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Introduction aux réseaux sociaux L'étymologie de "réseaux" rappelle d'abord qu'il s'agit de filets (des rets), donc de structures souples susceptibles de couvrir un certain espace par des liens qui unissent des nœuds. On peut donc en déduire que la qualité d'un bon réseau est d'abord de prendre ou couvrir beaucoup (qu'il s'agisse de beaucoup de poisson ou de beaucoup de téléspectateurs, de marchandises ou d'idées ). Mais le réseau ne peut réaliser cette performance que s'il est solide est adaptable à la fois. Ainsi si les nœuds ne se contentent pas d'être très denses mais sont eux-mêmes rattachés à d'autres nœuds eux-mêmes de diverse qualité, et densité. Tout tient par la forme générale, la structure, Pour filer un peu plus loin la métaphore, on peut considérer le réseau pour sa capacité d'enserrer loi et de nombreux éléments : c'est une vision extensive. Il semble bon qu'un réseau routier, électrique, mais aussi de solidarités humaines ou de relais d'opinion doive inclure le plus possible et qu'il,demeure assez dense pour ne pas se distendre (donc être fragile et inefficace en certains points). L'autre aspect d'une structure en réseaux est l'intensité des énergies et des flux en certains de ses zones internes. On l'emploie lors pour parler de modes de circulation, Plus une partie peut se relier à d'autres et coopérer plus elle contribue à la résilience du tout. Information et contrôle Il existe des réseaux naturels, comme le réseau sanguin ou nerveux mais l!usage le plus courant renvoie à des réseaux fabriqués par l!homme en vue de la bonne circulation de flux qu!il s!agisse de réseaux postaux, électriques ou routiers respectivement voués à transporter des lettres, du courant électrique ou des véhicules. Les réseaux peuvent être purement humains : un réseau de terroristes, d!espionnage ou d!influence naît du fait que ses membres poursuivent un but commun et échangent entre eux, par exemple suivant des affinités ou des règles de sécurité. A priori, ce http://huyghe.fr twitter : @huyghefb 1

Réseaux sociaux, pouvoir et stratégie

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Les réseaux sociaux (type Twitter, Facebook ou You Tube) : atouts pour l'intelligence collective et la démocratie directe ou outils stratégiques

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Introduction aux réseaux sociaux

L'étymologie de "réseaux" rappelle d'abord qu'il s'agit de filets (des rets),

donc de structures souples susceptibles de couvrir un certain espace par des liens qui unissent des nœuds. On peut donc en déduire que la qualité

d'un bon réseau est d'abord de prendre ou couvrir beaucoup (qu'il s'agisse de beaucoup de poisson ou de beaucoup de téléspectateurs, de

marchandises ou d'idées ). Mais le réseau ne peut réaliser cette performance que s'il est solide est adaptable à la fois. Ainsi si les nœuds

ne se contentent pas d'être très denses mais sont eux-mêmes rattachés à d'autres nœuds eux-mêmes de diverse qualité, et densité.

Tout tient par la forme générale, la structure,

Pour filer un peu plus loin la métaphore, on peut considérer le réseau pour sa capacité d'enserrer loi et de nombreux éléments : c'est une vision

extensive. Il semble bon qu'un réseau routier, électrique, mais aussi de solidarités humaines ou de relais d'opinion doive inclure le plus possible et

qu'il,demeure assez dense pour ne pas se distendre (donc être fragile et inefficace en certains points).

L'autre aspect d'une structure en réseaux est l'intensité des énergies et des flux en certains de ses zones internes. On l'emploie lors pour parler de

modes de circulation, Plus une partie peut se relier à d'autres et coopérer plus elle contribue à la résilience du tout.

Information et contrôle

Il existe des réseaux naturels, comme le réseau sanguin ou nerveux mais

l!usage le plus courant renvoie à des réseaux fabriqués par l!homme en vue de la bonne circulation de flux qu!il s!agisse de réseaux postaux,

électriques ou routiers respectivement voués à transporter des lettres, du courant électrique ou des véhicules. Les réseaux peuvent être purement

humains : un réseau de terroristes, d!espionnage ou d!influence naît du fait que ses membres poursuivent un but commun et échangent entre eux,

par exemple suivant des affinités ou des règles de sécurité. A priori, ce

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genre de réseaux est censé produire une synergie et apporter à ses

membres un pouvoir supplémentaire.

Celui qui fait partie d'un réseau terroriste le fait pour coordonner son action à celle de ses camarades, bénéficier de leur aide (armes, caches,

formation) et pour qu'au total leur action commune soit plus efficace que l'addition de leurs énergies individuelles. Celui-ci qui intègre un réseau

d'influence, comme les anciens membres d'une école ou un club prestigieux, peut espérer que ces gens qu'il a connu directement ou qui lui

ouvriront leur porte puisqu'il a la bonne recommandation, l'aideront dans ses affaires, lui faciliteront certains contacts, le créditeront d'un capital de

confiance, lui permettront de recevoir certains services voire certains privilèges. Et celui qui veut étendre son réseau de relations, en se faisant

recommander par A à B, en se réclamant de C pour avoir un meilleur accueil de D, etc.. le fait pour accroître ses chances d'obtenir un travail,

une invitation, un privilège, un conseil, un passe-droit une occasion de faire affaire, une aide, voire une indulgence ou une impunité, etc.

Retenons donc qu'un réseau :

- donne à chaque membre un pouvoir plus que proportionnel à ses propres

forces (ou à son propre statut), ou du moins qu'il l'espère. Dans tous les cas, la participation au réseau et la faculté d'être exposé à beaucoup

d'interactions, d'être au point où convergent certains flux (d'information, par exemple) a une valeur indéniable. Quelquefois, elle constitue un capital

social, que symbolise très bien le fameux carnet d'adresse. Dans un autre registre, un réseau de chercheurs, ou de travailleurs intellectuels est censé

produire de l'intelligence collective, donc une inventivité et gagner une capacité de traiter des problèmes que n'auraient pas tous leurs membres

isolément.

- Le réseau suppose une multitude d'interactions (il vaut rendre du séné pour la rhubarbe que l'on reçoit et participer au fonctionnement collectif)

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- Le réseau n'est pas forcément secret, mais obéit à des règles propres,

souvent implicites, que l'on comprend mal de l'extérieur et qui peuvent susciter des soupçons ou des jalousies.

- Enfin -et ceci est lié à tous les points précédents - il y a forcément du

pouvoir dans les réseaux (au sens d'une probabilité que les autres fassent ce que vous voulez ou que vous en retiriez les biens que vous espérez),

mais il n'est jamais facile de comprendre la nature de ce pouvoir. Dans tous les cas, c'est beaucoup plus difficile à résumer que dans un système

hiérarchisé et fixe, où les uns ordonnent et les autres obéissent, et dans lequel les échanges suivent toujours le même code.

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Réseau et technologie

Bref, en sociologie, le réseau étudie à ce titre une structure dynamique, reliant des éléments (des gens, des institutions) ayant certaines

interactions, pratiquant certains échanges, etc. et que l'on peut décrire en termes de liens et de nœuds. De là toutes sortes de concepts apparus au

cours de l'étude de ces réseaux, étude qui a maintenant plus d'un demi-siècle, comme la densité, la cohésion, la centralité, etc. Il existe également

de nombreuses représentations graphiques des réseaux.

De ce point de vue, le réseau s!oppose à la pyramide ou à toute système où les biens, les flux, les renseignements, les ordres… ne circulent que

dans un seul sens voire par un seul canal de type chef, sous-chef, subordonné… L!avantage d!un réseau dont les composantes sont reliées

de plusieurs façons, outre qu!il permet une communication entre ses « nœuds » est qu'il résiste relativement bien aux accidents, innovations ou

tentatives d!interruption. Son efficacité est à la mesure des connexions qu!il permet, donc de la richesse des liaisons possibles entre les

composantes.

Les réseaux informatiques autorisent de multiples commutations entre les

terminaux et donc les utilisateurs reliés. Internet repose sur la conjonction d!une structure réticulaire – permettant de multiples modes de circulation :

utilisateur à utilisateur, utilisateurs à sites et à bases de données et vice-versa, liens hypertextuels… - mais il repose aussi sur la nature

extraordinairement fluide de ce qui y circule : des bits numériques sous forme d!impulsions électriques.

L!expression « société en réseaux » -popularisée par un monumental travail de Manuel Castells est souvent employée pour désigner les

changement induits par le développement de la micro-informatique et par

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la mondialisation en tant que circulation de gens, de biens, de capitaux, de

signes de modèles culturels, et qui semblent déborder les anciens territoires et les frontières. Personne ne s!étonne plus d!entendre parler

d!entreprise en réseau, voire de guerre en réseau.

Notre époque recourt souvent à la métaphore du réseau – souple, vivant,

innovant…- et l!oppose volontiers aux structures hiérarchiques, formelles de l!ère industrielle. Ainsi le web est comparé à toile d'araignée mondiale

un filet tendu sur la planète, dont chaque maille serait un ordinateur et chaque fil une ligne de communication. Il se développe même une

véritable utopie du fonctionnement en réseau, comme si le simple fait de faciliter la communication, notamment celle de biens immatériels comme

l!information – était en soi porteuse de démocratie, d!apaisement et d!inventivité.

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Réseaux, technologie et médiation

Le terme a pris une connotation très particulières depuis qu'il est partout question des "réseaux sociaux" ou des "réseaux 2.0", ces deux termes

étant utilisés presque comme synonymes. On parle également des "communautés en ligne" des "médias sociaux" qui seraient les instruments

et dispositifs qui sont censés favoriser ce type d'échanges de contenus entre utilisateurs ou leur participation à des créations communes. Le tout

via Internet ou tout autre système permettant d'échanger vite des bits électroniques et donc des signes (un Intranet, un réseau Sms, etc..).

Le tout vaut dans un système - Internet, en particulier - qui permet que les messages, les contenus, les commentaires, les fabrications techniques ou

artistiques, etc de tout un chacun aient une chance théorique d'être connus de n'importe qui d'autre dans le monde. Nous parlons de chance théorique

puisque nous savons que beaucoup de blogs n'auront presque pas de lecteurs, beaucoup de vidéos n'intéresseront personne, beaucoup de

messages ne seront jamais repris, cités, commentés, etc. Et pour cause, puisque ce système engendre une monstrueuse quantité d'information.

Dans les réseaux sociaux au sens moderne, la technologie numérique intervient à deux titres :

- comme facilitatrice (elle donne plus de pouvoir à tel ou tel qui peut bricoler un petit journal, ou ses propres applications, ou des œuvres et

spectacles, qu'il n'aurait jamais eu les moyens de réaliser autrement).

- comme intermédiaire entre des acteurs qui n'ont plus besoin de se connaître "dans la vraie vie" ou de se rencontrer face à face pour faire

partie de la même "communauté virtuelle".

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- comme productrice d'effets sociaux dont des effets de croyance : on rentre dans une communauté, on y découvre de nouveaux intérêts ou de

nouvelles hostilités, on s'intègre, on adopte certains protocoles ou règles, etc.. Bref on change même marginalement.

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Quelle diversité ?

L'idée de "réseaux sociaux" recouvre en réalité plusieurs usages :

- partage de contenus plus ou moins spectaculaires destinés à attirer un

vaste public (vidéos sur YouTube, par exemple) et à le commenter,- blogs permettant l'émergence de porte-paroles, de vedettes ou recueil de

sources appréciées par un public concerné et expert, espace de présentation de soi, de ses passions, de ses amis,...,

- espace personnel (construction et présentation de son intimité) ou professionnel, communautés plus ou moins ouvertes suivant des critères

propres- plate-formes de micro-blogging : elles-mêmes peuvent servir aussi bien à

signaler et discuter des sources documentaires rares à des connaisseurs qu'à relater de façon narcissique les plus menus incidents d'une vie

banale…- espaces voués à un travail collaboratif de documentation, écriture ou

création- simple maintien d'un lien affectif.

Proclamation, e-journalisme, marketing, veille, dialogue de connaisseurs, entretien d'une convivialité ou d'une complicité, présentation de son image

ou de sa société, dialogue avec des usagers, propagation de modes, journal intime, affirmation symbolique d'une croyance ou simple fonction

phatique (s'assurer que l'on est toujours en contact avec des interlocuteurs)...

Le statut privé ou public, les contenus, le degré de technicité ou

d'ouverture, les fonctions de coopération ou de partage, le caractère sélectif, la richesse des apports possibles, le but recherché - de la quête

d'informations pointues ou du travail d'intelligence collective, comme les encyclopédies collaboratives, jusqu'à l'entretien d'une socialité gratifiante

pour l'ego -, tout varie donc considérablement suivant le réseau.

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Sans oublier ce dernier facteur : le réseau devient ce qu'en font ses

usagers. Facebook fait pour l'élite de l'élite des universités américaines vogue allègrement pour son milliardième inscrit. Mais Facebook utilisé

d'abord pour raconter les choses les plus banales du monde (sorties, souvenirs de copains, goûts en matière de marques..) peut devenir un

instrument politique

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Un nouveau lien social

Dans l'usage courant, "être sur" ou "fréquenter" les réseaux sociaux veut

dire utiliser (éventuellement après s'être inscrit et avoir pris une sorte d'engagement) des instruments comme Facebook, Twitter, Linkedin, Flick,

You-tube, Delicous, Copains d'avant, Viadeo, Tumblr...

Il en existe des dizaines qui permettent aussi bien de partager des vidéos,

des trouvailles ou des liens, que d'entretenir une incessante conversation ou d'entrer en contact avec des gens sensés partager la même passion.

De l'étalage narcissique d'une vie banale aux révélations d'un scandale qui peut bouleverser un pays, l'éventail est large.

Sur les réseaux sociaux on peut, en particulier, faire trois choses qui ne guère réaliser sur les médias classiques (Où le message est censé

descendre d'un émetteur unique vers des récepteurs multiples) :

S'exprimer à la première personne, que ce soit pour raconter sa vie,

rapporter des événements et se transformer ainsi en e-journaliste, et émettre son jugement sur des gens, des institutions ou des situations,

préconiser..., ,bref participer à l'élaboration d'un espace public

Évaluer, recommander, commenter, contribuer à attirer l'attention des

autres membres du réseau (ou indirectement des autres internautes en général) sur un message significatif. on peut même jour le rôle d'un

rédacteur en chef ou d'un "curateur" qui organise l'information suivant un certain ordre, pour lui donner un certain sens.

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Former un lien d'un nouveau type avec les autres membres du réseau. Les rapports qui s'instaurent ainsi couvrent une vaste gamme : simple suiveur

ou admirateur, copains se racontant leur vie,ou partageant le plaisir de se répéter des banalités, experts en quelque chose, groupe de discussion où

chacun prouve son excellence en discutant d'un film, d'un logiciel ou de la situation politique, groupe militant. Les récents événements ont démontré

que l'on pouvait passer du statut de "militant d'un clic" ou de simple transmetteur de nouvelles à celui d'organisateur d'une protestation, voire

que cela pouvait conduire dans la rue.

Ces nouveautés suscitent des réactions négatives qui ne sont pas sans

rappeler le discours psychologisants que tenaient certains sur les médias classiques : ils favorisent l'isolement et ne créent pas un lien social

authentique, ils abrutissent, ils font baisser notre attention et ne nous donnent qu'une connaissance superficielle du réel, et, bien entendu, il sont

le lieu de toutes les manipulations, de tous les rumeurs...

Les réactions positives tombent facilement dans l'excès inverse : éloge de

l'internaute devenu actif et non plus récepteur passif, apologie de la sagesse des foules et de leur courage, dénonciation du vieux système

hiérarchique et figé de rétention des savoirs, attente d'une sorte d'ubiquité et d'instantanéité libératrice de l'information échappant à toute censure et

enfin annonces prophétiques en tous genres. Parmi ces annonces, nous comptons celles qui s'attachent à un thème économique (les

consommateurs prennent le pouvoir face au fabricant et au publicitaire), social (les mouvements vont trouver à s'exprimer hors des vieilles

médiations que sont les syndicats et les partis et exprimer sans chefs ni porte -paroles les vraies demandes de la société civile), politique, enfin, (le

peuple peut savoir la vérité censurée, se rassembler et éventuellement renverses ses tyrans sans utiliser de cocktails Molotov ou de Kalachnikov).

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Stratégie et réseaux

Il nous semble surtout que cette opposition néglige une autre dimension

des réseaux en tant que tels : ce sont de bonnes machines de guerre. Ce peut être une simple guerre de l'opinion à propos d'un sujet très futile - un

CD qui deviendra ou pas à la mode-, mais il peut s'agir d'une guerre révolutionnaire ou d'une guerre tout court. On notera que les chercheurs

de la Rand ont mené de recherches sur une "netwar" qui permettrait à l'armée US d'utiliser ses moyens de surveillance et de coordination pour

agir à distance et sans déployer de corps d'armée sur un champ de bataille à l'ancienne. Dans un tout autre genre, Hardt et Negri auteur d'un grand

best-seller altermondialiste voient dans la structure en perpétuelle reconfiguration des réseaux un mode d'action enfin démocratique et

impossible à endiguer dans la contestation de l"l'Empire".

Les réseaux possèdent d'énormes qualités pour la lutte : vitesse de

réaction, négativité (ils sont faits idéalement pour rassembler des attaquants contre un objectif central), absence de structure hiérarchique

que l'adversaire puisse interrompre, résilience, puisque tout passe partout, réactivité instantanée n'empêchant pas la prise de décision... Mais quel est

leur pouvoir au-delà du stade du lynchage symbolique (tout le monde conspue le même personnage ou la même institution) ? Et par quel

mécanisme passe-t-on d'une participation distraite par vagues affinités (on aime tel type de musique, on fréquente le même forum, on est en commun

sur le mur d'ami de deux personnes....) à des rapports de force dans la vraie vie, comme une manifestation qui finit par renverser un

gouvernement ?

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Esprit du temps

L'expression "réseaux sociaux" connaît un incroyable effet de mode à la fois

- pour des raisons pratiques évidentes (nous sommes des millions à "y

être" et une bonne part de nos relations avec des amis ou des gens avec qui nous partageons une forme quelconque d'intérêt passe par Facebook,

Twitter, Viadeo)

- pour des raisons quasi idéologiques : leurs pouvoirs sont célébrés à la fois par le monde de l'entreprise qui se dit souvent elle-même "en

réseaux" (il faut avoir son community manager défendre sa e-réputation par la e-influence et faire le buzz sur le hub pour ne pas être archaïque) et

par celui de la politique (les réseaux sont crédités d'avoir "fait" les révolutions arabes et l'année électorale - en France ou aux USA - sera

placée sous le signe de la Web-stratégie des candidats, mais aussi de la confrontation avec les protestataires utilisant médias sociaux et self

médias..). On peut donc aussi bien évoquer les réseaux sociaux avec le sérieux du manager qu'avec les accents de révolte du libertaire.

De fait les travaux sur les réseaux en tant que systèmes reliant des groupes ou des individus exerçant des interactions et pratiquant des

échanges (notamment des échanges d'information) datent de l'après-guerre. Le réseau au sens quotidien (les gens sur qui l'on peut compter

pour rendre un service, donner un conseil, ou apporter une forme quelconque de convivialité ou d'intérêt affectif) préexiste, bien entendu à la

banalisation des technologies de l'information et de la communication.

Et la notion de réseaux (souvent opposée à celle de pyramide et de

hiérarchie) est vraiment entrée dans le Zeitgeist depuis déjà quelques

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temps. Du reste nous vivons à "L'ère des réseaux", titre d'un livre de

Manuel Castells date de 1998 et Patrice de Flichy dans "L'imaginaire d'Internet" fait remonter le discours sur les petites communautés

fonctionnant démocratiquement grâce à de nouveaux outils de communication des années 70 et 80. Ajoutons que les techniques sur

lesquelles reposent les plates-formes des réseaux étaient déjà là potentiellement depuis les débuts d'Internet : de la "page perso" au blog,

des bases de données aux sites de partage type Flickr, des forums et réseaux de développement communautaire (BBS, Free Net, Fidonet et

autres) aux réseaux au sens actuel, il n'y a pas eu de changement de paradigme.Et le premier "vrai" site de réseau social au sen moderne,

sixdegrees.com, au départ sorte de club assez élitiste, date de 1997.

Mais il y a eu, bien entendu, une vraie révolution des usages

accompagnée de facilités technologiques : facilités d'expression ou de production (pas besoin de gros budget ou de long apprentissage) et de

connexion (s'agréger à un réseau, les faire interférer, beaucoup transmettre à haut débit, trouver des interlocuteurs ou des thèmes

d'intérêt, recommander, indexer, commenter, le tout depuis un simple smartphone que l'on porte en permanence, tout cela aussi est devenu

enfantin).

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Codes et pratiques

Le réseau social en ligne se reconnaît à plusieurs pratiques :

- l'inscription (avec pseudo, anonymement ou pas suivant le site, si invité

ou librement),

- le "profil" plus ou moins public et élaboré,

- les listes d'accès, d'invités, de suiveurs et de suivis, de gens autorisés à commenter, modifier, répondre, etc., le contenu, bien sûr

- et la possibilité de lier tous ces éléments (et par exemple d'étendre

théoriquement à l'infini son réseau et par le partage de données et par des systèmes de recherche de contenus et de futurs correspondants). Il existe

de très fortes variations dans les pratiques ainsi des réseaux où la publicité est la règle et le privé l'exception, des systèmes d'acceptation ou

d'exclusion, etc.

En somme un réseau permet deux choses principales :

s'exprimer (au sens de dire et montrer quelque chose que l'on veut répandre, mais aussi présenter une image de soi dont on est censé avoir

la maîtrise et qui peut être falsifiée). Cette expression peut d'ailleurs être purement commerciale : améliorer l'image de son entreprise ou de ses

produits, se vendre soi même sur le marché du travail, se faire connaître des clients et prospects.

se relier. Ce lien peut aller de la simple rencontre par écrans interposés de

gens avec qui l'on partage un très vague intérêt pour un sujet très commun, jusqu'à un travail d'expertise mené en commun. Les réseaux

sociaux ne servent pas seulement à partager de l'information - que ce soit

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pour sa valeur de connaissance nouvelle ou pour le sentiment

communautaire que cela crée-. Ils servent aussi à évaluer en commun, à élaborer, à décider, à voter, à recommander, voire à lutter (organiser des

manifestations dans la rue, résister à des tentatives de censure et d'interruption). Ils peuvent aussi s'étendre (et leur extension peut être un

objectif en soi.

Le lien créé par les réseaux a donc une composante d'affinité (retrouver ceux qui, d'un certain point de vue, sont comme vous, soit parce que vous

avez le même profil socioculturel, les mêmes convictions, etc, soit parce que vous avez une passion en commun, depuis le goût pour les vêtements

à la mode jusqu'au désir de renverser une dictature et que vous vous découvrez ainsi).

Mais il y a aussi une composante d'intérêt et de réalisation : grâce aux réseaux, on fait et on reçoit.

On fait quelque chose dans la vraie vie ou l'on élabore des travaux en commun (par exemple un encyclopédie de type Wikipedia qui repose sur

l'intelligence collective et la "sagesse des foules").

On reçoit quelque chose : il y a toujours un intérêt à être sur un réseau qui

vous donne notamment des informations pratiques : conseils, bons tuyaux pour la consommation, bonnes adresses, l iens intéressants,

documentation précieuse que l'on trouve ainsi de façon bien plus ciblée qu'en recherchant classiquement dans une bibliothèque ou avec un moteur

de recherche. Il se peut aussi que ce que l'on reçoit soit de l'ordre des satisfactions psychiques : sentiment d'appartenir à une élite, plaisir de se

regrouper avec des gens qui pensent comme vous et vous confirment l'excellence de vos choix, plaisir du nouveau et de la découverte. Les

satisfactions narcissiques ("j'ai tant de friends, de fans, de followers...") ne sont pas les plus négligeables

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Il peut aussi y avoir des buts pratiques, entre faire et recevoir : trouver une épouse, jouer en ligne, monter un projet, avoir un entretien d'embauche,

améliorer sa valeur professionnelle ou marchande, vendre...

Dans un réseau social, il y a un média social (un dispositif de

communication) plus une médiation sociale (une communauté sociale à travers laquelle on atteint des objectifs, mais qui nous transforme en

retour). Cela en fait un défi pour une réflexion stratégique ou médiologique.

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Des relations personnelles au média "tous vers tous"

Un réseau, avons nous dit, est une structure relationnelle formée de liens

entre des "nœuds". Ceci vaut qu'il s'agisse de trains, d'électricité, de messages, de services, d'argent.

Ces "nœuds " peuvent être des acteurs échangeant ou faisant circuler un flux, des dispositifs, des gens...

Quant à "réseau social", l'expression s'est d'abord référée de façon large à

des communautés. d'individus ou de groupes pratiquant certaines interactions avec une certaine constance. En ce sens, chacun d'entre nous

possède un réseau social : tous ceux à qui il peut s'adresser dans le cadre d'un rapport affectif, utilitaire, ludique, pour en recevoir ou lui donner des

informations et des "services" (par exemple le fameux carnet d'adresse et ses "relations" dont on peut raisonnablement attendre qu'ils nous apportent

une aide, un conseil, un soutien affectif ou une simple conversation et un peu de temps…).

Tous ces réseaux étant à un degré ou à un autre interconnectés, dès les

années 60, une théorie célèbre affirmait que nous sommes tous à six "liens" de distance les uns des autres. Un chiffre moyen qui est tombé à

4,74, d'un bout de la planète à l'autre, justement grâce aux réseaux. En d'autres termes, les "chemins" qui mènent de tout individu à tout autre via

des intermédiaires sont relativement courts.

Désormais, ceux qui parlent de "réseaux sociaux" ou d'être "sur" les réseaux (et peu d'entre nous, s!ils ont moins d'un certain âge, ne se sont

jamais inscrits sur aucun) songent immédiatement à Youtube, Facebook, Twitter, Linkedin, Viadeo, Flickr, Delicious et des dizaines d'autres marques

ou plate-formes.

Les réseaux dans ce nouveau sens sont l'ensemble de relations qui naissent par l'emploi des médias "tous vers tous", voués à une

“conversation" avec de multiples destinataires, par contraste avec la

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logique "un vers un" des moyens de communication privés ou le "un vers

tous" des médias de masse qui multiplient les mêmes messages pour des audiences vastes et dispersées.

De fait, on "appartient" à un réseau social, avec une intensité très

variable ; elle va de la simple acceptation distraite d'une invitation sous pseudonyme que l'on oubliera cinq minutes après, jusqu'à la passion

addiction qui va dévorer des heures par jour.

Retenons que les réseaux sociaux nous procurent moyennant un engagement (a minima s'inscrire et cliquer sur une case) et à travers des

médiations techniques (comme une plate-forme) la possibilité d'échanger à distance.

Cela suppose :

- des dispositifs techniques (un certain logiciel, une adresse Internet, des

ordinateurs, des canaux, des budgets, des moyens de commutation),- des règles (il faut disposer d'un login et d'un code, apprendre des

procédures ou des usages, voire des normes : parfois il est interdit de donner une fausse identité ou de répandre certains messages)

- des gens. Ces derniers participent sur une base déclarative et entrent à un degré ou à un autre dans ce système d'échange en fonction d'intérêts

et de besoins. Ils attendent quelque chose : un écho à leurs opinions ou à leurs révélations, des aides ou conseils, le plaisir de la convivialité même

numérique avec des gens qui partagent un intérêt, peut-être un soutien affectif et ce que l'on nommerait aujourd'hui du "lien social". En retour, ils

donnent quelque chose : des avis, des idées, des adresses, des contenus texte ou image, des recommandations. Ou, tout simplement, ils donnent

leur profil, une ouverture sur ce qu!ils sont, donc des données qui peuvent avoir une valeur commerciale ou stratégique (ne serait-ce que traitées

statistiquement).

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Parole distribuée

Une première approche des réseaux sociaux les envisage comme des "outils de communication" ou "moyens d'expression" extraordinairement

puissants. La conjonction du numérique et des facilités de circulation des messages ou de navigation permet en effet théoriquement à chacun

d'émettre quasi gratuitement et instantanément un message que n'importe qui à l'autre bout du monde peut tout aussi théoriquement consulter.

De fait, les technologies dites Web 2.0 mettent à notre disposition

gratuitement ou à très bas prix des moyens de messagerie et de publication inimaginables il y a dix ans. Le "e-journalisme" ou le

journalisme citoyen, l'expression de soi et le témoignage en paroles ou en images sont incontestablement facilités.

Facilités au point que le problème n'est plus aujourd'hui de pouvoir dire ou

montrer, mais d'attirer l'attention, par exemple d'être repéré par les moteurs de recherche ou cité, "retweeté", indexé, commenté, "liké", etc..

Nous assistons visiblement à un transfert dans les méthodes de sélection face à une information surabondante : de la classification sur le modèle

catalogue ou de la recherche par mots clefs (ce qui fondait le fameux pouvoir des algorithmes de type Google) à des méthodes de

recommandation directe (évaluation, vote, suggestion) et indirecte (liens, citations, classification…).

La question du "tous émetteurs, tous s'expriment " renvoie à celle de la maîtrise de flux d'attention.

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Intrinsèquement démocratiques ?

Une autre approche insiste sur la nature participative, voire "démocratique"

du réseau. Elle en souligne le caractère ouvert ou horizontal par contraste avec l'ancienne structure pyramidale d'autorité ou le mode de diffusion des

mass media : le réseau permet à chaque membre non seulement de faire savoir, mais aussi d'interagir, voire de mener des projets communs en

utilisant ce que l'on nomme déjà intelligence collective ou intelligence des foules.

La forme du réseau implique du partage due pouvoir. Les cyberdissidences et contestations en ligne montrent que ce pouvoir se

dispute : affrontement de technologies dites "de libération" (il existe des réseaux orientés vers la lutte contre toute tentative de censure) et de

contrôle et censure, impliquant des États, des ONG, des acteurs économiques et techniques, etc.

En amont, un réseau social s'ouvre à tous : un apprentissage minimal, des

accès faciles, voire des terminaux qui, s'ils ne sont pas gratuits, deviennent de plus en plus accessibles, y compris sous leur forme nomade (le smart

phone que chacun peut avoir sur lui).

Pendant l'échange, la structure réticulaire accessible de n'importe où est, à ce titre, difficile à couper ou censurer : elle permet une coopération à des

degrés très divers..

On peut évaluer, commenter, discuter, contribuer à un nuage de tags (qui lui-même aidera à l'indexation et pourra attirer d'autres), faire un "rétrolien",

recommander, intégrer des éléments comme "curateur" en une sorte de revue de presse en ligne.

On peut aussi se concerter, voter, décider, propager des slogans ou des instructions, faire un cartographie ou une base de données en direct,

collaborer à un texte.Le degré de participation est extraordinairement variable, de l'intérêt

presque distrait d'un "chat" sur un sujet à la mode jusqu'à l'engagement

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militant dans la "vraie vie", comme les révolutions du monde arabe, vite

baptisées "2.0".

En aval, les contenus ont une vie propre : ils sont incessamment modifiés ou actualisés au cours d'un processus collectif d'adjonction critique et

révision, mais ils sont aussi plus ou moins consultés ou repris et attirent des flux d'attention variables qui font le "buzz" et la "e-réputation". Parfois

en interagissant avec les vieux médias.

À chacun de ces trois stades intervient une multitude de micro-décisions

prises par des acteurs, au départ égaux et inconnus (jusqu'à ce que certains accèdent au statut de porte-paroles, de "e-influents" ou de

blogueurs vedettes). Il y a aura d'ailleurs à discuter ce que recouvre le caractère apparemment égalitaire du réseau social et les réalités de

pouvoir (pouvoir d'influence, de sélection, de direction de l'attention qu'elles recouvrent) qui subsistent.

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Communautés

Enfin, il faut considérer que les réseaux sociaux ne servent pas seulement

à faire savoir, mais aussi à faire corps et à faire faire. Ce sont des outils de synchronisation de l'action, de coopération "dans la

vraie vie" à la recherche des solutions collectives, voire de lutte, comme l'ont montré les récents événements dans le monde arabe, stratégie de

rassemblement et de mise en scène reprise sous d'autres latitudes.

Une autre question serait celle de la capacité des réseaux de créer des identités collectives durables.

Les rassemblements dans le monde virtuel peuvent produire des changements dans le monde réel (au prix d'un incessant va-et-vient entre

les deux formes de vie collective, messagerie et action dans la rue). Mais on peut se demander si leur efficacité s'étend au-delà d'une fonction de

mobilisation et de contestation.

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Page 25: Réseaux sociaux, pouvoir et stratégie

Souveraineté, influence et réseaux

La vision traditionnelle, celle de la philosophie politique classique, celle du

système inauguré des traités de Westphalie repose sur quelques principes :

L'autorité - comme faculté d'obtenir une obéissance - "s'exerce par et sur le

territoire, ce qui suppose symétrie des relations entre acteurs internationaux, essentiellement étatiques.

La souveraineté ne connaît, par définition, pas de limite ou de concurrence

dans sur son territoire.

Hors frontières, les États connaissent des " rapports de guerre ou diplomatie d'égal à égal

C'est ce que nous appellerons la trilogie puissance / autorité / territorialité.

Il n'est évidemment pas difficile de démontrer combien tout ce qui précède

a changé dans un société en réseau et mondialisée.

Parmi les tendances lourdes en sens contraire:- l'internationalisation des idéologies et des cultures

- les systèmes impériaux- la dépendance de l'échange liée et circulation instantanée et incessante

des informations, des marchandises. des capitaux, mais aussi des hommes

- la conviction -vraie ou fausse- que les lois de l'économie s'imposent partout, le système TINA (There Is No Alternative)

- la répugnance des sociétés individualistes au principe d'autorité- l'émergence de nouveaux acteurs infra ou supra nationaux, la puissance

des contre-pouvoirs et de ce que nous avons appelé Organisations Matérialisées d'Influence (de type ONG, lobbies, etc)

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- l'insertion du pouvoir d'État entre une pluralité d'instances régionales et

internationales,- et on pourrait sans doute prolonger la liste

La nouvelle trilogie semble être devenue : influence / contrôle / réseaux.

Ceci ne signifie nullement que les frontières disparaissent ou que l'emploi

de la force soit obsolète! Simplement, la place, d'une part de techniques et organisations humaines, d'autres part de technologies matérielles (en

particulier celles dites "de l'information et de la communication"), et qui sont toutes liées finalement à la gestion de l'opinion joue un rôle croissant.

Soit l'exemple du binôme autorité / influence.

Les réseaux électroniques transforment les modes de mobilisation et de

vérification/évaluation de l'autorité " : "moins de contacts directs, moins d!actions ritualisées (comme la grève, la manifestation) et, il faut le dire,

moins de risque et de peine en règle générale. La mise en cause massive de l!autorité se limite, du moins au début, à quelques clics et à la rédaction

de commentaires. Et même les éléments les plus engagés, qui par exemple participent aux forums altermondialistes, peuvent mener des

actions internationales avec des facilités inimaginables à l!époque du télex et de la ronéo. Sans parler des révolutions arabes dites "2.0".La multitude

de groupes contestataires travaille en réseau. Ainsi l!information circule mieux et les différentes entités (associations, individus, ONG, etc.) peuvent

s!agréger pour critiquer une organisation ou une institution.

L!influence est un jeu de tous les jours dans notre espace démocratique. Plus une loi, une norme ne s!adopte sans qu!auparavant les uns et les

autres n!aient essayé de faire valoir leur point de vue. Dans un monde où la taille des crevettes est normée, les lobbies et organisations d'influence

jouent un rôle non négligeable et utile dans l!élaboration de la décision publique. En théorie, ils informent le décideur qui lui-même tranchera en

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Page 27: Réseaux sociaux, pouvoir et stratégie

fonction de l!intérêt général. Bref, une instruction à charge et à décharge y

compris sur les décisions les ténues.

"Et, "bien entendu, les technologies numériques amplifient ces tendances.Outre qu'elles sont accessibles à tous, hyperrapides, économiques, sans

frontières, etc, elles remplissent trois fonctions indispensables à l'action sur et par les médias :

" une fonction "preuve", ou du moins établissement et publication de

certains faits

une fonction "expression" qui permet de propager le jugement (souvent dans le registre de la dénonciation, de l'indignation. bref du contre-pouvoir)

et enfin une fonction "rassemblement" qui transforme des individus devant

leur écran, unis par le "lien faible" du partage d'un intérêt sur Internet en communautés qui peuvent se tourner vers l'action dans la "vraie vie".

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Page 28: Réseaux sociaux, pouvoir et stratégie

FRANÇOIS-BERNARD HUYGHE

HTTP://HUYGHE.FR! ! [email protected]

• Ses ouvrages :

• Terrorismes Violence et propagande

(Gallimard Découvertes 2011)

Avec A. Bauer : Les terroristes disent toujours ce qu'ils vont faire

• Maîtres du faire croire (Vuibert 2008)

Comprendre le pouvoir stratégique des médias (Eyrolles 2005)

Quatrième guerre mondiale (Rocher 2004)

Écran/Ennemi (00hOO.com 2002)

L’ennemi à l’ère numérique (PUF 2001)

L’information, c’est la guerre (Corlet 2001)

Les experts (Plon 1996)

La langue de coton (R. Laffont 1991)

La soft-idéologie (R. Laffont 1987)

Avec Edith Huyghe, il a écrit : La route de la soie, La route des tapis, Histoire des secrets, Images du monde, Les coureurs d'épices...!!

Enseignement :

Iris/Ipris

Campus virtuel, Université de Limoges

École de guerre économique

Celsa Paris IV Sorbonne

Hautes Études Internationales

DRMCC, ENA, Polytechnique...

Chercheur et consultant

Médiologue, revue Médium

Chercheur à l’IRIS; y dirige l'Observatoire géostratégique de l'information

au comité scientifique du CSFRS

dirige Huyghe Infostratégie Sarl, société de conseil et formation en communication d’influence, infostratégie, intelligence économique...

Anime le site http://huyghe.fr

Twitter : @huyghefb

François-Bernard Huyghe, docteur d’État en sciences politiques et Habilité à Diriger des Recherches (infocom)

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Domaines de recherche : stratégies de l’information, décryptage des médias, intelligence économique et stratégique, médiologie, polémologie

mais aussi critique des idées contemporaines, routes de rencontre des

civilisations et des imaginaires (route de la soie, route des épices...)