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STI 571 : une nouvelle approche therapeutique ;3epuis la decouverte en 1960 du chromosome Philadelphie, la physiopathologie de la leucemie myeld/de chronique (LMC) est bien etablie. La translocation chromo- somique t(9;22) (q22; q34) cree un gene de fusion BCR-ABL qui code pour une proteine de fusion, la p2~O, dont I'activite kinase est constitutive, & la difference de celle de la p190, tyrosine kinase codee par le gene ABL - dont rac- tivite est finement regulee et inter- vient dans la transduction du signal entre un recepteur membranaire et le noyau de la cellule. II a ete demontre, aussi bien in vitro que dans de modeles murins, que cette oncoproteine etait directement impliquee dans la leucemogenese. II etait donc tentant de chercher & inhiber I'activite de la p210. Une petite molecule a ainsi ete syn- thetisee dans les annees 90 : une phenylaminopyrimidine (CGP 571 48B) capable d'occuper le site ATP de la proteine BCR-ABL et, ainsi, d'empecher la phos- phorylation de son substrat. II a ete demontre, in vitro, que cette molecule etait capable d'inhiber I'activite kinase de BCR-ABL, d'ABL et aussi de deux autres recepteurs & tyrosine kinase : c-kit et PDGFR. II n'y a pas, en revanche, d'effet de cette mole- cule sur les autres tyrosines kinases testees. L'efficacite anti- Edicacit# du ST/ 571 chez des patients atteints de LMC en premiere phase chronique L e ST/571 est ici ~valu~ chez des patients atteints de teuc~mie my#l@de chronique (LMC) en I re phase chronique mais en ~chec d'un traitement par interferon-alpha (IFN). L'~chec est d#fini soit par l'absence de r~mission complete h~matologique (RCH : absence de spl~no- m~galie + leucocytose < 10 O00/m3) au bout de 3 mois, soit par I'absence de reponse cytog#n~tique au bout de 12 mois (% de mitoses Ph l > 65 o/o), soit par une r~volu- tion apres une r#ponse initiale, survenant sous traitement, qu'etle soit h#matotogique ou cytog~n~tique. Dans un 2 e temps, des patients ayant une intof~rance majeure ~ I'IFN ont egalement #t# inclus. Le STI 571 est donne par voie orale, en 1 ou 2 prises par jour selon la dose ~valuee (25 1 000 mg/j) ; 83 patients sont inclus (37 pour absence de RCH, 33 pour r~sistance cyto- g#n~tique et 13 pour intole- rance ~ I'IFN). Par rapport au diagnostic de LMC, te recul m&dian ~ I'inclusion est de 3,8 ans (0,8 ~ 14) et 19 patients #taient, en fait, acc~l&r#s (blastose m&dullaire entre 5 et 15 O/o).Les patients ~taient &valu#s au bout de 8 semaines de traiternent puis toutes les 12 semaines. Les r#ponses sont recapitut#es dans le tableau ci-dessous. Le d&lai moyen d'obtention d'une RCH est de 2 4 semaines. Cette RCH se maintient ensure chez 51/53 patients pour lesquels le ST157I a ~t~ poursuivi (suivi m&dian de 265j) ; un des patients a rechut# sur te plan hematologique, et I'un d'eux a progress# vers une phase blas- tique. Les r&ponses cytog#n#- tiques deviennent fr#quentes & partir de la dose de 300 mg/j : 1? patients sur 54 (31 o/o)ont une r&ponse cyto- gen~tique majeure (o/ode Dose (mg/j) N 25 ou 50 6 85 4 140 3 200 ou 250 t 6 300 ~ 1000 54 Toutes doses 83 Rdponse Remission compli~te h6matologique hdmatologique 2 0 2 1 3 1 16 9 54 53 77 (93 %) 64 (77 %) proliferante du CGP 571 48B a ensuite ete demontree sur des lignees cellulaires obtenues & par- tir de LMC et aussi sur des cel- lules clonogeniques prelevees chez des patients atteints de LMC, alors que cette molecule est sans effet sur des lignees ou cellules temoins. Ceci a conduit ~. la mise en place d'essais cliniques qui viennent d'etre rapportes dans le numero du 5 avril 2001 du New England Journal of Medecine o~J I'efficacit6 remarquable de cette molecule, rebaptisee STI 571 (pour signal transduction inhibitor) est etablie chez les patients atteints de LMC. Meme si d'autres essais cliniques sont necessaires pour preciser au mieux les modalites d'utilisation de ce nouveau medicament, il est d'ores et dej& etabli que le STI 571, qui va etre commercialise des cet automne, va bouleverser la prise en charge de la LMC et peut ~tre aussi d'autres neoplasies, des essais cliniques etant en cours dans des cancers du poumon, de la prostate et du cerveau. IV. Engl.E. Med.344 (05/04/01) Efficacite STt patient atteint de tumeur rneseno chymateuse du tube digestif • Les tumeurs stromales du tube digestif sont caracterisees par re×- pression, a la surface des cellules tumerales, d'un recepteur appar- tenant #, la famille des recepteurs g tyrosine-kinase : c-kit dont le ligand est un facteur de croissance, le SCF (stem cell factor). I 'existence de mutations de c-kit, conduisant & une activite tyrosine-kinase consti- tutive est demontree dans ce type de tumeur. Une patiente de 50 ans, atteinte d'une tumeur stromale du tube digestif est traitee par le STI 5? 1. Au moment du traitement, elle est en 2e rechute apres un traitement ayant associe deux temps chirurgicaux et une polychimiotherapie, et declaree en situation d'echec therapeutique. Au J1 du traitement la taille de la tumeur au scanner (evaluee par les mensurations des 8 plus volumi- 16 RevueFrangaise des Laboratoires, mai 2001, N ° 333

STI 571 : une nouvelle approche thérapeutique

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STI 571 : une nouvelle approche therapeutique

;3epuis la decouverte en 1960 du chromosome Philadelphie, la physiopathologie de la leucemie myeld/de chronique (LMC) est bien etablie. La translocation chromo- somique t(9;22) (q22; q34) cree un gene de fusion BCR-ABL qui code pour une proteine de fusion,

la p2~O, dont I'activite kinase est constitutive, & la difference de celle de la p190, tyrosine kinase codee par le gene ABL - dont rac- tivite est finement regulee et inter- vient dans la transduction du signal entre un recepteur membranaire et le noyau de la cellule. II a ete demontre, aussi bien in vitro que dans de modeles murins, que cette oncoproteine etait directement impliquee dans la leucemogenese. II etait donc tentant de chercher & inhiber I'activite de la p210. Une petite molecule a ainsi ete syn-

thetisee dans les annees 90 : une phenylaminopyrimidine (CGP 571 48B) capable d'occuper le site ATP de la proteine BCR-ABL et, ainsi, d'empecher la phos- phorylation de son substrat. II a ete demontre, in vitro, que cette molecule etait capable d'inhiber I'activite kinase de BCR-ABL, d'ABL et aussi de deux autres recepteurs & tyrosine kinase : c-kit et PDGFR. II n'y a pas, en revanche, d'effet de cette mole- cule sur les autres tyrosines kinases testees. L'efficacite anti-

Edicacit# du ST/ 571 chez des patients atteints de LMC en premiere phase chronique L e ST/571 est ici ~valu~

chez des patients atteints de teuc~mie my#l@de

chronique (LMC) en I re phase chronique mais en ~chec d'un traitement par interferon-alpha (IFN). L'~chec est d#fini soit par l'absence de r~mission complete h~matologique (RCH : absence de spl~no- m~galie + leucocytose < 10 O00/m 3) au bout de 3 mois, soit par I'absence de reponse cytog#n~tique au bout de 12 mois (% de mitoses Ph l > 65 o/o), soit par une r~volu- tion apres une r#ponse initiale, survenant sous traitement, qu'etle soit h#matotogique ou cytog~n~tique. Dans un 2 e temps, des patients ayant une intof~rance majeure ~ I'IFN ont egalement #t# inclus. Le STI 571 est donne par voie orale,

en 1 ou 2 prises par jour selon la dose ~valuee (25 1 000 mg/j) ; 83 patients sont inclus (37 pour absence de RCH, 33 pour r~sistance cyto- g#n~tique et 13 pour intole- rance ~ I'IFN). Par rapport au diagnostic de LMC, te recul m&dian ~ I'inclusion est de 3,8 ans (0,8 ~ 14) et 19 patients #taient, en fait, acc~l&r#s (blastose m&dullaire entre 5 et 15 O/o). Les patients ~taient &valu#s au bout de 8 semaines de traiternent puis toutes les 12 semaines. Les r#ponses sont recapitut#es dans le tableau ci-dessous. Le d&lai moyen d'obtention d'une RCH est de 2 4 semaines. Cette RCH se maintient ensure chez 51/53 patients pour lesquels le ST157I a ~t~ poursuivi (suivi m&dian de 265j) ; un des patients a rechut# sur te plan hematologique, et I'un d'eux a progress# vers une phase blas- tique. Les r&ponses cytog#n#- tiques deviennent fr#quentes & partir de la dose de 300 mg/j : 1 ? patients sur 54 (31 o/o) ont une r&ponse cyto- gen~tique majeure (o/o de

Dose (mg/j) N

25 ou 50 6

85 4

140 3

200 ou 250 t 6

300 ~ 1000 54

Toutes doses 83

Rdponse Remission compli~te h6matologique hdmatologique

2 0

2 1

3 1

16 9

54 53

77 (93 %) 64 (77 %)

proliferante du CGP 571 48B a ensuite ete demontree sur des lignees cellulaires obtenues & par- tir de LMC et aussi sur des cel- lules clonogeniques prelevees chez des patients atteints de LMC, alors que cette molecule est sans effet sur des lignees ou cellules temoins. Ceci a conduit ~. la mise en place d'essais cliniques qui viennent d'etre rapportes dans le numero du 5 avril 2001 du New England Journal of Medecine o~J I'efficacit6 remarquable de cette molecule, rebaptisee STI 571 (pour signal transduction inhibitor) est etablie chez les patients atteints de LMC. Meme si d'autres essais cliniques sont necessaires pour preciser au mieux les modalites d'utilisation de ce nouveau medicament, il est d'ores et dej& etabli que le STI 571, qui va etre commercialise des cet automne, va bouleverser la prise en charge de la LMC et peut ~tre aussi d'autres neoplasies, des essais cliniques etant en cours dans des cancers du poumon, de la prostate et du cerveau.

IV. Engl. E. Med. 344 (05/04/01)

Efficacite STt

patient atteint de tumeur rneseno chymateuse du tube digestif • Les tumeurs stromales du tube digestif sont caracterisees par re×- pression, a la surface des cellules tumerales, d'un recepteur appar- tenant #, la famille des recepteurs g tyrosine-kinase : c-kit dont le ligand est un facteur de croissance, le SCF (stem cell factor). I 'existence de mutations de c-kit, conduisant & une activite tyrosine-kinase consti- tutive est demontree dans ce type de tumeur. Une patiente de 50 ans, atteinte d'une tumeur stromale du tube digestif est traitee par le STI 5? 1. Au moment du traitement, elle est en 2 e rechute apres un traitement ayant associe deux temps chirurgicaux et une polychimiotherapie, et declaree en situation d'echec therapeutique. Au J1 du traitement la taille de la tumeur au scanner (evaluee par les mensurations des 8 plus volumi-

16 Revue Frangaise des Laboratoires, mai 2001, N ° 333