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N° 42 - Avril 2014 www.innovationandsociety.com www.isis.essec.edu ISBN :978-2-36456-124-3 7 € Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation dans les services Face aux mutations qui affectent leurs marchés et leur environnement, certaines entreprises font le choix de transformer radicalement leur business model, en capitalisant sur l’innovation et le service comme vecteurs de cette transformation. L’application de l’innovation au business model leur permet alors de maintenir ou d’obtenir un avantage compétitif, et de se différencier de leurs concurrents tout en conservant une logique de création de valeur, voire de se réinventer totalement. On assiste aujourd’hui à une multiplication des formes de business model dans le monde, que ce soit au niveau des start-ups ou à celui de grands groupes multinationaux, et ce dans toutes les industries. Comment anticiper au mieux ces nécessaires transformations et y préparer son organisation ? En quoi l’innovation devient-elle un facteur incontournable pour la transformation et le succès d’un business model ? L'Institut Stratégie Innovation Service anime un réseau international de partenaires économiques et universitaires tournés vers un objectif commun de développement de connaissances concrètes et de savoir-faire structurés. Au travers d’échanges continus avec les responsables économiques, une communauté se construit autour de la réflexion, de la diffusion et du partage d’expériences. Les « Matins de l’Innovation » ainsi que d’autres manifestations permettent à cette communauté de se réunir et de participer à une construction commune autour des enjeux et des méthodes de l’innovation dans l’économie des services. Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation dans les services Sous la direction de Prof. Xavier Pavie

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www.isis.essec.edu ISBN :978-2-36456-124-3

7 €

Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation dans les servicesFace aux mutations qui affectent leurs marchés et leur environnement, certaines entreprises font le choix de transformer radicalement leur business model, en capitalisant sur l’innovation et le service comme vecteurs de cette transformation. L’application de l’innovation au business model leur permet alors de maintenir ou d’obtenir un avantage compétitif, et de se différencier de leurs concurrents tout en conservant une logique de création de valeur, voire de se réinventer totalement. On assiste aujourd’hui à une multiplication des formes de business model dans le monde, que ce soit au niveau des start-ups ou à celui de grands groupes multinationaux, et ce dans toutes les industries. Comment anticiper au mieux ces nécessaires transformations et y préparer son organisation ? En quoi l’innovation devient-elle un facteur incontournable pour la transformation et le succès d’un business model ?

L'Institut Stratégie Innovation Service anime un réseau international de partenaires économiques et universitaires tournés vers un objectif commun de développement de connaissances concrètes et de savoir-faire structurés.Au travers d’échanges continus avec les responsables économiques, une communauté se construit autour de la réflexion, de la diffusion et du partage d’expériences.

Les « Matins de l’Innovation » ainsi que d’autres manifestations permettent à cette communauté de se réunir et de participer à une construction commune autour des enjeux et des méthodes de l’innovation dans l’économie des services.

Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation

dans les services

Sous la direction de Prof. Xavier Pavie

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3, avenue Bernard-Hirsch CS 50105 Cergy 95021 Cergy-Pontoise Cedex FranceTél. +33 (0) 1 34 43 28 29e-mail : [email protected]

70, rue Cortambert75 016 Pariswww.innovationandsociety.com

ESSEC Asia-Pacific2 One-North GatewaySingapore [email protected]él. +65 6884 9780Fax +65 6884 9781www.essec.edu/asia

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Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation dans les services

Sous la direction de

Prof. Xavier Pavie

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Transformer son business model : rôle et impact de l’innovation dans les services

The Institute for Strategic Innovation and Services

ISIS, The Institute for Strategic Innovation and Services, est un centre de recherche et d’animation scientifique de l’ESSEC Business School à Paris et Singapour.Créé en janvier 2004, ISIS a pour vocation de faire émerger, stimuler et promouvoir l’innovation dans l’économie de la connaissance et des services du XXIe siècle, et cela en vue de contribuer à la croissance responsable et à la compétitivité des organisations. L’institut instruit les mécanismes d’innovation, capitalise sur les bonnes pratiques, accompagne les changements organisationnels et managériaux et élabore des instruments de mesure de la performance et de la capacité créatrice des équipes.ISIS anime un réseau international de partenaires économiques et universitaires tournés vers un objectif commun de développement de connaissances concrètes et de savoir-faire structurés. Au travers d’échanges continus avec les responsables économiques, une communauté se construit autour de la réflexion, de la diffusion et du partage d’expériences. Les « Matins de l’Innovation » ainsi que d’autres manifestations permettent à cette communauté de se réunir et de participer à une construction commune autour des enjeux et des méthodes de l’innovation dans l’économie des services.

www.isis.essec.edu

L’association Innovation & Société a pour objet d’encourager et de pratiquer l’étude de la responsabilité sociale de l’innovateur, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une personne morale. Pour ce faire, elle réunit des chercheurs, enseignants, responsables économiques, représentants des pouvoirs publics et représentants de la société civile dans son ensemble autour d’un travail collectif de réflexion et d’animation scientifique sur les différentes composantes de l’innovation, sur les mécanismes de stimulation de l’innovation, sur l’évaluation des conséquences économiques, sociales et sociétales de l’innovation, sur la recherche et la formation à l’innovation, parmi d’autres. www.innovationandsociety.com

Sous la direction de

Prof. Xavier Pavie

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L’ISIS tenait à remercier Pierre Jalady, directeur marketing

de BMW Group France, Béatrice Kosowski, Managing

Director, en charge des relations avec la SNCF, IBM France,

et Sébastien Vercruysse, directeur de Créatix 3D, pour

leurs contributions sur le thème « Transformer son business

model : rôle et impact de l’innovation dans les services ».

Ainsi que Sophie Jacolin, www.voyelles.net, pour sa collaboration

à ce cahier.

Ce cahier est issu de la série « les Portes de l’Innovation ».

Sous la direction de Prof. Xavier Pavie

Professeur à l’ESSEC Business School, Xavier Pavie est directeur de

l’ISIS (Institute for Strategic Innovation and Services) et chercheur

associé à l’IREPH (Institut de recherches philosophiques) –

Université Paris Ouest.

Il a passé près d’une quinzaine d’années dans des entreprises de

premier plan en tant que marketing manager et directeur marketing

(Nestlé, Unilever, Club Méditerranée). Directeur pédagogique de

plusieurs programmes (notamment de l’Imagination Week qu’il

a créée pour les 600 étudiants de Master), ses enseignements

s’articulent autour du marketing et du management des services,

ainsi que de l’innovation dans les services.

Depuis 2011, il est en charge de définir l’innovation-responsable avec

l’appui d’un réseau d’universités internationales au sein d’un projet

soutenu par la Commission européenne. En 2014, il est nommé

président de la commission d’évaluation « Innovation-régulation-

gouvernance » de l’ANR (Agence nationale de la recherche) dans

le cadre « Horizon 2020 ».

Xavier Pavie a publié de nombreux articles et une douzaine

d’ouvrages à la fois en philosophie et en management notamment

autour de l’innovation-responsable, source d’innovations et de

performances.

Site internet : www.xavierpavie.com Twitter : @xavierpavie

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SOMMAIRE

INTRODUCTION ........................................................................................ 9

Avons-nous besoin d’une perceuse ou de faire des trous ? ............. 9

Enjeux d’une stratégie d’innovation dans le business model .......... 16

Les business models, de l’industrie aux services ................................... 19

DE lA POSSESSION À l’USAgE : UNE TRANSfORMATION EN

MARChE .................................................................................................... 21

Transformer son mix pour saisir le virage des services ...................... 21

Du hardware au software, une révolution de business model........21

Du véhicule au plaisir de conduire ........................................................... 28

De nouvelles opportunités d’usage et de service ...............................30

L’innovation dans l’expérience client, nouveau levier de création

de valeur ....................................................................................................................... 31

De l’amont à l’aval, réinventer l’expérience client .................................31

Miser sur la personnalisation ......................................................................... 36

REDÉfINIR UN MODÈlE D’ENTREPRISE fAVORABlE À

l’INNOVATION DE SERVICE ............................................................... 41

Un modèle d’entreprise globalement intégrée ........................................ 41

La dimension humaine de la transformation ........................................... 44

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INTRODUCTION

Avons-nous besoin d’une perceuse ou de faire des trous ?

Il suffit aujourd’hui à n’importe quel individu d’être équipé d’une imprimante 3D, qu’il aura acquise pour quelques centaines d’euros seulement, pour fabriquer une pièce de Lego dont il aura préléalablement téléchargé le plan gratuitement sur Internet. Des entreprises comme Lego ou Playmobil sont-elles menacées de disparition si elles ne prennent pas en compte le changement qui est en train de se produire, dans lequel les consommateurs deviennent capables d’élaborer un produit à leur place, et qui affecte leur business model ? « La production de figurines ou d’accessoires Playmobil à l’aide de l’impression 3D constituerait, sauf exception, une atteinte à nos droits », affirme le dirigeant de l’entreprise, tandis que celui de Lego explique : « Notre priorité est de permettre aux clients de distinguer l’original de la copie. » On peut comprendre cette réaction qui revendique la protection de la propriété intellectuelle. Mais on peut aussi s’étonner de cette position qui ne paraît pas accompagner la dynamique d’innovation, à l’heure où des vidéos apprenant à imprimer soi-même des pièces de Lego sont vues par des millions d’internautes. Ainsi se dégage un paradoxe entre l’innovation dont

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s’emparent les clients – en l’occurrence, en fabriquant eux-mêmes des pièces de jeu – et le cadre légal, cette innovation représentant une concurrence qui outrepasse les lois de la propriété intellectuelle et nuit ce faisant à l’entreprise. À cet égard, la réaction défensive de Lego ou Playmobil face au changement de comportement des consommateurs peut sembler quelque peu suicidaire. Cela, d’autant que de simples citoyens sont aujourd’hui en mesure de proposer des offres qui dépassent celles de marques, qui font mieux qu’elles et sont davantage susceptibles de satisfaire les consommateurs. Ainsi, un Américain et son fils ont développé un kit universel de jeux de construction, téléchargeable gratuitement en ligne, qui permet d’assembler des pièces de toutes les gammes disponibles sur le marché (Lego, Duplo, Playmobil…). C’est prendre le dessus sur les entreprises traditionnelles, en tirant parti des nouvelles ressources créatives telles que l’impression 3D pour proposer des solutions réellement innovantes.

Lego réfléchit cependant à la solution de l’impression 3D et aux changements de business model pouvant en découler. Car, que vend-il en définitive : un morceau de plastique, une expérience ou une licence (Harry Potter, Star Wars…) ? Que recherchent en définitive les consommateurs lorsqu’ils acquièrent une pièce de Lego : un produit matériel ou plutôt une expérience ludique, un moment de détente et d’évasion ? De la

réponse découle la finalité que doit viser l’entreprise, en d’autres termes sa mission stratégique. Et peut-être cette finalité diffère-t-elle de la visée que la firme mettait initialement en avant – la fourniture d’un bien –, et l’oblige-t-elle à bouleverser son business model. « Les individus ne veulent pas une perceuse, ils veulent faire des trous », affirmait Theodore Levitt. Cette assertion a marqué le début de la compréhension du changement de paradigme que nous venons de décrire, c’est-à-dire du passage de la vente d’un produit à la commercialisation de possibilités permises par ledit produit, résidant dans un service ou une expérience. Ainsi, les clients ne veulent pas d’ordinateur, mais des solutions pour résoudre leurs problématiques ; ils ne veulent pas prendre le train, mais avoir une solution pour se rendre d’un endroit à un autre ; ils ne veulent pas des médicaments, mais être soignés ; ils ne désirent pas posséder des lecteurs MP3, mais accéder à de la musique. À son lancement, une publicité pour l’iPod a été diffusée quelques jours seulement aux États-Unis, mettant en scène un jeune homme basculant instantanément d’une chanson à l’autre sur son lecteur. Steve Jobs l’a très vite retirée des écrans, constatant qu’elle ne traduisait pas l’intention de la marque, laquelle était non pas de vendre un produit, un iPod, mais un service permettant d’accéder de façon presque illimitée et en toutes circonstances à la musique, c’est-à-dire l’application iTunes. Ainsi, avec le slogan T

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« 1 000 chansons dans votre poche », elle mettait en avant les caractéristiques du produit et non les possibilités auxquelles il permettait d’accéder. Il ne restait plus à un concurrent qu’à proposer un appareil ayant la capacité de contenir 2 000 chansons, de surcroît à un prix moindre… Or, comme l’affirmait Steve Jobs, l’iPod n’était qu’un simple accessoire. Ce qui importait avant tout était la plateforme iTunes, le service offert par ce produit. Le produit devait être au service du service, et à l’avenir, annonçait-il, le business model d’Apple devait reposer sur le service, c’est-à-dire le contenu, les applications. D’où la nouvelle publicité qui a été élaborée, qui mettait en avant la musique et l’expérience, en faisant de manière explicite la promotion de l’iTunes « vendu » en même temps que l’iPod, et de son utilisation possible sur des systèmes d’exploitation différents du Mac (par exemple Windows), et donc de l’universalité du service pour tout utilisateur. Peut-être demain cette expérience pourrait-elle passer par un autre support : un téléphone (l’iPhone), une feuille interactive (l’iPad). D’ailleurs, le chiffre d’affaires des ventes d’iTunes est désormais supérieur à celui des ventes d’iPod, sachant qu’aujourd’hui l’Apple Store représente 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires. Le contenu est devenu le plus important dans le business model. Steve Jobs a transformé le business model des lecteurs MP3 à travers la pensée du service.

Cette problématique de servicization, de l’usage a été explorée dès le début des années 1980, quand Xerox a élaboré un nouveau mode de commercialisation de ses solutions. Cette entreprise, alors hautement innovante et performante dans son domaine, voyait un nombre croissant de concurrents envahir le marché (Canon, HP…) sans avoir besoin de déployer autant de moyens de R&D qu’elle n’avait dû le faire. Or, il va sans dire que lorsqu’une entreprise dépense moins qu’une autre en R&D, elle répercute ce gain sur le prix en vendant son produit moins cher que les concurrents ayant dû, pour leur part, engager préalablement des investissements de recherche. Une guerre des prix s’était de fait déclenchée, dont Xerox aurait dû en toute logique être le perdant en tant qu’innovateur pionnier, devant amortir ses coûts de R&D. C’est alors que Xerox décide de repenser son business model : il a cessé de commercialiser des photocopieurs pour vendre une solution – de la photocopie. En effet, les organisations n’ont pas besoin de photocopieurs, mais de photocopier. Aujourd’hui encore, Xerox continue à développer son organisation selon cette logique, autour de Xerox Global Services, et gère ainsi l’ensemble de la relation client avec notamment des solutions de digitalisation des documents. General Electric s’est inscrit dans une dynamique similaire, lui qui développe, notamment dans sa division médicale, des produits extrêmement coûteux (IRM, scanners...). Or, les zones où l’essor économique de la santé est

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le plus important – les pays émergents – disposent d’une faible capacité d’investissement, y compris dans leurs organisations médicales. Dès lors, General Electric a choisi de mettre à la disposition des établissements de santé des équipements dont ils ne paient que l’utilisation. Dans ce système de « banque interne », les différentes organisations reçoivent les appareils, mais ne s’acquittent donc que de leur utilisation. Dans cette stratégie dite « think global, act local », le revenu est donc généré par un modèle de « coût à l’utilisation ». Le groupe gère entièrement le portefeuille de services (IT, opérations de gestion, opérations financières). Plus encore, il innove sur les produits, en proposant, en Inde par exemple, des appareils portatifs permettant de réaliser des échographies.

En se lançant dans le service, une entreprise pourrait avoir la tentation de se dégager du produit. Citons à cet égard les exemples de Nokia, lequel est passé de la production industrielle aux services télécoms, ou de Nike, opérant un glissement de la production d’articles de sport aux objets connectés. Au contraire, l’exemple de Xerox révèle que c’est parce qu’on se focalise sur le service que le produit et la R&D gagnent en importance. Cependant, ce que l’on vend n’est plus le produit lui-même. Celui-ci se met, en quelque sorte, « au service du service ». Le Lego est au service d’une expérience ludique, tout comme

le scanner proposé par General Electric Healthcare est au service du soin médical et donc d’une solution médicale, et tout comme un photocopieur est au service d’une solution de photocopie.

Cette transformation de business model a progressivement tendu à s’imposer. Aussi SAP a-t-il commercialisé directement non pas des logiciels mais des solutions d’ERP. Messier-Bugatti-Dowty (appartenant aujourd’hui au groupe Safran), qui peinait à convaincre les avionneurs de se saisir de l’innovation que représentaient les freins carbone, est parvenu à entrer sur ce marché au milieu des années 1980 en décidant de ne pas vendre ces freins, mais de les mettre à la disposition des entreprises et de ne les faire payer qu’à l’utilisation. L’exemple de Michelin est également célèbre, lui qui prend désormais en charge la gestion de la flotte de pneus de ses clients et en assure le suivi, la maintenance ainsi que le remplacement quand nécessaire, tout en ne refacturant que les kilomètres réalisés. Cette nouvelle dimension modifie la donne vis-à-vis de ses concurrents.

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Enjeux d’une stratégie d’innovation dans le business model

Dans un environnement où les produits concurrents sont très proches les uns des autres, voire complètement similaires et ne se distinguent que par leur marque, l’intensité concurrentielle s’élève et la guerre des prix devient inévitable. Cette configuration ne joue pas en faveur des organisations extrêmement innovantes, lesquelles sont pénalisées par leurs investissements de R&D et leur processus d’organisation interne, qui deviennent très coûteux. Celles-ci peuvent alors opérer un changement de stratégie par le choix d’une diversification ou d’une croissance externe (fusion avec d’autres entreprises

plus petites en taille) ou choisir de transformer leur business model, de modifier leur façon d’être.

Cela demande de prendre en compte un certain nombre de déterminants. Il faut tout d’abord capitaliser sur la marque et la manière dont elle crée une différenciation dans l’esprit du consommateur : c’est parce que la marque est forte que les consommateurs croiront dans sa capacité à proposer et à assurer des services. Si demain une entreprise d’une marque inconnue commercialise l’équivalent d’un Lego, son offre n’aura évidemment pas le même poids que celle de la firme danoise. Il faut ensuite maîtriser les nouveaux enjeux financiers en matière

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de rapport Capex/Opex, c’est-à-dire de rapport entre les dépenses d’investissement et les dépenses d’exploitation : comment le cash permet-il de basculer d’un modèle à l’autre ? Gardons néanmoins à l’esprit que si les entreprises en arrivent là, c’est aussi parce qu’elles n’ont pas d’autre alternative. À cela s’ajoute un enjeu de ressources humaines car, outre le business model, les collaborateurs devront eux aussi mettre en œuvre la transformation. Des enjeux de R&D se présentent également, pour rester à la pointe de l’innovation et continuer à se différencier. Citons en outre les enjeux d’organisation et de management des services, et en corollaire de redéfinition de la relation client et de la qualité de service. Depuis les années 1980 et plus encore depuis les années 2000, ces éléments imprègnent et modifient profondément notre façon de penser la transformation des organisations.

les business models, de l’industrie aux services

Au vu de l’ensemble des paramètres que nous venons d’évoquer, le changement de paradigme entre un business model industriel focalisé uniquement sur la vente de produits et un business model intégrant une logique de services peut être schématisé de la façon suivante.

Parmi les principales différences entre les deux modèles, notons que dans le business model intégrant une logique de services, le client est considéré comme une ressource à part entière. Les ressources dépassent

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donc le cadre de l’entreprise, et le business model implique une mise en commun de ces ressources pour créer conjointement de la valeur. En d’autres termes, « le produit est au service du service » et le service se réfère directement au client, celui-ci participant indirectement par ses attentes à la création de l’offre de l’entreprise. C’est un retournement complet par rapport à la logique antérieure, dans laquelle le client était une cible extérieure qui se voyait adresser un produit.

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DE lA POSSESSION À l’USAgE : UNE TRANSfORMATION EN MARChE

L’évolution des comportements des consommateurs, moins attachés à la possession de biens qu’à l’accès à des solutions flexibles et personnalisées mêlant des produits et des services, oblige les entreprises à revoir la composition de leur offre, à réinventer leur relation client et à trouver de nouveaux leviers de croissance.

Transformer son mix pour saisir le virage des services

Du hardware au software, une révolution de business model

Pour illustrer la dynamique de réinvention du business model fondée sur l’innovation de service, l’expérience d’IBM est particulièrement emblématique : en effet, de cette transformation dépendait la survie du groupe. C’est en réponse aux demandes (pour ne pas dire aux critiques) de ses clients qu’IBM a opéré une transformation radicale de son mix, passant du hardware à des solutions combinant software et services. Cela s’est accompagné de l’élaboration d’un modèle vertueux de réinvestissement permanent dans l’innovation.

Le secteur d’activité d’IBM est éminemment exigeant, soumis à une attente d’innovation élevée et à une concurrence forcenée – au point que le groupe a

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failli disparaître dans les années 1990. Les éléments majeurs ayant joué dans la réinvention d’IBM au cours des décennies passées tiennent à son business model, à son innovation et à sa dimension humaine. Inutile de préciser que pour un groupe d’une telle taille (440 000 employés dans le monde), la question de la transformation se pose de façon aiguë : il faut faire preuve d’agilité. L’innovation, par ailleurs, constitue un pilier de l’organisation. Le modèle financier d’IBM permet de financer la croissance et l’innovation, et ce faisant d’investir dans l’avenir. Ainsi, le groupe consacre chaque année 6 milliards de dollars à la recherche. Il a déposé 50 000 brevets ces vingt dernières années, et c’est depuis vingt et un ans l’entreprise qui en dépose le plus dans le monde. Cet investissement dans l’innovation et dans l’avenir est absolument fondamental. Tout l’enjeu est de le financer et d’en tirer parti le plus efficacement possible.

À la faveur d’une étude qu’il a menée il y a quelques années auprès de 4 000 dirigeants dans le monde, IBM a identifié que leur préoccupation était d’innover dans le business model, plus encore que dans les produits. À cet égard, le groupe identifie trois modèles principaux d’innovation. Il s’agit en premier lieu d’innover dans le secteur d’activité, en changeant le mode de fonctionnement de celui-ci. Cela passe par la redéfinition des activités existantes, l’évolution vers d’autres domaines et même la création de nouveaux

secteurs. Il s’agit en second lieu d’innover dans les modèles de revenus, de retravailler le mix produits-services-valeurs et d’élaborer de nouvelles structures tarifaires, pour trouver une nouvelle forme de valeur et de différenciation. La troisième voie, enfin, consiste à innover dans l’organisation de l’entreprise et dans sa chaîne de valeur : quelles activités doivent être maintenues en interne ou réinternalisées ; lesquelles doivent être externalisées et via quel type de collaboration ?

Dans les années 1990, IBM réalisait 80 % de son chiffre d’affaires dans le hardware et 20 % dans les logiciels et services. C’était donc fondamentalement une société qui commercialisait des produits, lesquels étaient T

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assortis de logiciels. Or, il est apparu que ses clients demandaient avant tout des solutions, c’est-à-dire une combinaison de software et de services. Il est donc allé à la recherche d’autres business models autour du software, sachant que le service n’est pas, par nature, hautement générateur de profit. Aujourd’hui, IBM tire plus de la moitié de son chiffre d’affaires des services, et les trois quarts de l’approche par les solutions (services et logiciels). De fait, il s’est orienté vers un modèle où la moitié de son profit provient du software. Il reste présent dans le matériel, mais s’est détaché de la dépendance envers les produits qui le caractérisait auparavant. Il réinjecte dans des domaines de croissance 60 % des économies qu’il réalise, pour entretenir un cercle vertueux d’innovation.

Si IBM a rencontré de si grandes difficultés dans les années 1990, c’est qu’il s’était éloigné des clients. Parmi d’autres carences, son portefeuille n’était pas suffisamment clair, et il restait essentiellement concentré sur les produits. En outre, le groupe ne tirait pas parti de sa dimension internationale, alors que les clients attendaient qu’IBM puisse les accompagner dans leur développement mondial. Il était donc nécessaire de se transformer. L’impulsion a été donnée à l’occasion de l’arrivée, pour la première fois, d’un client à la tête d’IBM, Lou Gerstner.

La vraie révolution dans le business model est passée par l’acquisition d’actifs et de savoir-faire permettant au groupe d’être pertinent dans le domaine des solutions et dans son innovation. Les développer en interne aurait demandé un temps trop important. De fait, IBM a acquis pas moins de 150 entreprises, pour un montant de 42 milliards de dollars. Il a cédé en parallèle certaines de ses activités, pour l’équivalent de 15 milliards de dollars de chiffre d’affaires : PC, serveurs de faible puissance, terminaux en point de vente, etc. Bien qu’elles fussent profitables, elles relevaient des commodités et revêtaient une faible valeur du point de vue des clients.

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Dès lors, le groupe s’est exclusivement concentré sur les activités présentant des enjeux de valeur aux yeux de ses consommateurs : les solutions. Un travail d’analyse portant sur les axes de différenciation et les marchés de demain a fait ressortir le domaine dit du « CAMS2 » : Cloud, Analytics, Mobile, Social business, Security. IBM a complété son portefeuille en rachetant des sociétés dans ces domaines. Mais comment intégrer des sociétés aussi variées, allant de grandes organisations à des start-ups ? C’était un enjeu non négligeable en termes de transformation. Dans ce contexte, il fallait se garder avant tout de dévaloriser l’actif acquis, et accompagner l’intégration de son personnel pour qu’il puisse s’épanouir dans

sa nouvelle organisation. Pour certaines acquisitions, de la société Softlayer par exemple, dont le modèle est radicalement différent de celui d’IBM, il a d’ailleurs été décidé de ne pas procéder immédiatement à l’intégration dans le groupe.

Un autre gisement de croissance résidait dans les pays émergents. Ce fut une révolution pour IBM que d’ouvrir son spectre d’action au-delà des États-Unis. À titre d’illustration, il a créé 144 filiales en 2012 dans des pays dont l’économie était en phase d’essor. Le groupe s’est aussi attaché à répartir ses laboratoires et ses centres de recherche sur le globe, du Kenya au Brésil. Cette croissance représente aujourd’hui 22 % de son chiffre d’affaires, et l’ambition est de la porter à 30 %.

Ces dix dernières années ont été fondamentales pour asseoir un modèle financier robuste et profitable, offrant une capacité à investir. Pour autant, souligne Béatrice Kosowski, Managing Director d’IBM, le modèle reste très fragile, tant les enjeux financiers sont considérables et tant les erreurs peuvent coûter cher. Les nouveaux domaines du CAMS2 offrent certes des perspectives (IBM y affiche une croissance trois fois supérieure à celle du marché), mais l’IT traditionnel décroît pour sa part de 8 %. Il faut donc réajuster en permanence le dispositif, pour assurer la solidité du nouveau business model et être en capacité d’innover.

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Du véhicule au plaisir de conduire

L’évolution de la demande (et, partant, du business model) que nous venons de retracer pour IBM, passant du matériel aux solutions, le constructeur automobile BMW en fait également l’expérience. Là encore, l’innovation de service réside au cœur des problématiques. Elle accompagne la mutation du produit vers l’usage. C’est ainsi grâce à de multiples services avancés que l’industriel s’attache à accroître le plaisir de la conduite chez ses clients. Mentionnons à titre d’exemple le GPS tête haute qui permet de visualiser en hologramme, sur le pare-brise, l’ensemble des informations du GPS, ou encore le « service concierge » intégré aux véhicules qui permet d’obtenir une adresse (un hôtel, une place de parking, une station essence…), laquelle est directement envoyée au GPS. À partir de son iPhone, le conducteur peut également ouvrir et fermer sa voiture, ou encore en programmer sa climatisation à l’avance. Autre illustration parmi d’autres, la caméra de recul à 360° est de série, offrant une vue du ciel du véhicule.

Mais la réflexion ne s’arrête pas là. Toujours dans une optique de service, BMW travaille sur des solutions plus globales de mobilité, dont certaines mêmes ne reposent pas sur l’usage exclusif de la voiture. À moyenne échéance, explique Pierre Jalady, directeur marketing de BMW France, le groupe réfléchit, par exemple, à des véhicules qui seront capables de suggérer au voyageur, pour un trajet donné, de privilégier un autre mode de déplacement compte tenu du trafic ou des conditions météorologiques. IBM ne peut pas non plus rester indifférent à l’appétence croissante des consommateurs pour la location et le partage de véhicules. Il a consacré une de ses filiales, Alphabet, à des solutions de sharing.

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Celles-ci permettent, par exemple, d’utiliser une voiture électrique les jours de semaine et un véhicule thermique ou cabriolet le week-end. Cette activité se développe extrêmement vite, car elle répond à un désir de flexibilité accru de la part des conducteurs. Grâce à des forfaits, BMW tente ainsi de réconcilier la disponibilité totale offerte par la possession et la flexibilité offerte par la location.

De nouvelles opportunités d’usage et de service

Nous avons vu en introduction combien l’innovation que représente l’impression 3D était susceptible de transformer les business models. Au-delà de la solution technique, ce bouleversement se traduit en termes de redéfinition et des usages et de services. Le recours à l’impression 3D permet ainsi à certaines entreprises d’offrir un service plus réactif ou de revoir leur spectre d’activités. Disney s’en est par exemple saisi pour assurer une continuité de service dans ses parcs d’attractions aux États-Unis. Car sur un manège, dès l’instant où un capteur est endommagé, l’équipement tout entier doit être arrêté. L’entreprise recourt désormais à une solution d’impression 3D pour produire très rapidement des carters de protection de rechange, et réduire autant que possible le temps d’immobilisation des manèges. Dans un autre domaine, un fabricant d’appareils de motoculture envisage de mettre à disposition de ses concessionnaires une imprimante 3D professionnelle

afin de produire des pièces de rechange, dont ils auront acheté les fichiers. Cela impliquera une réduction des stocks ainsi qu’une suppression de la logistique et du transport. En termes de business model, les enjeux en sont donc potentiellement gigantesques.

l’innovation dans l’expérience client, nouveau levier de création de valeur

En toute logique, l’innovation de business model par le service, laquelle répond à des nouvelles attentes des consommateurs, impose à l’entreprise de réinventer, parallèlement à son offre, sa relation avec le client et l’expérience qu’elle lui propose de vivre. C’est même une nouvelle source de création de valeur qui s’offre à elle.

De l’amont à l’aval, réinventer l’expérience client

BMW s’est ainsi saisi de l’évolution des comportements de ses clients pour transformer son canal de distribution et réinventer sa relation client. En quoi les évolutions du marché obligeaient-elles le constructeur à repenser sa stratégie de vente ? Plusieurs chiffres témoignent de l’ampleur des mutations en cours. Ainsi, entre 2003 et 2013, le nombre de visites dans les concessions automobiles avant l’achat est passé de 4 à 1,4. Par ailleurs, 92 % des achats sont désormais précédés par une recherche en ligne,

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contre 1 % seulement en 2003. L’automobile est l’un des marchés où Internet a l’impact le plus puissant en matière de recommandation. Les consommateurs sont 42 % à manifester un intérêt pour l’achat d’une voiture en ligne, surtout en entrée de gamme, alors que cette pratique paraissait presque inconcevable en 2003. C’est le signe que la voiture devient de plus en plus une commodité. Autre nouveauté, 56 % des consommateurs pourraient acheter des pièces de rechange sur Internet.

En amont du tunnel d’achat, la recherche sur Internet devenant une étape clé, la marque doit s’efforcer d’y être visible et d’y dispenser une information claire et simple, d’autant plus que la gamme s’est diversifiée. Elle doit aussi prendre en compte la multiplication

des sources d’information : comparateurs, blogs, forums et réseaux sociaux. En aval, le lieu physique reste capital dans l’acte d’achat. C’est là que se joue en grande partie la relation. À cet égard, BMW a lancé deux innovations dans l’expérience client et prospect. L’une, le Brand Store, enrichit le volet émotionnel de la marque, tandis que l’autre, BMW Genius, enrichit son volet rationnel.

Le Brand Store du 38, avenue George-V à Paris, ouvert en 2012, se veut ainsi un lieu de rayonnement de BMW. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, toute possibilité de vente en a été retirée. C’est un espace entièrement dédié à l’expérience de marque,

Lieu de rencontre entre nos prospects et clients de la marque BMWSur des dimensions connexes à la marque (innovation, design, héritage, performance...)Pas de vente de voiture possible

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qui en décline les univers au regard de l’innovation, du design, de l’histoire, de la performance… Le musicien Kavinsky y a donné un concert pour la Fête de la musique, le chef Yannick Alléno y a cuisiné, une chasse aux œufs a été organisée pour les enfants…

Hier, les concessions étaient des lieux dédiés à la vente, où les prospects se rendaient plusieurs fois pour poser des questions à un vendeur, avant de prendre leur décision d’achat. Aujourd’hui, quand un client se rend dans une concession, il a une idée extrêmement précise du produit dont il a besoin, a recueilli moult informations sur Internet et a déjà comparé les prix. D’où la création du BMW Genius où, à l’instar du

Genius Bar d’Apple ou des conseillers techniques de la Fnac, des collaborateurs ont pour rôle de conseiller le client sur des aspects techniques, mais sans avoir la possibilité de vendre un véhicule. Les conseillers BMW Genius, identifiés par leur habit, répondent à toutes les questions relatives à la motorisation, aux types de modèles ou encore aux services embarqués, pour présenter l’univers BMW. Leur indicateur de performance n’est en aucun cas la vente, mais la satisfaction des prospects et des clients. Celle-ci est mesurée au moins six fois par an au travers de vagues d’enquêtes-mystère. Il s’avère qu’un prospect ou client qui s’est entretenu avec un BMW Genius achète une voiture mieux équipée et généralement plus haut de gamme qu’il ne l’envisageait initialement. Le conseil et le service assurent donc une montée en gamme des clients, ce qui a un impact notoire sur le business.

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Ces innovations contribuent à transformer la vente en une expérience client. L’acte d’achat devient alors une conséquence de la relation que l’entreprise a su gérer de l’amont (via le digital) à l’aval (sur le lieu de vente).

Miser sur la personnalisation

Comme en témoigne l’essor du Big Data, la personnalisation toujours plus poussée de l’offre réside au cœur des enjeux de business des entreprises. Si elle est en ordre de marche pour les messages qui portent la stratégie marketing, qu’en est-il pour les produits, soumis qu’ils sont aux contraintes d’une production de masse ? L’impression 3D permet, dans certains contextes, d’apporter des réponses dans ce domaine. Cette solution est en effet particulièrement adaptée

et rentable lorsqu’il s’agit de produire des pièces personnalisées. C’est une voie de différenciation sans pareille.

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Ces innovations contribuent à transformer la vente en une expérience client. L’acte d’achat devient alors une conséquence de la relation que l’entreprise a su gérer de l’amont (via le digital) à l’aval (sur le lieu de vente).

Miser sur la personnalisation

Comme en témoigne l’essor du Big Data, la personnalisation toujours plus poussée de l’offre réside au cœur des enjeux de business des entreprises. Si elle est en ordre de marche pour les messages qui portent la stratégie marketing, qu’en est-il pour les produits, soumis qu’ils sont aux contraintes d’une production de masse ? L’impression 3D permet, dans certains contextes, d’apporter des réponses dans ce domaine. Cette solution est en effet particulièrement adaptée et rentable lorsqu’il s’agit de produire des pièces personnalisées. C’est une voie de différenciation sans pareille.

Quelques exemples :

Le luxe est ainsi l’un des premiers secteurs à s’être équipés d’imprimantes 3D, par souci de réaliser des pièces quasiment uniques, sortant de l’ordinaire. Tous les joailliers de la place Vendôme en sont équipés, assure Sébastien Vercruysse, directeur de Créatix 3D, cela non pas pour réaliser des bijoux, mais pour imprimer des pièces en cire de fonderie, en vue d’une fabrication en or ou en argent à cire perdue. Dans un domaine bien différent, citons l’exemple de cette société produisant du mobilier d’éclairage public et

- Une personne en concession passionnée de produit

- Conseille sur les voitures, les technologies.

- Objectif de satisfaction

- Mobile en concession sur Ipad

- Pas d'objectif de vente

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Au stade de la vente, une solution d’impression 3D peut apporter le petit « plus » qui permet de remporter une commande. Par exemple, un constructeur de maison individuelle peut remettre à

Augmenter le CA

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Au stade de la vente, une solution d’impression 3D peut apporter le petit « plus » qui permet de remporter une commande. Par exemple, un constructeur de maison individuelle peut remettre à

Augmenter le CA

Au stade de la vente, une solution d’impression 3D peut apporter le petit « plus » qui permet de remporter une commande. Par exemple, un constructeur de maison individuelle peut remettre à un prospect la maquette de sa future maison en 3D. Cela ne lui coûtera guère plus de 200 euros, et constituera un atout pour accroître le taux de transformation des devis.

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qui, confrontée à la concurrence des pays asiatiques, souhaitait proposer des équipements personnalisés figurant en relief les armes de la ville. Elle s’est équipée d’une solution de fabrication additive, en impression 3D, pour réaliser en petite série des pièces devenues de fait extrêmement difficiles à copier. La grande consommation n’est pas en reste. L’Oréal ou la marque Air Wick, parmi d’autres, utilisent des imprimantes 3D pour réaliser des prototypes de packaging. Chez Decathlon, tous les prototypes sont produits en impression 3D par les équipes de R&D. De nombreuses applications de cette solution sont également possibles en matière d’objets publicitaires personnalisés et de publicité sur le lieu de vente : présentoirs, gadgets à l’effigie d’une marque…

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Le luxe est ainsi l’un des premiers secteurs à s’être équipés d’imprimantes 3D, par souci de réaliser des pièces quasiment uniques, sortant de l’ordinaire. Tous les joailliers de la place Vendôme en sont équipés, assure Sébastien Vercruysse, directeur de Créatix 3D, cela non pas pour réaliser des bijoux, mais pour imprimer des pièces en cire de fonderie, en vue d’une fabrication en or ou en argent à cire perdue. Dans un domaine bien différent, citons l’exemple de cette société produisant du mobilier d’éclairage public et qui, confrontée à la concurrence des pays asiatiques, souhaitait proposer des équipements personnalisés figurant en relief les armes de la ville. Elle s’est équipée d’une solution de fabrication additive, en impression 3D, pour réaliser en petite série des pièces devenues de fait extrêmement difficiles à copier. La grande consommation n’est pas en reste. L’Oréal ou la marque Air Wick, parmi d’autres, utilisent des imprimantes 3D pour réaliser des prototypes de packaging. Chez Decathlon, tous les prototypes sont produits en impression 3D par les équipes de R&D. De nombreuses applications de cette solution sont également possibles en matière d’objets publicitaires personnalisés et de publicité sur le lieu de vente : présentoirs, gadgets à l’effigie d’une marque…

L’impression 3D est par ailleurs extrêmement utile pour produire des formes complexes. Le secteur médical y recourt en particulier pour fabriquer des prothèses précisément adaptées à l’organe qui les accueillera ou au membre amputé.

L’impression 3D est par ailleurs extrêmement utile pour produire des formes complexes. Le secteur médical y recourt en particulier pour fabriquer des prothèses précisément adaptées à l’organe qui les accueillera ou au membre amputé.

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REDÉfINIR UN MODÈlE D’ENTREPRISE fAVORABlE À l’INNOVATION DE SERVICE

Un modèle d’entreprise globalement intégrée

La transformation du business model par les services implique une réorganisation globale de l’entreprise : il faut acquérir de nouvelles compétences, développer de nouveaux modes de collaboration, apprendre à échanger avec de nouveaux profils de clients… C’est alors l’organisation dans son ensemble qui est invitée à se réinventer.

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REDÉFINIR UN MODÈLE D’ENTREPRISE FAVORABLE À L’INNOVATION DE SERVICE

Un modèle d’entreprise globalement intégrée

La transformation du business model par les services implique une réorganisation globale de l’entreprise : il faut acquérir de nouvelles compétences, développer de nouveaux modes de collaboration, apprendre à échanger avec de nouveaux profils de clients… C’est alors l’organisation dans son ensemble qui est invitée à se réinventer.

Pour IBM, cette transformation s’est traduite par la mise en place d’un modèle d’entreprise globalement intégrée, venant soutenir la logique de service et pallier les carences dont le groupe péchait précédemment. Au titre de celles-ci figuraient les « baronnies » qui s’étaient constituées au cours des années 1990 dans les pays – voire les régions – où le groupe était présent. Ce modèle s’avérait non seulement inefficace, mais encore contraire aux attentes des clients. En conséquence, IBM s’est orienté vers une organisation intégrée dans laquelle les processus et les opérations ont été harmonisés, et qui s’appuie sur des centres de services partagés à travers le monde. Cette entreprise intégrée affiche désormais une identité globale, à la différence du modèle précédent qui se structurait autour du siège à New York et des filiales dans les pays.

Pour IBM, cette transformation s’est traduite par la mise en place d’un modèle d’entreprise globalement T

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intégrée, venant soutenir la logique de service et pallier les carences dont le groupe souffrait précédemment. Au titre de celles-ci figuraient les « baronnies » qui s’étaient constituées au cours des années 1990 dans les pays – voire les régions – où le groupe était présent. Ce modèle s’avérait non seulement inefficace, mais encore contraire aux attentes des clients. En conséquence, IBM s’est orienté vers une organisation intégrée dans laquelle les processus et les opérations ont été harmonisés, et qui s’appuie sur des centres de services partagés à travers le monde. Cette entreprise intégrée affiche désormais une identité globale, à la différence du modèle précédent qui se structurait autour du siège à New York et des filiales dans les pays.

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Dans cette entreprise globalement intégrée, la notion de domaine d’expertise se substitue à celle de zone géographique. Certes, des centres d’excellence ont été constitués en certains endroits, pour des questions de coût, en Inde pour People Soft par exemple, mais ils se caractérisent aujourd’hui par leur technicité avancée. Ainsi, les gisements de valeur se créent au bon endroit, là où se trouvent les ressources les plus pertinentes.

Quittant un fonctionnement en silos, l’entreprise s’ouvre en outre à la collaboration. Elle doit trouver des alliés et définir des modes d’alliance ou d’externalisation optimisés. IBM a, par exemple, pris la décision majeure d’externaliser sa supply chain auprès de Geodis.

Nous avons vu comment IBM allait chercher des zones de croissance pour nourrir le cercle vertueux de l’innovation. Dans ce modèle d’entreprise, la quête de la productivité est fondamentale. Il n’est pas question d’acquérir des sociétés et de se transformer sans travailler en parallèle sur les conditions globales de productivité. Cette seule politique a permis au groupe de dégager 6 milliards de dollars entre 2005 et 2010, et il en vise 8 milliards entre 2010 et 2015, dont 60 % seront réinvestis dans la croissance, les acquisitions et la recherche, et dont 40 % constitueront du profit. La logique de transformation est tellement intégrée par les collaborateurs que de nouveaux leviers de productivité et d’économie sont sans cesse dégagés. Pour ses propres fonctions informatiques par exemple, IBM a réduit le nombre de ses directeurs informatiques (de 128 à un seul !), de ses data centers et de ses applications (de 14 000 à 4 500). Le coût de sa fonction finance est passé de 3 à 1 % de son chiffre d’affaires. Grâce aux modèles d’analytics, les notes de frais sont validées de façon automatique à 90 %, et les risques financiers sont identifiés à neuf mois au lieu de six précédemment.

Dans cette entreprise globalement intégrée, la notion de domaine d’expertise se substitue à celle de zone géographique. Certes, des centres d’excellence ont été constitués en certains endroits, pour des questions de coût, en Inde pour People Soft par exemple, mais ils se caractérisent aujourd’hui par leur technicité avancée. Ainsi, les gisements de valeur se créent au bon endroit, là où se trouvent les ressources les plus pertinentes.

Quittant un fonctionnement en silos, l’entreprise s’ouvre en outre à la collaboration. Elle doit trouver des alliés et définir des modes d’alliance ou d’externalisation optimisés. IBM a, par exemple, pris la décision majeure d’externaliser sa supply chain auprès de Geodis.

Nous avons vu comment IBM allait chercher des zones de croissance pour nourrir le cercle vertueux de l’innovation. Dans ce modèle d’entreprise, la quête de la productivité est fondamentale. Il n’est pas question d’acquérir des sociétés et de se transformer sans travailler en parallèle sur les conditions globales de productivité. Cette seule politique a permis au groupe de dégager 6 milliards de dollars entre 2005 et 2010, et il en vise 8 milliards entre 2010 et 2015, dont 60 % seront réinvestis dans la croissance, les acquisitions et la recherche, et dont 40 % constitueront du profit. La logique de transformation est tellement intégrée T

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Comment intégrer la diversité des cultures, maîtriser de nouveaux métiers et apprendre aux équipes à travailler ensemble à travers le monde ? L’exercice est complexe. Ainsi, comment donner un sentiment d’appartenance aussi fort aux salariés qui travaillent chez IBM depuis trente ans et aux 140 000 employés en Inde, dont les trois quarts ont rejoint le groupe il y a moins de sept ans ?

Pour IBM, l’évolution du cœur de métier depuis le hardware vers les solutions a impliqué une transformation des compétences. À cet égard, le groupe a tout d’abord décidé de raisonner par secteur d’activité (banque, distribution, télécommunications, ferroviaire, etc.), pour mieux connaître les problématiques de ses clients et parler leur langage. Or, il faut du temps pour faire d’un expert Unix un expert de la maintenance prédictive sur les actifs ferroviaires à la SNCF, entre autres exemples. Cela demande un très important effort de réorientation, d’acquisition de savoirs et d’apprentissage sur le terrain. À cela s’ajoute l’acquisition de compétences relatives aux solutions proposées par le groupe. Aujourd’hui, IBM attend de ses collaborateurs qu’ils concilient, d’une part, une vision suffisamment transversale pour contextualiser les enjeux et, d’autre part, une véritable spécialité. Le groupe ne pourra pas survivre ni apporter de la valeur à ses clients sans une spécialisation approfondie. L’exercice étant

par les collaborateurs que de nouveaux leviers de productivité et d’économie sont sans cesse dégagés. Pour ses propres fonctions informatiques par exemple, IBM a réduit le nombre de ses directeurs informatiques (de 128 à un seul !), de ses data centers et de ses applications (de 14 000 à 4 500). Le coût de sa fonction finance est passé de 3 à 1 % de son chiffre d’affaires. Grâce aux modèles d’analytics, les notes de frais sont validées de façon automatique à 90 %, et les risques financiers sont identifiés à neuf mois au lieu de six précédemment.

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La dimension humaine de la transformation

Comment mobiliser, accompagner et stimuler les collaborateurs dans une logique de transformation ? Comment intégrer la diversité des cultures, maîtriser de nouveaux métiers et apprendre aux équipes à travailler ensemble à travers le monde ? L’exercice est complexe. Ainsi, comment donner un sentiment d’appartenance aussi fort aux salariés qui travaillent chez IBM depuis trente ans et aux 140 000 employés en Inde, dont les trois quarts ont rejoint le groupe il y a moins de sept ans ?

Pour IBM, l’évolution du cœur de métier depuis le hardware vers les solutions a impliqué une transformation des compétences. À cet égard, le groupe a tout d’abord décidé de raisonner par secteur d’activité (banque, distribution, télécommunications, ferroviaire, etc.), pour mieux connaître les problématiques de ses clients et parler leur langage. Or, il faut du temps pour faire d’un expert Unix un expert de la maintenance prédictive sur les actifs ferroviaires à la SNCF, entre autres exemples. Cela demande un très important effort de réorientation, d’acquisition de savoirs et d’apprentissage sur le terrain. À cela s’ajoute l’acquisition de compétences relatives aux solutions proposées par le groupe. Aujourd’hui, IBM attend de ses collaborateurs qu’ils concilient, d’une part, une vision suffisamment transversale pour contextualiser les enjeux et, d’autre part, une véritable spécialité. Le groupe ne pourra pas survivre ni apporter de la valeur à ses clients sans une spécialisation approfondie. L’exercice étant ardu, il est accompagné de façon soutenue par les programmes de formation. Les leaders doivent se montrer exemplaires dans ce processus : il est attendu d’eux des capacités d’adaptation, de créativité dans la résolution de problèmes et de collaboration – domaine dans lequel les besoins sont décuplés par rapport à hier. Ainsi, IBM compte 91 000 communautés, qui ont toutes leur légitimité et leur utilité. Ce

la dimension humaine de la transformation

Comment mobiliser, accompagner et stimuler les collaborateurs dans une logique de transformation ?

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C’est aussi à une transformation de l’intérieur que les organisations sont soumises lorsqu’elles intègrent les innovations et les possibilités de services rendues possibles par l’impression 3D. Sont particulièrement concernés les services commerciaux et de marketing, les bureaux d’études ainsi que les fonctions d’innovation, de conception et de fabrication.

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Pour BMW enfin, la professionnalisation induite par l’évolution du business model a porté sur la relation client. En effet, la montée en puissance du numérique impose, en regard, d’être plus performant sur le lieu physique et exemplaire dans la relation. Un client se rend moins souvent qu’autrefois en concession : lors de sa visite, il ne faut pas se tromper. Si hier les critères de vente étaient primordiaux dans la rémunération des commerciaux, les critères de service gagnent aujourd’hui en importance. Les fondamentaux du métier s’en trouvent redistribués.

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Ce n’est plus aujourd’hui l’entreprise qui apporte l’innovation à la société. C’est la société, à travers tous les moyens et techniques mis à sa disposition, qui invente des usages et guide cetteinnovation, que les entreprises doivent ensuite s’approprier. Par voie de conséquence, ces dernières sont soumises à une transformation permanente de leurs business models, de leur management, de leurs process, de leurs techniques et de leurs compétences, le tout sous l’égide du service. Une relation nouvelle s’instaure avec les clients, dont l’entreprise cherche à faciliter la vie et auxquels elle s’attache à proposer des services répondant au mieux à leurs besoins, plutôt qu’elle ne leur vend des produits. Dans ce nouvel écosystème, plus que jamais, l’adaptation et l’innovation sont les maîtres mots de la différenciation et de la compétitivité des entreprises, quitte à réinventer les modèles économiques sur lesquelles elles se sont bâties.

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Pour BMW enfin, la professionnalisation induite par l’évolution du business model a porté sur la relation client. En effet, la montée en puissance du numérique impose, en regard, d’être plus performant sur le lieu physique et exemplaire dans la relation. Un client se rend moins souvent qu’autrefois en concession : lors de sa visite, il ne faut pas se tromper. Si hier les critères de vente étaient primordiaux dans la rémunération des commerciaux, les critères de service gagnent

ardu, il est accompagné de façon soutenue par les programmes de formation. Les leaders doivent se montrer exemplaires dans ce processus : il est attendu d’eux des capacités d’adaptation, de créativité dans la résolution de problèmes et de collaboration – domaine dans lequel les besoins sont décuplés par rapport à hier. Ainsi, IBM compte 91 000 communautés, qui ont toutes leur légitimité et leur utilité. Ce sont autant de groupes de travail qui échangent, inventent ensemble, organisent des brainstormings, partagent l’information… Les collaborateurs IBM ont intégré la transformation comme un mode de fonctionnement normal. L’enjeu est de les préparer à affronter l’avenir.

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sont autant de groupes de travail qui échangent, inventent ensemble, organisent des brainstormings, partagent l’information… Les collaborateurs IBM ont intégré la transformation comme un mode de fonctionnement normal. L’enjeu est de les préparer à affronter l’avenir.

C’est aussi à une transformation de l’intérieur que les organisations sont soumises lorsqu’elles intègrent les innovations et les possibilités de services rendues possibles par l’impression 3D. Sont particulièrement concernés les services commerciaux et de marketing, les bureaux d’études ainsi que les fonctions d’innovation, de conception et de fabrication.

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aujourd’hui en importance. Les fondamentaux du métier s’en trouvent redistribués.

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Ce n’est plus aujourd’hui l’entreprise qui apporte l’innovation à la société. C’est la société, à travers tous les moyens et techniques mis à sa disposition, qui invente des usages et guide cetteinnovation, que les entreprises doivent ensuite s’approprier. Par voie de conséquence, ces dernières sont soumises à une transformation permanente de leurs business models, de leur management, de leurs process, de leurs techniques et de leurs compétences, le tout sous l’égide du service. Une relation nouvelle s’instaure avec les clients, dont l’entreprise cherche à faciliter la vie et auxquels elle s’attache à proposer des services répondant au mieux à leurs besoins, plutôt qu’elle ne leur vend des produits. Dans ce nouvel écosystème, plus que jamais, l’adaptation et l’innovation sont les maîtres mots de la différenciation et de la compétitivité des entreprises, quitte à réinventer les modèles économiques sur lesquels elles se sont bâties.