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Article original Script, forme de vie et jeu de langage dans une consultation de voyance Script, form of life and language game in a clairvoyance consultation M.-F. Agnoletti Groupe derecherche sur les communications, université Nancy-II, 23, boulevard Albert-1 er , 54000 Nancy, France Reçu le 25 août 2004 ; accepté le 24 janvier 2006 Résumé Lobjectif de cet article est darticuler les notions de forme de vie, jeu de langage et script et dillustrer cet essai avec létude de différents jeux de langage se produisant dans une consultation de voyance. Aussi, après avoir présenté les liens entre ces différentes notions, on procède à lanalyse de contenu de fragments extraits dune consultation. Pour cela, on précise les modalités dextraction de ces derniers, on identifie trois actes de voyance principaux : linstigation, la prédiction et la divination et on procède à leur analyse tant du point de vue du contenu des échanges que des relations quils entretiennent. Une analyse quantitative des données montre que ces actes apparaissent dans des structures composées dun nombre déchanges variable. Les résultats sont discutés au regard de larticulation script et jeu de langage. © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract The aim of this article is to try to articulate the concepts of form of life, language playing and script through the study of various kind of language game occurring in a clairvoyance consultation. After having presented and discussed the concepts of form of life, language game and script, we proceed to the content analysis of structures extracted from a transaction. We then study three kinds of language playing: council, prediction and the act which consists in guessing the past according to their content and their relations. A quantitative data processing shows that these acts appear in structures comprising a more or less great number of verbal exchanges. The results are discussed according to the possible articulation between the concept of script and language game. © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Jeu de langage ; Script ; Transaction ; Structure ; Acte de voyance Keywords: Language game; Script; Form of life; Transaction; Structure 1. Introduction Le concept de script étudié par Schank et Abelson (1977) et théorisé par Abelson (1981), renvoie à une structure de connaissance qui permet, à des membres dune culture donnée, daborder des situations connues. Elle se présente comme une séquence dactions prédéterminées et stéréotypées qui définit une situation familière et permet à des sujets de jouer les rôles pour lesquels ils sont programmés. Grâce à de telles structures, les sujets peuvent se représenter des situations comme aller au restaurant, aller chez le médecin, aller à une soirée, à une cérémonie de remise de médaille et savoir com- ment se comporter. Or, ces scripts de situation ne sont abordés, par les auteurs quau regard des actions qui sy déroulent. À aucun moment ce qui est dit par les sujets ou bien les échanges verbaux potentiels qui font partie intégrante de ces situations ne sont pris en compte. Tout se passe comme si ce type de script de situation était une histoire sans paroles. Cest précisé- ment ce constat qui a conduit Agnoletti et Defferrard (1989, 1991), Agnoletti (1999, 2003) à redéfinir le concept de script en réintroduisant les échanges langagiers et leurs modalités afin de lui redonner une forme et un contenu proches de celui quil possède au cinéma à savoir : une séquence daction et de dia- http://france.elsevier.com/direct/ERAP/ Revue européenne de psychologie appliquée 56 (2006) 199208 Adresse e-mail : [email protected] (M.-F. Agnoletti). 1162-9088/$ - see front matter © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.erap.2006.01.001

Script, forme de vie et jeu de langage dans une consultation de voyance

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Revue européenne de psychologie appliquée 56 (2006) 199–208

Article original

Script, forme de vie et jeu de langage dans une consultation de voyance

Script, form of life and language game in a clairvoyance consultation

M.-F. Agnoletti

Groupe derecherche sur les communications, université Nancy-II, 23, boulevard Albert-1er, 54000 Nancy, France

Reçu le 25 août 2004 ; accepté le 24 janvier 2006

Résumé

L’objectif de cet article est d’articuler les notions de forme de vie, jeu de langage et script et d’illustrer cet essai avec l’étude de différents jeuxde langage se produisant dans une consultation de voyance. Aussi, après avoir présenté les liens entre ces différentes notions, on procède àl’analyse de contenu de fragments extraits d’une consultation. Pour cela, on précise les modalités d’extraction de ces derniers, on identifietrois actes de voyance principaux : l’instigation, la prédiction et la divination et on procède à leur analyse tant du point de vue du contenu deséchanges que des relations qu’ils entretiennent. Une analyse quantitative des données montre que ces actes apparaissent dans des structurescomposées d’un nombre d’échanges variable. Les résultats sont discutés au regard de l’articulation script et jeu de langage.© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Abstract

The aim of this article is to try to articulate the concepts of form of life, language playing and script through the study of various kind oflanguage game occurring in a clairvoyance consultation. After having presented and discussed the concepts of form of life, language game andscript, we proceed to the content analysis of structures extracted from a transaction. We then study three kinds of language playing: council,prediction and the act which consists in guessing the past according to their content and their relations. A quantitative data processing shows thatthese acts appear in structures comprising a more or less great number of verbal exchanges. The results are discussed according to the possiblearticulation between the concept of script and language game.© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Jeu de langage ; Script ; Transaction ; Structure ; Acte de voyance

Keywords: Language game; Script; Form of life; Transaction; Structure

1. Introduction

Le concept de script étudié par Schank et Abelson (1977) etthéorisé par Abelson (1981), renvoie à une structure deconnaissance qui permet, à des membres d’une culture donnée,d’aborder des situations connues. Elle se présente comme uneséquence d’actions prédéterminées et stéréotypées qui définitune situation familière et permet à des sujets de jouer lesrôles pour lesquels ils sont programmés. Grâce à de tellesstructures, les sujets peuvent se représenter des situations

Adresse e-mail : [email protected] (M.-F. Agnoletti).

1162-9088/$ - see front matter © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservésdoi:10.1016/j.erap.2006.01.001

comme aller au restaurant, aller chez le médecin, aller à unesoirée, à une cérémonie de remise de médaille et savoir com-ment se comporter. Or, ces scripts de situation ne sont abordés,par les auteurs qu’au regard des actions qui s’y déroulent. Àaucun moment ce qui est dit par les sujets ou bien les échangesverbaux potentiels qui font partie intégrante de ces situationsne sont pris en compte. Tout se passe comme si ce type descript de situation était une histoire sans paroles. C’est précisé-ment ce constat qui a conduit Agnoletti et Defferrard (1989,1991), Agnoletti (1999, 2003) à redéfinir le concept de scripten réintroduisant les échanges langagiers et leurs modalités afinde lui redonner une forme et un contenu proches de celui qu’ilpossède au cinéma à savoir : une séquence d’action et de dia-

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1 Pour illustrer ce point de vue, il est possible de se référer aux incompré-hensions voire aux « gaffes » qui résultent de la méconnaissance des pratiquesrelatives à une culture donnée. Picard (1995) en donne quelques illustrations.

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logues. Pour spécifier cette orientation, ils ont introduit lanotion de script interlocutoire, qu’ils définissent comme « laréalisation langagière du traitement cognitif d’une situation,dès lors qu’elle obéit à une séquence typique d’interaction »(Agnoletti, 1999). Il ne s’agit donc plus d’aborder le scriptcomme une simple représentation cognitive de comportementsrelatifs à une situation sociale donnée mais de traiterl’ensemble de celle-ci en incluant les échanges langagiers quis’y produisent et les dynamiques psycholangagières et attitudi-nelles qu’ils révèlent. Dans cette perspective plusieurs épisodeset modèles d’interaction ont pu être décrits : la gestion d’unesituation de première rencontre potentiellement conflictuelle etd’une première rencontre galante (Agnoletti et Defferrard2002, 2004). Dans le présent article, nous voudrions approfon-dir la théorie du script interlocutoire en la confrontant à laconception de Wittgenstein qui traite des notions de contexte,de forme de vie et de jeu de langage. Nous proposons d’abordde rendre compte des liens conceptuels entre les deux appro-ches que nous concrétiserons dans un second temps par l’étudede fragments d’entretien issus d’une consultation de voyance.

1.1. Script, forme de vie et jeu de langage

Wittgenstein propose une théorie flexible et contextuelle dulangage. Dans les recherches philosophiques (1998) il insistesur les notions de « règle », de « grammaire » et de « contexte »en introduisant de nouvelles notions comme « jeu de langage »et « forme de vie ». Examinons chacune d’elles.

Pour ce philosophe, les expressions « jeu de langage » et« forme de vie » renvoient à l’usage du langage, à son insertiondans les contextes de la pratique linguistique. En effet, chaquejeu de langage se manifeste dans une « forme de vie ». Glock(2003) précise ainsi ce point de vue : « nos jeux de langagesont enchâssés dans notre forme de vie, l’ensemble des prati-ques d’une communauté linguistique ». Wittgenstein (1996)considère qu’une forme de vie est une culture ou une formationsociale c’est-à-dire, la totalité des activités d’une communautédans laquelle s’insèrent des jeux de langage. Ainsi, les usagesdu langage ne peuvent être étudiés que dans le cadre d’uneforme de vie qui renvoie à des activités communes, à des pra-tiques sociales et/ou culturelles au sein desquelles prennentplace des jeux de langage. Ce point de vue nous permetd’établir un lien entre script et forme de vie. Nous l’aborderonsà partir de deux dimensions, l’une culturelle, l’autre relative audéroulement des actions dans une forme de vie.

En tant que « culture » ou « formation sociale », la forme devie se rapporte aussi à ce qui se fait au sein d’une communauté.Elle peut être considérée comme un ensemble d’activités nonlinguistiques ou comme des manières de faire. Garver (1990),par exemple, avance que les cérémonies sont des formes devie. Ainsi, ces dernières pourraient renvoyer à des pratiquespropres à une culture donnée. Or, l’idée de surdéterminationdes pratiques par la culture apparaît aussi dans la conceptiondu script développée par Schank et Abelson (1977). Cettestructure de connaissance est, en effet, pertinente pour dessituations connues des membres d’un groupe social. Ainsi,

des situations comme « aller au restaurant », « avoir une visitechez le médecin », « aller à une réception » mobilisent descomportements voire des rituels partagés dans une culture1.En ce sens, les scripts de situation peuvent s’apparenter à uneforme de vie.

Par ailleurs, Glock (2003), précise qu’une forme de viecomporte des manières spécifiques d’agir et que ces dernières,prises ensemble, constituent une forme de vie. L’idée de spé-cificité des pratiques peut être mise en rapport avec les séquen-ces d’actions organisées caractérisant le script de situation.Dans le script du restaurant par exemple, les sujets ne produi-sent pas leur comportement au hasard mais agencent chacunede leur action dans les scènes qui composent le script afin deproduire un comportement qui est en harmonie avec celui desautres sujets. Le fait d’agir ainsi signifie que l’on a affaire à desactes ordonnés, organisés suivant une logique temporelle et quiparticipent à la constitution d’un tout. L’ordonnancement desactions apparaît donc comme une caractéristique commune auscript et à la forme de vie.

L’expression « jeu de langage », quant à elle, apparaîtcomme une extension de la notion de jeu (plus particulièrementdu jeu d’échec) à celle de langage. Wittgenstein (1979) consi-dère que le langage est une activité guidée par des règles. Ilprécise cette analogie en évoquant trois points :

● « comme un jeu, le langage a des règles constitutivescomme celles de la grammaire. (…) ces règles déterminentce qui est correct ou a un sens, et ce faisant elles définissentle jeu (…) » (1979, 43) ;

● « la signification d’un mot n’est pas l’objet qu’il représente,elle est déterminée par les règles qui gouvernent son utilisa-tion (id. 44) » ;

● « une proposition est un coup, ou une opération, dans le jeude langage. Elle n’aurait aucun sens en dehors du systèmedont elle fait partie » (1996, 42).

Le jeu de langage n’est donc pas un jeu avec les mots oubien un jeu sur les mots mais une manière de mettre en œuvrele langage dans un contexte donné. C’est ainsi qu’apparaît lathèse essentielle de Wittgenstein (1998) qui avance : « J’appel-lerai "jeu de langage" le tout formé par le langage et les acti-vités dans lesquelles il est entrelacé ». Nous pouvons dès àprésent établir un lien entre le langage et son inscription dansdes activités (sociales ?). Les jeux de langage seraient donc unefaçon d’utiliser des signes, de les employer, suivant certainesrègles et dans diverses activités. Parmi ces dernières, nous cite-rons : donner un ordre et y obéir, faire des devinettes, discuterd’un événement, inventer une histoire et la lire, jouer une scèneoù l’on peut repérer, un entrecroisement entre l’activité encours et le langage.

En outre, pour Wittgenstein, le jeu de langage est une acti-vité guidée par des règles qui déterminent la correction et la

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signification de ce qui est dit. Raïd (2001) précise que le jeu delangage fonctionne dans des circonstances ordinaires et qu’ilest « défini non seulement par des phrases mais égalementpar toute la scène où elles sont dites ». On peut comprendremaintenant l’intérêt de la conception de Wittgenstein pourl’étude du script interlocutoire. En effet, dès lors qu’on recon-naît l’insuffisance de la théorie de Schank et Abelson (1977),qu’on réintègre la dynamique langagière dans des situationssociales particulières, on a affaire à des événements microso-ciaux singuliers assimilables à des formes de vie. Ainsi, unscript de situation comme le script du restaurant ne sera pasétudié uniquement du point de vue des scènes qui le composentet des actions constitutives de ces scènes mais pourra êtreabordé au regard des échanges verbaux qui accompagnent lesactions. Dans cette perspective on peut identifier l’entrelace-ment entre le langage et l’activité, c’est-à-dire, les jeux de lan-gage qui participent d’une forme de vie sociale, ici, le restau-rant. En d’autres termes, on s’intéresse à l’ensemble desinteractions pertinentes au restaurant soit, celles qui sont cultu-rellement acceptables c’est-à-dire, l’ensemble des interactionsprobables. Ainsi, la scène de l’entrée au restaurant pourraitcomporter les jeux de langage associant la salutation, lademande formulée par le serveur pour savoir combien de per-sonnes vont manger, ainsi que les échanges concernant lechoix de telle ou telle table… C’est donc dans une gestaltd’ensemble qu’apparaissent les jeux de langage.

Pour rendre compte de l’articulation entre les différentesnotions que nous venons d’évoquer, nous proposons de lesappliquer ainsi que les théories qui les sous-tendent à uneforme de vie particulière : la consultation de voyance.

1.2. La consultation de voyance comme forme de vie

Pour préciser l’ancrage empirique que nous allons donneraux notions que nous avons articulées, nous proposons de lestransposer à la situation sociale que nous allons étudier.

1.2.1. Consultation et forme de vieComme nous l’avons avancé dans les précédents développe-

ments, la forme de vie caractérise une pratique propre auxmembres d’une culture donnée. Aller au restaurant, rendrecompte d’un processus, construire un objet d’après sa descrip-tion, sont autant de pratiques ou de formes de vie spécifiques.Il existe une diversité de formes de vie dont la caractéristiqueessentielle réside dans la spécificité des interactions qui s’ydéveloppent. Nous proposons alors d’intégrer, dans l’ensembledes formes de vie possibles, une catégorie appelée « transac-tion ». Selon Trognon (1999), il s’agit d’« une structure inter-locutoire reconnaissable dont l’organisation, socialementaccomplie, est régie par un ensemble de conventions. L’orga-nisation des transactions est faite ad hoc : nul patient ne remeten cause le déroulement d’une visite médicale et son organisa-tion interne (diagnostic, décision, prescription, recommanda-tion) ». Qu’il s’agisse d’une consultation en psychothérapie,d’un entretien conseil, d’un recueil d’information, nous avonsaffaire à des situations d’interaction ponctuelles, à des prati-

ques sociales propres aux membres d’une culture donnée quel’on peut regrouper d’ailleurs, dans une catégorie unique dansla mesure où ces pratiques possèdent un « air de famille ». Enoutre, ces différentes transactions comportent une successiond’actions, se déroulent suivant une dimension temporelle sin-gulière et sont organisées de manière originale. Ainsi conçues,elles s’apparentent à des formes de vie.

Au vu de l’analogie potentielle entre transaction et forme devie nous considérons qu’une consultation de voyance s’inscritdans cette dernière catégorie dans la mesure où elle renvoie àune situation d’interaction dans laquelle il existe des attentes etdes rôles ainsi qu’une « organisation interne ». Il convientmaintenant de s’intéresser à cette dernière soit, plus précisé-ment aux différents jeux de langage qui la composent.

1.2.2. Script, interlocution et jeu de langageEn tant que forme de vie, la transaction s’inscrit dans la

catégorie « des situations d’interactions conventionnellementsurdéterminées qui s’organisent en fonction des attentes etdes rôles qu’elles portent » (Trognon, 1999, 78). Dans cecadre, on peut supposer que les sujets utilisent le langage etles règles qui le gouvernent de façon singulière, pour produiredu sens. Ainsi, dans la forme de vie que constitue la consulta-tion de voyance et compte tenu des rôles et des attentes respec-tifs des sujets coprésents, nous pouvons trouver des formesd’interaction correspondant à des activités mises en parole quiconcernent ce qui peut être dit et/ou fait dans le cadre de cettetransaction. On peut, en effet, comme dans toute autre transac-tion, trouver des échanges qui se présentent sous forme dequestion/réponse, ou bien assertion/assertion successives quidébouchent sur un diagnostic. Une consultation de voyancecomporte donc des séquences typiques d’interaction. Ce sontces dernières que nous considèrerons que nous avons affaireà des activités correspondant à des jeux de langage.

Nous faisons l’hypothèse selon laquelle la consultation devoyance est une forme de vie dans laquelle prennent placedes jeux de langage singuliers. Ces derniers sont coconstruits,ils donnent existence à des structures typiques illustrant unentrecroisement entre activité et discours. Nous avançons queces jeux de langage organisés suivant un certain ordre, orientésvers un but et répétés au cours de la transaction sont des struc-tures langagières « scriptées ». En outre, ces dernières se com-posent d’un nombre variable d’échanges.

2. Méthode

Nous présenterons ici la méthode d’analyse que nous avonsutilisée pour rendre compte des jeux de langage présents dansune consultation par téléphone. Nous nous emploierons àcaractériser la transaction que nous allons étudier, à préciserles modalités qui nous ont conduits à choisir les fragmentsque nous allons soumettre à l’analyse et le déroulement denos analyses.

La consultation de voyance que nous allons étudier corres-pond à un type particulier de transaction. Cette situation estdéterminée par une organisation singulière et des conventions.

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Elle se présente comme une situation d’interaction entre deuxpersonnes : une voyante et une cliente et l’initiative de cettesituation revient à cette dernière. Dans cette transaction, la rela-tion interpersonnelle est dissymétrique puisqu’elle concerne unsujet « spécialiste » d’un domaine et un autre sujet n’ayant pasde connaissances. Elle met en présence une personne qui faitune consultation de voyance par téléphone que nous appelonsV. et une personne qui a formulé la demande de consultation,que nous appelons C.

C. a été orientée vers la voyante par une amie J. qui seracitée dans l’un des fragments que nous allons étudier. C’estavec cette amie que C. a évoqué certaines difficultés personnel-les d’ordre sentimental et c’est à la suite de cela que J. lui aconseillé de s’adresser à V.

V. et C. ne se connaissent pas et ne se sont jamais rencontré.On sait simplement que C. a déjà pris contact avec V. à qui ellea fait parvenir quelques photos de ses enfants. L’échange télé-phonique dont nous avons extrait quelques fragments fait suite àce premier contact et constitue ce que nous appelons la transac-tion proprement dite. Cette dernière dure 45 minutes environ.

Du point de vue de l’économie d’ensemble, les interven-tions sont également réparties entre la cliente et la voyante.L’alternance des tours de parole est respectée. Il existe toute-fois une différence qualitative entre les interventions des deuxlocutrices. Dans bon nombre de cas, la cliente se contented’acquiescer à ce que dit la voyante. Elle intervient brièvementen répétant « oui », « hum » ou bien « je ne sais pas ».Lorsqu’elle ne donne pas de réponse favorable aux dires deV. ses interventions sont plus riches car elle est amenée àapporter de nouvelles informations, des précisions ou bienelle rectifie les propos de V.

La transaction se caractérise également par une pauvretésyntaxique et sémantique. Parfois, des phrases commencéesrestent inachevées et des énoncés sont répétés dans une mêmeintervention. Certaines parties d’interventions sont incompré-hensibles tant le langage utilisé est familier comme entémoigne la présence d’expressions comme « il dérange »,« il se dérange », « il fréquente » et de locutions telles que« ousta ! », « à cause que », « comment ».

On constate également, à la lecture de la transaction, la pré-sence de formulations destinées à justifier, voire légitimer, lapratique de V. : « je vois », « je vois tout », « je dis tout », « jene cache rien »… et des interventions de C. qui légitiment lapertinence de sa demande auprès de V. : « mais là… le… est-ce que ? … Comment se fait-il que ? … » Dans cette forme devie nous avons extrait différents fragments que nous proposonsd’analyser.

La consultation de voyance est caractérisée par une absenced’unité thématique. En effet, il n’y a pas un seul sujet mis endiscussion. Tout au long de la transaction les deux interlocutri-ces abordent des thèmes comme : les enfants, la santé, les hom-mes, les maîtresses, la souffrance, le travail, l’avenir, qui ren-voient aux préoccupations de C. Le passage d’un thème à unautre n’obéit pas à aucune règle précise et se fait, la plupart dutemps, sans lien apparent avec ce qui précède. Ces différentsconstats nous ont conduit à considérer la discontinuité théma-

tique comme un critère objectif de délimitation de fragmentsau sein de la forme de vie. Ainsi, chaque thème abordé constitueune unité qui possède une certaine autonomie par rapport à cequi a été dit précédemment ou bien au regard de ce qui suit. Larupture thématique apparaît alors comme un critère pour délimi-ter des fragments que nous allons soumettre à l’analyse.

Cette première identification des fragments se précise toute-fois lorsqu’on examine le contenu de chaque unité thématique.En effet, à l’examen des différentes ruptures thématiques onconstate que chaque nouveau thème est introduit par la voyanteet donne lieu à une succession d’échanges formellement cons-truits et reliés entre eux. La présence répétée de ce type d’orga-nisation au sein des unités thématiques nécessite que nouscaractérisions plus finement le contenu des fragments. Aussi,en référence à Wittgenstein pour qui le jeu de langage est unentrelacement entre le langage et une activité, nous considéronsles activités qui se produisent au sein de fragments que nousavons sélectionnés pour notre analyse, comme des jeux de lan-gage. Nous définirons alors ces derniers, de manière empiriquecomme une organisation singulière d’échanges liés par desfonctions initiative et/ou réactive qui rend compte d’une acti-vité.

2.1. Mesures

Nous avons, ainsi, identifié trois catégories d’activités illus-trant des jeux de langage dans la forme de vie consultation devoyance.

Le premier groupe de jeu de langage est « l’instigation »correspond à l’action d’inciter (ou conseiller fortement) àquelqu’un de faire quelque chose. Sur le plan langagier il estcomposé d’énoncés comportant, en général des verbes àl’impératif, des formules comme « à votre place » qui indi-quent une conduite recommandée. Les interventions suivantes :« alors… prenez des précautions… », « comment … moi… jeserai que vous…je… », « et pi… soyez prudente…» sontcaractéristiques de ce type de jeu de langage.

La deuxième catégorie de jeu de langage est « la prédic-tion ». Elle renvoie à toutes les activités qui consistent à pré-dire ce qui va arriver, à annoncer qu’un événement va se pro-duire. Dans ce cas, les énoncés sont au futur, la voyante énonceune action qui va ou qui doit se produire. Ce sont des énoncéscomme : « … vous sortirez avec hein et pi vous laisserezl’autre… » ou bien « oui ben vous savez il va venir vousvoir… » qui illustrent ce jeu de langage.

Le troisième groupe de jeu de langage est la « divination ».Il s’agit ici de deviner des événements cachés. Il se composed’indices comme le temps des verbes : le passé composé estgénéralement utilisé, la présence de formules comme « jevois » qui précèdent l’élément deviné : « je vois comment…vous avez eu un bon travail vous… », « je vois qu’il y a eucomment… des… des querelles… et des colères… », ainsi quedes interventions formulées sur le mode interrogatif. Ces troisactivités sont produites suivant une organisation singulière desinterventions et de leurs rapports que nous quantifierons de lafaçon suivante.

Tableau 1Distribution des jeux de langage dans la consultation

Nature du jeu Instigation Prédiction Divination TotalFréquence 17 30 23 70

Tableau 2Nature du jeu de langage et nombre d’échanges

Nature du jeu de langage

Nombre d’échangesInstigation Prédiction Divination Total

2 échanges 9 14 4 273 échanges 6 9 8 234 échanges 1 3 9 13> 4 échanges 1 4 2 7

17 30 23 70

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La forme de vie « consultation de voyance » d’où nousavons extrait les fragments analysés, se compose de 378 échan-ges en deux tours de parole. Dans l’ensemble de ces échangesnous avons identifié 70 jeux de langage qui concernent,conformément aux critères langagiers que nous avons donnés,une instigation, une prédiction ou bien une divination. Larépartition de ces 70 structures est présentée dans le tableau 1.

Ces différents jeux de langage ne comportent pas le mêmenombre d’échanges et ne sont pas tous organisées de la mêmemanière. Aussi, pour mieux les caractériser, nous nous sommesintéressés à la liaison potentielle entre leur nature et le nombred’échanges qui le composent. Les résultats obtenus figurentdans le tableau 2.

Le χ2 (3, 70 = 12,78, p < 0,025) qui teste la liaison entre lanature du jeu de langage et le nombre d’échanges est significa-tif. Il apparaît en particulier que l’instigation et la prédictionsont surreprésentées dans des structures comportant deuxéchanges2. L’instigation et divination sont quant à elles, surre-présentés dans des structures comportant trois échanges. Ladivination apparaît de façon surreprésentée dans des structuresà quatre échanges et la prédiction dans des structures compo-sées plus de quatre échanges.

Globalement, on note que la prédiction a plus de chances dese dérouler en deux ou bien en plus de quatre échanges, l’insti-gation s’organise autour de deux ou trois échanges et la divi-nation apparaît préférentiellement dans des structures compor-tant trois ou quatre échanges. Les jeux de langage que nousavons choisi d’étudier dans le présent article apparaissentdonc comme des structures proches du prototype du jeu delangage en cours dans cette consultation. Il convient doncd’en faire l’analyse qualitative.

2.2. Procédure

Les différentes activités que nous venons de présenter,apparaissent, dans le cours de la transaction suivant un contenusingulier et organisation originale des tours de parole. C’est enétudiant ces dernières que nous rendrons compte de la compo-sition des jeux de langage.

2 Nous parlons de sur- et sous-représentation, pour indiquer la différenceentre les effectifs théoriques calculés avec le test du χ2 et les effectifs obser-vés. Seuls ces derniers figurent dans le tableau 2.

Pour cela, nous avons pris pour référence, le modèled’analyse en rangs développé par Roulet et al. (1985) ainsique le principe de traitement linéaire de l’information conver-sationnelle par Moeschler (1985). Ces deux approches nousparaissent en effet les plus adaptées pour caractériser à la foisles composants des jeux de langage et les relations entre lesénoncés qui le composent. Nous avons cependant adapté etaménagé les propositions de ces auteurs aux différents frag-ments que nous avons extraits de la forme de vie. Ainsi, nousn’avons pas pris en considération la dimension relative aucontenu thématique puisque nous avons utilisé cette dernièrepour délimiter les fragments soumis à l’analyse.

Nous avons alors retenu pour notre étude des jeux de lan-gage trois dimensions : le contenu propositionnel, des fonc-tions illocutoires et l’orientation argumentative. Précisons cha-cune d’elles.

La première concerne le contenu propositionnel. Le modèlede Roulet (1985) nous permet d’identifier les différents compo-sants d’un discours. Il nous autorise en outre à faire une diffé-rence entre l’intervention et l’échange. Sans entrer dans une ana-lyse plus fine des constituants de l’intervention qui dépasseraitnotre propos et compte tenu des caractéristiques générales de laforme de vie présentée plus haut, nous aborderons le contenupropositionnel d’un échange en caractérisant les interventionsqui le composent et en précisant la nature des activités verbalesqui s’y produisent. En référence à Moeschler (1985) nous utili-serons une catégorisation des actes illocutoires comme assertion,question, offre, demande d’information, confirmation… pourspécifier le contenu des interventions.

La deuxième dimension concerne les fonctions illocutoires.Le modèle proposé par Roulet met en avant que les différentesinterventions constitutives d’échanges sont liées entre elles pardeux types de fonctions. Ces dernières seront considéréescomme initiatives dans la mesure où elles permettent de pour-suivre l’échange soit, en d’autres termes, lorsqu’elles satisfontdes contraintes d’enchaînement. Ce sont précisément ces derniè-res qui contribuent à rendre un échange « complet », c’est-à-diresatisfaisant à une « complétude interactionnelle » Roulet (1985)ou bien selon Trognon (1999) indiquant que « l’illocution quil’a initiée est satisfaite ». Ainsi, une intervention qui ouvre unéchange est appelée initiative. Si elle reçoit une réponse satisfai-sante, nous sommes en présence d’une intervention réactivepositive et dans le cas contraire, nous avons affaire à une inter-vention réactive négative. Pour rendre compte de l’organisationinterne d’un jeu de langage, nous caractériserons à la fois lecontenu des interventions constitutives des échanges et les rela-tions qu’elles entretiennent. Pour cela, nous utiliserons la typo-logie proposée par Moeschler (1985) et présentée ci-dessous :

Initiatives

Réactives positives Réactives négatives

Assertion

Évaluation positive Évaluation négative Demande d'information Réponse positive Réponse négative Demande deconfirmation

Confirmation

Infirmation

Offre–requête

Acceptation Refus

Tableau 3

Échanges V164/C164 V165/C165 V166/C166Contenupropositionnel

Demanded'information/réponsepositive

Assertion/évaluationpositive

Assertion/réponse positive

Fonction illocutoire Initiative Initiative InitiativeOrientationargumentative

Co-orientation Co-orientation Co-orientation

Tableau 4

Échanges V244/C244 V245/C245 V246/C246Contenupropositionnel

Assertion/évaluationpositive

Demande deconfirmation/confirmation

Assertion/évaluationpositive

Fonctionillocutoire

Initiative Initiative Initiative

Orientationargumentative

Co-orientation Co-orientation Co-orientation

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Précisons cependant que dans les interventions réactivespositives, nous distinguerons celles qui correspondent à destours pleins et celles qui concernent des tours régulateurs (Tra-verso, 1999). Parmi ces dernières, on trouve des interventionsdans lesquelles il y a de simples émissions vocales comme« oui », « hum » ou « je ne sais pas ».

La troisième dimension abordée dans l’analyse est l’orienta-tion argumentative. Cette dernière renvoie selon Auchlin etMoeschler (1985, 209) à « l’obligation de répondre dans lesens attendu » soit « de confirmer le contenu de la questionou son orientation argumentative. » Ainsi, on identifiera deuxpossibilités : une intervention co-orientée ou bien une interven-tion contre orientée.

Pour étudier les jeux de langage que nous avons présentésdans le précédent paragraphe, nous utiliserons la typologie pré-sentée ci-dessus mais, nous l’appliquerons aux échanges et nonpas aux seules interventions constitutives des échanges.

3. Résultats

Nous présenterons, dans le cadre de cette analyse, deux jeuxde langage pour chacune des catégories définies ci-dessus.

3.1. Le jeu de langage « instigation »

Le premier fragment se compose de trois échanges succes-sifs où V. passe d’un registre à un autre. Elle vient, en effet defaire une tirade au sujet des compétences requises pour êtrevoyante où elle a exposé la difficulté qu’elle rencontre dansl’exercice de son activité avec une cliente qui ne lui a donnéaucune indication. Elle utilise cette situation pour faire le point,avec V., au sujet de la pertinence de ses conseils.

3.1.1. Exemple no 1V164 : voilà parce que… comment… qu’est-ce qu’elle vous

a dit de moi J. elle était contente de moi ?C164 : ah ! oui oui oui…V165 : oui … alors vous avez pas à vous inquiéter…

n’importe comment… vous avez qu’à attendre un peu…C165 : hum…V166 : et pis soyez prudente…C166 : oh ben oui…Dans ce jeu de langage, nous sommes en présence de trois

échanges co-orientés du point de vue argumentatif. Dans lepremier, V164/C164 nous avons affaire à un couple question/réponse complet. V. interroge sa cliente au sujet de l’évaluationqui a été faite par une tierce personne. La réponse de cettedernière apparaît comme satisfaisante pour V. Nous sommesainsi en présence d’un échange complet qui possède une fonc-tion initiative. Cette dernière permet d’enchaîner avec undeuxième échange (V165/C165) dans lequel V. produit un« hum » régulateur qui semble indiquer l’accord. Nous avonsalors affaire à un échange complet qui débouche sur le troi-sième (V166/C166) dans lequel V. incite C. à « ne pass’inquiéter », « attendre » instigations qui reçoivent, à leurtour, une évaluation favorable.

Le tableau 3 synthétise ce jeu de langage.Il semble donc que l’instigation se produise après une

recherche de consentement. Elle émerge après deux réponses(évaluations) positives.

Le deuxième fragment qui appartient à cette catégorie de jeude langage se compose de trois échanges. Il se situe aprèsdiverses interventions visant à différencier l’activité devoyance en général et d’autres pratiques (lecture des lignes dela main en particulier…). Après cela, V. enchaîne sur le thèmeprécédent cette dérive, qui concerne le mari de C.

3.1.2. Exemple no 2V244 : (…) c’est un homme qui… comment qui est … qui

est violent et tout… comme il a bu… c’est un homme qui…comment… il se connaît plus…

C244 : hum…V245 : c’est ça ?C245 : oui… oui…V246 : oui… pour l’instant vous savez ce que vous faîtes…

vous le laissez… vous le laissez petit à petit…C246 : oui.Dans ce fragment, nous avons affaire à trois échanges.

Après avoir parlé de sa pratique V. revient à la question initialeposée et propose une analyse du comportement de l’hommedont il est question (V244). La réponse de C., comporte un« hum » régulateur qui ne suffit pas semble-t-il à V. pourconsidérer que l’échange est complet. C’est ainsi qu’elleengage un deuxième échange V245 où elle demande explicite-ment à C. d’évaluer son analyse. L’échange (V245/C245) illus-tre une illocution réussie et donne lieu à un échange completqui possède une fonction initiative. En effet, partant de cetaccord sur le second échange, V. enchaîne sur une instigation,tout comme elle a procédé dans le jeu de langage que nousavons précédemment étudié.

Le tableau 4 illustre la dynamique de ce jeu de langage.Comme nous l’avons vu dans le premier fragment, tout se

passe comme si V. avait besoin de l’accord explicite de C. pourinciter C. à se comporter comme elle le lui ordonne.

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3.2. La prédiction comme jeu de langage

Pour illustrer le jeu de langage du type prédiction, nousavons extrait de la transaction deux fragments, l’un comportantquatre échanges l’autre cinq. Le premier fragment que nousallons analyser se situe après un passage relatif à une anecdoteliée à une autre cliente dont elle rapporte les déboires. Lavoyante semble faire une liaison entre cette anecdote et lespréoccupations de la cliente avec qui elle échange.

3.2.1. Exemple no 1V55 : … hein mais l’homme là la vierge vous avez com-

ment… vous avez rien eu mais vous avez parlé avec ?C55 : oui …V56 : oui n’importe comment il vous… il pense à vous et

vous… vous sortirez avec hein…C56 : hum…V57 : et pi vous laisserez l’autre…C57 : ah ! si seulement…V58 : ah ben… il n’y a pas de si seulement… je vous dis…C58 : oui.En V55/C55, nous avons affaire à un premier échange du

type question/réponse où C. répond favorablement à lademande d’information formulée par V. Ce premier échangeest complet et possède une fonction initiative qui permet à V.d’enchaîner. En V56/C56 V. fait une première prédiction« vous sortirez avec hein… ». Cette intervention reçoit, enréponse un « hum » régulateur qui permet à V. d’enchaîner.On peut alors considérer que cet échange est complet et pos-sède une fonction initiative. Cela se justifie lorsqu’on examinel’échange suivant dans lequel V. avance une autre prédictionen V57. Cette dernière apparaît comme une conséquence desdeux échanges précédents et, cette fois-ci, C. ne se contente pasd’acquiescer. Elle exprime le désir de voir cette prédiction seréaliser. À ce troisième échange complet, succède le dernierdans lequel V., forte du succès de toutes les tentatives précé-dentes, asserte, de façon péremptoire que ce qu’elle a énoncéen V57 est bien certain. Dans ce cas, C. ne peut donner qu’uneévaluation positive.

Le tableau 5 synthétise cette organisation.Dans cette structure comportant quatre échanges, nous som-

mes en présence de deux prédictions successives. Celles-ci seproduisent après un échange formulé sur le mode question/réponse dont la finalité est d’obtenir un accord. Forte de cepremier acquis, V. avance une première prédiction qui reçoitune validation de la part de C, ce qui permet à V. d’enchaîneren faisant une autre prédiction. Ainsi, V. possède tous les élé-ments pour poser son discours comme discours « vrai ». Les

Tableau 5

Échanges V55/C55 V56/C56 V57/C57 V58/C58Contenupropositionnel

Demanded'information/réponse positive

Assertion/évaluationpositive

Assertion/expressiond'un souhait

Assertion/évaluationpositive

Fonctionillocutoire

Initiative Initiative Initiative Initiative

Orientationargumentative

Co-orientée Co-orientée Co-orientée Co-orientée

échanges précédents apparaissent comme des élémentspréparatoires à l’émission d’une prédiction.

3.2.2. Exemple no 2Le deuxième jeu de langage qui s’inscrit dans cette même

catégorie comporte trois échanges. Ce passage arrive après lefragment déjà analysé (cf. le premier exemple du jeu de lan-gage « instigation »). V. est maintenant passée à un autre regis-tre de pratique. Elle ne se contente plus d’instiguer, elle fait desprédictions. Le fragment est le suivant :

● V176 : hein… vos enfants ils auront un très bon métier ;● C176 : oui… ils vont à l’école ;● V177 : oui mais plus tard ;● C177 : oui ;● V178 : je vois que plus tard ils auront un très bon métiervotre fille et votre gamin ;

● C178 : ah bon …

Dans ce fragment, nous avons affaire à un jeu de langagequi se compose de trois échanges. Le premier (V176/C176)comporte une assertion et une précision et n’apparaît pascomme un échange complet. L’intervention C176 laisse penserque les deux interlocutrices n’ont pas donné le même sens àl’énoncé : « ils auront un très bon métier plus tard ». Pour C.« plus tard » n’est pas compris comme à l’avenir et c’est celaqui semble motiver la demande de conformation en V177.Avec l’échange V177/C177, V. réitère l’assertion émise enV.176 ce qui donne lieu à un échange complet qui semble suf-fire pour que V. s’engage dans une prédiction.

Le tableau 6 illustre le jeu de langage prédire l’avenir.Dans ce fragment, à la différence du précédent, nous avons

affaire à trois échanges dont deux sont destinés à trouver unaccord sur le sens. Ce n’est qu’après avoir obtenu ce dernierque la prédiction proprement dite peut se produire, les deuxpremiers échanges ayant une fonction initiative.

3.3. La divination comme jeu de langage

Nous étudierons ici une structure comportant six échangesqui est engagée à partir d’une requête de la cliente qui est for-mulée de la façon suivante : « mais… là le verseau encore à cetteheure-ci il me trompe encore ou pas… ». La voyante ne répondpas à cette question. Elle se contente de qualifier ce dernier de« vaurien » et annonce à la cliente qu’elle ne voit rien en ce quiconcerne une relation possible avec un autre homme appelévierge. Celui-ci semble encore aimer une de ses maîtresses

Tableau 6

Échanges V176/C176 V177/C177 V178/C178Contenupropositionnel

Assertion/absenced'évaluation

Demande deconfirmation/confirmation

Assertion/évaluationpositive

Fonctionillocutoire

Initiative Initiative Initiative

Orientationargumentative

Co-orientée Co-orientée Co-orientée

M.-F. Agnoletti / Revue européenne de psychologie appliquée 56 (2006) 199–208206

alors que celle-ci a des relations avec d’autres hommes. Cettedernière information suscite la surprise de C. qui avance qu’ellepassait pour une femme sérieuse. À ce moment là, V. confirmece manque de sérieux et aborde le thème du travail.

3.3.1. Exemple no 1V23: vous avez eu un bon travail ?C23 : oui…V24 : hein… bien placé ?C24 : oui…V25 : dans les papiers ?C25 : non non non non j’ai travaillé avec le gars avec qui je

vivais… le verseau…V26 : oui…C26 : j’ai travaillé avec lui…V27 : dans les affaires ?C27 : c’était un restaurant…V28 : oui… ben que vous vous occupez des affaires tout le

temps…V28 : oui…Du point de vue de l’organisation d’ensemble, il apparaît en

V23/C23 et V24/C24 deux échanges consécutifs qui se présen-tent comme deux couples question/réponse complets qui ont unefonction initiative. Celle-ci permet d’enchaîner en V25 où V.poursuit sa demande d’informations. L’échange V25/C25n’apparaît pas comme un échange complet dans la mesure oùC. apporte une réponse négative à la demande d’information deV. Les échanges V25/C25 et V26/C26 apparaissent comme deséchanges visant à trouver un accord sur le sens. Les deux échan-ges suivants V27/C27 et V28/C28 sont alors l’occasion pour V.de redéfinir à ce qui a été dit par C. En effet, elle tente unenouvelle signification à donner à « bon travail », « bien placé »« dans les papiers » qu’elle traduit par « affaires ». Les deuxderniers échanges apparaissent alors comme ayant une fonctioninitiative puisqu’on retrouve deux échanges complets, l’un cons-truit sur le mode question/réponse et l’autre sur le mode affirma-tion/accord. Le tableau 7 synthétise ce jeu de langage.

Cette représentation permet d’identifier la succession deséchanges pour parvenir à « deviner le passé ». On observedans un premier temps, deux échanges ayant chacun une fonc-tion initiative puis deux échanges l’un ayant une fonction réac-tive l’autre initiative dans laquelle un ajustement se produit et

Tableau 7

Échanges V23/C23 V24/C24 V25/C25Contenu propositionnel Question/

évaluation positiveQuestion/évaluation positive

Assertionévaluatio

Fonction illocutoire Initiative Initiative RéactiveOrientation argumentative Co-orientée Co-orientée Co-orien

Tableau 8

Échanges V41/C41 V42/C42Nature du contenu deséchanges

Assertion/réponse(non satisfaisante)

Assertion (réitéraréponse non satis

Fonction des échanges Réactive RéactiveOrientation argumentative Co-orientée Co-orientée

enfin deux échanges dans lesquels V. affirme sa vision dupassé.

3.3.2. Exemple no 2Le deuxième exemple qui illustre l’activité de divination

apparaît quelques échanges après celui que nous venons de pré-senter. Dans les échanges qui séparent ces deux fragments V.pose un certain nombre de question à C. Cette dernière apportedes précisions quant à sa séparation, la garde des enfants… V. enarrive à parler des sentiments que son mari éprouvait à sonégard.

V41 : oh ben non il vous a aimé votre mari.C41 : mouais…V42 : hein…C42 : mouais…V43 : je vais vous dire… il vous a aimé plus que vous

l’avez aiméC43 : ouais…V44 : vrai ou faux ?C44 : oui… oui…À la différence du jeu de langage précédent, nous sommes

ici en présence de quatre échanges. Leur agencement est,comme dans les exemples antérieurs, organisé autour del’accord. En effet, en V41/C41 nous avons affaire à un échangedans lequel V. affirme un point de vue sur les sentiments pas-sés du mari de C. Cette intervention ne reçoit pas l’assentimentde C. L’échange a donc une fonction réactive. Cette dernièreapparaît dans l’échange V42/C42 du type question réponse.Partant de là, V, tente dans l’échange suivant V43/C43 unenouvelle assertion relative aux sentiments du mari de C. Cetéchange complet se poursuit par un autre échange confirmatifqui possède aussi une fonction initiative.

Le tableau 8 illustre ce jeu de langage.Comme nous l’avons vu précédemment, tout se passe

comme si V. recherchait l’accord de C. à travers deux échangesconsécutifs avant d’émettre un point de vue que l’on peutconsidérer comme l’aboutissement de son activité.

Ces différentes illustrations nous ont permis de mettre enévidence certaines régularités dans la forme de vie « consulta-tion de voyance ». Celles-ci correspondent à des jeux de lan-gage composés d’échanges liés par des fonctions illocutoires. Ilnous est possible à présent de procéder à la discussion des ana-lyses pratiquées.

V26/C26 V27/C27 V28/C28/n négative

Évaluationpositive/assertion

Question/évaluation positive

Assertion/évaluationpositive

Initiative Initiative Initiativetée Co-orientée Co-orientée Co-orientée

V43/C43 V44/C44tion)/faisante

Assertion/réponse positive Affirmation/réponse positive

Initiative InitiativeCo-orientée Co-orientée

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4. Discussion et conclusion

Les analyses que nous avons proposées, nous ont permis demettre en évidence quelques régularités dans la conduite de laconsultation de voyance. En effet, quelle que soit la taille dujeu de langage étudiée (deux, quatre, cinq échanges et plus), ilapparaît une manière de procéder identique. Dans tous les cas,le jeu de langage débute par un échange constitué d’un couplequestion/réponse, d’un couple assertion/assertion ou bien asser-tion précision. Ce dernier possède une fonction initiative oubien une fonction réactive. À ce premier échange succède undeuxième qui possède soit la même fonction soit une autre.Dans presque tous les cas, V. cherche à obtenir un accord surau moins deux échanges avant de s’engager dans une activitéde prédiction, de conseil ou deviner le passé.

Malgré quelques variations liées à la taille des structuresanalysées, certaines d’entre elles comportent deux échanges,d’autres quatre d’autres encore sept, il nous paraît possible deschématiser les différents jeux de langage (Fig. 1).

Quel que soit le jeu de langage en question, V. utilise demanière quasi systématique l’échange en deux tours de parole.Ce dernier sert à recueillir des informations (cas de l’échangedu type question/réponse) ou bien à valider le contenu d’uneintervention. Dans certains cas, ces deux usages des échangessont présents (cf. le jeu de langage deviner le passé). Cettestructure en deux tours de parole correspond à ce que nousavons présenté, dans le schéma ci-dessus, sous l’expression« recherche d’accord ». Lorsque cette étape semble acquisepour la voyante, cette dernière se livre à une tentative d’inter-prétation qui se présente généralement sous la forme d’unéchange de type assertion/évaluation positive qui est complet.Lorsque ce dernier ne satisfait pas à cette caractéristique, V.procède à un réajustement qu’elle soumet ensuite à validationà C.

Le jeu de langage se présente bien comme une organisationsingulière d’échanges et de relations entre ces derniers. Il appa-raît comme la réalisation d’une activité coconstruite. Ilconvient à présent de discuter ces aspects.

Les analyses qualitatives et le traitement quantitatif des don-nées traitées nous conduisent à introduire trois éléments de dis-cussion qui participent à la réalisation du projet de cet articlequi est, rappelons-le de tenter d’articuler les notions de script,forme de vie et jeu de langage.

Le premier concerne les notions de script, forme de vie et dejeu de langage que nous avons évoquées dans la première par-tie de ce texte. Partant de la conception de Wittgenstein, nousavons avancé que la forme de vie pouvait caractériser une pra-tique sociale. La consultation de voyance, comme d’autres for-

Fig. 1. Représentation schématique du foncti

mes de consultation d’ailleurs, relève d’un type particulierd’interaction sociale qui met en présence deux sujets jouantchacun un rôle singulier. Dans le cadre de la consultation devoyance, ces rôles se distribuent avec l’alternance des tours deparole et les différentes activités qui s’y déploient. Ainsi, lavoyante joue le rôle de conseillère, de prêtresse… Nous pou-vons donc avancer, en référence à Ghiglione et Trognon(1993), que la consultation de voyance comporte une métarè-gle : la voyante et la cliente savent en quoi consiste ce type desituation, elles ont une connaissance implicite, un arrière plancommun relatif à ce qui peut s’y passer. C’est en cela que l’onpeut considérer cette forme de vie comme un script de situa-tion. Nous ajouterons néanmoins, que cette métarègle comportedes jeux de langage ponctuels. Ces derniers se présententcomme des activités qui se manifestent sur le plan langagierpar des formes qui caractérisent la prédiction (verbes aufutur) le fait de deviner le passé (les actions concernent lepassé) ou bien de donner des conseils (les verbes à l’impératif).Les jeux de langage que nous avons étudiés ne renvoient pas àdes activités produites par un seul sujet, comme cela est le casdans certains exemples de jeu de langage cités par Wittgens-tein. Dans la consultation de voyance, les jeux de langage sontcoconstruits. En effet, la voyance ne peut avancer dans sesactivités que dans la mesure où elle reçoit, au cours d’unéchange, une validation ou un accord de la part de la cliente.Nous avons vu que lorsque ce dernier est favorable, nous som-mes en présence d’échanges ayant une fonction initiative, cequi permet à la voyante d’avancer dans la réalisation du jeude langage. Lorsque l’accord n’est pas acquis, il est possiblede réitérer une question ou bien de demander une précisionafin d’obtenir un accord et mieux enchaîner. C’est cet accordqui possède une fonction initiative qui fait varier la composi-tion des jeux de langage. Certains apparaissent de manièredirecte, c’est-à-dire avec deux échanges consécutifs, d’autresnécessitent un plus grand nombre d’échanges plus élevé etcomportent un réajustement ou bien une renégociation dusens. Toutefois, malgré les variations liées aux échanges, lesjeux de langage se manifestent avec une régularité certainedans la consultation téléphonique de voyance.

Le deuxième élément de discussion se rapporte à la manièrerépétitive selon laquelle la voyante déploie ses jeux de langageet qui nous amène à penser que la consultation de voyance estune transaction de même nature que celles identifiées par Tro-gnon (1999) dans lesquelles il existe des jeux de langage ins-titutionnalisés comme les psychothérapies, l’entretien conseil,le dialogue homme–machine… Les analyses quantitative etqualitative que nous avons réalisées permettant de soulignerles jeux de langage présents dans la consultation de voyances’organisent suivant une certaine temporalité illustrée par le

onnement des différents jeux de langage

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schéma que nous avons esquissé. Deux échanges au moins sontnécessaires avant de deviner, prédire ou conseiller et, si cetteactivité ne peut pas se réaliser, il y a un retour en arrière, émis-sion d’autres échanges. Cette manière de faire nous laisse pen-ser que la consultation de voyance peut s’apparenter à touteautre consultation qui suit une procédure « scriptée ». Eneffet, des jeux de langage comme instigation ou prédictionbien organisés et fortement structurés prennent la place desprescriptions ou des recommandations que l’on rencontredans une consultation chez le médecin par exemple. Ainsi, laconsultation de voyance, comporte des jeux de langage ou« scripts langagiers » qui se déroulent dans deux ou plusieurséchanges. Nous sommes alors en présence d’un type de scriptqui n’est pas la simple description du déroulement d’unmoment de la journée comme ceux étudiés par Edwards(1994, 1997) mais un script coconstruit dans l’interlocutiongrâce à une mise en œuvre originale du langage.

La transaction que nous avons étudiée et les jeux de langagemis en évidence nous amènent à nous interroger sur le statutmême du script. Cela constituera le dernier élément de discus-sion.

Nous avons signalé que la consultation de voyance pouvaitêtre considérée comme toute autre consultation dans ses objec-tifs. Cette forme de vie comporte également des scripts langa-giers (actes de voyance très circonstanciés, jeux de langage…).La question qui se pose alors est de savoir si ce type de pra-tique relève d’une pratique personnelle, propre à cette voyanteou bien s’il s’agit d’une pratique apprise dans le cadre d’uneformation à la voyance.

Dans le premier cas, on peut avancer que nous avons affaireà ce que Schank et Abelson (1977) ont appelé un script per-sonnel. Ce dernier correspondrait à des pratiques répétitivesproduites par un sujet dans un but qui lui est personnel et quin’est connu que de lui. Les auteurs illustrent ce type de scripten citant l’exemple d’un sujet qui souhaite obtenir une promo-tion et qui produit des comportements d’allégeance. Si ontranspose cette illustration à la forme de vie que nous avonsétudiée, on peut considérer que les pratiques verbales répétéesde la voyante sont produites dans un but singulier qui peut êtrecelui visant à légitimer sa pratique. Dans le deuxième cas, noussommes en présence d’un type de pratique apprise qui consisteà conduire une consultation en procédant à de nombreuses rup-tures thématiques, en ne laissant que peu de place au discoursde l’autre, en amenant le tiers à un accord pour procéder à ladivination, la prédiction ou l’instigation. La régularité et larépétition des différents jeux de langage étudiés nous condui-sent à retenir cette dernière conception mais il serait nécessaired’étudier d’autres consultations de voyance afin de pouvoirconfirmer ce point de vue. Quoi qu’il en soit, il apparaît quela forme de vie « consultation de voyance » est proche d’unscript de situation. Il existe, en effet des conditions d’entrée,

des rôles, un but, un résultat. Cependant, on est ici en présenced’entrelacements de langage et d’activités, à la différence desscripts de situation classiquement étudiés et dans lesquels onmet l’accent sur l’enchaînement des actions, ces dernières semanifestant à travers des échanges verbaux orientés vers unbut. L’opérationnalisation de la notion de jeu de langagecontribue au développement de la connaissance du script inter-locutoire tel que nous l’avons défini et permet ainsi d’appro-fondir une psychologie sociale des activités langagières.

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