5
Traitement des métastases cérébrales des CBNPC The treatment of NSCLC brain metastases E. Noël-Savina 1 , R. Descourt 1 , E. Le Fur 2 , G. Robinet 1 1 Unité doncologie thoracique, institut de cancérologie et dhématologie, CHU de Brest, F-29200 Brest, France 2 Service de radiothérapie, institut de cancérologie et dhématologie, CHU de Brest, F-29200 Brest, France Reçu le 16 novembre 2011 ; accepté le 2 avril 2012 Abstract: Brain metastasis is a ve- ry common complication of lung cancer. Therapeutic methods in- clude surgery, radiotherapy, and systemic therapies including che- motherapy and molecular thera- pies. The main question is the most relevant use of these thera- pies, which is still not determined. It depends on many factors such as the control of the lung disease, the patients general state, and the number of metastases. As a result, the decision needs a coordinated and multidisciplinary team ap- proach. Keywords: Lung cancer Brain metastasis Treatment Surgery Radiosurgery Radiotherapy Chemotherapy Résumé : Les métastases cérébra- les sont une complication fréquente des cancers broncho-pulmonaires. Larsenal thérapeutique à disposi- tion du clinicien comprend la chirur- gie, la radiochirurgie, la radiothéra- pie et les traitements systémiques (la chimiothérapie et thérapeu- tiques ciblées), mais les séquences thérapeutiques restent à préciser. Les indications thérapeutiques sont très variables et dépendantes du contrôle de la maladie thoracique, de létat général du patient, du nom- bre de métastases cérébrales et de la symptomatologie. La décision thérapeutique nécessite toujours une discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire. Mots clés : Cancer bronchopulmo- naire Métastases cérébrales Traitement Chirurgie Radiochi- rurgie Radiothérapie Chimiothé- rapie Introduction La découverte de métastases céré- brales (MC) conduit dans 50 % des cas au diagnostic de cancer bron- chopulmonaire (CBP) primitif. Si un quart de ces atteintes cérébrales sont uniques au scanner réalisé avec injection, lIRM va rectifier le diagnostic en dépistant dautres métastases dans 31 % des cas [21]. Près de 30 % des CBNPC (cancers bronchiques non à petites cellules) et principalement les adénocarci- nomes, ont une atteinte métasta- tique cérébrale au cours de leur évo- lution clinique et près de 50 % àlautopsie. Il sagit donc dune complication fréquente, mais égale- ment grave : la médiane de survie dun patient atteint dun CBP méta- statique au cerveau est en labsence de traitement denviron 1 mois. La mise en place dun traitement par radiothérapie externe de type encé- phale in toto ou irradiation pan- cérébrale (IPC) et lutilisation des corticoïdes prolonge cette survie à environ 4 mois. Différents moyens de prise en charge sont à la disposi- tion du clinicien quils soient loco-régionaux (de la chirurgie à la radiothérapie sélective ou sur lencéphale en totalité) ou généraux reposant alors sur la chimiothé- rapie. Compte-tenu du pronostic sombre lié à la découverte de MC, la décision thérapeutique ne peut se prendre quen considérant la mala- die néoplasique et le malade dans son ensemble au moyen de quel- ques questions: parle-t-on de méta- stases cérébrales uniques ou multi- ples ? Sont-elles symptomatiques ? Y a-t-il contrôle de la maladie extra- cérébrale ? Létat général du patient est-il compatible avec un traitement chirurgical ou systémique ? Pour saider dans la décision thérapeutique, il existe également différentes échelles pronostiques. Celle du RTOG (RPA : Recursive Par- tioning Analysis) est la plus utilisée. Elle permet de classer les patients porteurs de MC en 3 catégories avec une survie médiane dépen- dante de la classe, afin de décider de la meilleure prise en charge thérapeutique (Tableau 1) [7]. Les patients classés dans les groupes à meilleur pronostic sont potentielle- ment susceptibles de recevoir des traitements plus agressifs sur leurs MC tels quune chirurgie ou une radiochirurgie. Malheureusement plus de 50 % des patients atteints dun CBNPC sont classés dans la catégorie 3 de la RPA. Nieder et al. ont évalué différents scores pronos- tics dans une population non sélec- tionnée de patients atteints dun CBNPC et ont conclu que le GPA score (basé sur lâge, le KPS, le nom- bre de MC et la présence de méta- stases extra cérébrales) serait le plus adapté à cette population [15]. Moyens thérapeutiques Traitements locorégionaux Lexérèse chirurgicale [23] de MC est une possibilité thérapeutique rendue plus facilement envisa- geable grâce à lamélioration des Correspondance : [email protected] Mise au point Update Oncologie (2012) 14: 305309 © Springer-Verlag France 2012 DOI 10.1007/s10269-012-2157-6 305

Traitement des métastases cérébrales des CBNPC

Embed Size (px)

Citation preview

Traitement des métastases cérébrales des CBNPC

The treatment of NSCLC brain metastasesE. Noël-Savina1, R. Descourt1, E. Le Fur2, G. Robinet1

1Unité d’oncologie thoracique, institut de cancérologie et d’hématologie, CHU de Brest, F-29200 Brest, France2Service de radiothérapie, institut de cancérologie et d’hématologie, CHU de Brest, F-29200 Brest, France

Reçu le 16 novembre 2011 ; accepté le 2 avril 2012

Abstract: Brain metastasis is a ve-

ry common complication of lung

cancer. Therapeutic methods in-

clude surgery, radiotherapy, and

systemic therapies including che-

motherapy and molecular thera-

pies. The main question is the

most relevant use of these thera-

pies, which is still not determined.

It depends on many factors such

as the control of the lung disease,

the patient’s general state, and the

number of metastases. As a result,

the decision needs a coordinated

and multidisciplinary team ap-

proach.

Keywords: Lung cancer – Brain

metastasis – Treatment – Surgery –

Radiosurgery – Radiotherapy –

Chemotherapy

Résumé : Les métastases cérébra-

les sont une complication fréquente

des cancers broncho-pulmonaires.

L’arsenal thérapeutique à disposi-

tion du clinicien comprend la chirur-

gie, la radiochirurgie, la radiothéra-

pie et les traitements systémiques

(la chimiothérapie et thérapeu-

tiques ciblées), mais les séquences

thérapeutiques restent à préciser.

Les indications thérapeutiques sont

très variables et dépendantes du

contrôle de la maladie thoracique,

de l’état général dupatient, dunom-

bre de métastases cérébrales et de

la symptomatologie. La décision

thérapeutique nécessite toujours

une discussion en réunion de

concertation pluridisciplinaire.

Mots clés : Cancer bronchopulmo-

naire – Métastases cérébrales –

Traitement – Chirurgie – Radiochi-

rurgie – Radiothérapie – Chimiothé-

rapie

Introduction

La découverte de métastases céré-

brales (MC) conduit dans 50 % des

cas au diagnostic de cancer bron-

chopulmonaire (CBP) primitif. Si un

quart de ces atteintes cérébrales

sont uniques au scanner réalisé

avec injection, l’IRM va rectifier le

diagnostic en dépistant d’autres

métastases dans 31 % des cas [21].

Près de 30 % des CBNPC (cancers

bronchiques non à petites cellules)

et principalement les adénocarci-

nomes, ont une atteinte métasta-

tique cérébrale au cours de leur évo-

lution clinique et près de 50 %

à l’autopsie. Il s’agit donc d’une

complication fréquente, mais égale-

ment grave : la médiane de survie

d’un patient atteint d’un CBP méta-

statique au cerveau est en l’absence

de traitement d’environ 1 mois. La

mise en place d’un traitement par

radiothérapie externe de type encé-

phale in toto ou irradiation pan-

cérébrale (IPC) et l’utilisation des

corticoïdes prolonge cette survie à

environ 4 mois. Différents moyens

de prise en charge sont à la disposi-

tion du clinicien qu’ils soient

loco-régionaux (de la chirurgie à

la radiothérapie sélective ou sur

l’encéphale en totalité) ou généraux

reposant alors sur la chimiothé-

rapie. Compte-tenu du pronostic

sombre lié à la découverte de MC,

la décision thérapeutique ne peut se

prendre qu’en considérant la mala-

die néoplasique et le malade dans

son ensemble au moyen de quel-

ques questions: parle-t-on de méta-

stases cérébrales uniques ou multi-

ples ? Sont-elles symptomatiques ?

Y a-t-il contrôle de la maladie extra-

cérébrale ? L’état général du patient

est-il compatible avec un traitement

chirurgical ou systémique ?

Pour s’aider dans la décision

thérapeutique, il existe également

différentes échelles pronostiques.

Celle duRTOG (RPA : Recursive Par-

tioning Analysis) est la plus utilisée.

Elle permet de classer les patients

porteurs de MC en 3 catégories

avec une survie médiane dépen-

dante de la classe, afin de décider

de la meilleure prise en charge

thérapeutique (Tableau 1) [7]. Les

patients classés dans les groupes à

meilleur pronostic sont potentielle-

ment susceptibles de recevoir des

traitements plus agressifs sur leurs

MC tels qu’une chirurgie ou une

radiochirurgie. Malheureusement

plus de 50 % des patients atteints

d’un CBNPC sont classés dans la

catégorie 3 de la RPA. Nieder et al.

ont évalué différents scores pronos-

tics dans une population non sélec-

tionnée de patients atteints d’un

CBNPC et ont conclu que le GPA

score (basé sur l’âge, leKPS, le nom-

bre de MC et la présence de méta-

stases extra cérébrales) serait le plus

adapté à cette population [15].

Moyens thérapeutiques

Traitements locorégionaux

L’exérèse chirurgicale [23] de MC

est une possibilité thérapeutique

rendue plus facilement envisa-

geable grâce à l’amélioration desCorrespondance : [email protected]

Miseaupoint

Update

■Oncologie (2012) 14: 305–309© Springer-Verlag France 2012DOI 10.1007/s10269-012-2157-6

305

techniques chirurgicales et de

neuro-anesthésie qui ont permis

une diminution de la morbi-

mortalité. La décision de métasta-

sectomie cérébrale dépend des

caractéristiques de la tumeur. Inter-

viennent ainsi dans la discussion le

nombre et de la localisation des

MC (≤ 3 en général, situé(es) en

zone non-fonctionnelle, sans risque

de paralysie séquellaire post-

opératoire). Il faut également tenir

compte de l’histologie du primitif,

du caractère contrôlé ou non de la

maladie extra-cérébrale (espérance

de vie > 3mois), et de l’intervalle de

temps entre la découverte de la MC

et celle du primitif. Le patient, lui,

doit être également en bon état

général (âge et KPS) sans comorbi-

dité cardio-vasculaire ou respira-

toire majeure contre-indiquant une

anesthésie générale. Cette chirurgie

a plusieurs avantages : lorsque le

patient présente une MC de primitif

inconnu, elle permet de confirmer

la nature cancéreuse et métasta-

tique de la lésion, elle élimine des

diagnostics différentiels tels qu’un

abcès, une tumeur primitive ou

une radionécrose secondaire à une

irradiation préalable et elle permet

un contrôle local de la maladie en

soulageant les symptômesd’hyper-

tension intracrânienne et en rédui-

sant les déficits neurologiques ou le

risque convulsif.

La radiochirurgie [14] est un trai-

tement local alternatif. Il s’agit d’une

procédurenon chirurgicale dehaute

précision qui permet d’irradier à

dose unique élevée des cibles intra-

cérébrales définies par une image-

rie. L’irradiation se fait soit par un

GammaKnifeutilisant 201 faisceaux

de rayons issus de multiples sour-

ces de Cobalt 60 radioactif haute-

ment focalisés sur la lésion, soit

par un accélérateur linéaire utilisant

des photons. Elle se déroule en une

seule séance sans anesthésie géné-

rale, et permet ainsi de traiter des

patients plus âgés et avec des co-

morbidités. De plus, elle permet de

traiter des lésions profondes non

accessibles à la résection. Par

contre, les lésions doivent être

préférentiellement ≤ à 3 avec une

taille ≤ 3 cm. De même, les lésions

nécessitant une confirmation histo-

logique ou compliquées d’un

œdème important se prêtent plus à

un traitement chirurgical (fosse

postérieure). La toxicité neurocogni-

tive de la radiochirurgie est faible si

la technique est utilisée seule. Des

cas de radionécrose sont décrits

dans 1 à 5 % des cas.

Une autre technique proche est

la radiothérapie hypofractionnée

en conditions stéréotaxiques [22].

L’irradiation sedéroule en3 à 5 frac-

tions sur 1 à 2 semaines de traite-

ment, avec 5 à 9 Gy par séance. Le

fractionnement et l’étalement opti-

maux ne sont pas connus. Lorsque

les volumes tumoraux ont un dia-

mètre supérieur à 20 mm, cette

technique apparaît préférable à la

radiochirurgie. Le taux de survie

médian à un an est égal à la radio-

chirurgie et est de 80 à 85 %.

Parmi les traitements locorégio-

naux, le plus fréquemment utilisé et

celui considéré dans la littérature

comme étant la référence est l’IPC.

Elle consiste en l’irradiation frac-

tionnée par deux faisceaux latéraux

opposés. Le traitement standard

délivreunedosede30Gyen10 frac-

tions. Le contrôle local à 6 mois

est de 50 % et approche les 0 % à

1 an [12]. Des effets secondaires

peuvent apparaître dans les pre-

mières semaines et sont alors

liés à un œdème réactionnel, res-

ponsable d’hypertension intracrâ-

nienne. Ces complications aiguës

régressent sous corticothérapie.

En subaigu, c’est-à-dire de 1 à 6

mois après la fin de la radiothéra-

pie, des symptômes liés à ladémyé-

linisation tels que des céphalées,

une somnolence et une fatigabilité

peuvent se présenter et régressent

en quelques mois. Au-delà de

6 mois, les principaux effets secon-

daires consistent en des troubles

neurocognitifs irréversibles, princi-

palement des troubles de la

mémoire conduisant dans 2 à 5 %

des cas vers une démence [10].

Traitement général

Le principal est la chimiothérapie

qui a un intérêt majeur : elle permet

le traitement simultané de la locali-

sation cérébrale et de la maladie

systémique. L’efficacité locale est

en théorie diminuée par la barrière

hémato-méningée limitant la péné-

tration des cytotoxiques dans le

parenchyme encéphalique, mais

plusieurs chimiothérapies ontmon-

tré une efficacité chez les patients

atteints d’un CBNPC compliqué de

MC, bien que cette population soit

souvent exclue des études : gemci-

tabine et carboplatine, cisplatine et

vinorelbine, pemetrexed et cispla-

tine. L’erlotinib et le gefitinib sem-

blent également induire des répon-

ses radiologiques. La plupart de ces

études conduites sont des études

de phase II mais qui suggèrent des

réponses cérébrales aux chimiothé-

rapies similaires à celles d’autres

sites métastatiques.

Tableau 1. Échelle pronostique du RTOG (RPA : Recursive Partioning Analysis) [2].?

Classe Classe 1 Classe 2 Classe 3Critères index de karnosky ≥ 70 % (KPS), âge ≤65 ans,

maladie primitive contrôlée et absencede métastase extra-crânienne

KPS ≥ 70 %, ± âge ≥ 65 ans, ± unemaladie primitive contrôlée, ± unemétastase extra-crânienne

KPS < 70 %

Médiane de survieMétastase cérébraleunique

13,5 mois 8,1 mois 2,3 mois

Métastasescérébrales multiples

6 mois 4,1 mois

Dossier

Them

atic

file

306

Le traitement symptomatique

des MC est valable pour tous les

patients dès lors qu’il présente des

symptômes tels que douleur,

convulsion, déficit neurologique,

signes d’hypertension intracrâ-

nienne. Ces traitements comportent

des antalgiques, corticoïdes, man-

nitol, nursing.

Les options thérapeutiques

en fonction des différentes

présentations cliniques

dans les CBNPC

En cas de MC multiples

Le traitement de référence est l’IPC

avec une prolongation de la

médiane de survie globale 4 à

6 mois [26]. La chirurgie ne peut

s’envisager dans ce contexte que

lorsqu’une lésion métastatique

cérébrale engage le pronostic vital

à court terme. La question essen-

tielle est la place du traitement sys-

témique (chimiothérapie ou théra-

pie ciblée) et son « articulation »

avec la radiothérapie.

Concernant l’IPC, le schéma de

traitement classiquement retenu

délivre unedosede30Gyen 10 frac-

tions. Il n’a pas actuellement été

démontré que l’addition d’un agent

radio-sensibilisant (notamment le

motexafine-gadolinium) [13] était

bénéfique sur la survie globale.

Chez le patient de plus de 65 ans, le

schémahabituelpourraitêtreallégé.

Rades et al. ont mis en évidence

dans une étude rétrospective, une

non-infériorité du schéma 20 Gy en

5 fractions par rapport au traitement

de référence de 30Gy : la survie glo-

bale à 6 mois était de 29 % (20 Gy)

contre 21 % (30 Gy) (p=0,020) et un

contrôle cérébral à 6 mois de 12 %

contre 10 % (p=0,32) [18].

Pour ce qui est des traitements

systémiques, malgré le dogme de

la barrière hémato-encéphalique

et de son « impénétrabilité », les

essais de chimiothérapie ont

prouvé son efficacité dans cette

indication deMCmultiples et l’exis-

tence même de cette barrière,

basée sur de faibles données scien-

tifiques, est remise en question. Les

associations cisplatine avec le pacli-

taxel, la vinorelbine, le gemcitabine,

l’ifosfamide ou encore l’étoposide

permettent de rapporter des taux

de réponses cérébrales (complètes

et partielles) de 30 à 45% [27]. Edel-

man et al ont revu de façon rétro-

spective les résultats d’un essai de

phase III randomisé comparant les

associations gemcitabine-carbopla-

tine, gemcitabine-paclitaxel ou

paclitaxel-carboplatine afin d’étu-

dier les réponses dans les sous

groupes de patients porteurs de

MC : aucune différence n’était mise

en évidence sur le taux de réponse

et la survie entre les patients méta-

statiques sur le plan cérébral et ceux

indemnes de MC [6]. Plus récem-

ment, Barlesi et al. ont mis en évi-

dence, dans une étude de phase II

(GFPC 07-01) chez des patients

atteints d’un CBNPC présentant

des MC asymptomatiques, une effi-

cacité de l’association cisplatine-

pemetrexed avec un bon contrôle

cérébral, une survie globale de

7,4mois et une survie sans progres-

sion de 4 mois associé à une bonne

tolérance du traitement [4]. Cette

étude devrait se prolonger par la

mise en place d’un essai de Phase

III randomisée multicentrique. Cet

essai comparera une radiothérapie

cérébrale suivie d’une chimiothé-

rapie (par sel de platine plus peme-

trexed en première ligne puis peme-

trexed en maintenance) à une

chimiothérapie seule (par sel de pla-

tine plus pemetrexed en première

ligne suivi de pemetrexed en main-

tenance) chez des patients ayant un

CBNPC non épidermoïde avec MC

asymptomatiques. L’objectif princi-

pal sera dedéterminer si la radiothé-

rapie cérébrale doit être effectuée

systématiquement chez tous les

patients ou uniquement chez ceux

présentant une progression céré-

brale clinique ou radiologique.

Cette question de l’articulation de

la chimiothérapie avec l’IPC a déjà

été envisagée dans un essai de

phase III de Robinet et al. (GFPC

95-1) [20] qui s’intéressait à des

patients atteints d’un CBNPC avec

desMC potentiellement symptoma-

tiques. Le doublet de traitement

retenuassociait cisplatineet vinorel-

bine. Deux bras de traitement

étaient comparés, soit une radiothé-

rapie cérébrale « précoce » avec chi-

miothérapie, soit une radiothérapie

cérébrale retardée décidée lors de la

progression sous chimiothérapie

seule. Aucune différence de survie

globale (objectif principal) n’était

mise en évidence entre ces deux

schémas de prise en charge. En

association à la chimiothérapie,

peut également être utilisé le beva-

cizumab, sans qu’il n’y ait à priori

de majoration du risque de saigne-

ment intracérébral, toxicité clas-

sique redoutée avec ces thérapies

antiangiogéniques [24]. Les résul-

tats de l’étude BRAIN [1] devraient

apporter plus de renseignements

sur leur efficacité en association

à la chimiothérapie (paclitaxel-

carboplatine) dans la prise en

charge des patients atteints de

CBNPC, non-épidermoïde et por-

teurs de MC là-aussi asymptoma-

tiques. Les inhibiteurs de tyrosine

kinase de l’EGFR semblent égale-

ment avoir un effet bénéfique sur

les atteintes cérébrales chez les

patients mutés [9].

Oligométastases

La prise en charge diffère et peut

être plus agressive lorsque les MC

sont uniques voire au nombre de

2 ou 3. La chirurgie et la radiochirur-

gie trouvent alors leurs indications.

La question, ici, est celle de la place

des traitements complémentaires

comme l’IPC ou la chimiothérapie.

De plus, la prise en charge diffère

selon le caractère synchrone ou

métachrone de ces métastases.

Ces situations cliniques sont source

de discussions en RCP (Réunion de

Concertation Pluridisciplinaire) et

plusieurs questions reviennent

souvent :

Quel traitement local privilégier ?

Il n’y a pas d’étude prospective ran-

domisée comparant spécifiquement

chirurgie d’oligométastase céré-

brale et radiochirurgie. Lorsque ces

deux dernières techniques sont sui-

vies d’une IPC, la radiochirurgie

semble être non inférieure à la chi-

rurgie, c’est ce que conclut Rades

dans une étude rétrospective de

2009 sur une population de patients

atteints deMC (54%deCBNPC) [19].

Miseaupoint

Update

307

Y a-t-il un bénéfice à réaliserun traitement local au lieu d’une IPC,traitement de référence des MC ?

Dans deux essais randomisés,

l’association chirurgie+ IPC apporte

un bénéfice en survie globale de

près de 4 mois comparé à la radio-

thérapie seule [17]. Quelques essais

randomisés comparent un traite-

ment par IPC seule à l’association

radiochirurgie + IPC. Ils mettent en

évidence un contrôle local significa-

tivement plus important chez les

patients traités par radiochirurgie

et une survie prolongée notamment

lorsque les patients ne présentent

qu’une métastase unique [2]. Lors-

qu’ils n’existent pas de contre-

indication, la chirurgie ou la radio-

chirurgie suivie d’une IPC semble

plus efficace qu’une IPC seule.

Y a-t-il un bénéfice à associerà un traitement local supposé optimalune IPC complémentaire ?

Dans un essai comparant le traite-

ment local (radiochirurgie ou chi-

rurgie seule) au traitement local

suivi d’une IPC, la radiothérapie

réduisait le taux de rechute local

mais n’influençait pas la survie glo-

bale [11]. Patchell et al. ont comparé

la chirurgie seule à l’association

chirurgie suivie d’une IPC dans un

essai randomisé de 1998. Ils ontmis

en évidence un taux de récidi-

ves cérébrales plus bas chez les

patients traités par radiothérapie

complémentaire (18 vs 70 %,

p<0,001). De plus, le taux de décès

secondaire à des causes neurolo-

giques était significativement

moins important chez les patients

ayant reçu une IPC postopératoire

(14 vs 44%, p=0,003). Mais il n’exis-

tait aucune différence sur la survie

globale entre les deux traitements

[16]. Dans une étude randomisée

comparant la radiochirurgie seule

à la radiochirurgie + IPC, il n’existait

pas de différence sur la médiane de

survie à un an entre les 2 bras, mais

le tauxde récidive était significative-

ment plus élevé dans le groupe

radiochirurgie seule et un traite-

ment de rattrapage s’avérait plus

souvent nécessaire. Il n’existait

notamment pas de différence entre

les bras sur le statut fonctionnel

neurologique et sur le taux de toxi-

cité des irradiations [3]. Mais la

place de l’IPC post traitement local

reste actuellement débattue.

Y a-t-il un risque neurologique toxiqueà proposer une IPC complémentaire ?

Chang et al ont évalué le risque

neurocognitif sur les fonctions

d’apprentissage et sur la mémoire

de l’associationradiochirurgiesuivie

d’une IPC à la radiochirurgie seule

par un essai randomisé : à 4 mois

les patients ayant reçu l’association

avaient un déclin des fonctions neu-

rocognitives significativement plus

important [5]. Ces résultats ont pu

être aggravés par le cut-off de

4mois. En effet, il existe une toxicité

subaiguë de l’IPC vers cette période

avec notamment une asthénie et

une fatigabilité qui pourrait limiter

la pertinence des résultats.

Quelle est la place de la chimiothérapiedans ces tableaux qui restentmétastatiques ?

L’intérêt d’une chimiothérapie

après prise en charge locale de

MC n’a non plus pas été spécifique-

ment étudié. Pourtant, la place de ce

traitement systémique semble pri-

mordiale dans ce contexte demala-

die métastatique. Le moment pour

mettre en œuvre cette chimiothé-

rapie n’est pas non plus défini.

Si l’on se réfère aux standards

de traitement, en cas d’oligométas-

tase synchrone d’une tumeur pul-

monaire résécable, le traitement

local chez les patients en bon état

général, sans autre site métasta-

tique, ni atteinte ganglionnaire

médiastinale est à privilégier soit

par chirurgie soit par radiochirur-

gie. Il n’y actuellement pas de

recommandation sur l’intérêt

d’une IPC « adjuvante » au traite-

ment local : bienque celle-ci réduise

le risque de récidive intracrânienne

et améliore la survie sans progres-

sion, elle ne modifie pas la survie

globale ni l’indépendance fonction-

nelle. Lorsque le traitement local est

réalisé seul, une surveillance radio-

logique rapprochée s’impose en

vue de réaliser un traitement de

rattrapage si besoin. De plus, la

prescription d’une chimiothérapie

semble indispensable, la maladie

étant déjà métastatique avec un

risque de rechute systémique

extra-cérébrale majeure sur lequel

la chimiothérapie est efficace. Mais

le moment optimal de la chimiothé-

rapie dans cette séquence théra-

peutique est encore incertain.

En cas d’oligométastase méta-

chrone (récidive cérébrale après

traitement d’un CBNPC supposé

contrôlé), le traitement local céré-

bral (chirurgie ou radiochirurgie)

est à privilégier en cas de menace

cérébrale. La maladie extrathora-

cique doit alors être contrôlée.

Dans cette indication la place de

l’IPC n’est pas définie. La chimiothé-

rapie est indiquée après traitement

de la lésion cérébrale en fonction de

l’état général et neurologique du

patient : si le patient n’a pas reçu

de chimiothérapie adjuvante préa-

lable : 4 cycles de chimiothérapie à

base de sels de platine sont indi-

qués, si le patient a reçuune chimio-

thérapie préalable dans les 6 mois

précédents, une chimiothérapie de

seconde ligne se discute et si le

patient a reçu une chimiothérapie

adjuvante il y a plus de 6 mois : la

reprise de la chimiothérapie de pre-

mière ligne se discute et fait l’objet

d’une décision de RCP.

En pratique la prise en charge

desMCmultiples consiste principa-

lement en une IPC et celle des oligo-

métastases en une radiochirurgie

ou une chirurgie suivie ou non

d’une radiothérapie adjuvante. La

chimiothérapie doit se discuter

dans toutes les situations : la mala-

die est de toute façon à un stade

métastatique. La décision thérapeu-

tique est basée sur l’état général du

patient, le caractère actif ou stable

de la maladie primitive, l’existence

de métastases extra-crâniennes et

le nombre et la localisation des MC.

Et la prévention ?

L’intérêt d’une irradiation cérébrale

prophylactique est de réduire l’inci-

dence des MC et d’augmenter la

survie globale chez les patients

ayant une réponse favorable au trai-

tement initial systémique ou local.

Dans une étude de phase III, Gore

Dossier

Them

atic

file

308

et al. comparaient l’irradiation céré-

brale prophylactique à l’observa-

tion chez des patients atteints d’un

CBNPC de stade 3 sans progression

après une chirurgie et/ou une radio-

thérapie (± chimiothérapie) en 1ère

ligne. L’étude ne mettait pas en évi-

dence de différence à un an sur la

survie sans progression ni sur la

survie globale, mais le risque de

MC était 2,52 fois plus important

en l’absence d’irradiation [8]. Il exis-

tait par ailleurs un impact sur les

fonctions neurocognitives non

négligeable notamment sur les

troubles de la mémoire [25]. L’IPC

en prévention dans le CBNPC n’est

actuellement pas recommandée

comme traitement standard.

Conclusion

La place de la chimiothérapie et de

la radiothérapie dans la séquence

thérapeutique reste encore à préci-

ser et certaines études en cours,

permettront de répondre à ces

questions.

L’émergence de nouvelles théra-

pies potentiellement plus efficaces

et plus ciblées sur des populations

sélectionnées pourraient faire per-

dre sa place de thérapie de première

intention à la radiothérapie chez ces

patients n’ayant que très rarement

les critères pour des thérapies loca-

les telles que la chirurgie et la radio-

chirurgie. Dans toutes les situations

la prise en charge doit être décidée

dans le cadre d’une RCP.

Conflit d’intérêt : les auteurs

déclarent ne pas avoir de conflit

d’intérêt.

Références

1. A Study of Avastin (Bevacizumab) inPatients With Non-Squamous Non-SmallCell Lung Cancer With Asymptomatic Un-treated Brain Metastasis. ClinicalTrials.gov Identifier: NCT00800202. ML21823,2008-006504-33

2. Andrews DW, Scott CB, Sperduto PW,et al. (2004) Whole brain radiation therapywith or without stereotactic radiosurgeryboost for patients with one to three brainmetastases: phase III results of the RTOG9508 randomised trial. Lancet 363: 1665–72

3. Aoyama H, Shirato H, Tago M, et al.(2006) Stereotactic radiosurgery pluswhole-brain radiation therapy vs stereo-tactic radiosurgery alone for treatment ofbrain metastases: a randomized control-led trial. JAMA 295: 2483–91

4. Barlesi F, Gervais R, Lena H, et al. (2011)Pemetrexed and cisplatin as first-line che-motherapy for advanced non-small-celllung cancer (NSCLC) with asymptomaticinoperable brain metastases: a multicen-ter phase II trial (GFPC 07-01). Ann Oncol22: 2466–70

5. Chang EL, Wefel J, Hess KR, et al. (2009)Neurocognition in patients with brainmetastases treated with radiosurgery orradiosurgery plus whole-brain irradiation:a randomised controlled trial OriginalResearch Article. The Lancet Oncology10: 1037–44

6. Edelman MJ, Belani CP, Socinski MA,et al. (2010) Outcomes associated withbrain metastases in a three-arm phaseIII trial of gemcitabine-containing regi-mens versus paclitaxel plus carboplatinfor advanced non-small cell lung cancer.J Thorac Oncol 5: 110–6

7. Gaspar L, Scott C, Rotman M,, et al.(1997) Recursive partitioning analysis(RPA) of prognostic factors in three Ra-diation Therapy Oncology Group (RTOG)brain metastases trials. Int J RadiatOncol Biol Phys 1;37(4): 745–51

8. Gore E, Bae K, Wong S, et al. (2011)Phase III comparison of prophylacticcranial irradiation versus observationin patients with locally advancednon–small-cell lung cancer: Primary ana-lysis of Radiation Therapy OncologyGroup Study RTOG 0214. JCO 29: 272–8

9. Hotta K, Kiura K, Ueoka H, et al. (2004)Effect of gefitinib (‘Iressa’, ZD1839) onbrain metastases in patients with ad-vance non-small-cell lung cancer. LungCancer 46: 255–61

10. Khuntia D, Brown P, Li J, et al. (2006)Whole-brain radiotherapy in the manage-ment of brain metastasis. J Clin OncolMar 24: 1295–304

11. Kocher M, Soffietti R, Abacioglu U, et al.(2011) Adjuvant whole-brain radiotherapyversus observation after radiosurgery orsurgical resection of one to three cere-bral metastases: results of the EORTC22952-26001 study. J Clin Oncol 29: 134–41

12. Kondziolka D, Patel A, Lunsford LK, et al.(1999) Stereotactic radiosurgery pluswhole brain radiotherapy versus radio-therapy alone for patients with multiplebrain metastases. Int J Radiat Oncol BiolPhys 1;45(2): 427–34

13. Mehta MP, Rodrigus P, Terhaard CHJ,et al. (2003) Survival and neurologic out-comes in a randomized trial of motexafingadolinium and whole-brain radiationtherapy in brain metastases. J Clin Oncol21: 2529–36

14. Motta M, Del Vecchio A, Attuati L, al.(2011) Gamma Knife Radiosurgery for

Treatment of Cerebral Metastases fromNon-Small-Cell Lung Cancer. Int J RadiatOncol Biol Phys 15;81(4): e463–e8

15. Nieder C, Bremnes RM, Andratschke NH(2009) Prognostic scores in patients withbrain metastases from non-small celllung cancer. J Thorac Oncol 4: 1337–41

16. Patchell R, Tibbs P, Regine W, et al. (1998)Postoperative Radiotherapy in the Treat-ment of Single Metastases to the BrainA Randomized Trial. JAMA 280: 1485–9

17. Patchell RA, Tibbs PA, Walsh JW, et al.(1990) A randomized trial of surgery in thetreatment of single metastases to thebrain. N Engl J Med 322: 494–500

18. Rades D, Evers JN, Veninga T, et al.(2011) shorter-course whole-brain radio-therapy for brain metastases In elderlypatients. Int J Radiation oncology biolPhys Nov 15;81(4): e469–e73

19. Rades D, Kuetera J-D, Veninga T, et al.(2009) Whole brain radiotherapy plusstereotactic radiosurgery (WBRT + SRS)versus surgery plus whole brain radiothe-rapy (OP + WBRT) for 1–3 brain meta-stases: Results of a matched pair analy-sis. European journal of cancer 45: 400–4

20. Robinet G, Thomas P, Breton JL, et al.(2001) Results of a phase III study of earlyversus delayed whole brain radiotherapywith concurrent cisplatin and vinorelbinecombination in inoperable brain metasta-sis of non-small-cell lung cancer: Groupefrancais de pneumo-cancerologie (GFPC)Protocol 95-1. Ann Oncol 12: 59–67

21. Schellinger PD, Meinck HM, Thron A(1999) Diagnostic Accuracy of MRI Com-pared to CCT in Patients with Brain Meta-stases. J Neurooncol 44: 275–81

22. Schlienger M, Nataf F, Huguet F, et al.(2010) Place de l’irradiation stéréotaxiquehypofractionnée dans le traitement desmétastases cérébrales. Cancer/Radiothé-rapie 14: 119–27

23. Sills AK (2005) Current treatment approa-ches to surgery for brain metastases.Neurosurgery 57: S24–S32

24. Socinski MA, Langer CJ, Huang JE, et al.(2009) Safety of bevacizumab in patientswith non-small-cell lung cancer and brainmetastases. J Clin Oncol 27: 5255–61

25. Sun A, Bae K, Gore E, et al. (2011) PhaseIII Trial of Prophylactic Cranial IrradiationCompared With Observation in PatientsWith Locally Advanced Non–Small-CellLung Cancer: neurocognitive andquality-of-life analysis. J Clin Oncol 29:279–86

26. Tsao MN, Lloyd NS, Wong RK, et al.(2005) Supportive Care Guidelines Groupof Cancer Care Ontario’s Program inEvidence-based Care. Radiotherapeuticmanagement of brain metastases: asystematic review and meta-analysis.Cancer Treat Rev 31: 256–73

27. Walbert T and Gilbert MR (2009) The roleof chemotherapy in the treatment ofpatients with brain metastases from solidtumors. Int J Clin Oncol 14: 299–306

Miseaupoint

Update

309