2
Revue de presse B. Dousset, Ph. de Mestier, C. Vons 192 manométrie était également réalisée avant l’intervention, 1 an après, et à la fin du suivi, et une pHmétrie à la fin de l’étude. Aucun malade n’a été opéré par laparoscopie. Il n’y eu aucune mortalité opératoire. Deux fistules sur brèche muqueuse ont été traitées médicalement avec succès. Trois malades ont dé- veloppé un carcinome épidermoïde de l’œsophage (4,5 %) à 5, 7, 15 ans après l’intervention, soit 1 cas pour 120 malades par année. Il restait donc 64 malades pour le suivi à long terme. Concernant le suivi endoscopique, on observait une altération progressive de la muqueuse oesophagienne, avec une endosco- pie normale à 10 ans pour 85 % des malades, réduite à 76 % à 20 ans, et 53 % au-delà. On notait ainsi au niveau de la jonction gastro-oesophagienne, une réduction progressive de la mu- queuse de type fundique dans le groupe III par rapport au groupe I (p = 0,006), avec la transformation en muqueuse de type cardiale et l’apparition progressive d’une métaplasie intes- tinale particulièrement dans le groupe III (ns). La manométrie montrait une réduction significative de la pression du sphincter inférieur de l’œsophage à 1 an dont la valeur restait stable jus- qu’à la fin de la période du suivi, avec une relaxation du sphinc- ter satisfaisante, confirmant donc le bon résultat de l’interven- tion à distance sur le cardiospasme. Il n’y avait pas de retour à une activité péristaltique œsophagienne. La pHmétrie mon- trait une augmentation de la fréquence du reflux acide, aug- mentant avec le recul, devenant significative entre le groupe I et III (p < 0,01), avec un test de reflux acide normal chez 85 % du groupe I versus 47 % du groupe III (p < 0,05). Parallèlement la présence d’une métaplasie intestinale était plus élevée chez les malades avec reflux, avec une muqueuse fundique réduite en comparaison avec les malades sans reflux. Neuf malades ont développé un endobrachyœsophage (EBO). En définitive, à un recul moyen de 190 mois (15,8 ans), 73 % des malades avaient un excellent ou bon résultat. Il y eu 4,5 % de cancers (3 malades, tous décédés). Des résultats médiocres ou mauvais étaient ob- servés chez 22,4 % des malades (n = 15) ; un seul fut réopéré pour une myotomie incomplète, les autres malades (21,8 %) avaient des complications liées au reflux et traités médicale- ment pour la plupart. Les auteurs concluent qu’après cardiomytomie pour achalasie, on assiste à une détérioration progressive des excellents résul- tats obtenus en postopératoire immédiat, à la condition d’un recul suffisant (> 10 ans). Cette détérioration est principale- ment liée à la survenue d’un reflux gastro-oesophagien ou son accentuation, avec le développement possible d’un endobra- chyoesophage. Commentaires 1) Cette étude est intéressante par l’importance du recul, l’un des plus longs rapportés [1]. 2) La détérioration du procédé anti-reflux n’est pas une sur- prise [2], avec un patient sur deux porteur d’un reflux acide pathologique après 20 ans d’évolution ; 21,8 % des échecs étant dus à un reflux avec l’apparition d’une oesophagite, d’une muqueuse porteuse d’une métaplasie intestinale et parfois d’un EBO. Ces données suggèrent indirectement l’importance d’un geste anti-reflux de qualité après cardiomyotomie. 3) La manométrie est restée remarquablement stable, témoi- gnant du bon résultat à long terme de la myotomie et d’une barrière encore efficace au moins partiellement contre le reflux pour les 2/3 des malades. 4) le taux de cancérisation 4,5 % est assez faible à 20 ans d’évo- lution en fonction de la littérature qui situe ce taux plutôt autour de 6 % [3]. Ce qui implique la surveillance endoscopique régulière et à vie de ces malades. Mots-clés : Œsophage. Pronostic. Achalasie. Qualité de vie. 1. Br J Surg 1993;80:882-885. 2. Dis Esophagus 2002;15:171-179. 3. Ann Chir 1980;34:81-86. Traitement palliatif des adénocarcinomes gastriques M1 A.I. Sarela, T.J. Miner, M.S. Karpeh, D.G. Coit, D.P. Jaques, M.F. Brennan Clinical outcomes with laparoscopic stage M1, un- resected gastric adenocarcinoma Ann Surg 2006;243:189-195. Environ 25 % des malades porteurs d’un cancer gastrique ont déjà des métastases non décelées par l’imagerie au moment du diagnostic, qui sont découvertes lors d’une laparoscopie ou d’une laparotomie. La plupart de ces malades porteurs de mé- tastases ne sont justiciables que d’un traitement palliatif. Cette étude rapporte les résultats du traitement palliatif par chimio- thérapie systémique chez ces malades M1 non réséqués. Cette étude prospective a concerné 165 malades porteurs d’un adé- nocarcinome gastrique M1 après laparoscopie : métastases pé- ritonéales chez 74 % des malades (P1 métastases proche de l’estomac 9 %, P2 à distance 35 %, P3 disséminées 30 %), hépatiques (10 %), ou les deux (16 %). Les localisations tumo- rales étaient situées sur le cardia (44 %), au tiers supérieur de l’estomac (26 %), sur le fundus (38 %), sur l’antre (27 %) ou diffuse à l’ensemble de l’estomac (30 %). La majorité des tumeurs étaient indifférenciées (78 %). Les critères de perfor- mances fonctionnelles des malades, étaient : une activité normale (31 %), limitée (53 %), impotence majeure (16 %). Il y eu 18 cas de faux-négatifs après exploration par laparoscopie. L’étude des résultats du traitement palliatif n’a porté que sur les 97 malades suivi au Memorial Sloan Kettering cancer cen- ter. La chimiothérapie palliative administrée a été variée, dé- butée dans les 14 jours suivant la laparoscopie initiale. À huit mois de recul, 8 malades étaient vivants et les 89 autres étaient décédés de la progression de la maladie. Une geste palliatif majoritairement réalisé par des procédés en- doscopiques (gastrostomie percutanée) a été réalisée chez 48 (50 %) malades, 4 mois en moyenne après la laparoscopie (1 à 35 mois), avec plus d’une intervention réalisée (1 à 4) chez 21 % des malades. Sur l’ensemble des malades 42 % avaient eu un geste sur l’estomac (sténose 33 %, hémorragie 8 %, perfo- ration 1 %) et 20 % sur un site distal pour des complications liées aux métastases (sténose biliaire par adénopathie, hydro- néphrose pour les mêmes raisons, occlusion). En définitif, seul 7 % des malades ont nécessité une laparotomie. La survie moyenne entre la 1 re intervention et le décès était de 3 mois (1 à 28 mois). La survie médiane pour l’ensemble de la série était de 10 mois (1 à 39 mois) avec une survie actuarielle de 39 % à 1 an et 4 % à 2 ans, une mortalité opératoire (endoscopique ou chirurgicale) de 1 %. En analyse multivariée, de bons critères de performance au départ, et une extension limitée des métas- tases péritonéales (P1 ou P2) étaient associées avec un plus longue survie. En conclusion les auteurs rappellent que la majorité des malades porteurs d’un adénocarcinome gastrique M1 ont pu éviter une laparotomie, la moitié ont nécessité un geste principalement endoscopique avec une morbidité faible, et que les facteurs pro- nostics importants étaient l’importance de la maladie métasta- tique et le statut de performance initiale. Commentaires 1) Plusieurs enseignements sont à tirer de cette étude, et d’abord la nécessité d’une laparoscopie pour préciser la stadi- fication sous-estimée par les explorations d’imagerie. 2) L’inutilité d’une résection non curative ou d’une interven- tion palliative est confirmée chez les malades métastatiques,

Traitement palliatif des adénocarcinomes gastriques M1

Embed Size (px)

Citation preview

Revue de presse B. Dousset, Ph. de Mestier, C. Vons

192

manométrie était également réalisée avant l’intervention, 1 anaprès, et à la fin du suivi, et une pHmétrie à la fin de l’étude.Aucun malade n’a été opéré par laparoscopie. Il n’y eu aucunemortalité opératoire. Deux fistules sur brèche muqueuse ontété traitées médicalement avec succès. Trois malades ont dé-veloppé un carcinome épidermoïde de l’œsophage (4,5 %) à 5,7, 15 ans après l’intervention, soit 1 cas pour 120 malades parannée. Il restait donc 64 malades pour le suivi à long terme.Concernant le suivi endoscopique, on observait une altérationprogressive de la muqueuse oesophagienne, avec une endosco-pie normale à 10 ans pour 85 % des malades, réduite à 76 % à20 ans, et 53 % au-delà. On notait ainsi au niveau de la jonctiongastro-oesophagienne, une réduction progressive de la mu-queuse de type fundique dans le groupe III par rapport augroupe I (p = 0,006), avec la transformation en muqueuse detype cardiale et l’apparition progressive d’une métaplasie intes-tinale particulièrement dans le groupe III (ns). La manométriemontrait une réduction significative de la pression du sphincterinférieur de l’œsophage à 1 an dont la valeur restait stable jus-qu’à la fin de la période du suivi, avec une relaxation du sphinc-ter satisfaisante, confirmant donc le bon résultat de l’interven-tion à distance sur le cardiospasme. Il n’y avait pas de retour àune activité péristaltique œsophagienne. La pHmétrie mon-trait une augmentation de la fréquence du reflux acide, aug-mentant avec le recul, devenant significative entre le groupe Iet III (p < 0,01), avec un test de reflux acide normal chez 85 %du groupe I versus 47 % du groupe III (p < 0,05). Parallèlementla présence d’une métaplasie intestinale était plus élevée chezles malades avec reflux, avec une muqueuse fundique réduiteen comparaison avec les malades sans reflux. Neuf malades ontdéveloppé un endobrachyœsophage (EBO). En définitive, à unrecul moyen de 190 mois (15,8 ans), 73 % des malades avaientun excellent ou bon résultat. Il y eu 4,5 % de cancers (3 malades,tous décédés). Des résultats médiocres ou mauvais étaient ob-servés chez 22,4 % des malades (n = 15) ; un seul fut réopérépour une myotomie incomplète, les autres malades (21,8 %)

avaient des complications liées au reflux et traités médicale-ment pour la plupart.Les auteurs concluent qu’après cardiomytomie pour achalasie,on assiste à une détérioration progressive des excellents résul-tats obtenus en postopératoire immédiat, à la condition d’unrecul suffisant (> 10 ans). Cette détérioration est principale-ment liée à la survenue d’un reflux gastro-oesophagien ou sonaccentuation, avec le développement possible d’un endobra-chyoesophage.

Commentaires1) Cette étude est intéressante par l’importance du recul, l’undes plus longs rapportés [1].

2) La détérioration du procédé anti-reflux n’est pas une sur-prise [2], avec un patient sur deux porteur d’un reflux acidepathologique après 20 ans d’évolution ; 21,8 % des échecsétant dus à un reflux avec l’apparition d’une oesophagite, d’unemuqueuse porteuse d’une métaplasie intestinale et parfois d’unEBO. Ces données suggèrent indirectement l’importance d’ungeste anti-reflux de qualité après cardiomyotomie.

3) La manométrie est restée remarquablement stable, témoi-gnant du bon résultat à long terme de la myotomie et d’unebarrière encore efficace au moins partiellement contre le refluxpour les 2/3 des malades.

4) le taux de cancérisation 4,5 % est assez faible à 20 ans d’évo-lution en fonction de la littérature qui situe ce taux plutôtautour de 6 % [3]. Ce qui implique la surveillance endoscopiquerégulière et à vie de ces malades.

Mots-clés : Œsophage. Pronostic. Achalasie. Qualité de vie.

1. Br J Surg 1993;80:882-885.2. Dis Esophagus 2002;15:171-179.3. Ann Chir 1980;34:81-86.

Traitement palliatif des adénocarcinomes gastriques M1

A.I. Sarela, T.J. Miner, M.S. Karpeh, D.G. Coit, D.P. Jaques,M.F. Brennan

Clinical outcomes with laparoscopic stage M1, un-resected gastric adenocarcinomaAnn Surg 2006;243:189-195.

Environ 25 % des malades porteurs d’un cancer gastrique ontdéjà des métastases non décelées par l’imagerie au moment dudiagnostic, qui sont découvertes lors d’une laparoscopie oud’une laparotomie. La plupart de ces malades porteurs de mé-tastases ne sont justiciables que d’un traitement palliatif. Cetteétude rapporte les résultats du traitement palliatif par chimio-thérapie systémique chez ces malades M1 non réséqués. Cetteétude prospective a concerné 165 malades porteurs d’un adé-nocarcinome gastrique M1 après laparoscopie : métastases pé-ritonéales chez 74 % des malades (P1 métastases proche del’estomac 9 %, P2 à distance 35 %, P3 disséminées 30 %),hépatiques (10 %), ou les deux (16 %). Les localisations tumo-rales étaient situées sur le cardia (44 %), au tiers supérieur del’estomac (26 %), sur le fundus (38 %), sur l’antre (27 %) oudiffuse à l’ensemble de l’estomac (30 %). La majorité destumeurs étaient indifférenciées (78 %). Les critères de perfor-mances fonctionnelles des malades, étaient : une activité normale(31 %), limitée (53 %), impotence majeure (16 %). Il y eu18 cas de faux-négatifs après exploration par laparoscopie.L’étude des résultats du traitement palliatif n’a porté que surles 97 malades suivi au Memorial Sloan Kettering cancer cen-ter. La chimiothérapie palliative administrée a été variée, dé-butée dans les 14 jours suivant la laparoscopie initiale. À huit

mois de recul, 8 malades étaient vivants et les 89 autres étaientdécédés de la progression de la maladie.Une geste palliatif majoritairement réalisé par des procédés en-doscopiques (gastrostomie percutanée) a été réalisée chez 48(50 %) malades, 4 mois en moyenne après la laparoscopie (1 à35 mois), avec plus d’une intervention réalisée (1 à 4) chez21 % des malades. Sur l’ensemble des malades 42 % avaient euun geste sur l’estomac (sténose 33 %, hémorragie 8 %, perfo-ration 1 %) et 20 % sur un site distal pour des complicationsliées aux métastases (sténose biliaire par adénopathie, hydro-néphrose pour les mêmes raisons, occlusion). En définitif, seul7 % des malades ont nécessité une laparotomie. La surviemoyenne entre la 1re intervention et le décès était de 3 mois (1à 28 mois). La survie médiane pour l’ensemble de la série étaitde 10 mois (1 à 39 mois) avec une survie actuarielle de 39 % à1 an et 4 % à 2 ans, une mortalité opératoire (endoscopique ouchirurgicale) de 1 %. En analyse multivariée, de bons critèresde performance au départ, et une extension limitée des métas-tases péritonéales (P1 ou P2) étaient associées avec un plus longuesurvie.En conclusion les auteurs rappellent que la majorité des maladesporteurs d’un adénocarcinome gastrique M1 ont pu éviter unelaparotomie, la moitié ont nécessité un geste principalementendoscopique avec une morbidité faible, et que les facteurs pro-nostics importants étaient l’importance de la maladie métasta-tique et le statut de performance initiale.

Commentaires1) Plusieurs enseignements sont à tirer de cette étude, etd’abord la nécessité d’une laparoscopie pour préciser la stadi-fication sous-estimée par les explorations d’imagerie.

2) L’inutilité d’une résection non curative ou d’une interven-tion palliative est confirmée chez les malades métastatiques,

J Chir 2006,143, N°3 • © Masson, Paris, 2006

193

Revue de presse

même opérables, avec une survie semblable à celle observéechez les malades opérés d’une gastrectomie palliative avec54 % de morbidité et 6 % de mortalité, dans une série issue dela même équipe [1].

3) Le traitement non opératoire des cancers gastriques métas-tatiques est un concept récent, d’ailleurs déjà évoqué pour lescancers colorectaux. On évite ainsi une morbidité et mortalité

opératoire non négligeables en donnant une survie « plus confor-table ». Sept p cent seulement des malades ont nécessité unelaparotomie.

Mots-clés : Estomac. Traitement. Cancer. Palliatif.

1. J Am Coll Surg 2004;198:1013-1021.

Prier pour quelqu’un contribue-t-il à sa guérison ?

H. Benson, J.A. Dusek, J.B. Sherwood, P. Lam, C.F. Bethea,W. Carpenter, S. Levitsky, P.C. Hill, D.W. Jr Clem, M.K. Jain,D. Drumel, S.L. Kopecky, P.S Mueller, D. Marek, S. Rollins,P.L. HibberdStudy of the Therapeutic Effects of IntercessoryPrayer (STEP) in cardiac bypass patients: a multi-center randomized trial of uncertainty and certaintyof receiving intercessory prayerAm Heart J 2006;151:934-942.

Une équipe américaine a voulu savoir si prier avait un impactsur les suites opératoires.Ont été inclus 1 802 malades qui devait avoir un pontage co-ronarien. Ces malades ont été répartis par tirage au sort danstrois groupes avant l’opération : 1) malades informés que« peut-être » quelqu’un prierait pour eux, mais que ce n’était

pas certain, alors qu’effectivement quelqu’un priait pour eux ;2) malades pour lesquels aucune prière n’était faite ; 3) maladeinformé qu’on priait eux, ce qui était bien le cas. Les auteurs ontsuivi les malades pendant 30 jours et ont recueilli les complica-tions postopératoires.

Le pourcentage de complications était semblable dans les deuxpremiers groupes (52 % et 51 %) suggérant que la prièren’avait pas d’effet sur le rétablissement des patients. Le pour-centage de complications dans troisième groupe – sujets sachantqu’on priait pour eux – (59 %) était significativement augmenté.

Commentaires

1) D’après ces résultats, et contrairement à ceux d’autres études,il semblerait que la prière n’ait pas d’effet bénéfique sur la gué-rison des malades…

2) Il s’agissait de prières « professionnelles » (les « priants » neconnaissaient pas les malades). On peut légitimement se poserla question des bienfaits éventuels lorsque la prière est faite pardes proches qui vous aiment…