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1 ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AU MAROC SYNTHÈSE D’UNE ÉTUDE SUR LA COMMUNICATION 1 Par Souad AZIZI, Abdelbaki BELFKIH et Abdelkrim SAA Au terme de cette étude de la communication au sein de l’enseignement supérieur au Maroc, nous avons recensé un ensemble d’éléments positifs, mais aussi des défaillances que nous pouvons classer en deux grandes catégories : des défaillances structurelles et des défaillances organisationnelles. I. Définition des catégories de défaillances 1. Les défaillances structurelles Les défaillances structurelles sont ces effets négatifs qui résultent : du système administratif, à savoir la structure hiérarchique, linéaire et bureaucratique ; de l’effet pervers de la décentralisation, en l’occurrence la recentralisation du pouvoir de communication et d’information au niveau de la Présidence. 2. Les défaillances organisationnelles Les défaillances organisationnelles sont ces effets négatifs qui résultent du manque d’organisation originel et l’absence d’implication des acteurs concernés, dont souffrent : la gestion quotidienne de la communication administrative ; les actions de réforme majeures du Ministère ; les actions de communication stratégique ; les instances de communication et d’information générées par la réforme. II. État des lieux de la communication administrative 1. Trois catégories de défaillances structurelles Les principales défaillances structurelles recensées, ici, peuvent être classées en trois catégories : 1.1. Les défaillances relevant de la circulation des messages, informations et directives sur l’axe hiérarchique et linéaire de l’organisation, à savoir le 1 Étude réalisée par une équipe de consultants, enseignants chercheurs à l’université Hassan II, Mohammedia-Casablanca : Samira AMMOR, Abdelbaki BELFKIH Jawad BENNIS, Rachida BOUZIDI, Hakima LAALA, Abdelfattah MAKOUAR et Abdelkrim SAA.

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Etude sur la communication au sein de l'enseignement supérieur au Maroc. 2006

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Page 1: Synthèse étude communication E.S.M

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ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AU MAROC

SYNTHÈSE D’UNE ÉTUDE SUR LA COMMUNICATION1

Par Souad AZIZI, Abdelbaki BELFKIH et Abdelkrim SAA

Au terme de cette étude de la communication au sein de l’enseignement supérieur au Maroc, nous avons recensé un ensemble d’éléments positifs, mais aussi des défaillances que nous pouvons classer en deux grandes catégories : des défaillances structurelles et des défaillances organisationnelles.

I. Définition des catégories de défaillances

1. Les défaillances structurelles

Les défaillances structurelles sont ces effets négatifs qui résultent :• du système administratif, à savoir la structure hiérarchique, linéaire et

bureaucratique ;• de l’effet pervers de la décentralisation, en l’occurrence la

recentralisation du pouvoir de communication et d’information au niveau de la Présidence.

2. Les défaillances organisationnelles

Les défaillances organisationnelles sont ces effets négatifs qui résultent du manque d’organisation originel et l’absence d’implication des acteurs concernés, dont souffrent :

• la gestion quotidienne de la communication administrative ;• les actions de réforme majeures du Ministère ;• les actions de communication stratégique ;• les instances de communication et d’information générées par la

réforme.

II. État des lieux de la communication administrative

1. Trois catégories de défaillances structurelles

Les principales défaillances structurelles recensées, ici, peuvent être classées en trois catégories :

1.1. Les défaillances relevant de la circulation des messages, informations et directives sur l’axe hiérarchique et linéaire de l’organisation, à savoir le

1.  Étude réalisée par une équipe de consultants, enseignants chercheurs à l’université Hassan II, Mohammedia-Casablanca : Samira AMMOR, Abdelbaki BELFKIH Jawad BENNIS, Rachida BOUZIDI, Hakima LAALA, Abdelfattah MAKOUAR et Abdelkrim SAA.

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manque de coordination entre les différents relais de la communication verticales, la complexité des procédures, les retards importants dans la transmission des informations et des directives, et l’absence de feed-back rapide dans les deux sens de l’axe.

1.2. Les défaillances relevant de l’absence d’une communication horizontale, à tous les niveaux de l’enseignement supérieur :

• à la base de l’établissement, entre étudiants, enseignants et personnel administratif, entre départements ;

• à l’échelle de l’université, entre établissements et entre universités ;• au niveau de l’administration centrale, entre les directions de chaque

département, mais aussi entre les deux départements (éducation nationale et enseignement supérieur) ;

• à l’échelon supérieur, entre le Ministère de l’enseignement et les Ministères de Finances et de l’Emploi notamment.

1.3. Les défaillances liées au monopole et contrôle exercés par la Présidence sur la communication interne et externe de l’Université.

2. Défaillances organisationnelles de la communication administrative• la communication administrative se bricole au jour le jour, au coup par

coup ;• elle souffre d’un manque de professionnalisme caractérisé et de la

permanence de la culture de l’oralité et de l’improvisation ;• elle est marquée par le recours à un mode de communication

« coutumière » qui repose essentiellement sur le bouche à oreille et les relations interpersonnelles.

III. Etat des lieux de la communication de la réforme

En ce qui concerne la communication de la réforme, le constat auquel nous mènent les résultats de l’étude est le suivant :

1. Défaillances organisationnelles originelles de la communication de la réforme

Il ressort des évaluations faites de la communication de la réforme que c’est dans sa conception originelle que réside un certain flou quant :

• aux attributions et responsabilités de ses acteurs2 ;• à son cadre institutionnel3

2. La dynamique communicationnelle de la réforme

2. En effet, le texte de loi 01-00 ne comporte aucune disposition relative aux acteurs de la communication de la réforme, à leurs éventuels rôles et attributions.3. Ainsi, aucune commission de communication n’a de place dans ce texte.

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Bien qu’aucun cadre institutionnel n’ait été prédéfinit, la réforme elle-même a généré, dans le processus de sa mise en œuvre, une dynamique communicationnelle inédite. Dynamique qui se traduit par la création « sur le vif » de nouvelles instances d’information, de communication et de coordination.

Cependant, ces nouvelles instances, en dépit de leur contribution à la communicationnelle de la réforme, sont-elles tributaires de la prépondérance et permanence de la culture de l’oralité et de l’improvisation.

3. Échec des actions de sensibilisation

Par ailleurs, la communication de la réforme a échoué à susciter l’adhésion des acteurs. Les facteurs explicatifs avancés à ce sujet étant :

• l’insuffisance et le manque d’organisation des actions d’information et de sensibilisation ;

• le manque d’implication des acteurs, tant dans la conception de la réforme que dans sa mise en œuvre.

IV. La décentralisation : facteur favorable et non favorable

L’évaluation de l’état actuel de la décentralisation montre que les raisons pour lesquelles elle peut constituer à la fois un facteur favorable et non favorable à la communication sont les suivants :

1. Facteur de rayonnement externe de l’Université

Avec la décentralisation, l’université devient un pôle de communication externe, de par les nouvelles dispositions de la loi 01.00 qui accordent au Président de l’université le rôle et les attributions d’interlocuteur direct des partenaires extra-universitaires, nationaux et internationaux4.

2. Facteur de recentralisation du pouvoir de communication et amoindrissement du pouvoir des chefs d’établissement et de département

Dans la réalité, la Présidence, de par ses nouvelles fonctions d’interlocuteur externe, monopolise et contrôle toutes les actions de communication.

En effet, il résulte de ce déplacement de l’autorité du ministère à la Présidence, un amoindrissement du pouvoir de communication externe des chefs d’établissement et de département.

La décentralisation se traduit donc par une recentralisation de la gestion de la communication au niveau de la présidence.

V. La communication stratégique du Ministère

1. Large méconnaissance des actions du Ministère

4. Voir notamment l’article 16 de la dite loi.

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A l’exception des forums, les actions de communication du Ministère sont largement méconnues, voire arbitrairement méjugées par le public même auxquelles elles s’adressent.

2. Le forum : une formule réussie mais à consolider

Le forum, seule formule qui permet véritablement d’attirer des acteurs sur la communication stratégique du Ministère, présente à la fois des aspects positifs et négatifs.

2.1. Aspects favorables à la communication• ils touchent un public très large ;• ils permettent un contact direct entre les acteurs universitaires et le

personnel du Ministère.

2.2. Défaillance d’ordre organisationnel• il n’y a pas assez ou pas du tout d’implication des acteurs concernés

dans l’organisation des forums ;• ces rencontres ne permettent d’avoir de véritables échanges ; et ce en

raison de leurs modalités d’organisation et d’encadrement qui se font sur la formule de la foire.

VI. Attentes et besoins

Les attentes en matière de communication peuvent être classées selon quatre catégories principales : des changements d’ordre organisationnel, une plus grande professionnalisation de la communication, la consolidation de certains outils de gestion et de communication, et l’allocation de budget « spécial communication ».

1. Changements organisationnels

Dans ce domaine, les changements attendus sont :• l’établissement d’une communication directe entre l’administration

centrale et les chefs d’établissement ;• le renforcement de la communication et de la coordination entre les

présidents d’université et le département de l’éducation nationale ;• le développement de la communication horizontale entre les

départements de même statut, à l’échelle de l’enseignement supérieur • une plus grande communication externe avec les partenaires socio-

économiques et internationaux.

2. Une plus grande professionnalisation de la communication

Ces attentes concernent les besoins suivants :

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2.1. La formation et le développement des compétences humaines en communication • en dotant les établissements en professionnels de la communication et

relations externes, pour assurer l’ouverture sur l’environnement et la coordination avec les partenaires socio-économiques ;

• en organisant des formations en communication au profit des acteurs de la réforme (enseignants, délégués d’étudiants, personnel administratif, etc.).

2.2. La création d’instances de communicationConcernant ce besoin, il s’agit :

• de la création de cellules de communication interne, à l’échelle de tous les établissements ;

• du développement de convention avec les partenaires externes ;• du développement de stratégies de communication au niveau des

présidences et des établissements, de l’organisation de compagnes audiovisuelles et de forums.

3. Consolidation de certains outils de gestion et de communication

3.1. Les NTICLa généralisation et la consolidation institutionnelles des NTIC sont attendues par une majorité des acteurs comme un moyen sûr de relever les défis de la réforme et d’alléger le système de communication de l’enseignement supérieur des lourdeurs des outils de communications classiques.

Dans ce domaine, les besoins exprimés sont :• l’extension de l’usage de l’email au courrier administratif ;• la création d’un annuaire national des emails de tout le personnel

enseignant ;• la généralisation de l’usage des sites web à toutes les universités et

établissements du supérieur, et leur consolidation comme moyen de communication et d’information instantanée sur les cursus, formations activités pédagogiques, culturelles et scientifiques.

En somme, la généralisation de la communication virtuelle en temps réel est attendue comme un palliatif aux limites de la communication classique.

3.2. La réunionLes attentes concernent essentiellement des moyens de gestion qui permettent une organisation plus rationnelle et professionnelle de cet outil de gestion.

Malgré les défaillances relatives à sa sujétion aux aléas d’une communication « coutumière et improvisée », la réunion est le lieu où s’exprime les besoins de connaissance des différents acteurs, mais aussi l’outil qui suscite le mieux le sentiment d’appartenance à un groupe, à un port d’attache, et par suite le plus à même de développer motivation et adhésion des acteurs.4. L’allocation d’un budget « spécial communication »

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Enfin, la principale attente est la procuration de plus de moyens budgétaires, spécifiquement alloués au développement d’une véritable culture de communication.