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Syndrome d’Ehlers-Danlos et dystonie. Effet positif de l’amantadine

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Page 1: Syndrome d’Ehlers-Danlos et dystonie. Effet positif de l’amantadine

Presse Med. 2014; //: /// en ligne sur / on line onwww.em-consulte.com/revue/lpmwww.sciencedirect.com

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Pour citer cet article : Hamonet C, Césaro P, Syndrome d’Ehlers-Danlos et dystonie. Effet positif de l’amantadine, Presse Med(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.12.017.

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Syndrome d’Ehlers-Danloset dystonie. Effet positifde l’amantadine

Ehlers-Danlos and dystonia. Positive effectsof amantadine

L’expérience, depuis 15 ans, d’une consultation très fréquentée(842 consultations durant l’année 2012) accueillant des per-sonnes avec un syndrome d’Ehlers-Danlos, nous a permisd’observer, à de nombreuses reprises, à côté de la symptoma-tologie habituelle dominée par les douleurs, les troubles pro-prioceptifs et la fatigue, des manifestations de dystonie, a priorisurprenantes dans un tel contexte.Nous rapportons ici une observation de syndrome d’Ehlers-Danlos de type hypermobile selon la classification de Villefran-che [1], avec une dystonie nettement améliorée par un trai-tement dopaminergique.

Observation

Il s’agissait d’une femme âgée de 31 ans qui avait dû arrêterson emploi de secrétaire en raison de son état clinique. Elle seplaignait de douleurs diffuses, d’instabilités articulaires et defatigue depuis l’âge de 6 ans, avec une accentuation nette dansles suites immédiates d’un traumatisme crânio-cervical à l’âgede 27 ans (chute d’une valise lourde sur le crâne, depuis leporte-bagage d’un train).L’ensemble des symptômes permettait de faire cliniquement (iln’y a pas de test génétique) le diagnostic de syndrome d’Ehlers-Danlos de type hypermobile selon les critères de la classifica-tion de Villefranche [1] : hypermobilité articulaire nette avec untest de Beighton à 7/9 ; peau étirable, fragile, très fine, laissantapparaître les réseaux veineux avec de nombreuses vergetures(en l’absence de grossesse) ; instabilité articulaire, d’origineproprioceptive, responsable de pseudo-entorses et de luxations(épaule droite, articulations temporo-mandibulaires). Le carac-tère familial du syndrome (ici la mère) permettait de mettre enévidence le caractère génétique de cette maladie autosomiqueà pénétrance variable.Ce tableau clinique caractéristique était complété par d’autresmanifestations, souvent observées [2] dans ce contexte : mala-dresse avec heurts de l’encadrement des portes, douleursdiffuses périarticulaires, musculaires, cutanées, abdominales,

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génitales, toutes cotées de 8 à 10 sur une échelle analogiquevisuelle, fatigue extrême, syndrome hémorragique, dysauto-nomie (frilosité, sudations abondantes, pseudo-syndrome deRaynaud), troubles digestifs (constipation, ballonnement abdo-minal, reflux gastro-oesophagien), dysurie alternant avec desurgenturies, hyperacousie, hyperosmie, fatigabilité visuelle.L’utérus était rétroversé. Il existait une dyspareunie. La patientesignalait des blocages respiratoires et une dyspnée, les plaintescognitives étaient importantes (mémoire de travail, attention,orientation dans l’espace).À ce tableau clinique, déjà riche, s’ajoutaient des manifesta-tions motrices évocatrices d’un syndrome dystonique. Il s’agis-sait de secousses musculaires involontaires brusques desépaules, de décharges motrices des membres supérieurs(lâchage d’objets) et des membres inférieurs. La patientedéclarait qu’elle ne marchait pratiquement plus du fait desdouleurs intenses et de la fatigue, que ses mains tremblaient etqu’elle lâchait les objets.Un traitement par amantadine était démarré. La posologie étaitaugmentée progressivement (100 mg/jour avec des paliers de100 mg chaque semaine, jusqu’à 400 mg/jour). Les effetspositifs sont apparus à partir de la quatrième semaine : dis-parition presque totale du tremblement des mains, absence delâchage d’objets, nette diminution de la fatigue, augmentationdu périmètre de marche, possibilité de sortir de chez elle,sensation de mieux-être.

Discussion

Les connaissances des médecins sur le syndrome d’Ehlers-Danlos sont peu importantes, se réduisant habituellement àdeux symptômes cliniques [3] : l’hypermobilité articulaire etl’étirabilité cutanée excessive. Ces signes peuvent être absents,surtout le second, ou bien, pour le premier, disparaître avec l’âgeou lors de l’installation de rétractions musculo-tendineuses quifont aussi partie du tableau clinique et surviennent parfois dèsl’enfance. Les autres manifestations, les plus génératrices desituations de handicap (fatigue, douleurs, troubles proprioceptifsmais aussi digestifs, bucco-dentaires, respiratoires, dysautono-miques, gynéco-obstétricaux, ORL, visuels, cognitifs. . .), sontpresque systématiquement rattachées à d’autres pathologies :fibromyalgie, spondylarthrite ankylosante, polyarthrite, asthme,colopathies diverses, Gougerot-Sjögren, sclérose en plaques,dystrophie musculaire, Hashimoto mais, surtout, devant la néga-tivité des examens complémentaires et l’échec des traitements,à un état psychopathologique. Une enquête effectuée auprès de

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Pour citer cet article : Hamonet C, Césaro P, Syndrome d’Ehlers-Danlos et dystonie. Effet positif de l’amantadine, Presse Med(2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.12.017.

Lettre à la rédaction

55 personnes atteintes d’un syndrome d’Ehlers-Danlos, ayantdéposé un dossier à la Maison départementale des personneshandicapées (MDPH) de l’Essonne a montré que ce diagnosticn’était jamais évoqué alors que la fibromyalgie l’avait été45 fois [4].Cette séméiologie, déjà fournie [2], s’enrichit de deux typesde manifestations : la dysautonomie et la dystonie qui fontpartie du syndrome. La dysautonomie a été mise en valeurpar J.-F. Bravo [5] au Premier symposium international sur lesyndrome d’Ehlers-Danlos, en septembre 2012. Elle est quasiconstante [2,5]. La dystonie s’exprime moins nettement si l’onécarte certaines grandes crises toniques pseudo épileptiques.Elle est parfois difficile à démêler des troubles proprioceptifs.Les tremblements d’action, ou de maintien, les mouvementsmusculaires brusques, les « jambes sans repos », les crampesdes extrémités, les myoclonies (visage, cuisses), sont lesmanifestations les plus courantes. Elle peut être responsablede douleurs (chevilles, genoux), mais aussi de luxations (épaulesurtout).L’origine de ces manifestations dans le syndrome d’Ehlers-Danlos reste hypothétique : rôle des troubles proprioceptifs ?Rôle du déficit en fer avec effet sur l’activité de la dopamine ?Elles sont pourtant présentes, confortant le diagnostic desyndrome d’Ehlers-Danlos. Elles permettent d’expliquer cer-tains points de séméiologie et ouvrent, possiblement, unenouvelle voie thérapeutique dans un syndrome qui en estencore démuni.

Conclusion

Le syndrome d’Ehlers-Danlos reste majoritairement méconnudes médecins qui l’ont généralement restreint à une descrip-tion cutanée, articulaire et, plus récemment, artérielle [6], alorsque ses modalités d’expression cliniques sont très variéescomportant, notamment, des manifestations dystoniques.Ces dernières contribuent à la symptomatologie souvent trèshandicapante, et sont accessibles à des traitements spécifiques.

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflitsd’intérêts en relation avec cet article.

Références[1] Beighton P, De Paepe A, Steinmann B, Tsipouras P, Wenstrup RJ. Ehlers-

Danlos syndromes: revised nosology, Villefranche, 1997. Ehlers-DanlosNational Foundation (USA) and Ehlers-Danlos Support Group (UK). Am JMed Genet 1998;77:31-7.

[2] Hamonet C, Ravaud P, Villeneuve S, Gompel A, Serre A, Fredy D et al.Ehlers-Danlos syndrome (about 664 cases). Statistical analysis of clinicalsigns from 644 patients with a Beighton scale � 4/9. In: Abstracts bookof First international Symposium on the Ehlers-Danlos syndrome. Ghent,Belgium. 2012;114.

[3] McMusick V. Heritable disorders of connective tissues, 3rd ed., Saint-Louis: The CV Mosby Company; 1966.

[4] Trabelsi N, Hamonet C. Contribution à l’épidémiologie du syndromed’Ehlers-Danlos. J Readapt Med 2012;32:51-5.

[5] Bravo JF. Dysautonomia and osteoporosis in 1751 hypermobile EDSpatients. In: First Symposium on the Ehlers-Danlos Syndrome; 2012.p.101.

[6] Franck M. Syndrome d’Ehlers Danlos vasculaire. Rev Prat 2009;59:461-9.

Claude Hamonet1,2, Pierre Césaro1,3,4

1Faculté de médecine de Créteil (UPEC), 94010 Créteil, France2Hôpital Hôtel-Dieu de Paris, service de médecine physique et

réadaptation, consultation Ehlers-Danlos,75128 Paris cedex 04, France

3Hôpital Henri-Mondor, service de neurologie,94010 Créteil, France

Correspondance : Claude Hamonet, Hôpital Hôtel-Dieu de Paris,service de médecine physique et réadaptation, consultation

Ehlers-Danlos, 1, place du parvis Notre-Dame, 75128 Pariscedex 04, France.

4Auteur décédé[email protected]

Reçu le 9 septembre 2013Accepté le 17 décembre 2013

http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.12.017� 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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