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Texte de Jean-Pierre Fleury, Docteur en Sociologie de l'Université de Nantes, publié à l'occasion du 23 juin 2011 et de la candidature, à l'Académie française, d'Olivier Mathieu (dit Robert Pioche) au fauteuil de Claude Lévi Strauss. TA’WEN-Ã-NALIK-TU 1 ANIMISTE SUPPLIQUE AU SOLSTICE D’ÉTÉ CHANTÉE POUR QUE RENAISSE EN VÉNÉRABLE CONFRÉRIE UN NOBLE ANTHROPOLOGUE 1 En mamãindê, dialecte nambikwara du nord, littéralement : forêt (ta’wen), infixe du génitif (ã), souvenir, pensée (« nalik » qui se décompose en « na », tête et « lit » (arriver) qui se phonétise « lik » devant un « t »), suffixe des substantifs (tu) ; autrement dit : "la pensée sauvage". Ou si l’on préfère : la passe (en) tête de la forêt (vierge).

Réflexions sur Claude Lévi Strauss, à l'occasion de l'élection à l'Académie française du 23 juin 2011,par Jean-Pierre Fleury

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Le 23 juin 2011, à l'Académie française, aura lieu une élection afin de pourvoir le fauteuil laissé vacant par le décès de M. Claude Lévi Strauss. Dans le texte que voici (un texte qui, probablement, sera ultérieurement amplifié par son auteur), l'écrivain Jean-Pierre Fleury (docteur en Sociologie de l'Université de Nantes) offre un texte pyrotechnique et original sur Claude Lévi Strauss. Un texte riche en anecdotes savoureuses, mais aussi en citations littéraires (qui vont de Boris Vian à Céline, de Gérard de Nerval à Abel Bonnard, de Cioran à Claude Lévi Strauss). A noter que Jean-Pierre Fleury est pour finir l'éditeur d'Olivier Mathieu (dit Robert Pioche), l'un des candidats, le 23 juin 2011, au fauteuil de Claude Lévi Strauss. Rappelons enfin qu'Olivier Mathieu, le 8 avril 2011, a distribué devant l'Académie française un poème de sa plume (deux cents alexandrins réguliers), ce qui lui a valu un article élogieux, l'éditorial du "Figaro" du 8 avril 2011, sous le titre : "Candidat à l'habit vert, il sait discourir en vers".

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Texte de Jean-Pierre Fleury, Docteur en Sociologie de l'Universit de Nantes, publi l'occasion du 23 juin 2011 et de la candidature, l'Acadmie franaise, d'Olivier Mathieu (dit Robert Pioche) au fauteuil de Claude Lvi Strauss.

TAWEN--NALIK-TU1ANIMISTE SUPPLIQUE AU SOLSTICE DT CHANTE POUR QUE RENAISSE EN VNRABLE CONFRRIE UN NOBLE ANTHROPOLOGUE

Ce texte est publi, sur Scribd, sous sa forme actuelle (31 mai 2011), afin qu'on puisse le lire avant le 23 juin 2011 (lection l'Acadmie franaise) ; mais il sera trs probablement amplifi dans l'avenir.

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En mamind, dialecte nambikwara du nord, littralement : fort (tawen), infixe du gnitif (), souvenir, pense ( nalik qui se dcompose en na , tte et lit (arriver) qui se phontise lik devant un t ), suffixe des substantifs (tu) ; autrement dit : "la pense sauvage". Ou si

lon prfre : la passe (en) tte de la fort (vierge).

I La hotte du Pre NolLvi-Strauss fut un sage et comme tout sage, il fut admir d'une toute petite lite de pairs ou d'honntes gens cultivs, mais ignor pour ne pas dire moqu, condescend par l'opinion dite publique. Les pangyriques post mortem des journalistes ne changent rien son statut de prcheur dans le vide. L'amrindien, tout Primitif (ne riez pas, ne vous moquez pas des seuls tres humains aptes encore survivre dans les pires conditions terrestres, ce que tout civilis serait incapable, du moins long terme, sans mdecine, commerce au coin du bois ou feu dans un abri de fortune), tout Primitif donc a le respect austre et pointilleux de la Nature et de son quilibre ainsi que sa desse-mre la Terre. La gratter simplement pour en tirer profit dchire le cur aux plus farouches chasseurs-pcheurs-cueilleurs, si ce nest en quelque jardin discret, secret effleurer sa crote respectable, oui sa peau. Nature et Culture ne font qu'un chez eux. Espce humaine et crote terrestre, comme fut titr lun des ouvrages posthumes de Bordiga. Claude Lvi Strauss fut des grands dans la contre recule des anthropologues, tel un Malinowski ou encore un abb Breuil, un Haudricourt, un Leroi-Gourhan qui, chacun en leur domaine, ont ralis la fois uvre scientifique (de "sciences humaines") et uvre potique. Lire ou contempler Les Argonautes du Pacifique Occidental, Les Nuer, Quatre Cents Sicles dArt Parital, L'Homme et la Charrue Travers le Monde 2 et Prhistoire de l'Art Occidental relve pour tous, tout autant du plaisir esthtique que du plaisir de dcouvrir des mondes ignors. Luvre crite du splologue lancienne Norbert Casteret, rcits quasi romanesques qui ont berc ma jeunesse, est de la mme trempe. Il en va de mme pour Lvi-Strauss, connu par moi nettement plus tard, sans doute de la bande le plus philosophe et moraliste (dans le sens du terme l'poque classique).

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Lun de ses nombreux ouvrages, celui-ci crit en collaboration avec Mariel Jean-Brunhes Delamarre gographe et ethnologue.

Oyons donc, des limbes d'un au-del des cieux, les remembrances dun vieillard, tout sauf idiot, une vieille Dame que nous voulons croire non indigne, et qui dans la hotte en bois du Pre Nol a dress des crits de sa complainte au supplici. Bribes parses de mmoires, disperses aux vents perdus de sa mmoire. Le supplici est videmment le Pre Nol. Le Pre Nol Supplici3, et non pas quelque tre humain ni autres Ychoua, Yas`a, 's, Iesous, ou Iesus4. Lvi-Strauss ne croyait ni en ce galilen des pourtours nordiques du protectorat romain isralite et demi-juif, ami des Samaritains purs et durs, moqu par les patents pharisiens de la capitale judenne voisins des Philistins, contre qui connat encore un succs mondial, ni en YHWH dieu sans image d'origine gyptienne, sanhdrin ou autres Yaya samaritain ou encore moins Allah. Lvi-Strauss nest pas mme athe, mais plutt indiffrent ou ami des religions-philosophies orientales et du Bouddha stoque et contemplatif. Et de ses formes les plus douces. Il nous dit exactement, il suffit de le lire ou de lcouter, voix lointaine dj : Non vraiment la religion ne mintresse pas. Et si je devais avoir des proccupations de ce ct-l, mes sympathies iraient plutt vers certaines religions extrme-orientales. (in : Le Quotidien de Paris du 2 octobre 1989) Il aurait sans doute pu faire sienne cette conclusion une allgorie de Volney qui conclut une longue rflexion agace par les doctes dogmes, interdits ou inquisitions et doctrines religieuses, rflexion destine aux imam, an aotrou eskobl 5, rabbinim et autres clricatures des adorateurs de tout et surtout du Grand Rien : En ce cas, dirent les hommes simples, il n'est pas besoin de tant d'tudes ni de raisonnemens : montrez-nous quelle est la religion qui remplit le mieux le but qu'elles se proposent toutes.

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Cf. Le Pre Nol supplici aux ditions des Sables, sur la route de l'Eglise Pin-Balma, 1996.

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Yas`a est le nom de loint Jsus dans la Bible des chrtiens arabes et 's celui du prophte Jsus fils de la vierge Maryam, prcurseur, annonciateur du Prophte (sic).5

Littralement "le monsieur vque en breton.

Aussitt, chacun des groupes vantant sa morale, et la prfrant toute autre, il s'leva de culte culte une nouvelle dispute plus violente (opus cit, ci-aprs). Le Pre Nol, il sagit de Mo Crciun, Mo Creationis, le Vieux, lAnctre Cration 6, qui rde encore en l'antique fort de mythes roumaine dnomme Codru, la Vieille Fort, quelque forme grecque voire celtique du nom dnomination de l'arbre ou du chne, l'Arbre de Vie, l'arbre par excellence, le bois de qualit, dur comme fer, le robuste pilier qui soutient les Cieux. Chez les grecs antiques, le chne tait ddi, consacr Zeus ; il parlait aux initis et en ses divers bruits de feuillage et de rames au souffle du vent, les prtres rendaient oracles et prophtisaient. Le Supplici. Il sagit dun fait divers des annes daprs-guerre o les catholiques du coin, voulant reprendre du poil de la bte, au 24 dcembre 1951, avaient brl un mannequin du Pre Nol sur le parvis de la cathdrale de Dijon, en prsence de centaines denfants. Sacrilge. Excution dun usurpateur accus de paganiser la fte de Nol, alors mme que cest le christianisme qui a rcupr la fte du solstice dhiver, celle de la rgnrescence du Soleil et partant de la Nature, au profit de la naissance du Christ rgnrant non plus la nature et la vie terrestre mais lhumanit ternellement pcheresse davoir got, ds ses origines, la pomme du Savoir qui nomme, dirige les choses et la nature, les autres tres vivants, et pour finir modle la glaise et le sol mme de la Terre nourricire, autant dactions rserves aux dieux afro-asiates dentre Nil et Msopotamie. Aux temps antiques, la fin des Saturnales, les Romains brlaient le roi de la fte lautel du dieu-ogre insatiable qui avait dvor ses enfants7. Le nom de Saturne viendrait dit-on de *sa(e)tori-no qui signifierait : qui se manifeste dans l'impulsion . On rapproche le nom de Saturne de celui du dieu vdique Savitar qui, comme lui, l'origine serait un impulseur des biens, ide que l'on retrouve dans les rjouissances et les cadeaux des Saturnales, la priode qui prcde le solstice d'hiver, dont la fte de Nol est un lointain avatar, et qui avait pour but de ressouder la socit l'heure du solstice d'hiver, fte la fois du vieux dclin et du renouveau, d'une jeunesse6

du latin creatio, creationis , cration, gnration.

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Saturne une des anciennes divinits romaines, est un deus otiosus, dieu en sommeil une bonne partie de lanne ;lors des Saturnales, on le libre des bandelettes dont il est li le reste de lanne. Il a t assimil Cronos le pre infantophage de Zeus.

solaire retrouve. L'un des aspects de l'ternel retour des saisons. Puis avec le temps, logiquement, Saturne fut associ au cycle de l'agriculture. Inciter, vivifier, stimuler , Savitar est l'aspect actif du Soleil, le soleil en tant qu'nergie qui stimule le monde par opposition Srya qui est le soleil en tant que ralit matrielle, prsence au ciel, matre du ciel et de la lumire du jour. Principe primordial. Lun agit, lautre a cr et maintient. C'est une forme d'opposition ou de dualit, de complmentarit plutt, que l'on retrouve entre Ra8 et Aton. Ra celui qui fait , s'est cr lui-mme en se nommant, comme il cra l'univers et les lments de la vie en les faisant sortir du Noun, l'ocan primordial. Ra est galement le matre de l'anne. Le jour de l'an est le jour de la naissance ou de la renaissance de Ra, vers la mi-juillet correspond au dbut de la crue du Nil . Aton est le principe visible de Ra, ou d'Atoum-Ra, Atoum ou Toum signifierait quant lui l'Indiffrenci. Aton est la personnalisation du disque solaire. Ce n'est pas le dmiurge du monde, principe crateur de la Nature, mais son symbole et sa ralit prsente, son principe abstrait mais galement actif en tant que lumire. Le nom d'Akh-n -Aton ne signifie-t-il pas : clat d'Aton. lorigine, nous disent les amrindiens Pueblo, les Katchina volaient les enfants, mais les hommes les firent renoncer la condition quils puissent revenir, anne aprs anne, danser dans les villages, en masques et costums. Mais la place des enfants est ailleurs, non pas avec les masques et avec les vivants, mais avec les Dieux et avec les morts . Car en fait les enfants sont les vrais Katchina, la ralit du monde qui se renouvelle et sort du rve, loin de lillusion des masques ports par les plus anciens, les prochains mortels. La mascarade est triste et gaie la fois. On y fte les anctres et la continuit tnue de la vie dont les enfants sont les garants. La Toussaint est une autre rminiscence de la puissance vitale des morts, Hallowen dans les contres celtes du nord (non son affadissement contemporain ridicule, sa fade folklorisation) est un dialogue entre la Mort et les jeunes enfants, un dfi aux vivants vieillissants. Donner croire au Pre Nol, aux petits enfants nafs, ignorants ou tonns de la Mort, cest dire que le merveilleux existe et rappelle aux adultes quil faut croire en la Vie, voire en ses sens cachs. C'est une forme d'initiation, de transmutation des lments saisonniers, une transaction entre gnrations, entre initis et non-initis, et surtout, ceci marque la8

R ou R avec une voyelle longue, que nous rendons personnellement par Ra.

permanence dune opposition entre vivants et morts et autres anctres rincarns dans les jeunes enfants. L'ternelle renaissance en et par Mithra ou Mitra. L'enfant est innocence et oubli, un renouveau et un jeu, une roue qui roule sur elle-mme, un premier mouvement, une sainte affirmation affirme Zoroastre. Roue de la fortune ou roue de l'infortune, du malheur d'exister ? Symbole de la sagesse hindoue... Mais si lon en revient au Pre Nol Supplici comment ne pas noter que dans toutes les socits, les enfants sont une incarnation traditionnelle des morts , conclut Claude Lvi-Strauss, or tandis que les paens prient les morts, intercesseurs et protecteurs, les mnes du culte des anctres, les chrtiens prient pour les morts. Ils sont finalement moins croyants en lternit des mes, moins "mmorialistes" que les paens puisquils situent dans le prolongement de la pense juive raffirme par Saint Jean dans son Apocalypse que lternit nest pas encore advenue, est une eschatologie. 9 Nous avons dit lindiffrence de Lvi-Strauss vis--vis de la religion, du moins pour son quant--soi. Il aurait pu faire sienne tant d'ides de Volney 10, ce talentueux philosophe, moraliste et orientaliste, considr juste titre comme l'un des plus puissants prcurseurs des ethnologues, anthropologues et sociologues des XIXe et XXe sicles, doubl d'un talent d'crivain, voire de pote, auteur injustement oubli. Dans Les Ruines ou Mditations sur les rvolutions des empires, par M. Volney, dput l'Assemble nationale de 1789 , dont l'dition originale fut publie Genve en 1791 11 nous rencontrons de trs nombreux morceaux de choix comme celui-ci :

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ne pas confondre avec la scatologie judaque qui fait baigner le mauvais frre Jsus dans un chaudron dexcrments brlants pour toute ternit.10

Volney est un pseudonyme, un nom de plume form avec le Vol de Voltaire et le Ney de

Ferney. De son vrai nom : Constantin, Franois Chasseboeuf de La Giraudais, n Craon en Anjou en 1757, mort Paris en 1820, comte et pair de France, personnage fortement misanthrope et misogyne. sixime [et derniere] dition corrige de nouveau par lauteur, Baudouin frres, Paris, 1820.11

Maintenant, si vous rsumez lhistoire entire de lesprit religieux, vous verrez que dans son principe il na eu pour auteur que les sensations et les besoins de lhomme ; que lide de Dieu na eu pour type et modle que celle des puissances physiques, des tres matriels agissant en bien ou en mal, cest-dire en impressions de plaisir ou de douleur sur ltre sentant ; que, dans la formation de tous ces systmes, cet esprit religieux a toujours suivi la mme marche, les mmes procds ; que dans tous, le dogme na cess de reprsenter, sous le nom des dieux, les oprations de la nature, les passions des hommes et leurs prjugs ; que dans tous, la morale a eu pour but le dsir du bien-tre et laversion de la douleur ; mais que les peuples et la plupart des lgislateurs, ignorant les routes qui y conduisaient, se sont fait des ides fausses, et par-l mme opposes, du vice et de la vertu, du bien et du mal, cest--dire de ce qui rend lhomme heureux ou malheureux ; que dans tous, les moyens et les causes de propagation et dtablissement ont offert les mmes scnes de passions et dvnemens [sic], toujours des disputes de mots, des prtextes de zle, des rvolutions et des guerres suscites par lambition des chefs, par la fourberie des promulgateurs, par la crdulit des proxlytes, par lignorance du vulgaire, par la cupidit exclusive et lorgueil intolrant de tous : enfin, vous verrez que lhistoire entire de lesprit religieux nest que celle des incertitudes de lesprit humain, qui, plac dans un monde quil ne comprend pas, veut cependant en deviner lnigme ; et qui, spectateur toujours tonn de ce prodige mystrieux et visible, imagine des causes, suppose des fins, btit des systmes ; puis, en trouvant un dfectueux, le dtruit pour un autre non moins vicieux ; hait lerreur quil quitte, mconnat celle quil embrasse, repousse la vrit qui lappelle, compose des chimres dtres disparates, et rvant sans cesse sagesse et bonheur, sgare dans un labyrinthe de peines et de folies. () Ainsi parla lorateur des hommes qui avaient recherch lorigine et la filiation des ides religieuses

Et les thologiens de divers systmes raisonnant sur ce discours : Cest un expos impie, dirent les uns, qui ne tend rien moins qu renverser toute croyance, jeter linsubordination dans les esprits, anantir notre ministre et notre puissance : cest un roman dire les autres, un tissu de conjonctures dresses avec art, mais sans fondement. Et les gens modrs et prudens ajoutaient : Supposons que tout cela soit vrai, pourquoi rvler ces mystres ? Sans doute nos opinions sont pleines derreurs ; mais ces erreurs sont un frein ncessaire la multitude. Le monde va ainsi depuis deux mille ans, pourquoi le changer aujourdhui ? Et dj la rumeur du blme qui slve contre toute nouveaut, commenait de saccrotre, quand un groupe nombreux dhommes des classes du peuple et de sauvages de tous pays et de toute nation, sans prophtes, sans docteurs, sans code religieux, savanant dans larne, attirrent sur eux lattention de toute lassemble ; et lun deux, portant la parole, dit au lgislateur : Arbitre et mdiateur des peuples ! depuis le commencement de ce dbat, nous entendons des rcits tranges, inouis pour nous jusqu ce jour ; notre esprit, surpris, confondu de tant de choses, les unes savantes, les autres absurdes, qugalement il ne comprend pas, reste dans lincertitude et le doute. Une seule rflexion nous frappe : en rsumant tant de faits prodigieux, tant dassertions opposes, nous nous demandons : Que nous importent toutes ces discussions ? (pages 257 260) * Du jardin des Hesprides, J'ai jet, moi la Discorde, "Une pomme la plus belle !" Pomme d'or Puis tant de pommes du ciel mais Ont tomb de lescarcelle Du Dragon quand Hrakls Le chassa

Enchanant, pomme de coing, Pomme en noix de galle au chne, Coin de pin, pomme de chien La cruelle12 La Concorde, en dsespoir, Transforma les autres fruits En oursins, pommes de mer, Ou de terre : En des choux, laitues pommes, "Artichau" dont la bont Sur la carde a excd, Dit Par ; De grenade ou bien dorange, De citron, la pomme rose, En pomme de paradis 13 Africain. Du ct d'Amerigo, La moisson fut consquente Et le vol de ses contres Achev. Emmlant le Bien, le Mal Et la Mort avec la Vie, La tomate et la patate 14 Ont souri ; Car en nos pays lointains, Nous rappelle un Olivier 15 Qui n'a pas vcu en serf12

Fruit mortel de la belladone mandragore. Ancien nom ou surnom de la banane.

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Comme plusieurs fruits ou lgumes (tubercule en particulier) d'Amrique le reste de la plante est toxique ou mme, sous certaines conditions, les parties habituellement comestibles.15

Il s'agit d'Olivier de Serres cf Le Thtre dAgriculture et mesnage des champs, dOlivier de Serres, seigneur du Pradel, dans lequel est reprsent tout ce qui est requis et ncessaire pour bien dresser, gouverner, enrichir et embellir la maison rustique premire dition en 1600 .

Ni en serre : Oui ! les Pommes d'Amour, De merveille, et dores, Servent-elles couvrir cabinets et tonnelles ; Et la Vie Ainsi va, en raison d'esprer, Lors que Sol et Nature Et lEau donnent des ailes. *

II Le Sage merveillIdylle amre. De l-haut, de l-bas, de tout l-bas si loin, ou dici-bas De Prs et de Loin ou plutt daussi loin que la Matrix a enseveli ses restes, trs loin mme ounkn dit-on en langue nambikwara du dialecte latound dit-on, ou disait-on ? si Loin du Brsil, et plus encore du Mato Grosso, au cur du continent enchant des Cros, rminiscence de La Pense Sauvage, de la pense tout court, de celle dont Claude LviStrauss, pote un peu froid et distant, non rserv et pudique, qui disait en digne hritier de lOrdre du Soleil Levant et en substance : les religions sont des reprsentations comme les autres, des images de l'humanit pensante, des rites curieux, moraux, souvent intransigeants, au mieux des rves ou autres utopie ad patres auxquels je dnie toute spcificit supra-humaine. Claude nous dit encore : Je ne verrais aucun inconvnient appeler Dieu une sorte de pense diffuse dont on concevrait qu'elle soit rpandue dans tout lunivers et qui se manifesterait des degrs diffrents chez les animaux suprieurs et infrieurs, dans les plantes mme, jusquaux plus modestes. (La Croix, janvier 1979) La pense est une fleur, plus fleur des champs que fleur de culture, plus Flor des potes qu'oignon de tulipe calibr, transmut, voire bulbe infertile, bubon oghmis. Pitoyables coopratives agricoles ! conservateurs et diffuseurs d'espces rares ou ngliges, bouilleurs de cru du cru, oui, la Pense est Sauvage. Les mnes, l'me-sa 16 de quelque anctre nambikwarien murmure, glisse, coule au loin, sa question lancinante et liquide : Vous semblez fuir semblez fuir, tout ce qui a trait ce qui a trait la politique ?! Claude Lvi-Strauss, alerte encore, se reprenant bien vite, rameutant ses esprits :-sa suffixe catgoriel de la typologie agglutinante du mamaind qui runit : liquide, gaz, son, parole, air, vent, et plus gnralement tout ce qui coule.16

Oui, je le fuis [ je le fuis long silence]. Jai beaucoup fait de politique la SFIO tant jeune. Je me suis retrouv secrtaire gnral des tudiants socialistes vingt ans. Je me sentais engag, parce que javais la navet de croire quen raisonnant bien on peut fabriquer une socit bonne. Mais je me suis tromp double titre. Premirement avec lide quil suffisait de bien raisonner et davoir les ides claires pour concevoir et raliser la socit idale. Deuximement, jtais pacifiste en 1938. Quand on sest tromp ce point l, il ny a plus quune chose faire : se taire pour le restant de sa vie. Pas plus que lordre du monde, lordre social ne se plie aux exigences de la pense. 17 Cest lindiffrence bouddhique. Mais qu'on l'entende bien, c'est cette indiffrence de surface qui faisait dire Han Ryner en son Petit Manuel Individualiste (de 1903... plus dun sicle, dj!) : La socit est invitable comme la mort. Sur le plan matriel, notre puissance est faible contre de telles limites. Mais le sage dtruit en lui le respect et la crainte de la socit comme il dtruit en lui, la crainte de la mort. Il est indiffrent la forme politique et sociale du milieu o il vit comme il est indiffrent au genre de mort qui l'attend. Et il ajoutait : Le sage sait qu'on ne dtruit ni l'injustice sociale ni l'eau de la mer. Mais il s'efforce de sauver un opprim d'une injustice particulire, comme il se jette l'eau pour sauver un noy. Ou encore : Le sage remarque que, pour exercer une action sociale, il faut agir sur les foules, et qu'on n'agit point sur les foules par la raison, mais par les passions. Pour Claude Lvi-Strauss, c'est plus prcisment la contemplation et l'merveillement et le partage sous forme crite, photographique parfois, dessine (mais pour lui seulement), et la grande tolrance, la tolrance suprme et dtache. C'est in fine lextase et la saine rvolte cologique, car

Fusion de deux extraits dentretiens LExpress (de mai 1988) et au Quotidien de Paris (du 2 octobre 1989). Il aurait pu dire la suite de Georges Souls plus connu sous le nom de17

plume de Raymond Abellio, ingnieur et crivain gnostique, qui lui vira collaborateur, mais qui auparavant milita la Sfio : Avec une quipe de la section socialiste, je passai une partie de mes nuits coller des affiches. (in Ma Dernire Mmoire, 1971-1980).

aux yeux de Bouddha, toutes les espces se valent dans la nature ; et lhomme ny a aucun privilge. merveillement, motions vitales, motivit, motions, dsir insatiable de toujours faire de la moindre tirolhanbiin-kshr (vieille femme qui ne peut plus faire lamour), la tendre et belle monodwinu-kshr (jeune femme dsirable). Les Nambikwara, d'ailleurs, nont-ils pas quun seul mot pour dire "jeune" et "joli" et quun autre pour dire "vieux" et "laid" ? Lattitude nambikwara envers les choses de lamour peut se rsumer dans leur formule : tamindige mondage, traduite littralement, sinon lgamment : Faire lamour, cest bon. 18 Jai dj not latmosphre rotique qui imprgne la vie quotidienne. Les affaires amoureuses retiennent au plus haut point lintrt et la curiosit indignes ; on est avide de conversations sur ces sujets, et les remarques changes au campement sont remplies dallusions et de sous-entendus. Les rapports sexuels ont habituellement lieu la nuit, parfois prs des feux du campement ; plus souvent, les partenaires sloignent une centaine de mtres dans la brousse avoisinante. Ce dpart est tout de suite remarqu, et porte lassistance la jubilation ; on change des commentaires, on lance des plaisanteries, et mme les jeunes enfants partagent une excitation dont ils connaissent fort bien la cause. Parfois un petit groupe dhommes, de jeunes femmes et denfants se lancent la poursuite du couple et guettent travers les branchages les dtails de laction, chuchotant entre eux et touffant leurs rires. Les protagonistes napprcient nullement ce mange dont il vaut mieux, cependant, quils prennent leur parti, comme aussi supporter les taquineries et les moqueries qui salueront le retour au campement. Il arrive quun deuxime couple suive lexemple du premier et recherche lisolement de la brousse. Pourtant, ces occasions sont rares, et les prohibitions qui les limitent nexpliquent cet tat de choses que partiellement. Le vritable responsable semble tre plutt le temprament indigne. Au cours des jeux amoureux auxquels les couples se livrent si volontiers et si publiquement, et qui sont souvent audacieux, je nai jamais not un18

Plus prcisment : je fais l'amour, c'est bon. Tamindige, se dcompose littralement en "ta" (je, moi) suivi de "min" (pre, avec apocope du son "in" ) clos par les suffixes de temps et de verbe : di-g. cf Garvin Paul L. Esquisse du systme phonologique du Nambikwara-Tarunde. In Journal de la Socit des Amricanistes. Tome 37, 1948. pp. 133-189.

dbut drection. Le plaisir recherch parat moins dordre physique que ludique et sentimental. Cest peut-tre pour cette raison que les Nambikwara ont abandonn ltui pnien dont lusage est presque universel chez les populations du Brsil central. En effet, il est probable que cet accessoire a pour fonction, sinon de prvenir lrection, au moins de mettre en vidence les dispositions paisibles du porteur. Des peuples qui vivent compltement nus nignorent pas ce que nous nommons pudeur : ils en reportent la limite. Chez les Indiens du Brsil comme en certaines rgions de la Mlansie, celle-ci parat place, non pas entre deux degrs dexposition du corps, mais plutt entre la tranquillit et lagitation. Toutefois, ces nuances pouvaient entraner des malentendus entre les Indiens et nous, dont nous ntions responsables ni les uns ni les autres. Ainsi, il tait difficile de demeurer indiffrent au spectacle offert par une ou deux jolies filles, vautres dans le sable, nues comme des vers et se tortillant de mme mes pieds en ricanant. Quand jallais la rivire pour me baigner, jtais souvent embarrass par lassaut que me donnaient une demi-douzaine de personnes - jeunes ou vieilles - uniquement proccupes de marracher mon savon, dont elles raffolaient. Ce texte tout empli d'motions, de sensibilit, de sensualit fleur de peau, de compassion, d'adhsion contenue, d'amour pour des tres perdus dans la nature si sauvage texte de vrai pote est extrait de Tristes Tropiques (1955). Latmosphre y est incroyablement nave , paisible et quasiment dans lordre des choses de la philosophie du bon sauvage insouciant et joueur de Jean-Jacques, si loin des Tropiques du Cancer et du Capricorne dun Henry Miller urbain et quelque peu mcanique et amoral (ce que ne sont jamais les primitifs qui vivent entours de tabous les plus divers). Pourtant, nous y sommes quand mme un peu, du ct du tropique du Capricorne en pays nambikwara et du ct du tropique du Cancer, en cette contre maritime de charme sauvage et serein de Big Sur, El Pais Grande del Sur californien. Mais l'cart des rares villas de colons, que reste-t-il aujourd'hui des Esselen, Ohlone et Salinan, ces trois tribus amrindiennes dont les langues sont pour l'essentiel mortes en nos jours de

morne dcroissance morale et de l'Esprit et dont les vestiges archologiques montrent qu'ils y ont vcu pendant des milliers d'annes en nomades, et qu'ils vivaient de la chasse en des forts de squoias depuis longtemps exploits, dtrites, abattues par les assassins sacrilges de la Vie.

III La dbandade matrialisteArgent, Veau d'Or, conomie frileuse ou folle, esprit destructeur, utilitaire, mentalit non partageuse, technique tout autant au service du mal, de l'avilissement ou de l'abtissement, que du bien, qu'tes-vous l'chelle du monde, je veux dire de lUnivers ou du simple Soleil, le solitaire, notre bienfaiteur ? Lorsque larc-en-ciel des cultures humaines aura fini de sabmer dans le vide creus par notre fureur, tant que nous serons l et quil existera un monde montrant la voie inverse de notre esclavage, la contemplation procurera lhomme lunique faveur quil sache mriter. Contempler un minral, respirer le parfum dun lis, changer un clin dil alourdi avec un chat. Rien qui croise lhumain. (Tristes Tropiques) Esprit salutaire de Claude Lvi-Strauss : cette heure de dliquescence o le sicle se dissout dans les brouillards des dcadents , comme l'crivait Francis Maratuech 19, en ce cinquantenaire de dconscration, de dcommmoration, dun travail de mmoire lenvers , dans le silence blafard et la nuit noire de la nullit de pense des mdiocres imposteurs, bahis avins du sang des masses, qui nous dirigent vers le gouffre profond de notre dconfiture humaine et terrestre, au Nirvana des mes suprieures, motives et brises, jai rencontr un bon, nous dit Claude. Un samaritain note de trs bon ton, de trs bon teint, un samaritain 20 mdecin des pauvres ("mdecin des pauvres, le salopard", ont toujours ruct ses petits contempteurs riquiquis) ; il a nom Ferdinand Bardamu.

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dans la revue le Feu Follet dont il tait le directeur-fondateur (in volume 1885-1886).

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Et non pas un Saint Maritain, ni un Jacques Maritain qui, lev dans un milieu anticlrical, eut pour parrain, ainsi que sa femme d'origine juive russe et uktainienne, Lon Bloy.

Il chante, il nous en musique21 au ton juste le foutu pote (comme disait Gilbert-Lecomte de lun de ses amis). coutons les puissantes scansions de notre dsespr rvasseur bardique , cet autre tre bris dhumain, cet espce de pouilleux de la trempe de Nerval, Nietzsche, Bloy (d'autres finalement mystiques et tant potes, mais d'autant de mystres), en sa rage impuissante dcorch-vif dont la conscience est taraude dinfinie dsesprance, ce gnie rigodon, ce damn prophte : Le petit chat / mutin, lutin, / tout bondissant / devant la porte, / sy reconnat / bien mieux que nous / dans les dix mille / secrets du monde. / Nous sommes devenus les plus stupides, les plus emmerdants de tous les animaux crs. Pesanteur matrialiste, ankylose dogmatique pontifiante fins utilitaires. Tout nous condamne. Nous ne jouons plus avec rien, nous utilisons tout pour plus vite tout dtruire. 22 Limagination matrialiste nous condamne linfini dans la destruction, la philosophie matrialiste, la posie matrialiste, nous mnent au suicide par la matire, dans la matire Les hommes pris de matire sont maudits. Lorsque lhomme divinise la matire il se tue. Les masses dspiritualises, dpotises sont maudites. Monstrueuses cafouilleries, virulentes anarchies cellulaires, voues ds le chromosome toutes les cancrisations prcoces, leur destin ne peut tre quune dcomposition plus ou moins lente, plus ou moins grotesque, plus ou moins atroce. Les Mystiques des Rpubliques ne proviennent daucune me avouable, ce sont les produits honteux de ttes crapautiques, les jus de quelques pileptodes, de quelques camoufls satrapes en complot de nous dtruire. Pourquoi nous le dissimuler ? Dmocraties Rpubliques faillies, tout autant de lupanars dpiceries complotiques centuple fond, filiale de la grande imposture mondiale, de la fantastique carambouillerie o tout ce que nous21

Extrait du Littr : MUSIQUER 1V. n. Terme familier. Faire de la musique. Aprs dner on fit apporter de la musique ; nous musiqumes tout le jour au clavecin du prince, J. J. ROUSS. Conf. VIII. 2V. a. Mettre en musique. Il n'y a pas six vers de suite qu'on puisse musiquer, DIDEROT, cit par CASTIL BLAZE, l'Art des vers lyriques, p. 103. Presque tous les matres ont musiqu le Demofonte, l'Artaserse, la Didone, CASTIL BLAZE, l'Opra italien, Introduction.22

Tous les paragraphes et extraits qui suivent sont des morceaux choisis de Cline.

apportons defforts, de valeur, despoirs, vient culbuter aussitt, se rsoudre dans linfection, lordure, la charognerie perdus de matrialisme, passionns de choses , de luxe, de pondrable, de raisonnable, de bouffable, de roulable, de vendable, de ventrable, la matire nous a mufliss, avilis, banaliss, ahuris, affadis, asservis en dgueuler de nous connatre. Quoffrez-vous ? Que promettez-vous ? Je vous offre, cul-bas, des autos ! des radios ! du plein la fraise ! plein la cravate ! plein les mires ! plein les miches ! plein les oues ! plein la mitrailleuse ! plein la jalousie ! plein la spulture ! Vinasse, Borniol et Circenses. Le sympathique et lucide Boris Vian en fit son commentaire, quen son style, il chantonne encore de l-haut, ou des Enfers de temps autre. Cest la Complainte du Progrs : Autrefois pour fair sa cour / On parlait d'amour. / Pour mieux prouver son ardeur / On offrait son cur / Maintenant, c'est plus pareil / a change, a change / Pour sduire le cher ange / On lui glisse l'oreille : / Ah Gudule, / Viens m'embrasser, / Et je te donnerai.../ Un frigidaire, / Un joli scooter,/ Un atomixer / Et du Dunlopillo ; / Une cuisinire / avec un four en verre / Des tas de couverts / Et des pells gteau ! / Une tourniquet-teu / Pour fair la vinaigret-teu / Un bel arateur / Pour bouffer les odeurs / Des draps qui chauffent, / Un pistolet gaufres / Un avion pour deux / Et nous serons heureux ! / Autrefois s'il arrivait / Que l'on se querelle / L'air lugubre on s'en allait / Laissant la vaisselle / Maintenant que voulez-vous / La vie est si chre / On dit : "rentre chez ta mre" / Et on se garde tout : / Ah Gudule, / Excuse-toi, / Ou je reprends tout a... / Mon frigidaire, / Mon armoire cuillres / Mon vier en fer, / Et mon pole mazout / Mon cir-godasses, / Mon repasse-limaces / Mon tabouret--glace / Et mon chasse-filous ! / La tourniquet-teu / fair' la vinaigret-teu / Le ratatine-ordures / Et le coupe-friture / Et si la belle / Se montre encore rebelle / On la fiche dehors, / Pour confier son sort.../ Au frigidaire, / l'efface-poussire / la cuisinire, / Au lit qu'est toujours fait / Au

chauffe-savat's, / Au canon patates / l'ventre-tomate, / l'corche-poulet ! / Mais trs trs vite / On reoit la visite / D'une tendre petite / Qui vous offre son cur / Alors on cde / Car il faut qu'on s'entraide / Et l'on vit comme a / Jusqu' la prochain fois / Et l'on vit comme a / Jusqu' la prochain fois / Et l'on vit comme a / Jusqu' la prochain fois ! J'y vois l quelque rclame, quel publicit en noir et blanc d'une revue jaunie des annes cinquante, jy retrouve la trivialit bate et beaux costumes des personnages bouffons, en particulier la tortillante, moule en son tailleur, hrone du film Mon Oncle de Jacques Tati, dambulant sur quelques plots de pierre sems sur la pelouse de son minuscule jardin dagrment de son pavillon "moderniste" la cuisine nickel davant-garde et porte du garage se rsolvant en divers presse-boutons lectriques. Mais le prophte embraye de nuevo : Le fanatisme objectiviste nous tue. Lhomme vole ? mais cest un tron qui senvole, lesprit ne senlve pas, jamais la pense ne sest tenue plus basse, plus rampante, moins aile, moins dlivrante. Spirituellement, nous sommes retombs zro, atterrants, ennuyeux prir. Tous nos Arts le prouvent Obscnes, grotesques sans le savoir, trs pompeusement, machinalement. Les lamas dans toute leur crasse tourbillonnent aussi leurs petits moulins prires, machinalement, majestueusement. Foutre des posies mcaniques ! Posie est morte avouons-le ! Tous nos Arts gisent grotesques, lourds rebuts raisonnants, surchargs dastuces malheureuses, de mufleries tragiques. Nos socits croulent sous les richesses matrielles, mais elles crvent de pauvret spirituelle. Petits moulins prires et autres moulinettes des thurifraires liturgiques encenseurs du progrs. Encensoir, ostensoir et matin du grand soir, au rendez-vous des imbciles, fadaise diste et chrtienne. Et en son style plus tendre et plus prcieux, plus rflchi, plus lent, plus mthodique, moins viscral, prcieux, mais tout aussi dcid et clair, Abel Bonnard alors dchu de lAcadmie franaise :

Grand changement dans l'esprit de l'Humanit divise anciennement en nomades et en sdentaires ! Aujourd'hui, c'est le sdentaire mme, lui qui ne peut rester/demeurer tranquille et ressent le dsir irrpressible de se dplacer. Il ne faut pas confondre, cependant, ce dsir avec le got du voyage, qui est chose distincte. Le plaisir du voyage consiste aller en des villes lues d'avance, selon l'ide que l'on a d'elles et la jouissance/plaisir que l'on espre ressentir les visiter. Il importe peu, le chemin qu'il y aura parcourir, car le meilleur agrment est celui des arrts. En revanche, ceux qui au lieu de voyager se dplacent, recherchent seulement le mouvement en lui-mme. De leurs itinraires est exclu l'ide de toute prfrence et de programme. Ils se meuvent pour se mouvoir sans aucune autre finalit. Ceci suffit pour nous montrer jusqu' quel point nos contemporains, bien qu'ils croient satisfaire leurs gots, obissent cette tyrannie invisible qui se nomme l'esprit du temps. () Quelque chose d'analogue arrive aujourd'hui. Tout le monde se sent entran par un rythme frntique. Mais la diffrence des danseurs de la lgende, on ne voit pas le sorcier qui joue de la flte. C'est l'esprit du monde nouveau. () Le pire de cette vie actuelle est que les forces uniquement matrielles brisent par leur action continue des modes de vie vnrables ; de mme, mesure qu'au XVe sicle l'artillerie rcemment invente battit en brche les solides forteresses du Moyen ge. Il ne disparatrait pas celui qui dit que ce changement est fatal et fatal aussi l'abaissement de la valeur de l'homme que cela en rsulte ; d'autres se demandent s'il y a moyen d'empcher une telle dgradation. Ce serait trs difficile. Pour le tenter, cela, il y aurait se reprsenter en premier le pril en toute son extension et aprs dployer une nergie inbranlable.

La question reste ainsi pose et l'homme actuel doit dcider s'il se laissera mettre en droute : roul par les facteurs matriels d'une force accablante, ou s'il essayera de les dompter, les soumettant son me. 23

Extrait de larticle El automovil, paru dans La Vanguardia Espaola du mardi 27 septembre 1955. Traduit par nous-mme.23

IV Pauvres potesLe pote autrefois a tout cr. Le pote est un dmiurge. Dmiourgos, dmi-ourgos, le (grand) architecte, le (dieu) ouvrier. "Poie" signifie "faire" dans les sens de "crer, faonner, former, fabriquer" ; le "poits" (latin : poeta) est le crateur, c'est la langue grecque antique qui le dit, l'affirme et le maintient, le pote plus encore que le simple ade, troubadour et chantre antique ou mme que le philosophe, et pourtant ; " poisis" (latin : poesis) n'est rien que " la cration, l'acte de crer" et "to poima" (latin : poema) est "la chose faite par excellence, l'uvre". Le pote est celui qui fait, qui cre, il est aussi celui qui sait, qui a devin ou rgl lincomprhensible, qui dtient le sens de la vie. La vrit et la beaut. Cest cet tre bicphale, mi ade ni devin, reli la fois la tribu , ou la cit antique, et au dieu suprme de la cit et partant au panthon des cieux, abmes terrestres ou aquatiques, faits demprunts et remplois divers comme pierres et briques de vieilles urbanits, faits de manifestations diffres, revisites, faits doubli et de mort des dieux, de renaissances, dternels retours. Le pote autrefois fut aussi le druide, tre intgralement doralit qui voyait en lcriture une source absolue de malheur et de maldiction comme certains primitifs voient dans le miroir ou lappareil photographique un moyen diabolique de lui voler son image et partant son me et sa pense. ! les plaques votives qui nous ont livr des bribes de notre vieille langue gauloise, ces plaques votives des fontaines consacres, que dites-vous sinon la malveillance ou parfois la rdemption divinatoire recherche dsesprment en prjugs ! Mais que signifie druide en langue gauloise sinon : celui qui a la Science de lArbre 24 science magique de larbre sacr et consacr, ceint de gui, sperme-poison des dieux. Chez les gaulois, les druids taient rien de moins que ceux qui possdaient la connaissance,

24

De "dru", arbre et "wid", connatre.

le savoir de l'Arbre 25 par excellence, le chne : arbre du Monde, pilier divin de l'univers et du ciel. Le chaman lui-mme en son genre, en est un, dtre dexception, sinon un pote Comme le rappelle notre Claude en ses Tristes Tropiques, oui tristes car il en avait compris tout le malheur, un certain bonheur perdu, dgnr, bris et toute lillusion, en sa prime majorit, dun paradis rousseauiste qui nexiste nulle part : Les hommes ne sont pas tous semblables, et mme dans les tribus primitives, que les sociologues ont dpeintes comme crases par une tradition toute-puissante, ces diffrences individuelles sont perues avec autant dapplication que dans notre civilisation dite 'individualiste'. Le Chaman est la prhistoire de la culture, pote, artiste, mdecin, demidieu sacr, il fut de ceux qui dcorrent au fond du gouffre clair de torches, aux prmices infernales, la porte des entrailles terrestres, les parois de Lascaux, d'Altamira, ou encore des falaises australes ou sahariennes et autres lieux d'oublis, perdus pour nombre d'entre eux. Ah ! Valle des Merveilles graves emparque mais malgr tout dnature, rgulirement vandalise par de civiliss curieux crtins. Prhistoire de l'Art occidental, livre considrable d'Andr Leroi-Gourhan. uvre de pote, son auteur tait sonneur de cornemuse bardique ses heures qui taient celles de lveil aux aurores. Mais c'est une autre histoire. En des temps plus rapprochs, le chaman ou son double, fut de ceux qui crrent les dieux des cits, les vieux mythes potiques, mais aussi l'arithmtique, l'astronomie, l'criture, lagriculture raisonne mais aussi sans doute les castes, les classes sociales et les tats ; et j'en passe, enfin le dbut de nos malheur de civiliss plus ou moins urbaniss, plus ou moins esclavagiss. Dans La Pense Sauvage, Lvi-Strauss nous signale : Quand nous commettons lerreur de croire le sauvage exclusivement gouvern par ses besoins organiques ou conomiques, nous ne prenons pas garde quil nous adresse le mme reproche, et qu lui, son propre dsir de savoir parat mieux quilibr que le ntre.25

Tandis qu'en grec ancien, "druas, druados" est la dryade, la nymphe attache un arbre.

Besoin est-il de rappeler la justesse dune telle pense de civilis qui a tout prendre derrire la technique, les machines, lhoraire de trains, les files aux caisses des supermarchs, les immeubles dmesurs et aux autres normes, les tlphones portables et les autoroutes qui ne mnent rien de bon et voyagent du banal est encore moins libre dans sa marche et dmarche vitales que le premier venu des gueux primates de lespce de lhomo erectus ; non ! des nobles et fiers Bororo par exemple aux panaches colors faits de plumes darara,26 autrement humains, robustes et beaux que la dliquescente espce doies gaves des cits du progrs poussant pniblement un chariot de victuailles industrielles douteuses ou aseptises, des tonnes de futurs excrments dbiles. Moins esclave de ces tabous que des saisons, du don des Cieux et de la Terre, le primitif se rit, se moque, ignore ou juge fou le pire esclavage dhomme homme qui fut et qui a nom pognon, thune ou pze et j'en passe et partant salariat, cet esclavage librement consenti. Comme lcrivait Boris Vian : Le travail ? Cest horrible, cela rabaisse lhomme au rang de la machine . L-bas mme, en ces contres lointaines, ds quil arrive dans le Nouveau Monde en 1935, o il a ses premiers contacts avec les Indiens Caduvo et Bororo, Lvi-Strauss constate les ravages causs par lOccident : Amrindiens en haillons, populations dcimes par les pidmies et les massacres, nature dgrade. linverse, le spectacle des magnifiques Bororo, le renforce dans lide que nous avons dtruit une vie splendide et que le colonialisme est un chec pour lhomme, d'ailleurs tant pour le civilis que pour le sauvage . Le colonialisme est toujours une dfaite pour les deux camps, l'immigration une autre forme de colonisation encore plus insidieuse et perverse, une invasion feutre, la dfaite dune civilisation et dune culture quand les lments allognes nont mis le pouvoir ni lenvie dintgrer un autre monde, une autre culture si ce nest pour eux de faire dune terre daccueil illusoire un eldorado dentourloupe. Et que dans le mme temps, et plus encore des indignes amorphes contemplent bats et laissent faire annihils contents, bahis de lesbroufe, satisfaits de leur propre niaiserie et dcadence si peu virile qui se laisse insulter tour de bras des pires travers de la socit. Oui, il est de bon ton de traiter de raciste, de mauvais frre celui qui accueille, donne et subit, qui na rien demand ; celui qui ne sy26

ara, arar en langue tupi

reconnait plus dans ses sportifs mercenaires ou dans ses hommes politiques interlopes, si peu incrusts dans la terre, le terreau national et continental que les profiteurs allognes dnomment sans vergogne fumier tout en y nageant. Aux deux bouts des classes sociales : mme et unique internationale dexploiteurs et de dominateurs. Chacun sa manire. Quand, de plus, ses allognes entendent mme droger et saffirmer en tant que communauts ethniques et religieuses spares, ou pire encore : associations de couleur ! dernier scandale. Pendant ce temps, les cultures rgionales finissent de mourir petit feu, les communauts locales, les communauts de travail de plus en plus dqualifi ou parcellis, sans mtier, polyvalentes dans la dbine, domines par la machine et les logiciels, croupissent dans lindividualisme, tandis quailleurs les socits et les peuples primitifs moisissent de plus en plus dans lacculturation. Oui, alors que les lments les plus dcids des socits tribales, claniques et de type fodal investissent les curs de la dite civilisation la recherche dune part du gteau, qui de jour en jour samoindrit, se liqufie entre les doigts des puissants, les membres des socits dites primitives errent comme des gueux sur une Terre qui les oublie. moins que ce ne soit eux-mmes qui oublient leur Desse. Dcatie la desse. Abandonne, pille, ranonne ; dfigure des rides, sillons, billons des hommes qui ont perdu tout respect de la nature, de la Terre et deux-mmes en tant que dpositaires de la Pense et de lHumanit rflchies. Ah ! lirrflexion des sots savants ! que nous serons, nous et nos descendants, amens subir un long temps, comme les dnommait et le prtendait Axelos !!! les belles abmes venir, Ah ! le beau dsert en perspective, uniforme et mondialis Oh, Malthus, le flau dune plthore dtres humains, primates discutables ! Il y a du Pascal ou du Bloy en cette adoration mystique de ce qui seul lve lhumanit, et la fait sortir de sa gangue de glaise, de ce Respect sans dieux chez Claude pour la sacraliser, mais tout en amour, beaut, vrit, lans vitaux. Il est tel en son anthropologie, en sa quasi archologie ethnographique ou ethnologique, de la ligne, de la mme trempe que le chaman des peintures rupestres, le pote ou le druide divin qui dsigne les choses et les actions visibles et invisibles, qui compte, tudie le ciel, ordonne, modle, rcre en permanence sa manire diffuse, multiforme, diversifie et riche, les vieux mythes du dieu, des dieux de la Nature et de lArt. Il y a

du Hello mme en lui, Hello qui affirmait que lhomme qui aime nest jamais mdiocre , 27 ou encore que les mots sont du pain ou du poison le Cru et le Cuit, que du Miel aux Cendres celui qui aime la grandeur et qui aime labandonn, quand il passera cte de labandonn reconnatra la grandeur, si la grandeur est l rsum de la vie dethnoanthropologue de notre Claude. Lvi-Strauss aimait lhumanit, l'aimait trop si l'on peut dire, du moins celle des origines, si tant est que lon puisse lapprhender encore, partant lhumanit sauvage et primitive (sic), qui nest ni sauvage ni si primitive que a. Jaimais la musique galement, qui fut lautre moiti de ma vie , nous souffle aussi Claude qui sen nourrissait, sen vivifiait, se supportait, se stimulait par la musique tout en crivant ; tels firent, font, feront tant dautres crivains des temps dits modernes gramophones, phonographes, magntophones, postes galnes et autres instruments du mme genre. Lvi-Strauss navait pas lamour frelat.28 Il nous parut quelque peu lcart, misanthrope et dsabus, inconsolable, ranon de la Sagesse, vers la fin de sa vie, mais sans doute encore tonn, merveill par le Monde noubliant jamais, comme le disait Bardamu que sans Posie, sans ferveur altruiste brlante prtendre vouloir changer le monde des humains, pour le bonifier est un leurre grotesque, une mascarade macabre, car seul compte bonne folie, avant tout, par-dessus tout Posie. Lvi-Strauss a pass sa vie nous dire et redire que notre esprit est dans la nature, non ct, quil ny a pas de diffrence entre celui qui observe et veut comprendre et le monde observ. Que les hommes ne sont pas des dieux, quils sont uniquement les tmoins dmunis dune nature omnisciente. Que linfime tre terrestre dnomm tre humain est embarqu en une arche terrestre, sous le globe du ciel infini, fait dun espace-temps si limit lchelle de lUnivers. Lvi--Strauss na rien dire sur le destin de lhomme, il dcrit sa manire, dcrit lessence de lhomme, nattend rien dautre de lui. Il affirme que les religions ne sont que reprsentations et que lme de lhomme est insondable. Linguiste, il rappelle quil ny a pas dhomme, en nul lieu sans langage articul, tout27

Voir sa quadrilogie (magique) Mythologiques, t. I : Le Cru et le Cuit, Paris, Plon, 1964. ; t. II : Du miel aux cendres, Paris, Plon, 1967. , t. III : L'Origine des manires de table, Paris, Plon, 1968. ; t. IV : L'Homme nu, Paris, Plon, 1971.28

Regarder , couter, lire ; Paris, Plon, 1993, rsume les ferments de sa vie intellectuelle

primitif quil ft et que le sauvage a jeu complexe du langage, a nuances linfini, a tout ce qui fait notre grandeur et notre petitesse angoissante la fois dtres perdus dans le vide abyssal accroch du rien qui se tient, moins form de matire que de force dattraction ou de rpulsion entre des lments infiniment petits noys dans le vide. Que la sagesse est partout et plus encore en ces contres perdues en harmonie avec la nature, harmonie on en convient svre, difficile, sans intermdiaires, sans mdia, si ce nest ces bons chamans qui soignent lme et le corps avec leurs plantes et leurs grigris, enfin toujours avec sincrit ; qui soignent rien de moins que de la mort ou que du malheur plus encore que linconvnient dtre n. Qui dira le courage des primitifs supporter la vie, leur environnement, la souffrance, la solitude, lattente de la fin. Alors accordons-leur eux, le droit de faire des plantes alcalodes des plantes sacres, des cache-misre. , veaux amorphes, mes contemporains, cochonnailles dabattoir et mauvaise graisse, confortables progressistes et humanistes, socialistes milliardaires, racteurs dimportance troite et vile, que vous susurrent lme des rivires ? si ce nest, comme nonait le prophte bougon, que Rien ne peut modifier, attnuer, exalter le ton, la valeur, la joie dune me. Propagandes, ducations, violences, intrts, souffrances, et mme le fameux Amour natteignent pas lme. Lme sen fout. Le fond dun homme est immuable. Lme napprend rien, noublie rien. Elle nest pas venue sur la terre pour se faire emmerder. Lme nest chaude que de son mystre. Elle y tient. Elle le dfend. Elle y tient par-dessus tout, envers et contre tout. La mort qui refroidit tout ne saisit pas toujours lme, elle se dbrouille. Lairain, le platine, le diamant ne sont que flexibles, ductiles, capricieuses, trs impressionnables substances compares lme, leffroyable immuabilit dune me. Rien ne peut latteindre. Du premier au dernier souffle la mme pauvret, la mme richesse, exactement. Tous les bavardages, toutes les menaces, tous les charmes, tous les subterfuges flanchent, se dissipent devant sa porte, ne pntrent jamais. Rien ne peut lappauvrir, rien ne peut lenrichir, ni lexprience, ni la vie, ni la mort. Elle sen va comme elle est venue, sans rien nous demander, sans rien nous prendre.

mes libres et lgres, mes lourdes de chagrin, de malheur ou dorage belliqueux, de srnit, de torture ou dmesure, de vrit, vracit, mensonge, esprit malin et de fureur, dinnommable dgueulasserie barbare ou de bienveillance et complaisance niaiserie. Autant dhommes et de femmes, autant danimaux et de plantes, autant dmes. Myriades dmes mortes et renaissances, rcurrentes, hindoues. mes de fer, me dther ou de serge. Louange de lme dsespre des pierres. De lme des gens. De lme de gentes aux dieux souvent insidieux, odieux, offensants, intransigeants et intolrants, tant pour lintra que pour lextra. Lme en souffrance souvent, mais jamais en souffrance de penser, condamne la Pense. la nostalgie, la mlancolie, le petit bonheur, le grand chagrin, les phantasmes, le rve, les vaines utopies Lme est toujours libre dans la limite de ses prjugs, acquis, inns, des modes, libre de penser ce quelle veut, en droit ou de travers, en mystres, caricatures, raison plate ; libre de penser ce quelle veut, pour elle, en elle, jusqu ce que mort sensuive. La pense accorde ou non son temps, son espace, son milieu. Au centre, en priphrie ou la marge ultime En une langue, en dix langues et en toute folie. Mais qui a loutrecuidance de dcrter o commence et o sachve la folie ? Qui conduit ? Qui dlivre des sauf-conduits ? me individuelle, me dun peuple ou dun continent, le principe est le mme. Lme en Tables de la Loi lamentables est la pire des abominations morales, et physiques car elle dfinit, dcrte sui generis qui sera paria. Plus encore qu'un Hutu pour un Tutsi, le paria est quelque Twa, quelque pygme absolument non malfaisant mais abhorr de tous, Hutu et Tutsi runis. Mais au fond de son me lui, qui ne ressemble aucune autre en ce monde , si ce nest en celle de quelques vieux morts respectables connus ou inconnus, ou denfants pas encore ns, le paria a Raison ternelle et brise avec lui. Il est de ceux qui chantent les mythes et la multiplicit, la diversit des mes libres, la luxuriance des lgendes, la foison des mythes sculaires, non leur mort ou leur expression exclusive, totalitaire et irrcusable. Le droit au mythe est aussi le droit de ne pas croire. Le droit de croire ce qui est Mythe ou Histoire que lon veut, sen jamais en imposer la croyance qui que ce ft, surtout dans une constitution ou une

loi, la meilleure soit telle, je veux dire la mieux attentionne. Lenfer regorge de bonnes intentions Toute loi mmorielle, inscrite dans le Codex des lois dun tat, est une rgression, un lment dinconstitutionnalit dmocratique des grec dmos, peuple et cratos, gouvernement un dni de Libert dExpression, de Conscience et de Publication. Nouvelle forme de dictature, dintolrance, de tyrannie. De charia laque, enfin, pas tant que a laque. Retour en force des clricatures. Lhistoire des peuples demande toujours tre revisite, comme lhistoire des langues ou des plantes cultives. Revisite, mais non pas rige en dogmes et doctrines relevant de la croyance et de la religion de qui que ce soit. chaud, les interdits sont grotesques, mesquins, inclinant, dclinants, dfrents, bas, rendent mon me suspicieuse encore plus vive, encore plus contestataire, encore plus dissidente et dviante des bonnes murs morales, thiques, esthtiques du moment. Tout peuple qui sendort sesclavagise, vend lencan son me aux mercenaires, aux colons immigrs maffieux et autres communauts et sectes allognes, tue sa communaut nationale et mme continentale ; il nest que de voir ltat dplorable de la Vieille Europe pour sen rendre compte : Malthus est chez nous perdant ; le mtissage gnralis, qui nest pas qui ne sera jamais en ltat actuel du monde une lvation culturelle et morale ; est une calamit, le dclin, la chute finale de lIntelligence, de la Culture, la pauprisation acheve de lhumanit entire face une oligarchie ferme et communautariste elle-mme dcadente faite dempereurs doprette, de seigneurs barbares, danalphabtes cruels aux commandes dun bateau ivre de pirates, pitoyables dchets humains sans foi ni loi, si ce nest les leurs de fois et de lois ; lOmerta, la contrebande et lesclavage salari annonc comme le Paradis mme pour limmense majorit du monde. Supra autorit, gang international des malfaisants non lus, d'inconnus mme et autres auto-lus, en divers entits officieuses ou officielles comme le FMI, et les banques en gnral, le Capital est rig en malheur, en malheur entretenu, en guerre froide. Le partage ne pourrait que lannihiler, le dtruire, le rendre risible et vain. Il ne construit rien, il dtruit tout. Il na aucune valeur humaine, rellement humaine en soi. Le monde nest pas Beau, la Technique pavoise sur le vide. Espionnite 29, gels29

Japprends par ces temps-ci, la dcouverte partir de satellites nord-amricains, des sites de dix-sept pyramides de lgypte antique, jeusse prfr leur non-dcouverte de cette manire techniciste : ils tuent tout, mme le rve, la Lune, le plaisir de chercher en aveugle ou par le raisonnement, le plaisir sacr de la saine dcouverte. Rsolution des camras

de comptes bancaires, non prescription de dlit, droit d'ingrence (sic), criminel de guerre et autres fadaises sens unique, comme si la guerre ntait pas un crime en soi. Lencore Belle Terre devient une vaste prison, sans lieu de fuite ou de simple tranquillit. Un lieu sans repos. Fait de bruits et dclairs. Fulgurences de malheur. Devenu pire que le Meilleur des Mondes, le Jardin des Dlices, volet enfer du triptyque, et 1984 runis. Mon beau navire, ma mmoire, Avons-nous assez navigu, Avons-nous assez divagu De la belle aube au triste soir ? Oui, Guillaume. Bonne mmoire, et belle : nostalgies, mlancolies, utopies vaines. Patrimoine individuel, familial, collectif, quen est-il ? Mmoire de soi, mmoire en soi, en soie en soif aussi de dominer, dannihiler pour certains la mmoire tout aussi lgitime et concurrente de celles des autres. Et ce jeu, lHistoire prend souvent le pas sur le Mythe. Rgne chaud des beaux bobards. Le temps a besoin du temps pour acqurir quelque srnit un minimum objective et froid, dtache des passions bassement humaines. Tout Sage, tout vrai philosophe dtach des contingences de la cit, le sait et le rpte depuis des sicles, pour ne pas dire des millnaires. Rien nest bon dans lurgence, le lit des vainqueurs ou les intrts politiciens du moment ; toujours dats, souvent ridicules et risibles ou cruels le temps passant. La gurilla face aux media a du mal se faire entendre du grand nombre. Les manuels scolaires sont souvent rcrits, comme lhistoire officielle de tant et plus de dynasties tant stalinienne ou dmocratique que chinoise antique efface les noms des parchemins, les visages des photos ou des films officiels et salissent les morts vaincus. Notre Histoire contemporaine ny chappe pas, cette rgle ternelle, avec le silence complice et lche des histrions spcialistes ou gnralistes fonctionnaires historiens des coles et des universits. Toute histoire officielle est par dfinition suspecte, dautant plus si elle sappuie sur des jugements militaires daprs-guerre (le lot commun de lhistoire humaine) des interdits (bourgeois, proltariens ou nobles, de concurrents divers, etc.) et pire encore de lois pour sa juste application . On est l au niveau de lasatellites : un mtre carr !

religion officielle, des dogmes et doctrines, et en ce domaine lorsque quun mythe est (con)sacr croyance officielle et dtat indiscutable, patent et plus encore invrifiable, on ne sort pas de lexpression dune religion, dun aspect religieux de la pense. On y joue avec linvisible et limpalpable, loin des raids bombardiers des lches. Lhistoire connat des milliers de mensonges tablis en dogmes, tous les mensonges religieux drain par des sicles et des sicles de diverses superstitions dont on naurait rien dire si elles ne furent souvent totalitaires, exclusives, mortifres, cruelles, inhumaines ; en particulier lorsque religion et tat ne faisait quun, ce qui est dailleurs encore le cas de certaines contres terrestres quil est inutile de nommer. Laxiome, le postulat, le syllogisme plutt, pour ne pas dire le lieucommun est simplissime : par dfinition, le vainqueur (autrement il ne serait pas le vainqueur mais le vaincu) a toujours raison de son ct, bon droit, bonne justice, heureuses guerres (et engins de guerre) et lgitimes, bonheur et progrs ; et le vaincu, justes chtiments, horreur absolue, barbarie et malheur. Car une bonne part de lHistoire nest histoire que de conflits dintrts, de force et de pouvoir, recherche de prestige, dictature et tyrannie de diverses minorits. La guerre nest jamais, do lintrt de broder, de faire des hros, de dtruire ladversaire en lavilissant. Depuis la nuit des temps, les dieux eux-mmes sont mortels et les demi-dieux sont parfois massacrs de rvolution de palais en assassinats divers, devant des peuples cois, asservis, manipuls. Depuis la nuit des temps les tailleurs de pierre buchent la masse et au ciseau les cartouches de Pharaon pour le renvoyer dans la nuit du nant ou pour quun autre saccapare son uvre, enfin, luvre de ses architectes, maons, charpentiers, manuvres de basse besogne Or, le propre de toutes les sciences, du moins de celles qui ne sont pas brides par le religieux ou le prjug imbciles (citons Galile, mais il y en eut bien dautres), y compris bien sr des sciences que lon dit humaines est dtre rvises, revisites en permanence. Du moins depuis quelques sicles, un peu plus tolrants en ce domaine. Mais Athnes aussi ou Sumer ou en gypte antique, o transparait des formes de Raison, de pense logique et de Science derrire dogmes et doctrines heureusement souvent multiples, concurrentes ou mieux syncrtiques, rien ntait encore fig en ce domaine.

La diversit, cest la vie la tolrance mme et lenrichissement des savoirs. Depuis que le monde humain crit des bribes de son histoire entre ralit et mythe, lHistoire vraie ou tout au moins vrace car la globalit des faits, des biographies de tous les hommes qui nous ont prcds, nous chappera toujours a convenu avec sagesse quil faut parfois des sicles voire des millnaires pour faire la lumire sur le pass. Et dautant plus quil est proche de nous, car il est encore source denjeux de pouvoir ou de prestige divers (idologiques, politiques, religieux) Laissons Cauchon brler et rebrler dix fois Jeanne dArc, laissons passer le temps. Lme en dit toujours long, presque trop long lorsquon lui laisse le temps. Lme des choses, des faits, des gens. Drangeant, sil en est ; toujours ! Mais o sont, que sont devenus les potes ? Pour nous narrer piques, les grands faits darme ? Tout est devenu piteux, fors la mdiocrit, la bassesse, la lchet. Il ny a plus dHomre des temps modernes. Il est vrai quentre libre arbitre et intime conviction, libert de pense, dexpression et de publication, les vrais potes sont depuis quelques sicles fortement entachs desprit iconoclaste. Mais, moi Zoroastre, en vrit, je vous le dis : Le mal que font les bons est le plus nuisible des maux... La btise des bons est une sagesse insondable... C'est le crateur qu'ils hassent le plus : celui qui brise des tables et de vieilles valeurs, le briseur, c'est lui qu'ils appellent criminel ... Car les crateurs sont durs... Les esprits soumis sont la rgle... Car les bons ne peuvent pas crer : ils sont toujours le commencement de la fin Nous avons invent le bonheur , disent les derniers hommes, et ils clignent de l'il.

V ImmmoralLes lois ne pourront jamais rien contre la Pense Libre, non la Libre Pense association reconnue dintrt public qui peut ester en justice et injustice, bon ou mauvais escient, corporation frelate, ersatz anodin et sectaire qui ignore tout du vrai et positif sens du Sacr li l'essence mme et si pitoyable de l'Homme. Ce qui en fait sa grandeur mme. Toutes les ligues de vertus, de bonnes vertus dans lair du temps ne valent tripette devant la libert totale de pense. Les biens attentionns sont toujours ridicules, pips trompeurs tromps, ayatollahs, chefs de propagande, agents des ministres de linformation, estacades dans lair du temps, pdagogues le beau mot quils ont dchu, renvers de son pidestal, ces politicards tartempions quand les media imbciles, grotesques et propagandistes (redondances) en leur concert de klaxons plus ou moins accords, ou en leur silence clatant ditent, tiquettent, rcompensent, mettent aux nues puis tirent sur les ambulances et surtout anathmisent. Lvi-Strauss fut un amoureux de la pense sauvage et des mythes, mais uniquement de ceux, dits primitifs, qui livrent des reprsentations varies de lexistence et de la prsence des hommes au monde, riches dexpriences primordiales en contact troit avec la Nature, et de valeurs trs dissemblables, constituant un patrimoine en dclin, un chef d'uvre en trs grand pril. Dans deux grandes confrences prononces lUnesco, Race et histoire (1952) et Race et culture (1971), il plaida pour le respect des diffrences, tout en sachant quil parlait dans le vide. En dernier des Mohicans (cf. James Fedimore Cooper), en dernier des Rois de Thul (cf. Claude Malaurie, Les Derniers Rois de Thul). Tels sont tout en livres, les rayonnements ternels, ou presque de ses Sages. Les vrais rvolutionnaires, ceux de l'esprit, de la volont individuelle, de l'lvation. D'une vritable Rvolution Culturelle. ternel retour des prmices sacres. Ernest Hello crivait en son temps, dans LHomme, dit en 1872 :

Dans lordre physique et dans lordre moral, nous ne croyons notre rayonnement que dans la mesure prcise o nous le voyons sexercer. Quprouverions-nous, si nous voyions tout coup luniversalit de ce rayonnement, que nous croyions si restreint ? Que deviendrions-nous si nous apercevions de nos yeux laction que nous avons sur les Chinois par le rayonnement de notre me, rayonnement actif et invisible, aussi rel quil est oubli ? Histoire de Lynx Les Paroles ont t Donnes Le Regard sest loign La Voie des Masques sest ouverte, La Potire Jalouse a jas Ah ! connatre L'Autre Face de la Lune, lancienne. Tont-ils bien mme viol le sol, ces petits hommes, derniers des hommes, tont-ils vids de ton pipeau , ma Lune ? Pgase en rit, en hennit, en gmit, la vieille rosse virevoltante, le bon gnie. Au grand spectacle hollywoodien, le rcit est illusoire, le film mdiocre, antipotique souhait mon bon Mlis, en faux acteurs et mauvais studio tralala Mais cest encore un autre ahan, une autre fantasia pour les smalas du dclin. * Agonie 30 Ma pense, toi l'indigne, Es-tu morte d'un gne us, Aux eaux de Seine ou de Javel ? Ou sans gne, oghmise Au cloaque des eaux d'gouts ? Glissant tes os, dchet putride, Au quai de Conti, impromptue ! Triste Occident, Triste "progrs" des oxydants ! Pauvres tropiques O sont perdus tes utopiques ?30

Substantif (du verbe agoniser ) ou participe pass au fminin du verbe agonir

Emmonnays ! Hirsutes !... Meurtris, perclus De forclusion acadmique, Au cur du FMI ; au cur de l'infamie. Dans les halliers de voix profondes, Aux hurlements de Caipora, La fort souffre aux jours immondes ; , reviens-nous Curupira ! Ta sagesse, en Chaman perdu, Hante encore, aux cerveaux des druides, Une toile en Pense Sauvage ! * Entre la dfinition neutre de 1962 : Lethnologue respecte lHistoire, mais il ne lui accorde pas une valeur privilgie. Il la conoit comme une recherche complmentaire de la sienne : lune dploie lventail des socits humaines dans le temps, lautre dans lespace. (La Pense Sauvage, 1962) et celle de 1993, plus ambigu, ou plus exactement sur le terrain de la mmoire o on l'emmne qui n'est pas le sien, du moins lorsqu'il s'agit d'idologie politico-religieuse : Jaurais essay de montrer quon ne peut rien comprendre ou juger que grce la mmoire Il ny a que par le pass quon peut comprendre le prsent Mais, je naime pas le mot devoir Je naime pas les thmes qui ont une connotation morale. (in Le Figaro, 26 juillet 1993) un cataclysme est pass ( lchelle de la btise et de la bassesse humaine) ; je vous laisse deviner lequel ; qui a mis mal le sens commun, le simple bon sens si lon prfre, et qui imposa Lvi-Strauss darrondir les angles de sa pense pour laccorder aux lieux- communs de Messieurs Prudhomme, Piplet, Bonhommet, Pcuchet et autres Bouvard contemporains de lopinion dite publique, mais qui nest jamais que celle dun tout petit groupe de gens, quelque maffia mdiateuse, faisant et dfaisant les modes, les bonnes murs et les bons mots, se repassant lun lautre les mmes plats de mets

frelats, ce queux-mmes dnomment parfois avec dgot et non sans crapuleuse ironie "le politiquement correct" (invention qui arrive tout droit des tats-Unis). Incroyable niaiserie flagorneuse, haineux conformisme maffieux... Fait dabrutis, de crtins, de jobards. Dahuris ! Vous voulez un exemple, un seul, de la non-pense de notre poque, de sa niaiserie ; voici ce qucrivait rcemment quelque universitaire post-pubre en mal demploi de patente : La menace ngationniste est encore prsente et la lgitimit quon donne ces assassins de la mmoire est toujours dangereuse. Prenons juste un exemple, lAcadmie franaise vient daccepter Olivier Mathieu, ngationniste franco-belge,31 la candidature dun fauteuil vacant. Comment est-ce possible ? Nest-ce pas trop dhonneur accord un auteur antismite et ngationniste tel que lui ? Peut-tre que je devrais essayer moi aussi de my inscrire lAcadmie franaise et quils me le donneront le sige de LviStrauss ! Je suis scandalise de voir ainsi limportance accorde ces auteurs comme si le ngationnisme qui ne choque plus, tait rentr dans les murs. Passons sur le style approximatif ; mais de ce texte, toutes les propositions, tous les mots presque seraient reprendre, entourer de rouge et commenter. On croit rver, on se demande si lon na pas atteint le degr zro de la pense et surtout de la libert de pense. Nous avons l l'expression d'une pense catchisme, un exemple patent de la libert de non-pense et de lintolrance perroquet. Comme disait Vian : Les gens sans imagination ont besoin que les autres mnent une vie rgulire. Je crains fort que cette rflexion universiteuse 32 dnote un appauvrissement manifeste de lintelligence. Ce texte montre une incroyable intolrance, un esprit sectaire pour ne pas dire totalitaire, troit, obtus. Et surtout une incroyable mconnaissance de ce quest lAcadmie franaise et du simple fait que lon est encore malgr certaines lois dlirantes, sans parler d'un tas de lois inutiles, futiles ou caduques ouCe genre d'expression comme franco-belge , me fait toujours penser francorusse qui pour moi, m'voque toujours deux choses : les emprunts d'avant la rvolution russe et surtout une marque d'entremets qui a berc ma jeunesse.31 32

C'est--dire : universitaire et vaseuse.

inapplicables, ajoutes une somme dinterdits divers mdiatiss dans un tat de Droit. Pourquoi Olivier Mathieu ne pourrait-il pas se prsenter l'Acadmie franaise? Ou mieux encore : pourquoi un crivain, quel qu'il soit, ne pourrait-il pas se prsenter l'Acadmie franaise? Le rglement de l'Acadmie ne dit-il pas que "toute personne peut postuler un fauteuil" ? Olivier Mathieu (lequel, faut-il le rappeler, a suscit la "une" du journal "Le Figaro" du 8 avril 2011, sous la plume d'Etienne de Montety, lors de sa prcdente candidature au fauteuil de Maurice Druon, le 7 avril) n'est-il pas toute personne? Curieux dmocrates lorsque - pour certains - "dmocratie" rime avec "censure, dictature, totalitarisme, dmagogie et manipulation peine voile des masses" Dictature certes, mais sur une masse damorphes aussi ; nivellement par le bas certes, mais d'un tas d'imbciles heureux. Dans Contes et Facties, Nerval prsente lun de ses personnages de la faon suivante : Il n'tait pas de gens qui lui fussent si odieux que les personnes simples, d'entendement pais et d'esprit peu compliqu. Je crois y voir une dfinition de lhomme prsent. Comme dirait l'autre comme dirait lautre dont on ne connait jamais le nom, le visage, lidentit cette "crivaine", cette petite fille qui a crit ce petit propos niaiseux est tout juste un microbe la Zigounette. Comme lcrivait encore Grard (in La Bohme Galante) : Il est dangereux de passer trop tt pour un crivain de bon sens : cest le privilge des mdiocrits mres.

VI Pitoyables sous-promthensIl nest jamais humainement bon, eh non ! d'irriter, de mettre en colre, dindisposer la Nature ou de la bricoler minablement, en mdiocres dmiurges, gigantesque hrsie pour lHomme (ce microbe) et la Terre, mais misrable incontinence lchelle dun monstre atomique comme le Soleil qui lui-mme n'est rien l'chelle infinie de l'Univers. La Nature est toujours gagnante et n'a pas d'tat d'me. Elle ne connat ni le bien ni le mal, seul importe que l'enchanement de la matire perdure son rythme et non pas celui de l'homme, minable assassin de sa propre espce et de son environnement. Sais-tu que cest toi que tu tues en tuant la fort, en forant les abmes et entrailles de la Terre aux enfers de feu ? Inexorable et prvisible, manifestement dbile, sacrilge homo fric, homo dgotation, minus habens. Et mme lorsque tu te prends pour l'Aigle noir, tu es moins puissant fort et rus que le moindre mulot. coute ce conte : "Le Mulot, apologue, par Lon Bloy33 " : Je tiens cet apologue de l'tonnant Villiers de l'Isle-Adam qui me le raconta dans la boue glace d'une nuit de ce dernier carnaval, l'issue d'un trange festin de conspirateurs. Aprs maints propos dnus d'illusions sur la vomitive dgotation des allgresses ambiantes et aprs constatation unanime de l'vidente dcrpitude de lavenir : Savez-vous, me dit-il tout coup, avez-vous jamais entendu raconter comment le petit mulot tue le grand aigle? Je vais vous l'apprendre. Le petit mulot disgraci de la nature et crevant de faim, trottine et rampe sur la maudite terre. Sans orgueil comme sans ambition, il vaque de chtives nourritures pour la sustentation de son chtif33

Revue Le Feu Follet, in volume 6, juin 1885-mai 1886.

corps de mulot.

d'enfant

Le chauffe-pieds de Jupiter, l'aigle immense et terrible plane lhaut, roi des volatiles superbes, immerg dans la pourpre et l'or, souffletant de ses puissantes ailes la face clatante du soleil. D'un il infaillible, il aperoit le petit mulot, l'imperceptible petit mulot, au profond de la cuvette de fange, et la vue de ce Pauvre met le grand aigle en apptit. Sans doute, il trouverait d'autres aliments pour son estomac royal, de plus dignes proies. 11 n'aurait qu' croiser sur quelque autre habitant de l'air ses irrsistibles ongles, acrs et longs comme huit poignards. Il trouverait des colombes, rgal de sacrilge, qui ne lui rsisteraient gure, peut-tre mme d'autres aigles comme lui, qu'il combattrait dans l'ocan de lumire et dont la rsistance grandirait encore un peu plus son cur. Mais c'est le petit mulot qu'il veut. Cette misrable bouche, ddaigne des chiens et des serpents, rveille son apptit sommeillant par l'effet de la coutumire pratique des hautes ripailles. Il descend des airs avec une incroyable majest, rapetissant ses brasses concentriques, comme s'il enroulait spiralement un cne dont la pointe menacerait la terre, comme s'il tait lui-mme tout un gouffre dvalant de l'espace. Soudainement il s'arrte, et puis il tombe en coup de foudre. Mais le petit mulot l'a fort bien aperu ds le premier instant et son petit oeil noir a lanc un tout petit clair de dfi cet norme oeil de flamme qui le dardait de deux mille mtres. Et il attend sans bouger de l'paisseur d'un cheveu son effroyable ennemi qui arrive comme la tempte, pennes vibrantes, serrs ouvertes, Cou tendu, rostre bant.

Quelle piti ! On voudrait qu'elle essayt au moins de prendre l fuite, cette pauvre petite vermine, ce rien du tout d'indigent mineur, on voudrait qu'il dispart dans quelques trou de la terre qui, pour cette fois du moins, lui serait pitoyable et salvatrice ! Mais il n'est plus temps, l'aigle va l'atteindre... Il ne l'atteint pas et son formidable bec s'enfonce pleutrement dans la boue. Qu'est-il donc arriv? Presque rien. Un peu avant la fin de la dernire seconde, le petit mulot a imperceptiblement dplac son petit corps et, maintenant, il est sur la tte du grand aigle et il ronge la cervelle du contempteur de l'astre du jour. Celui-ci bondit jusqu'au ciel. II gonfle les nues de sa clameur, il pouvante les solitudes de son dsespoir, il fait vingt lieues, cent lieues dans l'azur qu'il retient la couleur de son sang plus fort que jamais dans son agonie, perdu, dsespr, sublime... et vaincu. Le petit mulot continue son repas avec tranquillit. Il sait bien ce qu'il fait et cela ne l'pouvante pas du tout d'tre emport si prodigieusement au-dessus de son tnbreux terrier. Le grand aigle meurt enfin et retombe lourdement sur le sol tant mpris. Alors, tous les petits mulots accourent en grande allgresse l'inespre bombance, non sans avoir rendu grces au Dieu des pauvres mulots pour le bienfait de cette charogne palpitante qui leur vient des cieux. Comme lcrivait Cline: Depuis la Renaissance lon tend travailler de plus en plus passionnment pour lavnement du Royaume des Sciences et du Robot social. Oui, dj les pices machines, les machineries faisant circuler leau dans les parcs la franaises fleuris dantiques pourtant, annonaient tranquillement et artistiquement ce dluge de fer, de feu, de laideur.

Alors, lHomme en tout a ? Et son destin ? sa destine ? el desdichado ? " On peut supposer chez lui () un apptit inconscient de se dtruire, car autrement on ne saurait expliquer comment il est parvenu accumuler catastrophe sur catastrophe, comment surtout il a russi se placer lui-mme devant la catastrophe", crit Emil Cioran dans "Le Sentiment que tout va mal" 34 o il fustige les aptres modernes de la science , ceux qui portent la responsabilit davoir forc lintimit de la matire, les disciples de Promthe, fauteurs dune inoue dbandade cosmique, les civiliss en somme . Les scientistes illumins, les savants du malheur (pour ne pas dire, de l'horreur) forcens la Oppenheimer, Joliot-Curie dignes staliniens, et autres anges du mal tel ce pacifiste atomiste et sioniste Einstein (double aberration). Et mil ajoute : "Pendant longtemps on a paradoxalement appels clairs les esprits entichs dillusions, ceux qui, obnubils par lenthousiasme, croyaient en lhomme, en sa capacit de triompher du mal en lui et hors de lui." Or, "connatre cest cder une tentation dangereuse () on ne se passionne pas impunment pour le savoir () larbre de la science est lantidote de larbre de la vie." Car, rien de moins, "connatre () cest violer le secret des choses." "On nous a dit que nous serons sauvs par la science, quelle nous rendra puissants. Eh bien, puissants nous le sommes tel point que nous accepterions nimporte quoi pour nous dbarrasser de notre fcheuse suprmatie. Le savoir comme flau !" 35 Poursuivons encore avec ce dernier : Le sentiment que tout va mal a exist toutes les poques, et juste titre, puisque depuis toujours les hommes nont pas trouv plaisir plus grand quinnover dans lart de se rendre malheureux les uns les autres. Quand les conservateurs affirment que la socit actuelle est mauvaise mais que celle qui lui succdera sera pire, on est irrit et mme exaspr. Pourtant lhistoire confirme ce diagnostic sans34

(document manuscrit de 1981-1982 bibliothque littraire Jacques-Doucet, reproduit par le Magazine littraire numro de mai 2011)35

Technique vaine : par exemple, on soigne comme jamais de maladies ou de malformations autrefois mortelles, tout en crant une bonne partie de nouvelles maladies, nes du mode de vie, d'alimentation etc. , y compris bon nombre de maladies mentales, difficults psychiques, dprime, stress et autre mal de vivre par les formes mmes que dveloppent la socit et le monde du travail ou l'ennui, linutilit, l'uniformisation, la productivit, le dclin du mtier, du travail bien fait, du savoir-faire et du savoir tout court, la perte du travail en quipe et la non-reconnaissance sont institus valeurs intrinsques, quasi suprmes, mais partant galement contreproductives.

nuances. Que faire ? Devenir bouddhiste, ou alors saveugler et consentir au Progrs ? Le rle de cette superstition qui remonte Condorcet a t norme. Lide de Progrs est une forme attnue dutopie, un dlire apparemment sens, sans lequel les idologies du sicle dernier, pas plus que celles du ntre, nauraient t possibles. Loriginalit du tournant historique dont nous sommes tmoins consiste dans la mise en cause de ce dlire, dans une lucidit fatale, veil librateur et dsesprant tout ensemble. Les vieilles catgories de droite et de gauche nous semblent dpasses. Nous pouvons videmment nous en servir loccasion, mais au fond elles ne font quescamoter lessentiel. Pourquoi souscrire des chimres au point de les proclamer, de les organiser en corps de doctrine ? Il nest personne aujourdhui qui croit vraiment lavenir, jentends : personne de normal. Des fous, oui. () Si lHistoire a un sens, ce ne peut tre que celui dinfirmer toutes les visions monumentales [Hegel, Marx, tout systme philosophique en gnral] et faussement gnreuses qui ont tent de linterprter ou de le reconstruire, de la refaire Lide de catastrophe est peut-tre moins importante que celle dimpasse. Car cest cela le devenir historique : un dfil dimpasses, une succession de situations bloques, une immobilit en marche () Lhistoire comme la vie en gnral, se droule mais ne progresse pas. Est-ce quon peut dire () : je progresse vers la vieillesse ? je progresse vers la mort ? On y va, et cest tout. Ainsi en est-il de lhistoire universelle, et mme de lEsprit absolu de Hegel. Impasses, ou tels est le mot. Myriades dimpasses, de rgressions mme, et de dchances. Au niveau de la Culture en gnral et de lArt en particulier, Cline y voit, derrire le scientisme, le technicisme et lutilitarisme, la mort de lmotion. La mort de lexpression motive. La mort du droit diffuser, rendre public, ses motions dites en art et avec art. Les bonnes avec les mauvaises, le receveur fera son tri. Vous laurez lart robot

La vie est un immense bazar o les bourgeois pntrent, circulent, se servent et sortent sans payer les pauvres seuls payent la petite sonnette du tiroir-caisse cest leur motion les bourgeois, les enfants petits bourgeois, nont jamais eu besoin de passer la caisse Ils nont jamais eu dmotion Dmotion directe, dangoisse directe, de posie directe, inflige ds les premires annes par la condition de pauvre sur la terre. la moindre incitation sentimentale ils gonflent, ils explosent en mille excrments infiniment ftides. Il nest quun maquis de salut pour tous ces robots sursaturs dobjectivisme. Le sur-ralisme. L, plus rien craindre ! Aucune motivit ncessaire. Sy rfugie, sy proclame gnie qui veut ! Le sur-ralisme, prolongement du naturalisme, art pour robots haineux, instrument du despotisme, descroquerie, dimposture Le sur-ralisme prolongement du naturalisme imbcile, scateur, frule des eunuques cest le cadastre de notre dchance motive. larpent de notre charnier, de notre fosse commune de crtins idoltres Aryens, cosmiques, jobards et cocus Et puis, cest entirement tap ! Admirablement pour nos gueules!... Le plus dpouill le plus objectif des langages cest le parfait journalistique, objectif, langage Robot. Plus besoin davoir une me en face des trous pour sexprimer humainement La dictature des larves est la plus touffante, la plus souponneuse de toute. Du moment o elles gouvernent tout peut se violer, sengluer, se travestir, se trafiquer, se dtruire, se prostituer. Nimporte quelle croulante charognerie peut devenir linstant lobjet dun culte, dclencher des typhons denthousiasme, ce nest plus quune banale question de publicit, faible ou forte, de presse, de radio, cest--dire en dfinitive, de politique et dor Et nimporte quelle baliverne robotique triomphe ! Nous y sommes Ils avilissent et salissent le beau pass, le triste prsent et ruinent le futur, plus aucun sens de lhonneur, de la pure grandeur, des vritables valeurs. Le sacr ? Massacr, avili. Esprance ? Dsesprant dsespoir !

Le mur est trop visible et on y va tout droit, gaiement ! Sans rechigner, sans regimber, en simple constat dimpuissante niaiserie. Autrefois, SaintAmour de Cri-Nu, notre valeureux pote baroque aujourdhui totalement oubli, annihil chantait dj, ne disant pas autre chose, psalmodiait vif son Hymne Belzbuth. Pauvre Terre notre Mre ! Vieille Mer au got amer ! Notre frre, un papillon De l'ther Qui, en lair, a lair prospre Et saffaire en tourbillons, Nous confre, antique pair, Un mystre : Mille et cent beaux cotillons, Tout dansant, sont terre--terre Et lencens qui les altre Va billon ; Si tu sens quils te confrent, Cur en sang plus dur que fer, Toi, pur-sang, leurs tortillons phmres, Alors fuit, Esprit de verre, Car le buis du goupillon Tue sans bruit et perce en vers Dure-mre...

VII La religion du respect de la Terre.Extrmement mfiant sur la question de lhumanisme, mme et surtout le mieux attentionn, Lvi-Strauss naccordait aucune valeur ce mot en tant quil incarnait le pouvoir exorbitant des hommes vouloir coloniser la Terre et humaniser les dieux, les forces de la nature voire lunivers, notre coin de cosmos riquiqui. Prtention infernale et grotesque inscrite dans les fondations mme de toute la pense judo-islamochrtienne selon laquelle la crature humaine et elle seule a t cre limage de Dieu, prtention sacrilge tout prendre, mais qui en toute logique devrait dailleurs amener les hommes se faire tous manichens ou adorateurs de Belzbuth ou autre Mphistophls. Car telle est la ralit des hommes qui, selon Cioran, sont marqus par un destin inexorable et tragique, tragi-comique pour les plus marqus d'acerbe ironie. Cioran, ce fils de pope, en nihiliste indpassable, en pessimiste bahi, mdus, ttanis de doute mystique sur dieux, diables et sens du monde et pour qui " lhomme est vici dans son essence et () maudit depuis toujours, quelles que soient les conditions extrieures, sociales ou autres, dans lesquelles il vit". Pour lui lhomme est cet "insupportable enfant gt qui a occup trop longtemps la scne philosophique et empch tout travail srieux en rclamant une attention excessive" Autrement dit : humanisme mal ordonn commence par soi-mme. Lvi-Strauss rejette un humanisme qui fait de lhomme le seigneur absolu de la cration, un humanisme sans vertu, ni devoir, partisan et dvoy. Un humanisme bien ordonn ne commence pas par soi-mme, mais place le monde avant la vie, la vie avant lhomme, le respect des autres avant lamour-propre . 36 On ne saurait mieux, ni plus. Sauf amplifier la thse dexemples incommensurables et plus nombreux quinfini.36

Comme la diffrence que l'on tablit entre un homme pacifique et un pacifiste, il conviendrait d'tablir une diffrence entre "tre humain" (sans isme) et "humaniste". On a vu tant et plus de pacifistes ou de pseudo humanistes se faire les pires bellicistes et tortionnaires ou les thurifraires des dictatures. Mais on n'a rarement vu un simple tre humain et pacifique droger.

Premire mutilation culturelle, dont sensuivirent tant dautres mutilations technicistes et scientistes, l'homme a commenc par se couper de plus en plus fortement de la nature; il a ainsi cru effacer son caractre le plus irrcusable, savoir quil est dabord un tre vivant. Ce qui n'tait pas encore le cas aux origines des cits et de l'criture ou les dieux savaient encore nous le rappeler. Dieux, demi-dieux trop faiblement humains. Champ ouvert laissant libre cours avec le temps toujours plus d'abus scandaleux, dviances barbares et aberrations. En sarrogeant le droit grossier et sacrilge de sparer radicalement lhumanit de lanimalit, en accordant lune tout ce quil retirait lautre, en confrant certains ce quil tait dautres, lHomme, lhomme occidental en ces derniers sicles et autrefois colon, aujourdhui largement colonis en retour a ouvert un cycle maudit. coutons Claude Lvi-Strauss : Que rgne enfin lide que les hommes, les animaux et les plantes disposent dun capital commun de vie, de sorte que tout abus commis au dpend dune espce se traduit ncessairement, dans la philosophie indigne, par une diminution de lesprance de vie des hommes euxmmes. Ce sont l autant de tmoignages peut-tre nafs, mais combien efficaces dun humanisme sagement conu, qui ne commence pas par soi-mme mais fait lhomme une place raisonnable dans la nature, au lieu quil sen institue le matre et la saccage, sans mme avoir gard aux besoins et aux intrts les plus vidents de ceux qui viendront aprs lui Dans le comit de parrainage des Amis de la Terre association ne en 1970, on retrouve entre autres, ct de Thodore Monod et Jean Rostand, Claude Lvi-Strauss, car il ny a pas de contradiction et une vritable adquation entre le relativisme de la diversit, lhumanisme de lquilibre (ce quon appelle des cosystmes en cologie), lamour de la Terre et le respect de la Nature et partant de la matire, des tres anims et inanims. L est la vraie Sagesse. Celle qui divinise la Vie. Lternel retour dionysiaque de la vie. Bien longtemps avant la mode de l'cologie (allge comme une nourriture de rgime), Lvi-Strauss note dj, parmi les dsastres qui guettent la plante, le nivellement venir de la diversit humaine, remarquant en Inde des populations mdivales prcipites en pleine re

manufacturire et jetes en pture au march mondial comme il en fut de mme l'ore de notre re industrielle europenne. Il constate la dsagrgation gnralise des organisations sociales traditionnelles, laissant des hommes lchs dans un nant engendr par lHistoire, agits en tous sens par les motivations les plus lmentaires de la peur, de la souffrance et de la faim" . Il pourrait ajouter que le mal a atteint le cur mme du monde spectaculaire-marchand qui est en voie de dpossder la masse humaine de tout : biens, avoirs, savoirs, mtiers, entraide, communauts vivantes, langues, en autant d'interdits dresss par des lois, des taxes, des impts, des droits et contraintes productives diverses. Petit exemple, l'homme moyen qui a perdu tout sens de la culture agricole, l'heure o l'on fait disparatre les bouilleurs de cru tout en accordant de nouveau, mais uniquement aux gros industriels, de produire de labsinthe ! Absinthe bnfique puisquindustrielle ! ignore tout de la production de son alimentation, de luniformisation des semences, de la strilit de celles-ci, de linterdit port sur les semences non reconnues, sous couvert de sant et autres fadaises. De lemprise totalitaire du Capital sur tous les domaines de la vie, de la survie, de la non-vie Car il nexiste plus dagora, de communaut gnrale ; ni mme de communauts restreintes des corps intermdiaires ou des institutions autonomes, des salons ou des cafs, aux travailleurs dune seule entreprise ; nulle place o le dbat sur les vrits qui concernent ceux qui sont l puisse saffranchir durablement de lcrasante prsence du discours mdiatique, et des diffrentes forces organises pour le relayer. Il nexiste plus maintenant de jugement, garanti relativement indpendant, de ceux qui constituaient le monde savant ; de ceux par exemple qui,