents et son petit frère à Phoenix, après sept ans de séparation.

De victime à témoin-clé pour l’arrestation des trafiquants

B. est une jeune femme originaire de l’Etat de Oaxaca. Elle est partie vivre aux Etats-Unis avec son mari et ses deux enfants. Là-bas, ils eurent un troisième bébé, qui obtint la nationalité américaine. Mais présente de manière irrégulière, la famille est déportée au Mexique. Après son divorce, B. retourne aux Etats-Unis avec un homme qu’elle a

rencontré au Mexique, et laisse les enfants à la charge de son ex-mari. Elle est alors forcée à se prostituer.

Après avoir obtenu son visa T1, B. décide de coopérer avec le FBI afin de faire arrêter le réseau de trafiquants qui l’a exploitée. Elle bénéficie donc d’un statut spécial

de « continued presence » qui la protège et lui permet de faire venir ses trois enfants en urgence, sans visas, au motif qu’ils sont en danger. En effet, si la partie du réseau qui

œuvre au Mexique apprend que B. coopère avec le FBI, ils risquent de lancer des

représailles sur ses enfants.

Page 94: Rapport de stage OIM

82

Le risque de la revictimisation

G. est une jeune fille originaire de l’Etat de Oaxaca. A 17 ans, elle rencontre un jeune homme pendant une fête. Très vite ils tombent amoureux et l’homme lui propose d’aller

vivre aux Etats-Unis pour avoir une vie meilleure. Apres être arrivés de manière irrégulière en Caroline du Nord, G. tombe enceinte. Mais le couple a des difficultés financières. L’homme force alors peu à peu G. à se prostituer et à accomplir toutes sortes de travaux pour gagner plus d’argent pour leur enfant, C. Au bout d’un certain

temps, G. renvoie son fils chez parents au Mexique afin qu’ils s’occupent de lui. Suite

aux abus du père, G. porte plainte et l’homme est déporté au Mexique. Mais il se rend chez la famille de G. et lui fait du chantage : si elle veut voir son fils, elle doit revenir habiter avec lui. G. revient alors au Mexique, toujours de manière irrégulière. Lorsqu’elle demande de l’aide à l’OIM pour obtenir le visa U1 (victime de violence domestique), elle est donc de retour au Mexique alors qu’elle devrait se trouver aux Etats-Unis.

Ceci a compliqué la tâche puisque des documents supplémentaires étaient nécessaires, attestant de son pardon pour les aller-retour irréguliers aux Etats-Unis. Par ailleurs, en raison de l’insistance du père de C. et de ses menaces, G. et C. sont placés dans un refuge de haute sécurité à Mexico, afin de recevoir l’assistance médicale,

sociale, psychologique nécessaire et d’être facilement disponibles pour les procédures administratives. Après quelques difficultés, G. obtient son visa U1 pour les Etats-Unis. C. n’en n’a pas besoin puisque, étant né aux Etats-Unis, il a la nationalité américaine.

Une fois aux Etats-Unis, G. et C. sont accueillis dans un refuge pour les victimes de traite, au Texas. Nous avons appris deux mois plus tard qu’ils avaient quitté le refuge

pour retourner en Caroline du Nord, où le père de C. était également retourné avant de se faire arrêter de nouveau par le gouvernement américain. A ce jour, il est peu clair si G. est de retour avec l’homme qui l’a exploitée ni ce qu’il va advenir d’elle et son fils.

Les hommes aussi peuvent être victimes de traite

M. est un père de famille originaire d’Acapulco, Guerrero. Face aux difficultés rencontrées pour nourrir sa famille de cinq enfants, il décide de tenter sa chance aux Etats-Unis pendant un temps afin de gagner assez d’argent et de rentrer chez lui. En

chemin, il est recruté par un réseau de trafiquants qui le maintiennent en travail forcé. Une fois son visa T1 obtenu, il entame les démarches pour faire venir sa femme et ses enfants aux Etats-Unis.

Cependant l’aîné des enfants a perdu le droit à la réunification lorsqu’il s’est marié et a eu un bébé. En effet, seuls les membres directs peuvent bénéficier du programme de réunification. Or maintenant qu’il est marié, le fils aîné émigrerait avec sa femme et son

fils, qui ne remplissent pas les critères pour bénéficier du visa T dérivé.* Après des adieux déchirants avec le fils ainé et sa famille, la femme et les quatre

plus jeunes enfants de M. ont ainsi pu le rejoindre en Pennsylvanie.

* Une réforme est en cours afin de permettre aux petits-enfants des victimes de bénéficier du visa également.

Page 95: Rapport de stage OIM

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H., fille d’une victime de traite partie rejoindre sa mère en Louisiane.

La famille Z. se préparant à rejoindre le père M. en Pennsylvanie.