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Stereochimie-LV : Etude cinetique de l'hydrocyanation d'enones cycliques

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Page 1: Stereochimie-LV : Etude cinetique de l'hydrocyanation d'enones cycliques

Ttrmhdmn Vol 37. tie 21. pp 3723 to 3725. 1981

Pnnkd I” Grcal Bntam

STEREOCHIMIE-LVt

ETUDE CINETIQUE DE L’HYDROCYANATION D’ENONES CYCLIQUES

C. AGAMI,* M. FADLALLAH et J. LEVISALLES

Laboratoire de Chimie Organique (ERA 127). Universite Pierre et Marie Curie, Tour 45, 4 place Jussieu, Paris Se, France

et

P. CAYZERGCES

Laboratoire de Cinetique et Mecanismes de Reactions Organiques (ER 84) Universite Pierre et Marie Curie, Tour 45, 4 place Jussieu, Paris Se. France

(Received in France 4 April 1981)

Abstract-Kinetics of hydrocyanation of various enones are reported. The different behaviour of testosterone and 19-nor-testosterone towards hydrocyanation is explained by a slower partial rate factor on the o-face of

L’hydrocyanation conjugee des &tones a$tthylCniques a donne lieu a de nombreux travaux2 quant a la stireoselectivite de cette reaction. En revanche, les etudes d’ordre cinetique sont tres peu nombreuses: dans les cinquante dernieres andes, seule la reactivite de Et2AICN a et6 examineef de ce point de vue. Ce reactif presente cependant I’inconvenient de reagir SOUS con- trole thermodynamique. Le present travail rapporte des resultats cinetiques concernant le plus simple des reactifs d’hydrocyanation: le cyanure de potassium, qui est repute operer “sous contrdle essentiellement cinttique”* lorsqu’il est utilise dans une solution dimethylformamide- eau et en presence de chlorure d’ammonium dont la fonction est de maintenir constant le pH du milieu reac- tionnel.

ETUDE CINETIQUE

Dans nos conditions experimentales (uide infra) une constante de vitesse de pseudo-premier ordre a et6 observee. L’equation de vitesse suivante est celle qui rend le mieux compte des resultats cinetiques:

dW1 c = _ = _ d([El ;WI) = k.,[E] dt

dF1 =-WK,,,=kk,,IEl

[El, [CH] et [CC] reprtsentent respectivement les con- centrations de I’enone mesurable, de la cyanhydrine (produite par la reaction (I) avec une constante d’equili- bre K) et de la cyanocetone (produite par la reaction (2) avec une constante de vitesse bimoleculaire k); K,, et k., sont respectivement tgaux a K[CN-] et a k[CN-1.

ENONE t CN-PCYANHYDRINE (1)

ENONE + CNi-*CYANOCETONE. (2)

+Article precedent dans cette serie: Ref I.

Cette expression de la loi de vitesse est done en parfait accord avec la theorie de Nagata* concernant la dualite de la reaction d’hydrocyanation: I’addition l-2 est un Cquilibre rapide alors que I’addition l-4 constitue I’etape determinant la vitesse globale.

Le fait que la vitesse paraisse etre d’ordre zero par rapport a I’anion cyanure peut s’expliquer par la presence de deux equilibres rapides qui maintiennent constante la concentration en CN-:

La rt%ction entre les ions cyanure et ammonium

CN- t NH,- 8HCN t NH,.

Dans l’eau, cet equilibre a une constante voisine de I’unite (les pK. de HCN et NH,+ sont respectivement4 de 9.31 et 9.25); dans le DMF cependant, I’anion cyanure est beaucoup moins solvate que dans I’eau5 et cet Cquil- ibre est alors dCplacC vers la droite.

Cet effet de solvant sur la position des Cquilibres acide-base a deja CtC illustre par de nombreux exemples.6

Ce phenomene rend compte de l’observation suivante: la reaction d’hydrocyanation est Ctudiee ici avec des proportions molaires relatives en KCN-NHXI- Cnone &ales a 2: 1.5: 1; or des que KCN et NHEI sont en quantite equimolaire (2: 2 ou I : I par rapport a l’enone) I’hydrocyanation de la cholestene-2 one-l ne s’observe pas. Cela correspond bien 21 un fort deplacement de I’tquilibre precedent vers la formation de HCN dans le systeme DMF-eau (9: I, V/L’) et a une reactivite trts faible’ de HCN par rapport a CN _.

L’iquilibre bien connu entre paires d’ions et ions libres’ Ces derniers sont generalement consider& comme les

plus reactifs:

K’, CN-sK’IICN-SK’ +CN-.

II a deja demontrCR.9 qu’une solution 0.03 M de cyanure de potassium dans le DMF est presque entierement a I’Ctat de paires d’ions.

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3724 C. ACAMI et al.

Ce second equilibre permet d’expliquer la quasi-iden- tite des vitesses de reaction pour l’hydrocyanation de la cholestene-2 one-l lorsque varie la nature du cyanure alcalin (toutes chases &ales par ailleurs):

KCN: k., = 3.95 . W’s-‘.

NaCN: k,, = 3.72. IO-‘s-l.

Les cyanures de sodium et de potassium n’ont pas, dans ce milieu, la meme aptitude a se trouver sous la forme ionisee9 mais, &ant donne que seule est mesuree une constante de vitesse apparente (qui ne tient pas compte de la concentration effective en ion CN-) il est normal d’observer une reactivitt sensiblement tgale avec ces deux cyanures.

ETUDE CONJOINTE DE LA STEWOClIMIE ET DE LA WTFSE

Cet outil cinetique, tres simple d’emploi, permet de revoir sous un Cclairage nouveau un certain nombre de don&es stereochimiques. Deux exemples particuliere- ment signiticatifs seront exposes ici.

Hydrocyanation comp&e de la mithyl-3 cyclohex6ne-2 one et de I’isophorone

L’action du cyanure de potassium sur l’isophorone 1 conduit a la f3-cyanocetone 2 ou le groupe cyano occupe une position axiale.”

La difference des energies libres d’activation (a 121”) est de 1.1 kcal mol-‘, ce qui est un ordre de grandeur convenable pour une interaction l-3 diaxiale entre les groupes methyle et cyano.

Hydrocyanation cornpaGe de la testostirone et de son

dtrivi 19-nor La testosterone (R=CH3) et la IPnor-testosterone

(R=H) ne presentent pas la meme sttreoselectivite lors de I’hydrocyanation sous controle cinetique” (Fig 2). L’attaque par la face p est plus favoriste avec la testos- terone qu’avec le derive 19-nor.

Ce resultat qui pourrait formellement sembler etre la consequence de quelque “attraction sterique” ne peut etre explique par une difference de conformations entre les &tones. II a en effet ete montre” que le conformere dont la jonction entre les cycles A et B est de nature quasi-cis est d’energie plus elevee que le conform&e quasi-trans, darts les deux cas. Leur difference d’energie est de 2.7 kcal mol-’ dans le cas de la testosterone alors qu’elle n’est que de I.0 pour son derive IPnor. Si I’on ne raisonne done que sur les conformations des reactifs, independamment de l’intervention tventuelle du principe de Curtin-Hammett, le controle stereoelectronique” par les angles de torsion (Fig 3) devrait conduire au resultat oppose: la conformation quasi-cis conduit preferen- tiellement a une jonction cis par une attaque f.3.

Les don&es cinetiques montrent qu’en fait la plus

Cette configuration correspond bien a celle que prevoit le controle stereoelectronique”.” conduisant a la for- mation d’un &at de transition p&chaise (Fig I). Le produit 2 &ant cependant conformationellement mobile peut ne resulter que d’un controle thermodynamique de la reaction.

Le controle stereotlectronique n’est done pas apparent sur la seule base d’un examen stereochimique.

Ce controle se manifeste clairement, en revanche, lorsqu’on examine les vitesses d’hydrocyanation de l’isophorone 1 et de la methylcyclohexenone 3:

1: k, = 0.26 * lo-' s-‘.

3: k,,, = 1.00. IO-' s-l.

La difference de reactivite entre les &ones 1 et 3 rend bien compte du fait que le controle sttredlectronique implique que l’entree de CN- se fasse par la face la plus encombree de I’isophorone 1 (Fig. I).

Fig. I. Attaque axiale du cyanure conduisant a un &at de transition p&-chaise.

grande proportion d’attaque /3 pour la testosterone rtsulte non pas dune vitesse d’attaque superieure sur cette face (par comparison avec la IPnor-testosterone) mais d’une vitesse moindre pour I’attaque sur la face a.

R.-H 79

R:CH, 50 50

Fig. 2. Pourcentages de produits cis et tram lors de I’hydro-

cyanation sous contrble cinetique de la testostkone (R=CHl) et de la IPnor-testostbrone (R=H).

quasi- trans CN

Fig. 3. ContrBle sttrkklectronique par les angles de torsion sur

des conform&es quasi-& et quasi-Vans.

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Stereochimie-LV 3125

Les vitesses absolues sont les suivantes:

R = CH,: k., = 1.49 * IO’-‘s‘ ‘.

R = H: k,, = 9.62 . IO-’ s-l.

Ces valeurs permettent de connaitre les vitesses par- tielles d’attaque sur chaque face pour les deux Cnones

(Fig 4). La difference d’encombrement stCrique sur la face /.3

se manifeste bien par un ralentissement de I’attaque sur cette face pour la tettosterone (0.75/2.02). La grande difference de vitesse observee pour I’attaque sur la face a(O.75/7.6) peut s’expliquer par la formation de deux interactions gauche entre le methyle angulaire et les liaisons CcCJ et C,-Cs (Fig 5).

Cette interpritation suppose un Ctat de transition pro- the des produits (controle par le developpement des produits). Cette nature de I’Ctat de transition est la plus probable pour deux raisons: (a) il existe d’excellentes correlations’ entre la stereoselectivite de cette reaction et le controle stereoelectronique; (b) sur la coordonee reactionnelle, l’etat de transition est proche d’un inter- mtdiaire instable (I’anion cyanotnolate) qui lui est pos- terieur: cela correspond a I’CnoncC originel du postulat de HammondI qui ne peut etre contestt dans cette forme-la.”

La difference inergetique entre les Ctats de tran- sition pour I’attaque sur la face a pour les deux steroi’des

2.02 (H) R

0.75 (CH,) \

o\ \ 7.60 04)

0.75 WI,)

Fig. 4. Vitesses partielles d’attaque sur la face a et sur la face ,9.

Fig. 5. Interactions gauche apparaissant lors de I’hydrocyanation sur la face a de la testosterone.

est approximativement de 1.8 kcal mol-‘; cette valeur a un ordre de grandeur satisfaisant pour I’interaction pos- tulee.

Ainsi I’anomalie apparente prtsentee par la testos- terone et la 19-nor-testosterone peut etre expliqute par des considerations cinttiques simples.

PARTIE EXPERIMENTALE La testosterone, la IPnor-testosterone et I’isophorone sont des

composes commerciaux (Fluka). La cholestene-2 one-l et la methyl-3 cyclohexene-2 one ont ete synthetistes respectivement selon Johnson et Crosby”’ et selon Marvel et Levesque.”

Les mesures cinetiques ont ete faites dans les conditions experimentales suivantes: proportion des reactifs: KCN-NH&I- enone = 2: 1.5: I; concentration de I’enone: 0.01 I mol L-‘; tem- perature: 121” (reflux); solvant: DMF-Hz0 (9: I, o/v).

L’avancement de la reaction est suivi par spectroscopic UV (Beckmann DK 2A) sur des echantillons preleves et trait& de facon habituelle (extraction a I’ether, lavages a I’eau et sechage sur sulfate de sodium).

Les droites obtenues par la correlation entre Log [E] et t sont trait&es par la methode des moindres carres; les coefficients de correlations sont toujours superieurs a 0.99.

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