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1 Union Africaine Projet « L’Utilisation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique » *** REVUE DES CONTENUS DE L’HISTOIRE GENERALE DE L’AFRIQUE Coordination Scientifique Prof. DOULAYE KONATE Président Association des historiens Africains (AHA) RAPPORT DE SYNTHESE

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Union Africaine

Projet « L’Utilisation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique »

***

REVUE DES CONTENUS DE L’HISTOIRE GENERALE DE L’AFRIQUE

Coordination Scientifique

Prof. DOULAYE KONATE

Président Association des historiens Africains (AHA)

RAPPORT DE SYNTHESE

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AVANT PROPOS La synthèse générale des 8 rapports de la Revue des contenus de l’Histoire Générale de l’Afrique (HGA) a été réalisée par Doulaye KONATE, coordinateur scientifique de la dite Revue avec la collaboration de :

• Issiaka Mandé • Faranirina Rajaonah • Ibrahima THIOUB

Les auteurs des rapports de lecture des différents volumes dont la synthèse est présentée ici sont : Augustin F.C. Holl et Innocent Pikirayi Volume1 Felix Chami et Babacar Sall Volume2 Idrissa BA et Penda Mbow Volume 3 George Abungu et Alexis Adandé Volume 4 Issa Saibou et Elisée Soumonni Volume 5 Jerome Mumbanza et Samuel Salo Volume 6 Olukoju Ayodeji et Faranirina Rajaonah Volume 7 Lily Mafela et Bahru Zewde Volume 8

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La Revue des contenus de l’Histoire Générale de l’Afrique (H.G.A) Contexte :

Dans le cadre de la mise en œuvre du Projet d’ « utilisation pédagogique de l’Histoire

Générale de l’Afrique », le Responsable dudit projet a approché le Président de l’Association des

Historiens Africains (A.H.A), une des associations partenaires au projet, pour envisager la

possibilité de mobiliser des collègues pour la réalisation d’une Revue des contenus des 8

volumes de l’Historie Générale de l’Afrique.

Cette tâche préconisée par le Comité Scientifique du Projet s’inscrit dans le cadre de la

préparation de la conférence régionale sur l’élaboration des contenus communs, et du matériel

pédagogique d’accompagnement pour l’enseignement primaire et secondaire en Afrique.

Des discussions qui se sont engagés autour de la réalisation de cette revue dans un délai

très court au regard de l’immensité de la tâche, ont conduit à l’adoption d’une formule de

contrats individuels qui ont été établis entre l’UNESCO et les différents lecteurs retenus par les

Responsables du Projet sur la base de propositions faites par le Président de l’A.H.A désigné

pour assurer la Coordination Scientifique de la dite Revue (cf. Termes de références)

Méthode :

L’identification des candidats lecteurs à proposer à l’UNESCO s’est avérée laborieuse

pour différentes raisons. D’abord, le délai imparti pour réaliser l’étude à dissuader plus d’un

d’autant que cette relecture leur demandait de surseoir à des activités prévues dans leur

agenda. Le choix des candidats a été d’autant plus compliqué qu’il devait obéir à un certain

nombre de critères souvent difficiles à croiser. Nous avons tenté en effet autant que possible,

d’allier les critères de compétence avec des considérations de représentation géographique,

linguistique et générationnelle. Le souci était de favoriser des « regards croisés » de

compétences diverses dans l’analyse des différents volumes.

Evidemment, pour les raisons précédemment évoquées, nous n’y sommes pas parvenus

dans tous les cas. Ainsi par exemple, on peut regretter l’absence de nos collègues d’Afrique du

Nord dans cette équipe de 16 lecteurs ainsi que celle de nos collègues lusophones et cela

malgré tous nos efforts.

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Les lecteurs ont été répartis en « binômes » par volume, suivant, leurs compétences,

chaque binôme devant produire un compte rendu commun pour le volume (liste des lecteurs en

avant propos) qui lui a été affecté.

Les différents « binômes » de lecteurs se sont organisés à leur guise et ont conduit le

travail en regard des termes de références. Leurs textes ont été adressés au Coordinateur qui y

faisait des observations, lesquelles pouvaient être prises en considération ou pas par le lecteur.

Les rapports finaux des différentes équipes ainsi élaborés ont été adressés au

Coordinateur en vue d’une synthèse générale. L’étude a duré de mi-mars au 19 mai 2010. C’est

le lieu de remercier ceux de nos collègues qui ont accepté de s’engager dans cette tâche ardue

et qui ont travaillé sous une pression certaine, dont certains rapports se ressentent. Tous ces

collègues ont accepté de travailler avant même d’avoir signé leur contrat avec l’UNESCO. La

plupart ont démarré cette relecture à partir de leurs propres volumes, ou de la consultation des

ouvrages dans les centres de documentation, c’est à dire bien avant de recevoir de l’UNESCO

l’exemplaire du volume qui leur était affecté. C’est dire l’intérêt des collègues pour cette

relecture et l’importance des sacrifices consentis.

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Préface de A.M. MBow Plus qu’un simple exposé des motifs, la préface de A. M. MBow constitue un texte essentiel de l’HGA d’autant qu’elle en définit les objectifs, les enjeux tout en précisant quelques uns des principaux apports de l’ouvrage. L’argumentation de A.M.MBow se développe autour d’un certain nombre de points qui ressortent du constat qu’il fait de l’image qui est donnée de l’Afrique à travers le savoir historique occidental. Il fait ensuite la genèse du Projet, précise les ambitions scientifiques qui le fondent et appelle à la diffusion de l’œuvre, et à son l’utilisation à des fins pédagogiques.

1) Le déni d’Histoire La traite négrière et la colonisation ont généré une image des africains et une certaine conception de leur passé, de leur « être au monde » et de leur avenir. Malgré les écrits de quelques auteurs - qualifiés de pionniers - dont L. Frobenius, M. Delafosse, Arturo Labriola, MBow met l’accent sur l’héritage de la pensée Hégélienne de l’Histoire universelle dans l’historiographie coloniale. Cette conception linéaire de l’Histoire de l’Humanité, en excluait en effet les sociétés africaines. L’absence de documents écrits était l’alibi évoqué pour justifier cette exclusion. Ce qui était accepté pour la Grèce Antique, à savoir l’exploitation de l’Odyssée et de l’Iliade (œuvre orale par excellence) en tant que source d’Histoire, était refusé à l’Afrique dont les traditions orales étaient méprisées. De fait, l’Histoire de l’Afrique n’existait qu’à partir de la rencontre du continent avec l’Europe et cette Histoire apparaissait alors comme un appendice de l’Histoire européenne. Le refus de reconnaître aux africains la possibilité de « création de cultures originales » se posait comme un défi que seul un renoncement aux préjugés et un renouvellement des méthodes pouvaient permettre de lever.

2) L’image d’un continent éclaté La perception dominante qu’on avait de l’Afrique était celle d’un continent fait de sous ensembles juxtaposés. L’Afrique du Nord dite « blanche » et l’Afrique Subsaharienne dite « noire » auraient vécu séparées à cause de l’obstacle infranchissable, qu’aurait représenté le Sahara. L’Egypte ancienne et la Nubie auraient également évolué indépendamment du reste du continent. L’Afrique n’était donc pas considérée comme une entité historique. S’il est vrai que chacune des parties de l’Afrique a son originalité, il n’en demeure pas moins qu’elles ont entretenu entre elles des relations d’échanges continus. Ainsi l’Afrique du Nord a constitué un pont entre le monde méditerranéen et l’Afrique subsaharienne et quant aux marges du Sahara, elles ont toujours été fluctuantes. L’Egypte et la Nubie ont une Histoire imbriquée et partagent de nombreux éléments culturels

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avec l’Afrique subsaharienne.

Les damnés de la terre Les stéréotypes raciaux liés à la traite et à la domination coloniale ont faussé les bases mêmes de l’historiographie africaine. L’usage par exemple de catégories discriminatoires établissant la supériorité du blanc et « l’essentialisation du nègre » ont biaisé cette historiographie. De fait l’Afrique avait à lutter contre un double asservissement « économique et psychologique ». La hiérarchisation des races dont se faisait l’écho l’historiographie coloniale servait à justifier la main mise coloniale et « la mission civilisatrice ». Les changements intervenus après la seconde guerre mondiale notamment l’entrée sur la scène internationale des états africains ont contribué à faire évoluer la situation. Dans ce contexte « les africains eux mêmes ont ressenti profondément le besoin de rétablir sur des bases solides l’historicité de leurs sociétés ». C’était l’un des principaux enjeux de l’Histoire Générale de l’Afrique. L’innovation méthodologique que cela nécessitait a donné aux sources africaines notamment la tradition orale (dont l’exploitation requiert un appareil critique systématique) toute leur importance.

Etapes de la conception et de la réalisation de l’Histoire Générale de l’Afrique Le projet a cherché à poser les bases théoriques et méthodologiques d’une Histoire de l’Afrique qui permette de comprendre « l’évolution des différents peuples dans leur spécificité socio culturelle ». Sa mise en œuvre a comporté plusieurs étapes : De 1965 à 1969, l’UNESCO a mis en œuvre un vaste programme de collections de traditions et des manuscrits inédits, d’inventaire des archives qui a abouti à la publication d’un « guide des sources de l’Histoire africaine » en 9 volumes. De 1969 à 1971 se sont succédées des réunions de travail de groupes d’experts à Paris et Addis Abeba pour l’élaboration de l’ouvrage : l’Anglais, le Français et l’Arabe ont été choisis comme langues pour les premières publications avec des prévisions de traduction en Hawsa, Yoruba, Peul et Lingala, pour ce qui est des langues africaines, l’Allemand, l’Espagnol, le Suédois, le Portugais et le Russe pour ce qui est des langues européennes. La troisième étape a été celle de la réalisation effective du projet rédactionnel sous la responsabilité d’un comité scientifique de 32 membres composés pour les 2/3 d’africains et 1/3 de chercheurs d’autres régions. L’approche choisie est fondamentalement interdisciplinaire et respectueuse des différences de points de vue entre experts.

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Parmi les nombreuses questions que les contributions des auteurs de cette œuvre ont contribué à éclairer, M. MBow cite : celle de l’unité historique de l’Afrique et les relations de celle-ci avec les autres continents notamment avec les Amériques et les caraïbes, la résistance des esclaves déportés en Amérique et leur participation aux différentes luttes de libération nationale, les relations de l’Afrique avec l’Asie du Sud à travers l’Océan Indien et les « apports africains aux autres civilisations dans le jeu des échanges mutuels ». M. MBow termine sa préface en exprimant le souhait que l’Histoire Générale de l’Afrique soit largement diffusée dans de nombreuses langues « et qu’elle serve de base à l’élaboration de livres d’enfants, de manuels scolaires et d’émissions télévisées ou radio diffusées ». Les africains (jeunes, écoliers, adultes) pourront ainsi avoir une meilleure connaissance du passé de leur continent, « une plus juste compréhension de son patrimoine culturel et sa contribution au progrès général de l’humanité ». En cela l’Histoire Générale de l’Afrique contribuerait « à favoriser la coopération internationale, à renforcer la solidarité des peuples dans leur aspiration à la justice, au progrès et à la paix ».

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Volume I.

Histoire Générale de l’Afrique

Méthodologie et Préhistoire de l’Afrique

Directeur de Volume : J. Ki-Zerbo

Avec 819 pages, le volume 1 contient 28 chapitres qui portent sur la méthodologie et les

approches régionales de la Préhistoire africaine depuis la Plio Pléistocène jusqu’à la fin du XVIe

siècle après J.C.

L’ouvrage comprend outre la Préface de A.M. MBOW, l’introduction et la conclusion, 28

chapitres. Comme pour tous les autres volumes on trouve à la fin la liste des membres de la

Commission Scientifique internationale pour l’Historie Générale de l’Afrique ainsi que les

biographies sommaires des différents contributeurs. Une bibliographie générale et un index.

Comme l’indique clairement le sous titre « Méthodologie et Préhistoire africaine »,

l’ouvrage est composé de deux parties distinctes se rapportant à deux thèmes majeurs qui se

chevauchent. On y distingue plusieurs sections.

La Section I (du Chapitre 1 à 6) traite de l’historiographie, ses tendances, et son

évolution.

La Section II (Chapitre 7 et 8) est consacrée aux traditions orales et leurs méthodologies.

La Section III (Chapitre 9 à 16) traite d’un large éventail de sujets qui vont des méthodes

archéologiques et des techniques de datation à la linguistique historique et la classification des

langues africaines, la géographie physique et humaine, la paléoclimatologie et l’ethnogenèse

des migrations.

Après la Préface de A.M. M’BOW évoqué antérieurement l’objectif et la portée générale

du projet sont résumés par B. A. Ogot. Il précise que le projet vise à produire un savoir de haut

niveau sur l’Histoire de l’Afrique, en tant qu’entité et à mettre l’accent sur les échanges et les

relations entre les différentes parties de l’Afrique.

Cette Histoire qui met en avant, les idées, les civilisations, les institutions et les sociétés

doit être écrite à partir de l’intérieur en tant que véritable contribution au patrimoine culturel

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mondial.

Dans son introduction générale au volume qui est aussi celle de la série des ouvrages, le

Professeur J. Ki-Zerbo affirme d’entrée de jeu que l’Afrique a une histoire, avant de rappeler les

objectifs du projet d’écriture d’une histoire générale de l’Afrique et les défis théoriques et

méthodologiques qui s’attachent à cette importante entreprise.

Selon le Professeur J. Ki-Zerbo, les difficultés spécifiques de l’Histoire africaine se lisent

au travers de l’observation des réalités physiques du continent. Le continent semble tourner le

dos au reste du monde et est faiblement relié au reste de l’Ancien Monde par le canal de Suez

et le Sinai. La configuration géographique du continent entrecoupé de déserts, de forêts et de

marais aggrave cet isolement. « La vastitude » du continent et la dispersion des populations

dans une nature à la fois généreuse (fruits, minerais) et cruelle (épidémies, endémies)

empêchaient d’avoir un niveau de concentration démographique nécessaire aux mutations

qualitatives majeures dans le domaine économique, social et politique. La traite négrière du XVe

au XXe siècle a contribué à priver l’Afrique d’un capital humain et de la stabilité nécessaires à la

créativité dans différents domaines. Reprenant le mot de F. Braudel selon lequel « la civilisation

est fille de nombre ». Le Professeur J. Ki-Zerbo considère que « l’isolement en Afrique a été un

facteur limitant de l’Afrique sur la piste de certains progrès ».

Ce point de vue est discuté par les auteurs de la Revue qui évoquent sur la base des

résultats de différentes recherches telles que la mise en évidence de sociétés complexes et

surtout de l’urbanisation en Afrique de l’Ouest à partir de 200 avant J.C., ou encore d’éléments

attestant la culture de la banane en Afrique Centrale (Sud Cameroun) en 500 avant notre ère.

Cela montre que la forêt équatoriale ne constituait pas un obstacle.

Les sources de l’histoire africaine regroupées en trois catégories (écrites archéologiques,

orales) sont ensuite analysées sans aucune mention dans cette introduction des hiéroglyphes

égyptiens qui constituent les premières sources écrites du continent.

L’introduction met l’accent sur l’importance des traditions orales, sources

authentiquement africaines pour l’étude de l’Histoire du continent. Les traditions orales en effet

présentent une vue de l’intérieur des processus historiques et leur exploitation en raison de leur

nature même pose des défis d’ordre méthodologique.

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La contribution d’autres disciplines à l’écriture de l’Histoire de l’Afrique telle que la

linguistique, l’anthropologie culturelle (à la condition qu’elle se libère de ses postures

évolutionnistes dans ses approches de l’Afrique) est amplement étayée par des exemples

probants.

Le Chapitre 15 p.p. 283 – 294 (éd. 2000) qui traite de l’interdisciplinarité et de son usage

dans le volume est le prolongement de la réflexion entreprise dans l’introduction. A partir du

rappel du domaine et des techniques d’investigation d’une série de disciplines (dont certaines

étaient longtemps dites auxiliaires de l’Histoire) l’idée de ce chapitre est de mettre à profit les

connaissances acquises sur différents aspects du passé pour une meilleure compréhension de

l’Histoire du continent.

Le débat sur l’historiographie et les sources.

Les trois premiers chapitres, écrits par J. D. FAGE, Boubou Hama et Ki-Zerbo passent en revue

les différents aspects de l’historiographie africaine, son développement, ses tendances

actuelles, sa contribution à l’Histoire générale, et la place de l’Histoire dans les sociétés

africaines

L’évolution de l’historiographie africaine (Chap.1 – J.D. Fage) fait apparaître les

différentes traditions historiographiques qui se sont succédées en Afrique et leurs

caractéristiques principales notamment dans les différentes sous régions (australe, occidentale,

centrale et orientale).

L’Afrique du Nord en tant qu’entité relevant du monde méditerranéen avait été

auparavant présentée à travers les sources grecques et romaines.

On distingue pour l’Afrique Subsaharienne, trois grandes périodes :

- La période avant le 15è siècle de notre ère est marquée par les écrits des auteurs arabes qui

ont des contacts sporadiques avec les sociétés de l’Afrique Subsaharienne, l’Ethiopie, la Côte

Orientale de l’Afrique et le Bilad Al Sudan (Pays des Noirs) à l’Ouest. Le développement du

commerce transsaharien, phénomène majeur, a favorisé durant tout le « Moyen Age », la

circulation des informations entre les deux rives du Sahara et dans l’ensemble du Dar-As-

Islam.

De nombreux auteurs arabes méditerranéens et du Proche Orient fournissent de

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précieuses informations sur différentes régions de l’Afrique Subsaharienne. Ces

témoignages directs ou de seconde main ont contribué malgré leurs insuffisances à faire

connaître l’Afrique. On peut considérer Ibn Khaldun (1332 – 1406) né en Ifriqiya. Comme le

premier historien africain à travers sa principale œuvre la Muqqadima.

Des chroniques locales en langue arabe ont été également écrites en Afrique de l’Ouest

et en Afrique de l’Est. Celles de Tombouctou, le Tarikh El Sudan et le Tarikh El Fetash, écrites

à partir du XVIe siècle sont des œuvres à caractère historique. La chronique de Kano, celle de

Kilwa sont essentiellement des transcriptions de traditions locales.

- A partir de 15è siècle les récits des marins et commerçants européens vont suppléer au

tarissement progressif des sources arabes. Ces sources européennes fournissent des

descriptions intéressantes sur la Côte Atlantique de l’Afrique Occidentale, du Congo, de

l’Angola, de la Vallée du Zambèze et les contrées voisines ainsi que l’Ethiopie.

- Au 18è siècle le savoir historique sur l’Afrique se construit essentiellement autour de la

question de la traite atlantique des esclaves. Ce commerce honteux a considérablement

porté atteinte au statut d’être humain des africains noirs.

Hegel affirme que l’Afrique est un continent anhistorique et il est suivi par beaucoup

d’autres (H. Trevor-Hoper…).

- L’expansion européenne en Afrique au XIXe siècle (conquête française de l’Algérie 1830,

occupation britannique de l’Egypte 1882) a entraîné la prédominance d’approches

colonialistes de l’Histoire africaine.

Fage analyse de façon approfondie l’influence des européens (voyageurs, historiens

coloniaux, anthropologues, linguistes) sur l’historiographie africaine. Il explique aussi

comment l’Afrique a été exclue de collection historique illustre telle que La Cambridge

History of the British Empire (1929 – 1959).

L’Historiographie coloniale se fondait essentiellement sur les poncifs Hégéliens selon

lesquels les africains n’ont aucune histoire et s’ils en avaient elle ne valait pas la peine d’être

étudiée.

L’extension du système scolaire européen en Afrique, les mouvements de modernisation

de l’islam et l’émergence du mouvement nationaliste ont été à la base d’approches

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historiques locales en Arabe, en Anglais et en Français.

- A partir des années 1960, l’historiographie africaine avait ses premiers historiens de métier

lesquels vont contribuer à remettre en cause l’historiographie coloniale largement

influencée par les théories Hégéliennes.

La Place de l’Histoire dans les sociétés africaines

Chap.2 – B. Hama – J. Ki-Zerbo

Ce chapitre débute par une affirmation très forte : « Les hommes sont des animaux

historiques ».

Selon les auteurs tous les aspects de la vie quotidienne relèvent de processus historiques

dont ils façonnent le cours

L’expérience particulière de chaque société façonne son histoire. Trois idées-force

annoncées en introduction du chapitre sont développées.

1) L’affirmation que la conception africaine du temps est mythique et sociale, 2) Les africains

sont bien conscients qu’ils sont les acteurs de leur histoire.

3) La conception africaine du temps est véritablement historique.

De nombreux exemples à travers l’Histoire africaine sont évoqués pour illustrer les

imbrications entre les moments mythique et social du temps historique.

La Revue du contenu de ce chapitre relève l’ « essentialisme » qu’il confère aux

« africains » en tant que catégorie.

Les tendances récentes des recherches historiques africaines et contribution à l’histoire en

général

La contribution de P. D. Curtin examine les changements qu’a connus l’écriture de

l’Histoire africaine de la période coloniale à la période post-coloniale. Cette évolution est

marquée par une tentative de déconstruction et de décolonisation de l’Histoire. Les

nationalistes africains ont contribué largement à cette remise en cause à travers notamment

l’élaboration d’une méthodologie de collecte des informations autres que celles fournies par les

archives. Dans ce cadre, une nouvelle impulsion a été donnée à la collecte et à l’exploitation des

traditions orales. L’enseignement de l’Histoire africaine à l’Ecole a aussi été une source de

motivation pour la recherche historique qui initia de nouvelles traditions.

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Les Chapitres 4 à 9 traitent des sources et techniques utilisées dans l’Histoire africaine.

Dans ce cadre, Théophile Obenga présente un aperçu général des sources et techniques

spécifiques à l’Histoire africaine (Chap.4). Ce Chapitre traite des sources supplémentaires utiles

à l’écriture de l’Histoire africaine en mettant l’accent sur les Sciences naturelles. L’auteur

montre par exemple le rôle des techniques de datation dans la compréhension des débuts de

l’Histoire de l’humanité en Afrique de l’Est, notamment au Kenya, dans la Vallée de l’Omo en

Ethiopie, les gorges d’Olduvay en Tanzanie, dont les découvertes font de l’Afrique le berceau de

l’humanité. Les méthodes telles que la palynologie (l’analyse des pollens de plantes) peuvent

permettre de reconstituer des environnements disparus, et informer sur des changements

climatiques… intervenus au cours des périodes reculées de la Préhistoire. La contribution met

surtout en lumière les apports de l’interdisciplinarité à la connaissance du passé africain.

Les Chapitres 5 – 6 à partir d’une évaluation des sources écrites antérieures au XVe siècle

(H. Djait) et celles produites après le XVe siècle (Hrbek) traitent des problèmes épistémologiques

qui s’attachent à leur utilisation. Cette évaluation adopte une approche régionale tout en

sériant les différentes catégories de sources.

Avant le XIVe siècle ces sources sont essentiellement les hiéroglyphes de l’Egypte

Antique, les sources grecques, carthaginoises, latines et celles écrites dans d’autres langues

européennes.

Au-delà du XVe siècle les sources deviennent plus nombreuses, plus complexes et

couvrent d’avantage de zones. Les africains écrivent eux-mêmes dans leurs propres langues

avec les caractères arabes. Aussi les sources européennes relayent progressivement les sources

arabes et se répandent au 18è siècle et 19è siècle à la suite de l’expansion européenne.

Les conséquences des disparités régionales dans la distribution de ces différences

sources sont discutées dans le texte.

La tradition orale fait l‘objet d’une analyse en profondeur quant à sa nature, ses

différentes formes, les cadres sociaux qui influencent sa production (Jan Vansina). La

méthodologie de collecte et d’évaluation des traditions orales est exposée et débattue,

notamment pour ce qui concerne les chronologies. La tradition orale, qui n’est pas qu’évocation

du passé, est analysée en tant qu’héritage vivant dont la complexité tient au fait que les

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traditions reflètent une certaine conception de l’humanité et de la place de celle-ci dans

l’univers. Cette vision du monde se retrouve dans différentes cosmogonies (bamanan – peulh…).

Les principaux vecteurs de la tradition orale que sont en Afrique de l’Ouest les artisans

regroupés en une caste sont décrits ainsi que la symbolique qui les entoure.

Le Chapitre 9 par Z. Iskander traite l’apport de l’archéologie à la reconstitution du passé,

au travers d’une présentation détaillée de l’archéométrie et de ses techniques, des méthodes

de datation et de conservation des matériaux.

Trois Chapitres sont consacrés à la relation entre la Linguistique et l’Histoire (Chap.10 – 12).

Dans le Chapitre 10, P. Diagne se concentre sur la relation mutuelle entre la Linguistique

et l’Histoire. Il explore et discute les différents types de classement des langues, les

reconstructions phonologiques et les relations ethno-culturelles. Il traite également de certaines

sciences auxiliaires de la linguistique comme l’analyse typologique et l’onomastique qui sont

importantes dans la cartographie de certains groupes de langues. Diagne montre également

l’importance de la linguistique pour la Science historique africaine.

D. Olderroge qui s’intéresse aux migrations et aux différenciations ethniques et

linguistiques, montre l’impact des différentes écoles de linguistique européennes sur l’étude

des langues africaines et sur l’écriture de l’Histoire africaine. L’Ecole allemande a par exemple

propagé la théorie des langues Hamitiques, selon laquelle les cultures africaines étaient

influencées par les peuples d’Asie.

Greenberg (Chapitre 12-1) traite de la classification des langues africaines. Son

classement qui révise les travaux antérieurs sur les groupes linguistiques de l’Afrique retient

quatre grandes familles : Langues Afro-Asiatiques, le Niger-Kordofanien, le Nilo-Saharien et le

Khoisan.

Dans le Chapitre 12, 2 Dalby met en garde contre le niveau de simplification de la

classification actuelle des langues africaines. Il identifie deux régions de plus grande affinité

linguistique contenant 80 % des langues africaines : Celle du Nord qui correspond à la famille

Afro-Asiatique de Greenberg et la région Sud qui correspond au Niger-Congo ou Niger-

Kordofanien.

Les Chapitres 13 à 17 présentent les cadres physiques, géographiques de l’étude du

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passé africain. Le Chapitre 13 de Diarra donne une vue diachronique de l’Afrique des temps

géologiques anciens à nos jours. Il traite de la caractérisation géologique, de l’influence des

climats anciens. Ce Chapitre couvre les environnements bioclimatiques et biogéographiques. Le

chapitre se termine par l’évocation les richesses minérales de l’Afrique.

Au Chapitre 14, Al Mabogunge examine à nouveau les ressources naturelles et réfute

tout déterminisme géographique. « Les peuples tout comme les individus ont été et

continueront d’être les architectes de leur propre fortune (page 346).

Au Chapitre 15, le Directeur du volume J. Ki-Zerbo examine les défis qui s’attachent à

l’interdisciplinarité dans la recherche historique en général et dans le volume 1 en particulier. Le

Chapitre présente la manière dont les différentes sources : archéologie, art rupestre, articles

importés, tradition orale, linguistique moyens mnémotechniques, Sciences naturelles mises à

contribution dans l’étude de l’Histoire africaine se complètent mutuellement.

Le Chapitre 16 I et 16 II présente le cadre chronologique des phases pluviales et

glaciaires de l’Afrique. Dans ce Chapitre les tendances générales du changement climatique au

cours du Pléistocène et des périodes de l’Holocène sont passées en revue.

Les Chapitres 17 et 18 sont consacrés aux premiers Hominidés / et aux études des

origines de l’homme.

Dans un chapitre double (17), Y. Coppens traite du contexte paléontologique général de

l’évolution humaine alors que L. Balout met l’accent sur la technologie lithique (outils en pierre).

Y. Coppens établit la généalogie des grands singes et les hominidés conduisant à l’émergence de

l’espèce Homo, faisant ainsi une esquisse de l’Histoire de la recherche en paléontologie

humaine. La mise en parallèle des principales découvertes en Afrique de l’Est et du Sud sur des

sites tels que Olduvay, la Vallée de l’OMO, la Vallée de l’AFAR fait de l’Afrique le berceau de

l’humanité.

Au Chapitre 18, R. Leakey examine les contextes, la chronologie et les caractéristiques

principales des restes fossiles qui ont permis de retracer l’Histoire des ancêtres de l’homme

moderne. Ils attestent tous du fait que l’Afrique est le berceau de l’humanité. Ces fossiles se

retrouvent pour la plupart en Afrique de l’Est (dans les zones lacustres, dans les zones des failles

de la Vallée du Rift, en Afrique Australe dans les brèches calcaires des grottes. L’homme

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moderne, l’Homo sapiens apparu il y a quelques 100-200.000 ans et qui a colonisé la planète

entière, est le seul représentant de l’espace Homo sur terre. Les présapiens sont classés en deux

lignées : Homo et Australopithecus qui utilisaient les outils en pierre. Les Chapitres 17 et 18 sont

accompagnés d’un glossaire de termes techniques, de tableaux, et de figures illustrant les

crânes et les mâchoires de différents types d’Australopithèques.

Les Chapitres 19 à 26 donnent un aperçu de la Préhistoire par région : Afrique de l’Est,

Afrique du Sud, Afrique Centrale, Afrique du Nord, Sahara, Afrique de l’Ouest, Vallée du Nil,

depuis les premiers temps du Plio-Pléistocène au début et au milieu de l’âge de la Pierre taillée

au dernier Age de la pierre taillée.

Ces présentations régionales font état du développement du comportement et de la

« culture » humaine tel qu’on peut le lire à travers les fossiles hominidés / hominien, les outils

de pierre taillée, les ossements humains et animaux.

Des huit synthèses régionales, il ressort un cadre chronologique général pour tout le

continent. Ces principales étapes sont l’Oldowayen dans l’Est, le Sud et certaines parties du

Nord, et l’Acheuléen pour les phases initiales et archaiques. Le ‘Middle Stone Age‘ ou

Paléothique moyen en Afrique du Nord et au Sahara caractérisés par une diversification

régionale. La fin de l’Age de la Pierre taillée, Paleolithique Terminal, Epipaléolithique ou

Mésololithique selon les zones mais présentant les mêmes caractéristiques générales. Ces

étapes sont marquées par une amélioration de la technologie lithium qui aboutit à la production

de pointes bifaces utilisés comme pointes de lance, ensuite l’invention de l’arc et de la flèche

(technologie mésolithique) et le matériel de broyage plus fréquent sur les sites de l’âge récent

de la pierre taillée. Cela suggère un traitement plus systématique des plantes et des minéraux

en vue de produire par exemple l’ocre rouge utilisé dans l’art rupestre.

Viennent ensuite trois synthèses thématiques traitant de l’art rupestre d’Afrique, de

l’émergence, du développement et de l’expansion de l’agriculture et de l’apparition de la

métallurgie. Au Chapitre 26 J. Ki-Zerbo traite de l’art préhistorique africain. Après avoir localisé

les principaux domaines de présence de l’art rupestre en Afrique (Sahara, une partie de

l’Afrique du Nord, Afrique Australe) il s’attache à analyser les difficultés de datation de ces

représentations gravées ou peintes sur les parois des grottes et abris sous roche. L’auteur

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examine ensuite le genre, les styles, les motifs et la symbolique de ces représentations qu’il

considère comme la version illustrée du premier livre de l’Histoire africaine. J. Ki-Zerbo fait en

outre la critique des différentes théories qui ne voient dans cet art rupestre que des influences

extérieures, même s’il ne nie pas la possibilité d’existence de telles influences. L’influence

égyptienne sur l’art subsaharien est également réfutée. Les origines de l’art saharien ainsi que

celui du Sud de l’Afrique sont analysées de façon très critique.

Au Chapitre 27 – R. Porteres et J. Barreau traitent de l’émergence, du développement et

de l’expansion des techniques agricoles. L’analyse s’appuie sur les travaux de N. I. Vavilov qui a

identifié 8 centres d’origines des plantes cultivées dont celui d’Ethiopie en Afrique. Sans

remettre en cause l’importance du Proche Orient (notamment le Croissant fertile) dans la

« Révolution du Néolithique », les auteurs montrent que d’autres régions du monde ont joué

un rôle important dans les efforts de l’humanité pour la domestication des animaux et la culture

des plantes. Ils illustrent ces changements en Afrique à travers une exploration des

environnements naturels des écosystèmes à partir desquels ils retracent les origines de

l’agriculture africaine.

Le Chapitre 28 de J. Vercoutter, qui se présente comme un complément du chapitre de

F. Debono sur la Préhistoire récente du Nil, traite de l’émergence des économies de production

à l’avènement de la métallurgie du fer. Son titre « invention et diffusion des métaux et

développement de systèmes sociaux jusqu’au Xe siècle avant notre ère » apparaît impropre au

regard du contenu. Ce Chapitre traite des modèles de l’évolution culturelle au Néolithique du

3ème millénaire avant J.C. à 500 respectivement dans la Basse et la Haute Egypte. L’avènement

de la métallurgie n’est traité que dans les deux dernières pages du chapitre et la plus grande

partie du continent est ignorée.

La chronologie des métaux précieux tels que l’or et l’argent et même le cuivre est

précisée pour l’espace du Nil (4ème millénaire avant J.C). Le bronze est entré en scène au 2ème

millénaire avec le fer (météoritique) à partir de 1580 B.C. La production du fer se serait

intensifiée pendant la période de Napata pour culminer à Méroé dans les derniers siècles du 1er

millénaire avant J.C. Pour l’auteur cette évolution a eu un impact considérable sur la diffusion

de la technologie du fer en Afrique Subsaharienne. Outre le caractère impropre du titre, la

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plupart des hypothèses avancées dans ce chapitre sur la métallurgie du fer sont largement

obsolètes.

La conclusion de l’ouvrage du directeur du volume porte un titre tout à fait évocateur :

« De la nature brute à une humanité libérée ». On se rappelle que l’Introduction du volume

commençait par l’affirmation de l’existence d’une Histoire africaine. La conclusion du Directeur

du volume insiste sur le fait que l’Afrique est le berceau de l’humanité.

La création et la recréation de l’humanité qui a eu lieu en Afrique est encore à l’ordre du

jour : Il y a une centralité de l’Afrique qui a été perdue seulement au cours des 2000 dernières

années. Le mot de la fin de J. Ki-Zerbo « En d’autres termes, d’une certaine manière, la

préhistoire de l’Afrique n’est pas encore terminée » établit un sentiment de continuité de cette

Histoire africaine.

Analyse critique du contenu du volume D’une façon générale, les évaluateurs reconnaissent la

validité et l’intérêt des contenus de ce volume malgré l’ancienneté de la publication. Il est

cependant nécessaire d’envisager dans le cadre d’une révision de ces volumes une

restructuration de l’organisation des chapitres et l’actualisation de certaines connaissances.

La restructuration proposée pourrait consister en la définition de nouvelles sections plus

cohérentes regroupant des sujets connexes. Ainsi on pourrait créer les sections :

« Environnements de l’Afrique » consacrée à la géographie, à la géologie, aux climats anciens et

présents.

- Historiographie qui traiterait l’Histoire de la Recherche historique en mettant l’accent sur

les développements régionaux. Elle inclurait l’Histoire de la Recherche sur les primates et les

langues.

- Technologie : Cette section qu’on a distinguée en Archéologie pourrait intégrer aussi les arts

et prendre en compte le travail de la pierre, du bois, de la poterie, la métallurgie,

l’architecture.

- Aspects des cultures africaines : qui s’intéresserait aux modes de subsistance différents : les

cueilleurs, le pastoralisme, l’agriculture.

- Etudes Régionales de l’Histoire africaine :

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La Revue soulève le débat déjà ancien sur l’usage du terme « Préhistoire » qui

« demeure largement euro centrique ».

Selon les évaluateurs, comme pour le reste de l’Histoire du monde, le volume souffre

d’un parti pris en termes de genre. Une nouvelle édition devrait faire plus de place aux

femmes.

Le Chapitre 9 du volume nécessite une refonte complète en termes de contenu,

l’Archéologie étant une discipline des Sciences Humaines qui ne saurait se réduire à

l’Archéométrie. Un chapitre distinct pourrait être consacré par exemple au Patrimoine

historique et archéologique africain.

La critique sur la « Race » et le type racial au regard de certains contextes comme celui

de l’Afrique du Sud mériterait une mise au point dans un chapitre nouveau. Il y a encore la

nécessité d’une plus grande compréhension des concepts de « race » et de langues.

Les relations entre anthropologie, linguistique et histoire mériteraient les plus longs

développements qui prendraient en compte des travaux tels que ceux de Christopher Ehret

(1982), Williamson Kay (1998).

Sur les origines de l’homme, l’édition révisée devrait faire connaître les sites ainsi que les

cartes des régions où ont été trouvés récemment les fossiles nouveaux. Des données

nouvelles issues de recherches récentes en Afrique du Sud (Malawi, Tanzanie, Kenya,

Ouganda, Ethiopie, Tchad) permettent d’améliorer notre compréhension de l’Afrique

comme berceau de l’humanité.

S’agissant des études régionales, il est nécessaire d’associer le Sahara avec l’Afrique du

Nord et la Vallée du Nil. Le Sahara, le Sahel et les régions de savane du Sud doivent

également être étudiées en rapport, d’autant que des résultats de recherche (sur la

domestication et l’agriculture récente) montrent que ces régions ont été en contact régulier.

Des recommandations pédagogiques Volume I :

- Les thèmes à retenir devront prendre en compte les questions de portée générale qui

concerne toute l’Afrique. En cela les manuels devront intégrer l’apport de l’Archéologie à la

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compréhension du passé de l’Afrique.

1) Une présentation des hommes fossiles (Chapitre 18) donnera les origines

paléontologiques de l’homme jusqu’à l’émergence de l’homme moderne ;

2) Des données doivent être extraites du Chapitre 13 et mises à jour pour une introduction

à la géographie physique du continent et du Chapitre 16 de la paléoclimatologie de

l’Afrique ;

3) Les synthèses régionales devront être adaptées à travers une approche chronologique

cohérente. Des Chapitres pourraient être consacrés aux thèmes suivants :

- Débuts Culturels : Tradition de fabrication des tout premiers outils.

Les techniques de datation chronologique peuvent être expliquées dans des rubriques

colorées avec des diagrammes.

- Les Premiers Hommes modernes et les traditions régionales : Les chasseurs-cueilleurs

spécialisés.

- Les premiers agriculteurs et éleveurs de l’Afrique ancienne : Présenter des informations

actualisées sur l’apparition de l’agriculture et de l’élevage.

- Les premiers artistes et artisans de l’Afrique ancienne : Présenter à cet effet des

informations actualisées sur l’art rupestre d’Afrique et l’apparition de la métallurgie.

- L’Archéologie comme patrimoine culturel et ses rapports avec l’identité des peuples.

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Volume II.

L’Histoire générale de l’Afrique: Afrique Ancienne

Directeur de volume : G. Mokhtar

Le Volume II de l’H.GA comporte 29 Chapitres et une introduction de 28 pages.

D’entrée de jeu les évaluateurs reconnaissent le professionnalisme, la compétence et la

conscience qui ont présidé à la rédaction du Volume. Tout en reconnaissant la solidité de

l’ensemble de l’ouvrage, ils montrent à différentes reprises les actualisations que

nécessiteraient l’utilisation pédagogique de certains chapitres.

Ce volume qui se situe dans le prolongement chronologique du premier volume couvre

la période allant de la fin du Paléolithique à l’avènement de l’Islam.

Ce volume donne un sens au concept d’Histoire ancienne de l’Afrique. Cependant, il ne

met pas fin au débat sur les cadres chronologiques de l’Histoire africaine. Il n’y a pas de repères

« ad quo et ad quem » de la période antique en Afrique prise dans sa globalité. La question est

abordée dans l’introduction… On relève que les auteurs des différents chapitres (les études

régionales en particulier) ont intégré dans l’Histoire ancienne de l’Afrique les cultures dites

néolithiques ou néolithisantes qui se sont développées à différents endroits avec ou sans cadre

étatique. La lecture de l’ouvrage laisse voir deux régions :

• Une première région constituée de la basse et moyenne Vallée du Nil et l’Afrique

Méditerranéenne. Ici l’abondance et la variété de la documentation (textes, découvertes

archéologiques) autorisent à parler d’Histoire des cultures et civilisations (égyptienne,

koushite, axoumite, carthaginoise, et lybique dans une moindre mesure). Les documents

sont aussi bien internes qu’externes (grecques, latines, hébraïques, assyriennes…).

• Une seconde région qui couvre la plus grande partie de l’Afrique et dont la connaissance des

modes de vie depuis la fin du Paléolithique repose essentiellement sur l’Archéologie. De ce

fait, on ne peut valablement parler pour cette région selon Babacar Sall que d’Etudes des

cultures et civilisations anciennes, l’Archéologie ne pouvant renseigner sur certains des

aspects essentiels de la vie dont la connaissance participe de l’usage du concept d’Histoire

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(relations de propriété et de production, système de répartition des biens, économie

politique).

L’approche régionale est privilégiée dans l’étude de ces différentes cultures et

civilisations. Sur le plan de sa construction l’un des traits marquants du Volume II c’est la

faiblesse de l’articulation entre les différents chapitres. Dans la perspective de l’utilisation

pédagogique de l’ouvrage l’on pourrait réorganiser ces chapitres dans un souci de cohérence

d’ordre chronologique.

Le Chapitre I rédigé par Cheikh Anta Diop est intitulé : Origine des anciens Egyptiens ».

L’auteur cherche à donner plus de profondeur à l’Histoire des sociétés africaines en général et

négro africaines en particulier. La civilisation des pharaons est réintégrée dans son giron négro

africain. Le terme « origine » est problématique au plan historique, Babacar Sall lui préfère celui

de « provenance ». L’auteur étudie l’appartenance raciale des communautés qui étaient

devenues les anciens égyptiens, et le caractère négro-africain de la civilisation qu’ils avaient

créée. Il présente des arguments bien sériés : d’ordre paléoanthropologique, iconographique,

biologique (test de la mélanine), ostéologique, textuel et philologique. Il exploite aussi des

parallélismes fondés sur une approche ethno linguistique. Depuis quelques années des cercles

d’études poursuivent des recherches et tentent d’approfondir la perspective ouverte par les

travaux de C. Anta Diop à travers diverses publications (ANKH Revue d’Egyptologie, Paris,

Journal Of African Civilisation New Brunschwick Cahiers d’étude Caribéens Antilles Guyane).

Dans le Chapitre II « L’Egypte pharaonique », A. Abu Bakr fait une présentation de

l’évolution générale de l’Histoire du royaume de l’Egypte ancienne. Ce panorama qui fait

ressortir les faits saillants en donnant de bons repères de cette longue Histoire n’analyse pas

l’Histoire de la période dynastique, aspect incontournable dans l’étude de la civilisation du

royaume d’Egypte. Cette présentation des grandes périodes de l’Histoire du royaume d’Egypte

(pages 83–106) est à affiner en raison de la place centrale de l’Egypte dans l’Histoire de

l’Afrique.

Toutes les subdivisions doivent y être intégrées avec leurs caractéristiques propres. La

formation du royaume d’Egypte devrait partir de la constitution des premières entités ethno

claniques en intégrant toutes les phases depuis la période Pre-Dynastique et l’ancien empire –

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2900 à 2200 (3ème – 6ème dynasties) jusqu’à la XXVIIe dynastie qui était perse et la XXIe dynastie

grecque (Cf. Michel Dessoudeix, Chronique de l’Egypte ancienne, 2008).

Le Chapitre III de J. Yoyotte traite de la société, de l’économie et de la culture de l’Egypte

ancienne. Si les cadres économiques de la relative stabilité du royaume sont assez bien

restituées l’analyse de la société est moins réussie. L’auteur omet par exemple de signaler le

caractère très inégalitaire de la société Egyptienne y compris devant la mort. Par contre

l’esclavage n’y a jamais été institutionnalisé.

Le Chapitre IV de Abd El Hamid Zayed porte sur les relations de l’Egypte avec le reste de

l’Afrique. Très informatif en faits historiques reconstitués, ce texte entretient une certaine

confusion. Il ne périodise pas correctement les relations entre la Basse Vallée du Nil et les autres

régions de l’Afrique avant l’émergence du royaume d’Egypte et ne précise pas les contacts et

relations historiquement attestées entre le royaume d’Egypte et certaines régions d’Afrique

(Exemple de l’Afrique de l’Ouest traité par ailleurs par B. Wai Andah, Chapitre XXIV).

Au Chapitre V sous le titre de « Legs de l’Egypte » Rashid El Nadoury analyse ce que

l’Egypte a transmis aux cultures et civilisations des temps post pharaoniques. Après les études

de M. Bernal, l’étude doit prendre en compte le contenu de Black Athéna : The Afro-Asiatic

roots of classical civilisations (1987).

Le VIe Chapitre : « L’Egypte à l’époque Hellénistique » traite de l’évolution du royaume

d’Egypte sous domination grecque à la fin du VIe siècle avant J.C.

Pour Babacar Sall, l’Egypte hellénistique « a été une rencontre et un dialogue de cultures

et de civilisations sur un bout de terre africaine ». L’écriture évolue. De jeunes égyptiens ont des

précepteurs grecs.

Cette particularité de l’époque hellénistique doit beaucoup selon Babacar Sall, aux longs

contacts entre grecs et négro-africains (Cf. centralité du noir Eurybate dans les textes

homériques) en Grèce d’abord et sur le sol africain (comptoirs de Naucratis, colonies de

Cyrenne et de Barké). Selon une tradition ancienne, des savants venaient acquérir la

connaissance élaborée en terre africaine (Obenga Th, l’Egypte, la Grèce et l’Ecole d’Alexandrie

Paris, l’Harmattan 2005).

Au Chapitre VII, S. Donadoui examine ce que fut l’évolution de l’Egypte en tant que

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colonie romaine à partir de l’an 30 avant J.C. Cette domination se caractérise par une politique

délibérée d’étouffement de la civilisation égyptienne surtout à partir de 380 après J.C., laquelle

n’est pas évoquée par l’auteur. Parmi les faits à signaler on peut retenir l’incendie de la

bibliothèque d’Alexandrie, les assassinats de prêtres à Alexandrie et les fermetures de temples

en 391. La domination romaine en Egypte et en Afrique du Nord (avec des guerres de

résistances célèbres) doit être perçue du point de vue africain comme la première agression

culturelle à l’encontre de l’Afrique.

Les Chapitre 8, 9, 10 et 11 pourraient être regroupés dans un ensemble qui pourrait

s’intituler : Le couloir nilotique nubio-soudanais dans l’antiquité : identité et histoire. Ces

chapitres traitent des facteurs géographiques et environnementaux, du facteur humain et de

l’Histoire des Etats Nubio-soudanais : Kerma, Koush, Napata, et Méroé.

Le Chapitre 12 retrace le processus d’évangélisation précoce de la Nubie si l’Histoire de

la genèse et de l’évolution de ces états est bien retracée. L’auteur n’insiste pas sur l’utilisation

que faisait Rome de la foi chrétienne pour tenter de remodeler les dites sociétés. C’est ainsi que

sont crées les royaumes chrétiens dans la Moyenne Vallée du Nil.

Les Chapitres 13, 14, 15 et 16 traitent de l’Histoire du royaume d’Axoum. Cette entité a

eu une longévité exceptionnelle. Né durant l’antiquité, il a perduré jusqu’au début de l’époque

moderne avant d’être envahi par les Galla.

Le Chapitre 17 qui s’intitule les « Protoberbères » se fonde sur un postulat qui est celui

de l’assimilation entre Libuis (libyens) des textes grecs et berbères.

Le fondement historique de l’assimilation demeure fragile au regard de l’état actuel des

recherches. L’étude de la constitution du monde berbère pour être pertinente doit prendre en

compte les Mechtoides et le phénomène migratoire qui a conduit sur les côtes méridionales des

bassins méditerranéens plusieurs vagues de populations eurasiatiques (G. Camps et M. Fantav,

les Berbères : identités et Histoire, 1982).

Le Chapitre 18 écrit par B. H Warmington est consacré à Carthage. L’étude descriptive

est intéressante. Il reste que Carthage a évolué à la périphérie des dynamiques sociopolitiques

qui ont concerné l’Afrique dans l’antiquité.

Le Chapitre 19 double traite de la période romaine et post romaine en Afrique du Nord.

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Pour la période romaine, A. Mahjoubi tente d’identifier les communautés humaines citées par

les textes gréco-latins (Gétudes, Garamantes). Leur identification aux berbères n’a pas de

fondements historiques solides. Le Chapitre présente une page d’histoire romaine qui n’insiste

pas sur les résistances à la politique romaine faite de surexploitation.

Au Chapitre 20, Pierre Salama aborde le Sahara pendant l’antiquité classique. Ce texte

d’érudition philologique ne donne pas au Sahara toute sa place dans l’Histoire de l’Afrique. Ainsi

l’auteur a donné l’avantage aux relations entre le Sahara et le monde gréco-romain. Le recours

aux seules sources gréco-romaines de l’avis même de nombre d’hellénistes ne suffit pas pour

faire l’Histoire du Sahara. La lecture de G. P. Murdock : « Africa, It’s peoples and their culture

History » 1959 aurait permis de centrer l’analyse de Salama dans l’antiquité.

Les Chapitres 21 à 29 sont consacrés aux études régionales. L’Histoire ancienne de

l’Afrique commence avec des communautés productrices de leur nourriture. Les chapitres

consacrés aux différentes régions et à des thèmes spécifiques transversaux explorent les

dynamiques à l’œuvre.

Le Chapitre 21 « Introduction de la fin de la Préhistoire de l’Afrique Subsaharienne » de

M. Ponanski soulève une série de problèmes qui seront débattus dans les chapitres suivants. M.

Ponanski insiste sur l’unité de l’Afrique malgré les contraintes géographiques qui caractérisent

certaines zones comme le Sahara qui n’a cependant jamais constitué une barrière aux relations

inter africaines.

Il rappelle également la continuité culturelle qui caractérise l’Afrique au-delà des

différences. Le changement est partout remarquable et aucune région n’a connu de stagnation.

Il s’érige en conséquence contre le concept de « continent noir » ou « cul de sac ». Si les idées

de M. Ponanski mettaient en cause nombre d’idées reçues sur l’Afrique au moment où il

écrivait, certaines d’autres sont controversées en regard des nouvelles découvertes. Le débat

porte sur l’avènement des nouvelles technologies comme celle du fer (le sort fait aux anciennes

technologies en différents endroits) l’Histoire du peuplement en rapport avec le mouvement

des peuples. Les relations entre migrations et « diffusion » des technologies nouvelles,

l’endogénéité des cultures et civilisations et la question des influences étrangères.

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• La métallurgie du fer

Une des questions les plus débattues dans les chapitres consacrés aux études régionales

est celle de la métallurgie du fer (Chapitre 21 au Chapitre 29) en raison certainement de liens

qu’on établit entre la métallurgie du fer et le développement de l’agriculture et la formation des

sociétés complexes. De nombreuses découvertes faites en différentes régions ont permis un

renouvellement du paradigme qui privilégiait la « diffusion » de cette technique à partir de

différents centres (Egypte, Axoum, Méroé) ou Afrique du Nord durant les premiers siècles de

l’ère chrétien.

Aujourd’hui de nombreux résultats de fouilles attestent de l’invention indigène de la

métallurgie du fer à des dates qui remontent au 1er millénaire avant J.C., 400 avant J.C au

Nigéria, 200 avant J.C à Jenné Jeno (Mali), 400 avant J.C. dans les grands lacs.

Ces découvertes doivent permettre d’actualiser les informations relatives à l’âge du fer

des chapitres 27 sur l’Afrique Australe, chapitre 29 sur les sociétés de l’Afrique au Sud du Sahara

au début de l’âge du fer.

- L’apparition de la technologie du fer n’est pas synonyme de l’abandon de l’usage des objets

de pierre. Ponanski estimait que la tradition de l’âge de pierre c’était poursuivie dans

certaines régions de l’Afrique jusqu’à 1000 ans de notre ère. Cette utilisation tardive des

technologies antiques en Afrique n’a pas de lien avec une quelconque appartenance

ethnique selon Félix Chami.

- Les études régionales attestent de la précocité de la domestication des plantes dans le cadre

d’établissements humains plus ou moins étendus et relativement permanents. En Afrique de

l’Ouest par exemple dans des espaces compris entre le Mali, la Mauritanie et le Sénégal la

culture du riz remonterait au IVe millénaire. A ces activités étaient associés la chasse, la

pêche, le ramassage des mollusques.

• L’Histoire du peuplement :

Les migrations, phénomène marquant de l’Afrique sont analysées à travers les chapitres 22

et suivants ainsi que leurs conséquences supposées ou avérées. Une des migrations les plus

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controversées quant à ses dates, itinéraires et conséquences est bien celle des Bantous.

Chami Félix réfute la thèse qui fait venir les locuteurs Bantous d’Afrique de l’Ouest pour

peupler le reste de l’Afrique Subsaharienne. Est aussi débattue la thèse de la domination des

« Bushmen » ou Khoisans en Afrique Orientale, Centrale et Australe telle qu’exposé par J.

Sutton au Chapitre 23 intitulé « l’Afrique de l’Est avant le septième siècle ».

L’hypothèse selon laquelle la Côte Swahili-antique était peuplée par des « Kushites »

développée par Sheriff A (Chapitre 12) est également sujette à caution.

Quand au peuplement de l’Ile de Madagascar (Chapitre 28) étudié par Vérin, les arguments

relatifs aux deux migrations (Asie du Sud-est et Afrique) reposent essentiellement sur des

études linguistiques.

Vérin défend l’existence à Madagascar du « génotype » africain antique et donc un mélange

ancien entre austronésiens et africains. Félix Chami émet des réserves quand au statut servile

attribué à ces africains par Vérin. Cette idée selon Chami relève d’un vieux préjugé colonial qui

fige les africains dans un rôle, celui de la servilité, même pour la période de l’antiquité.

Les études régionales ont intégré les dynamiques de l’évolution sociale de l’Afrique

ancienne. La Vallée du Nil apparaît comme le lieu d’épanouissement des cultures et civilisations

de l’Afrique ancienne.

Les recherches révèlent progressivement des espaces sans entités étatiques connus. C’est

par exemple le cas des recherches archéologiques sur Djenné Djéno, une cité dont les origines

remontent au 3ème siècle avant J.C. et dont l’épanouissement est lié à son environnement

proche propice mais aussi à des relations d’échanges avec des régions plus lointaines.

Recommandations pour une utilisation pédagogique du Volume II

1. D’une façon générale :

Il faudra, dans la perspective d’un usage du Volume II pour l’enseignement, commencer

par rappeler que, pour la période antique, l’Histoire de l’Afrique est dominée par celle de la

Vallée du Nil où se sont constituées des organisations sociopolitiques qui ont laissé les

témoignages les plus nombreux.

On évitera de singulariser l’Histoire africaine en établissant des comparaisons avec

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l’Histoire de la période ancienne de l’Europe dominée par celle du Rivage septentrional des

bassins de la Méditerranée.

Il est proposé de n’enseigner sous le chapeau Préhistoire que le Paléolithique. Pour la

période suivante on parlera des cultures et civilisations anciennes de l’Afrique. Pour

l’enseignement des civilisations égypto Koushites relevant de l’ensemble précité, il est proposé

le découpage suivant :

1) Aspects de la civilisation et l’Egypte pharaonique :

Le Chapitre III de l’édition de 1980 (H.G.A) peut servir de base. Les trois points à retenir ici

seraient : les bases de l’évolution de l’Economie en Egypte, l’Administration de l’Egypte, l’Etude

des Sciences, Arts et Techniques. Un quatrième point pourrait porter sur la « Vie quotidienne en

Egypte ».

2) L’Egypte dans le Monde :

On traitera sous cette rubrique du legs de l’Egypte ancienne. On y ajoutera un point intitulé

« Relations du royaume d’Egypte avec certaines régions de l’Afrique nilotique et hors de la

Vallée » (cf. Chapitre 13).

2. En rapport avec les différents Chapitres :

Sur la base du Chapitre 1, l’Histoire des formations politiques créées par les Noirs

commence avec l’ancien royaume d’Egypte (on enseigne encore dans les écoles africaines que

le Ghana a été le plus ancien état noir connu) constitué à la fin du IVe millénaire avant J.C. Sur la

base des arguments développés par C. A. Diop on peut affirmer selon Babacar Sall que les

auteurs des civilisations africaines et du royaume d’Egypte étaient des noirs.

Il faudrait intégrer au Chapitre II l’analyse du processus qui a permis l’avènement du

royaume d’Egypte.

Le rôle de la violence est décrite dans les documents protohistoriques doit être mis en

exergue dans ce processus.

Le Chapitre 3 devra être associé avec les 4 et 5 sous le titre : L’Egypte ancienne dans le

temps et l’espace » qui traiterait les points suivants :

- L’Egypte : économie, société et vie quotidienne ;

- Les relations entre l’Egypte ancienne et certaines régions africaines ;

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- L’impact de l’Egypte ancienne sur les civilisations post pharaoniques en Afrique noire.

La question des techniques en usage en Egypte est l’une des plus attrayantes pour le grand

public. L’étude de cette thématique permet de montrer la centralité de l’Afrique noire dans

l’élaboration des sciences et de leur diffusion (Chapitre 3).

Le Chapitre V qui traite l’Egypte à l’époque « hellénistique » devrait être exploité. On

insisterait sur le fait que cette période a connu un véritable dialogue de cultures entre

égyptiens, grecs. Les écrits grecs montrent l’image que les grecques se faisaient des africains,

notamment les éthiopiens.

- Le Chapitre VII (Egypte sous domination romaine) est à regrouper avec le Chapitre 19 (La

période romaine et post romaine en Afrique du Nord) sous la Rubrique « la première grande

agression culturelle. Au dialogue des cultures de l’époque hellénistique succédait à l’époque

romaine un véritable choc culturel.

Les Chapitres 8, 9, 10 et 11 offrent les éléments permettant d’étudier :

a) l’époque pré-Koushite marquée par une multitude d’entités politiques : Wawai, Irthet,

Sétou, Yam. Le royaume dit de Kerma (dans l’actuel Soudan) apparaît comme le fleuron

de la Nubie Pré Koushite ;

b) Le royaume de Koush qui a duré 24 siècles.

Des innovations majeures qui ont eu lieu au cours de la période méroïtique mériteraient

d’être enseignées. Il s’agit de l’élaboration d’un système d’écriture alphabétique : Le

Méroïtique, l’accession des femmes au pouvoir suprême, les célèbres candaces de Koush.

On pourra retenir du Chapitre 12 (sur l’évangélisation de la Nubie) dans une perspective

pédagogique, le rôle que l’Afrique a joué dans l’affirmation de la foi chrétienne. L’étude de la

christianisation de la Nubie peut servir également de transition pour l’étude du Royaume

d’Axoum acquis au christianisme au 4ème, 5ème après J.C.

Les Chapitre 13 à 16 consacrés à l’Histoire d’Axoum peuvent servir de fiches pédagogiques,

moyennant une simplification de l’analyse confuse par moments.

L’exploitation du Chapitre 17 (qui traite des berbères) devrait se faire prudente en raison de

la complexité des problèmes identitaires dans les pays dont la population a une composante

berbère.

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Quant à l’Histoire de Carthage (Chapitre 18), Babacar Sall estime qu’elle ne devrait pas

occuper une grande place dans l’enseignement de l’Histoire de l’Afrique dans l’Antiquité.

Le texte du Chapitre 20 sur le Sahara, ne devrait servir dans une perspective pédagogique

que comme une simple entrée (introduction dans l’étude historique du Sahara).

A la suite de la relecture des Chapitres consacrés aux études régionales (Chapitre 21 à 29),

Félix Chami recommande la réécriture de la plupart d’entre eux au vu des nouvelles découvertes

(archéologiques notamment). Il insiste sur la nécessité d’expliquer aux étudiants africains les

changements de paradigmes intervenus et en cours dans l’approche de l’Histoire africaine ainsi

que les raisons de ces changements. L’Histoire africaine a été écrite par le passé avec très peu

de données disponibles et à partir de paradigmes influencés par les « préjugés racistes » qui ne

sont pas perçus par la plupart des historiens africains. Des historiens tels que C. A. Diop ont

remis en cause ces paradigmes erronés et en ont exigé le renouvellement pour l’écriture

l’Histoire africaine. L’enseignement doit exercer l’esprit critique des jeunes face aux

présentations qui ont été faites de l’Histoire africaine dans le passé et celles qui ont cours

maintenant.

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Volume III :

L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du VIIe au XIe siècle

M. El Fasi Directeur de Volume I Hrbek Co-directeur.

La Revue de ce Volume a été effectuée par Penda MBOW et Idrissa BA et les deux

lecteurs se réfèrent à l’édition UNESCO NF A 1990, 954 pages.

L’ouvrage qui comprend 28 chapitres est structuré autour de la naissance et de

l’expansion de l’Islam, son hégémonie sur le pourtour de la Méditerranée et sa force de

pénétration en Afrique Subsaharienne. On note beaucoup de chevauchements et de répétitions

au niveau des chapitres même si l’approche se veut chronologique et régionale.

Les quatre premiers Chapitres traitent de l’avènement de l’Islam et de l’essor de la

civilisation musulmane qui se matérialise par la création d’un grand Etat dans la région

Méditerranéenne à partir des conquêtes du VIIe et VIIIe siècle et l’épanouissement d’une

nouvelle culture à l’intérieur de cet ensemble. Cette civilisation musulmane qui, a son apogée,

fut en fait la synthèse de diverses traditions de peuples convertis à l’Islam a favorisé un nouvel

ordre social appuyé sur une créativité scientifique, artistique et technologique.

L’impact du monde islamique a été considérable sur les dynamiques sociales de

l’Afrique. Tout au long des siècles, l’islamisation et le commerce sont restés étroitement liés.

Aussi la co-présence du système social induit par l’Islam et des traditions africaines a favorisé

des interactions entre le monde musulman et les cultures africaines. Au-delà, de la question de

l’Islam et de son expansion, Hrbek redéfinit la géopolitique de l’époque en précisant la place

que l’Afrique y occupa. Il met en évidence l’’importance du commerce et le rôle joué par les

peuples d’origine africaine dans l’océan indien et dans le nouvel espace musulman.

Dans le Chapitre 2 « L’avènement de l’Islam et l’essor de l’Empire musulman, El Fasi et

Hrbek définissent la religion musulmane, (sa genèse et ses relations avec les autres confessions

Abrahamiques) reviennent sur la biographie du Prophète Muhammad. Y sont également

abordés le regard de l’Islam sur les non musulmans, la grandeur et la décadence du califat ainsi

que la prépondérance des Turcs à la fin du XIe siècle. La montée des forces nouvelles (Zirides,

Arabes, Seldjoukides) modifie la géopolitique. Les changements qui interviennent sont aussi

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économiques, sociaux et spirituels, avec notamment le développement du souffisme…

Le Chapitre III traite en deux parties complémentaires l’Islamisation de l’Afrique du Nord

(M. El Fasi) et la diffusion de l’Islam en Afrique au Sud du Sahara (I.Hrbek).

Pour l’Afrique du Nord, l’auteur distingue l’Egypte (ancienne province byzantine où

s’affrontent différentes formes de christianisme) du Maghreb. La progression de l’Islam profite

des nombreuses querelles religieuses et de l’arrivée continuelle des Arabes de la Péninsule. Au

Maghreb cohabitaient le judaïsme, le christianisme et les religions traditionnelles. La conquête

Arabe s’y heurtait à la forte résistance des berbères. L’action désormais légendaire d’Ukba Ibn

Nafi constitue un tournant dans l’islamisation du Maghreb même si celle-ci progresse de façon

contrastée, le christianisme restant dominant dans le Sahili, les régions méridionales et le Mzab.

Les grandes étapes de l’islamisation de la région sont indiquées depuis la conversion de

nombreuses tribus berbères (défaite de Al Kahina en 703) jusqu’à l’achèvement de l’islamisation

de l’ensemble du Maghreb au 10è siècle. Cette évolution est marquée par des dissidences

(Kharidjites) et des hérésies (religion nouvelle chez les Barghawata).

En Afrique Sud-Saharienne, à l’exception de quelques terres de colonisation Arabe

(Soudan Oriental), le rôle d’envahisseurs arabes dans l’islamisation fut limité. L’islamisation du

Soudan Occidental s’est faite avant la conversion totale des populations du Maghreb. Selon Al

Zuhuri, le rôle des commerçants Ibadites installés à Tadmeka depuis le IXe siècle a été important

dans l’introduction de l’Islam. Ces Ibadites qui ont régné à Sijilmassa étaient présents dans

d’autres localités notamment le long de la route reliant la Lybie au bassin du Lac Tchad. Cet

islam des débuts restait superficiel et influencé par les survivances des religions berbères et

africaines.

Les commerçants furent les premiers à se convertir, cette activité étant étroitement liée

à l’Islam en Afrique. Ces convertis (Wankara, Dioulas, Diankankés) évoluaient en communautés

avec leurs quartiers spécifiques.

Les groupes dirigeants, notamment les chefs et leur proche entourage (Roi du Tekrour,

Chef Dya Kossoi à Gao / 1009/1010 et du Roi de Malal), vont suivre dans l’adoption de l’Islam.

Les Etats ont des intérêts à la fois internes et externes à entrer dans l’islam (notamment les

nécessités du commerce avec l’Afrique du Nord). La pratique musulmane des souverains est

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parfois peu orthodoxe. Le changement viendra des Almoravides qui vont imposer un islam

orthodoxe au détriment des Kharidjites. Mais ce sont essentiellement les commerçants locaux

(Wankara, Dioula) qui par vagues vont contribuer à répandre l’Islam en Afrique Subsaharienne.

Au XVe siècle l’Islam se consolide dans de nombreuses régions du Soudan Occidental (Kano,

Katsina) grâce à l’influence du Prêcheur réformateur Al Maghîlî sur les chefs politiques. Au XVIe

siècle l’Islam est assez bien implanté dans le Soudan Occidental, de l’Atlantique au Lac Tchad. En

Nubie et au Soudan Nilotique, l’islamisation suivit un processus permanent lié à la proximité de

l’Egypte et à l’arrivée des nomades et des commerçants arabes.

Dans la corne de l’Afrique l’Islam pénétra l’Ethiopie à partir des Iles de Daklat et Zayla.

Au VIIIe – XIe siècle l’Islam gagna les bords du Golfe d’Aden sur la côte de l’Afrique Orientale et

les Iles des Comores. A Madagascar, l’Islam s’installa de manière contrastée.

L’Islam en tant que système social en Afrique depuis le VIIe siècle

Dramani Issouffi (Chapitre 4) analyse l’Islam comme religion et comme élément de

culture spirituelle et sociale faisant partie intégrante de la civilisation d’Afrique Noire. L’auteur

analyse les relations entre l’Islam, les peuples africains et leurs cultures. Il explique le succès de

l’Islam en Afrique par son dogme et sa dialectique qui participent d’une unité profonde et de la

diversité culturelle. Après avoir rappelé les obligations de l’Islam, il évoque quelques unes des

raisons qui ont facilité son adoption par les africains, dont la liberté d’adhésion (par un acte

individuel de foi) à la communauté (UMA).

L’Islam africain dans lequel domine le Malékisme est marqué par l’apparition et le

développement de courants mystiques notamment le souffisme. Les relations que l’Islam

entretient avec les cultures africaines ont connu une évolution contrastée. Après une période

de coexistence aisée (XIe siècle) durant laquelle l’Islam progresse en Afrique de façon

relativement pacifique, on voit apparaître des tensions sociales et culturelles après le XIe siècle.

Celles-ci sont alimentées par la pression des juristes musulmans dont certaines prescriptions se

heurtent aux résistances des cultures locales.

Les souverains africains ont profité des villes et de leur encadrement musulman pour

renforcer leur pouvoir et dans certaines régions l’adoption de l’écriture et des techniques

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arabes s’est accompagnée d’une « arabisation » des élites dont les effets se ressentent

notamment dans les listes généalogiques. Pour la fin du XVIe siècle et le début du XVIIe siècle,

l’auteur relève une interruption du dialogue entre l’Islam et cultures africaines qui se traduisent

par réactions hostiles à l’Islam dont l’une des plus radicales a été celle de Soni Ali (1466 – 1492).

L’éclatement politique et la désintégration sociale qui suivent les règnes d’Askia Mohamed,

(1493 – 1528) et Askia Daoud (1549 – 1582) annoncent le déclin du Songhai. L’intégration

sociale à partir de l’Islam ne se produira que beaucoup plus tard au cours des XVIIIe et XIXe

siècles.

L’analyse critique de ces 4 premiers Chapitres portant essentiellement sur l’Islam et son

expansion en Afrique fait ressortir quelques insuffisances : le caractère trop superficiel du

Chapitre I qui embrasse une problématique trop vaste. L’absence de cartes et de documents

iconographiques constitue la plus grande faiblesse de lattice. Le Chapitre 2 traite d’avantage de

la genèse de l’Islam, de la biographie du Prophète, et du développement de la religion que de la

place de l’Afrique dans la société musulmane. Le choix opéré par le volume a été de structurer

l’Histoire de l’Afrique autour de l’importance de l’Islam. Le Chapitre 3 pour ce qui concerne

l’Egypte ne laisse pas voir le rôle des conquêtes (celles dirigées par Amr par exemple) ni les

causes de l’immigration Arabe. La complexité des processus d’islamisation en Afrique explique

sans doute que certaines régions aient été mieux étudiées que d’autres. Une meilleure

exploitation des sources arabes permettrait de mieux faire ressortir le rôle du commerce

transsaharien.

Les Chapitres 5 à 25 traitent des mouvements de population et plus largement de

l’Histoire du peuplement dans une perspective régionale. On peut relever que l’Histoire de

certains de ces mouvements déborde en amont et en aval le cadre chronologique que s’est fixé

le volume (ex : l’expansion des peuples bantouphones). Des études consacrées à des thèmes

spécifiques permettent d’éclairer ces mouvements de populations dans leurs mobiles et leurs

itinéraires (Chapitre 11 sur le rôle du Sahara et des sahariens dans les relations entre le Nord et

le Sud. Chapitre 14 sur le commerce et les routes du trafic en Afrique Occidentale). Le

découpage géographique adopté est tributaire de la géopolitique de l’époque considérée. Pour

les commodités de cet exposé nous allons quelques fois nous référer aux 5 grandes sous régions

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de l’Afrique actuelle et la diaspora.

Les peuples du Soudan : Mouvements de populations

Dans le Chapitre 5 (F. de Meideros), le terme Soudan est utilisé pour l’Afrique Occidentale.

L’auteur analyse d’abord les sources qui permettent l’étude des mouvements et de la mise en

place des peuples de la zone soudanaise de l’Afrique. Il évoque les différentes hypothèses, les

modèles qui ressortent de l’analyse des sources quant à l’assimilation dans un espace ouvert.

Parmi ces hypothèses, il y a celle de la primauté culturelle de certains groupes d’origine

septentrionale ou orientale. La fameuse hypothèse hamitique qui distingue: hamites pasteurs

(fondateurs de royaumes) des Noirs agriculteurs et son corollaire le « diffusionnisme » prôné

par des auteurs comme M. Delafosse, Palmer…

La critique des sources Arabes a été faite sur cette question à maintes reprises. Le recours à la

tradition orale pour pallier l’insuffisance des sources Arabes a permis d’apporter quelques

correctifs à différentes affirmations.

Peut-on parler d’hégémonie du Nord dans les relations qu’il entretient avec le pays des Noirs ?

Il y a un phénomène ancien répond F. de Meideros qui consiste « à définir le pays des noirs à

partir du Nord » (page 147). L’ensemble des tribus berbères ainsi que leurs activités sont

étudiées et plus spécialement les touaregs, à cheval entre les Noirs et le monde saharien. Sur la

base de l’exploitation des sources écrites, orales, et archéologiques, l’auteur a tenté de définir

le terrain où se structurent et s’organisent les sociétés africaines.

La thèse hamitique et le diffusionnisme ne résistent pas à l’analyse. L’auteur réaffirme la

domination des Noirs dans le peuplement néolithique du Sahara qui ne laisse aucun doute sur

les origines de l’Empire du Ghana. L’émergence d’hégémonies soudanaises est la résultante

d’une évolution de sociétés complexes débouchant sur la création d’Etats organisés dès le 1er

millénaire : Kanem, Ghana, Hawsa ; Songhai, Tekrour. La prospérité des Etats soudanais reposait

sur la maitrise de moyens techniques (métallurgie du fer), l’usage du cheval et du chameau. Une

note du rapporteur du volume porte sur l’impact de la production du fer en Afrique

Subsaharienne.

Les relations entre le Nord et les pays du Sud ont été marquées par des luttes âpres pour le

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contrôle des routes et du commerce. Les écrits d’Al-Bakri témoignent d’une valorisation de la

fonction royale) et d’une tolérance religieuse. Les rois se montrent habiles dans leurs

transactions avec les Arabes. L’un des événements majeurs favorisé par l’Islam de cette

évolution c’est le Mouvement almoravide au XIe siècle.

Aventure Almoravide (I. Hrbek et J. Dévisse traite des Almoravides Chapitre 13).

L’article définit le mot almoravide comme étant une déformation de Al Murâbitun qui dérive de

la racine r-b t qui signifie « mener le djihad de la manière juste ». Les facteurs à la base de la

naissance du Mouvement, la vie et l’œuvre de son leader Abdallah Yassin y sont exposés. Le

déroulement des actions militaires, l’élargissement de l’empire par les successeurs de Yassin

sont rappelés. L’un des facteurs d’intégration des peuples du Soudan, ce sont les échanges

commerciaux à différentes échelles locale, régionale et internationale. A cet égard le commerce

transsaharien a joué un rôle essentiel comme facteur de brassage.

Au Chapitre 14 « Commerce et routes du trafic en Afrique Occidentale, J. Dévisse, un des

meilleurs spécialistes de cette période montre à travers les résultats de fouilles archéologiques

« l’existence d’une économie d’échanges locaux » et régionaux « sans qu’il soit besoin de penser

à des influences transsahariennes » et une maîtrise de la technologie.

L’auteur analyse le rôle des grandes villes « médiévales » en liaison avec le commerce local,

régional et transsaharien.

Le commerce transsaharien attesté depuis le VIIIe siècle atteint son apogée au 10è siècle.

Les produits d’échanges sont analysés par l’auteur quant à leur flux, fret, transformation et

quantité. La place de l’or dans ce commerce y est particulièrement analysée : production,

dénominations, monnayage, alois. Le contrôle des routes de ce commerce au Nord comme au

Sud a toujours été un enjeu à la base de nombreuses rivalités et convoitises.

L’étude portant sur les mouvements de populations au Soudan paraît limitée par l’état

de l’historiographie. Le bilan critique de l’ensemble des sources relatives aux migrations est

nécessaire pour réexaminer les différentes hypothèses. S’agissant des Almoravides, l’étude ne

prend pas en compte les informations fournies par les traditions orales (maures et soudanaises)

sur les origines et l’expansion almoravide. Depuis 1990, la recherche sur les origines et le déclin

de Ghana a connu quelques avancées. La thèse de la destruction violente de Koumby Saley par

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les Almoravides est très controversée avec une tendance à la réfutation de l’incendie de la ville

(cf. bibliographie, Rapport MBOW – BA).

Le Chapitre 6 de S. Lwanga – Lunyiigo et J. Vansina « Les peuples Bantuphones et leur

expansion » l’une des questions les plus débattues de l’Histoire africaine. L’espace bantuphone

tel que défini ici couvre le tiers méridional du continent africain, de la frontière camerouno-

nigériane à l’Ouest jusqu’au littoral frontalier Somalo-Kenyan à l’Est, et de là jusqu’aux environs

du Port Elisabeth au Sud (page 165). Il se caractérise par plusieurs parlers qui dérivent du proto

bantu dont le berceau se situerait soit dans la Région de la Bénoué Moyenne (Afrique de

l’Ouest) soit dans la Province du Shaba (actuelle R.D.C). La première hypothèse semble

privilégiée. L’expansion Bantu aurait ainsi commencé au Néolithique (entre -1000 ou même -

400) pour se poursuivre jusqu’aux environs de l’an 1000 avec des prolongements vers le Nord

qui vont durer jusqu’au XIXe siècle. L’étude du vocabulaire ancien de la langue Bantu renseigne

sur les modes de vie des Bantus (pratiques de la culture de l’igname, des céréales, de la chasse,

de la pêche…).

La question des origines et de l’expansion des bantu est abordée essentiellement dans

ce chapitre sur la base des hypothèses de linguistes. La faiblesse de la documentation

transparaît dans la pauvreté des renvois bibliographiques.

Dans la Vallée du Nil

Dans un chapitre intitulé l’Egypte depuis la conquête Arabe jusqu’à la fin de l’Empire

Fatimide (Chapitre 7), T. Bianqui retrace les étapes de l’Histoire d’Egypte, de l’occupation

byzantine, au règne des Fatimides au 10è siècle. L’Egypte devint un bastion du monde Arabe à

partir des expéditions du Général Amr, conduites depuis le Fayoum. Babylone se substitua à

Alexandrie comme capitale. Le règne des Ummayades à Damas s’accompagnera de

changements dont l’Hégémonie de l’Arabe sur la Mer Rouge, l’apparition de nouveaux

itinéraires commerciaux et un développement culturel remarquable. L’arabe devint la langue de

culture chez les égyptiens et les chalcédoniens.

La présence des soldats yéménites dans les villes égyptiennes contribua à

« l’acculturation » des populations. Les révoltes du califat Abasside initiées par les chrétiens et

les Arabes des Kabila vont installer une période d’anarchie. L’autonomie de l’Egypte qui fut le

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fait de forces centrifuges (Tulumides, Ikshidides et Kafur) prélude l’avènement des Mameluks.

L’Egypte impériale apparut et se développa au Xe siècle sous le règne des trois premiers imams

fatimides. L’auteur décrit avec maints détails l’évolution de la ville du Caire (fondée par

Djawhar) en tant que pôle d’attraction jusqu’à l’agonie du régime fatimide au XIe siècle. Au

total, ce Chapitre révèle les imbrications entre l’Histoire de l’Empire Musulman sous les

Ummayades, les Abassides et celle de l’Egypte.

Dans une perspective d’utilisation pédagogique de ce Chapitre il faudrait distinguer les

faits politiques des faits de culture (notamment le développement des techniques) qui

s’entremêlent. L’agriculture importante en Egypte a été très peu abordée dans ce Chapitre.

Pour le même espace S.J. Jakobielski traite de la Nubie chrétienne à l’apogée de sa civilisation

(Chapitre 8).

Comme cela a été illustré par le Volume II, l’Histoire de la Nubie est intimement liée à

celle de l’Egypte. L’auteur expose ici les facteurs qui fondent la prospérité de la Nubie (union

des royaumes de Nobadia et Makura, établissement de relations profitables avec l’Egypte à

travers le bakt, pacte de non agression) avant d’évoquer la prospérité de ses villes et le

développement artistique et artisanal qui les caractérise. Mais ce qui caractérise le plus cette

Nubie, c’est son christianisme de tendance monophysite (avec une liturgie plurilingue : grec,

copte, vieux nubien.

Afrique du Nord

Les Chapitres 9, 10 et 12 traitent de l’évolution de l’Afrique du Nord de la conquête Arabe (7è

siècle) à la fin du règne des Fatimides au 11è siècle.

Le Chapitre 9 de H. Monés « La conquête de l’Afrique du Nord et la Résistance berbère » décrit

les grandes étapes de la conquête Arabe ainsi que celles de la Résistance des berbères à cette

conquête. Après deux mises au point qui concernent l’usage du terme Maghreb et la situation

des berbères à la veille de la conquête, l’auteur distingue les 4 grandes étapes de la conquête de

l’Afrique du Nord dont il rappelle les enjeux (outre l’islamisation, le rançonnage, la maîtrise et le

contrôle des routes commerciales). La première étape 663 – 670 a lieu sous la conduite de Ibn

Hudaydj Al Sakuni commandant en chef de l’armée Arabe. L’année 670 marque un tournant

avec la nomination de Ukba Ibn Nafi à la tête des forces Arabes, lequel étendit la conquête

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jusqu’au Kawar, en passant par le Fezzan. En 675 le remplaçant de Ibn Nafi, Dînar Ibn Abû Al

Muhâdjir convaint Kusayla un chef berbère à se convertir avec les siens à l’Islam. Le retour de

Ukba Ibn Nafi en 683 va marquer de nouvelles conquêtes notamment celles de l’Aurès, du

Tafilalet et de la Côte Atlantique. La résistance berbère est incarnée d’abord par Kusayla qui

constitua un royaume berbère intégrant l’Aurès, le Sud Constantinois et la plus grande partie de

l’Ifrikiya en 687 – 690. La deuxième phase de la résistance berbère est symbolisée par une

femme surnommée Al Kahina qui infligea de sévères défaites aux troupes arabes notamment en

696. C’est à la suite de la mort de Al Kahina que les conquérants mettront en place

l’organisation administrative des territoires.

Au Chapitre 10 « L’indépendance du Maghreb » M. Talbi traite de la Révolte et de

l’indépendance du Maghreb. Ce mouvement a été suscité par les injustices subies par les

berbères musulmans sous les Ummayades. La révolte se fait sous le signe du Karidjisme qui

considérait le pouvoir Ummayade comme illégal. Les Karidjistes conquièrent pratiquement tout

le Maghreb Central et mirent en place différents royaumes ; royaumes des Barghawâta, de

Tlemci, de Bani Wassul (Sufrites) de Tripoli et Tahert (Ibadites). Au XVIIIe siècle c’est le Chiisme,

le courant opposé, qui s’impose au détriment des Karidjisme (avec le succès de Idrissides). En

800 l’Ifrîkiya obtint son indépendance de Harun Al Rashid et ainsi apparaît le royaume Aghlabide

(800 – 900).

Au chapitre 12 « L’avènement des Fatimides » I. Hrbek définit tout d’abord le Chiisme dont

relève les fatimides. Ses dogmes fondamentaux sont : l’attribution de l’imamat aux descendants

du Prophète et la thèse du retour du Mahdi. Le mouvement fatimide prend ses origines chez les

Ismaïliens (basés en Syrie) qui considèrent Ismaïl descendant du Prophète mort en 761 comme

étant le Mahdi. Les berbères Kutana aidèrent le Dai (missionnaire venu de Salamiyya en Syrie)

Abd Allâh Al Shi’i à vaincre les Aghlabides. Le pouvoir sera remis par la suite à l’imam « Ubayd

Allâh le fondateur du mouvement des fatimides. Le royaume Fatimide se transformera entre le

Xe et XIe siècle en un vaste empire s’entendant de l’Atlantique à la Syrie. S’agissant des

conquêtes arabes, différentes études ont montré comment la légende s’était saisie du

personnage d’UKba en lui attribuant des conquêtes qui n’étaient pas de son fait. Ainsi T. Lewicki

dans le même volume examine autrement le portée des conquêtes d’Ukba qui ne seraient pour

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certaines que des expéditions de reconnaissance.

Le Chapitre 11 « Le Rôle du Sahara et des sahariens dans les relations entre le Nord et le

Sud » écrit par T. Lewicki est à mettre en rapport avec le Chapitre 9. L’auteur analyse le rôle que

le Sahara a joué dans les relations entre l’Afrique et le Soudan entre le VIIIe et le XIIe siècle.

Après avoir défini les contours du Sahara limité à l’Est par le Nil et à l’Ouest par l’Océan

Atlantique », il en décrit les habitants, comme des « peuples d’origine berbère métissés quelque

fois de sang noir africain ». Il distingue parmi ces berbères deux branches principales : les

Sanâdja et les Zanâte. Au Sud du Sahara Oriental, il situe des « peuples négroïdes » appartenant

à différents groupes tels les Zaghâwa, le Teda et les Dawa. Ce peuplement compte quelques

éléments Arabes disséminés.

L’auteur analyse à travers le détail des axes routiers, des itinéraires, des étapes, des

terminus le rôle important que les populations sahariennes ont joué dans les relations

transsahariennes. L’étude est fondée essentiellement sur les sources arabes. Si ce Chapitre (l’un

des plus long du Volume III) permet d’avoir une vue d’ensemble des principaux axes

commerciaux transsahariens, il ne permet pas de situer les nombreuses localités mentionnées.

Il ne comprend qu’une carte de protée générale.

Les approches de la parenté entre Sanadja et Touareg (Al Tawârik) par les auteurs des

Chapitres 9 et 11 divergent. H. Monès les identifie aux Tarka qui avec d’autres (Lamtuna,

Massûffe, Djuddala) constituent les plus importantes Kabila Sanadjiennes. T. Lewicki fait des

touaregs les descendants des Sanadja. L’auteur accrédite le propos d’Ibn Hawkal qui disait être

passé par Awdaghost en 951 ce qui a été démenti par Levtzion sur la base d’une étude

intertextuelle montrant que Hawkal n’est jamais allé au-delà de Sidjilmassa où il a recueilli des

informations sur le Sud. La description précise que les auteurs Arabes de Thaghâza font plus

penser à une mine qu’à une saline.

On peut regretter que la description du peuplement du Sahara s’appuie presque

exclusivement sur les sources Arabes. De fait les populations noires sont peu présentes dans

cette description à l’exception des Tubu de la partie Orientale du Sahara Oriental, une brève

allusion aux bafours assimilés par l’auteur à des blancs. Il faudrait prendre en compte

d’avantage les traditions maures et soudanaises relatives à ces différents groupes.

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Au Chapitre 15 D. Lange en collaboration avec B. W. Bakindo traitent de « La Région du

Lac Tchad en tant que carrefour). La région du Lac Tchad a été très tôt une zone d’accueil (avant

l’ère chrétienne) de populations nomades et sédentaires fuyant la désertification du Sahara

(dans les phases d’aridification dont celle du 3ème millénaire avant J.C et celle du XIe siècle la plus

documentée). Parmi ces populations on retient : les Zaghâwa, Tadji, (Djâdo) Teda Daza (Tubu),

Bede, Kuri, Kotoko, Kanuri, Sao (Sao) regroupés en différentes familles linguistiques.

La région connaît une maîtrise agricole et technologique attestée par de nombreux sites

(technique de fabrication du fer connue dès – 540 avant J.C.). Elle aussi connaîtra plusieurs

hégémonies politiques dont le Kanem (avec les dynasties Zaghâwa et Sêfuwa) qui entretient des

liens commerciaux durables (dont la vente des esclaves) avec les Etats musulmans d’Afrique du

Nord (Zirides, Hafsides). Les auteurs de ce Chapitre consacrent un passage aux Almoravides (en

dehors de leur sujet) qui diverge dans ses conclusions avec le texte écrit par Hrbek et J. Dévisse

(Chapitre 13) sur le sujet (pages 488).

Les Chapitres 16, 17, 18 qui se fondent essentiellement sur les résultats de la recherche

archéologique, les études linguistiques et les traditions orales tentent d’esquisser les schémas

d’évolution des sociétés de la zone guinéenne, en ces différentes composantes, depuis le

premier millénaire avant J. C., mais plus spécifiquement au courant du millénaire suivant. Le

millénaire qui ouvre l’ère chrétienne « qualifié de millénaire du silence » par T. Shaw (Volume I.

Chapitre 24) était peut être aussi celui au cours duquel un changement important était

intervenu dans les modes de vie.

Dans le Chapitre 16 « La zone guinéenne : Situation générale » T. Shaw présente les

traits caractéristiques de la région durant cette époque et les tendances générales dont les

déclinaisons locales seront traitées dans les Chapitres suivants. Toute l’étude est concentrée

autour « d’un changement fondamental » mais graduel qui intervient durant le premier

millénaire : c’est le passage d’une économie fondée sur la chasse, la cueillette et la pêche, à un

mode de vie dominée par l’agriculture et l’élevage.

Cette évolution est étudiée en Basse Guinée par B. W. Andah (Chapitre 17) et en Haute

Guinée (Chapitre 17) du point de vue de l’économie, de subsistance, de l’habitat du commerce

de la métallurgie du fer, des pouvoirs propitious. Dans chacune des parties la zone guinéenne,

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l’étude s’appuie sur les groupes linguistiques, identifiés par la recherche.

Les évaluateurs se demandent si le chapitre 16 consacré selon l’auteur lui-même « au millier

d’années qui a précédé l’an mille en Afrique occidentale » avait sa place dans ce volume.

La définition de la zone guinéenne, malgré la carte qui figure à la page (491) reste incertaine. La

prise en compte des mégalithes et tumulus au cœur de la Sénégambie n’amène t-il pas l’auteur

à étendre excessivement la zone guinéenne ?

La Corne de l’Afrique : Chapitre 20

Dans ce chapitre T.T MEKOURIA s’intéresse à l’évolution du royaume d’Axoum apparu

vers la fin du premier siècle et qui connaît un essor prodigieux sous le règne de EZANA au IVe

siècle.

Dans le chapitre 21 E. Cerruli s’intéresse aux relations entre l’Ethiopie et le monde

musulman (donc entre musulmans et chrétiens) de part et d’autre de la mer rouge. Les

musulmans se rendirent progressivement maitres de la mer rouge au détriment des éthiopiens

à la suite de nombreuses conquêtes au début de l’ère Ummayade, notamment l’occupation des

Iles Dahlak. Des commerçants musulmans s’installèrent à Enderde entrainant de nombreuses

conversions d’éthiopiens à l’Islam. Malgré le verrou que semblait constituer l’Etat Chrétien

d’Axoum, des sultanats musulmans se créèrent contraignant Axoum à s’étendre vers le Sud en

direction du plateau Ethiopien, transférant même sa capitale. Entre le XIIIe et le XIVe siècle, on

assistera à de nombreuses confrontations entre Axoum et les sultanats musulmans, dont la

plupart seront à l’avantage du Négus.

C. Erhet étudie au chapitre 22 l’évolution des sociétés à « l’intérieur de l’Afrique

orientale ». Il y distingue essentiellement deux grands groupes : les Kushites et les Bantu. Les

non bantu, tel les Khoisan sont l’objet d’une assimilation par les premiers. Les modes de vie et

les croyances religieuses des différents peuples sont décrits et l’auteur établit une sorte de

corrélation entre l’appartenance ethnique et le type de production alimentaire.

Dans l’étude consacrée à la corne de l’Afrique, il n’a été nulle part fait mention des

Falasha. Contrairement à ce qu’annonce le titre du chapitre 20, celui-ci a traité surtout de

l’expansion musulmane en Ethiopie.

Chapitre 21 : F.T MASAO et H.W Mutoro : « la côte d’Afrique orientale et les Comores ».

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Les auteurs s’intéressent aux abords de la côte orientale de l’Afrique. Une bande de terre

délimitée au Nord par la Somalie et au Sud par le Mozambique. L’ancienneté et la continuité du

peuplement de cette zone sont attestées par l’archéologie qui le fait remonter jusqu’au 1er

millénaire de l’ère chrétienne. Les sources arabes, les récits chinois et les traditions orales

permettent de restituer les aspects ethnographiques importants de cette région telle la

répartition des principaux groupes : les barbares (Somali) au Nord, le pays des Zandj, et le pays

de Sofala au Sud.

Afrique Centrale

Le chapitre 23 « l’Afrique Centrale au Nord du Zambèze » de D.W Philipson porte sur

une région peuplée presque exclusivement de populations bantu au début de la période

considérée. Cependant ces bantu dit du premier âge du fer ou encore « du complexe industriel

du premier âge du fer » se divise en deux courants, l’un oriental et l’autre occidental. Des

cultures archéologiques (fondées notamment sur l’étude des céramiques) permettent de

distinguer plusieurs groupes dans des aires géographiques définis. Le XIe siècle marque le début

d’une période de transition entre le premier âge et le deuxième âge du fer, changement lisible

dans les traditions de poteries et les modes de vie. La chasse recule au profit de la culture du

sorgho, de l’élevage et les relations commerciales utilisant les cauris et les cônes se développent

avec la côte orientale.

Afrique Australe

Le chapitre 24 « l’Afrique méridionale au Sud du Zambèze » de N. Huffman traite

essentiellement de la culture Zimbabwe de l’âge du fer (il y’a de cela 1 millénaire) qui est le fait

des peuples bantou. L’espace étudié englobe le Sud-ouest du Matabélé Land, le centre Est du

Botswana et l’extrémité Nord du Transvaal. Les différentes communautés de cette région qui

pratiquaient une agriculture diversifiée, l’élevage, la chasse et la pêche sont étudiées à travers

leurs cultures matérielles notamment la céramique et l’habitat. Sous l’effet des échanges

externes, la culture Zimbabwe connait entre 1000 et 1075 une évolution marquée par le

renforcement du pouvoir central, la prospérité de Manpungwé, première capitale du royaume

du Zimbabwe.

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Madagascar

Dans le chapitre 25, intitulé « MADAGASCAR » B.Domenichini – RAMIARIMANANA à partir du

décryptage des sources orales et l’exploitation des résultats archéologiques et de la

linguistique, tente de restituer l’Histoire du peuplement de la grande île et l’évolution des

modes de vie dans la longue durée. Un certain nombre d’hypothèses ressortent de cette

analyse :

- L’Homme était présent à Madagascar aux moins dans les régions enquêtées à l’époque

longtemps avant +1000.

- Des populations de pêcheurs vivant probablement entre le VIIe et XVe siècle sur la Côte,

avaient une relation avec une zone de commerce arabo-persane. Elles auraient disparu au XVe

siècle.

- Les austronésiens ont certainement joué un rôle dans la navigation hauturière sur l’Océan

Indien (constructeurs, utilisateurs de radeaux, de pirogues à balanciers, et de grands bateaux).

Leur installation dans l’île par ces moyens remonte au 1er millénaire de notre ère et depuis cette

époque l’île est insérée dans un commerce interrégional fournissant des produits de cueillette

(bois d’œuvre, gomme, aromates, épices).

Y. Talib à partir d’une contribution de Faisal « la Diaspora africaine en Asie » chap.26 s’attache à

documenter la présence africaine en Asie à différentes époques. De la période préislamique au

IXe siècle (terme de l’étude), cette présence est marquée surtout par la servilité. Utilisés comme

esclaves dans l’Arabie préislamique (en provenance d’Afrique orientale), on les retrouve

mercenaires, assurant la protection des itinéraires caravaniers de la Mecque. Nombre

d’esclaves noirs font partie des premiers convertis à l’Islam dont le fameux Bilal B. Rabah.

« Au VIIe siècle et IXe siècle la demande d’esclaves s’accrut suite au développement de

l’agriculture dans la basse Vallée de l’Iraq et à l’expansion du commerce international dans

l’Océan Indien » (P. 759).

Le statut des africains dans la société musulmane est ensuite examiné. Ceux-ci sont utilisés dans

l’agriculture, le commerce, les armées, les Harem, comme domestiques et dans les lieux de

loisirs. Différentes révoltes de Zandj secouèrent l’Empire abasside entre 869 et 883. Outre leur

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rôle économique, l’apport des africains au monde musulman a été important dans différents

domaines : culture, arts, littérature, exégèse…

Les chapitres 27 et 28 portent sur des thématiques transversales traitant de l’organisation de la

sédentarité et de la mobilité des populations en Afrique pour l’époque considérée (VIIe – VIe

siècle).

Le chapitre 27 de A. Bathily et C. Meillassoux « Relations entre les différentes régions de

l’Afrique » traite des mouvements de la population et de leurs conséquences. Les auteurs

soulignent d’entrée de jeu l’ancienneté et l’importance de la mobilité des populations

africaines. Les progrès réalisés dans les moyens de communication, l’extension du réseau

commercial, l’essor urbain sont des faits caractéristiques de la période étudiée. Ils passent en

revue les produits du commerce interregional. Les échanges et la mobilité des personnes

favorisent la diffusion des techniques. Ce pendant s’agissant de la métallurgie du fer, la thèse

d’une origine autochtone emportent la faveur des auteurs. La période étudiée est aussi

marquée par des transformations sociales importantes : accélération du processus de

différenciation sociale sous l’effet des progrès de la diffusion du travail, développement de la

lutte des classes à travers les révoltes dans différents états.

J. Dévisse / J. Vansina « l’Afrique du VIIe au XIe s : cinq siècles formateurs » chapitre 28.

Les auteurs étudient l’organisation sédentaire de l’espace en Afrique dans les différentes

régions. Cette organisation s’appuie sur des systèmes de production appropriée assurant la

nourriture des populations. En Afrique orientale, c’est la diffusion des races de bovins à bosse

en Afrique occidentale, les progrès de l’agriculture firent reculer la forêt dans les Vallées du

Niger et du Sénégal. On peut distinguer des zones caractéristiques comme le Sahel « domaine

de l’élevage » ou les Vallées « espaces d’organisation complexes ». Les auteurs s’intéressent

ensuite aux techniques dont aucune n’est « immobile » ; leur Histoire reste à faire en Afrique.

Les autres centres d’intérêt du chapitre sont le commerce (ses différentes formes) et l’étude des

religions, des idéologies et des arts en tant que représentations collectives. Le rôle des religions

africaines comme cadre structurant des pouvoirs politiques commence à être mieux connu.

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Propositions de thèmes et de sujets pour les contenus d’enseignement dans le primaire et le

secondaire.

La liste des sujets proposés pour être enseignés est longue, au regard de l’intérêt du volume. On

peut les regrouper en quelques thématiques.

- L’Islamisation en Afrique : Etapes du développement de l’Islam et de sa diffusion. Chap.3. Les

textes d’auteurs arabes pourraient ici servir de supports. Exemple : récit de l’expédition d’Oqba

Ibn Nafi dans le Sud du Maroc. Les textes d’Ibn Kaldun ou d’Ibn Batuta à propos du Mali relatifs

au fonctionnement d’un Islam de cour.

- Les résistances des peuples berbères. Chap.9

On commencera par la problématique des origines et structures sociales berbères. Chap. 9,

11,13.

- Les gestes des Empires fatimide et almoravide.

- Le rôle du Sahara dans les relations entre le Nord et le Sud. Chap.11. Dans l’imaginaire

collectif, le Sahara est perçu comme un obstacle entre l’Afrique du Nord et le Soudan. Une

étude du commerce transsaharien qui en présenterait les principaux axes, le rôle de ce

commerce dans la consolidation des pouvoirs étatiques et les enjeux autour du contrôle des

axes routiers serait utile.

- Les débuts de l’agriculture et la domestication des plantes dans différentes régions.

- L’art africain exemples : Ife, Igbo-Ukwu.

- Introduction à la religion africaine. Chap.28

- Le royaume d’Axum notamment sous le règne d’Ezana

- La culture de Zimbabwe

- La mise en place des populations à Madagascar

- Les africains en terre d’Islam

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VOLUME IV

L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du XIIe au XVIe siècle

Directeur de volume : D.T. Niane

Le volume IV de l’H.G.A dirigé par D.T Niane couvre une période importante de l’histoire du

continent africain, celle qui va du XIIe au XVIe siècle. Il comporte 27 chapitres et une introduction

du directeur du volume qui présente de façon didactique le contenu. La question dominante de

ce volume est celle de la constitution, de l’épanouissement, et de l’effondrement des grands

ensembles politiques en Afrique dans les contextes socio-économiques et politiques divers.

Les contributions mettent en lumière le rôle des religions, comme cadre structurant des

systèmes politiques (dans le contexte des religions ancestrales) et/ou facteur de renforcement

ou non des institutions étatiques (exemple de l’islam au sein des aristocraties régnantes en

Afrique de l’ouest). Les relations commerciales intra et inter continentales qui ont joué un rôle

important dans les développements politiques, sociaux et culturels sont parallèlement étudiées

à travers, par exemple, la circulation des idées et des savoirs faire.

L’histoire du peuplement, la formation de groupes ethniques et leurs transformations

successives, les formes d’organisation sociales sont au cœur de l’analyse dans différents

contextes à travers l’étude des sources varies, notamment la linguistique historique et

l’archéologie. Les découvertes archéologiques récentes permettent aux auteurs de dissiper les

différents mythes relatifs aux auteurs et à l’origine des différentes cultures et civilisations telles

que celles matérialisées par les structures de pierres des cites côtières SWAHILI ou les ruines du

ZIMBABWE- mapungubwé à l’intérieur.

L’ensemble de ces questions est abordé dans le volume dans une perspective régionale :

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AFRIQUE DU NORD :

En Afrique du Nord, cette période est marquée par un double mouvement de constitution

d’ensembles (à tendance unitaire, régionale) d’une part et de désagrégation du Maghreb en

entités multiples et autonomes sous l’effet de forces centrifuges. Le chapitre II rédigé par

OMAR SAIDI décrit l’évolution politique du Maghreb sous les Almohades tandis que TALBI, au

chapitre III, montre le rôle joué par les savants, médecins, historiens, jurisconsultes,

géographes... Ils ont non seulement contribué au développement du savoir (rôle souvent

méconnu du grand public) mais ont aussi joué un rôle important dans le transfert des

connaissances littéraires et scientifiques vers l’Europe. H. R. Idriss et I. Hrbek, dans les chapitres

IV et V, dépeignent les conditions qui ont provoqué la désintégration du Maghreb en trois

(Marinides, Wattassides, Hafsides) puis en une multitude d’entités politiques ainsi que la

composition de la société de l’époque et sa stratification. Le Machrek connaît durant la même

période un renouveau musulman sous les Ayyubides, notamment sous le règne des Mameluk

(XIIIe et XIVe siècle) qui lui a permis d’arrêter l’expansion des croisés chrétiens venus d’Europe.

Les chapitres traitant de l’Afrique du nord pourraient être enrichis par les résultats de travaux

récents, notamment ceux effectués sous l’égide de l’Institut des Etudes Africaines de

l’Université de Mohamed V à Rabat.

Afrique de l’ouest :

L’Afrique de l’Ouest connaît l’émergence et l’épanouissement de grands ensembles politiques

étudiés dans les chapitres VI, VII et VIII rédigés respectueusement par D. T. Niane, Mme Ly Tall

M. et S. M. Cissoko. Les auteurs de ces chapitres font une utilisation optimale des sources

disponibles (écrites, orales, archéologiques) pour analyser les conditions d’émergence des

ensembles ouest africains et décrire leur mode d’organisation politique, sociale, leur

épanouissement et les circonstances de leur déclin. Il s’agit notamment du Mali (XIIe, XVIe

siècle), du Songhaï (VIIe, XVIe siècle) et des entités qui les ont précédées, le WAGADU (Ghana

des auteurs arabes) et le SOSSO de Soumangourou Kanté. Après la chute du WAGADU (Ghana),

sous les coups des almoravides au XIe siècle, l’espace du Soudan Occidental connaît des remous

politiques et socio-économiques. L’émergence royaume du SOSSO du roi forgeron

Soumangourou Kanté est remis en contexte comme celui de son “ « challenger“ Soundiata Keita

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qui l’emportera lors de la célèbre bataille de Kirina en 1235 qui marqua la fondation de l’empire

du Mali. La sécurité et la paix (dont témoigne Ibn Battuta, qui visita l’empire au XIVe siècle) vont

caractériser la région durant de longs siècles. Le rayonnement du Mali au delà de l’Afrique doit

beaucoup à l’empereur Kanku Mussa qui entreprit un pèlerinage à la Mecque (1324) avec une

étape remarquée en Egypte. La générosité dont il fit preuve lors de cette escale est diversement

appréciée par les lettrés arabes et les détenteurs des traditions orales mandingues. A propos de

l’Empire Songhaï, le chapitre VIII de S. M. Cissoko fait état de la durée exceptionnelle de cette

entité dont les origines remontent au VIIe siècle, qui a connu trois dynasties du IXe au XVIe siècle.

Le petit royaume de Kukya longtemps tributaire du Mali s’affranchit de cette tutelle malienne et

à partir de sa capitale Gao exercera son hégémonie sur une grande partie du Soudan Occidental.

Sonni Ali Ber (1464-1492) qui fut le grand bâtisseur du Songhaï, fut remplacé après sa mort par

Askia Mohamed qui usurpa le pouvoir au successeur légitime. Askia Mohamed, musulman

convaincu et prosélyte instaura une nouvelle dynastie, celle des Askia qui se plaça sous la

bannière de l’Islam. Après son pèlerinage à la Mecque, Askia Mohamed revint avec le titre de

Calife du soudan. L’islam connut un développement important sous son règne à travers des

foyers culturels tels que Tombouctou, Djenné, Gao et des actions missionnaires à travers la

région. Le Songhaï fut victime au XVIe siècle de la volonté hégémonique du souverain Mérenide

du Maroc Al Mansour. La bataille de Tondibi (1591) marqua la fin du dernier grand empire

soudanais de cette époque.

Beaucoup de travaux archéologiques menés au cours de ces dernières décennies, notamment

dans le Delta intérieur du Niger viennent enrichir l’histoire de ces ensembles politiques. Il est

important de prendre en compte leurs résultats qui remettent en cause le paradigme colonial

qui expliquait l’émergence de la civilisation soudano-sahélienne par la seule stimulation du

commerce transsaharien et de l’islam introduit en Afrique de l’ouest. Si le commerce

transsaharien qui intégrait en effet cette partie du soudan au commerce mondial a eu un impact

certain sur l’évolution de cette région, renforçant même le commerce inter-régional

préexistant, il est important de retenir la « permanence de la recherche de la stabilité et de la

sécurité chez les « peuples » de la région.

Au nombre des ressources ayant servi au maintien de cette stabilité, (dont certaines perdurent

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encore aujourd’hui) les évaluateurs mentionnent la charte de Kurukanfuga (édictée après la

bataille de Kirina par Soundiata et qui fixait les règles de la coexistence entre les différents clans

et les rapports entre peuples et dirigeants) et la « Sanankuya » (alliance à plaisanterie qui avec

d’autres participent à la régulation sociale au quotidien).

Des études ont également porté sur l’évolution de différents autres peuples de l’Ouest africain :

les royaumes de la boucle du Niger et du Bassin de Volta du XIIe au XVe siècle par M. Izard, les

« Hawsa et leurs voisins du Soudan Central » par M. Adamu chapitre 11 « les peuples côtiers de

la Casamance aux lagunes ivoiriennes par Y. Person, chapitre 12 et P. Kipré, chapitre 13.

Si Izard parait renseigné sur les questions relatives aux Mossi dits septentrionaux et ceux plus

méridionaux, il reste silencieux au sujet des autres communautés et même d’entités connus.

Des entités tels que le Gurma/ Gulmu ou le Bourgou / Baruwu qui figurent sur plusieurs cartes

ne font l’objet d’aucun développement. Si l’accès du chapitre 6 relatif aux Hawsa est facile, on

peut regretter de n’y trouver en dehors de la carte (P. 315) aucun élément illustratif des cités

évoquées.

Le chapitre 12 de Y. Person sur les côtes de l’Ouest africain nous fait connaître les premiers

peuplements de l’archipel du Cap Vert très lié à l’actuelle Guinée Bissau. Cette étude est

prolongée par le chapitre 13 de P. Kipré qui renseigne sur les lagunes de l’actuelle Côte d’Ivoire,

ainsi que le pays Akan jusqu’au Ghana Contemporain. Il ne dit rien par contre du pays Ga de la

Plaine dite d’Accra. Le texte de A.F.C. Rycler (chapitre XIV) qui traitre de la « Volta au

Cameroun » renseigne largement sur les cités Yorubas (actuel Nigéria méridional) et les auteurs

de la célèbre cité de Bénin et de ses bronzes (les Edo), les peuples du Delta et les Ibo auteurs

des productions artistiques d’Igbo-Ukwu. Le dernier paragraphe consacré aux Ijo et Ewé révèle

une difficulté de localisation de ces peuples. Des rectificatifs voire des compléments

d’informations sur la base des travaux récents sont nécessaires pour préciser la localisation de

ces peuples.

La Vallée du Nil

L’Egypte est replacée dans le monde musulman entre le XIIIe siècle et le début du XVIe siècle

(chapitre XV). L’Egypte sous le règne des Mameluks (1250-1517) contrôlait la route des épices

et autres denréeset passant par la Mer Rouge en direction de la Méditerranée. Elle était aussi

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l’étape pour de nombreux pèlerins (notamment ceux de l’Afrique Occidentale et Centrale) allant

à la Mecque. En 1517, les Ottomans étendaient leur domination à l’Egypte faisant basculer à

nouveau son sort. La Nubie étudiée par L. Kropacek présente un cas de gestion pacifique des

relations inter religieuses sur la longue durée entre l’Etat Fatimide musulman d’Egypte et les

deux royaumes Chrétiens du Sud à travers le « Bakt » qui a perduré pendant six cent ans.

L’auteur évoque ensuite le processus de décadence des deux royaumes Chrétiens, nubiens, leur

conquête et l’arabisation des nubiens du XIIIe au XVe siècle.

La Corne de l’Afrique

Le chapitre XV nous introduit à la géographie politique et humaine complexe de la Corne de

l’Afrique. T. Tamrat nous présente une région où se sont déployés des Etats chrétiens et

musulmans qui entretenaient des relations avec des communautés de religion traditionnelle

africaine. L’Empire éthiopien dirigé par un Souverain chrétien Yekuno Amlak (1270-1285) atteint

son apogée sous le règne Zera Yacob (1434-1468) avant de décliner à la fin du XVe siècle.

L’essor de la civilisation Swahili entre le XIIe et le XVIe siècle sur les côtes Orientales du continent

et dans les Iles archipels voisins est le thème du chapitre XVIII écrit par V.V. MATVELEV.

L’auteur restitue le processus historique qui a produit cette civilisation originale à partir d’un

substratum africain Bantu. Il fait ressortir la part des influences et des métissages avec les

apports arabes, persans indiens, ceux de l’Islam entre autres.

Cependant les évaluateurs trouvent discutable son opinion selon laquelle la communauté

Swahili ne serait pas alors homogène au plan ethnique et social. Les études disponibles à

l’époque de la redaction du chapitre faisaient déjà état d’une ancienneté de la civilisation

Swahili qui faisait remonter, ses origines plus loin qu’on ne l’avait estimé auparavant. Des sites

archéologiques dans l’archipel de Lamu sont antérieurs au Xe siècle et le site Urbain de Shanga

existait déjà au VIIIe siècle. Au XIIe siècle déjà la société Swahili était impliquée dans d’autres

activités que l’agriculture et la pêche et plusieurs cités-états le long de la Côte Orientale étaient

engagées dans le commerce régional et pratiquaient des arts et métiers dont la fabrication de

tissus, la construction navale et la navigation. Ces dernières activités sont des traditions

anciennes de la Côte Orientale. Il existe en effet plusieurs mots en Swahili pour désigner la

diversité des bateaux. Des préjugés faisaient penser que « les habitants de l’Afrique de l’Est ne

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naviguaient pas à long cours dans l’Océan indien ».

Selon Matvelev, la « position géographique avantageuse » de la zone côtière de l’Afrique

Orientale rend possible la navigation sur l’Océan indien « et rend compte d’un véritable

commerce maritime dans cette partie du monde ». Parmi les produits d’échanges, sont cités le

fer produit sur place, l’or provenant du continent qui a joué un rôle important dans l’essor de la

civilisation Swahili. La poterie, de la vaisselle en verre, des perles, etaient importées de Chine,

d’Inde et du Moyen Orient. A différentes époques, les points d’ancrage de ce commerce ont été

évoqués par les auteurs arabes (Yakut au 8e siècle, Ibn Battuta au 14e siècle). Du XIIIe au XIVe

siècle, la cité de Kilwa était considérée comme le centre principal de contrôle de l’or provenant

du continent. L’Islam a été adopté pacifiquement en premier lieu par les couches dirigeantes de

la société, un Islam tolérant à l’endroit des cultes traditionnels. On retient de la lecture de ce

chapitre le caractère authentiquement africain de la civilisation Swahili. Les Swahili ont fait des

emprunts en dehors du continent et ont aussi enrichi d’autres cultures. Les portuguais

témoignent du rayonnement de cette civilisation, à leur arrivée sur les côtes. Cependant des

signes avant coureurs de la décadence des cités Etats sont décelés par les analystes et qui

précèdent l’arrivée des portuguais notamment la multiplication des conflits entre états et des

facteurs environnementaux comme la dégradation de la qualité de l’eau sur certains sites. Le

facteur déstabilisateur de l’ensemble de la région sera l’intrusion portuguaise et la violence

armée qui l’accompagne.

La Région des Grands Lacs

Le Chapitre XIX et XX sont consacrés à l’Histoire du peuplement de cette région. C. Erhet

présente un tableau de la région « entre la Côte et les Grands Lacs » à travers une approche qui

privilégie la linguistique historique. Selon Erhet, les migrations anciennes d’agriculteurs de

langue bantou dans cette région dès le premier millénaire n’avaient pas permis d’occuper tout

l’espace, ceux-ci s’étant cantonnés dans les zones les mieux arrosées. On trouve dans une zone

située au Nord, des locuteurs de langues nilotiques et au Sud des locuteurs de langues « Sud

couchitiques ». On assiste donc à des phénomènes de métissage, d’assimilation, et à

l’émergence de structures sociales variées. D’autres groupes arrivèrent plus tard, comme les

Luo au XIVe siècle dans la région du Golfe de Kavirondo qu’ils vont contrôler totalement, ou les

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Kalenjim méridionaux dont la migration fut soudaine. L’interaction de ces nombreuses

populations entraina des métissages qui font qu’on ne peut distinguer un quelconque « groupe

ethnique pur ».

Au chapitre suivant Ogot s’intéresse à la problématique de la formation des Etats dans la zone

inter-lacustre pour la même période, ainsi qu’aux relations entre les divers groupes, leurs

positions respectives et leurs occupations. Les relations entre agriculteurs et sédentaires avec

tous les stéréotypes dont font l’objet ces différents groupes sont particulièrement analysés par

l’auteur. Ogot tente de démonter le mythe du complexe de supériorité/infériorité entretenu

entre ces groupes en montrant que la formation des premiers états dans la région est le fait des

agriculteurs longtemps avant l’arrivée des pasteurs. Et pendant des centaines d’années,

agriculteurs et pasteurs avaient vécu en harmonie à l’intérieur et à l’extérieur de la région. La

stratification s’est modifiée au XVe siècle donnant naissance à des classes sociales qui se sont

muées en situation extrême en « Castes ». L’auteur montre que les termes « pasteurs » et

« agriculteurs » loin de désigner des ethnies renvoient plutôt à des occupations.

Afrique Australe

Le chapitre XXI de B.M. Fagan traite de l’Histoire des Bassins du Zambèze et du Limpopo

(+1100/+1500) sur la base des données archéologiques qui lui permettent de rouvrir le dossier

du Grand Zimbabwé. Comme le dit fort justement Fagan, ce site unique en Afrique « est célébré

à la fois pour son excellente architecture et pour les théories extravagantes qui ont entouré ses

origines » (page 532). Fagan restitue l’évolution qui a conduit à cette civilisation à travers une

succession de cultures archéologiques, l’éclairage des traditions et des rares textes. Ainsi ce

sont des cultures et sociétés de l’Age du Fer (à partir de 1000) qui sont présentées, ainsi que

leurs transformations économiques et sociales au cours des XIe et XIIe siècles, jusqu’aux origines

de la culture du Zimbabwé telles qu’elles apparaissent à travers les résultats archéologiques et

l’étude des plus anciens sites du Zambèze tels que Batoka, Kalomo, et Léopard kopje. Ce dernier

est considéré comme étant à l’origine de sociétés centralisées comme celle Mapungubwe qui se

sont épanouies à partir du XVe siècle.

Certains chercheurs comme Huffman voient dans les constructeurs de Mapungubwé les

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ancêtres du peuple Venda de l’actuelle République d’Afrique du Sud, d’autres dont Fagan voit le

Grand Zimbabwé comme étant l’œuvre des ancêtres des Shona.

Afrique Equatoriale

Les chapitres XXII et XXIII rédigés par J. Vansina et L.D. Ngconco avec le concours du premier,

traitent de la partie équatoriale du continent. Les auteurs relèvent pour l’Afrique Equatoriale,

l’émergence précoce d’entités étatiques malgré la présence de la forêt dense. L’Histoire des

peuples au Sud du Limpopo a subi les contre coups négatifs de la politique raciste d’exclusion

des africains noirs.

MADAGASCAR

F. Esoavelomandroso présente au chapitre XXIV Madagascar et les Îles avoisinantes du XIIe

siècle au XVIe siècle. Cette période est perçue comme celle de la formation du peuple malgache

qui au-delà de sa diversité ethnique possède une unité linguistique remarquable. L’Île connaît

des brassages entre ses différentes composantes et on voit émerger les principales entités

politiques. Durant cette période Madagascar et les Comores sont intégrés aux multiples circuits

commerciaux dont ceux animés par les Swahili avant les interventions directes des arabes. Les

investigations archéologiques récentes dont ceux de « African Archéologists Network » auquel

participent des chercheurs malgaches, devraient permettre d’enrichir les connaissances sur

Madagascar.

Recommandations pour une Exploitation Pédagogique du Volume IV

Une remarque préliminaire des évaluateurs du volume invite la structure ou le groupe en

charge de l’exploitation du volume à des fins pédagogiques à tenir compte de la mentalité des

jeunes actuels qui diffère beaucoup de celle de la jeunesse qu’avaient en vue les rédacteurs de

l’Histoire Générale de l’Afrique en 1986. Les besoins de la jeunesse d’aujourd’hui ont changé

même en termes de supports d’accès à la connaissance. Mais dans le même temps les

évaluateurs insistent sur la nécessité de respecter le choix du Comité Scientifique International

qui a privilégié « une vision holistique et fédéraliste des peuples africains plutôt que le

particularisme local et le fractionnement des faits… ».

- Le volume IV selon eux doit être considéré comme une « ressource book » dont chacun des

chapitres recèle des données importantes. Cependant certains ont besoin d’un toilettage

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sérieux, d’autres juste d’une actualisation.

- De façon plus précise, certains chapitres ont été signalés comme comportant des orientations

pédagogiques et ayant une valeur didactique avérée. Ce sont les chapitres VI, VII et VIII qui sont

respectivement de D. T. Niane, Madame Ly Tall, S. M. Cissoko.

Le chapitre XII de Y. Person et le chapitre XXVII de D.T. Niane, J. Dévisse sont essentiels et

pourraient de l’avis des évaluateurs servir de fondement à la redaction des manuels et du

matériel didactique. D’autres chapitres ont été recommandés en raison du fait qu’ils abordent

des thèmes qui présentent un intérêt éducatif, ce sont par exemple, le chapitre 15 de J.C.

Garcin sur l’Egypte dans le monde musulman (pour les questions de géopolitique et de

géostratégie qui y sont abordées).

Le Chapitre 16 de L. Kopracek sur la Nubie du XIIe au XIVe siècle (aspects relatifs à la gestion des

conflits), le chapitre XX de Ogot sur la région des Grands Lacs (intéressant par rapport au thème

de l’ethnicité). Aussi recommandent ils la prise en compte de thèmes qui sont autant d’idées

forces qui se dégagent de la lecture du volume tels que : la formation de l‘Etat et la

centralisation, l’art de la guerre et la conquête, la gouvernance, la paix et la résolution des

conflits, « le leadership », le développement religieux sur le continent, l’expansion de l’Islam en

Afrique, la tolérance religieuse, l’Afrique et le monde extérieur.

Quant à la démarche globale, les évaluateurs recommandent :

- La prise en compte des sites inscrits dans le patrimoine mondial, dans la formation de la

jeunesse (en cartes et dossiers pédagogiques).

- de lier ce projet d’écriture des manuels avec les initiatives de différents musées africains visant

l’exploitation de leurs collections à des fins éducatives.

- de faciliter l’articulation des produits de ce projet pédagogique avec les enseignements des

« Histoires nationales ».

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VOLUME V

Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du XVIe au XVIIIe siècle

Directeur du volume : B.A Ogot

Le volume V de l’Histoire Générale de l’Afrique couvre une longue période de trois siècles (1500

et 1800). La pertinence de la borne chronologique interpelle sur la périodisation en histoire de

l’Afrique d’autant qu’elle semble eurocentrée et non motivée par les dynamiques internes des

sociétés africaines. On peut aussi rétorquer que les sources majoritairement exogènes pour la

période couverte, ont fortement influencé la perception et l’interprétation des tendances

d’évolution de l’Afrique.

Structure du volume

La structure du volume a été conçue à partir d’une approche thématique pour déboucher sur

une approche régionale. Les premiers chapitres (1 à 5) ont ainsi examiné des thèmes généraux

que l’on retrouvera, à des degrés divers, dans le reste du volume consacré aux études

régionales. Une telle méthodologie a l’avantage d’attirer l’attention sur les faits marquants de la

période dont les effets pourront être diversement appréciés à l’échelle locale ou régionale. Si

elle a été garante d’une certaine unité aux vingt-neuf chapitres constitutifs du volume, elle a été

également génératrice d’une impression de répétitions ou de redites d’un chapitre à l’autre,

d’un thème à l’autre.

Approche thématique

Dans le premier des cinq chapitres consacrés à un thème particulier, intitulé ‘La lutte pour le

commerce international et ses implications pour l’Afrique’, M. Malowist souligne les

implications, pour l’Afrique, de la nouvelle orientation du commerce international. Jusque vers

la fin du 15è siècle le rivage méditerranéen, l’Extrême-Orient et l’Orient constituaient les

directions principales du commerce international africain. La période du seizième au dix-

huitième siècle est celle d’un nouveau système géopolitique orienté vers l’Atlantique, avec son

dispositif commercial triangulaire reliant l’Europe, l’Afrique et les Amériques. Les conséquences

de l’ouverture et du développement du commerce atlantique dont la traite des esclaves devait

en constituer le moteur pendant près de quatre siècles, ont été tragiques pour l’Afrique à bien

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des égards.

J. E. Inikori (ch. 4) a examiné le rôle que la traite des esclaves a joué dans l’émergence d’un

ordre économique dans l’Atlantique. Il a d’abord souligné l’ampleur du trafic dont l’évaluation

quantitative a été fortement influencée, par la publication, en 1969, de l’ouvrage de l’historien

américain Philip Curtin, The Atlantic Slave Trade : A Census. Pour lui, en se basant sur le système

d’échanges inégaux qu’il a incarné et qui devait se poursuivre avec la conquête et

l’administration coloniales, le commerce transatlantique peut être perçu comme un des

facteurs fondamentaux dans le sous-développement de l’Afrique.

Dans le chapitre 5 du volume, J.E. Harris a présenté un tableau documenté de la diaspora

africaine dans l’Ancien et le Nouveau Monde. En spécialiste de la question, il a rappelé les

principales étapes de cette histoire, signalant au passage les personnalités marquantes de cette

diaspora comme une réfutation éloquente des thèses racistes de l’infériorité supposée des

noirs. Si la traite atlantique reste l’un des aspects majeurs de cette diaspora, l’auteur en a

montré les dimensions mondiales, soulignant au passage le caractère volontaire de certaines de

ces migrations. Son étude est d’un intérêt particulier pour appréhender les dynamiques des

cultures africaines dans les divers coins du continent américain.

La traite des esclaves n’est pas sans effet sur les mouvements traditionnels de population en

Afrique, si bien étudiés par Jan Vansina (ch.3), sans parler, bien entendu, de la dispersion des

Africains hors de leur continent. Il ne faut pas en effet perdre de vue que la violence, sous forme

de guerres organisées, de razzias et de kidnappings, est la forme principale et la méthode la plus

communément répandue d’approvisionnement en main-d’œuvre servile pour le Nouveau

Monde. L’insécurité et la violence associée à la quête de l’esclave ont provoqué à l’intérieur de

bon nombre de régions d’Afrique subsaharienne d’importants mouvements de population.

Marécages, montagnes et forêts ont ainsi servi de refuges aux populations en détresse. L’étude

de Vansina a toutefois un intérêt plus général. Après avoir noté la mobilité caractéristique des

différentes catégories de la population africaine, notamment des cultivateurs (en raison de la

pratique d’une culture itinérante) et des éleveurs, il a tenu à préciser que cette tendance n’est

pas forcément caractéristique de la période 1500-1800. Elle n’est pas non plus, caractéristique

d’une région.

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La contribution de P. Diagne (ch.2) porte sur ‘les structures politiques, économiques et sociales

africaines durant la période considérée’. C’est une véritable gageure de pouvoir embrasser un

thème d’une telle envergure sans tomber dans le piège des généralités. Il lui était difficile

d’embrasser tout le continent tout en donnant des exemples précis pour étayer bon nombre de

ses assertions. Il a toutefois eu le mérite de souligner l’impact de l’islam et du christianisme sur

l’émergence de nouvelles structures même si presque rien n’a été dit sur les religions

traditionnelles et leurs relations conflictuelles avec ces deux nouvelles religions.

Dans les cinq chapitres qui viennent d’être passés en revue, la traite des esclaves est,

explicitement ou implicitement, un facteur historique dont la signification dans l’histoire de

l’Afrique pendant la période 1500-1800 n’a échappé à aucun de leurs auteurs.

Approche régionale

Une lecture attentive de la vingtaine de chapitres consacrés aux études régionales permet de se

faire une idée des dynamiques internes de transformation des sociétés africaines. Il y a souvent

des chevauchements, voire des confusions, entre les cadres géographiques et les catégories

ethniques utilisées dans l’approche thématique du volume.

Les considérations sur l’approche régionale impliquent, pour les raisons d’ordre pédagogique,

un certain réaménagement ou regroupement des chapitres au vu de leur contenu. Le

traitement de l’histoire de l’Afrique méditerranéenne (ch.6, 8 et 9), dans cette perspective,

mérite d’être revu pour faire mieux ressortir ses liens avec le reste du continent. Il serait

toutefois souhaitable, dans un objectif pédagogique, que le facteur ottoman soit présenté de

façon plus simple et plus accessible à l’ensemble des élèves et étudiants africains.

Les thèmes identifiés dans le présent volume sont illustratifs des liens entre les parties

septentrionale et méridionale du continent. Ils se retrouvent, à des degrés divers, dans les

autres chapitres du volume. L’étude de B. Barry (ch.10) est significative à cet égard. Après avoir

souligné que le destin de la Sénégambie était lié à la convergence…des influences du Soudan, du

Sahara et de la forêt’, il a noté que cette unité a été renforcée, à partir du 15e siècle par

l’influence du commerce atlantique dont le développement et les conséquences, examinés dans

l’approche thématique, sont ici illustrés par le cas de la Sénégambie. Les ‘mouvements

maraboutiques’ du dix-septième siècle et les ‘révolutions musulmanes’ du siècle suivant

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apparaissent ainsi comme des formes de résistance à l’impact des traites négrières. Peut-être

serait-il intéressant de tenter une analyse comparative de ces révolutions musulmanes au-delà

de la seule Sénégambie.

La fin de l’Empire songhay (ch.11) aurait pu être étudiée dans le contexte de l’expansion

marocaine au Soudan occidental. Si l’auteur a fait une analyse pertinente des mobiles de

l’invasion marocaine, il a été par contre discret sur la signification de la bataille de Tondibi dans

le processus de formation des états au Soudan occidental. Au-delà de l’histoire politique, le

chapitre a pris en considération d’autres aspects significatifs du processus historique. C’est

notamment le cas des calamités naturelles et de l’environnement humain, de la production et

des échanges régionaux, du commerce transsaharien à l’heure de la traite atlantique, du

développement des influences culturelles et religieuses.

Le chapitre 12 (Du Niger à la Volta) est partiellement consacré aux royaumes bambara de Ségou

et du Kaarta déjà passé en revue dans le chapitre précédent. Voilà qui illustre la problématique

de l’approche régionale à laquelle il a été déjà fait allusion. Une définition, même

approximative, de la géopolitique du Songhaï permettrait d’éviter ces chevauchements que l’on

peut noter dans d’autres parties du volume. Le chapitre 12 gagnerait en cohésion si les

royaumes mossi en constituaient le seul objet. L’originalité des structures socio-politiques des

royaumes mossi offre un cadre approprié pour apprécier la nature et l’impact des rencontres et

relations entre l’islam et les religions traditionnelles africaines.

Pour des raisons écologiques et historiques, les Etats hausa (ch.16) auraient dû constituer la

suite logique des chapitres 11 et 12 brièvement examinés ci-dessus. Cela aurait permis de mieux

comprendre les rapports conflictuels du pays hausa avec ses voisins. Cela aurait également

offert une intéressante perspective comparative d’évolution historique du Soudan occidental et

central, qu’il s’agisse des structures de production et d’échanges, de la pénétration et du

développement de l’islam et de son impact sur les cultures traditionnelles et l’idéologie du

pouvoir étatique. Les pays hausa ont toujours été l’objet d’une curiosité intellectuelle certaine

comme en témoigne la Chronique de Kano.

Globalement, les chapitres 13 à 15 couvrent les zones forestières de la côte du Golfe de Guinée.

Au risque de se répéter, il faut rappeler ici la problématique de la définition et de l’identification

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des zones géopolitiques. Cela est d’autant plus pertinent qu’il s’agit d’une région où l’impact du

commerce atlantique a été plus sensible, avec comme corollaire l’existence de sources

documentaires substantielles. Les cartes des trois chapitres sont illustratives de la difficulté à

déterminer des repères de frontière crédibles compte tenu de la complexité des mouvements

migratoires dans la région et des interactions ethniques qui en ont résulté.

Les chapitres 17 à 29 s’ouvrent sur le Kanem-Borno et s’achèvent par la synthèse

générale du volume dans laquelle B.A.Ogot fait ressortir les faits marquants et les principaux

thèmes abordés dans les différents chapitres. Au-delà de ses ressorts économiques, le

commerce des esclaves apparaît, à côté de celui de l’or et de l’ivoire, comme le baromètre de la

construction et de la déconstruction des Etats et des cités commerçantes. Toutefois,

l’évaluation de ce facteur et de son impact doit prendre en compte les spécificités et les

nuances régionales dont, entre autres, l’influence relative du christianisme et de l’islam.

E.M’Bokolo, dans le chapitre 18 sur la zone ‘des savanes du Cameroun au haut Nil’,

retrace les grands itinéraires migratoires et la structuration des sociétés qu’on y retrouve. La

grande difficulté réside dans le recours presque exclusif aux sources orales et aux données

archéologiques, ce qui donne l’impression de travaux inachevés, en attendant l’éclairage des

sources nouvelles. La première donnée qui émerge d’emblée est que l’histoire de la zone

considérée dans ce chapitre commence à être mieux connue à partir du XVIe siècle, voire plus

récemment.

On notera entre autres que la chasse et le travail du fer y sont valorisés. Le commerce se

fait dans des marchés périodiques où s’échangent et s’acquièrent des produits divers,

notamment des esclaves. L’on retiendra par ailleurs que c’est à cette époque que furent

introduites les cultures vivrières importées d’Amérique, à savoir le maïs, le manioc, les

arachides, les haricots et le tabac. A cette mutation agricole due au commerce atlantique,

s’ajoute le ralentissement des mouvements humains et donc la stabilisation démographique de

la zone.

Dans le chapitre 19, à l’opposé du chapitre précédent, le texte de J. Vansina bénéficie d’une

abondance ressource documentaire. Il en ressort qu’aux XVe et XVIe siècle, le Kongo établit son

hégémonie sur l’ensemble des territoires compris entre le plateau de Benguela et les plateaux

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bateke d’une part et d’autre part de la mer au-delà du fleuve Kwango.

Pendant que se jouent les rivalités politiques et les intérêts économiques africains et portugais

tantôt solidaires tantôt concurrents, se déploient les nouvelles cultures importées d’Amérique

qui améliorent le niveau général de nutrition, mais aussi la variole qui s’installe de façon

récurrente. Un nouveau tournant de l’histoire s’opère à partir de 1641 : les Brésiliens font

irruption en Angola, en chassent les Hollandais et dominent désormais le commerce au-delà des

années 1730. La déliquescence du Kongo favorise l’autonomie de petites principautés

Le chapitre 20 consacré à la formation des Etats luba et lunda met en évidence un mode

d’organisation sociopolitique hiérarchisé chez les Luba avec au sommet le mulopwe, détenteur

du pouvoir royal. Chez les Lunda, le pouvoir est de type impérial et familial, reposant sur une

reproduction continuelle de la dévolution des charges sur les mêmes bases de filiation familiale.

L’empire lunda pratique la traite aussi bien pour ses propres nécessités de main d’œuvre

agricole ou pour le portage, que par souci d’échanger les esclaves contre les produits

manufacturés importés d’Angola.

Les chapitres 21 et 22 analysent la vie politique et économique des territoires au nord et

au sud du Zambèze. Il s’en dégage aussi la dynamique du commerce de l’or et de l’ivoire

pratiqué par les Portugais et les populations locales. Si les Européens ont quelque succès dans

l’exploitation aurifère, la perte du contrôle de l’ivoire au profit des Yao et des Bisa pousse les

Portugais vers le commerce des esclaves. Les colons créent des domaines, les prazos, qui se

répandent dans toute la région du bas Zambèze.

Les contributions relatives aux régions du Zambèze et à l’Afrique australe (ch.21 à 23)

illustrent l’ancienneté de la présence portugaise, l’ingérence des nouveaux venus dans les crises

politiques locales, les processus d’implantation de leur hégémonie sur le commerce et le

contrôle de la société politique. Ces chapitres et celui consacré à la côte orientale pourront

servir de sources à des cours sur ‘le facteur portugais’ dans l’histoire africaine du XVIe au XVIIIe

siècle.

Au chapitre 23, E. Haberland analyse : les heurs et les malheurs de l’empire chrétien

d’Ethiopie qui, face à la pression extérieure et aux problèmes internes, sut faire preuve de

résistance malgré la durée des crises (1529-1632) ; la conquête musulmane conduite par Ahmad

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ibn Ibrahim al-Ghazi dans l’Amhara et le Tigré pour n’imposer finalement qu’une islamisation

éphémère ; la révocation de l’influence musulmane par les Oromo qui instaurent leur propre

autorité sans que celle-ci s’accompagne d’une influence culturelle notable ; et puis la poussée

des Somali entre 1500 et 1700 aboutissant à la diffusion de la culture arabo-musulmane et d’un

snobisme culturel fédérateur des groupes éparses qui les composent.

Le chapitre 25 consacré à la côte orientale de l’Afrique est à la fois une histoire de la

lutte à laquelle se livrent Portugais et Arabes pour le contrôle politique et économique des cités,

une histoire des moments de partenariats entre les deux rivaux et une histoire de l’urbanisation

et des activités économiques sur cette façade du continent africain. Les grandeurs et les

servitudes des cités commerçantes (Kilwa, Sofala, Malindi, Paté, Lamu, Mombassa…)

Les chapitres 26 et 27 traitent de la région des Grands Lacs et de ‘l’intérieur de l’Afrique

de l’Est’. Les auteurs qui se sont penchés sur les Grands Lacs en segmentent la dynamique dans

la période considérée par le volume V, en trois séquences. Entre 1500 et 1580, les nouveaux

Etats postérieurs à l’Empire Bachwezi cherchent à se consolider par d’habiles manœuvres

diplomatiques. Le fait marquant de cette période est le déclin du Bunyoro et l’émergence des

royaumes du Buganda et du Rwanda.

L’étude des peuples du Kenya et de la Tanzanie entre 1500 et 1800 souffre de la rareté

des sources écrites, d’où une inégale répartition de l’intérêt des historiens pour les groupes de

l’intérieur. Dans les deux chapitres, la famine émerge comme un thème d’intérêt historique du

fait de son impact sur les mouvements humains, sur les redéfinitions géopolitiques et sur le

mode de vie des populations.

Conclusion générale :

Du volume particulièrement dense et riche se dégagent des thèmes d’intérêt commun, à

des degrés divers, aux sociétés africaines pendant la période considérée. Ainsi en est-il de la

traite, de l’esclavage et des résistances qu’ils ont générées ; des conditions et des modes de

production ; de la santé ; de l’impact du christianisme et de l’islam sur l’évolution des structures

politiques et sociales. Ces thèmes devraient être pris en compte dans des programmes

d’enseignement dans une perspective panafricaine, avec le souci de mettre en exergue les

facteurs d’unité dans la diversité des cultures africaines. Dans la poursuite de cet objectif, les

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outils pédagogiques devront intégrer les facilités audiovisuelles modernes.

La traite atlantique des esclaves, caractéristique de cette période de l’histoire africaine n’est pas

une innovation. Elle prolonge la vieille tradition d’exporter des esclaves vers les pays arabes,

mais avec une nouvelle direction et une dimension que chacun des contributeurs a, à sa

manière, mise en exergue. Dans une perspective pédagogique et dans l’éventualité d’une

édition simplifiée, on pourrait peut-être envisager une présentation du thème de la traite et de

l’esclavage sous une forme mettant en relief l’essentiel de ce qui mérite d’être retenu par les

étudiants. A ce propos, une approche comparative des conséquences des migrations

traditionnelles ou naturelles et celles induites par la quête des esclaves pour les marchés du

continent américain devrait faire l’objet de développements.

C’est peut-être le lieu de rappeler que l’UNESCO, à l’aube du troisième millénaire, avait conçu

un projet éducatif sur ce thème, projet connu sous le terme de ‘Briser le silence’ (‘Breaking the

silence’ en anglais), avec pour objectif l’enseignement d’une sorte de programme minimum

commun dans les écoles secondaires des trois continents impliqués dans la traite

transatlantique. Les actes de la conférence de Ouidah, publiés par l’UNESCO sous le titre de ‘La

chaîne et le lien’, ainsi que les documents produits dans le cadre du projet éducatif ‘Briser le

silence’ devraient pouvoir servir à l’élaboration d’une synthèse globale sur le sujet de la traite et

de l’esclavage. Cette orientation, stimulée par diverses initiatives de l’UNESCO qui informe

aujourd’hui bon nombre d’expositions et de réseaux de recherche dans divers pays d’Afrique,

d’Europe et d’Amérique. Les résultats de cette dynamique, sous forme de revues spécialisées,

d’ouvrages individuels ou collectifs et de documents audio-visuels constituent des outils

pédagogiques appropriés pour un enseignement pertinent de l’histoire de la traite et de

l’esclavage.

L’accent mis sur l’esclavage et les traites négrières à cause de la documentation abondante ou

de la conjoncture dans la recherche ne doit pas faire perdre de vue les autres thématiques très

importantes ou novatrices ?

Quid des maladies des hommes et aussi du bétail, parfois concomitantes à ces épisodes

désastreux ? Il est clair que le lien entre écologie et histoire du peuplement est une donnée

transversale dans l’historiographie africaine ; qu’en est-il des maladies comme facteur de

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modification des structures sociales et politiques, comme source de modifications

démographiques ? Au fait, quelles sont les grandes maladies de cette époque ? Corrélativement,

comment les Africains se soignaient-ils tout juste avant l’introduction de la médecine

occidentale ? Ce sont là, incontestablement, des questions pertinentes qui méritent attention

dans les programmes de recherche et d’enseignement.

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Volume VI

Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique au XIXe siècle jusque vers les années 1880 Directeur du volume : J.F.ADE. Ajayi

1. Présentation synthétique du volume

Le volume VI de l’HGA porte sur le XIXe siècle. Deux facteurs majeurs se dégagent

changeant radicalement la donne politique et économique pour l’ensemble du continent :

l’abolition de la traite par les puissances européennes, à leur tête la Grande Bretagne, et

l’instauration du commerce dit légitime. L’environnement international ainsi modifié par des

décisions unilatérales a sommé les acteurs africains, Etats et sociétés, à un difficile ajustement,

tout au long de ce court siècle qui démarre en 1815 et s’achève avec le démarrage de la

conquête coloniale, véritablement lancée en 1880. Sans minimiser l’impact indéniable de ces

facteurs externes, les auteurs du volume ont privilégié une perspective africaine en mettant en

avant les initiatives prises dans les différentes régions du continent pour s’accommoder à la

nouvelle donne introduite par l’économie et la politique à l’échelle globale. Ils ont ainsi montré

que les Etats africains bâtis sur les traites esclavagistes externes ne pouvaient pas du jour au

lendemain s’adapter à la nouvelle donne introduite par le commerce légitime, d’autant que la

demande américaine en «bois d’ebene» ne s’était pas non plus tarie. La réponse à cette

demande était désormais assurée par la traite clandestine impliquant Etats et seigneurs de

guerre de connivence avec les bateaux de la contrebande mais dans des conditions rendues plus

difficiles par la surveillance des mers par les marines européennes. Les traites esclavagistes ont

mis du temps à être éradiquées. Les difficultés à échapper à la marine britannique qui sillonne

et surveille l’Atlantique orientent les caravanes de traite en direction du monde arabe. Les

pistes transsahariennes et beaucoup de circuits du trafic esclavagiste internes au continent sont

ainsi restés hors d’atteinte de la lutte contre la traite. L’abolition de l’esclavage a connu les

mêmes avatars et difficultés d’application. Beaucoup d’économies locales en connexion avec le

marché mondial ont continué à faire largement usage des esclaves dans la production et le

transport des produits agricoles et de cueillette destinés au marché du commerce légitime

international.

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Aucune région du continent, la partie subsaharienne particulièrement, n’a échappé aux

crises induites par ces mutations à l’échelle globale. Les sociétés ont réagi à ce nouveau

contexte qui a considérablement accru le niveau de violence dans les rapports économiques,

politiques et sociaux. Toutefois, les auteurs du volume le montrent suffisamment, les réponses

africaines à ces crises ont été fort variables. Un peu partout des révolutions surviennent, en

réponse à la crise interne des sociétés affectées par l’abolition de la traite et l’immixtion

européenne. Au final, le XIXe siècle reste fortement marqué par les crises et les révolutions qui

sont toutefois demeuré inefficaces à stopper la poussée impérialiste des puissances

européennes qui culmine avec la colonisation porteuse d’une modernité dépendante.

Les auteurs n’ont pas manqué de mettre en évidence le facteur religieux comme ressort

des stratégies d’adaptation au contexte du XIXe siècle. Dans les pays d’islam les révolutions ont

mobilisé au nom de cette foi contre les pouvoirs séculiers et mis en place des régimes

théocratiques. Dans la quête des solutions aux crises, le monde chrétien a cherché à mettre au

service de leur cause des interprétations innovantes du message de l’évangile dans les églises

locales (Ethiopianisme) comme dans les églises conventionnelles. Les religions des terroirs ont

également contribué à une interprétation active des mutations qui affectent le siècle. Ces

mouvements religieux qui ont cherché à faire sens des rapides et traumatiques évolutions n’ont

pas réussi à contrer durablement le projet impérialiste européen. La défaite consécutive à la

conquête ne les a pourtant pas éradiqués en tant que communautés de foi. Ils sont demeurés

vivaces dans le nouveau contexte colonial et y ont même servi comme instrument

d’accommodation avec les nouvelles autorités.

Le rêve d’une libre adhésion à la modernité occidentale portée par le mouvement

abolitionniste qui a cherché à se matérialiser dans la création de deux Etats peuplés d’anciens

esclaves, mais aussi par les Etats islamisés du Nord, sans oublier les autres régions comme la

Corne de l’Afrique n’a pas totalement abouti. Au final, le XIXe siècle s’achève avec la mainmise

des puissances impérialistes sur l’ensemble du continent, économiquement, puis politiquement.

Deux Etats, l’Ethiopie et le Libéria, ont réussi à préserver leur indépendance politique.

Ces éléments structurants analysés ont permis aux auteurs du volume d’inscrire le reste

du volume à faire l’état des lieux en Afrique au tout début du siècle avant de passer à des

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études régionales portant sur l’Afrique australe, l’Afrique orientale et son hinterland, l’Afrique

des Grands Lacs, l’Afrique centrale avec le bassin du Congo et l’Angola, l’Egypte et le Soudan, la

corne de l’Afrique, l’Afrique du Nord et l’Afrique occidentale, Madagascar et les diasporas

africaines en Europe et en Amérique.

Le XIXe siècle voit s’achever la longue période de la traite Atlantique des esclaves. Le

volume met l’accent sur les conséquences démographiques de cette séquence historique et

analyse les phénomènes migratoires qui ont durablement affecté l’histoire du continent. Il

passe en revue les motivations économiques et les visées des puissances européennes en

compétition pour le contrôle des richesses du continent, les potentialités productives des

systèmes agricoles et les transformations des bases sociales, des institutions et mécanismes de

fonctionnement des régimes politiques.

L’impact de la nouvelle configuration de l’économie mondiale sur les différentes régions

du continent qui y sont intégrées de force ou de grès fait l’objet d’une analyse minutieuse.

Aucune région n’échappe à la poussée de l’économie capitaliste à la recherche des matières

premières. La maîtrise des positions stratégiques en vue d’accéder à ces ressources mettent en

compétition les nations européennes sur le sol africain. De façon précoce en Afrique du Nord et

plus tard dans le reste du continent, l’intervention européenne se traduit partout, en dépit de la

variété des situations et des réponses locales, par une forte mise en dépendance des économies

africaines. L’unique frein à l’expansion capitaliste demeure l’absence de ressources répondant à

la demande du marché mondial.

Autant que faire se peut, les sociétés et Etats africains prennent des initiatives pour tenter de

maîtriser ces facteurs externes ou de les mettre à leurs avantages dans les luttes internes pour

le contrôle du pouvoir. Les stratégies couvrent un large spectre allant de la politique

d’ouverture et de réformes économiques pour le développement d’un capitalisme national ou

le rejet radical mais vain du cours nouveau de l’expansion capitaliste. Entre les deux, de

multiples variantes d’accommodation, largement informées par les contextes locaux, sont

élaborées en réponse aux sollicitations des Etats et compagnies européennes.

2. L’Afrique australe (chapitres 5, 6 et 7)

Au seuil du XIXe siècle, l’Afrique du Sud connut des transformations économiques, sociales et

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politiques d’une ampleur sans précédent. Une combinaison de multiples facteurs locaux est à

l’origine des changements révolutionnaires survenus dans cette région. L’adoption en pays

Nguni du maïs d’origine américaine introduit par les Portugais à partir du Mozambique a permis,

dans les conditions climatiques favorables, d’accroire considérablement la production

alimentaire. Il s’ensuivit corrélativement une forte croissance démographique. La région avait

été au début du siècle confrontée à un cycle de sécheresses à l’origine de famines qui avaient

affecté la population. La nouvelle donne agricole et ses conséquences démographiques se sont

traduites par des changements de très grande portée historique dans le domaine politique,

économique et social.

A travers ce qui est connu comme le Mfecane (le temps des troubles), les chefferies

locales ont été militairement réduites et réunies en un puissant Etat Zulu sous la direction de

Chaka qui a consolidé et parachevé les réformes militaires entamées par ses prédécesseurs.

L’une des innovations majeures portait sur l’armement des troupes avec le passage des armes

de jet aux armes de contact avec l’usage du bouclier fait de peau de bœuf. Une profonde

recomposition sociale s’opère par intégration des vaincus dans les structures des classes d’âge

de l’initiation traditionnelle transformées en unités militaires soumises à une discipline de fer.

La tactique de guerre avait connu une réforme tout aussi radicale, avec la technique de la tête

de buffle enveloppant et étouffant l’adversaire.

L’origine locale de ces innovations a été mise en évidence pour faire échec à

l’interprétation qui les faisait venir de l’influence européenne. Ces réformes, qui ont conduit à

l’unification de l’espace politique et à l’intégration de groupes de populations, aussi divers que

nombreux, dans la nation Zulu, se sont opérées avec un niveau élevé de violence sous la

direction de souverains autoritaires voire despotiques. Toutefois, les réformes militaires ont eu

un effet bénéfique sur l’artisanat local affecté à la production à grande échelle des armes :

lances, couteaux et boucliers. L’esprit de la virilité guerrière issu de cette expérience historique

est demeuré une des composantes majeures de la culture Zulu.

C’est également dans ce contexte qu’émergent de nouveaux ensembles étatiques et

ethniques : les Sotho, les Swazi, les Zulu, les Ndebele, etc., aujourd’hui encore conscients de leur

identité. L’état de guerre généralisé par le Mfecane installe une grande insécurité avec le pillage

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du bétail et la destruction de l’agriculture, remettant en cause les bases de la croissance

démographique entamée au tout début du siècle. La misère et le dénuement laissent dans

l’errance de nombreuses populations. Les conséquences de cette séquence historique touchent

des régions lointaines et affectent toute l’Afrique australe et touchent même certaines régions

de l’Afrique orientale.

La situation s’est considérablement complexifiée avec l’entrée en jeu de deux forces

étrangères aux intérêts contradictoires. Les Boers, paysans hollandais expulsés d’Europe pour

hérésie religieuse et arrivés dans la région depuis le XVIIe siècle, sont pris en tenaille entre

l’effervescence révolutionnaire des sociétés africaines et les visées des Britanniques intéressées

par l’exploitation des régions minières. Ils répondirent par une migration massive en direction

du Nord connue sous le nom de Grand Trek. Les Boers développent une farouche opposition

aux Etats africains expansionnistes. Leur mouvement, fondé sur l’idéologie religieuse du peuple

élu, s’est heurté à l’opposition des peuples africains de la région contre qui des luttes d’une rare

violence sont engagées. Il a développé contre les peuples africains une haine raciale qui servit

de ferment à l’idéologie de l’Apartheid.

Les troubles qui affectent la région dans cette première moitié du XIXe siècle participe à

rendre négligeable sa contribution au commerce mondial. L’extrême focalisation du volume sur

la révolution zulu et ses aspects militaires et politiques s’est faite aux dépens de l’évocation des

autres peuples de la partie Nord-Ouest de l’Afrique du Sud sérieusement affecté par la

spoliation de leurs terres par les colons Boers.

3. L’Afrique orientale et son hinterland (chapitres 8, 9, 10 et 11).

Le volume porte son attention les réseaux marchands qui animent le commerce d’exportation

qui se développe liant la côte orientale de l’Afrique à son hinterland qui s’enfonce loin à

l’intérieur du continent jusqu’au bassin du Congo. Les réseaux marchands asiatiques (Arabes

du Sultanat d’Oman et Indiens) y côtoient les Européens (Britanniques, Français, Allemands et

Portugais), tous les deux sont connectés au commerce africain qui draine les produits de

l’intérieur vers la côte. Les Arabes ont réussi tout de même à pénétrer l’hinterland. Ils sont

protégés par les pouvoirs africains et dans certaines circonstances favorables se constituent

leurs propres territoires politiques. Ils sont actifs en direction du Malawi, de la Zambie, du Sud-

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Est du Congo, de la région des Grands Lacs, du pays des Masaï.

Les acteurs africains comprenaient les Swahili qui partaient de la côte comme leurs

homologues arabes pour se connecter avec les intermédiaires de l’hinterland en charge de la

capture des captifs et de la collecte de l’ivoire, les deux produits qui dominent ce commerce.

L’impuissance de la marine britannique à éradiquer ce flux de traite esclavagiste permet

d’approvisionner le marché brésilien à partir des ports mozambicains. Une partie des esclaves

acheminée sur les ports de Kilwa et de Zanzibar est expédiée aux plantations des îles de Pemba

et Zanzibar ou vers l’Asie. Le commerce de l’ivoire est contrôlé par les Indiens qui le revendent

aux Américains et aux Européens.

Le contexte s’est révélé favorable à une coalition de la classe montante des marchands

et celle des guerriers qui forgent de nouveaux Etats relativement déliés des déterminants

traditionnels du pouvoir et qui ont fait face à l’impérialisme conquérant de la fin du siècle. Ces

projets politiques inscrits au cœur d’une économie de prédation désorganisent les sociétés

soumises aux pillages produisant des milliers de marginaux et déclassés, principalement dans

le Kasaï et le centre de la cuvette. En revanche, les sociétés intégrées aux réseaux marchands

se sont associées aux entreprises esclavagistes marchandes des Arabes et des Swahilis. Elles

passent du statut de victimes à celles d’agents actifs de la chasse aux esclaves et de la collecte

de l’ivoire. Le meilleur exemple de cette reconversion ce sont les Batetela de Ngongo Lutete

qui ont été associés aux aventures des Arabes et des Swahili, vers le Kasaï et en aval de

Kisangani.

Ce contexte de violence combiné aux sécheresses a eu des conséquences désastreuses

sur les conditions de vie des populations. L’endémicité de certaines maladies, les épidémies et

les famines récurrentes, les guerres de capture et la traite des esclaves ont affecté

négativement la démographie régionale.

Soulignons que l’introduction des nouvelles plantes américaines (le maïs et le manioc)

sur les bords du lac Victoria a contribué à augmenter la production au XIX è siècle pour

répondre aux besoins des royaumes et peuples environnants. Tel a certainement été le cas

ailleurs, mais les auteurs ne le signalent pas. On devrait ajouter l’apport des Arabes qui ont

développé les plantations de riz dans leurs possessions et dans leurs places fortes. Ils ont ainsi

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assuré l’alimentation de leurs caravanes et de leurs villes naissantes. Ils ont introduit aussi les

nouvelles habitudes alimentaires comme chez les Batetela dont l’aliment principal est devenu

le riz. La région de Kindu est toujours réputée jusqu’à ce jour pour la culture du riz.

Dans le sillage du commerce, le Swahili s’est imposé comme lingua franca et avec lui,

l’islam a pénétré la région. La prégnance de la culture Swahili dans la région témoigne de

l’importance des transformations portées par le monde marchand au XIXe siècle. De même

l’architecture arabe a pénétré la région. L’étude des mutations culturelles du XIXe siècle reste

l’un des points faibles de ce chapitre : le système d’instruction arabe et l’expansion régionale

de la culture Swahili.

4. Le bassin du Congo et l’Angola (chapitre 12)

L’immensité de la région sous revue a contraint à des choix qui ont exclu de l’étude certains

espaces comme les territoires des Etats contemporains du Gabon, de la Centrafrique et du

Tchad. L’importance de ces espaces dans la dynamique régionale est pourtant incontestable et

sous ce rapport, il mérite d’être pris en compte.

Partant du déséquilibre démographique entre différentes zones de la région, l’étude

montre l’impact différentiel de la traite sur les mouvements de populations. Les plantes

introduites par le commerce atlantique ne sont certainement pas étrangères à la densité

observée dans les savanes de l’Ubangi et de l’Uele au Nord du Congo, les régions

montagneuses à l’Est du Congo et les savanes du Sud du Congo et de l’Angola. L’activité de

production y est assure par la main d’œuvre servile qui, du fait de la surveillance accrue des

mers, ne pouvait plus s’exporter sur les Amériques. Les déséquilibres démographiques

s’expliquent aussi par d’importants mouvements migratoires notés chez les Fangs, les Ngbaka,

les Ngbandi et les Azande. La forte poussée de populations arabes y est aussi pour quelque

chose. Le monde marchand a été l’agent actif des changements historiques survenus dans la

région. Ils se sont constitués en réseaux contrôlant différents espaces fort différenciés.

L’espace soudano-nilotique qui se prolonge jusqu’en mer Rouge exerce une activité de

prédation dans le bassin du Congo, le pays Azande et Mangbetu. Les opérations de razzias y

sont conduites par les mercenaires africains au service des Egyptiens, musulmans ou Coptes,

mais aussi des Européens. Les conséquences culturelles majeures sont lisibles dans les langues

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véhiculaires qui s’y imposent : l’arabe du Soudan au Tchad et le sango dans la boucle de

l’Ubangi.

L’espace Swahili s’est étendu dans le bassin de l’Uele et de l’Aruwimi, du territoire de

Bumba (Equateur) jusqu’au Kasaï oriental, en passant par le centre de la cuvette. La zone

commerciale du fleuve sous le contrôle des Africains constitue un autre espace qui draine les

produits du bassin du Congo vers la côte occidentale. L’ivoire, le caoutchouc, les noix de coco,

la cire de l’huile de palme sont les principaux produits commercialisés par cet espace. Deux

facteurs sont la clé du dynamisme marchand de la région : l’abondance de l’ivoire accumulé

comme trophée de chasse depuis des siècles et de la capacité des riverains de transporter les

marchandises grâce à la plus puissante flotte du continent qui parcourait des milliers de

kilomètres sur le fleuve et sur les affluents. Les factoreries des Européens, Anglais, Français,

Hollandais, Portugais, sillonnant la basse vallée du Congo étaient les partenaires de ce

commerce. Dans cet espace, le commerce a entrainé un dynamisme linguistique remarquable

avec l’émergence ou l’affirmation de langues véhiculaires comme le kituba ou kikongo dans le

Kwango-Kwilu, le futur lingala. Les transformations économiques ont un impact social certain

avec les commerçants enrichis qui s’imposent dans la vie politique.

L’espace luso-africain se déploie du Loanda au Kasaï et au Katanga jusque chez les Lunda de

Kazembe. Les Africains y organisent un commerce caravanier sous haute protection en

rapport avec les Portugais qui contrôlent directement les produits des plantations et certains

produits du commerce venant des régions sous leur domination. Une intense activité

prédatrice alimentée par la circulation des armes y développent une chasse à l’éléphant mais

aussi à l’homme. Les captifs sont largement mis à contribution pour assurer le transport des

produits de l’intérieur vers les côtes et vice versa. Ailleurs dans le bassin de l’Ogoué s’est

constitué un réseau marchand qui livre des produits dont l’ivoire aux factoreries françaises du

Gabon. Le transport se fait par pirogue en dépit de quelques passages du cours d’eau

encombrés par les rochers.

Il est important de noter que la dynamique économique n’a pas entrainé un développement

des infrastructures. Il est à l’origine du déclin de l’artisanat local. Il a induit des

transformations culturelles majeures véhiculées par les langues du commerce. A côté du

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monde marchand, l’évangélisation qui avait déjà une tradition ancienne dans la région

continue de s’étendre animée par les Spiritains français, dans la seconde moitié du XIXe siècle

du Gabon au Congo. A la fin du siècle, ils sont concurrencés dans la conquête des âmes par les

missionnaires protestants installés à l’embouchure du fleuve.

5. L’Egypte et le Soudan (Chapitres 13 et 14)

L’Egypte a développé une politique de modernisation relativement précoce comparée au

reste du continent. Muhammad Ali et ses successeurs ont fait preuve d’esprit novateur pour

fonder l’Etat moderne égyptien. Ils ont brisé la domination turque et étendu la souveraineté

égyptienne en Asie, en Afrique, jusqu’au Soudan et en Ethiopie. L’ouverture de l’Egypte à

l’influence européenne leur a fourni les moyens techniques et militaires pour réaliser leurs

ambitions. Les dépenses exigées par une telle entreprise ont débouché sur une impasse malgré

la volonté des dirigeants du pays de préserver son indépendance. Pour faire face aux difficultés,

l’Egypte a exercé une pression croissante sur le Soudan dont les populations ont été largement

pressurées par les impôts et le travail, en particulier celui de la main d’œuvre servile. A ces

difficultés se sont ajoutées celles résultant des réformes agraires qui ont provoqué un

mécontentement grandissant parmi les populations déshéritées dont les esclaves soudanais

massivement utilisés dans les durs travaux de modernisation : chemins de fer, canaux

d’irrigation, etc.

La modernisation a touché également le domaine culturel avec le développement d’un

système éducatif avec son réseau de grandes écoles, au Caire, à Alexandrie, etc. Toutefois, elle a

été largement handicapée par le recours aux experts étrangers bien placés dans les centres de

décision de l’armée et de l’administration.

Si la position géostratégique de l’Egypte lui a permis d’obtenir le financement nécessaire

au percement du canal de Suez en 1853, l’endettement qui s’ensuivit lui a fait perdre la

souveraineté sur cet outil stratégique désormais sous le contrôle des puissances créancières. Le

canal devient une zone internationale. L’influence étrangère a surtout été celle des Anglais qui

mettent sous tutelle le pays et se donne ainsi les moyens d’un contrôle efficace leur ouvrant la

voie à la conquête de l’espace du Caire au Cap.

La conquête du Soudan par l’Egypte dépendant toujours juridiquement de la Turquie

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répondait bien entendu aux visées de Muhammad Ali d’avoir un empire africain, mais les motifs

sont plus économiques que politiques. Muhammad Ali voulait disposer des esclaves pour ses

armées et ses grands travaux agricoles et infrastructurels en Egypte. Il a incorporé des milliers

de Soudanais capturés dans son armée. La politique fiscale est à l’origine de la révolte du Nord

Soudan islamisé. Dans le Sud, la conquête a été réalisée à la fois par l’Etat et par les particuliers,

les commerçants de tout bord et leurs milices. Ainsi les populations non islamisées ont connu de

nombreuses guerres d’esclavage menées par les Turcs, les Egyptiens, les Arabes, les Ansars ou

Dongolawi du Nord Soudan. Ces hommes construisaient des places fortes, les Zeriba, bases des

opérations militaires qui rapportaient aussi bien des esclaves que de l’ivoire. Les populations

qui ont opposé la résistance la plus farouche furent les Shilluk, les Bari et Azande.

Les Al-Djallaba ou les commerçants du Nord Soudan qui s’étaient infiltrés dans le Sud ont

contribué à étendre l’arabe et l’islamisation du Sud Soudan, en développant le mépris envers les

autochtones de la région qui leur ont opposé une farouche résistance dans la région du Bahr el-

Ghazal et du Darfour. L’instabilité consécutive à la politique égyptienne a provoqué

d’importantes vagues migratoires venues du Darfour, du Kordofan et du Haut-Nil sur l’Afrique

centrale.

6. L’Ethiopie et la Somalie (chapitre 15)

L’empire chrétien d’Ethiopie commence le XIX è siècle dans un état de dislocation totale,

consécutive à l’invasion des Galla ou Oromo. Trois royaumes plus ou moins importants, le Tigré,

l’Amhara et le Shoa se partagent l’espace avec une multitude de petites entités. Tous ces Etats

cherchent des alliances avec les pays d’Europe - France, Angleterre et l’Italie - pour avoir des

armes et s’imposer comme l’unique maître de l’empire. A cette crise politique s’ajoutent des

difficultés économiques considérables.

C’est en 1853, sous le règne de Dajazmach Kassa Heyku qu’est entreprise la

reconstruction politique du pays. Sous le nom Téwodros II, il devint empereur en 1855. Il

entreprit une vigoureuse politique de modernisation de son armée pour faire face à la menace

égyptienne soutenue par les Anglais. Ces derniers l’attaquèrent en 1867 et sans occuper le pays,

ils le détruisirent. Le Kassa de Tigré, sorti victorieux des conflits de succession, est nommé

empereur sous le nom de Joannes IV, en 1872. Il vainquit les Egyptiens à deux reprises assurant

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définitivement l’indépendance du pays. Il reforma l’Eglise orthodoxe, poussa les musulmans à se

convertir au christianisme, chassa les chrétiens catholiques malgré leurs connaissances

techniques indispensables à la construction du pays.

La Somalie pour sa part est le théâtre d’un émiettement politique dispersant le pouvoir

entre des chefs musulmans de faible envergure. Les maigres produits commerciaux locaux se

dirigent vers le sultanat d’Oman. Des sécheresses récurrentes à l’origine de famines rurales ont

largement éprouvé la population.

7. Le Maghreb au XIXe siècle (chapitres 17, 18, 19)

Le Maghreb encore sous domination ottomane est largement convoité par les

puissances européennes motivées par deux facteurs étroitement liés : la proximité des pays

méditerranéens comme marchés et l’ouverture des routes rendues dangereuses par les

pirates de mer musulmans. Après avoir vaincu les pirates, ils s‘imposent dans le commerce,

grâce à leur puissance économique et surtout financière.

A partir de 1815, l’économie de la région est soumise à une forte influence des agents du

commerce international qui poussent à son ouverture et à sa réforme. L’endettement

croissant des Etats consolident la mainmise des Européens fortement installés dans les villes

côtières où ils dominent le monde des affaires. Les hommes d’affaires étrangers réussissent à

briser les monopoles et à s’emparer des droits et des privilèges divers, au détriment des Etats.

Le monde rural sur qui repose la satisfaction des créances publiques deviennent plus

vulnérables aux catastrophes naturelles.

Les reformes les plus inadaptées ont eu lieu surtout en Tunisie. Les dépenses exagérées

ont poussé le pouvoir à augmenter les impôts, puis à recourir aux emprunts. Les impôts ont

provoqué des révoltes tandis que les emprunts ont rendu l’Etat insolvable. D’où la

Commission financière internationale en 1869 pour contrôler toutes les finances et garantir le

remboursement des dettes. On peut donc dire que la mise sous tutelle économique a précédé

la colonisation qui intervient dans les années 1881. Le point positif de cette réforme concerne

la construction des écoles et la formation de certains cadres à l’étranger pour servir de base à

la modernisation.

La Libye a connu un sort légèrement différent pour deux raisons : la pauvreté relative et

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la domination directe par la Turquie à partir des années 1835. D’où une certaine poursuite des

activités économiques anciennes qui englobent les échanges transsahariens : un peu d’or, les

plumes d’autruche, les cuirs (peaux de chèvres) et un peu d’ivoire, sans oublier les esclaves.

L’Algérie pour sa part connaît une situation particulière à cause de l’occupation coloniale

précoce, dès 1830. Les Français qui se rendent maîtres du pays vont s’imposer dans le

domaine politique et économique. Une grande partie du territoire va se soulever, paralysant

le déroulement des échanges.

L’autre article montre que le Maroc qui évolue en dehors de l’empire Ottoman

ressemble sur plusieurs points, aux autres pays de la région. La pression européenne pousse

les sultans à introduire des réformes, alors que l’organisation politico- administrative est

basée sur la loi islamique. Ces reformes vont poser le problème fiscal qui marque cette

période historique. Les ressources financières sont inférieures aux besoins réels du pays. Ainsi,

en 1859, le Maroc s’ouvre au commerce international et tombe sous la loi des endettements.

Comme dans les autres pays, l’Egypte et la Tunisie, le Maroc apportent des reformes de

son enseignement et de son armée. L’université de Fès qui forme les administrateurs se

charge aussi de former les ingénieurs. D’autres jeunes sont envoyés en formation à l’étranger.

Ajoutons que malgré les efforts pour la modernisation de son armée, le Maroc ne peut tenir

tête ni à la France, ni à l’Espagne qui triomphent de lui respectivement en 1844 et 1866.

Les tentatives de modernisation ont partout entraîné une crise croissance de la dette

publique, rendant les Etats insolvables. Ils finissent par tomber, les uns après les autres, sous

la domination économique puis politique des puissances coloniales européennes.

8. Le Sahara au XIXe siècle (chapitre 20)

Le chapitre est focalisé sur les occupations coloniales et les mutations géopolitiques qui

s’opèrent dans cet immense espace qu’est le Sahara. L’une des conséquences majeures de

cette présence coloniale porte atteinte au commerce esclavagiste transsaharien dont les

routes s’étaient réorientées en direction du Maroc avec l’occupation française de l’Algérie.

Avec la conquête de Tombouctou en 1894, le coup fatal est donné à ce trafic qui a drainé plus

de 200.000 esclaves sur le Maroc. La route Kano-Tripoli par où transitent les plumes autruche,

les peaux et les esclaves, elle reste active jusqu’en 1900. La sécurité assurée par la confrérie

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de la Sanussiya sur la voie Wadai-Benghazi permet d’y faire transiter plus longuement encore

les mêmes produits avec plus de 500.000 esclaves dirigés vers l’Egypte entre 1840-1885. Cette

importante population servile capturée dans les raids des tribus nomades est employée à la

garde des troupeaux, à l’agriculture (Hoggar), à l’artisanat et à la production du sel dans le

Sahara (Aïr). Les guerres religieuses et économiques du XIXe siècle ont également alimenté ce

trafic. Les armées marocaine et égyptienne y ont recruté de forts contingents.

Ces relations de part et d’autre des rives du Sahara ont donné l’occasion aux tribus

nomades de diffuser les traditions mystiques des confréries soufies et l’usage du droit

islamique dans l’exercice du commerce et de la politique.

9. Les révolutions islamiques du XIXe siècle en Afrique de l’Ouest (chapitres 21, 22 et 23)

Le chapitre montre qu’au XIXe siècle, l’Afrique de l’Ouest est le théâtre d’importantes

révolutions islamiques avec pour objectifs affichés le retour à l’orthodoxie islamique dans

l’organisation sociale et le façonnage des mentalités. Les grandes figures des Jihad furent

Shaykh ‘Uthman dan Fodio, Seku Ahmadu et Al-Hadj ‘Umar. Elles ont offert des perspectives de

sortie des impasses issues des politiques conduites par les Etats séculiers et des vieilles

théocraties sclérosées par l’exercice du pouvoir. Les jihad ont eu des conséquences immenses

sur l’ensemble des sociétés ouest-africaines: institution de pouvoirs théocratiques dynastiques,

développement de systèmes esclavagistes autochtones, émergence d’une nouvelle élite

intellectuelle, implantation durable des deux confréries rivales : la Kadiriyya et la Tidjaniyya, etc.

Illustrations

Il y a nécessité d’un enrichissement des illustrations en qualité et en quantité quand on

s’adresse à un jeune public contemporain éduqué dans un monde d’images. Les illustrations des

différents chapitres sont trop concentrées sur les personnages de premier plan et illustrent très

peu les scènes de vie, l’architecture et les images représentatives de la vie quotidienne, les

éléments technologiques et de l’environnement résidentiel. La cartographie est globalement

bien faite. L’usage de la photographie doit être plus systématique. Il faudra également penser à

alléger les cartes pour obtenir plus de clarté et gagner en lisibilité. Pour les ouvrage destinés aux

écoles élémentaires et secondaires, il sera important de fournir des textes sources aux élèves en

vue de les familiariser avec le matériel de construction de l’histoire et alimenter leur propre

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réflexion et éveiller leur imagination constructive.

Les propositions des matières à retenir pour les écoles primaires et secondaires africaines

Pour le volume VI et en suivant la logique des commentaires, les matières suivantes peuvent

être retenues :

1) Les chapitres généraux : l’abolition de la traite négrière.

La traite est une question importante dont les élèves doivent connaître le début et la fin. Il

faut aussi comprendre le comportement des Blancs et des Noirs qui participent à ce chapitre

douloureux de notre histoire.

2) L’Afrique australe : la culture des Nguni et des Zulu.

Il est question d’insister sur l’initiation suivant les classes d’âge comme une grande école

de la vie qui est devenue au XIXe siècle un instrument d’intégration nationale et une grande

école militaire. Les nouvelles techniques de combat prouvent que l’Afrique avait ses strateges

militaires.

3) L’Afrique australe : Les républiques Boers au XIXe siècle.

La communauté minoritaire des Boers qui se fait remarquer par sa politique de

développement séparé (Apartheid) forge toutes ses armes dès cette époque. Le complexe de

supériorité raciale et technologique, l’instinct naturel de défense ainsi que la cupidité qui les

poussent à tout prendre aux Africains, sont autant de facteurs qui expliquent leur

comportement. Ces facteurs primordiaux pour leur existence paraissent plus forts que les

principes moraux et religieux dont ils prétendent être les porteurs depuis l’Europe.

4) La côte et l’hinterland de l’Afrique orientale : La culture swahili

Cette culture qui est un mélange d’éléments asiatiques et africains montre le dynamisme

des cultures africaines face à l’apport étranger et leur capacité d’emprunt et d’innovation. Cette

nouvelle culture a ensuite intégré les cultures africaines de l’intérieur. Elle semble aujourd’hui

être un modèle instructif en termes d’intégration régionale.

5) L’Afrique centrale (le bassin du Congo et l’Angola) : le bassin du Congo, carrefour

commercial.

De par sa position, le Congo apparaît déjà au milieu du XIXe siècle comme un véritable

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carrefour commercial et objet des luttes entre les puissances européennes. Les fondements du

futur statut international du bassin conventionnel du Congo datent de cette époque de la

conquête économique.

6) La vallée du Nil : La renaissance égyptienne sous Mohamad Ali et Ismail.

La première puissance africaine de l’histoire moderne du XIXe siècle, mérite un traitement

spécifique pour montrer les difficultés d’une politique de modernisation dans le contexte

d’expansion impérialiste.

7) La corne de l’Afrique : La restauration de l’empire d’Ethiopie sous Tewodros II et Joannes

IV.

Ce royaume chrétien de l’Afrique de l’Est a connu une existence difficile depuis

l’avènement de l’Islam. Alors qu’il était sur le point de sombrer, deux de ces vaillants fils l’ont

ressuscité au milieu du XIXe siècle. Il est le symbole de l’indépendance africaine.

8) Le Maghreb : les tentatives de modernisation du Maghreb au XIX è siècle.

Vaste berceau de civilisations islamiques, le Maghreb offre un exemple des méfaits du

capitalisme en expansion et de la difficile lutte des sociétés africaines pour la préservation de

leur indépendance.

9) L’Afrique de l’Ouest : les révolutions islamiques en Afrique occidentale.

Confrontées aux défis de s’ajuster à un contexte mondial de grandes mutations, les

sociétés ouest-africaines ont su mobiliser les héritages islamiques pour faire face aux défis de

l’impérialisme conquérant.

10) Les grandes personnalités : Les grandes figures historiques de l’Afrique au XIXe siècle.

On pourra parler aussi bien des bâtisseurs des Etas que des résistants aux premières

tentatives de colonisation.

11) Les agents extérieurs de l’évolution culturelle : Les missions chrétiennes en Afrique au

XIXe siècle.

12) La place de l’Afrique dans le monde : Les relations internationales du l’Afrique au XIXe

siècle.

Les chefs africains ont essayé d’établir les relations bilatérales avec les grandes puissances,

souvent pour avoir de l’assistance militaire ou technique. C’est dans ce cadre que les consuls

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ont résidé dans leurs Etats.

13) Les produits d’importation et d’exportation : Le commerce international de l’Afrique au

XIXe siècle.

14) L’état de nos sociétés : Les sociétés africaines au XIXe siècle.

15) La Grande île de Madagascar : Madagascar au XIXe siècle, diplomatie et organisation

sociale.

16) Le sort des Africains vivant hors du continent : la diaspora africaine au XIXe siècle.

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Volume VII L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique sous domination coloniale, 1880-1935

A. Adu Boahen, dir.

I Structure et grandes lignes du volume

Consacré à l’Afrique sous domination coloniale, le volume VII de l’HGA étudie certes les

politiques des acteurs des impérialismes européens, mais privilégie les réactions des sociétés

africaines face aux bouleversements induits par les conquêtes dans les dernières décennies du

XIX e siècle et face à l’emprise exercée par des étrangers jusqu’à l’annexion de l’Éthiopie par

l’Italie fasciste en 1935. Il ne s’agit donc pas d’une histoire des Européens en Afrique, mais bien

d’une histoire des Africains en Afrique et en dehors de l’Afrique, une histoire qui s’inscrit dans

un contexte international, marqué durant cette période par l’expansion européenne, la

Première Guerre mondiale et le renforcement des connexions entre l’Afrique et l’Amérique du

Nord, contribuant à l’émergence du panafricanisme.

L’ouvrage, de trente chapitres, est construit suivant un plan chronologique et, dans la

mesure du possible, selon une approche par grands ensembles régionaux qui permet de se

départir de la perspective européenne d’une histoire des colonies. Évidemment, cela n’a pu se

faire pour les quelques chapitres portant spécifiquement sur les méthodes de domination. Il

faut également souligner le souci constant d’éviter une vue homogénéisante, ne serait-ce qu’en

raison de la diversité des nations ou des groupes sociaux peuplant une même région, des

différences entre les enjeux économiques (par exemple, les cultures de rente ou les

exploitations minières), entre les politiques des puissances exerçant la tutelle. De même, la

présence de colons européens et, sur le plan religieux, la force de l’islam, l’enracinement du

christianisme ou la vigueur des religions traditionnelles figurent parmi les multiples facteurs

invitant à des analyses nuancées. Aussi, de façon générale, le volume rend bien compte de la

complexité des phénomènes, même si les auteurs n’ont pu exploiter certaines sources non

encore accessibles au moment de la rédaction.

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Le volume peut être subdivisé en trois grandes parties, bien équilibrées. Chaque partie

commence par un chapitre introductif, synthétique, donnant une vue d’ensemble sur le thème

qui va être développé.

La première partie (du chapitre 2 au chapitre 11) qui couvre la période 1880-1914, celle de

la défense de la souveraineté, traite « des initiatives et résistances » des sociétés africaines

confrontées aux conséquences des tractations diplomatiques qui leur échappaient totalement

(Conférence de Berlin), aux attaques armées des Européens, puis à la mise en place de la

colonisation. Les réactions à la conquête ont varié entre résistances armées et stratégies

d’alliance et non de collaboration. D’ailleurs, il importe de dépasser la dichotomie simplificatrice

résistant/collaborateur. Alors que les puissances coloniales pensaient avoir achevé la

« pacification », les Africains n’en continuèrent pas moins à manifester leur désir de retrouver

leur souveraineté. Les résistances qui ont revêtu différentes formes et ont concerné toutes les

sociétés, avec ou sans État, témoignent également d’un travail des sociétés sur elles-mêmes. Il

ne faut donc pas y voir seulement des réactions à des agressions venant de l’extérieur ; actrices

à part entière, les sociétés africaines ont aussi conscience de prendre des initiatives en tenant

compte des sollicitations de leur temps, de leurs besoins propres, des contextes spécifiques à

chacune d’entre elles. Quoi qu’il en soit, à la veille de la Première Guerre mondiale, les

puissances européennes ont établi leur domination sur la presque totalité du continent ; elles

réussissent également à intervenir dans la vie économique des deux seuls États indépendants

du Libéria et de l’Éthiopie.

La deuxième partie de l’ouvrage (du chapitre 12 au chapitre 21) s’ouvre sur les impacts de la

Grande Guerre, avec le recrutement militaire, les pertes sur les fronts, les difficultés

économiques dues à la rupture des relations commerciales avec les métropoles. Suit une

analyse des politiques coloniales dont la diversité tient aux différences de méthodes et de

stratégies des puissances impériales mais aussi aux ressources des territoires et à l’implication

des sociétés africaines dans l’administration ou l’économie, à leur ouverture ou leurs réticences

face à « la mission civilisatrice ». L’ouvrage ne manque pas de rappeler que, malgré des

différences entre l’administration directe et l’administration indirecte des « politiques

indigènes », une même idée a guidé les colonisateurs : celle d’une supériorité des Occidentaux.

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Une attention particulière est accordée aux économies coloniales qui font l’objet de quatre

chapitres ainsi qu’aux mutations démographiques et sociales liées à la colonisation, examinées

dans deux chapitres. En situation coloniale, dans le contexte d’un étroit contrôle social, les

religions et les arts sont apparus comme des espaces de relative liberté, offrant la possibilité

d’exprimer le refus de la domination étrangère. Deux chapitres sont consacrés à la vie culturelle

dans cette perspective africaine.

La dernière partie (du chapitre 22 au chapitre 29) traite de « politique et nationalisme

africain » ou plutôt des réactions nationalistes ou anticolonialistes des sociétés dans l’Afrique

de l’entre-deux-guerres. Les Africains s’adaptent au système mis en place par les pouvoirs

coloniaux, par la protestation ou par la résistance. La prise de conscience d’une profonde

inégalité a entretenu un sentiment de frustration qui a touché les auxiliaires des

administrations, anciennes élites de chefs ou nouvelles élites urbaines instruites dans les écoles

coloniales. Les intellectuels reprirent les discours officiels sur la politique d’assimilation ou

d’association pour étayer leur contestation. Ils utilisèrent beaucoup la presse, agirent au sein de

partis, d’organisations de jeunesse. Le nationalisme s’est aussi exprimé dans la religion, avec la

fondation d’églises indépendantes des missions et le développement de mouvements

millénaristes ou du mahdisme et du panislamisme. Les problèmes économiques alimentèrent le

mécontentement dans les milieux des travailleurs et le monde rural. Les tensions furent

particulièrement vives dans les régions où les colons étaient bien représentés. Ces réactions

sont analysées dans le cadre des grands ensembles régionaux définis dans la première partie

pour l’analyse des résistances aux conquêtes. Après un chapitre consacré à l’intervention

croissante des Européens au Libéria et en Éthiopie qui finit par perdre son indépendance

(l’année 1935 est un tournant dans l’histoire de l’Afrique), le volume rappelle de quelle manière

le contexte international a tout de même joué en faveur des nationalistes africains. Ceux-ci

profitèrent de la SDN et du soutien de diverses associations en Europe et aux Etats-Unis, grâce

en particulier aux connexions établies par la diaspora d’intellectuels ayant effectué des études à

l’étranger, objet de l’avant - dernier chapitre de l’ouvrage.

La conclusion générale, rédigée par Adu Boahen, pose la question de l’impact du

colonialisme sur l’Afrique et de sa signification dans l’histoire du continent. L’auteur souligne la

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complexité du phénomène, rappelle la nécessité d’une approche qui prenne en compte la

diversité des situations et la capacité de résilience des cultures africaines en particulier dans les

campagnes, malgré les répercussions indéniables de la domination étrangère dans le domaine

de l’économie et ses conséquences sur l’évolution politique du continent. Il conclut ainsi : « Bien

que le colonialisme ait été sans aucun doute un simple chapitre d’une longue histoire, un

épisode ou un interlude dans les expériences multiples et diverses des peuples d’Afrique… il a

marqué une nette coupure dans l’histoire de l’Afrique » et dans le développement ultérieur du

continent.

II Contenu résumé des chapitres autres que les chapitres introductifs

On pourrait reprendre comme titre de la première partie, celui de l’introduction générale, rédigée

tout comme la conclusion par Adu Boahen, « L’Afrique face au défi colonial ».

(Chapitres 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11)

Le chapitre 2 qui présente les différentes théories sur le développement d’un nouvel

impérialisme à partir des années 1880 oppose aux théories centrées sur des perspectives

européennes (rôle primordial du capitalisme monopoliste, influence de l’évolutionnisme social,

exacerbation des nationalismes européens), « la théorie de la dimension africaine » qui accorde

une attention particulière aux forces de désintégration à l’œuvre dans les sociétés africaines

pour expliquer leurs défaites.

Après une réflexion générale de Terence Ranger sur les « initiatives et les résistances

africaines face au partage et à la conquête », une série de chapitres aborde la question dans des

ensembles régionaux, en commençant par l’Afrique du Nord-Est.

En Egypte, la dépendance croissante vis-à-vis de l’Europe suscita la révolution dirigée par

Ahmad Urabi. Mais les Anglais profitèrent des divisions entre Urabistes pour occuper le pays. De

jeunes intellectuels constituèrent le Parti Nationaliste, alors que d’autres choisirent la stratégie

de l’alliance. Au Soudan, les Mahdistes mobilisés dans un djihad furent également défaits par

Anglais aidés par leurs alliés égyptiens, tandis que la France, l’Italie et la Grande-Bretagne se

partagèrent le territoire des Somalis qui ne formaient pas une seule entité politique. Un

mouvement de renaissance islamique se déclencha cependant en opposition à la domination

d’infidèles. Le chapitre est illustré par des photographies de leaders politiques et d’une carte

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générale.

En Afrique du Nord, malgré la relative homogénéité culturelle, la situation est complexe en

raison de la diversité des nations, celle des périodes de la conquête, celle des modes

d’administration et de l’antériorité de la domination ottomane. Les réactions sont à examiner à

différents niveaux : celui des États organisés, celui des confréries Sufi et celui de la djema’a. La

conquête par les Européens s’est faite en cinq étapes. On peut distinguer deux grandes phases

dans la résistance au Maghreb : de 1880 à 1912 et de 1921 to 1935. Mais les Africains furent

aussi défaits en raison de facteurs internes et externes. Dans les illustrations figurent des cartes

des principales régions et des campagnes des Européens ainsi que des photographies de leaders

des résistances et une sur la guerre du Rif.

L’organisation socio-politique des États africains ainsi que les relations que les Européens

entretenaient avec eux figurent parmi les facteurs déterminants dans les réactions des sociétés

de l’Afrique Occidentale à l’intrusion des Européens (Français, Britanniques et Allemands). Les

Africains optèrent pour l’une des trois solutions : confrontation militaire, alliance ou soumission.

L’accent est mis sur les réactions dans les territoires conquis par la France (Sénégambie,

l’Empire Toucouleur, l’empire de Samori, le Dahomey et le pays Baulé) et les territoires passés

sous la domination britannique (empire Ashanti, Sud et Nord du Nigeria). Suit une analyse des

résistances à l’oppression exercée par l’administration coloniale, marquées par des révoltes

(Mamadou Lamine, la révolte contre l’impôt de la case en Sierra Leone), des migrations, des

mouvements religieux chrétiens ou musulmans, la formation d’associations par des élites. Deux

cartes (les États et populations ; la progression européenne en Afrique de l’Ouest) ainsi que des

reproductions photographiques de leaders de la résistance et un aspect de la répression

illustrent le chapitre.

Le chapitre dédié à l’Afrique Orientale traite successivement du Kenya, du Tanganyika et

de l’Ouganda. Alors que les Nandi du Kenya offrent l’exemple d’une longue résistance aux

Anglais, l’attitude des Gikuyu a varié entre alliance et affrontement armé. Au Tanganyika, les

Allemands profitèrent de rivalités entre certains groupes, mais se heurtèrent à la vigueur des

réactions de la part des Hehe et de populations de la côte, dirigées par Abushiri. Mwanga, roi du

Buganda recourut d’abord à la diplomatie avant de finir capturé au terme d’une guérilla. Les

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gouvernements coloniaux confisquèrent les meilleures terres, confinèrent les Africains dans des

réserves, avec une plus forte pression des colons au Kenya. Les contraintes coloniales

suscitèrent révoltes, résistance passive, revalorisation des croyances africaines, nouvelles

expressions du christianisme au Kenya. Au Tanganyika, ce fut à partir de 1905 le mouvement

Maji-Maji. Outre une carte, les illustrations comprennent trois photographies (construction du

chemin de fer, le résistant chef Abushiri et les souverains Mwanga du Buganda et Kabarega du

Bunyoro).

En Afrique Centrale (République Démocratique du Congo, Zambie, Malawi, Angola et

Mozambique), les conflits internes n’ont pas empêché les réactions de contestation, parmi

lesquelles on peut distinguer les résistances ayant un caractère local et les insurrections

d’envergure, avec le projet de renverser le système colonial, mais confrontées à différents

problèmes. Le fait que des groupes ont choisi de coopérer avec les Européens a également

contribué à l’échec de la résistance. Une carte des populations et des états ainsi que les

photographies de Bemba recevant les Européens, de leaders de la résistance illustrent le

chapitre.

Les réactions des sociétés de l’Afrique méridionale face aux Européens ont varié selon

leurs intérêts et leur capacité à résister ou non. De petits royaumes (Tswana et Swazi) misèrent

sur une entente avec la Grande-Bretagne. D’abord victorieux, les Zulu durent s’incliner devant

les Anglais, alors que Lobengula, souverain des Ndebele, essaya la diplomatie avec Cecil Rhodes

qui joua sur les termes du traité pour s’imposer. L’annexion de leurs territoires suscita chez les

Ndebele et les Shona un mouvement de résistance, le chimurenga, qui prit fin après la capture

de ses leaders : des prêtres et des prophètes. Dans l’Afrique du Sud-Ouest, la révolte des Herero

fut réprimée par des massacres. Les illustrations comprennent une carte des peuples et entités

politiques, le champ de bataille victorieuse des Zoulous à Isandhlwana (1879), et de souverains.

La chronologie en ce qui concerne Madagascar dans cette première partie diffère de

celle des autres régions. Elle va jusqu’en 1939. Une première expédition (1883-1885) de la

France contre le royaume de Madagascar se termina par la signature en 1885 d’un traité qui

inaugura une décennie de malentendus. Mais une seconde expédition (1894-1895) se termina

par l’annexion de l’île, affaiblie par de multiples difficultés. Cependant dès la reddition de la

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reine Ranavalona III, des soulèvements éclatèrent sur les marges de l’Imerina. Les Français

eurent également à faire face aux résistances dans d’autres régions. Les Malgaches réagirent

ensuite à la domination coloniale par la résistance passive, des jacqueries, des formes modernes

de nationalisme à partir des années 1910. Le refus opposé par la France à la revendication de la

naturalisation en masse marqua un tournant en 1929, avec la naissance d’un mouvement

national. Le chapitre comporte trois cartes et des photographies (Ranavalona III et le Premier

ministre, Rainilaiarivony)

Convoités aussi par les Européens, L’Éthiopie et le Libéria réussirent à préserver leur

indépendance mais dans des conditions d’autant plus difficiles que les sociétés y étaient

traversées par de profondes divisions, entre Africains autochtones et Américo-Libériens au

Libéria, ou fortement hiérarchisée comme en Éthiopie, avec une organisation pyramidale

dominée par l’empereur. Le Libéria assista impuissant aux grignotages successifs de son

territoire par l’Angleterre et la France. Les divergences sur l’interprétation du traité de Wuchale

furent à l’origine d’une guerre entre l’Italie et l’Éthiopie qui se termina par la victoire de celle-ci

à Adowa. Mais, sollicités ou s’imposant comme intermédiaires pour accéder à la modernité, les

Européens intervinrent tout de même dans la vie économique et sociale de l’Éthiopie de

Menelik II, comme ils le firent de façon plus marquée au Libéria. Le chapitre est abondamment

illustré. Des cartes du Libéria et des photographies de dirigeants politiques et un dessin de la

bataille d’Adowa accompagnent le texte.

La seconde partie analyse l’exercice de la domination coloniale et ses conséquences dans

différents domaines : économique, social, culturel. Il inclut les chapitres consacrés à l’économie

coloniale (14, 15, 16, 17), à la démographie et aux sociétés (18, 19) ainsi qu’à la religion et aux

arts (20, 21).

Un chapitre introductif rappelle les liens étroits entre les colonies et la métropole d’une

part, le reste du monde d’autre part sur le plan économique. On peut distinguer quatre phases

principales dans ce processus : 1880-1910 (conquête et nouvelles relations de production), vers

1900-1920 (capital et coercition), 1920-1930 (participation de l’Afrique à l’économie coloniale)

et 1930-1938 (dépendance et dépression). Il importe aussi de tenir compte de la diversité des

situations en fonction des ressources, de l’implantation de colons européens, de la capacité de

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résilience des Africains face à diverses pressions, des contextes de guerre et de la Grande

dépression. L’économie coloniale se caractérise par une interdépendance entre les secteurs

moderne et traditionnel.

L’économie coloniale dans l’Afrique subsaharienne est ensuite analysée en fonction des

puissances impériales. Un chapitre étudie les anciennes colonies françaises, belges et

portugaises, en soulignant la grande diversité des situations, ainsi en fonction des ressources

(minières ou agricoles), du type d’économie (économie de traite ou compagnies à monopole).

Mais de façon générale, on note la faible diversification de l’économie et le poids des

contraintes sur les colonisés fournissant la main-d’œuvre mais ne pouvant adhérer facilement à

des partis et syndicats. Une quinzaine de tableaux statistiques et une carte représentant les

ressources des colonies françaises, belges et portugaises illustrent le chapitre.

Sources de matières premières pour la métropole, les anciennes colonies britanniques

représentaient aussi des marchés pour ses industries. Cependant, les territoires se sont

distingués chacun par une certaine spécificité : l’Afrique du Sud où les richesses minières ont

joué un rôle primordial dans les mutations socio-économiques, l’Afrique Occidentale restée à

l’abri d’importantes spoliations foncières à la différence du Kenya, de la Rhodésie du Sud ou de

l’Afrique du Sud. Si la modernisation, limitée, d’une économie extravertie n’a pas beaucoup

amélioré la situation des colonisés, elle a en revanche profité aux grandes entreprises

britanniques. Trois cartes, dont une des ressources minières et une autre des chemins de fer, un

tableau statistique des exportations minières et des photographies de travailleurs africains

accompagnent le texte.

Le dernier ensemble défini pour l’étude de l’économie coloniale est l’Afrique du Nord,

avec une distinction entre les colonies selon les régions (Maroc, Algérie et Tunisie, d’une part,

Libye, Égypte et Soudan de l’autre) et selon les puissances impériales. À la différence des

territoires sous domination française et italienne, on n’a pas de forts noyaux de peuplement

européen en Égypte sous domination britannique qui présente aussi la particularité d’être une

zone de libre-échange et de connaître une relative prospérité. Ailleurs, dans territoires, où

l’accent a été mis sur l’exploitation des minerais, où les investissements dans les infrastructures

sont restés limités, la Grande dépression a provoqué une grave détérioration de la situation des

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colonisés. Des cartes de chacun des territoires, des tableaux statistiques et des photographies du

barrage d’Assouan et de Djazira illustrent le chapitre.

Les répercussions sociales de la domination coloniale sont analysées sous l’angle des

aspects démographiques et de l’apparition de nouvelles structures sociales. Si les guerres, la

famine, les épidémies et le travail forcé, en particulier dans les colonies qui furent des réservoirs

de main-d’œuvre, ont épuisé les populations, le développement des communications et les

infrastructures sanitaires des missions ou des gouvernements ont eu un impact positif.

L’accroissement démographique s’est accompagné de mouvements de population, notamment

vers les villes. L’urbanisation, l’instruction, le christianisme, l’économie coloniale figurent parmi

les causes de mutations, avec l’abolition de l’esclavage, une plus grande mobilité sociale,

l’émergence de nouvelles élites ou encore la création de différentes associations. Cependant, il

importe de tenir compte des dynamiques propres aux sociétés africaines, de ne pas s’en tenir à

une opposition tradition/modernité. Tout comme, il faut prendre en compte la diversité des

processus à travers le continent, en fonction des politiques coloniales, de la présence de colons

européens, des réactions des Africains aux forces du changement. Les illustrations portent sur

une ville, une école, la sociabilité de nouvelles élites mais exclusivement dans les colonies

britanniques.

La vie culturelle pendant la période coloniale est traitée dans deux chapitres : sur la

religion et sur les arts. L’opposition à la domination coloniale a trouvé aussi son expression dans

la religion. Certaines révoltes ont été placées sous le signe d’une revalorisation des croyances

traditionnelles et, alors que les États nés du djihad s’étaient effondrés, on assista à une

renaissance de l’islam (mahdisme et confréries). Si des Africains convertis se conformèrent aux

règles des missionnaires, d’autres s’insurgèrent contre leur tutelle. Ils créèrent des églises

indépendantes qui furent des espaces de contestation politique et d’accommodement avec les

traditions africaines. Des illustrations diverses représentant des prophètes, une mosquée et des

danseurs au cours d’un rite d’initiation complètent l’exposé.

La partie consacrée à la musique, étroitement liée à l’éloquence, insiste sur la musique

des cultes de possession chez les Shona. Si les professionnels des arts du spectacle furent

victimes de mesures contre les rites païens, l’administration et les missionnaires encouragèrent

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des représentations théâtrales qu’ils contrôlaient de près. Enfin, pour ce qui est des littératures,

le chapitre privilégie les débats sur les usages de l’arabe classique ou moderne et des langues

des puissances coloniales au sujet desquels les avis des intellectuels africains étaient partagés.

Les exemples sont pris en Égypte et au Soudan Occidental. Ce chapitre ne comporte aucune

illustration.

La dernière partie examine la politique africaine et le nationalisme africain dans les

grands ensembles régionaux

Dans l’Afrique du Nord-Est, alors qu’en Égypte et dans la partie méridionale du Soudan,

le nationalisme a eu un caractère essentiellement laïque, au nord Soudan et en Somalie, il a été

d’inspiration à la fois laïque et religieuse. Avec l’appui du roi Fu’ad Ier, la Grande-Bretagne

freina le succès du Wafd, organisé par une classe émergente d’intellectuels et de propriétaires

égyptiens pour donner un caractère légal à sa présence en Égypte. Le pouvoir colonial réprima

les manifestations de la Ligue du drapeau, association de jeunes intellectuels soudanais, dont le

slogan était « L’unité de la vallée du Nil », de même qu’il brisa au Darfour une révolte sous la

bannière du mahdisme. Les répressions n’empêchèrent pas cependant d’autres réactions,

comme la résistance passive ou des discussions dans des clubs. Trois photographies (le leader du

Wafd, collège de Khartoum, manifestation en faveur de Fu-ad) illustrent le chapitre. Du

nationalisme qui s’est exprimé de différentes façons en Afrique du Nord, le chapitre souligne un

certain nombre de point remarquables dont l’éveil du syndicalisme en Tunisie et en Algérie, le

développement d’une presse nationaliste et la guerre du Rif au Maroc. Les difficultés

économiques ont L’importance de la colonisation en Algérie a posé un problème particulier

pour des jeunes partagés entre l’identité française et le nationalisme algérien. Au Maroc, l’islam

mobilisa également des opposants. Une carte du Maghreb et du Sahara, ainsi que des

photographies sur la guerre du Rif et un portrait de Bourguiba accompagnent le texte.

La Grande Guerre, avec ses contraintes et la découverte des faiblesses des Européens, a

joué un rôle fondamental dans le développement d’un sentiment anticolonial en Afrique

Occidentale. Il en est de même de la Grande dépression. Cependant, des problèmes de

leadership et de méthodes se sont posés aux partis, syndicats et mouvements de jeunesse qui

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se sont créés à l’échelle de la région. Une carte et des photos de personnalités politiques

illustrent le chapitre.

En Afrique Orientale, le nationalisme s’exprima dans des mouvements millénaristes,

dans des églises dissidentes et surtout dans des associations de jeunes élites instruites à

caractère local, dont l’une (celle des Kikuyu) eut pourtant une ambition transethnique. La

répression ne marqua pas la fin des revendications. Une carte de localisation et des

photographies de leaders politique illustrent le texte.

La série de chapitre sur le nationalisme à l’échelle régionale se termine sur l’Afrique

centrale et méridionale. La ségrégation raciale en Afrique du Sud a été un puissant moteur de la

contestation d’abord au sein d’églises indépendantes et, de plus en plus à partir des années

1930, dans le cadre de partis dont l’ANC pour l’élite instruite et de syndicats pour les ouvriers.

Au Congo Belge, l’anticolonialisme s’exprima par la résistance passive ou les grèves, ainsi que

dans le cadre de mouvements millénaristes. Outre des phénomènes comparables, on relève en

Angola l’importance de la presse nationaliste et des ligues affiliées au panafricanisme. Si

l’opposition intellectuelle fut moins structurée au Mozambique, en revanche, les travailleurs se

mobilisèrent dans d’importantes grèves. Les illustrations consistent en deux cartes de

localisation et un portrait d’un chef d’une église indépendante.

Un parallèle peut être établi entre le Libéria et l’Éthiopie où l’auteur parle d’un « esprit

colonial » des groupes dominants, un des facteurs qui, associé aux difficultés économiques

favorisa l’intervention des puissances occidentales et la surveillance par la SDN. Les USA

s’imposèrent au Libéria qui réussit à préserver son indépendance contrairement à l’Éthiopie qui

passa sous domination italienne. Deux cartes et des portraits de dirigeants politiques illustrent le

chapitre.

Le chapitre 29 analyse les relations entre l’Afrique et le Nouveau Monde sous différents

angles : le mouvement de Marcus Garvey, l’évangélisation de l’Afrique par des Africains-

Américains, le rôle en Afrique des étudiants africains formés aux USA, le panafricanisme et

l’héritage culturel africain en Amérique latine et aux Caraïbes. Une carte de l’implantation

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d’Afro-Brésiliens en Afrique Occidentale, des portraits de leaders politiques, des photographies

en rapport aux relations entre l’Afrique et le Brésil accompagnent le texte.

III Remarques d’ordre général sur le contenu du volume dans la perspective de

manuels

Sur les textes De façon générale, l’ouvrage fournit une abondante documentation

malgré quelques problèmes liés à la date de rédaction des textes. Le directeur du volume fait

remarquer que les auteurs n’ont pu consulter les documents qui n’étaient pas accessibles en

raison de la réglementation des archives. Par ailleurs, il est nécessaire de mettre à jour les

thèmes et débats avec le renouvellement de la bibliographie et de l’historiographie. Il a été

impossible aux rédacteurs du rapport de faire ce travail. Un certain nombre de points

pourraient être développés. Le sport est effectivement quelque chose d’important, ne serait-ce

que parce qu’il touche les jeunes (d’ailleurs peu présents dans l’ouvrage sauf à propos du

Kenya), parce que les clubs sont des lieux de discussion et donc éventuellement de

contestation. De même les mouvements de jeunesse (boy scouts, YMCA, éclaireurs) méritent

plus d’attention car ce sont des questions qui peuvent intéresser des élèves. On peut aussi

penser à la rareté de la présence des femmes, or depuis des travaux ont été faits dans ce

domaine. La question de la scolarisation devrait être traitée plus amplement qu’elle ne l’est.

Quelques insuffisances ont été notées, comme l’absence des colonies allemandes et portugaises

en Afrique Occidentale (chap 6). Par ailleurs, le rapport attire l’attention sur le cas des îles qui

font partie de l’UA (Madagascar, Comores, Maurice) qu’il aurait fallu considérer comme un

ensemble régional. Ni Maurice, ni les Comores ne sont traitées. On peut subsidiairement poser

la question des Seychelles et de la Réunion. Pour ce qui concerne Madagascar, le choix d’une

autre chronologie a fait que certains évènements ont été occultés. Pour la périodisation, si 1935

est un tournant, on pourrait aller jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, car celle-ci se

caractérise par un renforcement du système déjà en place.

Sur les illustrations en vue de manu : Elles sont trop centrées sur des grands hommes. Il faut

chercher d’autres illustrations pour montrer les cadres de vie : villes, villages etc., les

monuments comme églises, écoles, les sanctuaires traditionnels, les représentations de

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résidences administratives. On peut penser à des illustrations pour les concessions agricoles et

minières, pour des villages avec leur architecture spécifique. Il serait intéressant d’avoir des

plans de villes pour montrer l’urbanisme occidental et les « quartiers indigènes », la ségrégation

spatiale mais aussi pour donner des exemples de villes où la ségrégation est sociale plus que

raciale, distinguer ainsi des villes préexistantes à la conquête, des villes qui sont créations

coloniales. Des illustrations devraient représenter le commun des gens de différents milieux,

avec femmes, hommes, enfants, etc. On doit pouvoir trouver facilement des illustrations dans

des archives ou dans des ouvrages. Chaque illustration devrait être accompagnée d’un bref

commentaire.

Le volume contient un grand nombre de cartes, mais il faudrait des cartes plus simples

pour les manuels : cartes de localisation, cartes des peuples, des langues, des territoires

coloniaux, etc.

On peut également garder des citations tout à fait expressives et qui parleront à des

élèves.

IV Recommandations pour le contenu de manuels du primaire et du secondaire

Il aurait été utile de se faire une idée des programmes dans les classes primaires et

secondaires pour une réelle efficacité du travail, de savoir au fond quels genres d’ouvrages et

combien de manuels l’UNESCO envisage d’éditer. Un pour le premier cycle du secondaire et un

pour le second ? Et pour quel niveau du primaire ? Un ouvrage pour des enseignants ou pour

des élèves ? Les réponses devraient venir des sessions de travail à Tripoli, sans oublier les

recommandations précédentes.

Il nous manque le regard des enseignants du primaire, des collèges et des lycées qui eux

connaissent les publics auxquels s’adresser. Il faudrait associer à l’entreprise les collègues du

primaire et du secondaire, se faire une idée de la place de l’histoire de l’Afrique et de l’histoire

nationale dans les programmes. Ceci étant, il faudrait avoir une approche par grands ensembles

régionaux, à l’intérieur desquels on peut parler plus spécifiquement des pays.

Le rapport relève dans chaque chapitre ce qui a semblé le plus important.

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Le rapport attire l’attention sur l’intérêt qu’il y aurait à s’inspirer des travaux de nos collègues

du Nigeria dans leur publication Tarikh. On peut en ce qui concerne cette période se référer à

Tarikh vol 4, n 3 « European Conquest ant African Resistance », vol 3, n 3 « Indirect Rule in

British Africa », vol 5, n 3 « Protest against Colonial Rule in West Africa », vol 3, n 4

« Independence Movements in Africa 1», vol 4, n1 « Independence Movements in Africa 2 »,

vol 5, n 4 « The African Diaspora ».

En passant successivement en revue les chapitres, voici les thèmes susceptibles d’être retenus

Chapitre 2 Partage Européen et conquête de l’Afrique

Parler de la Conférence de Berlin ; simplifier partie sur les théories de l’impérialisme, insister sur

nationalismes européens et les divisions, les difficultés en Afrique ; un tableau chronologique

des conquêtes est nécessaire.

Chapitre 3 : Introduction générale à initiatives et résistances

Il faut quelque chose de moins complexe, tout en évoquant les différents points de vue ;

reprendre la citation du chef nama Hendrik Wittboi sur une vision unitaire de l’Afrique

Chapitre 4 : Initiatives et résistances en Afrique du Nord-Est

Retenir les thèmes suivants : Révolution urabiste, le Mahdisme, la partition de la Somalie ;

insister sur les enjeux autour du canal de Suez

Chapitre 5 : Initiatives et résistances en Afrique du Nord et Sahara

Les affrontements militaires et échanges diplomatiques avant 1880 ; les résistances au

colonialisme de 1880 à 1930 ; les facteurs intérieurs et extérieurs ayant causé l’échec des

résistances ; étudier rôle des leaders, des groupes religieux

Chapitre 6 : Initiatives et résistances en Afrique Occidentale

Les résistances à l’invasion européenne ; résistance à la domination coloniale ; l’échec

des résistances ; les élèves doivent se faire une idée autant de l’unité que de la diversité des

expériences des communautés africaines ; biographies de leaders de la résistance ; chronologie

des principaux évènements.

Chapitre 7 : Initiatives et résistances en Afrique orientale

Parler des Maji-Maji, de la révolte d’Abushiri ; Insister sur la question des terres dans les Hautes

terres du Kenya ; résistance dans la région des Grands Lacs. Il faut carte des territoires

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coloniaux.

Chapitre 8 : Initiatives et résistances en Afrique centrale

La lutte des états pour maintenir leur souveraineté ; les premières résistances à caractère local ;

les insurrections anticoloniales avant 1918. Il faudrait une chronologie pour guider les élèves,

mettre l’accent sur la diversité des réactions des Africains face à l’invasion, donner des

biographies de figures de résistants.

Chapitre 9 : Initiatives et résistances en Afrique méridionale

Ajouter quelque chose sur la révolte de Bambatha ; retenir le chimurenga ; parler de la

constitution des deux Rhodésie et des richesses minières ; le démantèlement de l’empire zulu ;

Républiques Boers, les origines des enclaves du Swaziland et Lesotho.

Chapitre 10 : Initiatives et résistances à Madagascar (1880-1939)

Distinguer Royaume de Madagascar des autres royaumes ; simplifier la question des

Menalamba ; avoir même chronologie que pour autres ensembles régionaux, donc deux

chapitres mais inclure au moins les autres îles membres de l’UA.

Chapitre 11 : Éthiopie et Libéria (1880-1914) : la survie de deux États africains

Libéria et empiètements des Européens ; la victoire d’Adowa et son retentissement en Afrique.

Chapitre 12 : La Première Guerre mondiale et ses conséquences

Contribution de l’Afrique à la Guerre (en homme, en ressources etc.) ; conséquences de la

guerre sur le plan économique et social ; impact socio-politique, en particulier le rôle des soldats

démobilisés. Un tableau chronologique des évènements.

Chapitre 13 : Méthodes et institutions de la domination européenne

Diversité des politiques indigènes en tenant compte des spécificités des sociétés africaines ; les

gouvernements coloniaux ; les moyens de contrôle des administrations

Chapitre 14 : L’économie coloniale

La conquête et la perte de l’autonomie dans le domaine économique ; le développement des

cultures de rentes ; la politique foncière ; l’impact de la Grande dépression sur les sociétés.

Éviter un trop grand nombre de tableaux statistiques.

Chapitre 15 : L’économie coloniale dans les anciennes colonies françaises, belges et

portugaises

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Distinguer entre colonies d’agriculture et d’extraction minière ; politique foncière, de la main-

d’œuvre, fiscale et commerciale ; les entreprises étrangères et africaines ; limiter les tableaux

statistiques pour des élèves.

Chapitre 16 : L’économie coloniale : les anciennes colonies britanniques

Comme pour le précédent chapitre

Chapitre 17 : L’économie coloniale : Afrique du Nord

Comme pour les précédents chapitres, mais parler de la diversité régionale, en fonction de la

présence de colons, de minerais, de l’impact des programmes d’irrigation.

Chapitre 18 : Les répercussions sociales de la domination coloniale : aspects démographiques

Discussion sur impacts de la traite en Afrique et aux Amériques, au Moyen Orient ; tendances de

la démographie avant et après l’abolition de la traite ; impact de la politique coloniale en

matière de santé.

Chapitre 19 : Les répercussions sociales de la domination coloniale : les nouvelles structures

sociales

Émergence de nouvelles élites économiques et intellectuelles ; conséquences de l’urbanisation

sur vie associative et sur identité ; formation des syndicats ; voir les spécificités régionales tout

en notant les grandes tendances en Afrique.

Chapitre 20 : La religion en Afrique pendant l’époque coloniale

L’univers religieux des Africains ; importance des églises dissidentes ; compléter les approches

régionales

Chapitre 21 : Les arts en Afrique à l’époque de la domination coloniale

Le texte privilégie l’Afrique de l’Ouest, sauf pour la musique shona ; penser à d’autres régions ;

développer les arts plastiques avec le support d’illustrations ; ajouter poèmes et chants

contestant le pouvoir colonial.

Chapitre 22 : La politique africaine et le nationalisme africain

Synthèse de différents faits étudiés dans les chapitres suivants

Chapitre 23 : Politique et nationalisme en Afrique du Nord-est

Garder le plan distinguant les différentes régions ; le Wafd et la révolution de 1919 ;

l’implantation de la Grande Bretagne en Égypte et au Soudan ; La ligue du drapeau du Soudan ;

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idée de l’Unité de la vallée du Nil ; renaissance du mahdisme au Soudan ; le rôle des jeunes

intellectuels.

Chapitre 24 : Politique et nationalisme au Maghreb et au Sahara

Guerre et résistance passive au Maghreb ; réformisme musulman ; action des syndicats ; l’élite

et la presse nationaliste ; impact de la Grande guerre et de la crise sur les mouvements

anticoloniaux.

Chapitre 25 : Politique et nationalisme en Afrique occidentale

Inclure les colonies portugaises ; impact de la Grande guerre et de la crise sur le développement

du nationalisme ; développement des syndicats, des partis, des associations d’étudiants et de la

presse ; les mouvements qui s’étendent à toute l’Afrique de l’Ouest.

Chapitre 26 : Politique et nationalisme en Afrique orientale

Insister sur le rôle des associations des jeunes ; parler de millénarismes mais aller vite sur les

nouvelles églises mieux représentées en Afrique du Sud

Chapitre 27 : Politique et nationalisme en Afrique centrale et méridionale

Pour l’Afrique du Sud : ANC et églises africaines ; pour Congo Belge : les grèves dans les régions

minières ; dans les colonies portugaises : la résistance au travail forcé et le rôle des

intellectuels ; simplifier les cartes.

Chapitre 28 : Éthiopie et Libéria : deux États africains indépendants à l’ère coloniale

Pour le Libéria : intervention des puissances occidentales et de la SDN, implantation de

Firestone ; pour l’Éthiopie : intervention de la SDN, modernisation et conservatisme, l’agression

italienne.

Chapitre 29 : L’Afrique et le Nouveau Monde

Mouvements de retour à l’Afrique (Marcus Garvey) ; mouvements panafricains ; les

organisations de toutes sortes qui font le lien entre l’Afrique et les Amériques ; la diaspora

africaine. Il faudrait illustrations sur les congrès panafricains et les leaders de la diaspora en

Europe et aux Amériques.

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Volume VIII

L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique depuis 1935 Directeur de volume : A.A. Mazrui, Codirecteur : C. Wondji

Chapitre 1 : Introduction

Cet ouvrage couvre la période de 1935 (invasion de l’Ethiopie par l’Italie) à nos jours ; cette

période est aussi celle de l’intégration active de toutes les régions de l’Afrique au système

monde avec ce que cela implique comme mutations, adaptations et prise de conscience.

Les nouvelles identités et aspirations ont favorisé l’émergence d’une volonté d’intégration

économique et l’expression du panafricanisme largement discuté. Une des volontés de l’écriture

dans le présent volume est la reconnaissance du poids des femmes dans l’histoire et une remise

en cause de la vision classique de l’histoire dont les objets portent sur le politique et le militaire,

les événements et des époques. C’est plutôt la perspective de l’histoire problème privilégiant

l’analyse des faits, de leurs conséquences socio-culturelles et économiques.

SECTION I : L'AFRIQUE DANS LA DÉCENNIE DE CONFLITS MONDIAUX 1935-1945

Chapitre 2 : La corne de l'Afrique et l'Afrique septentrionale

Chapitre 3 : L'Afrique tropicale et l'Afrique équatoriale sous la domination française, espagnole

et portugaise

Chapitre 4 : L'Afrique sous domination britannique et belge

L’analyse porte sur la Corne de l’Afrique, l’Afrique du Nord et les deux crises majeures que ces

régions ont connu (la Grande Dépression et la seconde Guerre mondiale) et leur corollaire, les

défis économiques et politiques. Les économies reposent essentiellement sur des industries

extractives très sensibles aux cours mondiaux des matières premières.

Au niveau social, ces régions amorcent la transition démographique et connaissent une

explosion de leur population dès 1930 ainsi que de forts courants migratoires. Au niveau

politique, ces régions sont traversées par de forts courants nationalistes avec comme

conséquences des crises avec les puissances coloniales et des revendications d’indépendance.

Les métropoles coloniales ont eu des réactions différentes du fait de leur mode de

gouvernement des territoires. Le Portugal, très ségrégationniste a renforcé les servitudes

(travail forcé, impôts…), attisé les tensions raciales durant les périodes de crises économiques

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par l’installation des portugais pauvres dans les colonies. La France a également opéré, sous

Vichy, un durcissement des conditions de vie des populations qui seront largement mobilisées

par la suite pour participer aux campagnes de libération de la métropole. Le régime tantôt

répressif, tantôt méfiant sera dirigé contre les communautés religieuses notamment les

confréries musulmanes. Les avancées syndicales entraînent des luttes sur les exploitations

économiques lesquelles sont relayées dans l’opinion par la presse. Aussi la Conférence de

Brazzaville apparaît en porte à faux avec le contexte, dans le sens que celle ci visait à préserver

lempira. La Belgique avec une politique paternaliste n’a pas eu de perspectives d’extension des

droits politiques aux Africains contrairement à la Grande Bretagne qui, après la guerre s’est

fixée pour objectif de déléguer aux africains la représentation politique, sauf dans les cas de la

Rhodésie et de l’Afrique du Sud.

SECTION II : LA LUTTE POUR LA SOUVERAINETÉ POLITIQUE, DE 1945 AUX INDEPENDANCES

Chapitre 5 : Cherchez d'abord le royaume politique...

Chapitre 6 : L'Afrique septentrionale et la corne de l'Afrique

Chapitre 7 : L'Afrique occidentale

Chapitre 8 : L'Afrique équatoriale de l'Ouest

Chapitre 9 : L’Afrique orientale

Chapitre 10 : L’Afrique australe

Cette section s’ouvre avec un chapitre consacré aux concepts politiques, philosophiques et

religieux des luttes de libération. Les organisations politiques d’entre les deux guerres étaient

composées de l’élite africaine urbanisée regroupée dans les syndicats et les associations.

L’agitation anti-coloniale s’est peu à peu étendue au milieu rural et à la diaspora très active dans

la propagation du discours panafricain.

Les chapitres 6 à 10 abordent selon une approche régionale, l’histoire des colonies, puis celle

des Etats africains de 1935 au milieu des années 80. Il y a un caractère répétitif des informations

développées à travers ces chapitres. De manière globale, on note un activisme des populations

africaines avec une amplification des grèves, de la lutte politique en Afrique du nord surtout

après la débâcle française en Indochine. En Algérie, la lutte armée est engagée à cause de

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l’intransigeance de la France, des enjeux pétroliers, géo-stratégiques et économiques

immenses. Cette guerre de libération et les conflits entre l’Egypte, la Libye et les puissances

coloniales suscitent le soutien de l’URSS, des organisations musulmanes et arabe (Frères

musulmans) et des pays non-alignés Au Soudan, c’est le conflit Nord-Sud attisé par les

Britanniques qui prend le dessus. Le voisin éthiopien, lui se libère de la domination italienne

pour passer sous administration britannique et absorber l’Erythrée. Alors que la Somalie sous

l’impulsion de l’intelligentsia tente une improbable union qui connaitra des soubresauts. De

manière générale, la situation dans les colonies britanniques d’Afrique est marquée par la

montée du nationalisme, le rôle des syndicats, le leadership affirmé de l’élite instruite et un

engagement panafricaniste très fort. Cette situation contraste avec celle des Francophones

plutôt engagés dans des stratégies fédéralistes. Les colonies belges sous la direction d’une

bourgeoisie naissante est moins encline à la contestation alors que les colonies portugaises sont

soumises, au lendemain de la guerre, à une répression malgré la mobilisation de la population.

En Afrique australe, les politiques de ségrégation en Afrique du Sud et au Rhodésie tranchent

d’avec la situation qui prévaut dans les autres colonies.

SECTION III : LE SOUS-DÉVELOPPEMENT ET LA LUTTE POUR L'INDÉPENDANCE ÉCONOMIQUE

Chapitre 11 : Les changements économiques en Afrique dans le contexte mondial (1935-

1980)

Chapitre I2 : L'agriculture et le développement rural

Chapitre 13 : Le développement industriel et la croissance urbaine

Chapitre 14 : Stratégies comparées de la décolonisation économique

L’intégration de l’Afrique dans le système capitaliste international se renforce avec les formes

nouvelles d’impérialisme, une diversification des relations multilatérales et l’attrait de nouveaux

partenariats autres que les relations avec les anciennes métropoles coloniales. L’Afrique post-

indépendance n’a pas défini une stratégie uniforme visant une décolonisation économique. Elle

est sans stratégie cohérente de développement avec des économies concentrées sur des

paramètres économiques néo-classiques.

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Les rares politiques d’industrialisation (faites de peu ou pas d’industrie produisant des produits

finis et de consommation locale) n’enrayent pas la structure extravertie de l’économie. Cette

extraversion tient surtout au fait que les entreprises agricoles et minières sont financées et

gérées par les étrangers et une main d’œuvre locale utilisée dans la production de matières

premières destinées à l’exportation et des structures commerciales désavantageuses pour le

continent. Au niveau social, c’est la montée en flèche du prolétariat que les syndicats canalisent

plus ou moins et l’afflux incontrôlé vers les villes où la pauvreté explose. Bref, « le capitalisme

est venu en Afrique sans l’éthique protestante du travail et de la frugalité ».

SECTION IV ÉVOLUTION SOCIOPOLITIQUE DEPUIS LES INDÉPENDANCES

Chapitre 15 : Construction de la nation et évolution des structures politiques

Chapitre l6 : Construction de la nation et évolution des valeurs politiques

Cette section cherche à trouver des réponses à la question fondamentale de la nation. Que

renferme t-elle ? Quelle est l’attitude des populations dans le jeu des constructions identitaires

notamment face au legs de la colonisation ? Qu’est-ce qui participe à la construction des états

modernes ? Bref, sont scrutés dans ces chapitres les marqueurs identitaires, les symboles des

états africains ainsi que leurs avatars tout comme leurs tentatives d’intégration. On arrive à

l’analyse des ingrédients du nationalisme avec leur corollaire, l’idéologie de l’état nation, la

religion, l’ethnicité, le territoire, et la race/civilisation. Cette production du politique ne fait pas

l’impasse sur les constructions idéologiques (socialisme africain, nassérisme, Ujamaa…) ou

l’adaptation de formules politiques connues et pensées ailleurs.

SECTION V CHANGEMENTS SOCIOCULTURELS DEPUIS 1935

Chapitre 17 : Religion et évolution sociale

Chapitre 18 : Langue et évolution sociale

Chapitre 19 : Le développement de la littérature moderne

Chapitre 20 : Les arts et la société depuis 1935

Chapitre 21 : Tendances de la philosophie et de la science en Afrique

Chapitre 22 : Education et changement social

Cette section qui fait la synthèse de chaque thème se veut informative. Le chapitre 20 le plus

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développé avec une approche très érudite campe assez bien la situation. Ce qui est assez bien

mis en lumière, c’est le caractère non prosélyte des religions traditionnelles africaines

contrairement aux religions monothéistes parce qu’elles sont une composante de la vie

africaine même si elles perdent du terrain au profit des religions révélées à cause de la

dimension sociale de ces dernières (surtout dans les villes). L’acculturation liée aux modes

d’éducation en vigueur axés sur le modèle Occidental accélère leur disparition. L’éducation

s’appuyant sur les trois modèles : indigène, Islamique et Afro-Chrétien est supplantée par

l’école moderne dans les années 1930 avec des enseignements en langues européennes plutôt

qu’en Arabe ou en d’autres langues africaines. Ce qui pose le problème de développement des

langues africaines, étant donné que l’élite avait un avantage à utiliser la langue du colonisateur

laquelle transcende les frontières ethniques. Malgré le danger des politiques coloniales

d’assimilation, les langues africaines doivent leur survie à la rupture en douceur d’avec le passé.

Elles enrichissent la littérature mondiale par les emprunts qu’elles autorisent et assurent

l’épanouissement de la littérature africaine. Cette dernière sait mettre en valeur les savoirs

locaux et autres expertises qui sont au fond des connaissances sociale plutôt qu’individuelles.

Elles sont sous-tendues par la philosophie en Afrique que l’on peut diviser en trois catégories :

- Culturelle, enracinée dans les traditions indigènes ;

- Idéologique, « conçue pour régir l’action politique et définir les objectifs » ;

- Critique, plus académique que politique, plus rationaliste que nationaliste.

SECTION VI LE PANAFRICANISME : LIBÉRATION ET INTÉGRATION DEPUIS 1935

Chapitre 23 : L'Afrique et la diaspora noire

Chapitre 24 : Le panafricanisme et l'intégration régionale

Chapitre 25 : Panafricanisme et libération

Cette section met l’accent sur l’activisme déployé par la première Diaspora noire pour rétablir

des liens avec le continent africain (congrès panafricain, études sur l’Afrique, festival…). Sa

démarche qui se situe largement au-delà de la quête identitaire, promeut le panafricanisme et

soutient les mouvements de libération. La perception des choses par cette première Diaspora

est différente de celle de la nouvelle Diaspora consécutive aux mouvements migratoires

récents. L’installation de cette dernière résulte de l’oppression économique et politique exercée

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dans les colonies (en particulier celles de l’Afrique du Nord et les colonies Belges) ou liée à

séjours d’études. Cette migration des professionnels hautement qualifiés, des réfugiés

économiques et politiques ne confine pas à l’Europe et à l’Amérique du Nord seulement mais

elle est surtout diffuse sur le continent. La section se termine sur les conditions ayant présidé à

la naissance de l’OUA et surtout du contenu de sa Charte et des principes qu’il défend.

SECTION VII L'AFRIQUE INDÉPENDANTE DANS LES AFFAIRES MONDIALES

Chapitre 26 : L’Afrique et les pays capitalistes

Chapitre 27 : L’Afrique et les pays socialistes

Chapitre 28 : L’Afrique et les régions en développement

Chapitre 29 : L'Afrique et l'Organisation des Nations Unies

Chapitre 30 : L'horizon 2000

Postface : Chronologie de l’actualité de l'Afrique des années 90

Cette section examine le soutien soviétique et chinois aux pays africains soutendu par des

considérations idéologiques et stratégiques. Ce soutien, côté soviétique s’est fait notamment à

travers l’Internationale communiste, le Komintern et par l’intermédiaire des étudiants africains

radicaux dans les universités occidentales. L’appui matériel et diplomatique Soviétique au

mouvement anticolonial est allé grandissant, à travers les accords de coopération post-

indépendance, surtout dans l’enseignement. La solidarité idéologique, la rivalité avec l’URSS et

les intérêts personnels ont été à la base des relations avec la Chine très engagée dans le soutien

aux mouvements de guerilla.

Le mouvement des Non- Alignés regroupant principalement les pays du ”Tiers Monde” se révéla

un espace de coopération très actif dans la décolonisation du continent et sur les questions de

racisme. Les relations entre l’Afrique et le Monde Arabe se fondent sur le fait que le continent

abrite la plus grande partie du monde arabe. Cette solidarité active s’est manifestée au cours de

l’embargo contre le Portugal, la Rhodésie et l’Afrique du Sud. Les états Latino- Américains et

Caribéens (la plupart des pays Caribéens possédant des majorités noires) cultivent les liens avec

les Etats africains à travers le Panafricanisme et la négritude mais avec souvent des positions

ambiguës dans la défense des intérêts de l’Afrique.

Les relations de partenariat avec les Nations unies sont tour à tour analysées ainsi :

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- Les Nations unies comme « impérialistes bienveillantes »

- Les Nations Unies comme « alliées de la libération »

- Les Nations Unies comme « partenaires au développement »

La gestation de l’ouvrage ayant pris énormément de retard, un chapitre de mise à jour

notamment au niveau de l’historiographie s’est imposé ; l’artifice du tableau chronologique

permet de faire le lien avec des événements contemporains à la publication.

Analyse Critique et suggestions

Ce volume, dernier de la série, souffre d’être daté au moment même de sa sortie à fortiori de

nos jours. Des problèmes d’édition ont en partie joué mais également la méthodologie utilisée

dans certains chapitres pose des problèmes. Aussi, sa révision devrait couvrir plus que les

évènements mais également les thèmes émergents et les méthodes, par exemple, les questions

de genres, c’est-à-dire, l’histoire du genre plutôt que seulement l’histoire des femmes, les

minorités.

La plupart des chapitres manquent de matériel d’illustration, particulièrement les photos et les

cartes si utiles à l’enseignement.

L’analyse critique qui a été faite de ce volume par les évaluateurs est très fournie. Des

suggestions ont été faites pour la mise à jour de nombreux chapitres.

L’adaptation pédagogique de plusieurs chapitres relève d’un vrai défi du fait de leur caractère

polémique ou tendancieux pour l’historiographie actuelle.

Des suggestions à caractère pédagogique ont été faites par les évaluateurs au niveau de chacun

des chapitres du volume.

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OBSERVATIONS du Coordinateur

La synthèse générale des rapports de relecture de l’H.G.A appelle quelques remarques relatives

à l’œuvre elle-même et à la perspective de son utilisation pédagogique. Il est important de

rappeler quelques unes des caractéristiques principales de l’Histoire Générale de l’Afrique

identifiables à travers tous les rapports. L’approche adoptée pour l’élaboration de l’Histoire

Générale de l’Afrique est d’abord régionale. Les dynamiques de formation des entités régionales

(dont la plupart recoupe les sous régions actuelles) sont mises en lumière dans la perspective

d’une Histoire continentale. L’Histoire du continent s’inscrit elle même dans l’Histoire mondiale

depuis ses origines et ensuite par le biais des Diasporas à la suite des différentes traites des

esclaves, notamment la traite atlantique.

Cette démarche globale devrait être prise en considération dans l’Utilisation Pédagogique de

l’œuvre. L’utilisation optimale de toutes les sources notamment africaines fait appel à

l’interdisciplinarité seule susceptible de permettre la restitution d’une Histoire globale et d’en

faciliter la compréhension.

Un certain nombre d’idées forces traversent l’ensemble de l’œuvre :

- La centralité de l’Afrique d’abord : en tant que berceau de l’humanité et du fait de sa situation

et de ses relations d’échanges continus avec les autres régions du monde.

- L’unité culturelle des civilisations africaines, au delà de la diversité des situations (illustrant

des développements locaux) expressions de la créativité des africains.

- La continuité de l’Histoire africaine au-delà des ruptures induites par la traite atlantique des

esclaves et la colonisation. Cette continuité est due aussi et surtout à la capacité des africains à

résister, à produire et à se régénérer même dans des situations extrêmes.

Parmi les thèmes transversaux dont le traitement permet d’étayer ces thèses, des questions

telles que celles relatives aux techniques (invention et diffusion) à la circulation des savoirs,

l’Histoire du peuplement, la formation continue des communautés ethno-culturelles, la

formation des Etats, ont été abordées pour chacune des régions. La thématique de l’Etat est si

prégnante que les espaces n’ayant pas connu d’états « centralisés» sont quelques fois oubliés,

ou moins bien couvertes.

Un des problèmes qui ressort de la lecture des rapports est celui de la chronologie, ou plus

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exactement de la périodisation de l’Histoire africaine. Il s’agit de l’un des problèmes récurrents

de la recherche historique africaine.

La question de la pertinence des repères chronologiques utilisés au regard des dynamiques

internes africaines reste posée.

Dans la perspective de l’utilisation pédagogique de l’Histoire Générale de l’Afrique, le débat

devra porter sur les périodes ou les séquences historiques à retenir et le type de chronologie qui

serait enseigné. Une autre question que l’on croyait résolue, celle relative à la « race »,

mériterait de l’avis de certains évaluateurs, une mise au point quant au concept lui-même et ses

relations avec les cultures et les langues.

Il y’a enfin la question de la réception de l’œuvre par les jeunes à qui sont destinés les contenus

d’enseignement. Il ne serait pas inutile pour répondre à cette question de partir de la préface de

A.M. MBow qui fixait les objectifs de l’Histoire Générale de l’Afrique. On pourrait alors

s’interroger sur l’adéquation de ces objectifs avec les besoins de formation des jeunes

d’aujourd’hui en tenant compte de l’état du monde et des grandes tendances qu’on peut y

observer.