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SUPPLEMENTO AL VOLUME xi, SERIE X N. 3, 1955 ])EL NUOVO CIMENTO 2 0 Semestre Sur les [r~quences propres de vibration des cristaux cubiques. J.-P. MA1'u~u Zaboratoire des Reeherehes Physiques, Sorbonne - Paris 1. - Les vibrations 51astiques des cristaux sont quantifi~es, en consequence de la structure atomique [3]. Duns un fragment cristallin qui contient ~V atomes, il existe 3N vibrations ~lastiques sinusoidales, formant 3N ondes ~lastiques planes. Chacune d'elles est car~ctSris~e par sa fr~quence vet par son veeteur d'onde S (S= l/A, A ~tant la longueur d'onde 41astique). Le spectre v = ](S) comprend 3p branches distinctes, p d4signant le nombre des atomes du motif cristallin. Duns trois branches du spectre, la frSquence s'annule ~vec S: on les appelle branches acoustiques. Duns les 3p--3 branches restantes, dites branches optiques, la fr~quence garde une valeur finie ]orsque S s'annule (fig. 1). IJorsqu'un cristal parfait absorbe une radiation infr~rouge, ~ un photon d'~nergie h~, guid4 par une onde luminuse de vec- teur d'onde s, (s=1/2) se transforme en phonon de m~me 4nergie, appurtenant ~ une onde 61astique, dont le vecteur d'onde s = S. Entre vet s, on a la relation v = v.s, v ~tant la vitesse de la lumi~re, ~gale ~ la pente de la droite OD sur la fig. 1. f Les pentes des courbes v = ](S) des branches optiques sont beaucoup plus faibles. Les points d'intersection de ees cour- s~ bes avee OD ont done une abscisse presque nulle: ils se rap- Fig. 1. portent ~ des longueurs d'onde 41astiques tr~s grandes de- rant les dimensions de la maille et d~finissent les fr4- quences propres, qui interviennent d~ns les ph~nom~nes optiques dont il va ~tre question. 2. - On suit que seules peuvent donner naissance ~ des bandes d'absorption les vibrations qui s'aecompagnent de la production d'un moment ~lectrique. Les ondes ~lastiques qui les transportent polarisent ~lectriquement le cristal. La fr~quence de la vibration d~pend du champ E agissant duns le cristal,

Sur les fréquences propres de vibration des cristaux cubiques

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S U P P L E M E N T O AL V O L U M E xi, S E R I E X N. 3, 1 9 5 5 ] ) E L NUOVO CIMENTO 2 0 S e m e s t r e

Sur les [r~quences propres de vibration des cristaux cubiques.

J.-P. MA1'u~u

Zaboratoire des Reeherehes Physiques, Sorbonne - Paris

1 . - Les vibrations 51astiques des cristaux sont quantifi~es, en consequence de la structure atomique [3]. Duns un fragment cristallin qui contient ~V atomes, il existe 3N vibrations ~lastiques sinusoidales, formant 3N ondes ~lastiques planes. Chacune d'elles est car~ctSris~e par sa fr~quence v e t par son veeteur d'onde S (S= l / A , A ~tant la longueur d'onde 41astique). Le spectre v = ](S) comprend 3p branches distinctes, p d4signant le nombre des atomes du motif cristallin. Duns trois branches du spectre, la frSquence s'annule ~vec S: on les appelle branches acoustiques. Duns les 3 p - - 3 branches restantes, dites branches optiques, la fr~quence garde une valeur finie ]orsque S s'annule (fig. 1).

IJorsqu'un cristal parfait absorbe une radiation infr~rouge, ~ un photon d'~nergie h~, guid4 par une onde luminuse de vec-

teur d'onde s, (s=1/2) se transforme en phonon de m~me 4nergie, appurtenant ~ une onde 61astique, dont le vecteur d'onde s = S.

Entre v e t s, on a la relation v = v.s , v ~tant la vitesse de la lumi~re, ~gale ~ la pente de la droite OD sur la fig. 1.

f Les pentes des courbes v = ](S) des branches optiques sont beaucoup plus faibles. Les points d'intersection de ees cour-

s ~ bes avee OD ont done une abscisse presque nulle: ils se rap- Fig. 1. portent ~ des longueurs d'onde 41astiques tr~s grandes de-

ran t les dimensions de la maille et d~finissent les fr4- quences propres, qui interviennent d~ns les ph~nom~nes optiques dont il va ~tre question.

2 . - On suit que seules peuvent donner naissance ~ des bandes d'absorption les vibrations qui s'aecompagnent de la production d'un moment ~lectrique. Les ondes ~lastiques qui les transportent polarisent ~lectriquement le cristal. La fr~quence de la vibration d~pend du champ E agissant duns le cristal,

~;Oi, J . - P . ) , I A T H I E U

c'est-a-dire h la fois du champ appliqu6 et du champ cr66 par la pol,~ris~tion P.

Nous considOrerons dans ce qui suit un cristal (qcctriquement isotrope, earac-

tOrisb par une polarisabilit(, scalaire :~.

t~) Si l '6chantillon est form6 par une sphbre dont le rayon est petit devant

la lono'uem" d'onde, sa polarisation est homo~'bne et le champ agissant E se

r(,duit au chain l) appliqu6. La frdquence propre de vibration sera d6signde

p a r r . dans ce (.as.

b) Si l '6chantillon a des dimensions grandcs devant la longueur d'onde,

une vibration active peut 6tre transport6e par une onde de polarisation trans-

versMe ou lon~o'itudinale. Darts la premibre, par d6finition, P e s t perpendiculaire

S et E = 0; dans la seconde, P e s t parallble h S; E = 4 n P et ~ -- 1/4:r. A c e s diff6rences de champ ag'issant correspondent des diff6rences entre les

fr6quences propres: nous appellerons la premi6re vt, la seconde v~.

FRSHLICH [5] a 6tabli les relations suivantes entre v,, v,, et v~.

Vl ~ ~t - Y~ ~ ?So @ 2 ( J ) ~ - - ~ , ( 2 ) ~ _ , ( 3 ) - - ~ .~ ,

d(,signe le pouvoir indm'teur sp6cifique du cristal, ~to lava , leur de son indice

de r(4raction extrapol6e ~ part ir des fr6quenees sup6rieures s la fr6quence d'ab-

sorption eonsid6r~e.

3. - Je me propose d 'examiner comment on peut atteindre les diverses

fr(~quences d6finies prdc6demment.

o) Les mesures d'absorptio~ donnent vt, ear l 'onde 61astique qui satisfait aux conditions pos6es en w 2 doit Ore transversale, comme l 'onde 61eetro-

magn6tique. Cependant, si l 'on utilise une lame monocristalline, la lumi6re

transmise est priv6e des radiations absorb6cs et r6fl6chies ~t la fois, ce qui peut

fausser la valeur de yr. D 'aut re part , il faut tenir compte des effets d'inter-

f6rence signal6s par CZERNY [2]. Cette dernibre cause d 'erreur n'existe pas darts le cas off l 'on opbre sur un solide en poudre, mais la premi6re subsiste,

aggrav6e [8].

L'cffet de la r(,flcxion devient n?,gligeable lorsque l '6paisseur de l '6ehantillon,

mono ou polycristallin, est faible devant la longueur d 'onde de la lumi6re:

le minimum de transmission se confond alors prat iquement avec vt. M~me darts ce cas, avec une couche de poudre dont les cristallites seraient assimi-

lables ~ des sph6rules, on n 'a t te in t pas la fr6quence v~, car sous l 'incidence normale, une couche mince se comporte comme un milieu massif s l '6gard

des ondes lumineuses transversales.

SUIt LES FIt]~QUENCES PROPItES DE VIBRATION DES CItISTAUX CUBIQUES 801

b) La dispersion de rd]raction se ru t tache ~ l 'absorpt ion par les formules connues de la thSorie des ~lectrons, compl~t4es, au besoin, par l ' introduction des intensit~s d'oscilluteurs. En dehors des r~gions d 'absorption, on a propos~ deux types de formules pour representer la contr ibut ion des diverses fr~quences d 'absorpt ion ~ l ' indice de r4fraction: soit la formule de Drude

(4) v~

n 2 - - 1 - - - - ~ . , 2 . 2~ i ~i - - ~

soit la formule de Loren tz

n ~ - 1 ~ Ci (5) n ~ + 2 - - , ~ v ~ - - ~"

Toutes deux se d~duisent de lu relat ion entre l ' indice de rSfruction et 1~ pola. risabilit~

(6) n 2 - 1 -- 4~w

et de l '6quution du mouvement forc4 des oscilluteurs atomiques. Muis le culcul qui conduit A lu premiere ne t ient pus compte explici tement du champ de pohrisut ion, tundis qu 'on purvient ~ lu seconde en introduisunt le champ isotrope E - - ~ u P , relutif uux ondes transversules.

On dolt donc s 'a t tendre ~ ce que v~ repr4sente duns (5) lu fr4quence propre v~ d 'un oscillateur isol~, v~ duns (4) 4tant au contraire identique ~ vs. Or, les formules (4) et (5) ont ~t4 utilis~es pour representer la dispersion de r~fraction des cristuux de C15Ta et de C1K [4]; les constuntes y ont ~t~ d~termin~es empi- r iquement , de fa~on ~ accorder uu mieux les formules avee les mesures jusque 22,5 ~. L'un des te rmes de ces formules est relatff ~ une fr~quence propre infra- rouge. On a uinsi pos~:

2 i pour C1Nu: 2 1 = 6 1 , 6 7 ~, 2~----45,759, d'ofi 2 ~ 0 ' 7 4 8 '

pour C1K: 2t = 70~23 ~, 2~ = 55,09 9~ d'ofi 2~ = 0~784.

La relat ion (2) donne d 'au t re par t , avec les donn~es prises duns [5]:

v2 = 0,747 pour C1Nu, vZ= 07,8~ pour C1K. ~s ~'s

On voit donc que l 'on peut a t te indre l~ fr~quence r~ par l ' a jus tement des const~ntes d 'une formuie de dispersion de Lorentz. Les mesures d 'absorption, post~rieures uu truvail [4], ont montr~ que la fr4queuce propre, d~termin~e

80L) J.-P. MATHIEU

~,orreetement, s ' accorde bien avee v~. Pour C1Na, par exemple, on a t rouv( ~

2 , = 61,1 a, pour C1K, 2t ~ 70,7 ~ [1].

Le plus souvent , ae tue l l cment , on utilise des formules de Drude , en p renan t pour v, la va leur exp~r imenta le de vt [13].

c) La re;Jlea'io~ s~lectire a des re la t ions simples avec les fr~quences r~, v~ et ~'z, l o r squ ' on fait cer ta ines approx imai ions .

Supposons qu'i l n ' y ait pas de fr(~quence d ' abso rp t ion inf~rieure ?~ eelle de

la bande infrarouge que nous considbrons. On peut alors repr6senter la dis-

pers ion au vois inage de ~,, par une formule d(~rivbe de (5):

(7) ~ + 2 - , ~ - 2 30,~-- v~) '

od no a la signification indiqube dans la re la t ion (1), C = Noe~/m (No 5tant

le nombre pa r uni t6 de vo lume d 'osci l la teurs de masse m e t de charge e )

et q'( dbsigne l ' indice de rbfrac t ion complexe, q-{ = n - - i k , off k est l ' indice

d 'qbsorp t ion .

0,5

"R

- - - j o

\ o.o,.; ~ , 1 v~ /v e 2

Fig. 2.

Le f ac t eu r de r~flexion R sous l ' ineiden(.e

normale est donn6 par la fo rmule :

()~ - - 1 ) 2 + k 2 (s) R = (~ + i ) ~ + 1~ "

N(tgligeons l ' amor t i s s emen t des osei l la teurs: l ' indiee c/-( est alors rbel et le p rodui t n ' k est

nul. Les var ia t ions de n, de k et de R sont re- pr(~sentb~es sur la fig. 2 en fonet ion du r appor t

v/yr. Darts ce cas sch~matique, la r6gion de

rbflexion to ta le (R = 1) est comprise en t re la f r6quenee off k = c% q - ( = c~,

qui est la f rbquence & a bso rp t i on m a x i m u m vt et eelle off k = n = 0, c/~ = 0, qui n ' e s t au t re que v~, car c~ = - - 1 / l n . La fo rmule (7) d o n n e :

l~t ~ P s - - ~ ~

2 c (.o ~ + 2) 2 2

Comme, d'aprOs les hypo thbses faites, c / 7 ~ s pour v ~+ 0, les re la t ions

(1), (2) et (3) sont v~rifi~es. Ce r ( ' sul ta t est d 'a i l leurs i n d @ e n d a n t de la valeur �89

du fae teur de Lorentz . E n pra t ique , les eourbes de r6flexion qu 'on observe sont moins simples

que eelle de la fig. 2, car l ' a m o r t i s s e m e n t n ' 6 t a n t jamMs nu], R n ' e s t jamais

8 U R L E S I ~ R ] ~ Q U E N C E S P R O P R E S D E V I B R A T I O N D E S C R I S T A U X C U B I Q U E S 8 0 3

~gal ~ l 'unit4. Mais comme v~ res te d5termin~e par lu condition n ~-- k, on

peut obtenir sa va leur pa r l ' in tersect ion des courbes qui repr4sentent n e t k en fonct ion de v. Pour calculer ces courbes, on chercher~ ~ ~juster les constantes d 'une formule de dispersion donnant c]7, de fa~on ~ r4pr~senter aussi bien que

possible le fac teur de r~flexion mesur~.

4. - Les re la t ions pr~c~dentes ont pu ~tre soumises au contrSle de Fexp~-

rience dans le cas des cr is tuux cubiques de blende SZn, pour lesquels on pos- s~de un nombre suffisant de donn4es exp~rimentales . La transmission, mesur~e

sur le produi t pulv~ris~, ava i t mont r~ un m i n i m u m ~ 303 em -~ [11]. Ces me- sures, qui pr~ta ient aux crit iques expos~es au w 3 a , o n t ~t5 reprises sur des

couches 4paisses d 'une f r ac t i on de micron, obtenues par ~vaporat ion dans le vide; on a t rouv4 v~ : 274 ~ 2 cm -~ [6].

La dispersion a 5t5 repr~sent~e pa r une formule du type (4) ~vec amor- t i s sement :

C

Darts la eons tan te C ~ (8--noS)v~, in te rv iennent les valeurs eonnues [1O]

de ~ - 8 , 3 et de n~ :5 ,07 . On a choisi, en outre, v~--~ 286 cm -1 et ]--~14 cm -1,

pour ealeuler lu courbe R de la fig. 3, qni re-

pr~sente convenablement les mesures [7]. On

en d~duit lu valeur de v~--~ 367 em -1 [6]. Les fr~quences ~t et vz sont, d ' au t r e

par t , donn~es par le spectre de diffusion du

cristal, car celui-ci est pi4zo~lectrique [9]; on a t rouv~ par cet te mdthode ~t---- ~-274 • 2 cm -1 et ~ ~ 349 =L 1 cm -1. Le rap-

por t de ces v a l e u r s satisf~it ~ la relat ion (1) [12]. L 'accord avec Uinfrarouge, excellent

pour v~, reste sat isfaisant pour vz, compte t enu de l ' incer t i tude qui affeete les mesures

Ruben5 ; x i ~ , i I!-

/ 11,

i ..'" , " , Z00

Fig. 3.

de r~flexion. L '4 tude de l ' absorp t ion infrarouge et des ph4nom~nes optiques qui en d~-

p.endent, aid4e darts certains cas pa r celle de l 'e f fe t R a m a n , pe rme t donc de dist inguer diverses fr~quences propres des cr is taux cubiques simples, de v~- rifler les re la t ion th4oriques qni exis tent entre elles et de d~terminer leurs

valeurs num~riques.

,~04 J.-P. MATtIIEU

R t~ F I~ R E N ( : E S

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